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 Yseult de Traquemont [Finie]

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Yseult de TraquemontChâtelaine
Yseult de Traquemont



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MessageSujet: Yseult de Traquemont [Finie]   Yseult de Traquemont [Finie] EmptyDim 25 Oct 2015 - 15:15





Yseult jadis de Corbeval,

aujourd'hui de Traquemont







« Je ne vous promets ni justice, ni bonté, ni paix.
Mais la vengeance ! »

« Dans dix ans.
Dans vingt, ou cent.
Pour vous ou pour vos enfants...
Nous vengerons le genre humain. »



Identité



Nom : De Traquemont
Prénom : Yseult
Âge : 27 ans
Sexe : Féminin
Rang : Noble
Situation : Fille de châtelains, elle s'est emparée d'un fort abandonné quelques lieues à l'Ouest de la Cité Franche et l'a fait sien ; renommé Traquemont, il est désormais le siège de ses gens. Depuis ce repaire, Yseult mène une véritable guérilla contre les Fangeux et ce, avec une rare violence. Certains murmurent qu'elle cherche à prendre les quelques villages alentours encore habités sous son aile, au nez et à la barbe du maître de Marbrume... Peut-être cette aristocrate audacieuse songe-t-elle qu'il n'osera pas sortir de ses murs pour l'empêcher de déployer son influence ?

Physique


« Aiguisée, vive et toute entière tournée vers sa tâche. Métallique, sans plus guère de chaleur à ceci près lorsque le sang d'autrui l'éclabousse... davantage épée que femme, si vous voulez mon avis ! »

Au premier abord, Yseult est une personne de froide compagnie. Elle est dure et sobre dans le verbe comme dans le geste, dotée d'un pragmatisme certain ; la noble est femme de guerre et songe, pense, réfléchit en tant que telle - la chose se devine assez vite lorsqu'on la côtoie. De petite taille, il se dégage d'elle une noblesse cassante qui se veut s'imposer par le silence : l'aristocrate guerrière parvient à exprimer par son mutisme une surprenante supériorité glacée, aussi naturelle que spontanée. Toutefois, l'autorité qu'elle a dans le ton et son regard aux nuances d'azur hivernal semble davantage relever de celui des gens d'armes que des sang-bleus, et si on lui reconnaît du charisme, c'est avant tout pour mener le peuple contre les Fangeux ; et non pour courtiser et entretenir ses relations avec ses pairs. Représentation d'un étroit mariage entre la gentilhommerie et la soldatesque...

Dignité et sombre fierté peignent ses traits d'expressions altières. Une épaisse crinière d'un blond pâle encadre un visage qu'elle a ovale, empreint d'une vitalité austère que les nuits blanches et les expéditions sauvages menées en pleine campagne contre les Fangeux peinent à épuiser. Un petit nez à la courbe mutine que contredit la sévérité de ses yeux acérés surplombe une bouche dont le pli est rarement autre que sérieux. Yseult a les pommettes saillantes, ce qui lui donne un sourire plein de fossettes lorsqu'elle veut bien en esquisser un ; mais il s'agit plus souvent d'un demi-rictus, qu'il soit sincèrement amusé ou moqueur, voire cruel.

Personnalité


« Je vous détruirai. Vous venez de donner un sens nouveau à ma vie ! Vous en avez exclu... les idées de plaisir, les idées de famille, les idées d'amour. Ne reste qu'une haine hurlante, agitée, aux limites de la raison et de la démence que je muselle derrière un masque impavide. Je vous... détruirai... »

Certaines vengeances aveuglent ceux qui s'en font les messagers ; ce n'est pas le cas d'Yseult. Elle donne l'impression d'une personne éclairée à la lucidité cristalline, faisant preuve d'une rare clairvoyance pour ce qui est de comprendre les gens du commun... et d'une rare éloquence pour faire leur sa propre cause. Une cause qui tient en quelques mots : exterminer les Fangeux.
Loin de relever de l'idéalisme, cette impossible croisade s'envisage, chez la jeune femme, comme un combat sans victoire possible mais qui se doit d'être livré. Elle se pose en meneuse, mais qui mène par l'exemple avant tout. Sa haine tenace et livide de ceux que d'aucuns murmurent frappés par le courroux divin s'exprime toute entière par l'épée au métal clair qu'elle manie avec un talent certain pour tuer. On en vient vite à la croire insensible : plutôt que de l'être, Yseult a simplement pris l'habitude de mettre de côté bien des choses afin de ne pas perdre de vue sa détermination. Et au fil des corps brûlés sur son passage, sa résolution demeure inaltérée.

Toute son assurance, égale à la surface d'un lac figé, se mue en un étrange malaise lorsque la guerrière en vient à se laisser tenter par les plaisirs simples que la vie peut parfois lui proposer. Rigide, disciplinée, elle en devient timide à l'heure de troquer sa cuirasse ou sa livrée de cuir noir au profit d'une robe satinée ; et ne saurait guère sur quel pied danser si d'aventure la châtelaine devait se retrouver à quelque bal ou agape auquel son noble lignage pourrait la faire convier. Si la maîtresse de Traquemont se veut être une épée pointée vers les Fangeux et si elle se présente comme une gardienne du peuple face aux périls le menaçant, elle n'en évoque pas moins une petite fille maladroite dans certaines situations. On pourrait la voir rougir telle une adolescente en surprenant deux jeunes gens échanger un baiser fougueux ; ou s'empiffrer, avec un plaisir dont elle serait la première surprise, d'un monceau de myrtilles qui lui peinturlurerait les lèvres d'un profond bordeaux.

Histoire



« Je n'oublierai pas ! Ni tes râles, ni ton regard suppliant, ni tes doigts convulsés tendus vers moi. Ta douleur est enfermée dans mon cœur. Sache qu'elle y demeurera vivace... »

Je ne suis pas de ces terres. Le Morguestanc est pour moi une région inconnue, étrangère, en lesquelles je suis venue mi-amicale, mi-conquérante. Je viens de loin d'ici, loin à l'Ouest... Prenez votre meilleur cheval et allez vers le soleil qui se couche ; à bride abattue trois jours durant, à supposer que votre monture ne se fatigue ni ne boive. Vous verrez s'élever deux hautes montagnes, l'une couronnée de neiges tenaces et l'autre drapée d'une forêt de pins noyés dans un perpétuel brouillard, semblables à de pâles écorchés que les nuages se seraient piqués d'habiller. Au pied de ces monts serpente un sentier étroit s'enfonçant dans une vallée : suivez-le sans faillir.

Bienvenue en Corbeval, le lieu de ma naissance.

C'était il y a vingt-sept ans. Nos gens en ont dit que c'était là l'hiver le plus rude qu'on ait vu de mémoire d'homme et mes premiers vagissements ont résonné entre les pierres trop fraîches du château à sa mi-solstice, lorsque les vents glacés se faisaient les plus mordants. D'étranges rêves m'assaillent quelquefois, des songes vaporeux où j'entends le sifflement acéré de folles bourrasques par-delà une vitre en ogive, de verre épais ; cette lucarne donne sur un monde d'un blanc immaculé, un rien trop lumineux. Dans l'air gelé se dessine doucement une main qui vient caresser ma joue, l'attiédir l'espace de quelques secondes... et quelque part, hors de ma vue, une voix chaude chantonne ce qui ressemble de près à une berceuse. Je veux me laisser aller le long de ces mots indistincts, portée par ce ton maternel, tendre, insouciant.

Mais la cruelle aurore revient immanquablement, déchirer ces mirages dans le froide clarté du petit matin.

J'ai eu deux frères qui sont morts dans leurs couches avant que je ne leur succède au creux du berceau de bois gravé qui m'accueillit les premiers mois de mon existence. On ne me donna mon prénom que lorsqu'on fut certain que je survivrai : Yseult de Corbeval, pour l'heure unique héritière de cette lignée des châtelains ancestraux de la vallée.
Je fus élevée selon ce que d'aucuns pourraient estimer être une éducation trop élevée pour notre rang et dont je n'aurais guère l'usage ; l'étiquette, les emblèmes et noms non des grandes maisons du royaume de Langres mais de l'ensemble de sa noblesse, de notre souverain au modeste chevalier de l'arrière-pays. On m'alloua très tôt quelques précepteurs afin que je fusse instruite dans les domaines des lettres, de la bienséance, de la musique et de l'amour courtois. De mes pairs, on m'apprit à reconnaître lesquels quêtaient une alliance et lesquels n'étaient pas dignes de confiance ; sans que je n'oublie que ces choses n'étaient pas immuables et que l'ennemi d'hier pouvait devenir l'allié de demain, et vice-versa.

Mais ce que je préférais, sans aucun doute, restait les leçons de ma mère.

Pas tant des leçons que des récits, par ailleurs. Aujourd'hui je regrette de n'y avoir pas prêté davantage que l'attention rêveuse qui était alors la mienne : je l'écoutais distraitement, les yeux rivés sur la fenêtre, me narrer la magnificence des grandes cités des terres du roi et d'ailleurs, l'immensité sans frontières des océans, les histoires un rien rocambolesques qui avaient donné, çà et là, de fantaisistes noms à de lointaines contrées.

C'était aussi le temps de l'enfance, des boules de pain chaud volées en riant aux cuisines, des courses folles dans les larges escaliers du donjon, de ces moments passés assise aux créneaux à balancer mes jambes dans le vide tout en écoutant bavarder les hommes d'armes qui ne manquaient pas, à l'occasion, d’ébouriffer mes cheveux.

J'avais douze ans lorsque mon père a fait irruption dans mes appartements, tandis que j'étais là à découvrir de nouveaux arias sur la petite viole qui m'avait été prêtée. Irruption, oui ; car c'était une place où il ne venait jamais, lui qui s'était fait si distant pendant toute ma courte vie. En conseil ou à l'extérieur, à parcourir le duché pour j'ignorais quelles raisons - les repas du soir étaient les seuls instants où je le voyais vraiment, grand homme aux épaules solides, aux longs cheveux retenus d'un bandeau de métal et à la barbe aussi noire que les ailes d'un corbeau. Il m'a observée un moment de ses yeux impénétrables, avant d'inspirer profondément. Et sa voix grave a roulé, avec des intonations montagnardes.

« Tu es mon héritière. Sans mari et sans frère, c'est toi qui dirigeras Corbeval : il est temps de t'y préparer. »

Ces quelques paroles ont marqué la fin de mon confort et peut-être même de ma sécurité.

***

J'y repense avec la nostalgie que peuvent soulever dans notre âme nos émois d'enfant. Les années qui suivirent cette décision de la part de mon paternel se teintent de gris et de lassitude.
Je pourrais vous les résumer en quelques scènes, souvenirs en impressions désagréables que ma mémoire me concède à contrecœur : un après-midi pluvieux du mi-l'an alors que je serre nerveusement les rênes de mon hongre, me sentant terriblement limitée par le poids de mon armure et l'ouverture par trop étroite qui fend mon heaume d'une mince balafre. La lance calée sous mon épaule est pesante, et darde trop souvent sa pointe émoussée vers le sol détrempé à l'herbe grasse. L'odeur âcre du métal me donne envie de me boucher les narines, mais mes gantelets sont si... raides... Puis le signal est donné. En face de moi, le châtelain de Corbeval. Comme il est beau... si menaçant dans sa cuirasse polie mais marquée par les batailles passées. Comme il est beau, du haut de son destrier fringant à la musculature épaisse. Et comme il est beau, tandis que sa monture fond sur moi avec l'élan implacable de quelque rocher dégringolant la montagne...

Le heurt me soulève de ma selle et je me sens ridiculiser les lois de la nature, arrachée à la poigne de la terre par une force qui fait grincer l'acier dont je suis bardée. Une souffrance vive et aiguë à nulle autre comparable se répand dans mon bas-ventre, là où son épieu arrondi a frappé avec la fureur d'un coup de tonnerre ; je ne sais si c'est la peur, la douleur ou la simple violence de l'assaut qui me coupe la respiration, mais mon souffle se perd dans l'infinie seconde qu'il me faut pour m'écraser plusieurs pas en arrière. L'impact se répercute dans ma nuque, mes épaules, mes reins. J'ose à peine gémir tandis que la bruine, insensible à mon malheur, continue de s'abattre sur la visière à demie-soulevée de mon casque et dégringole contre ma peau. J'ai... si froid...

Sa silhouette montée se penche au-dessus de moi, se découpant sur le fond orageux du ciel. Il n'y a aucune compassion dans son regard ; rien qu'une implacable détermination. Et sa voix claque dans l'air humide plus durement encore que s'il m'avait giflée.

« Debout, gamine. Debout, et bats-toi. »

***

Des dizaines... des centaines de scènes semblables hantent les recoins de ma mémoire. Des scènes où mon paternel se dresse devant moi, sempiternelle figure sombre et sévère, et il me semble à chaque fois impossible de lui donner satisfaction. Je ne suis, de fait, jamais à la hauteur ; qu'importe combien, au fil des ans, j'apprends à chevaucher vite et avec agilité. Qu'importe combien, au fil des ans, je peux apprendre à manier l'épée avec élégance et dextérité. Qu'importe, enfin, au fil des ans les efforts que je parviens à déployer, à en suer, à m'en faire saigner ! ...il n'est jamais satisfait. Jamais.

Et lentement, je grandis. L'adolescente devient femme. De moins en moins les hommes d'armes, nos gens et même ma mère ne me parlent. Je m'échine à remplir mes devoirs, à devenir l'héritière de mon père. De plus en plus je deviens son ombre damnée, à la chasse comme aux affaires qui nécessitent son attention, et même à la bataille lorsque le besoin s'en fait sentir. À la bataille...
Avec une surprenante facilité, le combat devient le centre de mon existence. Cet instant étrange où l'acier parle, où le corps devient léger, instinctif. Où la raison disparaît au profit d'une limpide et lumineuse vision de ce qui vous entoure. Le sang qui gicle dans l'air dessine des arabesques aussi gracieuses qu'elles sont éphémères, et je me surprends parfois à en admirer l'inattendu motif. Je cesse d'accorder mon attention aux jeunes chevaliers qui avaient commencé à me courtiser ; celui qu'on choisira pour mes épousailles, l'un ou l'autre... à quoi bon s'en inquiéter à l'avance ? Je n'attends rien du mariage, sinon peut-être de ne pas décevoir l'auteur de mes jours.

C'est à la veille de mes dix-neuf ans qu'on me le présente, dans la pièce décorée de lourdes bibliothèques de ce qui est le séjour de notre donjon. Je me rappelle qu'un feu ronflant crépitait dans la cheminée, projetant les ombres dansantes du soir sur les murs chichement vêtus de quelques éparses tapisseries au thème champêtre. Il se tient raide auprès du seigneur des lieux, et me semble assez joli garçon ; pas bien plus âgé que moi, avec un visage en lame-de-couteau qui sourit aisément. Sa coupe est courte, brune comme les landes de l'automne et une fine barbe qui donne envie d'y glisser les doigts recouvre pleinement ses joues. Je le devine rompu aux armes de par l'athlétisme discret que son pourpoint laisse deviner ; dans ses yeux sombres réside une douceur un rien rêveuse qui, peut-être à tort, me conduit à le croire insouciant.
Nous sommes dissemblables. Je le dévisage sans qu'une émotion ne fasse frémir mes traits, drapée d'une robe au tissu trop fin mais dont j'apprécie la teinte de ciel nocturne. Ma chevelure, disciplinée pour l'occasion, est ramassée en une lourde tresse dorée qui dévale par-dessus mon épaule ; j'avais suggéré qu'on la raccourcisse afin de me rendre le port du heaume plus agréable, mais mes parents s'y sont tous deux fermement opposés. Malgré mon éducation martiale je devais demeurer aussi féminine que possible, me dirent-ils avec un mélange de réprobation et d'indulgence.

Tristan des Noirjardins, fils du banneret du même nom. On disait d'eux qu'ils étaient de fiers combattants dont l'entrain pour les choses de la guerre était bien difficile à entamer, et qu'ils inspiraient une grande loyauté à leurs chevaliers. Pour mes ascendants, une telle union nous prêterait une garde bienvenue et puis... je crois que ce fut l'une des rares fois où ma mère parvint à quelque peu imposer une décision à mon père. Elle pensait qu'il ferait un bon mari.

Sans doute en fût-il un.

J'ai quitté Corbeval pour m'installer aux Noirjardins, où j'ai commencé une vie... bien trop tranquille. Tristan était un homme courtois, étonnamment tendre, et son impatience mal maîtrisée dans le domaine compliqué de l'amour lui donnait un charme rare. Mais par bien des aspects, il ressemblait à un enfant ; il manquait de maturité, de sérieux et d'ambition. Quelquefois, dans les heures apaisées de la nuit où je me tenais aux abords de la fenêtre de notre chambre, un simple drap passé autour du corps, je me surprenais à songer que ce pouvait être agréable ; d'oublier les sentiers de la bataille, de trouver un bonheur simple dans le fait de fonder une famille avec un homme sincèrement aimant et dont je devinais le fond gentil.

D'abord, quelque chose en moi se révoltât à cette idée. Une petite voix farouche, sauvage, ardemment indépendante. Cependant les printemps ont succédé aux hivers et Corbeval se fit de plus en plus lointain. Corbeval, ma famille et mes devoirs d'héritière guerrière. Je commençais à regarder de plus en plus souvent vers Tristan, à l'imaginer à mes côtés, avec la même rêverie dans ses yeux obscurs, le même sourire spontané pour étirer ses lèvres, le même épi exaspérant dans ses cheveux. Et puis pourquoi pas... serait-ce vraiment un mal, que d'échapper au fracas des batailles pour les bras d'un mari ?

Je tombais enceinte la saison suivante, avec une joie poignante qui réduit au silence tant les maîtres des Noirjardins que moi-même. Je lisais un authentique amour dans les regards de mon époux et de ses parents, comme dans ceux de ses nombreux cousins et de sa sœur dont pourtant, au prime abord, je n'avais su goûter les manières par trop frivoles.
Notre enfant vint au monde un peu moins de neuf mois plus tard, sous le nom d'Arthur.

J'ai peine à évoquer les années qui suivirent. Elles me paraissent si... si lointaines. Si effacées. Si irréelles, en vérité, lorsque comparées à ce qu'est devenu notre quotidien. Elles ont mêlé le doute, l'inquiétude, la déception... mais tout ceci réuni ne parvenait pas à ne serait-ce que ternir le bonheur droit et candide dont nous étions entourés. Nous. Je ne parvenais même plus à penser et voir l'avenir selon le terme singulier qui jusqu'ici avait été mien. Je commençais, de fait, à doucement me réprimander pour n'avoir pas su voir plus tôt combien la vie avait à offrir, et combien offrir la vie pouvait suffire à justifier la sienne propre.

Mais tout a changé. Bien sûr, vous le savez.

Nul ne sait pourquoi, nul ne sait vraiment comment. Ils sont arrivés. Ils se sont relevés. Les Fangeux ; d'abord des disparitions étranges, singulières. Des pistes infructueuses ou erronées, et puis d'inquiétantes rumeurs. Et puis les hordes se manifestèrent... Des foules bestiales, abruties mais ô combien vivaces lorsqu'il s'agissait de tuer de l'homme. Hantant les forêts, les plaines, les marais. Malédiction affligeant ces basses terres... Pour la première fois depuis bien longtemps, je me mis à éprouver à nouveau de la peur.
Les Noirjardins étaient bien moins défendables que Corbeval, aussi notre petite famille y a-t-elle déménagé. C'était avant tout une mesure de prudence, une simple précaution... mais à peine une semaine après notre arrivée, nous ne recevions déjà plus de nouvelles de notre foyer.

Nulle ne devait plus nous parvenir.

J'ai insisté pour revêtir mon ancienne armure, reprendre mon épée ; on me le refusa, et je fus bientôt réduite à me ronger les sangs à l'abri des murs sinistres du château tandis que j'apercevais, par les meurtrières, de minuscules silhouettes rôder à l'orée des bois alentours. Ce manège n'a pas duré davantage qu'une lune, et un spectacle improbable m'attendait par une aurore maussade : des nuées de créatures qui jadis furent humaines, vagissantes et voraces, se pressant au pied des remparts. Pour inquiétante que fut la chose, nous nous rassurions en nous disant qu'ils ne pouvaient nous atteindre et que Corbeval avait toujours été tenu prêt à subir un siège.

C'était compter sans la folie d'un homme. La folie d'un seul qui en a condamné des centaines... en tentant de disparaître dans la nuit par une porte dérobée. Il semblerait que les ténèbres ne leur soient pas un obstacle, car les Fangeux l'ont mis en pièces à peine avait-il franchi quelques toises. Avant de se déverser dans l'enceinte...

***

« Tu savais parler. Dans les grognements animaux qui emplissaient la salle, j'entendais distinctement ta voix. Jamais elle n'avait été si claire, si audible. Si chargée de terreur et d'agonie. Tu hurlais tandis qu'ils dévoraient ta chair. Tes petits doigts. Tes oreilles. J'ai vu une mâchoire déchiqueter ton nez avec une saisissante précision, tandis qu'un autre pinçait tes lèvres et les arrachait d'un geste sec. J'aurais voulu que tu sois déjà mort lorsqu'un Fangeux a cassé tes dents. Tu avais cessé de crier, mais tu gémissais. Cela n'a cessé que lorsqu'ils ont mordu dans ta langue, mais même à ce moment, les yeux que tu braquais sur moi brillaient d'un éclat qu'un mort n'aurait pu avoir. Tu m'appelais... maman... »

J'ai tout perdu. Tout. Mon âme, ma lumière, et tout ce qui ressemblait encore à de l'amour et qu'on pouvait trouver dans mon cœur. Celle que j'étais est morte cette nuit-là, alors oubliez cette femme ! De ma douleur en est née une autre.

Une autre qui ne voulait plus se rappeler de ce dont elle avait pu jouir dans sa vie précédente. Une autre toute entière tournée vers la vengeance, animée d'une haine livide, glacée. Je n'aurai pas assez d'une vie pour parvenir à mes fins mais j'ai juré qu'il n'y aurait pas d'avenir pour les Fangeux...
Je ne me souviens pas de ce qu'il s'est passé. Mes gens me disent que je les ai rassemblés, rescapé par rescapé. Une lame poisseuse de sang à la main, une armure poisseuse de sang sur le corps. Que mon visage et mes cheveux dégoulinaient d'un rouge visqueux et froid, épais. Et que je les ai menés dans les ténèbres, en me fiant à ils-ne-savaient quel instinct primaire - car je ne répondais à aucune question, plongée dans un état second. Toute la semaine nous avons marché droit vers l'Est, où les bêtes semblaient moins nombreuses ; et nous avons trouvé ce fort abandonné à quelques lieues à peine de la ville cernée de marais, adossée à la mer. Marbrume.

Ce n'est que là que je me suis effondrée pour dormir pendant plus d'une journée.

Nous nous sommes installés dans ce bastion désert que j'ai rebaptisé Traquemont. Tous, nous avons perdu notre foyer et notre famille. Tous, nous recherchons le prix du sang. Et tous nous participons aux traques que nous, les survivants de Corbeval, lançons à partir de notre repaire.
Nous avons peu d'échanges avec la Cité Franche ; je me suis présentée au maître des lieux peu après notre arrivée, sans aller plus avant. De temps à autres, un convoi en partance pour la campagne alentours sollicite notre aide lorsque la caravane manque de soldats et en échange, nous leur prenons quelques armes, outils et boissons alcoolisées. Nous essayons de prendre contact avec les rares groupes épars qui tentent de vivre en autarcie çà et là, hors les murs de Marbrume - s'ils veulent nous rejoindre, ils le peuvent, mais nul ne les y forcera. Qu'ils nous disent où ils ont vu les Fangeux, et nous les traquerons ! Certains nous récompensent en vivres par paires d'oreilles - les têtes sont trop lourdes à porter en grand nombre.

Nous essuyons des pertes mais nous nous sommes également aguerris. J'ai vite compris qu'il était inutile de les affronter sur leur terrain et de face ; c'est de jour que nous chassons, pour nourrir nos estomacs et nos âmes avides de vengeance. Privilégier les espaces ouverts où l'on peut les voir venir et les dénombrer. Sonder les marais avec des molosses, car ils jappent d'appréhension et se détournent des mares stagnantes où les Fangeux reposent. Des arcs pour les ralentir, des filets pour les plaquer dans la boue et de longues lances, hallebardes et haches afin de les équarrir à même le sol.

Et tous les brûler...

Sachez qu'il y a toujours quelque fumée qui s'élève en journée autour de Traquemont.

Soi réel




Certifiez-vous avoir au moins 18 ans ? Ouaip !
Comment avez-vous trouvé le forum ? (Topsites, bouche à oreille...) Bouche à oreille. Je dénonce Gauvenin.
Vos premières impressions ? Contexte vraiment sympa'. Ambiance apocalyptique dans un univers médiéval ? J'achète.
Des questions ou des suggestions ? M'non, pas pour le moment ; s'il m'en vient j'en parlerai !



Marbrume soutient la création; cette fiche a été codée par Orange de CSSActif



Dernière édition par Yseult de Traquemont le Lun 26 Oct 2015 - 3:14, édité 32 fois
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Ambre de VentfroidFondatrice
Ambre de Ventfroid



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MessageSujet: Re: Yseult de Traquemont [Finie]   Yseult de Traquemont [Finie] EmptyDim 25 Oct 2015 - 15:18
Bienvenue parmi nous, Yseult ! N'hésite pas à nous poser des questions si tu as besoin pour l'avancement de ta fiche ! o/
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Yseult de TraquemontChâtelaine
Yseult de Traquemont



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MessageSujet: Re: Yseult de Traquemont [Finie]   Yseult de Traquemont [Finie] EmptyLun 26 Oct 2015 - 2:01
Et paf ! Finito !

Bon, l'histoire traîne un peu en longueur. Je passe malgré tout assez vite sur des périodes importantes mais j'avais du mal à faire des coupes sans me donner l'impression de bâcler. Bonne lecture !
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Auray de VauvrurComte
Auray de Vauvrur



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MessageSujet: Re: Yseult de Traquemont [Finie]   Yseult de Traquemont [Finie] EmptyLun 26 Oct 2015 - 10:57
Bienvenue Yseult, j'ai le plaisir de te valider, très belle fiche très complète.

Te voilà donc en plein milieu hostile, courage et attention quand même aux réserves de nourriture. :D

N'hésite pas à faire une demande de sous-forum pour ton château extérieur si tu le souhaites.
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MessageSujet: Re: Yseult de Traquemont [Finie]   Yseult de Traquemont [Finie] Empty
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