Marbrume


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 Ruse en préparation (Philippe)

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SatineRibaude
Satine



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MessageSujet: Ruse en préparation (Philippe)   Ruse en préparation (Philippe) EmptyVen 22 Avr 2016 - 0:04
Satine était partie à l'abri des regards indiscrets ce matin là. Il ne fallait pas qu'on la trouve en train de sortir de là déguisée en fille de service...
Elle marcha en baissant l'échine et évitant les regards des autres. En temps normal, elle aurait marché tête haute, fière de sa féminité et de sa capacité d'attirance. Mais à présent elle n'était qu'une servante. Aussi devait-elle agir comme telle. Elle ne pensait pas qu'elle aurait pu essuyer autant de propos orduriers. Comme quoi, une femme qui s'affirmait faisait nettement plus peur aux hommes qu'une frêle pépée sans défense et craintive...
Heureusement, le quartier des Temples arriva bien vite et déjà elle se sentit un peu plus en sécurité, malgré le climat de tension répandu par la fange Elle se présenta devant la demeure de Rikni, comme l'homme d'église le lui avait demandé. Elle avait trouvé de la poudre colorée et avait réussi à camoufler sa cicatrice à la perfection. Elle avait également recouvert sa chevelure de feu d'une coiffe blanche de servante et revêtu une robe très simple de tissus brun, la taille enserrée par un tablier amidonné. Elle était méconnaissable, personne sauf peut-être Bôdan n'aurait pu la reconnaître dans cette tenue.

Elle se présenta vers le temple de Rikni et demanda à voir Philippe. On l'emmena vers lui alors qu'il se préparait pour la messe. Lorsqu'ils furent seuls elle courba le torse en signe de respect puis tapota nerveusement son tablier. Elle n'avait vraiment pas l'habitude.

- J'espère que je suis assez crédible en servante... Je ne savais pas trop quoi choisir comme vêtements.

Elle remonta son visage vers le sien. Ses yeux pétillaient l'intelligence et l'envie de venir à bout de ces miliciens pourris.

- Bien. Que dois-je faire maintenant ? Enfin... Il faudrait que vous m'expliquiez brièvement ce que votre servante est sensée faire afin que je ne me trahisse pas.
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Philippe de Tourres
Philippe de Tourres



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MessageSujet: Re: Ruse en préparation (Philippe)   Ruse en préparation (Philippe) EmptyVen 22 Avr 2016 - 14:56
Gilles était tout content. Le prêtre ne savait pas encore pourquoi, mais il savait quand son diacre était tout content. Le vieux routier, vêtu de son long manteau troué en plusieurs endroits, cuirassé par du cuir, avait un large sourire de côté, près de son œil manquant, les mains croisées et postées juste devant son torse. Voilà maintenant 5 bonnes minutes qu'il attendait patiemment dans l'entrée de la pièce, juste entre deux alcôves en pierre, éclairé par quelques cierges postés un peu partout. Il était patient. Comme un chien....

Philippe s'habillait. Il se recouvrait d'une longue soutane blanche, avec une écharpe écarlate et dorée. Des vêtements étonnamment propres, et luxueux. Il fallait que le prêtre soit beau, lui qui était censé être le ministre des Dieux. Il faisait de légers gestes avec ses doigts, pour remettre en place les plis, et observa son livre de prières posé devant lui, sa bouche se mouvant alors qu'il récitait à voix basse certains passages de l’Écriture. Et pendant qu'il faisait ça, le vieux Gilles restait tout muet, tout silencieux, en arrière, avec son grand sourire. Oui, c'est un chien, un chien qui attend qu'on lui gratte derrière l'oreille.

Lentement, Philippe avait tourné son buste, observé le diacre avec un visage neutre, avant d'enfin élever la voix, qui fit écho dans les murs vides du sous-sol du Temple.

- Qu'est-ce que tu as à me dire, Gilles ?
- Le Räzell, j'l'ai suivi toute la nuit, padré.

Son sourire s'était élargi, pour montrer ses dents jaunes et rances. Avec une gestuelle de la main, le prêtre lui indiqua de parler, le temps qu'il termine de se vêtir. Tel un bon serviteur, le chien s'exécuta.

- Son père est malade ! Alité, fragile, il ne va plus travailler. Räzell s'fait du soucis pour son paternel. C'est que le garçon fait vivre le foyer, maintenant, avec sa solde de sergent.
- Il n'a pas démérité pour avoir sa position. Vincent est quelqu'un de très courageux. Malheureusement, il aime l'argent facile.
- Ouais, ouais...
'Fin bref. Le daron Räzell il est à l'article de la mort, v'voyez. Et maman Räzell aussi est affaiblie, même si elle peut encore tenir la boutique. C'est pas la joie là-bas.

- Je comprend.

Ce que Gilles voulait sous-entendre, mais qu'il n'oserait pas dire à voix haute, c'est que quelqu'un de désespéré est toujours plus ouvert aux clercs. Un moyen de s'approcher de lui, aisément. D'ailleurs, le diacre lui-même pouvait témoigner.
Philippe n'aimait pas Gilles. Enfin, si, il l'appréciait, c'était compliqué... Gilles avait vécu une vie violente. Routier, c'est pas un métier facile, et il avait confessé des pêchés par centaines au prêtre. Il avait bastonné des gens, il avait souvent brigandé, pointant un couteau sous la gorge de quelques passants pour récupérer une bourse. Lorsqu'il était dans une bande, il lui était souvent arrivé de piller des villages lorsqu'il ne recevait pas sa solde à temps. Et puis, à un moment, il s'était même mis à violer des gueuses, et à tuer deux, ou trois personnes lorsqu'il devait guerroyer. Il avait tout confessé, tout dit, les moindres de ses fautes, et en échange, il espérait bien être capable de s'agenouiller devant Anür libre comme un petit oiseau.
Sauf que voilà. Depuis l'arrivée du Fléau, Philippe l'avait mandé pour ce genre de travaux, franchement peu recommandables, tel que celui de suivre un homme toute la nuit et s'apercevoir qu'un bon père de famille allait peut-être rendre l'âme. C'est pour ça que, au fond de lui, Philippe craignait Gilles.

- C'est une boucherie, qu'ils tiennent, les Räzells ?
- Aye, sire.
- Oui, je suppose que c'est normal qu'ils ne s'en sortent pas...
- Ils vendent plus de bœuf et plus d'jambon. Mais ils vendent du poulet, souvent c'que des chasseurs ils trouvent dehors, du lapin et tout.

A nouveau, le prêtre se contenta d'agiter la tête. Il était prêt pour la messe, et quitta sa petite pièce en coupe-vent, son vêtement flottant juste derrière lui. Gilles, adossé au mur, l'observa du coin de l’œil. Il ne le collait jamais vraiment aux talons, gardant constamment une certaine distance entre lui et le religieux qu'il servait.
Ce fut à peu près à ce moment, alors que Philippe allait gagner son chaire, que la Satine leur était tombée dessus. Philippe s'était arrêté juste devant elle, avait relevé son buste et placé les mains dans son dos, l'écoutant silencieusement, les lèvres pincées. Gilles, lui, écoutait la conversation, juste derrière.

- Ne t'inquiète pas, ma fille. Tu es très bien.
Pour l'heure, contente-toi de rester avec mon diacre, et de chercher Vincent dans la foule. Essaye de lui parler après la messe, trouve un quelconque moyen pour lui parler, soit inventive.
Et encore merci d'être ici. C'est important pour Marbrume.


L'ayant assuré en posant une main sur l'épaule de la jeune femme, peut-être un peu condescendante, il était parti tout rapidement. C'est que le Temple de Marbrume, du moins la nef, était assez remplie. Les bancs étaient couverts de fidèles, tandis qu'on entendait quelques chants d'une chorale. Satine restait plantée là quelques secondes, quand le diacre en question, le vieux brigand, s'était approché avec un sourire graveleux.

- C'est toi la putain qui veut aider les ribaudes ? Le Philippe qu'il m'a dit que j'devais t'aider, mais c'est plutôt à toi de m'aider, hein.
Écoute, le Vincent, il a des problèmes en ce moment, avec son daron et tout. Ça devrait être facile de l'approcher.

Gilles lui fit un petit signe de la main, avant de contourner la nef pour se présenter tout près des portes du Temple. Là, il se contentait de s'arrêter, et de se tenir droit. Pas dans une posture lâche ou détendue, comme à son habitude, non. Bien droit, le buste relevé, les mains dans le dos. Il écoutait très attentivement le sermon de Philippe de Tourres, qui était perché au-dessus de la masse, du haut de son chaire. Un plutôt beau sermon, d'une dizaine ou d'une quinzaine de minute, sur l'importance du service et du respect des autres, de l'intérêt général, et du fait que tout le monde se devait, en ces temps de crise, de soutenir autrui, de ne pas être égoïste, et cætera... Si le diacre semblait toujours attentif aux paroles de son maître, il observait surtout dans la foule. Et au bout d'un moment, il donna un coup de coude assez brusque dans les côtes de Satine.

- Là. 4e banc, vous voyez l'gars ? C'est Vincent, avec sa sœur.

Il pointa discrètement et rapidement du doigt. En effet, en bout de banc, on voyait clairement deux personnes.
Vincent était un jeune homme qui commençait à approcher de la trentaine. Aussi grand que Satine, très mince, il avait les joues creuses, les traits bien marqués, un teint pâle et des cernes. Il avait de nombreuses cicatrices visibles sur ses mains, et des traces de griffures dans le cou. Il ne semblait étrangement pas athlétique, et pourtant, Räzell était un très puissant épéiste. Il portait des vêtements simples, mais également un pourpoint en cuir bouilli, et peut-être, Gilles n'était pas sûr, avait-il une dague cachée quelque part. Sa sœur, elle, était une jeune fille de seize ans. Plus petite que son frère, avec des cheveux noirs coupés courts, elle aussi paraissait très mince et très blanche. Elle était plutôt mignonne, malgré son nez proéminent, ses nombreux boutons qui lui recouvraient la face, et ses dents qui partaient dans tous les sens.

La messe continuait. Après le sermon, il y eut quelques chants, puis finalement, la fin de la cérémonie. Les gens se levèrent pour s'approcher des prêtres, comme dans toutes les messes. Gilles continuait d'observer. Posté à la sortie, il souriait aux fidèles qui sortaient, leur donnant tous ses vœux de bonne santé... Mais toujours il regardait Vincent du coin de l’œil. Lui et sa sœur avaient pris un cierge, et commençaient à se recueillir devant une des statues du Temple.
En voyant cela, Gilles s'était approché de Satine, et lui chuchota tout bas. La jeune femme pouvait sentir l'odeur du vieux routier, assez nauséabonde.

- C'est lui le pédéraste ?
'Fin bref, z'avez p'têt envie de lui parler, établir le contact... J'sais pas faire ce genre de choses, moi.

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SatineRibaude
Satine



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MessageSujet: Re: Ruse en préparation (Philippe)   Ruse en préparation (Philippe) EmptyVen 22 Avr 2016 - 22:57
Dans la sacristie, Philippe lui donna les directives. Trouver Vincent, nouer un contact, faire preuve d'inventivité. Rien de trop difficile en somme... Il la remercia et la gratifia d'une main sur l'épaule, comme l'aurait fait un père un peu trop absent devant sa bonne fifille première de la classe. Qu'à cela ne tienne, tout ce qui importait c'était de cesser ce vil commerce. Peu importait s'il fallait se confronter aux gestes paternalistes d'un prêtre étrange. Elle avait connu bien pire.

Elle avait regardé l'homme s'éloigner avant d'être rejointe par le diacre. Celui-là, elle était sûre de ne jamais perdre sa trace, son odeur était décelable à au moins dix mètres à la ronde ! Elle fit tout les efforts du monde pour ne pas le gifler ni plisser du nez ni faire la moue. Son air graveleux, ses dents rares et jaunes, son absence totale de l'hygiène corporelle la plus élémentaire.... Tout dans cet homme respirait la crasse et l'inculture.

Après l'avoir laissé l'appeler ribaude non sans une bonne dose de contrôle d'elle-même, elle l'écouta. Ainsi ce cher Räzell avait des problèmes familiaux... Encore une corde sensible sur laquelle appuyer en cas de besoin. Elle hocha la tête sans rien dire et le suivit jusqu'à l'entrée de l'église. Le voir se tenir si droit la dérouta mais elle ne dit rien, se contentant de baisser humblement la tête comme toute servante bien comme il faut.
Alors qu'elle parcourait l'assemblée des yeux, le violent coup de coude de ce rustre de routier faillit lui arracher un gémissement. Il avait repéré le gredin. Le voir comme ça, pieux et recueilli, au côté de sa jeune soeur l'attendrit presque. Il avait un air perdu, fragile et fatigué. Satine se surprit presque à compatir pour lui avant de se rappeler que sa bande de loubards avait tout de même brutalisé Myrtille et tant d'autres avant elle.

Le culte se termina et les gens sortirent alors que Gilles se pencha vers elle. Bon sang ce qu'il puait ! Il avait mangé du fangeux au petit-déjeuner ?!
Satine hocha la tête. Etablir le contact, c'est encore ce qu'elle savait faire de mieux.

- Laissez-moi faire.

Elle s'éloigna du routier et commença à déambuler dans l'église en prenant un air pieux et recueilli. Puis elle s'agenouilla non loin de la fratrie, allumant à son tour un cierge et commença à prier à mi-voix, imitant des sanglots.

Si Satine avait pu être comédienne, elle aurait pu figurer parmi les plus talentueuses du royaume.

- Pitié... Pitié pour mon pauvre père... Il ne mérite pas tant de malheur... lui qui vous a toujours si loyalement honoré...

Elle ne visait pas Vincent mais sa petite soeur par ces épanchements factices. L'adolescente, le visage soucieux, s'agenouilla près d'elle et posa une main compatissante sur son épaule. Satine, tête baissée, s'en voulut l'espace d'un instant d'abuser d'une fille qui avait l'air très honnête.

- Votre père aussi est mal en point ? Lui chuchota-t-elle dans un souffle

Satine fit mine d'essuyer les larmes qu'elle avait réussi à faire couler et fit remonter vers la jeune fille le visage soucieux qu'elle avait savamment composé.

- Oui... Une fièvre atroce depuis plusieurs jours... Les herboristes ne peuvent rien faire, je tremble chaque soir en me demandant s'il passera la nuit.

- Je comprends... Notre famille vit le même cauchemar. J'aimerais pouvoir être à ses côtés mais nous devons travailler, mon frère et moi, afin de pouvoir subvenir aux besoins de notre famille si jamais... Enfin... S'il devait...

Se sentant à la fois triste et coupable d'envisager le pire, l'adolescente éclata en sanglots. Satine, le coeur serré, la tint dans ses bras et la berça doucement.

- Vos préoccupations sont bien naturelles... Ne pleurez pas... Moi aussi j'ai dû parer à cette éventualité... Monseigneur de Tourres a eu la bonté de me donner un emploi en tant que bonne. La vie continue vous savez... Nous devons honorer ceux qui risquent de nous quitter en protégeant ceux qui restent avec nous du mieux que nous pouvons...

Vincent vint près d'elle et posa ses mains dans le dos de sa soeur en regardant Satine dans les yeux. Il avait l'air sincèrement contrit mais son visage plus adulte montrait qu'il assumait bien mieux l'idée de la mort prochaine de son géniteur.

- Je vous remercie pour ces paroles réconfortantes... Puisque vous êtes au service de Monseigneur de Tourres, auriez-vous l'obligeance de m'introduire auprès de lui ? J'aurais... Quelques formalités à régler.

La jeune femme devina qu'il souhaitait s'enquérir des inclinations du prêtre à célébrer une oraison funèbre sous peu, mais comment dire cela en présence de sa petite soeur ? Satine hocha la tête, l'air grave, alors que son esprit criait victoire.

- Je vais vous conduire auprès de lui... Mademoiselle, auriez-vous l'obligeance de nous attendre dans la nef ?

La jeune fille approuva et se retira vers un banc en reniflant bruyamment alors que Satine, suivie par Räzell, se dirigeait vers cet immonde routier.

- Gilles, ce jeune homme souhaiterait voir monseigneur de Tourres, pouvez vous nous conduire à lui ?
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Philippe de Tourres
Philippe de Tourres



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MessageSujet: Re: Ruse en préparation (Philippe)   Ruse en préparation (Philippe) EmptySam 23 Avr 2016 - 16:18
Le sergent de la milice s'était approché du routier. Quel homme normal que ce Vincent Räzell, si on s'attendait à un monstre, on allait vite être déçu. Il était poli, même s'il parlait avec une voix souvent haletante et excitée. Il paraissait très fatigué, il ne devait pas avoir eut une bonne nuit de sommeil depuis des lustres, et cela ne le rendait que plus paranoïaque et en proie à de subits accès de rage. Néanmoins, sa présence dans un Temple le calmait ; devant les Dieux, il se montrait subitement plus humble, plus contrit, il pliait l'échine face à leur grandeur. Qui aurait pu croire que ce même homme passait certaines de ses nuits à terrifier des femmes ?
Et que cherchait-il, en fait ? C'est ce que Gilles se demandait. S'il était homosexuel, que pouvait-il bien gagner ? Était-ce pour l'argent, parce que si oui il y avait plus à gagner à terrifier des marchands que des ribaudes. Oui, le routier était incapable de comprendre ce que le jeune Vincent pouvait bien chercher à prouver. Aussi, il mit un moment à répondre. Il croisait les bras devant Räzell, et gardait son même sourire en coin.

- Il veut voir qui ? Le père de Tourres ? Oué, c'est bien, mais il est occupé le padré, pourquoi qu'il veut le voir ?

Qu'est-ce que Gilles cherchait à faire ? C'était débile. Il avait l'homme qu'ils étaient censés suivre droit devant lui, et plutôt que de s'empresser à le conduire auprès de Philippe, voilà qu'il se mettait à déblatérer des conneries.
Vincent lui-même paru surpris un moment, pour bien d'autres raisons. Ses sourcils s'étaient arqués sur son front, et son poing droit s'était fermé.

- Est-ce que ça te regarde, mon vieux ? La jeune fille vient de te demander de me conduire à lui.
- Qu'elle m'a demandé si j'pouvais ! Et moi j'te demande pourquoi t'veux le déranger.
- J'ai besoin de ses services.
- Plein d'gens ont besoin des services d'un prêtre ! Fais la queue, le jeune.

Gilles prenait clairement Vincent pour un débile. Il parlait avec une voix niaise, volontairement niaise. Il haussa les épaules, puis parti rapidement pour arpenter la nef.
Ou du moins, il essayait. Parce que sitôt avoir fais deux lourds pas en avant, que la main froide de Vincent lui attrapa le poignet, et commença à violemment le serrer. Vincent sifflota avant de tirer Gilles vers lui. Ses yeux globuleux, un peu pétillants comme celui d'un consommateur de chanvre en manque, se fixèrent, sévères, sur ceux (Ou plutôt celui) de Gilles.

- Attend, attend, attend... T'éloignes pas papi.
- D'où tu m'touches ?!
- Je te touche pas là, on fait que parler ! On parle là et toi tu te casses, ça va pas ?
- Lâche-moi, gamin.
- Le vieux il va se calmer maintenant. T'sais pas qui je suis ? Eh ! Arrête de te débattre ! Arrête de te débattre putain !

Mais c'est que Gilles se débattait. Et voilà qu'en quelques minutes, tout un tas de regards indiscrets s'étaient tournés vers les deux hommes qui luttaient en plein milieu de l’Église.

- J'suis sergent de la milice ! T'entends ?!
- Mais ! Calmez-vous enfin !
- Qu'est-ce qui se passe ? Monsieur ?

Et voilà maintenant qu'un badaud quelconque s'approchait. C'était fou comment tout avait dégénéré en quelques instants. Soudain, Vincent posa son bras derrière la nuque de Gilles, et l'approcha de lui, le tenant fermement, comme s'il était en train de lui faire un « câlin », et pourtant voilà que le routier luttait, qu'il semblait peiné, et cela paraissait évident aux autres fidèles qui s'approchaient.

- Mais non ! Mais non ! On fait que discuter là !

- Vincent ? Qu'est-ce que tu fais ?

Sa petite sœur s'était légèrement approchée. Elle était toujours éloignée, tout près de son banc où Satine l'avait laissée, mais elle pouvait clairement voir son frère tenir dans ses bras un vieux monsieur qui tentait de se défaire de son emprise.

- Ça va ! Eh ! On faisait que parler !
Hein papi ? Alors, il est où le père de Tourres ? Faut que je lui parle, c'est important !
C'est pour mon père ! Il est malade ! J'ai besoin des services d'un prêtre, et ce monsieur allait m'y conduire, n'est-ce pas ?


Et puis, soudain, quelque chose se passa.
En fait, Gilles n'était pas du tout un pauvre vieux sans défense, mais il savait se faire passer pour l'un. Lentement, il posa ses doigts sur ceux qui le retenait, et il les appuya. Vincent fut pris d'une courte douleur, et le routier approcha sa bouche de l'oreille du milicien. Il lui chuchota quelque chose, tout doucement. Personne n'entendit, d'ailleurs, personne ne remarqua que Gilles lui avait parler. Il n'y avait que Satine qui avait pu voir, clairement, que Gilles provoquait le sergent.
Qu'importe ce qu'il avait dit, cela avait énervé Vincent. Son visage pâle avait rougi. Celui-ci lâcha Gilles, et le poussa en arrière. Mais le routier, dans sa chute, attrapa les manches du vêtement du milicien, l'emportant dans sa courte chute. Cela paniqua Vincent, qui, perdant ses moyens, décocha un coup de poing en plein dans sa tête.
Le vieux monsieur hurla de peur en s'écrasant contre un des bancs. Il y eut des murmures dans la petite troupe de fidèles. Vincent s'approcha de Gilles pour le rouer de coup, quand quelques mains faibles, d'un jeune homme et d'un vieillard, l'arrêtèrent.

- Mais lâchez-le enfin ! Lâchez-le !
Il vous a rien fait !


Et déjà Vincent se mettait à hurler, en plein dans une église.

- J'vais te tuer ! T'entends ?! Je vais t'ouvrir ! Comme un putain de porc !
- Vincent ! Qu'est-ce que tu fais ?!

Sa sœur avait couru derrière lui. Elle était au bord des larmes. C'est à ce moment là qu'une autre voix gronda. Celle de Philippe de Tourres, qui avait quitté l'autel pour se rapprocher, en trottinant, de son diacre.

- Que se passe-t-il ici ?!
Gilles ?

- Il m'a attaqué ! Mon père !
- Je suis témoin mon père ! Cet homme a attaqué ce vieux monsieur sans aucune raison !
- Vincent ?! Pourquoi tu fais ça ?!
- Mon père s'il vous plaît ! Vous comprenez pas ! Il m'a provoqué ! Il m'a insulté, il... il... Il m'a-

Philippe l'avait foudroyé d'un regard.

- Sortez !

- Mon père ! Vous comprenez pas !
- Sortez, sortez maintenant ou bien je demanderais à ce qu'on vous fasse sortir !
Je vous reconnais en plus. C'est vous, Vincent Räzell, sergent de la milice ! Eh bien ! Vous n'avez pas honte ? Sachez que votre capitaine entendra parler de cela !


Pendant un instant, Vincent n'eut plus l'air d'une bête enragée, mais plutôt d'un petit garçon apeuré d'avoir été pris sur le fait. Il s'éloigna rapidement, tandis que Philippe aida son Gilles à se relever.
Un instant, Satine put voir le diacre lui faire un clin d’œil.

Car voilà, la sœur de Vincent n'était pas partie. Au bord des larmes, elle attrapa Satine, la tirant contre elle.

- Je... Je comprend pas, je... Il... Il est pas comme ça d'habitude !
Je suis désolée ! Je... Je suis désolée !
Vous devez lui parler ! Je vous en supplie ! Moi j'arrive pas à lui parler ! Venez avec moi, le calmer, lui dire de présenter des excuses à cet homme !
Pitié !
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SatineRibaude
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MessageSujet: Re: Ruse en préparation (Philippe)   Ruse en préparation (Philippe) EmptySam 30 Avr 2016 - 20:26
Satine pensait que Gilles ferait en sorte d'introduire très vite le jeune homme auprès de Monseigneur de Tourres mais il n'en fit rien. Au lieu de cela, il fit mine de vouloir l'empêcher de le voir en prétextant qu'il était occupé. Derrière Vincent, Satine jetait un regard d'incompréhension au vieux routier. Mais qu'es-ce qu'il fabriquait ? Il savait pourtant ce qu'il avait à faire ! Dieu qu'il la repoussait... Elle avait envie de le frapper ce vieux schnok.

Evidemment, la sauce commença à monter violemment. Bien vite, d'autres personnes approchèrent alors que Satine essayait de calmer le jeu.

- S'il vous plaît.. S'il vous plaît calmez vous ! Vous êtes dans un lieu saint !

Elle pensait que Vincent s'arrêterait mais non, il riposta avec une force qu'il n'avait pas soupçonné. Satine essaya d'agripper le milicien mais celui ci bougea trop rapidement. Bientôt d'autres gens entrèrent et la jeune femme décida de les éloigner, l'air plutôt vindicatif.

- Ah vous, ne vous en mêlez pas ! C'est déjà assez compliqué à gérer sans que des pécores ne viennent se rajouter au milieu !

Alors qu'elle les faisait reculer, Monseigneur de Tourres fit taire tout le monde en arrivant dans la nef. Satine soupira de soulagement avant de s'étouffer quand il le chassa. Heureusement le clin d'oeil qu'il lui fit la rassura. La jeune soeur de Razell vint la harponner en la suppliant de ramener son frère. En soupirant la jeune femme la serra dans ses bras et murmura.

- Ne vous en faites pas.... Je vais lui parler... Je vous promet de le ramener.

Elle l'assit sur un banc puis se dirigea vers la sortie. Cependant, la prostituée prit le soin de s'arrêter devant cette saleté de Gilles. Elle fit le sacrifice de se pencher sur sa puanteur pour siffler, si doucement que seul lui pouvait l'entendre.

- Il n'y avait pas besoin de ça pour le mettre dans notre poche.

Elle faillit en rajouter mais le laissa tomber pour courir après le milicien sur le parvis.

- Monsieur Räzell !! Revenez !!

Il s'arrêta en l'entendant puis repris sa marche rapide, les poings serrés. Finalement, la jeune femme sprinta une dernière fois et attrapa la manche de l’homme en manquant de s’étouffer dans sa course.

- Mais attendez enfin ! Ne faites pas l’enfant !

Le jeune homme se retourna vers elle. Il avait l’air contrit et terriblement malheureux. C’était vraiment ça, la terreur des prostituées ? La jeune femme avait presque de la peine à le croire… Mais hors de question de se laisser attendrir. Elle soupira.

- Je me suis fait ridiculiser par ce fieffé enquiquineur, il l’a cherché, je…. Je…

Satine hocha la tête. Il était blessé dans son orgueil mais se sentait ridicule en même temps. Elle saurait trouver les bons mots pour l’apaiser.

- Je sais, je l’ai vu… Monseigneur de Tourres n’est pas stupide, il sait à quel point Gilles peut se montrer… Disons… Importun. Si vous faites preuve de calme et que vous retournez le voir humblement, je suis certaine qu’il saura vous accueillir.

Le milicien releva la tête avec quelque chose dans les yeux qui ressemblait à de l’espoir.

- Vous en êtes certaine ?

Satine lui sortit son plus beau sourire de comédienne et caressa doucement son bras.

- Oui j’en suis sûre. Je vais vous y conduire… Dépêchez-vous, votre sœur se fait un sang d’encre, vous savez.

Elle le ramena ainsi dans l’église. Au moment de franchir le pas de la porte, la jeune femme jeta un regard assassin à Gilles, l’air de dire que s’il bougeait la moindre parcelle de sa peau puante, elle enverrai un de ses poings dans sa bouche déjà passablement édentée.
La petite sœur se leva et enlaça son frère.

- Ne me fais plus peur comme ça !

Gêné, Vincent referma son étreinte protectrice sur elle et tourna ses yeux vers la prostituée.

- Je te le promet… Tu veux bien m’attendre ? Je vais voir Monseigneur de Tourres.

La jeune fille acquiesça puis alla sagement s’asseoir, le plus loin possible de Gilles alors que Satine et le milicien entraient dans la sacristie. Après avoir refermé la lourde porte, la jeune femme, comme une vraie servante, trottina jusqu’à lui, tête basse.

- Monseigneur… Cet homme est calmé, daigneriez-vous lui accorder votre attention, ne serait-ce que pour quelques minutes ?
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Philippe de Tourres
Philippe de Tourres



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MessageSujet: Re: Ruse en préparation (Philippe)   Ruse en préparation (Philippe) EmptyLun 2 Mai 2016 - 18:30
Vincent de Räzell se présenta, humble et contrit, dans la sacristie du prêtre de Tourres. Celui-ci était en train de terminer de se dévêtir de ses vêtements de messe, pour reprendre un accoutrement plus habituel. Lorsqu'il aperçut le visage long et fin de Vincent, les sourcils du prêtre s'arquèrent bien haut sur son front, avant de tourner lentement son regard de pierre sur Satine.

- Merci. Tu peux partir à présent.

Lorsque la ribaude fut partie, claquant la porte derrière elle, Philippe se retrouva seul avec lui. Quelle fut la teneur de leur discussion ? Probablement la même que Philippe avait toujours avec ses fidèles, une leçon sévère et légèrement humiliante. Il lui parla assez longuement, peut-être une quinzaine de minutes, Satine, si elle voulu écouter, ne pouvait entendre que des murmures camouflées, peu audibles derrière la grande porte.
Lorsque leur entrevue fut terminée, la porte se rouvrit à nouveau, brutalement. Philippe sorti en premier, d'un pas très rapide, suivi par Vincent qui semblait bien plus hésitant. Les deux hommes retournèrent vers la nef, où Gilles se tenait devant une statue d'Anür, son couvre-chef dans les mains.

- Gilles. Ce monsieur voudrait te parler.

Le diacre se tourna lentement, l'air penaud, tandis que Vincent lui grimaçait douloureusement. Les prochains mots qui allaient sortir de sa bouche allaient être une torture à prononcer, pour ce garçon qui était obsédé par son ego.

- Je... Je vous présente mes excuses pour... Pour ce que je vous ai fait.

Gilles lui sourit. Un grand sourire un peu niais, comme celui d'un toutou content qu'on lui donne une friandise.

- Ah, c'bon fiston, j'veux dire, eh, zavé un problème avec votre papa, hein ? J'peux comprendre ça.
- Partez donc, Vincent, je vous rejoins.

Vincent s'éloigna de la nef, en prenant sa petite sœur sous le bras. C'est alors que Philippe se tourna lentement vers Satine, qui n'était pas éloignée, et lui fit un léger signe pour venir s'approcher.

- Gilles. Il faut que vous fassiez quelque chose pour moi.

- N'importe quoi, padré.
- L'autre sergent, Lazare... Il faut que vous le surveillez, que vous vous occupiez de lui. Je veux savoir où lui et sa troupe de brigands crèchent, où dans les bas-fonds est-ce qu'ils comptent terroriser.
- Oué, d'accord sire.

Et aussitôt dit, aussitôt fait. Il s'éloigna en bombant le torse, recouvert de ses haillons, toujours aussi rustre et volontaire. Philippe le regarda partir, avant de lentement placer ses mains dans son dos et d'observer la ribaude.

- Bien. Tout se passe comme prévu pour l'instant. C'est peut-être le bon moment pour aller chercher votre, heum... « Ami ». Nous allons retourner au Bourg-Levant, dans la boucherie des Räzell, et continuer la suite des opérations. En attendant, Gilles s'occupera de surveiller le sergent Lazare et de voir ce qu'il prévoit.
J'espère que vous êtes toujours d'accord pour m'aider. On ne pourra pas réussir sans vous.
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