Marbrume


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 Péchés véniels [Grayle]

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Cyrielle FerrandForgeronne
Cyrielle Ferrand



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MessageSujet: Péchés véniels [Grayle]   Péchés véniels [Grayle] EmptyDim 12 Mar 2017 - 17:12
Les nuits étaient longues, lorsque la solitude et la faim se faisaient seules compagnes des mauvais rêves et des insomnies. Pour chasser ses angoisses, Cyrielle partageait son lit avec Aurèle, trouvant dans le petit corps chaud de son fils une partie du réconfort que le sommeil lui refusait. Mais s'il lui fallait être honnête avec elle-même, alors elle devait s'avouer que cela ne l'apaisait pas totalement, car sentir les membres grêles qui se blottissaient contre sa chaleur lui rappelait la faim constante, la menace fangeuse, les responsabilités qu'elle devait désormais assumer seule. Lui rappelait, aussi, que ses parents ne garnissaient leurs écuelles qu'une fois le petit rassasié, prenant sur eux une part de sacrifices. Et pourtant, la forge appartenait au père, et l'ouvrage ne manquait pas, ce qui leur assurait le pain quotidien, mais à peine plus. Ce n'était pas l'argent qui manquait, mais la nourriture, et l'angoisse la rongeait, à peine atténuée par l'espoir que portait le Labret.

Ce fut après une trop courte nuit sans repos, durant une journée de labeur, que se présenta l'idée, peu probablement bonne, mais moins mauvaise encore, de chercher un temps d'oubli, un temps de réconfort. Veuve, elle n'avait plus de pureté à préserver, et son deuil ne suffisait seul à son corps privé d'époux. Observant sans y penser un bourgeois s'écarter en compagnie d'une grue, elle se fit réflexion qu'à l'instar des marchands d'armes, les marchandes d'amour ne manquaient pas d'ouvrage. Que la mort et le rut marchaient souvent de concert. Si un moment en compagnie galante faisait au cave l'esprit et la bourse plus légers, alors peut-être lui fallait-il semblable délassement ?
Un appel d'un apprenti la tira de ses rêveries, et son attention revint au métal. Mais tandis que les heures passaient, la pensée revint, papillonnante, impossible à chasser. Par désespoir, par indécision, elle résolut sans vraiment s'en apercevoir de se rendre dans l'un des bordels qui émaillaient le quartier, une fois son travail achevé. Pour quelques sous, elle pourrait tenter de trouver un moment de réconfort et d'oubli. Elle ne se laissa pas le temps de renoncer, et après une toilette rapide, elle quitta la maison familiale, une bourse modeste ayant pris à sa ceinture la place de son marteau. Sa mère la vit s'apprêter, la vit sortir, mais ne posa pas la moindre question. Savait-elle, préférait-elle l'ignorer ? Cyrielle ne se risqua pas à inventer un mensonge.

Le ciel s'assombrissait, se laissait doucement glisser du jour à la nuit, lorsqu'elle poussa la porte d'un bordel, choisi par le hasard davantage qu'autre chose. La salle commune lui parut plutôt propre, les filles accortes, mais ses goûts ne la portaient pas vers ses consœurs, et elle adressa un léger signe de refus à celle qui déjà s'avançait vers elle, sa peau pâle enflammée par la gêne. La catin parut néanmoins comprendre, et tout en lui indiquant une table où s'installer, elle s’éclipsa de la pièce. Sans doute pour trouver un collègue plus adapté aux goûts de la grande forgeronne. Restée seule, celle-ci sentit l'angoisse monter peu à peu. Que fichait-elle là ? Pouvait-elle prétendre porter le deuil de son époux, respecter sa mémoire, et pourtant venir chercher un instant de plaisir charnel auprès de gitons ? Était-ce donc ainsi qu'elle entendait montrer aux dieux que sa foi demeurait solide ? Mais avant qu'elle ne décide de fuir, fuir ses peurs autant que ses péchés, on s'approcha d'elle.
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Grayle



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MessageSujet: Re: Péchés véniels [Grayle]   Péchés véniels [Grayle] EmptyMar 21 Mar 2017 - 20:09
Swip swip swip

Avec les gestes du mousse essuyant le pont du navire, Grayle astiquait le plancher usé du bordel, sur lequel étaient passés, et passaient, tant de personnes. Il n'utilisait que de l'eau et du savon, mais le bois était devenu brillant, comme s'il avait été vernis, même si l'acharnement de Grayle avait sûrement plus érodé le plancher qu'autre chose. Dans ses habits de serviteur, un pantalon de lin et un haut de la même matière et de texture grise, il passait inaperçu... mais quelqu'un vint le voir. Une jeune femme, une belle prostituée à la chevelure flamboyante et au bustier décoré, riche, qui avait bien du mal à contenir une opulente poitrine.

- Grayle

Il se retourna et contempla la jolie jeune femme. Guère impressionné par cette vision belle à damner toute une congrégation, il se redressa.

- Oui Marguerite ?

Elle croisa les bras, qui bombèrent son énorme poitrine, qui semblait douée d'un champ gravitationnel propre, semblant attirer à elle le monde entier, dont Grayle, qui penchait dangereusement en avant.

- Il y a une cliente en bas. Je pense. Elle n'aime pas les filles en tout cas, et elle a la tête de celle qui va faire une grosse bêtise et le sait. T'es l'homme, enfin, le petit garçon de la situation. Alors fout la dans ton lit, fais la payer et dégage là. Ce plancher ce lavera pas tout seul.

Elle tourna les talons, fière. Grayle s'inclina en avant, souriant derrière sa chevelure tombante. Marguerite était une des préférées de la patronne, et adorait jouer l'arrogante princesse, surtout devant Grayle, à qui elle ne pardonnait pas de l'avoir fait hurler comme une pucelle après qu'elle l'ait mise au défi.

- Tout de suite madame !

Il vit le dos fin et nu de la jeune fille trembler comme un volcan sur le point d'entrer en éruption. Elle s'immobilisa, mais reprit son chemin, lachant un soupir de mépris.

Grayle nettoya un peu un dernier instant le plancher, avant de pousser le torchon et le seau dans un coin. Il se lava les mains à l'eau chaude, avant de descendre les escaliers.

Il vit la "cliente" en un instant. Dans un bordel, c'est facile : cherchez celle qui est la moins habillée et avec l'air le plus honteux ou le plus triste. Et cette jeune femme aux longs cheveux blonds et à la carrure peu commune semblait porter tous les malheurs du monde sur ses épaules. Il s'approcha d'elle, et leurs regard se captèrent. Il vit un voile d'indécision, de peur, et même, de déception derrière ses yeux. Il faut dire que Grayle n'était pas joliment apprêté, contrairement à ses consœurs. Il fit une légère révérence, et prit la chaise en face de celle de la blonde.

Les prostituées saluaient les clients de manière tactile, jouant parfois les allumeuses ou la petite prude, ou la salope inaccessibles. Grayle ne pouvait se permettre ce genre de rôle. Il savait que les femmes ne venaient pas au bordel pour les mêmes raisons que les hommes. Il y avait plus de... désespoir. Ses lèvres s'ouvrirent, et sa voix de miel en coula.

- Mes excuses pour l'accoutrement. Je ferais des efforts la prochaine fois.

Ses jambes s'étaient avancées, à un millimètre de celles de la femme, qui pouvait presque sentir la pression de ces dernières. Les yeux d'acier aiguisé détaillaient la femme avec la tranquillité de celui qui se balade dans les champs. Elle était jeune. Plus que lui, sûrement, mais elle, semblait avoir été affectée par les turpitudes de la vie, qui laissaient le jeune homme indifférent. Son regard glissa sur les mains féminines, des mains puissantes, épuisées et marquées. Une manuelle. Une de ces femmes du peuple qui faisaient tourner la grande machine qu'était Marbrume. Son interlocutrice muette pouvait voir que le jeune homme souriant, petit à petit, reconstituait le puzzle qu'était sa vie.

- Je m'appelle Grayle dit-il dans un souffle. Vous n'êtes pas obligée de me donner le vôtre. Je comprendrais tout à fait, repris t-il, avec un timbre peut-être un peu plus triste.

Un rire cristallin se fit entendre, qui le fit se retourner. Il reporta son attention à la blonde. Son pied nu avanca legèrement, caressant la cheville féminine avec plus de douceur que bien des mains, avant de se retirer, furtivement.

- Si vous le voulez toujours, vous pouvez me suivre dans ma chambre. Nous y serons plus au calme. Et il y fait plus chaud.
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Cyrielle FerrandForgeronne
Cyrielle Ferrand



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MessageSujet: Re: Péchés véniels [Grayle]   Péchés véniels [Grayle] EmptyDim 26 Mar 2017 - 19:37
L'homme qui avançait vers elle était surprenant, en cela qu'il paraissait plutôt banal. Joli garçon, indéniablement, mais d'une allure tout à fait commune, en opposition aux belles de jour fardées et apprêtées qu'il côtoyait. C'était déroutant, mais aussi moins effrayant pour la femme, qui se serait sans doute enfuie s'il avait arboré des plumes ou un corset... Sans un mot ni un geste, elle le suivit du regard alors qu'il s'inclinait élégamment devant elle, puis s'installait à sa table. Elle n'osait parler ni bouger, car elle ignorait ce qui était attendu d'elle en semblable situation. Elle ne se voyait pas agir ainsi que certains clients, qui riaient aux éclats en pinçant ou palpant les chairs offertes. Elle ignorait tout des jeux de la séduction, de l'art de la courtise. Son mariage avait été un accord entre camarades avant tout, et Robin était son ami autant que son époux. Ils avaient de l'affection l'un pour l'autre, mais surtout de la confiance, et ils ignoraient tout de la procédure qui pouvait mener deux inconnus à partager le même lit. Alors elle laissait le courtisan mener la danse, en espérant qu'il saurait la guider, de la même façon qu'elle attendait de ses clients qu'ils la laissent forger à sa guise une arme à leur convenance. Et eux attendaient d'elle qu'elle leur fournisse une prestation de qualité. Ignorer ce qu'elle attendait exactement de sa présence en ce lieu ne l'aidait pas à prendre des initiatives, et la retenait autant que son ignorance des mœurs de ce monde à part.

Les premiers mots de l'homme lui furent une surprise, et cela se lut sur son visage. « La prochaine fois » ? Elle n'était pas même certaine qu'il y ait réellement une première fois. A moins qu'il n'ait voulu par là lui signifier que sa propre vêture n'était pas appropriée ? Elle baissa le regard sur sa robe, solide mais dépourvue d'élégance, de lin gris, sans apprêt, sans broderie ni ruban. Mais elle avait conscience que sur sa silhouette solide et sans charme, une toilette sophistiquée serait ridicule, comme une vache parée de fleurs et de rubans. Elle rougit donc, ses joues se colorant de nuances vives, et haussa légèrement les épaules. Ni lui ni elle ne pouvait se changer en cet instant, et leur simplicité similaire les assortissait davantage que si l'un d'entre eux avait été apprêté comme pour une cérémonie. Elle cessa cependant de s'interroger sur sa vêture lorsqu'elle sentit l'homme proche à la toucher, plus qu'il ne l'était communément admis entre deux inconnus, mais sans franchir ouvertement les limites de la convenance. Et tout en se sachant ridicule de songer aux bienséances en un tel lieu, elle ne pouvait s'empêcher d'être embarrassée, et de ne savoir comment réagir. En temps normal, elle se serait reculée, là où une autre se serait peut-être avancée, mais les circonstances n'étaient en rien « normales » pour elle. Si l'homme s'était ouvertement montré plus entreprenant, elle aurait peut-être su comment réagir, en répondant favorablement ou en fuyant, mais elle demeurait là statique, indécise.

Ce qui la détendit finalement un peu fut de pouvoir cesser de considérer son vis-à-vis comme un inconnu, alors qu'il se présentait. Elle en comprit tout d'abord pas pourquoi elle n'en ferait pas de même, avant de réaliser pourquoi certains ne donnaient pas leur nom en ce genre d'endroit. Cette prise de conscience se lut à nouveau sur son visage, trop aisé à lire, et peut-être pour dissimuler maladroitement cette naïveté première, elle donna son propre prénom, trop brusquement, le jetant presque comme un défi à ce Grayle trop doux, trop poli pour qu'elle sache comment réagir. Mais elle s'aperçut qu'elle ne pouvait donner le nom de son époux, et peut-être cette honte participa-t-elle à la rudesse de sa réponse.

« Cyrielle. »

Elle n'assumait pas de se trouver en cet endroit, veuve esseulée écartelée entre son mal-être et sa foi, entre le besoin de réconfort et l’indécence de sa venue. Il lui semblait que tous l'observaient, plus ou moins ouvertement. Il était admis pour un homme de venir au bordel, mais pour une femme ? Elle ne pouvait espérer que le soucis de discrétion sur leur propre présence retienne la langue d'un client, si on venait à la reconnaître. Elle baissa le visage, comme pour se dissimuler sous le rideau de sa chevelure linacée. Mais son regard se releva brusquement, traqué comme celui d'une proie, lorsqu'elle sentit le contact, léger et délicat, de la peau d'un autre sur sa cheville nue. Son sursaut fut violent, et la rougeur qui ne s'atténuait pas sur ses joues s'étendit à son front, son cou et son torse, sans qu'elle ne puisse rien y faire, parfaitement consciente que la chaleur qui l'envahissait signifiait qu'elle était aussi rouge qu'une braise. Voulait-elle ? Le suivre, et tout ce que cela sous-entendait ? Elle ne le savait toujours pas, alors qu'il abolissait cette distance qui l'avait tant perturbée. Mais elle hocha néanmoins la tête et se leva, faisant bruyamment frotter la chaise contre le plancher. Le suivre lui paraissait la seule possibilité, oubliant qu'elle pouvait tout simplement sortir. Elle ne supportait plus d'être ainsi exposée aux regards, et ainsi qu'il le disait, ils seraient bien plus tranquilles en ses murs. Quoi qu'il se passe ou non, il lui paraissait plus facile de n'être qu'avec Grayle plutôt qu'en une pièce lui rappelant sans cesse où elle se trouvait, et pour quelle raison.

« Je vous suis. »

Peut-être aussi lui serait-il plus facile de ne pas être au côté de ces femmes si coquettes, si désirables, qui mettaient en relief sa silhouette hommasse. Au sein de leurs rires perlés, même son chuchotement paraissait rauque et grossier. Elle emboîta le pas au prostitué, tâchant d'écourter un peu ses trop grandes enjambées. Une fois la porte de la chambre refermée, pourtant, elle demeura dressée au centre de la pièce, raide et ne sachant que faire de ses mains abîmées et de ses membres trop forts.
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MessageSujet: Re: Péchés véniels [Grayle]   Péchés véniels [Grayle] EmptyLun 17 Avr 2017 - 22:19
Grayle ferma doucement la porte derrière eux, avant de la verrouiller, avec une telle tranquillité qu'il était impossible pour la cliente d'être paniquée à l'idée d'être coincée dans la même pièce que lui. Il la contourna sans chercher à lui demander de bouger, ne voulant pas troubler son immobilité.

Sa chambre était assez modeste. Un simple lit double, néanmoins plus grand et apparemment plus confortable que ce à quoi Cyrielle devait être habituée, une armoire, une table de nuit, deux meubles à mis chemin entre la chaise et le fauteuil. Il n'avait pas pu offrir à cette femme "La" chambre avec bain qu'il a parfois la possibilité de "réserver". Tant pis. Elle devra se contenter de peu.

Ici et là, quelques bougies protégées par des coquilles de mauvais verre illuminaient la pièce, créant des ombres joueuses et découpant le visage de Grayle par contrastes en clair-obscur. Mais ses pupilles grises brillaient toujours, comme celles d'un félin dans la forêt obscure traquant sa proie. Il s'assit sur son siège et l'invita à faire de même.

" Tu sais, Cyrielle, je suis quelqu'un d'assez curieux. "

Oh, il voyait qu'elle détestait la suite sous-entendue.

" Les hommes qui viennent ici veulent juste décharger. Ce n'est pas une honte. Parfois, dépenser son pécule pour se vider dans une catin de quartier est presque une fierté. La preuve qu'on a de l'argent à dépenser. Mais les femmes... "

" Elles viennent souvent pour une autre raison que juste leur petit plaisir égoïste. Je... pense avoir une responsabilité de consolateur. Si tu vois ce que je veux dire. "

Il se leva de son siège et avança vers elle, avant de contourner le siège, se retrouvant derrière elle. Ses deux mains se posèrent sur les épaules qu'il devinait musclées, caressant le tissu de ses vêtement. Elle respirait fort, et la sentait bouillir de nervosité.

" Tu n'es pas obligée de m'en parler bien sûr. Mais je pense que cela te fera du bien. Je te promet... "

Ses pouces s'enfoncèrent dans sa chair, et il commença à la masser avec l'expertise appuyée du pratiquant accompli. Elle était crispée, et il la voyait grimacer lorsqu'il touchait un muscle tendu. Elle pouvait sentir que ses doigts, tout fins qu'ils semblaient, étaient plein de puissance, et sa poigne, plus sûre que bien des travailleurs manuels de la ville.

" Que rien de ce que tu dit ou ne pense sortira de cette chambre. Ce temps est à toi. "

Il chuchota de sa voix de miel, tout prêt de son oreille.

" Je suis à toi. "

Il embrassa furtivement sa nuque.
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MessageSujet: Re: Péchés véniels [Grayle]   Péchés véniels [Grayle] EmptyMar 25 Avr 2017 - 11:19
Consciente que rester debout serait ridicule, la forgeronne s'assit auprès du prostitué, dans un mouvement brusque qui trahissait à la fois son malaise et son habitude de faire les choses au plus efficace, sans grâces ni manières, sans élégance et sans mise en scène. Se mettre en avant, de paraître gracieuse, de se mouvoir avec légèreté, tout cela lui était inconnu, et si sa mère avait pendant un temps tenté de lui enseigner cet art de la féminité, elle avait rapidement renoncé, reconnaissant que sa fille serait mieux armée dans la vie avec des compétences de forgeronne qu'avec de jolies manières. Un minois avenant séduisait un homme, mais ne concluait pas de mariage. Cet esprit pratique avait profondément marqué la jeune femme, dans sa personnalité, mais aussi dans sa manière de se mouvoir ; ses hanches se balançaient à peine lorsqu'elle marchait, ses épaules étaient raides, et l'on attendait plus d'elle une solide poignée de main qu'un baiser langoureux. Ce qui lui permettait de se mêler sans gêne à ses confrères, mais la laissait désemparée face dans une ambiance feutrée et sensuelle comme s'efforçait de la créer Grayle. Et le plus difficile pour elle était d'en avoir conscience. Car elle réalisait parfaitement que son attitude de vierge effarouchée, de la part d'une femme faite et d'une mère, était tout à fait ridicule, ce qui ne l'aidait pas à se détendre.

La voix du courtisan était suave pourtant, à même de faire force les carapaces les plus hermétiques, et ses propos, qui plutôt que de la rabaisser au rang des hommes venus profiter égoïstement, faisait d'elle une femme, avec toute la sensibilité attendue, avec ses douleurs et ses tourments. Ce respect, cette intimité qu'il tissait entre eux, sans qu'elle ne puisse agir contre ni en faveur, la désarçonnait tout autant. Elle avait maintes fois pu voir les filles des rues interpeller les hommes, souvent très crûment, certaines venant même rôder sur le seuil de la forge pour tenter ouvriers et apprentis, provoquant la colère de Thomas, homme fidèle et très pieux, qui les chassait bruyamment, leur tirant des rires moqueurs. Grayle, au contraire, se voulait confident, oreille amie autant qu'amant, et cette faiblesse qu'il lui accordait, tout en étant réelle, donnait à la femme l'envie de s'en défendre. Mais elle n'imaginait pas le basculer sur la couche pour prendre son plaisir. Son attitude rappelait trop celle d'un prêtre lors d'une confession.

Comme s'il avait senti que ses propos pouvaient perdre sa cliente, il vint la masser, trouvant et dénouant les douleurs qui tendaient ses épaules sans même qu'elle s'en rende compte, venant de son travail, de ses tracas quotidiens, de ses angoisses plus profondes aussi, dont elle n'avait pas remarqué qu'elles s'exprimait aussi sur son corps, plissant son front de rides nouvelles et crispant ses muscles fermes. Il savait détendre ceci, et bien que certains nœuds particulièrement sensibles la fassent grimacer d'inconfort, elle ne pouvait s'empêcher d'apprécier la détente de son corps, alors même que son esprit ne trouvait le repos. Puis une nouvelle tension, une chaleur neuve, grandirent en elle, alors que le souffle de l'homme venait caresser son oreille, lui assurant le secret, et sa disponibilité. Ses lèvres furent comme une braise venue soudain marquer sa peau, et elle ne put retenir un sursaut.

Dans le même temps, ses mains se nouèrent, et elle sentit sur sa peau, comme un rappel sévère, le froid du métal, de son anneau marital. De ses serments, noués en même temps que le ruban, autour d'elle. Des dieux auxquels elle accordait sa foi. Comment pouvait-elle agir ainsi, chercher le plaisir et l'oubli, face aux épreuves que ces mêmes divinités avaient décidé de leur faire surmonter. Abandonnait-elle déjà ? Si facilement ? Non, elle ne pouvait. Mai elle ne pouvait pas davantage supporter cela sans faillir. Sans doute aurait-elle dû se rendre au temple, plutôt qu'au bordel, mais elle était là désormais, alors que la barrière de ses craintes cédait. Les larmes se mirent à couler sur ses joues, et elle pleura. A grands sanglots bruyants, qui oppressaient ses poumons et secouaient ses épaules, qui étouffaient dans sa gorge les paroles qu'elle aurait pu prononcer. Rien que des pleurs, et un peu de ses tourments qui partaient avec.

Au bout de plusieurs longues minutes, elle s'apaisa un peu, et frotta son visage de ses paumes rudes, pour en retirer les larmes, comme pour effacer un peu cette faiblesse. Mais sa voix demeurait fragile.

« Pardon, je ne voulais pas. »

Pleurer, venir ? Elle était incapable de préciser.

« Je réalise que c'était une mauvaise idée de venir. Je voulais oublier, mais comment je pourrais oublier mon mari, mon fils ? Que les dieux nous mettent à l'épreuve, et que je suis en train de faillir ? »

Elle soupira en secouant la tête, surprise de sa propre faiblesse.

« Je me pensais plus forte que cela... »
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MessageSujet: Re: Péchés véniels [Grayle]   Péchés véniels [Grayle] EmptyLun 29 Mai 2017 - 0:18
Il s'attendait à de la tristesse, mais pas des pleurs. Grayle, même s'il aimait se considérer comme prévoyant, n'avait pas du tout anticipé une telle réaction. Il avait cessé de la masser durant ses sanglots, posant doucement ses mains sur ses épaules, sans la troubler, sans imposer sa présence qu'elle pouvait toutefois sentir.

" Ne t'excuse pas. Ça fait du bien de pleurer. "

Il s'écarta légèrement, avant de la prendre par les mains. Elle se leva, presque par automatisme, comme si elle se laissait faire et, sans qu'elle ne puisse réagir, il la prit dans ses bras, la tête de chacun reposant contre l'épaule de l'autre, corps collés l'un contre l'autre. Il l'attira contre lui, comme pour l'empêcher de se dégager, ses mains sur son dos. Il prit la parole, la laissant se détendre (si cela était possible) dans ses bras.

" Le pire aurait été d'oublier. Il est normal... de les garder en toi. Mais rester bloquée dans les regrets... je ne pense pas que ça soit une bonne idée. "

Il l'embrassa, sur la joue, avec tendresse, avant d'essuyer les restes de quelques larmes.. Ses bras bougèrent avec lenteur et il tâta ceux de Cyrielle, éprouvant leur épaisseur et leur solidité, reculant son visage pour qu'ils soient l'un en face de l'autre.

" Tes bras sont forts... " dit-il avec une admiration non feinte, prenant la mesure de la rudesse et la solidité du corps qu'il avait en face de lui. La prenant par le bassin, il l'attira vers lui, avant de se décaler, échangeant leurs positions, et il la poussa délicatement sur le lit, se retrouvant au dessus d'elle.

" Faillir, ce serait rester effondrée, triste, et abattue après les malheurs. Notre force, ta force, c'est de surmonter les épreuves. "

Il lui caressa la joue, avec la tendresse d'un amant. Il était à genoux, une jambe de chaque côté du corps de la jeune femme.

" Rien ne frappe plus fort que la vie. Mais je vois en toi quelqu'un capable d'encaisser et de se relever. Tu ne le sais peut-être pas encore... "

Il voyait le visage torturé de la jeune femme, les émotions qui devaient s'enchaîner dans son esprit. Ses mains à lui, quittèrent ses épaules, glissant avec la légèreté d'un souffle d'été matinal sur sa poitrine, avant de revenir sur son ventre. Il souriait toujours, d'un air qui se voulait toujours joyeux et remotivant.

" Je suis suspendu à tes lèvres. Tu n'a besoin que d'un mot pour que je me lance... ou m'arrête. "
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MessageSujet: Re: Péchés véniels [Grayle]   Péchés véniels [Grayle] EmptyMar 13 Juin 2017 - 17:01
Se trouver enlacée, retenue et protégée par des bras d'homme, moins forts que ceux de son époux, mais solides tout de même, ne lui était pas arrivé depuis le début de son veuvage, et elle se laissa aller, fermant les yeux et s'abandonnant à l'homme, se laissant guider, ses paupières rougies demeurant obstinément closes, même alors qu'elle sentait autour de ses hanches le poids du prostitué. Mais ses derniers mots ramenèrent sur lui le regard liquide de la forgeronne, l'eau de ses prunelles noyée dans l'eau de ses larmes.

« Non. Je te remercie, mais je ne veux pas céder, pas me laisser aller à être faible. »

Gentiment, mais avec assez de force pour qu'il ne puisse résister sans l'affronter ouvertement, elle le fit basculer pour qu'il se retrouve non plus au-dessus d'elle, mais à son côté. Mais elle adoucit cette rebuffade en prenant la main de l'homme entre ses doigts calleux.

« Je crois que j'ai besoin d'un ami, plus que d'un amant. Je suis venue poussée par un désir de chaleur humaine plus qu'une envie charnelle, je crois. »

Elle inspira profondément, et son souffle puissant évoquait davantage un cheval fourbu qu'une jeune femme alanguie.

« Si je te paye comme pour... Ce que tu fais d'habitude, est-ce que je peux simplement rester avec toi, contre toi ? Pour un peu de compagnie sans péché ? »

Elle craignait qu'il refuse, et la chasse, tout en éprouvant le besoin de partager un moment de tendresse simple, de complicité. De souffler, un peu, loin de la forge, de ses responsabilité de fille, de femme et de mère. De plus, elle ignorait comment prévenir une grossesse. Se retrouver enceinte alors qu'elle était veuve aurait fait d'elle la femme de tous, et elle perdrait le respect de ses voisins et de ses clients. Sans parler des explications qu'il lui faudrait fournir à sa famille...

« C'est apaisant, de me dire que mon fils ne va pas m'appeler, ni mes parents. Que personne n'attend rien de moi, à part une chose très concrète et simple. »

Elle faisait là allusion à l'argent, et comprenait pourquoi certains préféraient payer une prostituée plutôt que d'honorer leur femme. La facilité d'agir ainsi, de n'avoir aucune obligation, était dangereusement séduisante.
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MessageSujet: Re: Péchés véniels [Grayle]   Péchés véniels [Grayle] EmptySam 22 Juil 2017 - 12:39
Inutile de dire que la déception se lisait sur le visage de Grayle. Il aurait pu la cacher, bien sûr, mais n'en avait pas envie. Oh, certes, il était un prostitué, et n'avait, au final, pas vraiment droit au chapitre quant à ce que la cliente attendait de lui. Mais il voulait que cette femme, qui n'avait sans doute pas des montagnes de confiance en elle, voir qu'elle pouvait décevoir un homme en se refusant à lui.

Elle l'avait repoussé avec une force contenue, mais qu'il pouvait deviner conséquente et réelle. S'ils devaient en venir aux mains, il doutait de ses chances face à elle. Il imagina son mari comme un colosse de 2 mètres, avec une barbe épaisse et des muscles colossaux, tel un dieu de la guerre. Il se mit à complexer sur son absence de pilosité, ses muscles pas si épais ni visibles. Les doigts de Cyrielle étaient plus larges que les siens, et ces derniers s'entrelacèrent les uns autour des autres.

" Cyrielle. Pour un peu de compagnie, tu ne devrais pas avoir à payer qui que ce soit. Tu peux même venir en dehors de mes heures de travail si tu le souhaite. " dit-il avec douceur. Il se mit sur ses coudes et s'éleva jusqu'à la tête du lit. Il l'attira contre lui, posant avec bienveillance la tête de la cliente sur son torse, afin qu'elle agrippe à lui.

La respiration de Grayle devint lente, mesurée et régulière, ses pectoraux gonflant et retombant doucement, berçant la blonde. La voix de l'homme devint légèrement plus grave lorsqu'elle parla de tranquilité.

" Je suis le maître dans ma chambre et nul n'y entre sans mon autorisation. Ici, tu es tranquille. Il n'y aura personne pour t'embêter. "

Il lui lança un regard amusé.

" Ceci dit, je connais d'autres endroits, en ville, où il y a une vraie tranquilité absolue. "

Il passa une main dans ses cheveux, gratouillant gentiment son cuir chevelu comme si elle n'était qu'un gros chat.

" Tes parents sont du genre... envahissants ? "
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