Un autre Torren ? [PV Üther]

Nous sommes à la fin de Mars 1165 et la vie au sein de Marbrume suit son cours, avec ses hauts et ses bas, ses espoirs et ses désillusions, sa beauté et sa laideur magnifiées par les Hommes qui occupent la Cité. Ne nous voilons pas la face, tout est loin d'être tranquille et il suffit d'un rien pour que les esprits s'échauffent et que le sang coule. Gondemar n'avait pas fait "rien" et c'était là ce qui ne cessait de se rappeler à son bon souvenir. Ecuviel lui avait demandé de "punir" Grim Torren et, si d'aventure l'ancien soldat avait voulu rendre la chose réaliste, il s'était dit après coup y avoir été beaucoup trop fort avec le pauvre Saltimbanque. Oh bien sûr, il avait également été question de tenir la sinistre réputation qu'on lui faisait, mais en vérité il n'avait prit aucun plaisir à blesser l'artiste de rue, le ramenant à son domicile en constatant son piteux état et songeant que peut-être il aurait du faire quelque chose pour l'aider. Mais non, trop en proie à ses propres craintes intérieures et au deuil qui l'accablait, il n'avait à l'esprit qu'une chape de sombres nuages obscurcissant son jugement... tout du moins jusqu'à-ce qu'une nuit il ne supporte pas l'idée que peut-être Grim Torren s'était attiré d'autres ennuis. Et voilà que cela l'avait travaillé furieusement, au point que le lendemain matin, à la première lueur du jour, il quitta sa chambre avec son armure et son épée, mais également un baluchon contenant quelques bonnes nourritures pour une semaine -viande, pain, fromage- et choisit de se rendre au domicile du cracheur de feu. La démarche lourde, bien que silencieuse, il jetait des regards en arrière pour s'assurer de ne pas être suivit par l'un des espions de son ami d'enfance, arrivant finalement dans la Hanse où il retrouva le chemin du domicile recherché.

- ...

Il se rappelait du lieu où tout semblait manquer et, après une hésitation, frappa trois brefs coups à la porte avant de parler d'une voix basse et grave.

- C'est moi Grim, j'entre.

Comme s'ils avaient seulement pu se connaitre, en-dehors de la course-poursuite et de ce qu'il lui avait infligé ensuite. Gondemar voulu pousser la porte, mais celle-ci était dans un état tel que ses gonds seuls permettaient de la faire tenir, le verrou ayant visiblement sauté. Grognant en imaginant qu'on ai pu la défoncer, il pénétra à l'intérieur du logement sans y trouver âme qui vive. L'odeur forte de pourriture emplissait l'air et, l'espace d'un instant, l'ancien soldat redouta que le pire ne soit arrivé et s'en voulu atrocement. Réfrénant sa culpabilité, il referma la porte dans son dos sans jeter un regard en arrière, puis s'avança vers le lit aux draps encore souillés de sang et d'un autre fluide qui aurait pu être bien des choses, mais surtout, probablement, des suintements. Avisant la minuscule table, il s'y dirigea pour y déposer le sac de victuailles, hésitant sur la démarche à suivre. Grim Torren avait-il trépassé ? Avait-il eu des ennuis ? L'avait-on enlevé ? Chose qui pourrait expliquer l'état de la porte et l'apparent abandon des lieux. Ce fut un mouvement dans son dos suivit d'un raclement de gorge qui le fit se retourner vivement, la main déjà sur la garde de son épée. Face à lui, un grand gaillard à l'air peu commode... qui pourrait peut-être répondre à ses interrogations.

Après le sauvetage de Grim, Üther voulût prendre les choses en mains. Le fameux Ecuviel, trop souvent craint et faisant une trop grosse preuve d'aisance en commettant ses crimes, à la vue de tous, a commis sa première erreur face aux yeux du jeune homme.
S'en prendre à la famille. Le business peu ragoutant du malhonnête homme ne l’intéressait pas du tout. Mais le fait qu'il atteigne à la vie de son frère, l'impliquait soudainement.
Apparemment très courageux, le citoyen pourris gâté et apparemment intouchable, n'a même pas eu l'audace de faire les choses lui même. Un homme qui a peur de se salir les mains directement et qui envois ses chiens faire le travail à sa place n'est pas vraiment un homme.

La situation avait été amoindrie et relativisée par Grim, mais à moitié mort peu de ses arguments, visant à convaincre Üther, étaient valables. Grim a peur pour sa famille, certes, mais laisser faire impunément une fois pousse à recommencer.

Suivant son instinct du moment, Üther s'était mis en tête d'attendre le fameux homme de main d'Ecuviel, Gondemar Rosalis. Dans les appartement de son frère.
On ne sait jamais un élan de regrets ou bien alors l'intention de terminer le travail pour achever la cible n'était pas impossible.
L'initiative s'avérant porter ses fruits, le larbin déboula.

Üther attendait sagement assis dans le coin de la pièce, dissimulé par une zone d'ombre, non éclairée par la fenêtre un peu plus loin. Il attendait depuis quelques temps maintenant, il dû se faire à l'odeur. Mais c'est sous la montée d'adrénaline soudaine que le problème évoqué se volatilisa tout d'un coup.
Des bruits de craquements et de grincements dans la cage d'escalier trahissaient les pas d'une personne voulant apparemment se faire discrète.
Une fois en haut les bruits se stoppèrent quelques secondes devant la porte puis trois coups résonnèrent dans le hall.

- C'est moi Grim, j'entre.

Apparemment sans gènes et oubliant sûrement qu'il était agresseur à la limite d'un tueur, l'étranger entra sans gènes dans l'appartement, n'attendant aucunes autorisations ou refus.
A peine entré il grommela en voyant la porte simplement posée.
Üther leva les yeux au ciel, une réponse silencieuse au râle opposé.
Comme toute personne normalement constituée Gondemar constata la mauvaise odeur et grimaça, tout en repoussant délicatement la porte.
L'homme fixait les draps et posa un baluchon sur la table d'à côté. Üther un peu trop impatient après cette longue attente décida de se faire "remarquer". Il se leva et racla sa gorge.

Hum, hum

Apparemment stressé, en réponse à la mise en scène, Gondemar pris soins de prendre contact avec son pommeau. Les deux hommes tout deux de grande taille, rendait l'habitat ridiculement petit.
D'un ton calme, le bûcheron lança la conversation à l'avenir houleux.

-Oh du calme mon grand ... Alors c'est toi Gladis ? Ou Rosalis j'sais plus ...

Il ne fallait pas se leurrer, l'espace d'un bref instant et bien que Ecuviel lui ait affirmé que toute cette affaire était réglée, Gondemar avait eu peur. Peur que d'autres soient passés après lui, peur pour la vie de Grim que sa culpabilité non désirée n'avait fait qu'accroitre et cette démarche qui ne s'imposait pas lui avait semblé être nécessaire. Qu'aurait-il bien pu dire à l'artiste de rue ? Qu'il était désolé ? Qu'il aurait du trouver un autre stratagème ? Quand bien même cela était sincèrement vrai, le mal était fait et toutes les excuses du monde n'auraient pu rien changer à la situation. Ainsi quand l'homme se retourna après avoir entendu un raclement de gorge, portant la main à la garde de son épée, il fronça les sourcils en entendant l'inconnu tenter de l'appeler par son nom. Ses yeux clairs se fixèrent sur la masse de muscles qui lui faisait face et il songea que soit il s'agissait d'un ami de Grim, soit c'était un homme de main engagé à quelque fin de vengeance.

- Et que lui voulez-vous, à Rosalis ?

Demanda d'une voix basse et grave l'ancien soldat, le ton un peu sec et trahissant ainsi la défensive sur laquelle il était. Sa main ne quitta pas la garde de son épée, trop habitué qu'il était à être agressé pour une raison ou pour une autre. Entre son enfance dans la rue et sa vie d'adulte à l'armée, les réflexes ne manquaient pas et, bien qu'il attaque rarement le premier, il savait se tenir prêt à tout.

- Où est Grim ? Est-il en sûreté ?

Les questions sonnaient presque comme des accusations, bien que cet homme-là ne travaille pas pour Théodemar, puisqu'il lui semblait les avoir tous rencontrés au moins une fois. En tant que Conseiller, c'était l'une de ses obligations, bien qu'il ignora tout de certaines activités secrètes de son ami d'enfance. Refusant de quitter la montagne du regard, il se déplaça lentement sur le côté, en direction de la fenêtre, au cas où on l'obligerait à battre en retraite de manière précipitée.

La venue de Gondemar chez le jeune Grim, devait être contraire à ses principes. L'homme était stressé et sur la défensive. Malgré sa carrure plutôt imposante qui pourrait lui confier une certaines aisance lors de conflit, il restait ni plus ni moins sur ses gardes.
Le contraste était flagrant entre le ton léger et très sarcastique d'Üther et l'attitude accusatrice de son opposant.

- Et que lui voulez-vous, à Rosalis ?

- C'que je lui veux ? Ce que je te veux, plutôt non ? Tu permets j'te tutoie ... les manières serait un peu trop hors de propos, j'le craint.

Üther se déplaçait dans la largeur de la pièce tout en restant face à son adversaire, il devait évacuer l'adrénaline qui lui submergeait les membres.
Il restait près de la table, en coin derrière la porte. Un pot ou un crachoir peu importe, si ça dégénérerait il le lui balancerai à la figure. Gondemar est armé, certes, mais la longueur de l'arme n'était pas à son avantage dans un espace aussi réduit. La diversion de l'objet l’obligerai à engager le combat aux poings.

- Un certains Ecuviel ... il a fait le pas de trop. Il t'a envoyé toi ! T'as atteint à la vie de quelqu'un, mon gars ... c'est votre première erreur à vous deux.

-Où est Grim ? Est-il en sûreté ?

L'homme de main avait un ton limite accusateur. On aurait presque pu croire qu'il tentait de faire passer le bûcheron pour le coupable principal du crime.
En réponse à son accusation Üther haussa un sourcil et lâcha quelques syllabes d'un rire très jaune.

-Nous y voilà ... Tu ne l'approche plus ... ou t'auras à faire à moi !

L'homme n'était pas dupe quant à l'identité de celui qui lui faisait face et Gondemar songea brièvement qu'on avait du le décrire à l'individu. Le cheminement de ses pensées le mena à croire qu'il s'agissait de Grim lui-même, malgré l'état de la porte du logement et tandis que les deux se faisaient face en pivotant lentement de part et d'autre de la pièce, l'avertissement fut lancé à la suite des questions de l'ancien soldat. Ne plus l'approcher ? Ainsi donc l'artiste de rue avait réussi à requérir une protection auprès de ce colosse, ce qui n'était pas plus mal... Mais qui risquait aussi de compliquer les choses. La mention de Ecuviel, de ce qui s'était passé sous-entendu, il en savait déjà beaucoup trop. Théodemar devrait être plus prudent à l'avenir dans ses affaires.

- Je n'étais pas venu pour l'agresser.

Il se retint de dire "de nouveau" et se redressa un peu en inspirant profondément, lâchant la garde de son épée pour tendre le bras et saisir le baluchon, le jetant aux pieds de l'inconnu avec une légère retenu, eut égard à la nourriture qui se trouvait dedans.

- Ça c'est pour lui. Ecuviel ignore que je suis ici, aussi j'escompte que tu n'iras poin le trouver pour le lui dire. Il risquerait de se tourner de nouveau vers Grim s'il apprenait que celui-ci a trop parlé.

Gondemar ne pensait pas qu'il risquait forcément des ennuis outre mesure, mais savoir qu'à cause de cette histoire et de sa loyauté envers son ami d'enfance, il commençait à passer pour une ordure n'était pas pour lui plaire. Bien sûr, il avait agit en connaissance de cause, sachant fort bien que Grim lui en voudrait... Mais ce qu'un certain prêtre lui avait dit ne cessait de tourner en arrière-plan de son esprit et il songeait de plus en plus à prendre les choses en mains et à choisir une autre voie.

- Je ne compte pas l'approcher de nouveau. J'ignore qui tu es, mais j'espère qu'il est bien traité avec toi. Et dit-lui de se tenir éloigné d'Ecuviel et de la Milice, ils se livrent à des jeux bien trop dangereux pour un innocent.

Pas comme si lui possédait encore quoi que ce soit d'innocent, il fallait bien le reconnaitre, mais l'ancien soldat savait que le jour où il viendrait à périr, il aurait des comptes à rendre avant d'espérer atteindre, peut-être, le Royaume d'Anür où vivait désormais sa femme.

Gondemar était bien loin d'être en position de confiance pendant cet échange, il ne cessait de se justifier en tout point, sur toutes les phrases.

- Je n'étais pas venu pour l'agresser.

Les mots sortants il s'arrêta à demi-mot, tentant surement de camoufler une vérité qui n'aurait pas sa place à ce moment là de la discussion. L'ambiance restait lourde et électrique.

- C'est plutôt en ton intérêt ... ceci dit tu n'as pas à mettre un pied ici de toute façon !

D'un excès de confiance, dû à sa tentative désespérée de rachat de conscience, le milicien balança le baluchon aux pieds d'Üther, après avoir préalablement relâché son pommeau.
De la nourriture sortît du torchon tombant sur sol, lâchant quelques miettes sur le sol déjà crasseux de Grim.

- Ça c'est pour lui. Ecuviel ignore que je suis ici, aussi j'escompte que tu n'iras point le trouver pour le lui dire. Il risquerait de se tourner de nouveau vers Grim s'il apprenait que celui-ci a trop parlé.

Üther laissa échapper un petit rire de quelques syllabes à la vue des quelques miches de pain, qui était là en guise de dédommagement. C'est vrai que la vie de Grim valait clairement ça ... Des miches ou la vie ?

- Je ne compte pas l'approcher de nouveau. J'ignore qui tu es, mais j'espère qu'il est bien traité avec toi. Et dit-lui de se tenir éloigné d'Ecuviel et de la Milice, ils se livrent à des jeux bien trop dangereux pour un innocent.

-Occupe toi de ce qui te regarde le sous-fifre ! Pour Ecuviel, j'en tiendrais Grim écarté, comme je le tiendrais écarté de son clébard. Mais si j'lui rend visite à ton patron ça s'ra pas pour enfiler des perles.

L'ours aux cheveux long, laissa planer quelques secondes de réflexions avant de reprendre, rajoutant de la lourdeur à la conversation.

-Si je le revois lui ou encore toi près de Torren je serais largement moins clément tu peux me croire. On s'est compris je pense ?

Üther le fixait dans les yeux à paroles appuyant ses dires, attentifs à la moindre réponse.
Le moment fatidique du départ de Gondemar des appartement du demi-homme allaient se faire, seulement la porte est derrière Üther et la distance va devoir être brisée.

Tout était en menaces et avertissements, l'homme semblait farouchement décidé à protéger Grim, au-delà de la simple raison, ce qui ne manqua pas de faire naitre une certaine curiosité au beau milieu de l'échange qui avait lieu. Etait-ce un ami du saltimbanque ? Un parent peut-être ? Voilà qui serait singulier, mais parfaitement sensé quand on y réfléchissait un peu, cependant Gondemar était encore trop foncièrement dans ses réflexions pour vouloir véritablement apprendre la vérité à ce propos. Le sac de nourriture semblait contenir du pain, certes, mais si l'odeur rance du logement n'avait point tout occulté, l'on aurait pu sentir les fragrances du fromage encore frais et de la viande salée qui pouvait se conserver un certain temps.

- Je ne suis pas un sous-fifre et encore moins un clébard, je m'occupe justement de ce qui me regarde. C'est moi qui l'ai mis dans cet état, c'est ma responsabilité de réparer cette faute.

Claqua sèchement la voix grave de l'homme d'arme, dont le visage se durcit autant que son expression s'assombrit, lui donnant un air presque menaçant bien que ce ne soit point là son objectif. Autant la culpabilité pouvait naturellement le rendre plus enclin à une certaine gentillesse, autant face à une espèce de bouledogue montrant les crocs il n'hésiterait pas à dégainer l'épée si nécessaire. Que ce type débarque chez Théodemar dans sa demeure occupée par de nombreux gardes n'était pas son affaire, à chacun de choisir sa façon de mourir.

- Je n'ai pas à t'obéir, qui que tu sois. Tant que je n'aurais pas vu Grim vivant et guérit, je reviendrais.

Franchissant les quelques mètres qui le séparait de l'individu -un vrai grizzly, une chance que lui-même dépassa les deux mètres- il s'arrêta à deux pas de lui, le fixant de ses yeux bleus devenus noirs d'une sourde colère contenue, de cette rage qui lui venait des Bas-Quartiers dont il était issu et qui ne l'avait jamais vraiment quitté. La main sur le pommeau de son épée, il
suffisait de peu pour que toute cette situation ne dégénère.

- Maintenant, laisse-moi passer avant que je ne change d'avis et te fasse subir le même sort qu'à un Fangeux.

La menace était sans doute par trop prononcée, voir exagérée -loin de lui l'envie de tuer cet homme, tout au plus de le malmener un peu pour accéder à la porte- mais se faire insulter lui déplaisait fortement et l'ancien soldat ne comptait pas faire de demi-mesure face à cet indigent. Entre gens de basses conditions, nul besoin de chichis ni de courbettes avant le combat. Ça passait ou ça cassait, mais la porte était juste là et Gondemar, se sentant non désiré en ces lieux, espérait les quitter au plus vite pour mieux revenir guetter, cette fois, les mouvements qui s'y faisaient. Tôt ou tard, il retrouverait Grim.

Üther avait été plus virulent qu'il ne l'était à l'accoutumée lors de n'importe quelle rixe verbale.
Mais l'homme qui se tenait devant lui était aller bien trop loin dans le méfait commis, à deux doigts d'ôter la vie de son frère.
Cet homme venait se racheter une conduite, avec comme seule dédommagement de la vulgaire nourriture, ça rendait le bûcheron hors de lui et il avait une grande peine à se contrôler. Une seule et unique envie lui traversait l'esprit, cogner du poing dans le visage adverse.

Gondemar monta dans les tours lui également. Se sentant menacé et peut être en danger devant l'attitude d'Üther, cela pouvait se comprendre. Néanmoins il n'attaqua pas pour autant. On pourrait presque croire que cet homme avait des valeurs ... Il s'en voulait peut être vraiment. Ou alors c'était par peur ou encore par manque d'affection de la violence.
Les "valeurs" ne restèrent pas longtemps en supposition dans l'esprit du petit frère, pas après ses actes.
L'homme de main ordonna à Üther de lui laisser place pour qu'il puisse partir, tout en lui affirmant qu'il allait revenir tant qu'il n'aurait pas vu Grim.

Il fît quelques pas sur le côté, sans briser le contact visuel. Les deux hommes se retrouvèrent face à face, l'espace de quelques instants dans ce maigre espace. Une confrontation aussi proche était inévitable.
Le souffle opposé ressentit sur le visage, les yeux injectés de sang autour des pupilles dilatées, la mâchoire crispée. La tension était presque palpable du doigt.

Gondemar se tenait devant et avança de quelques pas éloignant de peu la distance entre les deux hommes. Üther repensa encore aux paroles de l'homme lui affirmant qu'il reviendrait.
Par réflexe il prit gentiment un morceau de bois traînant sur la table derrière lui, le tenant fermement prêt à toutes éventualités.

Gondemar s'attendait à ce que l'homme ne s'écarte pas et qu'au contraire, au vu de la proximité qui était la leur -au point qu'ils pouvaient sentir le souffle l'un de l'autre- il ne tente de l'attaquer malgré le fait que le second n'ai la main sur la garde de son épée. Il ignorait tout des pensées de Üther, ignorait qu'il le prenait pour une vulgaire brute et qu'il s'étonnait de le voir retenir son bras, mais c'était là des considérations dont l'ancien soldat n'avait pas besoin. Voyant le Bûcheron se déplacer de côté pour lui laisser le champ libre, le Mercenaire plissa ses yeux bleus, le suivant d'abord du regard avant d'acquiescer et d'avancer vers la porte, la main toujours en suspend contre le pommeau de son arme. Allait-il se faire attaquer ? Dans le dos par un lâche ? Celui visé par la colère du frère n'aurait su le dire, cependant il ne s'essaya pas à jouer au plus malin et gagna la porte, se retournant vivement malgré tout pour lancer un regard d'avertissement à son vis-à-vis.

- J'ignore qui tu es pour Grim, mais sache que je ne lui ferais plus jamais le moindre mal. Et même si cela ne vaut rien, dit-lui que je regrette sincèrement. J'apporterais d'autres nourritures dans trois jours, si tu es ici plutôt que lui, je te les confierais. Et si jamais il a besoin d'argent pour ses soins, fait-le-moi savoir.

Ce n'était pas grand-chose, en vérité c'était même assez peu quand on y réfléchissait, mais après tout Gondemar n'aurait jamais pu croire que l'apprenti espion serait assez naïf pour croire qu'il pouvait survivre sans demander soin ou assistance à un guérisseur, ce qui aurait permis d'éviter l'aggravation de sa blessure pour laquelle le Mercenaire n'était même pas au courant, en fin de compte. Ce fut donc sur ces dernières paroles que l'homme de haute taille quitta les lieux, fermant la porte après lui autant que cela était possible avant de s'éloigner dans les rues de la cité, en direction de la demeure Ecuviel. Ainsi les dés en étaient-ils jetés, qui sait quand ou si Gondemar reverrait jamais Grim, difficile à dire et plus encore ce qui arriverait alors.

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