Marbrume



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 [Terminé] Un cri court dans la nuit

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Hérald DreitMilicien
Hérald Dreit



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MessageSujet: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyDim 12 Fév 2017 - 18:47
Février 1165

Le milicien se dépêchait d'asperger d'alcool le cadavre jonchant les pavés d'une petite ruelle déserte de Marbrume. Ce faisant, il attrapa une torche que lui tendit son collègue pour carboniser le cadavre afin de limiter au possible les risques de l'avènement de la Fange. Les dispositions prises étaient draconiennes, mais cela offrait un amer sursis à la population désolée de la cité fortifiée qui redoutait plus que tous ces êtres putréfiés qui se relevaient après qu'Anür ait prélevé leurs âmes pour la grande voute céleste. Un inconnu mourrait, tandis que le grand blond pâle, qui avait aidé à nettoyer la bavure, regardait, l'air grave, le cadavre brûlant sur l'avenue.

"Celui ou ceux qui ont fait ça ont sans doute emporté tous ses effets personnels avec lui. Je suis d'avis de les chercher."
"Oh, la, fais c'que tu veux, moi j'ai ma dose pour c'soir, j'aime pas les morts, ça pue, c'est chiant à nettoyer, j'veux pas qu'ça m'arrive."
"Bien sûr. Auquel cas je te laisse surveiller notre défunt de sorte à ce qu'il ne créé pas d'incendie autour de lui. Je m'en vais chercher le meurtrier de ce pas."

Sur ces mots, le milicien redescendit l'avenue éclairée d'une triste lumière d'argent, le pas lourd et élancé, le regard fin et perçant, à la recherche de la ou des cibles à abattre. Sur le chemin, il croisa un binôme à qui il fit des signes, s'approchant d'eux.

"Besoin de renforts par ici. On a un à plusieurs assassins dans les environs. Tâchez d'être prudents."
"Putain, et moi qui allais bientôt finir mes quarts !" rouspéta l'un des deux, postillonnant d'agacement.

Tous deux se mirent à suivre Dreit comme deux moutons, regardant autour d'eux sans grande conviction, s'en remettant à leur collègue alerte, qui gardait une forte poigne sur le pommeau de son épée courte...


Dernière édition par Hérald Dreit le Dim 26 Fév 2017 - 10:05, édité 1 fois
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Margot d'Ergnies



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyDim 12 Fév 2017 - 23:08
L'hiver. Le froid. L'ombre.

Je n'ai jamais réussit à me décider quant à l'amour que j'éprouvais pour cette saison. La bise glacée qui me caressait le visage me faisait soupirer d'aise... Mais mes doigts gourds me rappelaient douloureusement que des gants dignes de ce nom me faisaient cruellement défaut. Sentir le rythme de son cœur au bout de ses doigts, voilà quelque chose de très désagréable... mais il aurait fallut bien plus que cela pour me pousser à être n'importe ou ailleurs.

Les rues des bas quartiers se succédaient, et même sans être de véritables ruelles, elles étaient assez étroites et mal éclairées pour que mes pas se fassent rapides et m'obligent à garder ma chaude cape fermée de la main gauche. Le capuchon rabattu sur la tête pour contenir mes cheveux et protéger mes oreille, tout les attributs de ma condition cachés sous ses pans, j'avais sûrement l'air de la parfaite voleuse... ou plutôt du parfait voleur puisque ma haute taille m'avait déjà valu d'être prise pour un homme dans l'obscurité de la fin du jour.

S'aventurer seule le soir dans les rues transverses n'était pas l'idée la plus raisonnable qu'il m'ait été donné d'avoir mais qu'importe, il fallait que j'atteigne cette mansarde au plus vite, sinon je ne me le pardonnerai pas. Rikni puisse me laisser encore quelques miettes de lumière pour que je puisse reconnaître l'endroit qu'on m'avait décrit.

Cela faisait plus d'un quart d'heure que je tournais dans le même coin, passant devant les mêmes clapiers, le même mur ébréché... et rien. Les rues se vidaient peu à peu... et je devais luter contre la peur pour ne pas retourner bien vite d'où je venais.

Je passais à l'angle d'une taverne, ouvrant grand les yeux pour ne pas risquer de rater un mouvement en direction du mur ébréché... quand je suis tombée à la renverse en lâchant un cri de surprise... qui se changea en peur lorsqu'une main s'est abattue sur ma bouche pour me faire taire.

Il me fallut encore un instant pour comprendre que j'avais été heurtée de plein fouet par quelqu'un. Il m'avait tout juste retenu par la manche, par réflexe sans doute. Mais il avait finit par me plaquer contre le mur, prêt d'une fenêtre éclairée de la taverne, refermant une pogne large et caleuse sur mes lèvres. Ma capuche était toujours en place... Mon cœur battait à tout rompre. La lueur tremblotante qui suintait par la fenêtre nous éclairait faiblement. Ses yeux bruns me fixaient, à la fois surpris et incertains. Il était troublé et soufflait comme un boeuf. Un visage bourru. Rustre et sale plus que laid. Je serrais les poings pour ne pas perdre contenance, croquant l'intérieur de ma joue.

Il fit un mouvement pour repartir précipitament... Lorsque le métal de mon large pendentif représentant le symbole de la Trinité. Nos deux regard sont descendus vers ma poitrine en quête de l'origine du reflet... Et la bouche de l'inconnu se tordit en un sourire malsain en vrillant de nouveau son regard sur moi... Un regard emplit de haine cette fois-ci.

Pourtant, le détails qui m'a suivit par la suite jusque dans le monde des rêves, fut la sensation de son indexe caressant discrètement ma joue sans qu'il ne daigne prononcer un mot...

« Rikni est grande. Rikni est sage. Rikni est forte. Louée soit elle. Loués soient ceux qui portent en leur cœur son courage et sa sapience... »

Je répétais les mêmes mots intérieurement en faisant attention que mon visage ne trahisse pas la moindre émotion.

Si la peur avait été une maladie, j'y aurais succombé déjà depuis un moment, mais c'était dans ces moment que le vrai courage apparaît. Les ombres que jetaient les baraques avaient cette furtivité inquiétante des scènes de cauchemar. La seule chose qui me rassurait c'était de savoir que Rikni pouvait être au plus près à cette heure tardive.

Et pourtant je restais de glace, le jaugeant comme si j'étais extérieur à la scène.

Puis tout se mit en mouvement.

Sa main libre vola vers sa ceinture. Je le repoussais violemment. Il a libéré mon visage une seconde. J'ai crié. La main a de nouveau essayé de me bâillonner. J'ai réussit à le mordre. Il a crié. Une violente douleur au ventre me fit tomber à genoux. J'ai sentit sa main me saisit au col, arracher mon capuchon, mes cheveux sombres tombant de chaque côté de mon visage jusqu'au pavé glacé. J'ai juste eu le temps de me retourner avant de voir un poings voler vers mon visage.

Incapable de détourner les yeux, je restais tétanisée, ma bouche refusant obstinément de pousser un autre cri.
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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyDim 12 Fév 2017 - 23:43
Un cri rompit le silence pesant, momentanément perturbé par les pas des miliciens. Dreit pointait du regard dans la direction du son, tel un suricate qui reçut un signal.

"Par ici !" ordonna-t-il à ses deux collègues qui furent comme interloqués par l'interruption soudaine dans leurs songes.

Le trio d'infortune se dirigeait au pas de course à l'instinct dans la nuit. Ils furent momentanémens désorientés, s'arrêtant, essayant d'écouter malgré leur respiration sifflante et leur coeur battant à la chamade. S'en suivit un second cri, bien plus audible cette fois tant la petite troupe de milicien se rapprocher de ce qui était, espéraient-ils, la source des troubles nocturnes que Dreit suspectait.

Après une courte progression, ils finirent par apercevoir, tapi dans l'ombre d'une ruelle, un larron qui mesurait deux bons mètres, plutôt costaud, encapuchonné dans des vêtements sales et qui se semblait pas enclin à se montrer tendre avec ce qui ressemblait à s'y méprendre à une jeune fille.

"OEH !" appela le milicien du fond de son ventre, poussant comme à s'y méprendre un cri de guerre pour interpeler le costaud.

Celui-ci se redressa alors que les collègues d'Hérald allèrent au devant, tirant leur lame au clair, mais se ravisant en observant la stature imposante du loubard. Ca n'était pas plusieurs assassins, mais un seul qui résumait à lui la puissance de deux ou trois hommes. D'où un tel bébé pouvait sortir ? De grâce, Rikni, à quoi joues-tu ? Pourquoi ne pas nous l'envoyer à la milice ? Au lieu de ça, c'est lui qui envoyait, sans sommation les miliciens à la morts, de deux coups de manchette bien placés, ponctués par des cris de rage. Les collègues n'eurent pas le temps de souffrir, tandis que Dreit tirait à son tour son épée au clair, le regard impassible au clair de Lune. Silencieux, il dardait un regard riknien sur son adversaire, tenant le pommeau de son épée courte de sa main gauche, elle-même située sur le bas de sa hanche. Il redressait la lame à hauteur de son genoux, le tranchant légèrement incliné, le tout fléchissant autant que possible sur ses appuis pour adopter une posture stable. Et il approchait à pas mesurés, ne quittant pas l'imposant forcené du regard, maintenant une respiration stable et un sang-froid à toute épreuve.

L'assassin hurla de tout son ventre. Il en avait vraisemblablement après des vies, motivé par on ne sait quelle pulsion, quel dessein. Dreit fut momentanément frappé de stuppeur devant le cri de l'assassin, mais son esprit demeurant vif, il répliqua à son tour par une clâmeur guerrière une clameur riknienne, tandis qu'il s'écarta de l'axe de coupe du géant, in-extremis, venant planter d'un simple geste de hanche gauche, par extension du bras, sa lame dans la gorge du gros. Une frappe. Un coup. Sans fioriture. Telle était la philosophie de son style de guerre qu'il avait fièrement baptisté "Obscurus Caeli Schola", ayant exécuté dans toute sa splendeur la technique "serpentis morsus".

Il retira sa lame d'un geste sec, administrant un violent coup de pied dans le ventre du malandrin. On entendit un bruit sourd, tandis que, comme si cela ne suffisait pas, il s'éclata le crâne sur le sol, laissant moult gerbes de sang teinter le pavé des rues d'une substance noirâtre dans cette nuit sombre.

Il se dirigea ensuite vers cette silhouette tapie dans l'ombre, aux cheveux longs cheveux noirs et à la peau encore plus pâle que la sienne. Il gardait par précaution sa lame ensanglantée pointée en direction de cette sombre inconnue, tandis qu'elle pouvait aisément apercevoir le visage mi-éclairé et impassible de Dreit qui, le menton relevé, jaugeait l'inconnue d'un regard inquisiteur.

Après un court instant, le milicien blond tira un torchon sale qu'il passa le long de sa lame pour épurer autant que possible l'hémoglobine du présumé assassin qui avait rendu son âme à Anür, et rengaina.

"Aide-moi à brûler les cadavres." ordonna-t-il d'un ton sec et tranchant, tandis qu'il fouillait sur ses collègues pour y dénicher des fioles d'alcool à brûler.


Dernière édition par Hérald Dreit le Lun 13 Fév 2017 - 17:41, édité 1 fois
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Margot d'ErgniesPrêtresse
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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyLun 13 Fév 2017 - 2:36
« OEH ! »

Le cri fit sursauter le géant. J'ai vu avec stupeur son poing s’écraser sur le mur près de ma tête... Et repartir immédiatement en sens inverse alors que l'homme retenait un grincement de douleur.

Quant à moi... J'étais toujours incapable de bougée...

Trois hommes firent face à la force de la nature qui avait tenté de... Je ne savais pas ce qu'il aurait tenté et je n'avais pas envie de le savoir. J'ai frémis au premier craquement sec. Puis au second. J'aurais voulu fermer les yeux. Mais rien à faire. Les deux corps se sont brutalement affaissés.

Une sueur froide empoissait mon dos.

La montagne de muscle faisait face au dernier homme debout.

Je devais fuir. J'en avait la certitude. Une conscience intime du fait que je risquais ma vie. Réellement...

Le cri de l'assassin m'a glacé jusqu'aux os.

Je me suis retrouvée debout, sans avoir exactement comment. Sous les pans de ma cape tombant à moité de mes épaules, mes doigts frigorifiés étaient tellement serrés autour du manche de ma miséricorde que mes phalanges en étaient blanchies.

J'ai manqué partir à toute jambe mais la présence du dernier adversaire m'en a dissuadé...

Le cris de l'homme retenti en un funeste contre-point.

Un immonde gargouillement mis fin à l'affrontement...

Fini...

Debout dans le noir, la pointe de ma lame glissait sans que j'y prête attention entre les pans de ma cape pour accrocher la lumière.

Devant moi, le grand homme blond a dégagé sa lame d'un geste brusque. L'immense cadavre s'est écrasé au sol dans un bruit lourd et flasque... Et le survivant se tournait déjà vers moi.

J'ai fait un pas en arrière, mon dos heurtant ce traître de mur. Une fois de plus dos au mur, toujours aussi impassible bien que mes mains se soient mises à tremblées sous mon pardessus.

A peine plus d'une longueur d'épée nous séparait. Au milieu d'un visage pâle et stoïque, deux yeux de glaces m'observaient. Inquisiteurs... presque hautains. Je vrillais mes pupilles dans les siennes, le jaugeant en retour sans aucune gêne. C'était comme... Comme me regarder dans un miroir... sans rien savoir du reflet en question...

Cet homme venait d'exécuter un monstre avec une facilité déconcertante. Il pointait son arme vers moi. Il aurait put me tuer d'un simple geste, mon coutelas aurait fait bien pâle figure... mais malgré sa froideur, je ne sentais aucune agressivité en lui.

Un grand respect, une gratitude presque aussi grande et surtout une certaine curiosité... voilà ce que m'inspirait cet homme ô combien valeureux...

Le regard que nous avons échangé ne dura pourtant pas bien longtemps...

Le léger trouble que j'ai ressenti lorsqu'il braqua de nouveau son regard sur la scène macabre me tira des restes de ma tétanie. J'ai dégluti, repoussant les pans de ma cape pour tenter de rengainer ma miséricorde... sans réel succès.

Alors qu'il fouillait avec dextérité les corps de ses confrères, mes mains tremblaient à un point tel que je n'arrivais même pas à glisser la lame dans son fourreau. Et je regardais avec détachement mes mains tremblées, la gorge serrée et a poitrine creuse, tentant encore et encore de faire ce simple geste sans m'énerver jusqu'à ce que je réussisse enfin. L'homme avait déjà fini de 'fouiller' ses confrères lorsque je fis mon premier pas

Après un bref moment d'hésitation j'expirais doucement et m’agenouillais près du premier corps... un milicien.

L'allongeant un peu plus proprement sur le dos, je fermais dignement ses paupières avant de glisser ma main à ma ceinture pour en tirer une flasque. Versant quelques gouttes du liquide sur ma main, je signais le symbole de la trinité sur le front du défunt en psalmodiant quelques mots de remerciement et d'accompagnement pour son âme.

Dépassant de sa tenu, je remarquait un médaillon, pendant au bout d'une cordelette en cuir. Une médaille gravée... je l’ôtais d'un coup sec avant de me lever pour passer au suivant, accomplissant les mêmes rites rapides et trouvant cette fois ni pendentif, ni bracelet, j’avisai une alliance que je retirais avec mille précautions.

Une fois de plus debout, je jetais un œil vers le monstre... puis me tournais, droite et calme vers celui qui m'avait sûrement sauvé la vie.

« Voulez-vous que j'aille chercher une torche à la taverne ? »
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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyLun 13 Fév 2017 - 22:48
Dreit fut servi. Il palpait les cadavres avec une indifférence à en faire palir les plus humanistes. Fussent-ils ses collègues, fussent-ils ses ennemis, Dreit leur réservait le même sort : brûlés pour qu'ils ne se relèvent sous des airs sanguinolent de fange. Anür s'occuperait du reste. Pourquoi se soucier de retenir leur noms alors que même les grands sont oubliés en ces temps troubles où tout le monde ne pense qu'à sa petite existence et à sa survie, après tout.

Ainsi il avait recueilli les papiers et les armes des trois défunts. Les nettoyant avec le même chiffon qu'il avait utilisé pour sa propre lame, il les rengaina et passa une corde dans les fentes des fourreaux initialement prévues pour y faire passer une ceinture, nouant le tout pour y faire soigneusement passer sur son épaule droite. Après quoi il s'occupa de récupérer les effets personnels les plus importants, papiers et bourses. Les armures, pussent-elles servir après refonte, étaient trop lourdes pour être transportées. Il observa un instant la jeune femme s'adonner à quelque pratique qui lui rappela immédiatement le clergé. Il fronça un instant les sourcils alors qu'elle avait le dos tourné, puis fermant son visage à nouveau. Même si la nuit dissimulait bien des vices, bien des émotions, il ne tenait pas à se trahir de la sorte. Alors qu'elle eût finit ses pratiques religieuses, il s'occupa d'entasser les corps en tâchant de paraître grave et non insultant.

Alors qu'elle demandait si elle devait s'empresser d'aller chercher du feu, Dreit fit un geste de main à la jeune fille pour lui intimer qu'il avait de quoi provoquer des flammes, s'équipant d'un morceau d'acier et d'une arête de silex qui, à force de quelques frictions - et de persévérance dans ce froid humide - il réussit à provoquer quelques étincelles. Les corps prirent feu alors que le blond se redressait, les bras croisés, inspectant les flammes dansantes qui éclairaient un peu plus son visage pourtant sombre au demeurant.

Par chance, le feu, de par son éclat, sa chaleur et son odeur, avait alerté des miliciens qui s'étaient hâtés céans, comprenant la situation qui venait de se produire. Ainsi Dreit tourna la tête vers la jeune fille, toujours les bras croisés.

"Je vais devoir te demander de m'accompagner à la caserne. Il va falloir que je t'interroge. Je compte sur toi pour coopérer, cela nous facilitera la tâche. Tu n'as rien à craindre avec moi, enfant de la Trinité."
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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyMar 14 Fév 2017 - 0:56
Combien de fois depuis le début de toute cette folie avais-je vu brûler des crémations improvisées comme celles-ci ? Purifié les corps par le feu était devenu quelque chose d'habituel pour ceux qui souillaient leur lames de sang... Un rituel macabre...

Hypnotisée par les flammes, les bras toujours serrés autour de mes côtes douloureuses, je prononçais quelques mots pour guider les âmes des défunts, même celle de l'immonde bâtard qui avait été justement puni... Tout en sachant que malgré l'alcool, elles ne brûleraient pas assez longtemps pour réduire le corps en cendre, sûrement était-ce tout juste suffisant pour que les corps ne deviennent pas des œuvres impies... Ces hommes se verraient brûlé une seconde fois avec luis de moyens... Et je n'en éprouvais pas la moindre compassion.

Ni la vision infernale des visages déformés par les flammes. Ni l'odeur mêlée de cuir, de poil et de chair brûlée. Ni même le grésillement ne me faisait frémir. Pas le moindre haut le cœur. Rien.

Seulement trois morts de plus.

Après le rapide hommage, je me tournais vers le survivant qui avait œuvré avec un certain respect. Sur un ce même ton neutre, à la fois sentencieux et détaché qui me valait régulièrement des froncement de sourcils de la part de mes aînés, je lui tendais l'alliance et le pendentif.

« Vous avez oublié ceci. Si vous êtes moitié moins honorable que vous êtes bon escrimeur, vous les rendrez à leur famille avec le reste... »

J'avais envie de poser milles autres questions, et le peu qu'il m'en posait avait de quoi frustrer la haute opinion que j'avais de moi-même, mais quelque chose dans sa posture m'empêchait de trop insister... Il ne fallut pas plus longtemps pour que plusieurs gardes ne débaroulent autour de nous. Certains allèrent immédiatement chercher des sceau d'eau, craignant que le triple bûché ne lèche d'un peu trop près les hautes façades. Puis ce fut le tour, presque aussi rapide, de quelques badauds, surtout ceux sortis de la taverne voisine.

Essayant d'oublier la douleur qui pulsait encore dans de multiples endroits de mon corps, j'en profitais pour prier à voix, basse, les yeux perdu dans les flammes, la lumière du brasier donnant sûrement une teinte étrange à mon visage blafard, lorsque l'homme desserra enfin les lèvres.

Je tournais lentement un visage aussi impassible que le sien... Mais ses mots me firent bien vite retrouver la réalité... Et la prime raison de ma venue. Je ne pouvais pas partir maintenant. C'était hors de toute négociation !

« Je suis navrée mais je vais devoir refuser. Cet homme est arrivé en courant par cette ruelle. Il m'a heurté et s'est mis à me rouer de coups. Je n'ai pas beaucoup plus à en dire. Si vous voulez je pourrais venir à la caserne demain après les Matines, mon fils. » ai-je dis en insistant sur le vouvoiement et la formule consacrée.

Comme souvent lorsque je m'entretenais avec des hommes, je n'avais pas besoin de réellement lever les yeux pour regarder le milicien en face. Ma taille me donnait l'aplomb naturel dont d'autres auraient manqués pour fixer sans gêne les billes de glace de cet homme... Ou c'était peut-être juste moi après tout...

« Je suis ici pour voir quelqu'un et sa vie dépend peut-être de ma diligence. J'espère que vous aurez le bon sens de me laisser aller sans causer de problèmes... »

Dans un cas comme dans l'autre, ce que mes yeux disaient étaient sûrement bien plus tranché que cette demande polie...
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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyMar 14 Fév 2017 - 3:37
Des paroles sans détour. Nettes. Tranchantes. Qui rappelaient avec toute la franchise du monde les écarts grotesques du milicien. Un empaffé pourrait s'émouvoir d'une telle insolence venant de la bouche de ce qui restait, aux yeux des petites gens de Marbrume, une simple enfant désolée torturée par les épreuves de la vie. Il pourrait la gifler sur le champ pour son insolence, la rouer de coups s'il était encore plus véreux ou simplement au sang chaud. Et plus si affinités ; on n'était plus sans connaître certaines anecdotes relatant des écarts de la milice ces jours-ci.

Ainsi le milicien avait décroisé les bras et s'était tourné vers la jeune fille pour lui faire face. On aurait dit que Rikni l'avait mis une fois de plus à l'épreuve par la malice. Lui qui s'était instinctivement mis à la tutoyer compte tenu des circonstances, voilà qu'elle lui rappelait qui ils étaient tous les deux, et quels étaient les rapports à entretenir. Les mots dénués de toute fioriture de cette jeune dévote, qui sans en douter auraient pu être bien plus crus, ne laissait plus aucun doute quant à ses affinités particulière avec la déesse de la malice, de la ruse, du ciel, de la nuit, de la guerre. Instinctivement, il voyait en elle son portrait craché, si bien qu'il n'était sûrement pas aussi porteur d'une conscience aussi lourde à cet âge.

L'air froid, ne haussant pas même un sourcil, gardant toute contenance tant il demeurait maître de ses émotions, Dreit ne se laissa pas décontenancer. Lui n'était certainement pas aussi religieusement dévoué que cette pauvre fille secouée, mais lui était guerrier. Lui était escrimeur. Lui était homme d'épée. L'air grave, il tendit une main gantée, dont le métal froid effleurait naturellement le dos de la main de la jeune fille, tandis qu'il relevait les bijoux qu'il n'avait pu prélever sur les cadavres.

"Veuillez accepter mes excuses pour mon impertinence, Mère. Je vous attendrai de pied ferme, demain à la caderne. Demandez Hérald Dreit."

Ni plus ni moins, car s'il demeurait homme honorable en apparence, il restait un milicien qui se devait de faire montre d'autorité. Ainsi employait-il, par-delà le vouvoiement, un impératif ferme et déterminé. Tandis qu'il s'imprégnait soigneusement du visage de la jeune fille sur ses rétines, il se recula légèrement et s'accorda une révérence polie, avant de conclure comme il le faisait à toute personne méritant son estime,

"Que la Trinité vous garde."

Sans demander son reste, il tourna les talons et le reflet de sa silhouette disparu bientôt des flammes timides qui avaient été maîtrisées, tandis qu'on s'occupait de se débarrasser des corps calcinés en vue de les incinérer dans un futur proche pour éviter qu'il n'occasionne toute gêne aux habitants de Marbrume.

---


La nuit avait été courte. Certes le milicien était retourné au chevet de sa sœur malade plus tôt en reportant un interrogatoire certain - peut-être plus tard, en fait, à cause des tragiques évènements de la veille - mais il lui fallait s'affubler d'une ou deux gifles pour retrouver un éveil vif. Pas de repos pour les braves. Surtout en ces temps. Ainsi, naviguant dans les deux pièces de ses petits appartements, parfois il secouait la tête, claquait des doigts, essayant de ne pas finir l'esprit brumeux à regarder bêtement le sol avec un air endormi qui lui couterait la vie en temps plus pressant. Ainsi il revêtit aussi vite que possible son armure, s'attardant néanmoins sur une toilette appliquée, se massant le cuir chevelu d'une laque au doux parfum d'oranger. Ceci sans oublier le baiser d'Adieu comme il en avait fait mille à sa sœur encore dormante, comme s'il ne reviendrait jamais d'un incident quelconque lié à l'exercice de ses fonctions... Mais même si la vie d'un milicien était plus exposée que la vie d'un autre, ces temps étaient somme toute dangereux.

Dreit était consciencieux à sa manière. Il avait l'habitude de se lever un peu plus tôt qu'à la normale. Certains oiseaux matinaux pouvaient l'apercevoir sur des sentiers voisins de la caserne militaire de Marbrume à s'entraîner en solitaire, d'une façon un peu étrange et un peu particulière. Il répétait maintes fois le serpentis morcus qu'il avait exécuté hier, ôtant impunément la vie à ce curieux individu comme il n'en avait jamais vu. A vrai dire c'était le premier non milicien à s'être montré aussi dangereux en sa présence, avec des airs rikniens qui lui avaient glacé le sang. Il s'en souvenait. Un faux mouvement et c'était peut-être Dreit qui aurait pu y passer à la place de cet humain tourmenté, à qui il n'avait laissé aucune chance, à qui il n'avait infligé aucune souffrance. Telle était l'essence de du serpentis morcus, qui se voulait aller droit à la gorge de la cible, sans fioriture. Parfois il exécutait d'autres mouvements qui ressemblaient à s'y méprendre à cette estoque de profil motivée par une hanche rapide et puissante, mais qui comportaient d'autres séquences, d'autres jeux de pieds, d'autres enchaînements compte tenu de certaines situations. Les cris de guerre étaient remplacés par de silencieuses expirations et un regard acéré.

Le soleil hivernal pointait timidement le bout de son nez, laissant son reflet embraser la cité de Marbrume par-dessus ses remparts, teintant de mille éclats dorés le gel matinal du peu d'herbage qui se trouvait aux alentours. Le grand blond pâle se hâta vers la caserne, où cette fois les entraînements différaient et semblaient plus pragmatiques que de simples estoques. Il apprenait à tenir tête à certains partenaires, la lame rangée avec pour seul moyen de défense ses poings, jouant de son endurance pour résister le plus longtemps possible à une agression, se déplaçant aussi intelligemment que possible pour éviter des attaques plutôt que de les bloquer. On n'était jamais trop prédisposé à un incident qui nécessitait d'engager sa vie dans le conflit.

La pression retombait alors qu'il disposait d'un répit moindre. Débouchonnant sa gourde pour se rafraîchir le gosier, il la referma tout en balayant machinalement la cour de la caserne, se rappelant de cette jeune prêtresse qu'il attendait.
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Margot d'ErgniesPrêtresse
Margot d'Ergnies



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyMar 14 Fév 2017 - 17:41
Je hochais la tête, toujours droite, reconnaissante.

« Que Rikni soutienne toujours votre bras. »

Et sans attendre, je rabattais mon capuchon et pressait de nouveau le pas. Si je m'arrêtais un instant j'étais sûre de rester paralysée par ce qui venait de se produire...

Heureusement, je parvins enfin à trouver ce que je cherchais : le trou dans la cloison obstrué par une planche. Peinte. Prenant mon courage à deux main, je me glissais dans le vieux cellier par cette entrée dérobée. L'odeur de renfermé était à peine supportable... et une respiration sifflante fut le seul accueil que j'obtins en m'approchant. Je me couvrais le nez de ma manche pour que les larmes ne me viennent pas aux yeux sous l'assaut de la puanteur.

La pièce était fondue dans l'obscurité, seul les rais de lumières qui filtraient par un pan du toi effondré offrait un chiche éclairage.

« Gareth ? »

Pas de réponse.

Je m'enfonçais à tâtons... Pour découvrir le garçonnet suant à grosse gouttes... la main qui trônait sur son torse déformée et amputée de plusieurs doigts comme il était parfois d'usage pour les voleurs... Je posais rapidement mon front contre le sien.

Brûlant aurait été un euphémisme...

« Tient bon, je vais m'occuper de toi maintenant... Courrage... Rikni puisse-tu lui prêter ton endurance. »

La nuit allait être longue...




Au petit matin, je m'étais présenté avec les premiers rayons du soleil, comme convenu... Je n'étais ni changée, ni même peignée et n'avait eu le temps que d'une toilette extrêmement sommaire. Mes cheveux grossièrement rassemblés en un chignons approximatif, mes yeux profondément cernés par la fatigue, le pendentif de la trinité, grand comme ma paume, bien visible sur ma poitrine dans la lumière du jour, Blanche m'avait fait remarqué que j'étais encore plus pâle que d'ordinaire... Et que j'avais selon ses dire : une tête a faire peur. Si on me donnait facilement la vingtaine tant j'avais été vieilli par les derniers mois, je n'osais imaginer ce que cela donnait ce matin là...

Sur les terrains bordant la caserne, les entraînements étaient déjà entamés. Je les observais un court instant d'un œil appréciateur. Depuis toujours je trouvais une sorte de beauté viril dans ce genre de démonstration... un plaisir coupable en somme.

J'allais m'avancer vers le bâtiment en lui-même lorsque je remarquais exactement la personne que j'étais venu voir.

Son regard se posa sur moi, presque par hasard alors qu'il balayait la cour des yeux. Je le saluais d'un signe de tête en approchant à pas vifs.

« Bonjour Sire. Je suis venue... et bien comme convenu. »

Pau au fait de la manière dont il fallait me présenter en de telles circonstance, j'allais tendre une main presque avenante lorsque j'ai noté les incrustations de sang que je n'avais pas réussi à faire partir autour de mes ongles, coupant net le geste pour une courte et respectueuse révérence.


Dernière édition par Margot d'Ergnies le Mer 15 Fév 2017 - 0:53, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyMar 14 Fév 2017 - 22:42
Le blond s'était immédiatement mis en tête de nettoyer l'espace sur lequel il s'était entraîné avait ardeur ; avait piétiné avec énergie. Mais la jeune prêtresse s'était montrée, et il n'était pas difficile de l'apercevoir entre les miliciens matinaux qui s'exerçaient, s'interrompant quelques instants pour suivre la jeune fille du regard et, voyant qu'elle avançait vers Dreit. Il s'empressa d'agglutiner la poussière et les feuilles mortes pour les mettre en évidence, reposant son balais et se tenant un peu plus droit chaque seconde alors que la jeune fille approchait. Malgré son air de revenue d'entre les morts, elle gardait une certaine prestance, une certaine aura que le grand blond pâle ne s'expliquait. Mais il la ressentait, d'autant plus suite à leur dernière conversation.

Il perçut la révérence ravisée mais n'en tint rigueur; lui se contentait d'une courbette, le dos droit, le regard légèrement baissé en guise de respect, mais demeurant néanmoins prestant et militaire dans ses manières.

"Bonjour, Mère. Si vous voulez bien vous donner la peine de me suivre..."

Sur ces mots, il pivota prestemment les talons et marcha en direction d'un couloir qui s'étendait dans un préau, puis dans l'enceinte de la caserne, où quelques autres collègues miliciens allaient et venaient, plus ou moins pressés. Dreit s'arrêta devant une porte entre-ouverte, où un milicien dormait sur son tabouret les bras croisés. Dreit le notifia d'un léger coup de pied au niveau du mollet du mollusque qui se réveilla en sursautant, manquant par la même de se rétamer devant la Prêtresse.

"Bonjour, soldat. Je vais auditionner un témoin. Fais en sorte qu'elle ne manque de rien le temps que je m'absente." Il regarda par-dessus son épaule à l'attention de la jeune fille blafarde. "Je n'en ai pas pour longtemps."

Il laissa son hôte aux soins du milicien qui émergeait de son roupillon, tandis qu'il se dirigea plus loin dans les couloirs, pressant le pas. Il fit un détour par la salle commune où il tira un plateau de bois, allant par la suite chercher deux verres propres et deux récipients qu'il remplit respectivement d'eau froide et d'eau chaude, se redressant, ouvrant le placard pour y trouver des sachets de thé. Enfin, il se dirigea vers son casier, duquel il prit méticuleusement son nécessaire d'écriture et quelques feuilles viellies, y apportant une certaine délicatesse alors qu'il les disposait sur le plâteau, pour faire d'une pierre deux coups. Car si Hérald se permettait parfois de donner des ordres l'air hautain à ses collègues, il demeurait quand même un milicien qui n'était jamais mieux servi que par soi-même.

Il revint là où il avait laissé Margot, entrant dans la salle qui était en fait une simple salle d'interrogatoire où les miliciens avaient l'habitude de recevoir des détenus plus que des témoins. On pouvait le voir sur les rebords de la table, rougis, sans doute témoins de quelques scènes de violence passée. Une fenêtre à barreaux laissait passer quelques timides rayons de soleils dans laquelle dansait mille particules de poussières. Il disposait soigneusement ses affaires, commençant à se servir du thé et à attendre que Margot soit disposée à un interrogatoire tout à fait normal et procédurier.

Spoiler:
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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyMer 15 Fév 2017 - 1:39
Je le suivis sans un mot. Les lieux étaient loin de m'être inconnus mais la raison formelle de sa venue était bien moins habituelle, aussi calquais-je doucement mon pas sur le sien... M'apercevant au passage que je connaissais toujours ni son grade, ni son nom... Et que j'aurais été bien en peine de ne lui demander dans de telles circonstances.

A l'intérieur la luminosité baissait drastiquement. Le comportement de mon hôte à l'encontre d'un de ses frères d'arme m'indiqua que s'il n'était pas le moins gradé, il n'était certainement pas non plus le moins estimé des miliciens... Quoi qu'il y avait autant de hargne et de méfiance dans le regard de celui qu'il venait de sortir de sa sieste qu'il y aurait pu avoir de respect...

« Je vous attends. » avais-je simplement répondu avant de suivre le planton qui m'avait été désigné... C'était à se demander si ce n'était pas moi qui était suspectée d'avoir tuer cet homme...

La salle était... Exiguë et.. Intimidante ? Ou du moins l'était elle devenu avec le temps, le sol faisant montre d'une propreté toute relative et la table... passons sur les détails désagréables. Deux pas suffirent à me faire longer la table, ma robe gris sombre ondulant sur ma silhouette aussi maigre que haute. Je laissais un instant courir mes doigts sur un coin embouti, frissonnant légèrement, avant de me poster, debout, près de la fenêtre, l'épaule appuyée contre le mur pour regarder à l'extérieur à travers les barreaux. Le planton milicien avait bien demander s'il pouvait faire quelque chose, non sans m'observer d'une façon très... observatrice... mais je le détrompait d'un geste de la main et d'un refus à la fois froid et courtois sans poser même une fois mon regard sur lui.

A l'extérieur, le soleil était encore si bas que les ombres jetées par les bâtiments engloutissaient presque tout le sol, donnant un découpage étrange de l'image ciblée des formes noires des barreaux à contre jour. Tout en était très tranchées, la noirceur semblaient se répandre avec le jour plutôt que de se rétracter. Un effet d'optique qui me fit venir l'ombre d'un sourire.

Puis on ouvrit de nouveau la porte. Je tournais vaguement la tête pour m'informer avant de me redresser pour venir me recentrer vers la table en voyant de qui il s'agissait, mon masque impassible de nouveau sans craquelure.

Sans un mot, mon hôte disposait tout un attirail. Eau. Thé. Verre. Matériel d'écriture... Matériel d'écriture ? Alors il était en effet bien plus qu'un milicien de base.

« Juste de l'eau pour moi, merci. »

Je m’assaillais en face de lui, croisant les mains sur le rebord de... en fait non. Elle seraient très bien sur mes genoux étant donné leur état déplorable... Ce que j’aurai aimé pouvoir prendre quelques instant de plus pour me les lacer correctement. Mais ce n'était ni le moment ni l'endroit...

« Puis-je vous poser une question avant que nous commencions ? »
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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyMer 15 Fév 2017 - 11:50
"Vous venez de le faire."

Un petit sourire sur le visage de Dreit, détendant légèrement l'atmosphère lugubre de la petite pièce, tandis qu'il remplissait respectivement un verre d'eau froide et un verre d'eau chaude, posant ce premier près de la jeune prêtresse.

"Trois sont morts hier. D'abord une présupposée victime de ce même tueur à qui j'ai ôté la vie, ensuite deux de mes collègues. Trois vies pour une, croyez-moi, je ne vois pas ce genre d'incident tous les jours et encore moins toutes les nuits."

Pensif, Dreit se rassit, trempant un sachet de thé dans de l'eau chaude, le regard pensif sur son breuvage.

"J'ai pris le temps de regarder ce que j'avais pu récupérer des corps. Outre les effets personnels que je réstituerai soit aux familles, soit à la caserne en ce qui concerne feu mes collègues... J'ai remarqué quelque chose d'intéressant qui ne m'aurait pas alerté si vous ne m'aviez pas fait comprendre d'où vous veniez, Mère..."

Il redressa machinalement la tête, plantant son regard dans celui de la jeune fille pâle et fatiguée. Il relevait légèrement le menton comme pour se donner un air inquisiteur, essayant un peu plus de percer à jour l'esprit de cette jeune fille. Des comme elle non plus, on n'en voyait plus beaucoup. Elle l'avais repris à l'ordre hier, et elle se montrait incroyablement maître d'elle-même. De quoi laisser le milicien perplexe. Suspicieux. Captivé. Il s'accouda, se pencha légèrement, comme s'il allait faire une révélation des plus accablante à son hôte.

"Père Fogiel... C'est le nom du pauvre homme que nous avons retrouvé mort dans une rue voisine avant que je ne me mette sur la piste de votre agresseur. Peut-être le connaissiez-vous ? Je ne me suis pas encore renseigné sur son état civil, il me faut des permissions qui prennent des jours voire des semaines avant que je puisse procéder."

Le milicien se redressa, puis tira le sachet de thé qu'il reposa sur le plâteau, agrippant son verre d'une poigne délicate, ses gants absorbant la châleur dégagée par le breuvage brûlant et fumant qui venait se liquéfier sur son visage. Une sensation agréable dont il profita un instant, avant de boire une timide gorgée, silencieux.

"Vous auriez pu être la prochaine, ce qui aurait fait deux gens du clergé de décédés ce soir-là. Avouez que le schéma, s'il n'est pas lié à un pur hasard, est quelque peu... Troublant. Un ancien du temple qui voudrait se venger ? Un hérétique ?"

Il haussa les épaules.

"Je m'égare. Quelle était votre vraie question, Mère...?"
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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyMer 15 Fév 2017 - 20:29
La remarque du milicien m'arracha un demi éclat de rire. Une brève lueur amusée sur un visage froid. Je garderai donc mes questions pour plus tard. Et si je les oubliai et bien… non aucune chance. Pourtant, voilà un exploit que les révélations du milicien réussirent réussirent à atteindre…

Ce que sous-entendaient les mots de cet homme avait de quoi me glacer les sangs. Plus sérieuse que jamais, immobile comme une statue de pierre, toute mon attention était tendue vers chaque bribe d'information qu'on me laissait entrevoir. Un tueur de prêtres… Certes le Culte ne rayonnait comme au plus haut de son influence, mais de la a imaginer que des hommes pouvaient commencer à s'en prendre délibérément à des prêtres…

Calmons nous. Pour l'heure il ne s'agissait que d'un homme, pas d'un groupe. Et il n'avait pas l'air particulièrement sain d'esprit. Après tout certains déments étaient toujours prompt à commettre l’innommable, qu'il s'agisse d'enfants, de femme ou de gens du Temple.

« Vous ne vous égarez pas. Comparée à cela, ma question peut attendre… Père Fogiel... »

Le nom en lui même ne m'était pas inconnu mais j’aurai été bien en peine de dire ou et quand je l'avait entendu… Une chose était sûr, il ne faisait pas parti de ceux qui vivaient au temple. Il devait probablement avoir une demeure et une salle de prière dans un autre quartier pour servir et aider les habitants au plus proche… A moins qu'il n'officie qu'en certaines circonstances ?

Je prenais le temps de la réflexion, mes doigts jouant distraitement sur le rebord du godet comme d'autre auraient tordus leur doigts sans y prêter attention. Après une gorgée salvatrice, je reportais mon attention sur mon hôte.

« Je peux vous certifier qu'il ne vit pas au Temple. J'ai l'impression d'avoir déjà entendu ce nom mais impossible de me souvenir où avec précision… » Je reposait le verre sur la table sans le quitter des yeux. « Si cela peut faire avancer l'enquête, je peux chercher dans les archives d'initiation. Les élévations au rang de prêtre étaient généralement envoyées au Saint-Siège, mais depuis la Fange certains d'entre nous se sont attelés à reconstituer les archives pour que nous puissions garder un compte de toutes les personnes que nous devons faire vivre… Malheureusement je ne vous cache pas que plusieurs d'entre nous se sont défroqués et que, par conséquent, nous n'avons pas nécessairement trace des officiants qui n'ont pas donné signe de vie depuis septembre. »

Les détails étaient un poil plus compliqué que cela, mais les grandes lignes feraient l'affaire.

« Quant à savoir qui voudrait voir mort n'importe quel prêtre sans distinction… Il est malheureux mais nécessaire de considérer que certains prêtres qui n'avaient rien avant d'entré dans les ordres y sont restés pour de bas contingents matériels tout en cachant une certaine rancune… Cependant je n'a jamais vu ou entendu parlé d'un prêtre qui approchait de près ou de loin la carrure de l'homme qui était présent cette nuit. Je suppose que n'importe lequel de ces gens qui cherchent des coupables à la Fange au lieu de chercher des solutions aurait put en arriver à de telles extrémités. »

Un certain dédain pouvait s'entendre. Bien loin de l'accent respectueux que j'avais eu jusque là pour chacune des phrases prononcées face à cet homme. Je m'accordait une autre gorgée pour faire passer ce goût amer. La façade détachée n'était que ce qu'elle était et si elle pouvait me protéger de bien des choses, évoquer le passage de la veille me mettais dans un état fébrile assez désagréable… sans parler du fait que plusieurs noms de prêtres vacillants me seraient venus sans mal au lèvre et que chacun d'eux me faisait serrer un peu plus les mâchoire de dégoût.

Mais ce n'était pas le moment de s'épancher, ce qui de plus n'aurait pas servit à grand-chose…

« Mais pour en revenir à ma question. Le mouvement que vous avez utilisé… Où l'avez-vous appris ? »

Une lueur intrigué brillait dans mon regard, seule indice de la curiosité qui me dévorait les entrailles et me permettait de passer outre le malaise que toute cette histoire provoquait.
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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyJeu 16 Fév 2017 - 19:27
Le milicien commençait à tremper sa plume d'oie dans le liquide visqueux et noirâtre. Sous ses faux airs d'intellectuel, on aurait pu croire qu'il était le sténographe numéro un de la milice, tant il parcourait d'un geste vif et rapide de sa main l'étendue du papier veilli, griffonnant quelques notes éparses, illustrant les dires de la jeune fille à l'aide de schémas obscurs dont seul lui pouvait comprendre ce qu'il en retournait vraiment.

Tantôt visionnant ses notes, tantôt plantant son regard dans celui de la jeune fille, il marquait parfois quelques pauses, hochant la tête comme pour approuver. Il retroussait légèrement les lèvres, comme appréciant la manière qu'avait la prêtresse de s'exprimer. Il lui arriva même de plisser le front l'espace d'une seconde, comme surpris par la clarté des propos de son hôte qui s'exprimait sans ambages. Il s'arrêta, marquant un silence de plomb, songeur, le regard perdu sur ses notes. Il croisait les bras. Redressait le menton, regardant le plafond. Un point de fuite dans cet espace confiné. Une idée.

"Le meurtrier ne possédait rien sur lui qui ne trahisse sa provenance. Nul doute qu'il eût s'agit d'attaques préméditées. Et peut-être n'agit-il pas seul. Je redoublerais ainsi d'attention à votre place. Car si la Trinité m'a conduit à vous ce soir-là, peut-être choisirait-elle de ne pas le faire ultérieurement. Ce n'est pas tous les jours que la milice peut se targuer de redorer son blason ; on entend davantage d'histoires de méfaits, de violence et de comportement brutaux venant de nos hommes que d'anecdotes qui parlent d'un véritable service, d'un devoir rendu à Marbrume."

Il s'interrompit, continuant de prendre des notes lorsqu'il s'arrêta net lorsque son interlocutrice lui posa une question qu'on ne lui avait jamais posée auparavant. Il se remémorait la scène d'hier soir. Pour le commun des mortels, il s'était simplement battu d'une estoque et l'on pensait qu'il s'agissait d'un mouvemen risqué, hasardeux et tellement simple à reproduire. Mais elle, elle qui en plus malgré l'urgence de la situation et la nuit avait émis ne serait-ce que le moindre soupçon de cette attaque. Il redressait lentement la tête, le regard acéré, perplexe, reposant la plume dans son encrier, s'adossant, les bras croisés.

"J'ai appris ce mouvement auprès de Ronan Murinus, feu chef de l'arrière ban du Croc d'Ebène, que vous connaissez possiblement sous le nom insultant des "Loups de Langres". Il faisait partie de la seixième génération d'une école d'escrime nommée Grandis Vacui Schola. J'ai eu la chance, avec la plupart de mes anciens frères d'arme, d'apprendre l'escrime et les arts rikniens sous son aile. Serpentis Morsus est le commencement du Curriculum des techniques enseignées. J'ai décidé de la reprendre dans mon propre style d'escrime, Obscurus Caelis Schola. Le nom se rapproche un peu plus de la divinité avec laquelle vous et moi sommes en affinité, n'est-ce pas ? Je veux parler de Rikni."

Il se redressa, plantant à nouveau un regard profond dans celui de la prêtresse.

"Venons-en aux faits. Je ne sais toujours pas qui vous êtes, Mère. J'aurai besoin de vous me parliez un peu vous, et que vous n'omettiez aucun détail sur votre état civil. Après quoi je pourrai consigner un rapport et faire avancer une enquête pour laquelle je me battrai corps et âme pour faire la lumière sur ce qu'il s'est réellement passé. Lorsque nous en aurons fini, j'irai écrire mon rapport et je me rendrai faire mes devoirs de piété au temple lorsque le soleil sera à son zénith. J'espère vous y croiser."

Sur ces paroles, il reprit sa plume et se préparait à noter tout ce que la prêtresse pourrait lui dire.
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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyVen 17 Fév 2017 - 0:08
J’acquiesçais à ses remarques... mais un arrière goût désagréable me collait à la langue en entendant ses paroles... Qui étaient vrai par ailleurs. Ce que j'avais vu la veille n'était pas le seul acte de bravoure auquel j'avais assisté de la part de la milice et mon opinion était faite bien avait cela, que ce soit sur les troupes internes ou externes.

« Ce n'est pas parce que certains d'entre vous profite de leur pouvoir que l'organisation en elle-même est a jetée, vous l'avez prouvez hier soir et nombreux sont ceux qui croient encore l'efficacité de la milice, même si elle gagnerait à être plus stricte envers ses éléments. Vous avez cependant raison, prendre des risques inutiles serait stupide. Je préviendrais mes confrères et consœurs, mais n'attendez pas que nous restions cloîtrés pour notre propre sécurité en des temps pareils. »

Il y avait des proportions à garder mais le soutient que je témoignais était on ne pouvait plus sincère et le même comportement franc et simple guidait mes paroles par la suite.

Je n'étais pas et je n'avais jamais été une experte dans le maniement des armes. Lors de mon initiation on m'avait mis entre les mains une miséricorde en mon montrant globalement par quel bout la tenir... et cela se résumait à peut près à ma pratique du combat. Mais observer, voilà une sciences dans laquelle j'excellais. Observer les gens, les choses et les actes ou observer les augures, cela n'était pas bien différent. Observer le monde pour comprendre son fonctionnement et peut-être trouver les causes et les effets de bien des choses... voilà qui faisait d'après moi, parti du devoir contemplatif des religieux. A quoi bon prêcher la foi sans être attentif à l’œuvre de dieux et à tous les messages qu'ils y laissaient pousser ?

En l’occurrence, je n'avais même pas pensé que ce détail soit extraordinaire à relever... Mais ma question semblait faire mouche... Le pas qu'avait fait cet homme la veille était totalement maîtrisé... Le Grand Vide. Le Ciel Obscur. D'autres traductions de l'ancienne langue aurait put donner des tournures plus travaillées et sûrement plus révélatrices que les premiers mots à mots mais ce changement était déjà révélateur. Mais voilà qu'il lui avouait non seulement d'où il venait, mais également que ce n'était là que le premier pas d'un art du combat bien plus poussé... A quel point cet homme pouvait se montrer dévastateur...

Sa simple attention, légèrement plus tendue qu'un peu plus tôt alors qu'il parlait de meurtre et de dépravés, suffisait à me donner l'impression diffuse que la réponse revêtait bien plus d'importance que ce qu'il voulait bien laisser paraître... Et bien que je connaisse pas les personnes et ordres qu'il citait plus que de nom au détour d'un ouvrage, je ne manquerais certainement pas de faire quelques discrètes recherches sur la question.

Je soutint son regard acéré, pendue à ses lèvres sans le laisser paraître. Instinctivement, la moindre trace d'émotion s'était effacée de mon visage, rejetée derrière ma carapace de glace habituelle par l'intensité de ces yeux qui me scrutaient avec un je ne savais quoi d'interloqué...

Troublée, je ne trouvais rien à répondre sur l'instant, aussi reprit-il en vrillant d'autant plus ses yeux pâles dans les miens. Je dégluti avant de trouver le calme intérieur dont j'avais besoin pour reprendre contenance et aplomb.

« Donnez moi votre nom, je vous donnerai le mien » demandais-je avec un petit sourire pour reprendre la conversation sur le ton avec lequel elle avait commencé, comme si cette aparté n'avait pas eu lieu... Et accessoirement, rappelant que je ne connaissais pas non plus le nom de celui qui me faisait face.

Une fois que j'eus obtenu l'une des réponses que j'attendais, je ne me fis pas plus priée pour entonner la litanie qui résumait ma vie en quelques phrases de la façon la plus claire et concise possible.

« Je suis née Margot d'Ergnies, ce qui fait de moi l'un des quatre survivants de la lignée des banneret d'Ergnies. Je vie et j'étudie au temple depuis mes huit ans. Mon grand-père Sigismond d'Ergnies est lui aussi prêtre de la trinité. Mon jeune frère, Robin, et mon grand-oncle, Arthur, vivent sur l'Esplanade. Je n'ai pas d'autre famille. Je ne suis pas mariée. Je n'ai aucun enfant. Mes proches se résument aux gens de foi. Et je n'ai pas plus d'amant qui aurait put me vouloir du mal. Ai-je omis quelque chose ? »
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Hérald Dreit



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un cri court dans la nuit   [Terminé] Un cri court dans la nuit EmptyVen 17 Fév 2017 - 13:42
"Hérald Dreit, simple larron de la milice intérieure." répondit-il au quart de tour avec un petit sourire amusé, tandis qu'il reprit son humeur froide tandis qu'il notait rapidement tout ce que la prêtresse qui répondait au doux nom de Margot d'Ergnies pouvait lui dire. Il réfléchit un instant ; la particule et le nom qu'elle précédait formaient un tout qui éclairaient l'esprit de Dreit, comme s'il avait dû entendre parler de la réputation de cette lignée, elle aussi visiblement bouleversée par les maux récents, la Fange n'ayant épargné personne. Un grand-père, un frère et un grand-oncle. Il mit en évidence leurs noms sur ses notes, dont la feuille devenait noircie de divers anotations et divers symboles de plus en plus grossiers et vagues au fur et à mesure qu'il se relisait. Il était temps de consigner tout cela.

"C'est parfait. Je vais pouvoir écrire mon rapport pour officialiser la mort de mes deux collègues et ainsi laisser l'enquête prendre la poussière dans les archives. Il est peu probable que nous nous attardions sur le cas d'un assassin dont nous n'avons su récupérer le moindre indice sur lui, si ce n'est son arme. Et personne ne me laissera assez de marge de manoeuvre pour retourner la ville entière à la recherche du forgeron ou du fournisseur qui lui aurait prodigué cette vulgaire machette. Le métal est un peu comme l'argent ; il n'a pas d'odeur, ou très peu. Enfin, je vous libère, mon collègue va vous raccompagner. Je dois m'occuper de la besogne administrative avant de me recueillir au Temple de la Trinité. Puisse-t-elle vous garder jusqu'à notre prochaine rencontre."

Sans un mot de plus, il rassembla ses brouillons, documents et termina d'une traite son thé tiède tandis qu'il débarrassa entièrement la table, intimant au garde qui s'était presque rendormi de raccompagner Mère d'Ergnies hors de la caserne. Le reste de la matinée fut sans encombre, Dreit profitant d'un calme relatif dans la salle commune pour synthétiser un rapport qu'il alla glisser plus tard sous la porte du sergent Tim Hagine. Il évita ainsi la foule de miliciens qui avait investi les lieux pour se sustenter, profitant de l'heure creuse marquée par le zénith pour se rendre au Temple de la Trinité. Le milicien demeurait silencieux, connaissant les lieux, saluant respectueusement les prêtres et prêtresses qu'il croisait parmi les allées et couloirs du temple, jusqu'à ce rendre dans une enceinte sombre, surplombée par une magnifique statue à l'effigie de la grande Rikni. Prenant place parmi les bancs presque vide de fidèles venus se confesser, il imita leur posture, joignant ses mains, fermant les yeux, faisant le vide dans son esprit.

Il se passa une heure. Les fidèles étaient quelque peu plus nombreux, mais les bancs restaient relativement innocupés en cette journée d'hiver. Le grand prêtre de Rikni, qui circulait dans l'allée remontant les bancs, masquait autant que possible une expression déçue à l'idée que la déesse de la guerre n'ait pas le succès escompté aujourd'hui.

"Bonjour, fidèles," commença-t-il, s'exprimant d'un ton ferme dont la détermination laissait cependant à désirer. "L'un de vous souhaite-t-il mener le choeur aujourd'hui ? Mh ? Personne ?"

Dreit se leva après un court instant, émergeant des rangs et venant se placer devant les fidèles qui à leur tour se levèrent. Tous mirent la main droite sur le coeur, attendant que le grand prêtre de Rikni prenne place au face de l'orgue. Une note résonna dans l'enceinte et, bientôt, Dreit chantait, fermant les yeux, déterminé à porter sa voix pour amener le choeur à réciter les paroles en hommage à la déesse de la guerre.

"La victoire, à tout prix.
Dans notre cor de guerre,
Retentit la clameur de Rikni.
Affutons notre fer,
Préparés pour la bataille,
Que rien ne nous assaille.

Tremblez les déchus de la Trinité,
Hérétiques, bandits et athées,
Tous les peuples de Langres se lèvent,
vivants, vous n'aurez nulle trêve.

La belle Rikni nous bénit,
Dressons-nous, soyons forts,
au devant des ennemis,
pourfendons et semons la mort,
au devant des ennemis,
pourfendons et semons la mort.

Au devant des conflits,
Nous devrons nous avancer,
Sans faire cas, cas de notre vie.
Nous trancherons sans pitié,
laissant le sang de nos ennemis
empreindre une terre cramoisie.

Parents, vous nous avez élevés,
La magnifique Rikni vous bénit,
Notre existence pour la divinité,
Nous lui confions notre vie.

La belle Rikni nous bénit,
Dressons-nous, soyons forts,
au devant des ennemis,
pourfendons et semons la mort,
au devant des ennemis,
pourfendons et semons la mort.

Lorsque la Trinité,
de sa nouvelle égide
nous procure la prospérité.
Nous demeurons impavides,
et la paix nous garderons,
et les Langres nous protègerons.

Rikni nous garde depuis le Ciel,
veillant dans la nuit sur la Terre,
restons à l'écoute de son appel,
alors nous repartirons en guerre.

La belle Rikni nous bénit,
Dressons-nous, soyons forts,
au devant des ennemis,
pourfendons et semons la mort,
au devant des ennemis,
pourfendons et semons la mort."

Le chant de Dreit fit place à un silence de plomb, tandis que les fidèles partirent sans demander leur reste. Le grand prêtre, quant à lui, remercia le milicien d'un bref signe de tête avant de retourner à sa besogne. Comme s'il ne s'était rien passé. Comme si ce rituel n'avait servi à rien.
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