Le retour à la maison n'est parfois pas de tout repos [PV Kira & Victor]

Fangeux, meurtres, renégats. Où sommes nous tombés ? Se demande Alexandre. Pourquoi donc l’humanité ne se décide pas à s’entraider, s’unir ?! Pourquoi doit-elle toujours s’entredéchirer, telle était la question du Vicomte qui semblait dégouté de tout cela. Même si il avait voulu voir le Duc mort pour ce qu’il avait commis au début de la Fange, jamais il n’aurait pensé que c’était de la main même des miliciens … des hommes avec peu d’honneur … c’est ce que Alexandre deviendrait si il commettait ou essayer de commettre ce délit ? Un homme en disgrâce ?

« Oui ! Mais en mémoire d’Alice et de Claire ! » Répondit une petite voix à l’intérieur de sa tête.

Non … Alexandre ne voulait pas cela, il avait eu du mal à retrouver son fils. Son bâtard de fils, Joris. Il lui avait envoyé son poing dans le nez et depuis, il avait disparu. Disparu ? Nooon, Son ancien homme de confiance, Gondemar de Rossal qui avait censé avoir disparu lui aussi (bien que la moitié de son visage, lui ait disparu) le suivait à la trace. Quant à Claire … il ne savait toujours pas où elle était, par les dieux. Où était-elle donc, était-elle morte ? Il n’en savait rien et il voulait tellement le savoir pour qu’il puisse faire son deuil d’elle aussi. Mais il avait encore l’espoir ! L’espoir faisait vivre mais il était parfois cruel.

Alexandre était entrain de rentrer à Marbrume sur son destrier blanc. Son armure rutilante était cabossée un peu partout et un bandage lui couvrant ce qui aurait dû être son oreille gauche qui n’était plus que maintenant un moignon … elle fût tranchée par un banni fourbe qui un peu plus le scalpait. Heureusement que Alexandre avait encore des réflexes, il lui avait tranché la gorge grâce à son crochet. C’est que ça sert parfois d’être estropié.

Le Vicomte rentrait en même temps que des miliciens et des membres de son Ordre qui l’avait rejoint peu à peu. Les Fangeux semblaient se tenir tranquille … heureusement que la Cité était en vue quand le crépuscule était en train de tomber.

« Messire ? » Demanda un jeune milicien à pied à côté d’Alexandre.

Ce dernier mit son regard torve dans celui du militaire et dit :

« Oui ? »

« Nous allons bientôt arriver ? Nous devrions envoyer un éclaireur pour le signaler aux sentinelles de la porte du Crépuscule. »

Le noble ne répondit pas mais hocha la tête. Il n’en avait rien à faire et voulait rentrer au plus vite et se reposer car il était fourbu et crotté. Il voulait aussi boire un verre, juste un petit. Ça lui fera certainement aussi bien que les herbes que les guérisseurs lui avaient données.
Une petite demie heure plus tard et ils arrivèrent enfin à la Cité. Alexandre soupira et pendant que les autres allaient où bon leur semblaient, il alla au galop jusqu’à l’Esplanade. Cela lui fit du bien de sentir le vent dans ses … mmh, dans sa barbe. Arrivé à sa Résidence, il donna son cheval à son Palefrenier et entra dans sa demeure.

Annabeth, la jeune servante, la protégée de Amélia, arriva alors devant le Vicomte et dit avec un grand sourire :

« Messire. Heureuse de vous revoir. »

« Moi aussi, ma petite. Où se trouve Dame de Terresang ? » Demanda t-il avec un léger pincement, cela lui faisait bizarre de l’appeler ainsi. Il n’y en avait qu’une et c’était Alice …. Mais elle était morte et Alexandre avait fait son deuil, du moins il le présumait.


« Dans votre cabinet… Avec Messire de Rougelac. »

« Je ne souhaite pas savoir qui est ce Rougelac, je vais me débarbouiller et dormir une petite heure … prévenez la que je viendrais plus tard. »

Alexandre prit alors un bain préparé par la grosse Mireille. Il se détendit, il en avait besoin. Son oreille le faisait souffrir mais … au moins, cela lui montrait qu’il n’était pas mort. Pas encore. Lorsqu’il sortit de son baquet, et s’endormit aussitôt sous sa couette.
Les cauchemars étaient omniprésents dans son sommeil, tellement que quand il se réveilla, il était aussi fatigué que quand il était revenu.

Il s’habilla d’une tunique verte avec les bouts de manches rouges. Son bas de tunique en lin était aussi vert et son fourreau contenant Rageterre, l’épée familiale et il regarda au dessus de sa commode, la lance offerte par Guérin, un jeune artisan. Elle s’appelait Purgure Ensis. Mais qu’importe. Il continua de s’habiller et sortie de sa chambre en claquant la porte.

Il alla au premier étage où se trouvait son cabinet, il ne prit pas la peine de frapper, non et puis quoi encore ? Sa femme était avec un noble et même si ce n’était qu’un mariage arrangé, il n’allait pas se faire cocufié dans sa propre maison. Il y entra alors et remarqua un homme entrain de parler avec Kira, qui était-il ? Il ne le connaissait guère, sûrement un Marbrumien.

« Kira, bonjour. Votre héros est revenu du Labret. » dit-il avec un sourire forcé.

La Vicomtesse savait que son cher mari était rentré, non seulement elle l'avait entendu, mais l'une des servantes – Hanna ou Elisabeth, la belle rousse ne savait plus trop – était venu les prévenir. Oui, parce que la jeune femme n'était pas toute seule. Victor de Rougelac était venu, un peu à l'improviste, pour à l'origine parler avec le maître des lieux. Malheureusement, il s'était retrouvé nez à nez avec la maîtresse des lieux en l'absence d'Alexandre de Terresang. Sachant que plusieurs bataillons et escouades étaient déjà revenu du Labret, et au lieu de faire revenir le Seigneur de Rougelac plus tard inutilement, elle l'invita à rester un moment pour bavarder et puis pour faire par de ses demandes. Kira n'avait pas de mal à communiquer sur des affaires, plus ou moins urgentes, avec son mari, c'était au moins un avantage – ils avaient plus de mal à communiquer sur d'autres choses. C'est donc pour transmettre ces informations à son mari dés son arrivée qu'elle s'était permise d'inviter le fameux Rougelac au sein de la Résidence des Terresangs.
Elle avait peut-être bien fait. Au moins, Victor de Rougelac n'aurait pas à revenir et à retarder ses affaires. Il aurait ses réponses le jour même… Enfin, lorsque le Seigneur des lieux se décideraient à se réveiller et à finir de prendre son bain. Cela ne dérangea heureusement pas le Seigneur de Rougelac.

« Je vous propose de boire quelque chose en attendant que mon cher époux ait fini de se reposer. » proposa la jeune femme à Victor.

Pour le plus grand plaisir de son invité, les serviteurs ramenèrent une bouteille de vin. Il fallait bien désaltérer des gorges qui bavardaient depuis bien une bonne heure et durent s'occuper pendant une heure supplémentaire en attendant Alexandre.
Bienheureusement, cette heure passa vite, et l'époux de Kira se présenta rapidement à son bureau où les deux nobles bavardaient encore. Le Vicomte de Terresang était évidemment rentré sans frapper, mais encore une fois, la jeune femme n'était pas surprise de le voir arriver, on avait entendu la porte de sa chambre claquer d'ici. Pourtant, la Résidence était grande, mais on savait ce qu'il s'y faisait où que l'on soit. C'est pour cela que la belle rousse ne sursauta pas et se leva calmement à l'arrivée de son époux, lui souriant gentiment comme elle le faisait à son habitude. Un sourire trompeur, car elle était encore choquée de voir les cicatrices et les séquelles des combats que vivaient Alexandre. Qu'avait-il encore perdu comme membre ? Un doigt, un œil… Non. Une oreille apparemment. Kira lui aurait bien conseillé de se faire pousser les cheveux ou la barbe pour cacher toute cette misère… Mais c'était probablement inutile, Alexandre ne l'écouterait pas.

« Heureuse de vous voir en vie, Alexandre. J'espère que le Labret n'a pas été un enfer aussi morbide que ce que j'ai entendu dire. » lança Kira, essayant plus de se rassurer elle-même. « Je vous présente le Seigneur Victor de Rougelac. Il est venu ici pour vous parler. Vous étiez absent, j'ai pensé à le laisser rentrer pour vous transmettre ces affaires plus tard, lorsque vous seriez rentré. Mais maintenant que vous êtes présent… Nous allons gagné du temps. »

Kira se tourna vers Rougelac et lui versa encore un peu de vin dans son verre, le lui tendant poliment. Elle remplit également son propre verre avant de le tendre à Alexandre.

« Je suppose que vous avez soif, surtout si nous passons notre temps à bavarder. »

« Les histoires que l’on risque de vous raconter ma chère sont bien au-delà de la réalité. Il faut y être pour le croire. » Dit-il sur un ton plus cassant qu’il ne le voulait tout en regardant la jeune femme puis Victor.
Il essaya alors de prendre le verre avec sa main gauche … mais il se souvint qu’il n’en avait plus et se ravisa avant que les nobles présents ne le remarque et le prit de sa main droite.

« Merci. » Il lui adressa un petit sourire et il laissa le Comte se présenter.

Ce dernier n’inspira pas confiance à Alexandre, il semblait faux. Il laissait trainer une somptueuse odeur d’hypocrite et de manipulateur. Sa tête aussi n’inspirait pas la confiance au Vicomte ou peut être qu’il avait vu assez de complot pendant son séjour au Labret et qu’il était paranoïaque au point de voir des traîtres partout … il était lui-même un traître vu qu’il voulait la mort du Duc, fallait qu’il se calme et vite si il voulait pas devenir cinglé … penser à son épouse lors d’une bataille avec un Fangeux passait mais alors croire que ses coéquipiers ou ses possibles alliés étaient des ennemis, il allait droit dans le mur.

« Croyez moi, Comte, la …
Il laissa en suspend sa phrase pendant un instant et insista sur les quatre premiers mots.
« bonne société de Marbrume ne se serait pas inquiété de ma disparition. Au contraire, elle aurait sauté sur l’occasion pour rafler le reste de richesse qu’il me reste et peut être même mon Ordre, qui sait. Espéront que je ne disparaisse de sitôt, j’ai la ferme attention de survivre à tout cela et … faire le nécessaire avec ces derniers. » Dit-il avec un grand sourire

Il s’assied alors sur un canapé se trouvant en face de celui où se trouvait Victor de Rougelac, il but une gorgée de son verre et intérieurement il soupira d’aise. Ah oui, il était bien las de tout cela, il n’avait qu’une envie c’est que tout cela s’arrête.

« Oh oui, vous pouvez le dire monsieur le Comte. Ce canapé est aussi meilleur que le confort d’une tente au Labret et je peux vous dire que j’en ai connu des inconforts dans ma vie, durant vingt ans j’ai dirigé les forces frontalières du Duché du Morguestanc et … les marais ce n’est pas le mieux pour dormir mais le Labret, c’est l’inconfort ultime. Mais bref, je radote, je radote. Et si vous m’expliquiez ce que vous venez faire ici, mon cher Comte ? »

La jeune femme fut presque étonnée de la sécheresse de la voix de son mari. En fait, elle lui en voulait. Soit, il n'y avait aucun amour entre eux, mais ce n'était pas une raison pour ne pas faire des efforts et se respecter un minimum. Et ce n'était pas parce que le petit bout de femme qu'était Kira était assigné à résidence en l'absence de son mari, comme une bonne épouse convenable - qu'elle n'était qu'en apparence - qu'il fallait que son cher et tendre mari commence à la prendre de haut. Surtout qu'il savait très bien qu'elle aussi avait affronté des Fangeux, autant pour venir à Marbrume que pour les travaux qu'elle avait effectué à Sombrebois. Indirectement, la vengeance de la belle rousse fut plus divine que volontaire. Elle sourit doucement à Alexandre, légèrement moqueuse, lorsque celui-ci se trompa de main pour saisir le verre de vin de sa chère épouse. Kira essaya de se retenir de pouffer à la réaction surprise du Vicomte. Quelle ironie après tout.

Après cette petite aparté, Kira laissa les deux hommes s'asseoir l'un en fasse de l'autre, préférant rester appuyée sur le bureau sombre du Vicomte de Terresang. Préférant observer la scène de haut, de loin. Étonnamment, la belle rousse fut presque surprise que le Rougelac ne demande pas à ce qu'elle sorte de la pièce pour qu'ils puissent bavarder "entre hommes". Mais au fur et à mesure de la conversation - où Kira trouvait étrangement Alexandre bien bavard, comme s'il avait besoin de faire sortir toute sa rancœur et sa colère envers d'autres innocents - la belle Vicomtesse comprit très vite que ce n'était pas une conversation entre homme que Victor souhaité, mais une conversation entre personne réfléchis, intelligentes et qui raisonnent. La belle rouquine n'était pas particulièrement méfiante envers le Comte. Mais elle ne confierait pas sa confiance entre les mains d'un homme dés le premiers jour, c'était une évidence à ces yeux, bien plus qu'une évidence même. Heureusement, Alexandre semblait du même avis. Au moins, il n'avait perdu toute sa tête pendant ces longues semaines d'absence.

Toutefois, aux paroles du Comte, la jeune femme ne sut que dire. Leurs problèmes étaient bien les leurs, et non ceux d'un Comte de Rougelac. Sans vraiment se soucier de savoir si son mari avait quelque chose à ajouter à cela, ce fut Kira qui se chargea de cingler Victor:

"Nous ne sommes pas encore à genoux. Et ceux qui nous envies, nous envie seulement, et ne piétinent pas encore nos cadavres meurtris par les monstruosités - que Rikni nous garde - qui rôdent hors des murs."

Evidemment, Kira ne voulait pas en rester là, mais elle ne souhaitait pas non plus mettre un froid. Ce n'était pas non plus le moment d'avoir un ennemi de plus. Surtout que sa réputation, même redorée après les Fêtes d'Anür, certains nobles voyaient toujours les Terresangs d'un mauvais œil. Et leur invité n'avait pas intérêt à passer dans le rang de ces nobles qui tournaient le dos à Alexandre. Cela pourrait tout aussi bien être bon comme mauvais.

"Il serait convenable que votre ambitions ne prenne pas le pas sur vos convictions. Je pense que c'est ainsi que nous pourrons œuvrer ensemble, comme vous le dites. Expliquez moi... Enfin, expliquez nous, si mon époux est du même avis que moi, pourquoi vous souhaiteriez avoir la confiance du Vicomte de Terresang." ajouta enfin la jeune femme, fixant son mari du regard, cherchant une quelconque approbation, et même si elle ne la trouvait pas, elle dirait ce qu'elle avait à dire.

Alexandre but une gorgée de son verre de vin et fit un petit sourire à son épouse. Le Vicomte se dit qu’il avait eu raison d’épouser cette jeune femme même si ce n’était qu’un mariage arrangé, elle restait une fervente conseillère et une personne à qui on ne la faisait pas … même si Alexandre aurait préféré avoir Alice m’enfin, on fait avec ce qu’on à. Kira était vivante, Alice, non.

Le Comte n’avait aucunement la confiance du manchot surtout après ces paroles, il venait d’affirmer qu’il voulait les aider en tuant sournoisement ses ennemis. Mais pourquoi ferait-il ça alors qu’il ne les connait que depuis une heure et encore.

Il regarda ce serpent déguisé en noble plein de bonnes volontés et dit tout en prenant en compte les propos de sa femme.

« Veuillez m’excuser Messire de Rougelac mais je n’ai pas l’attention de mettre à terme les vies de mes ennemis par la sournoiserie, je n’ai pas l’habitude de comploter … sauf dans de rares cas et lors de mon séjour au Labret, j’ai vu bien assez de traîtrise mais je suis enclin à vous écouter. Pourquoi, justement devrais-je le faire ? Et sachez que ma confiance ne se gagne pas facilement, vous savez à quoi est dû cette brûlure ? »

Dit-il en montrant son crâne dégarni avec une légère balafre brûlée.

« Mon père. Lors du siège de Terresang, mon père avait prit toute les troupes de la Cité sauf peut être de vertes recrues que j’avais entraîné et vous savez pourquoi ? Au départ, nous pensions que c’était pour combattre un comté voisin qui avait attaqué nos terres mais c’était pour que ses hommes de mains tels que le Baron de Frayer attaquent la ville. Bien entendu, j’ai brisé le siège mais j’ai appris plus tard que l’archer qui m’avait fait cela était un des soldats de Terresang. »

Il but alors une autre gorgée

« Alors pourquoi devrais-je vous faire confiance quand mon propre père et des soldats fidèles ont attentés à ma vie, je vous le demande. »

Il leva alors son gobelet.

« Quand à me trancher la main, il ne m’en reste qu’une et je compte la garder jusqu’à ma mort, je ne veux pas me retrouver avec des couverts à la place des mains. »
dit-il avec un grand sourire tout en buvant le reste de son vin.

La belle jeune femme ne put que grimacer en entendant une fois de plus son époux déblatérer son histoire de flèche enflammée. Soit, c'était une preuve inéluctable de traîtrise, mais cela ne s'était vue que chez les Terresangs. Toutefois, Kira ne pouvait nier que la trahison était partout et à toute heure, même dans sa propre famille. Après tout, pourquoi s'était-elle mariée? Pour redorer un blason depuis longtemps souillé par les faits et gestes de son père. La belle rousse fut toutefois surprise d'apprendre qu'Alexandre avait vue cette même trahison présente au Labret, que c'était-il réellement passé? Il le lui dirait peut-être plus tard. Elle n'avait eu que des échos de cette reconquête. A la fin du beau discours de son époux Vicomte, elle ne put s'empêcher de soupirer devant la petite pointe d'humour faite en rapport avec la perte de sa main. Il n'y avait que cette homme pour rire de ses amputations successives... On pouvait presque se méprendre en apprenant qu'il y avait quelques mois, ce même homme était alité au lit, déprimant au sujet de sa femme, de ses enfants, et de sa fameuse main. La jeune femme se demandait réellement ce qu'il s'était passé durant son absence, lors de son voyage à Sombrebois... Qu'avait appris ou fait Alexandre pour passé d'un état dépressif à un état presque... désinvolte qu'en à son état de santé?

Heureusement le Comte ramena très vite la jeune femme à un autre type de discussion. Peut-être avait-il remarqué le sombre regard qu'avait lancé Kira à l'encontre de son époux. En tous les cas, ce n'était pas elle que cela gênait. La jeune femme se concentra tout de même pour écouter les arguments de leur invité. La belle rousse aimait voir que Victor ne mettait pas à l'écart de la conversation malgré son intervention directe au début de leur entretien. Peut-être que lors de leur échange, avant l'arrivée d'Alexandre, le Comte de Rougelac avait remarqué que Kira n'était pas uniquement la maîtresse de maison. Alexandre était peut-être le chef de cette demeure, mais Kira n'en était pas moins sa femme, et l'ancienne Baronne de Haldonores. Elle avait tiré son peuple de l'enfer qu'était le Pavillon de chasse de sa famille, et en avait sauvé le plus grand nombre possible. Elle n'en oubliait pas l'aide qu'on lui avait apporté, mais si elle n'avait pas été présente et si elle n'était pas sortie du Pavillon cherché de l'aide, Kira savait que les morts auraient été beaucoup plus nombreux.

Mais après coup, la Vicomtesse comprit vite pourquoi le Rougelac semblait la respecter, ce qui était des plus étonnant d'ailleurs. Cet homme semblait s'être renseigné sur eux... En quelle circonstances? Qu'avait-il appris exactement? Peut-être avait-il justement eu vent des histoires réciproques d'Alexandre de Terresang et de Kira. Toutefois, cela n'expliquait pas tout, encore moins le fort intérêt que semblait porter Victor à leur encontre. La rousse ne lâcha pas sa méfiance pour autant, toutefois, elle souhaitait en apprendre plus sur les intentions de leur invité. Un joueur d'échec? Il voulait être à la bonne place si, d'aventure, les jeux politiques devaient changer. Et il invité les Terresangs à s'y joindre. Il ne fallait pas rater cette occasion. Même si Victor n'était pas clair dans ses intentions et ses manigances, Kira n'en oubliait pas moins l'affront que le Duc et toute sa cour avait fait à sa famille! Elle avait peut-être redoré son blason grâce à son mariage des plus arrangés avec Alexandre, mais sa réputation était toujours aussi sombre et sulfureuse! Et la jeune femme gardait encore au fond d'elle cette envie de vengeance! Cette alliance ne pouvait qu'être fortuite! Mais le Rougelac devait se montrer clair envers eux, et eux, devraient se montrer prudent envers cet homme. C'est pourquoi Kira prit son temps pour répondre. Elle ne regarda pas une seule fois son époux, elle n'en avait pas besoin. Elle savait que lui aussi avait quelques esquisses de vengeance au fond de son cœur, elle n'avait pas eu les détails, mais elle en savait assez pour savoir qu'il comprendrait que cette occasion n'était pas à prendre à la légère.

"Je ne parlerais qu'en mon nom. Et non pas à celui de mon époux, qui s'exprimera très bien tout seul à ce sujet." commença-t-elle, doucement, prudemment, comme si la rouquine marchait sur des œufs en talons aiguilles. "Ce ne sera donc que mon avis personnel, et celui d'une femme en plus de cela. Vous pourrez donc prendre mes paroles comme bon vous semble, Comte de Rougelac."

La jeune femme prit son temps, inspirant et expirant doucement. Elle regardait, de ses yeux vert émeraude leur invité, s'attendant à ce qu'il l'empêche de parler, de s'exprimer et de donner un avis qui ne l'intéressait pas. Après tout, Victor était venu pour parler à Alexandre de Terresang, et non pas à sa femme. Mais rien ne se passa, et Kira put continuer sans être importuné, ni même coupée par son mari qui semblait toujours boire les restes de son verre de vin.

"Le Duc n'est pas un mauvais dirigeant." dit-elle tout d'abord, étudiant les réactions de ces paires. "Mais pas à notre sombre époque où les intérêts sont bien différents de ceux en période de paix. Nous avons besoin de quelque chose, de quelqu'un ou d'un groupe de personne pouvant rassurer la population et la mener loin de ce Fléau. Le Duc ne veille pas assez sur son peuple! Et c'est pourtant eux, le cœur. La preuve en est: je prends pour exemple le Labret. Sans les miliciens, les soldats, sans les fermiers et le petit peuple, nous serions déjà mort de faim. Les remparts seraient déjà tombés, et nous serions déjà... au mieux, mort, au pire, transformé en choses abjectes."

Kira s'arrêta une troisième fois, étudiant le regard de Victor de Rougelac, mais également celui de son mari, désormais. Elle n'avait évidemment pas fini. Mais elle s'attendait une fois de plus à des protestations. Pourtant, on l'écoutait. Elle ne donnait évidemment qu'une partie de son avis personnel. Alexandre avait évidemment mis à l'écart les idées de complots et de trahison. Kira également, mais par prudence. Elle ne souhaitait pas qu'on la dénonce comme une traîtresse, comme celle voulant assouvir ses désirs de vengeance. Alors, Kira tairait encore ces envies, pour le bien d'elle-même, mais aussi de tous ceux qui pouvait être sous sa protection... Ou tous ceux qui tenaient un minimum à elle... Subrepticement, elle pense à Hector, avant de retirer cette homme de ses pensées. Ce n'était pas le moment de penser à lui.

"Nous avons besoin d'un dirigeant qui saura protéger son peuple et le guider pendant les années sombres qui s'annoncent. Je pense légèrement à l'héritier, qui s'est montré lors du Festival d'été, à la place de son père... Il a fait montre d'une sérénité et d'une sagesse rare. Il a encore beaucoup de chose à apprendre... Et je ne dis pas qu'il ferait mieux que son père, le Duc. Mais c'est de cela que la populace a besoin..." finit enfin la jeune femme avant de se tourner vers Alexandre qui se taisait toujours, il l'étudiait, elle le savait. "Et vous, du'en pensez-vous?"

Il imaginait bien que le Rougelac ne parlait pas de supprimer les ennemies du Vicomte aussi directement non, mais il avait assez côtoyé de mondains pour savoir que Victor n’allait pas employer ces mots aussi directement. Il n’était pas paranoïaque, non … il n’accordait juste pas sa confiance aussi facilement, on l’avait beaucoup trop trahi et il ne savait pas bien entendu si les paroles qu’il allait laisser sortir de sa bouche allaient être dévoilées hors de cette Résidence.

Voilà que le Comte voulait savoir ce que le couple Terresang pensait du pouvoir en place … Alexandre commença à grincer des dents. Ce qu’il pensait du Pouvoir en place ? C’était aussi clair que de l’eau de roche : Il devait tomber même si c’était un souverain qui n’était pas mauvais bien au contraire, il l’avait prouvé en venant au Labret mais il n’avait guère le peuple derrière lui … avec les rafles dans les quartiers pour combler les effectifs ou encore les centaines de paysans qui mourraient pour reconstruire ou même produire la nourriture nécessaire à la survie de tous. Et puis, il n’aimait pas le Duc pour une simple et bonne raison : Il avait tué sa femme et probablement sa fille. Et pour cela, il n’avait qu’une envoie, voir sa tête au bout d’une pique avec celles de tous ses conseillers.

Il regarda sa jeune femme tout en buvant son verre, elle avait un sens aiguisé pour parler politique ou même pour dire des choses qui allaient dans le sens de son interlocuteur et c’était en partie pour cela qu’Alexandre l’avait choisi comme femme … ‘fin même si c’était surtout pour ne pas mourir sans descendance mais pas que.

Il se resservit un verre de vin … tant bien que mal et autant que cela soit possible avec une seule main. Il but une gorgée et eut un haussement de sourcil quand Kira lui demanda ce qu’il en pensa. Il regarda alors sa coupe et dit d’une voix torve :

« Hm. Je suis d’accord avec vous ma chère. Mais j’aimerais bien poser la question à Alice et Claire. » Il regarda alors le Comte et Kira. « Cela répond t-il à votre question, Kira ? »

Il but la gorgée qui lui restait dans son verre puis dit à l’encontre du Comte.

« Quoi que vous soyez prêt à faire mon cher Victor, je ne serais pas contre sauf si cela va à l’encontre de la sécurité de ma femme et de mes gens. »

Il se leva alors et le regarda de plus belle :

« Si cela arrivé à nuire à la sécurité que je m’efforce de donner à ma famille, croyez moi mon cher Comte, la Fange sera bien le cadet de vos soucis. Ce n’est pas une menace, c’est une certitude. »

La jeune femme ne fut pas vraiment surprise de la réponse d'Alexandre. Elle en fut quelque peu vexée toutefois, mais n'en montra rien. Comment pouvait-il invoquer les esprits de sa femme et de sa fille - la première étant morte et la seconde probablement aussi - alors qu'ils parlaient de chose bien plus sérieuse? Ce n'était pas le moment de montrer ses faiblesses et sa rancœur, même s'il était question de cela! La rancœur apportant la vengeance, une vengeance qu'ils attendaient impatiemment tous les deux: la mort du Duc. Ou tout du moins, un assassinat en bon et du forme. Un assassinat qui ne les soupçonnerait évidemment pas... Ce qui n'était pas une mince affaire.
Le Vicomte finit son verre avant de continuer, laissant en suspens ses paroles, qu'elles puissent raisonner assez dans cette pièce et dans les esprits présent. La suite surpris la belle rousse. Tout en levant la tête vers son époux, elle ouvrit de grand yeux vert écarquillé. C'était bien la première fois qu'elle l'entendait parler d'elle ainsi. Se souciait-il vraiment d'elle? Ou était-ce pas pur intérêt? Il était vrai qu'elle avait un contrat à remplir. Elle n'était qu'un outil dans la plupart des mains. Était-ce la même chose pour Alexandre, la prenait-il pour un simple objet qui remplirait ses envies? Peut-être. En fait, elle n'en savait rien et ne voulait peut-être pas savoir. Elle ne savait pas non plus ce qu'il entendait par "ma famille"... Pensait-il plus large que son simple cercle privé? Personne ne nier penser que le Terresang avait eu des liaison avant son mariage et des rumeurs courraient. mais encore une fois, ce n'était que des rumeurs. Quoi qu'il en soit, l'homme qui se tenait désormais à côté de la jeune femme jura qu'il ferait payer le Comte si quelque chose de mal arriver à ses proches, et cela ne surpris pas Kira. Elle savait dans quel état il pouvait se mettre pour ceux qu'il... aimait? Tel que sa défunte femme...

Après la fin des courtes paroles de son époux, le Comte de Rougelac reprit. Tout d'abord, il approuva les paroles de Kira, ce qui ne la surpris qu'à moitié. Après tout, il l'avait invité à continué de parler. Il lui accordait du crédit, mais cela ne voulait pas dire que la Vicomtesse allait se laisser amadouer si facilement. Et même si celle-ci et son désir de vengeance prenait le pas sur sa sécurité, sa méfiance restait son atout majeur. La belle rousse comprit également très vite que Victor tentait de rassurer Alexandre de Terresang, qu'aucun mal ne serait fait à sa famille. Mais encore une fois, la méfiance de la jeune femme frappa. Aucune action qui n'aurait été savamment réfléchis? Ah oui? L'échiquier était grand, et les solutions multiples. Les Terresangs n'étaient pas la seul famille puissante à Marbrume. Et la belle Kira le savait pertinemment. Ils n'étaient pas non plus les plus proches du Duc, mais ils avaient sa confiance. Confiance qui, au passage, avait reçu un léger coup lorsque le Vicomte Alexandre de Terresang officialisa son mariage avec Kira de Haldonores... La parjure, l'empoisonneuse, la marionnette du Baron de Haldonores! Mais elle ne pouvait rien y faire.

Sortant de ses sombres pensées et de ses rêveries, mais gardant toujours sa méfiance et sa prudence à ses côtés, elle continua d'écouter le Comte. Peu à peu, d'autres question s'ajoutèrent aux premières qu'il lui restait en tête. Comment pourrait-il bien s'affirmer aux côté de l'ennemi? Comment pourrait-il être au milieu du chamboulement politique? Quel genre de soutiens souhaitait-il? Sur les dires de Victor de Rougelac, ses projets seraient long et fastidieux... Sauf que la Fange n'attendrait pas. Il faudrait bientôt agir. Le Labret offrait quelques semaines ou mois de répits, mais bientôt, il faudrait de nouveau agir. L'hiver serait de nouveau à leur porte, et les Fangeux encore plus puissant et persévérant qu'avant! Il ne fallait pas prendre son temps. Il faudrait prendre le Duc avait des baquettes. La traîtrise étaient partout et les exécutions multiples. L'envie de parler de la jeune femme devint pressante. Mais la prudence prônait, alors elle prit son temps avant de reprendre la parole.

"Comment comptez vous nous... utiliser pour rentrer dans le cercle ducal? D'autres familles sont bien plus puissantes, et vous offrirez la sécurité que vous nous garantissez alors que vous commencez à peine à avoir des appuis. Comment pouvons nous avoir la garantie que vos actes, savamment réfléchis comme vous le dites si bien, cher Comte, ne nous feront pas avoir la tête pour haute trahison?" lança Kira, croisant les bras et n'hésitant pas à montrer une fois de plus sa méfiance vis-à-vis des paroles bien mesurées de Victor. "Après ce qu'il s'est passé ses dernières semaines, le Duc et sa famille sont extrêmement prudent. Ils deviennent vite soupçonneux dés lors que l'on montre un brin de faiblesse. Je ne sais pas exactement comment vous souhaitez réaliser votre oeuvre, Comte de Rougelac. Il est vrai que le pouvoir en place se doit de changer, quelque soit la manière. Mais il n'est pas prudent d'agir dés maintenant, en pleine périodes de noirceur..."

La jeune femme décroisa ses bras, regardant le verre de son mari. Elle avait soif à force de parler ainsi. Elle n'attendit pas que celui-ci lui laisse son verre, elle alla en prendre un autre et se servit du vin à son tour, buvant modérément.

Alexandre était las de tout cela. Il n'avait plus envie une minute de plus d'écouter ces intrigues. Il n'était guère fait pour le complot en plus sa famille était une fervente partisane du Duc de Sylvrur et malgré que le Vicomte avait des différends ... que dis-je des raisons de le tuer pour le meurtre de sa famille, il n'en restait pas moins un de ses vassaux. Et en entendant dire des choses pareilles sur le gouvernement actuel de la part de Messire de Rougelac il ne put réprimer un sourire. Il avait envie que d'une chose prendre le pouvoir et ça se sentait.

- Et je suis tout disposé également à écouter vis doléances et vos suggestions, cela va de fait.

Cette phrase résonnait dans l'esprit d'Alexandre, Rougelac se croyait déjà à la place du Calife. Eh bien. ça promettait. Il n'avait plus tellement confiance. Il voulait la mort du Duc oui ! Comme lui ! Ou du moins, il voulait sa place. Mais ce n'est pas sans le tuer que le Comte aura la place du dirigeant.

Il écouta alors son épouse et elle avait raison. Le Duc avait du mal à retrouver une certaine confiance quant à ceux qui font preuve de faiblesse et puis depuis le dernier attentat contre lui au Labret, la sécurité sera doublée à n'en point douté. Alexandre était convaincu par sa femme et peu par le Comte qui ne voulait qu'une chose et cela se sentait :le pouvoir.

On entendit alors toquer à la porte et Alexandre regarda sa femme puis le Comte dans un regard qui voulait tout dire.

"Entrez." Dit-il en en reportant son attention sur la porte qui s'ouvrit sur le visage d'Elisa, une autre jeune servante.

"Oui ?"
"Monsieur... les représentants du Conseil de l'Astre de l'Ordre de l'Astre d'Azur sont arrivés ... Madame de Terresang avait réuni le Conseil pour le milieu de la journée, Monsieur.

Alexandre regarda alors son épouse avec un léger sourire et un regard qui voulait dire "sauvé par le gong !" puis il reporta son regard sur le Comte et dit avec un grand sourire triste.

"Apparemment ma chère et tendre avait oublié de m'avertir de cette réunion. Nous sommes désolé Comte de Rougelac mais nous allons devoir reporter cette entrevue à plus tard. Nous avons était heureux de pouvoir discuter avec vous et ... nous allons réfléchir à ce que vous venez de dire. Elisa va vous raccompagner jusqu'à la sortie."