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 Pour un bout de pain [Alfonso Oncero]

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Louise OchaisonErudite
Louise Ochaison



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MessageSujet: Pour un bout de pain [Alfonso Oncero]   Pour un bout de pain [Alfonso Oncero] EmptyVen 15 Sep 2017 - 12:10
S’il vous plaît, je vous … En supplie.

Les mots étaient tombés comme des pierres sur le rebord de fenêtre du vendeur de pâtes. Ces palabres-là n’allaient pas dans la bouche de l’érudite. Et même si la jeune femme faisait de la peine à voir, le boulanger improvisé qui profitait de la disette pour vendre son pain bourré de cendres au bord de la rue restait de marbre. Elle tenait dans le creux de sa paume les petites pièces de cuivre qu’elle avait amassé toute la journée durant. Et l’homme bedonnant devant elle n’osait même pas la regarder.

C’est tout ce que j’ai…
J’en veux pour 8 pistoles. Tu en as 6. Tu passes ton chemin.
La moitié ? trouva la jeune femme. Vous ne voulez pas m’en donner la moitié pour 4 pistoles, s’il vous plait ?
Et puis quoi encore ? s’offusqua l’homme. Vires de là, tu bloques le passage.

Et le boulanger colla sa grande paluche sur l’épaule de la jeune mère. Les temps étaient dur, l’érudite n’était pas plus grosse qu’un fétu de paille. Elle eut à peine le temps de refermer ses doigts sur les pièces qu’un grand moustachu avait posé l’appoint devant le vendeur à la sauvette. Il repartit avec la dernière miche. Et elle repartit avec la même faim qui lui tenait le ventre depuis des semaines.

D’un coup, elle, à l’habitude inébranlable comme la plus vieille des montagnes, eut les larmes au bord des yeux. A Marbrume, elle était en enfer. La faim, le froid, l’hiver, l’insalubrité, la misère… Et maintenant, elle se sentait comme une criminelle. Une mendiante qu’on évinçait même des échoppes les plus précaires.

Un instant, elle s’assit sur le rebord de la chaussée. Pour se calmer. Pour étouffer ce long sanglot qui montait de sa poitrine vers sa gorge pour la nouer. Trop fière. Elle avait été un jour trop fière. Et elle n’avait cessé de dégringolé toute sa vie. Là, elle touchait le fond.

Si ça n’avait tenu qu’à elle, elle se serait arrêtée là. Pas la peine de voir davantage de ce monde qui n’en serait bientôt plus un. Si avait été seule, elle aurait tout jeté ; l’argent dans sa main et sa vie qui fuyait déjà dans le caniveau. Abandonné. Elle aurait simplement abandonné s’il n’y avait pas eu l’enfant. A cet instant, c’était la dernière chose qui comptait. C’était pour cela qu’il fallait continuer de se retrousser les manches et de se battre. Sans l’amour pour l’enfant, elle ne se serait probablement jamais relevée de là.

Elle prit du temps pour pleurer parce qu’après tout, cela soulageait un peu son cœur trop lourd. Et elle réfléchit aussi. A ce qu’elle pouvait faire de plus.

Si elle avait été capable de supplier un marchand douteux peut-être qu’il était enfin temps d’aller chercher de l’aide là où elle pouvait en trouver. Parmi ses connaissances, elle chercha qui était le plus à même de lui donner un petit coup de main. Pour une raison inconnue, un mélange de délire lié à l’épuisement et la faim, le nom qui vint le premier fut celui d’Azhim Khalil. Voilà un moment qu’elle n’avait pas revu le domestique. Sans être le plus démonstratif, elle savait que son ancien élève accepterait de lui fournir au moins de quoi se nourrir. Il savait pour le petit. Elle lui avait à demi-mots.

Fragilement, elle se remit sur ses frêles jambes pour se rendre sur l’esplanade. Là où devait vivre la comtesse Victoire, la maîtresse de l’homme qui avait partagé bien des journées à ses côtés. Après une longue marche, elle se tient devant la belle demeure, ne sachant comment entrer à l’intérieur. Une lavandière entra, elle l’aida à porter son panier et lui demanda poliment les quartiers des domestiques qu’on lui indiqua gentiment. Devant la porte qu’on lui indiqua, elle toqua plusieurs fois. Aucune réponse. Et tous ses espoirs tombèrent à l’eau. Il devait être parti, occupé ou simplement ailleurs.

Elle se trouva là, devant la porte. Idiote. Pas au bon endroit. Pas au bon moment. Pas à sa place ni dans l’espace ni dans le temps.

Plus que tout, elle se trouva ridicule. Stupidement en train de taper à toutes les portes. Débile au point de croire qu’il y avait quelqu’un quelque part prêt à lui tendre la main. Douce utopie.

Une autre larme roula sur sa pommette creuse. Elle la sécha, tentant tant bien que mal d’emplir son cœur de courage. Et elle revint sur ses pas pour sortir de ce bel endroit qui n’était pas pour elle. Après tout, tout ce qui avait une once de beauté n’était plus pour elle…

Elle descendit un escalier, tentant de se faire aussi petite qu’une souris égarée. Elle reprit les longs couloirs qu’elle avait emprunté. Et elle se trouva bientôt devant la porte par laquelle elle était entrée.

Tout le long personne n’avait croisé son regard rougis et au bord d’un gouffre de tristesse, à peine retenu par un courage vacillant. Ce n’est qu’au moment de pousser la porte, qu’en levant les yeux, elle tomba sur une silhouette familière.

Un homme au regard sombre et à l’allure soignée. Une belle étoffe. Elle ne se souvenait plus où elle l’avait vu, quand. Pourquoi et dans quelles circonstances elle avait eu l’occasion d’avoir une conversation avec une personne comme lui. Pourtant, il ne devait être qu’un domestique. Mais à côté, elle se sentait gueuse.

Un instant, elle soutint son regard sombre et elle craignait de se faire chasser, elle qui était déjà quasiment du mauvais côté de la porte.
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MessageSujet: Re: Pour un bout de pain [Alfonso Oncero]   Pour un bout de pain [Alfonso Oncero] EmptyDim 17 Sep 2017 - 12:15
Encore une journée... J'agissais presque machinalement à présent, je me levai à une heure précise, une toilette bien faite et rapide, je portai ma livrée sur mes épaules, et voilà, le manoir était encore vide, il n'y avait que quelques domestiques qui débutaient comme moi leur journée. Ce matin, je me rendais en cuisine, et demandais à ce qu'on taille quelques fruits, en récitant les préférés de Mademoiselle Victoire.

La suite, j'attendais l'heure précise, puis je lui apportais son petit déjeuner. Tout se faisait ainsi, la noble était comme ça, tout était sous contrôle, et tout devait être réglé parfaitement.
Elle agita sa main gauche, et je compris que je devais débarrasser, et disposer. J'avais perdu cette notion d'orgueil vis à vis d'elle. C'était comme acquis, j'étais devenu une ombre humaine qui était là, juste pour servir la baronne de Brasey.

Je me surprenais moi-même à changer lorsque je quittai l'uniforme ou quand on m'autorisait quelques instants de pauses. C'était comme si la livrée me bouffait mon âme petit à petit ! Et je n'arrivais pas à lutter contre cela.
Les minutes passèrent, je faisais des tours dans le manoir, en restant tout de même proche des appartements de ma Maîtresse au cas où. Je savais qu'elle pouvait rester comme ça des heures dans sa chambre.

Une journée ordinaire, je vivais au rythme des désirs de la jeune sang-bleu. Je discutais avec mes confrères, nous parlions de tout et de rien, des rumeurs aussi, nous aimions cela, parler, commenter les agissements, les derniers achats des habitants de la demeure. On riait amèrement en se disant que la vicomtesse pouvait s'acheter un bijou qu'on ne pourrait jamais acheter nous-même, même en travaillant toute nos vies, ou qu'il nous faudrait peut-être atteindre les cents ans.

On prenait conscience de cette inégalité, puis on se consolait en cherchant une réponse dans la trinité. Que le destin était ainsi fait. Et que peut-être avions-nous de la chance dans nos petites vies de pouvoir travailler, et servir des gens comme les habitants du manoir.

Puis à un moment, je décidais de sortir un peu. Rosalie m'avait averti que Mademoiselle n'aurait pas besoin de moi pendant une bonne heure. Alors je décidais de faire un tour dans le jardin, il ne fallait pas non plus qu'on me voit sans rien faire.
Et puis comme je pourrais respirer l'air frais. Je me faufilais comme un poisson dans l'eau dans les quartiers des domestiques que je connaissais comme ma poche à présent.

En arrivant à la porte, je remarquai une présence étrangère. La frénésie qui habitait le quartier des petites-mains faisait souvent qu'on ne prêtait pas attention à ce genre de détail, mais là, il s'agissait d'une personne que je connaissais.
Que faisait-elle là ?
Il s'agissait de Mademoiselle Louise, l'érudite qui m'avait donné une petite leçon de lecture et d'écriture.
D'un pas vif je me dirigeais vers elle.
-" Mademoiselle Louise ?! " Murmurais-je en posant ma main sur son épaule pour la guider vers la sortie. En voyant auprès d'elle, un autre domestique s'éloigna en voyant que je la connaissais ou que du moins je m'occupais de cette personne qui ne devrait pas forcement être là.

J'ouvris la porte et nous sortîmes.
-" Que faites-vous ici ? Mademoiselle..." Je soupirais en voyant son état, néanmoins je restais comme d'ordinaire.
-" Vous désirez parler à la Vicomtesse ? Ou à l'un des membres de la Famille de Brasey ? " Demandais-je en ne voyant que cette hypothèse et qu'elle s'était égarée en trouvant la porte de service des domestiques.
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MessageSujet: Re: Pour un bout de pain [Alfonso Oncero]   Pour un bout de pain [Alfonso Oncero] EmptyMar 19 Sep 2017 - 12:41
Mademoiselle Louise ?!

C’est quand il ouvrit la bouche, étonné, qu’elle reconnut sa voix : c’était le domestique avec qui elle avait passé la journée, il y a une semaine cela. Une semaine ou deux semaines. Elle ne se souvenait plus. Le temps filait bien trop vite. Et le temps ne se souciait pas d’elle.

Il la rejoint, met une main sur son épaule. La protège en somme. Car un patrouilleur s’approchait d’elle. Elle qui ne venait sans arme et sans mauvaise intention.

Ensemble, ils sortirent dehors. La tête de l’érudite s’affaissait entre ses deux épaules.

Que faîtes-vous ici, Mademoiselle ? la questionna l'homme dans sa belle livrée. Vous désirez parler à la Vicomtesse ? Ou à l’un des membres de la Famille de Brasey ?

Elle secoua la tête pour faire signe que non. D’aucune manière elle ne voulait avoir de problèmes. Entrer dans une demeure qui n’était la sienne n’était guère dans ses habitudes alors elle avait de la peine à avouer son délit. Elle voulut articuler quelque chose sans vraiment arriver d’agencer quelque chose de cohérent. Elle ne voulait pas mentir. Alors elle prit son souffle et expliqua, la gorge serrée :

Je venais juste voir un… Un ami, bégaya-t-elle, voulant faire simple. Il est absent alors je m’en vais.

Par accident, elle croisa le regard du domestique. Alfonso. Il lui avait dit son nom et elle s’en rappelait. Et elle se sentait à nu devant lui. Incapable de gérer la moindre émotion.

Tout au fond des yeux claire de la jeune femme n’était que tourment. Son corps n’était plus que carcasse. Sa carcasse, un sac à os grelottant depuis que l’hivers revenait. Et la persévérance et la douceur et le courage qu’elle avait pu affiché lorsqu’ils s’étaient rencontré la première fois avait fondu comme neige au soleil.

Je… Je ne veux pas déranger, elle murmura en baissant les yeux.

Ils n’allaient pas tarder à déborder de larmes.
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MessageSujet: Re: Pour un bout de pain [Alfonso Oncero]   Pour un bout de pain [Alfonso Oncero] EmptyMar 19 Sep 2017 - 16:07
J'attendais sa réponse, j'attendais qu'elle me réponde qu'elle souhaitait parler à l'un des habitants du manoir avec l'intention de la conduire dans le salon et d'avertir la personne qu'elle venait voir comme le voulait le protocole qu'on m'avait enseigné.
Néanmoins, la silhouette de l'érudite m'inquiétait. Cela faisait peu de temps que nous nous étions rencontrés, et elle me semblait si différente, bien maigre, trop maigre même.
Les yeux attentifs, je l'écoutais alors qu'elle venait voir un ami, et que, comme il était absent, elle partait.

La manière dont elle parlait ne me disait rien qui puisse me rassurer. Elle bégayait. Quand nos regards se croisèrent je fus encore plus marqué par son état, par cette lueur dans ses pupilles, c'était quelque chose de triste, de profond, de solitude aussi.
Je voulais me convaincre du contraire, mais je ressentais de la peine pour elle. C'était étrange, une personne qui possédait un tel savoir, de telles compétences ne pouvait à mes yeux qu'être malade. Je pensais qu'elle venait là, pour peut-être enseigner à ma Maîtresse ou un autre habitant du domaine, mais plus le temps s'écoulait, plus j'avais du mal à le croire, même si je luttais contre les autres hypothèses.

Ma main sur mon épaule se surprenait même à ne toucher qu'un os sous le tissu. Une épaule qui tremblait, et un regard tourmenté. Je la regardais, avec des gros yeux, en la dévisageant, en essayant de comprendre simplement.
Sa voix, cette voix, oui, c'était cella là qui sort de la gorge avant les larmes.
-" Mademoiselle Louise..." Soufflais-je timidement après qu'elle eut dit qu'elle ne voulait pas déranger.
Je portai ma seconde main sur son autre épaule pour lui faire face. Que pouvais-je bien faire ?
Le plus aisé aurait été de la laisser là, et la voir s'éloigner sans me soucier de son sort.

-" Qui est donc cet ami ? Peut-être pourriez-vous l'attendre ? Et en attendant j'irai vous chercher une boisson chaude. " Oui, je reculais l'hideux moment où je devrais laisser cette idée me convaincre, cette voix qui me disait qu'elle allait mal, et qu'un esprit élevé n'excluait pas la misère.
J'ôtai mes mains de sur ses épaules, puis j'osai !
-" Que vous arrive-t-il Mademoiselle ? Puis je vous aider ? " Demandais-je d'un ton discret, et intime.
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