Marbrume


-28%
Le deal à ne pas rater :
Brandt LVE127J – Lave-vaisselle encastrable 12 couverts – L60cm
279.99 € 390.99 €
Voir le deal

Partagez

 

 Er wollte Caesar sein, er ist nur Pompeu gewesen (titre en construction)

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
Anton GunofBoucher
Anton Gunof



Er wollte Caesar sein, er ist nur Pompeu gewesen (titre en construction) Empty
MessageSujet: Er wollte Caesar sein, er ist nur Pompeu gewesen (titre en construction)   Er wollte Caesar sein, er ist nur Pompeu gewesen (titre en construction) EmptyMer 17 Mai 2017 - 0:18
Cet événement fait suite au rp Elle avait une bouche à rester vierge.

Fin d'été.
La cérémonie avait lieu dans une chapelle de seconde zone.
La bâtisse était sombre et froide. Les lueurs des rares bougies ne rayonnaient guère. La mansarde était bondée. Des dizaines d’hommes l’occupaient, et le double au moins se tenait à l’extérieur, sur le parvis, à essayer de voir ce qui se passait sur l’estrade mitée au fond du temple. La matinée commençait à être bien entamée, et tous ces miliciens qui débordaient congestionnaient peu à peu la circulation de la rue.

A l’intérieur, les dernières recrues essayaient de faire fi des insultes des charretiers agacés par cet embouteillage anormal et des autres bruits de fonds qui parvenaient de la route ; ils composaient, tant bien que mal, une face grave pour leur cérémonial d’initiation. Le rituel se déroulait d’habitude dans le grand Temple de Marbrume, un immense bâtiment solennel de fonds en combles. Mais pas ce coup-là.

Tandis que les verts tiraient des tronches dignes en prêtant leur serment et en recevant leur épée, les Antoniens qui assistaient à l’élévation des nouveaux gars paraissaient déçus et colère. Gunof, plus que tous les autres, avait une mine de déterré. Raide sur l’estrade mitée au fond du temple, son regard était absent et pourtant ses yeux, ses yeux on aurait dit du feu. Son expression faciale, moitié rictus haineux moitié front désespéré, suintait une anxiété qui se réverbérait sur tous les siens.

Entre les psalmodies du prêtre, les objurgations du sergent et les oblations des engagés, les Antoniens murmuraient.
« Il est fini, » disaient deux d’entre eux en fixant leur supérieur qui donnait l’accolade à une recrue devenue milicien grâce aux formules magiques du prêtre.
« Regarre, il a même plus son épée. Ils lui ont pris. » Les gars, depuis quelques jours, avaient senti s’amonceler contre eux des volontés inconnues et puissantes. Leur sergent s’était fait plus absent, et quand il revenait d’on ne sait où, il était maussade et taciturne. La nuit, au contraire, il gueulait des trucs imbitables dans son sommeil. Il dormait peu, par intermittence, plus du tout. Sa voix était devenue encore plus cassante qu’à l’accoutumée, ses punitions plus sévères encore ; et parfois pourtant il ne finissait même plus ses phrases, pris d’un subit accès d’apathie. Quand il se reprenait, alors ses yeux bondissaient partout, fiévreux comme un pendard emmené à la potence.

Le comportement inquiétant de leur patron inquiétait naturellement ses garçons. L’atmosphère de fin de règne s’exacerba quand des chevaliers de la maison ducale vinrent visiter le sergent Gunof. A partir de ce moment, les messes basses se multiplièrent, partagées également entre deux questions : quel vice avait eu raison du sergent ? Et qui lui succèderait ? Les rumeurs couraient de coutilerie en coutilerie.

« C’était trop beau pour durer, » tenta un autre des gars, partagé entre le regret et la contrition. Le sergent avait toujours aimé gâter sa base, mais tout le monde savait d’où venait le beurre avec lequel il graissait les essieux de ses coutileries. Crévieux, ce n’était pas qu’ils fermaient les yeux sur la contrebande, ils l’organisaient ! La sergenterie Gunof était infestée de transfuges de l’Ecot rouge, de malfrats des docks et de vétérans de la vieille garde. Les recrues raflées çà et là étaient écrasées par ce noyau dur de butors locaux. L’intégration était expéditive, celui qui ne prenait pas le pli finissait dans l’Externe au fin fond des marais ou dans le ruisseau d’une venelle. La technique paya, en un rien de temps, Gunof eut sept coutileries opérationnelles sous la botte.

Il ne faisait pas bon sortir du rang chez les Antoniens. Ou être une femme, ou un étranger, ou avoir la vertu mal placée. Mais une fois qu’on avait compris ça, une fois qu’on en était, c’était dur d’en décrocher. Car dans les baraquements antoniens, il fallait se lever sacrément tard pour ne pas grailler à sa faim, boire à satiété et baiser tout son soûl. La seule chose que tu avais à craindre était la sainte Trinité : le Gunof, le Sigfroi et le Fangeux.

Douce, douce damnation, mais damnation quand même. Ceux qui avaient accompagné l’ascension fulgurante de Gunof n’avaient jamais voulu envisager la fin de cette idylle pour soldats. L’ordre ducal régnait, donc la garde méritait tous ses à côté ; les résultats étaient là, donc les méthodes étaient toutes justifiées. L’ambiguïté morale qui formait le mode opératoire des gars à Gunof n’avait pas de raison d’être remise en cause tant que leur chef grimpait. Mais la grimpette était finie, le sergent à présent dévalait la pente dans le mauvais sens. Les uns, le voyant dégringoler, se découvraient des remords, les seconds nostalgisaient déjà sur le « bon vieux temps » et les derniers craignaient que leur impunité ne soit levée une fois Anton déchu.

« Les autres de la Plätz disent qu’il a mis le schwänz dans la bouche d’une qu’il aurait pas dû, » fit quelqu’un, moins philosophe que l’autre, en rapportant ce qu’il tenait des gardes de l’Esplanade. « Le mari a demandé qu’il crève, qu’y paraît… »
« Il a l’air d’être mort, à toi ? »
répliqua le philosophe, brusquement.
« Un peu. Bientôt, peut-être… »
« Sigfroi ossira pas le premier bâtard qu’a mis du sel sur un mordeur. »
« Tu bouffes vraiment toutes les menteries qu’il nous sert toi. Si ta femme te fait des cornes et te dit que t’es Serus tu vas l’accroire ? Il a rien mis d’autre dans des mordeurs que sa queue, dummkopf. Tout ce qu’il a dégoisé sur l’Ecot rouge, sur sa balade avec les vingt salopards, sur le sel, ses maîtresses, sa rencontre avec la princesse, tout ça c’est que de la flûte. »
ricana âprement le réaliste, qui se sentait un besoin nouveau de tuer le père Gunof.
« Ils peuvent pas l’ossir. Ca déplairait aux dieux. » martela l’autre.
« Dans tous les cas, il est fini, kaput. » conclut, sombre, le réaliste tandis que la cérémonie se terminait.

Un silence profond flotta un instant pendant lequel tous les regards assaillirent leur sergent, qui les zyeutait comme il aurait zyeuté l’abîme. Ils fermaient bien tous leur gueule, d’un coup, comme lui fermait bien sa gueule également. C’était le moment pourtant. C’était le moment d’attraper ce silence et de le remplir avec des explications, avec des crâneries ou avec des mensonges. Les gars n’avaient même pas besoin qu’il joue les fiers-à-bras des beaux jours ou qu’il se lance dans une harangue toute martiale. Ils ne voulaient même pas des réponses à leurs interrogation, sentait-il, mais qu’il se débarrasse de ce manteau d’ombre qui l’avait drapé dernièrement. Ils souhaitaient le voir une ultime fois réinvestir ce corps qui n’exprimait désormais plus qu’une angoisse mortifère et tellement contagieuse.

Il avait cette impression sublime et ridicule qu’ils étaient tous ses enfants, ses enfants qui attenaient le chevet du patriarche mourant, qui attendaient, aussi enfiévrés que lui, son dernier râle, son dernier quelque chose pour qu’il les libère en quelque sorte, et qu’ils puissent faire leur deuil de lui.

Le moment s’éternisa, Anton ouvrit la bouche, resta béat. Un mouvement imperceptible inclina la foule des soldats vers lui ; ils avaient les esgourdes grandes ouvertes. Crévieux, il aurait pu chialer qu’ils auraient chialé, il aurait pu raconter une millième fois sa blague de la pute, du lépreux et de l’Arcadien qu’ils auraient ri aux éclats. Il aurait pu envoyer se faire mettre le duc et les Trois qu’ils auraient acclamé.

Rien ne lui vint. Il sentait que sa bouche pâteuse, son front brûlant et ces cent vingt yeux qui le foudroyaient silencieusement. Il ferma ses poings qui tremblaient et baissa les yeux. Le charme relâcha les hommes et se dissipa ; un coutilier aboya que la partie de plaisir était finie, qu’on avait du boulot et la chapelle se vida et Anton resta seul, au fond, sur l’estrade mitée.
Revenir en haut Aller en bas
 
Er wollte Caesar sein, er ist nur Pompeu gewesen (titre en construction)
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Marbrume - Forum RPG Médiéval Apocalyptique :: ⚜ Cité de Marbrume - Quartiers populaires ⚜ :: Bas-Quartiers-
Sauter vers: