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 À travers les eaux troubles [Matteu]

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HermineSaltimbanque
Hermine



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MessageSujet: À travers les eaux troubles [Matteu]   À travers les eaux troubles [Matteu] EmptyVen 16 Nov 2018 - 21:31
À travers les eaux troubles [Matteu] 01_her10

La mer, quand on est sur la plage, ça sent le sel, le sable, ça invite à imaginer ce qui se trouve là-bas à l’horizon. Mais la mer dans un port, ça pue. Tout ce qu’il reste c’est l’odeur des algues en train de macérer dans leur jus, des cadavres de rats rongés par les crabes et ce parfum gras de poix, près des entrepôts.
C’était là qu’était venu rôder Hermine ce soir. Dans son plus bel habit de main noire, elle avait filé du Labourg au Goulot, tantôt par les venelles, tantôt par les toitures, avant de remonter vers le port. Il faisait froid, on attendait encore la neige, mais ça n’empêchait pas le moindre recoin humide de geler après la tombée de la nuit, ce qui rendait la course plus dangereuse pour les fuyards comme pour les poursuivants. Mais ça n’avait pas arrêté l’acrobate, qui préférait se rompre les os en essayant de les réchauffer que de sentir ses extrémités s’engourdir de froid. Le panache blanc de son souffle passait à travers le masque de tissu qui lui couvrait la bouche et le nez.

Elle avait passé l’été sur le port, faisant le tour de toutes les impasses, de tous les quais, de toutes les ruelles étroites pour les avoir bien en tête. Dansant de jour pour le plaisir des passants et quelques piécettes, frayant la nuit avec les contrebandiers. À force de proposer ses bibelots brillants, elle s’était fait quelques contacts et une bonne réputation tout en restant assez discrète pour ne pas attirer l’attention. Puis elle avait disparue, du jour au lendemain. Pas de dettes, pas de contrat à honorer, elle laissait derrière elle une place vacante trop insignifiante pour que quelqu’un la prenne. Alors à quoi bon revenir ?

Deux jours auparavant, une connaissance à elle était venue la trouver pour lui demander un service. Trois fois rien à première vue, juste remettre à un gars un objet parce que la milice les avait à l’œil. Bonne poire et surtout pas folle, la drôlesse avait demandé à être payée pour la mission, et rubis sur l’ongle s’il vous plaît. Le ladre s’était exécuté avec une aisance qui lui mit la puce à l’oreille, mais curieuse comme un chat elle avait tout de même accepté de se rendre sur place. Qu’est-ce qui se tramait donc par là-bas qui puisse lui échapper ? Et surtout, comment pouvait-elle mettre son grain de sel dans l’histoire sans que l’engrenage ne lui arrache le bras tout entier ? Le défi était aussi imprudent qu’inutile, mais c’était bien pour cela qu’elle comptait le relever.
Le soir de la livraison, elle avait donc informé ses frères de toute l’affaire. Ils ne tentèrent pas de la dissuader, après tout elle avait déjà accepté l’argent et cela faisait longtemps qu’elle ne les écoutait plus, mais ils promirent de garder un œil ouvert pour s’assurer que personne n’allait rôder dans leur coin de cimetière cette même nuit. Simple mesure de sécurité.

Arrivée à l’entrée d’une ruelle qui donnait sur tout un réseau de venelles mal fréquentées, elle prit une bonne inspiration en essayant d’ignorer le parfum écœurant du port et se glissa parmi les ombres. Preste et souple, Hermine suivit le trajet qu’elle avait déjà arpenté plusieurs fois jusqu’à l’arrière d’un bâtiment d’où provenaient des voix. La pile de caisses qui s’adossait au mur lui permit sans difficultés de se hisser jusqu’au premier étage où un rebord de fenêtre lui fournit un perchoir satisfaisant. Elle n’avait ensuite plus qu’à grimper sur le toit et retrouver le trou camouflé qu’elle avait pratiqué là plusieurs mois auparavant pour se ménager une entrée discrète. Ce n’était pas grand-chose, juste quelques tuiles dans un angle qu’elle avait déplacé et qui pouvait se remettre en place facilement. Usant de ses talents, elle tordit son petit corps jusqu’à le faire entrer entièrement par l’ouverture et remit en place les tuiles de l’intérieur.
Elle se trouvait désormais dans le bâtiment voulu, une taverne crasseuse et sombre où il ne faisait pas bon entrer lorsqu’on ne savait pas quoi faire de sa soirée. C’était l’un des établissements du port dans lequel transitait le plus d’escrocs, de main noire, de passeur et de racaille en tous genre. On vendait et on achetait sous le manteau, on se laissait berner par une moulière aux hanches larges pour une passe qui se ferait sans doute dans les écuries vides juste à côté, on fomentait des plans pour dérober ou assassiner.
La violence n’avait jamais fait partie des habitudes d’Hermine et elle ne comptait pas changer cela, cependant elle devait la connaître pour mieux la repérer et l’éviter. Ou jouer avec.

Installée confortablement dans la pénombre des combles ouvertes de la taverne, la jeune femme ne craignait aucuns regards. L’espace, en forme de L, longeait deux des murs de l’établissement et ne servait qu’à stocker des marchandises dans des sacs, des tonneaux ou des caisses. On y accédait par une échelle de meunier, derrière le comptoir. Le reste de l’espace était occupé par les poutres de la structure du toit formant un maillage sombre au-dessus de la salle.
Agenouillée près du bord de sa plateforme en hauteur, elle s’autorisa un regard en bas. La lumière était pauvre, on économisait le suif par ici, et il y avait du monde. Certains jouaient aux cartes, le butin misé se trouvant au milieu, d’autres conversaient à voix basse. Pas de musique.

Portant une main à la petite aumônière à sa ceinture, la voleuse s’assura qu’elle avait toujours l’objet qu’elle devait livrer. Un « simple » bracelet, bien qu’il soit en argent gravé et orné d’une pierre précieuse. Le genre de bijou si unique en son genre qu’il n’est pas aisé de le revendre, voilà pourquoi elle comptait le livrer comme prévu plutôt que de le subtiliser. Que pouvait avoir ce bracelet de si spécial pour qu’on lui demande de jouer les hérauts ? Peu importait, elle devait juste repérer son acquéreur et se faire une idée de la faune locale avant d’entrer par la porte de devant. Le bonhomme devait être massif, le crâne rasé et une rose des vents tatouée au sommet de la tête. Pas bien difficile à localiser donc. Assit à l’une des rares tables avec une lampe, le gars était en train de disputer un bras de fer contre un autre, beaucoup plus malingre. À première vue il était seul mais il semblait aussi en mesure de se défendre sans aide, cela dit.
Après plusieurs minutes à observer toute la taverne ainsi que sa cible, Hermine retourna dans la rue par où elle était venue, refermant le passage derrière elle avant de rejoindre l’entrée principale. N’ouvrant que peu le battant de la porte, elle se glissa à l’intérieur sans qu’on ne la remarque et rasa les murs pour s’approcher de l’homme. Avec sa petite taille et sa capuche rabattue sur la tête, personne ne prêtait attention à elle. C’était tout le principe d’être un petit prédateur parmi les fauves : parvenir à s’emparer d’une part du butin sans que les plus gros ne le remarque et sans qu’ils ne vous considèrent comme une menace.

Arrivée à deux tables de là où elle comptait faire l’échange le plus rapidement possible, la jeune femme se figea. Un nouveau protagoniste était apparu dans la scène, de quoi la rendre plus méfiante. Ce n’était peut-être rien, peut-être juste un jouvenceau adossé à l’un des piliers de la salle non loin de sa cible à elle, mais elle n’aimait pas les regards que le tatoué lui lançait et qui lui étaient rendus. Elle ralentit sa progression. Le tatoué s’était levé pour s’approcher du jeune homme et semblait vouloir lui parler très bas, parce qu’il s’était penché pour murmurer à son oreille. Hermine s’adossa au mur et attendit de voir la suite.
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Matteu
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MessageSujet: Re: À travers les eaux troubles [Matteu]   À travers les eaux troubles [Matteu] EmptySam 17 Nov 2018 - 1:37
Le temps eu rarement été aussi peu clément que ces jours-ci. La froideur de l'hiver avait planté ses crocs dans la terre, faisant germer ici et là, de délicieuses rosaces de glace. Comme la nature était ironiquement belle ! Les foules devenaient maigres dans les rues, et la populace raclait ses bourses pour un peu de bois dans le foyer. De jour en jour, mon étal cessa progressivement de se vider, jusqu'à ce que je ne vende plus la moindre tige. Les hommes quant à eux, préféraient rester bien au chaud à la maison devant un âtre frémissant, ou au lit derrière la croupe de leur femme. Ma bourse se vidait inexorablement, et ne se remplissait plus.

Saisissant mon courage à deux main, je me résolus à changer mes habitudes pour aller là où je trouverais quelques hommes moins frileux. Avant, je me rendis au temple pour faire offrande de mes fleurs en couronne, et adresser une prière aux dieux leur quémandant bonne fortune pour pouvoir gagner ma pitance. Je fis route à la tombée de la nuit vers le port, où j'évitais d'ordinaire tant bien que mal de mettre les pieds. Des souvenirs amers me remontaient en mémoire à mesure que j'avançais, mais je savais que là-bas, je trouverais bien quelques rustres à envoûter. L'avantage d'un mercure aussi bas, était que les marins devait quitter leurs rafiots pour prendre refuge au sec, et au chaud. Et il était de notoriété publique parmi nous autres qui faisons commerce de la luxure, que nulle n'avait plus d'appétit qu'un marin aux couilles bien pleines. Je n'eus pas à rôder bien longtemps avant de repérer ma proie. Je débouchai d'une ruelle sombre, et un peu plus loin, un gaillard pissait entre deux tonneaux. Les bruissement de mes pas lui fit tourner la tête dans ma direction, et je le toisai d'un regard mystérieux pour le jauger. Dans une telle situation, la plupart des hommes aurait détourné le regard, ou m'aurait enjoint de fiche le camp avec véhémence. Mais il eu pour toute réaction, de jeter un rapide coup d’œil tout autour...et oui, il n'y avait personne. Pour éclaircir mes intentions, je glissai une main dans l’entrebâillement de ma chemise, me tenant toujours prêt à courir, juste au cas où. Je devinais que ses mains commençaient à s'agiter entre les tonneaux, au mouvement de ses avant bras. Un dernier battement de cils, puis je me glissai sensuellement dans le premier entrepôt vide, juste à côté. Je ne pu distinguer ses traits que lorsqu'il traversa la ruelle pour entrer à son tour. Il avait le visage dur, comme bon nombre de marin, et son crâne chauve était surmonté d'une rose des vents tatouée à même la peau. Un sourire d'impatience commençait à poindre sur son visage, atténuant un peu la sévérité de ses énormes sourcils bruns. Il tira la grande porte derrière lui, vint me saisir avec empressement dans l’obscurité alors presque total,puis s'en suivirent quelques jeux de mains avant qu'il n'entreprit sa besogne.

Après une bonne demi-heure, et plusieurs retour à la charge, il se refroqua rapidement pour entrouvrir la porte de l’entrepôt pour vérifier que personne ne pouvait nous voir sortir. A son grand regret, au bout de la ruelle, se trouvaient trois hommes qu'il semblait connaître.

- Et merde ! Bon, tu ne bouge pas de là avant que j'les emmène ailleurs!
- D'abord, il faut payer, non?
opinai-je à voix basse.
- J'ai rien sur moi ! tenta-t-il de râler le plus faiblement possible.
- Alors je ne vais certainement pas attendre ici plus longtemps.

Je lui adressai un clin d’œil, comme pour lui lancer un défi. Je jouais un jeu dangereux. Il pouvait me faire taire sur le champs, et je ne serais sorti de là que les pieds devant. Mais après une tempête intérieure qui se lisait sur son visage, il reprit la négociation.

- Fait comme je t'ai dit, et attend que je les éloigne. Je serais à la taverne de l'autre coté des entrepôts, un dernier travail à finir et tu aura ton paiement. Mais reste discret !

J'acceptai ses conditions. Même si je n'avais aucune raison de lui faire confiance, je dus me résoudre à céder si je voulais pouvoir manger, et ne pas insister plus si je voulais garder la vie. Je me doute qu'un déviant découvert dans l'équipage d'un navire, ne devait récolter qu'une fin peu enviable. Aussi, je m'assis dans un coin, et suivis son plan. Peu de temps s'écoula avant que je ne puisse sortir sans crainte, je me dirigeai alors vers la dite taverne, devant laquelle je restai planté un long moment avant d'entrer. Je priai de toutes mes forces pour le trouver à l'intérieur. La faim faisait vriller mon estomac, et la sauvagerie animale de ce gros bourrin m'avait retourné les tripes. Je me décidai à entrer, et sondai rapidement la salle bondée du regard. Je le repérai assis à une tablée, en train de disputer des bras-de-fer, certainement pour gagner ce qu'il me devait. Pff, tu parles d'un "travail". Je traversai la salle en quête d'un coin à peu près propre ou je pourrais me poser, et passant à son niveau, il remarqua ma présence. Je m'adossai à une poutre non loin, feignant de m'intéressé aux jeux de muscle, disposant ainsi d'un point de surveillance largement suffisant. J'avais bien dû passer deux bonnes heures sans bouger de là, alors que les gargouillis de mon ventre se faisaient de plus en plus douloureux et sonores. Il me jetait de petits regards furtifs, non sans me communiquer sont agacement et sa crainte d'être dévoilé. Comme si tout le monde allait le deviner! Ça n'était pas ici, au milieu de baiseurs de porc et de gourgandines défraîchies, que qui que ce soit allait se porter en garde de la bonne morale. Se redressant promptement, le mauvais payeur vint jusqu'à moi, et se pencha pour me glisser à l'oreille :

- Prend ça, et va-t-en vite! siffla-t-il tout en me collant discrètement trois pistoles au creux de la main. Les choses risquent de se gâter ici, alors rentre chez toi!

Il se redressa un peu, et me tendit la le bras comme pour sceller une poignée de main secrète dans un échange mystérieux. Sans doute avait-il compris que personne ici n'irait se douter de quoi que ce soit. Mais son avertissement me paraissait des plus curieux, et les questions commencèrent à fuser dans ma tête. Qu'est-ce qu'il pouvait bien se tramer dans cette taverne crasseuse à cette heure? J'entrai dans son jeu, et me dirigeai d'un pas assuré vers le fond de la salle, comme pour sortir par l'arrière, alors que lui regagnait se place. Mais sans quitter l'établissement, je claquai la porte et me glissai derrière une barrique vide, trop avide de connaître la suite. Je l'apercevais difficilement depuis ma cachette. Il tapa brièvement du doigt sur le carreau de la fenêtre à coté de lui, et sans plus tarder, ses trois comparses que j'avais pu voir un peu plus tôt entre les entrepôts, firent leur apparition dans l'encadrement de l'entrée principale. L'autre issue à côté de moi, s'ouvrit également avec fracas, et deux autres gaillards s'ajoutèrent au mélange. Quelques silhouettes encapuchonnées dans la salle, visiblement coutumières de telles situations, se levèrent sans bruit pour disparaître par l'une ou l'autre de ces portes. Mon cœur commençait à s'emballer tant la tension était palpable. Le brouhaha de la taverne se mua en de vagues chuchotements éparses.

- Enfin ! Tu es là !

J'eu presque sursauté, lorsque mon payeur brisa cette atmosphère pesante, lâchant ces mots d'une voix forte et inquiétante. Je ne voyais pas à qui il pouvait bien s'adresser, mais pour rien au monde je n'aurais voulu être à sa place. Les cinq autres hommes de chaque côté, fondirent dans la salle et disparurent dans mon angle mort. Malgré ma conscience qui me susurrait de rester caché, j'essayai de me pencher pour voir la scène.
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HermineSaltimbanque
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MessageSujet: Re: À travers les eaux troubles [Matteu]   À travers les eaux troubles [Matteu] EmptyDim 18 Nov 2018 - 15:08
Sous la frange sombre de ses cils, Hermine avait suivit du regard le départ du jeune homme. De dos, sa silhouette lui semblait familière… À peine eut-il disparu vers le fond de la salle que le tatoué toqua au carreau juste derrière lui. Le signal, visiblement, pour que la taverne se change en clapier. Pas de doute, toute cette mise en scène était de mauvais augure pour la voleuse. Quelques clients plièrent bagage pour sortir mais Hermine était trop loin de l’une ou l’autre porte pour faire de même discrètement et le regard qui venait de se braquer sur elle lui disait que de toute façon, c’était peine perdue. On l’avait repérée et sans doute depuis un moment, inutile d’espérer filer par un trou de souris sans qu’on ne la remarque.
D’un rapide coup d’œil elle évalua la situation : trois hommes à l’entrée principale, deux à la porte de derrière et le gros tas assit dans sa chaise avec un air suffisant. Avec son gabarit de crevette, la demoiselle ne pouvait pas espérer engager un combat victorieux. Il lui restait son ouverture de secours, à l’étage, qu’elle pouvait essayer de regagner en se hissant aux piliers et jusqu’aux poutres au-dessus d’eux. Une entreprise risquée quoi que faisable si elle en avait le temps. Et puis il y avait la fenêtre, par laquelle elle pouvait toujours se jeter pour se retrouver dans la rue. C’était une option, à condition qu’elle arrive à faire bouger celui qui se trouvait devant.

Enfin ! Tu es là !

L’interjection sembla être le second signal et tous les ladres entrèrent définitivement dans la taverne, en refermant les portes derrière eux. Le reste de l’assemblée demeurait silencieuse, observant ce qui ne la concernait pas, faisant simplement office de décor. Personne ne s’interposerait, dans un sens comme dans l’autre, Hermine le savait. Personne ne viendrait donc l’aider.
Perdu pour perdu, elle se hissa d’un bond sur la table la plus proche pour dominer au moins d’une tête ses assaillants. Elle était cernée, autant les avoir tous dans son champ de vision. Peut-être qu’en déclenchant une bagarre générale, elle pourrait se faufiler jusqu’à une sortie… C’était un choix comme un autre. Ce qui lui échappait encore, c’était pourquoi on lui tendait ce traquenard. Était-il possible qu’on la prenne pour celui qui avait volé le bijou ? Difficile à croire.

Je vois que t’as des couilles : appeler cinq de tes potes, rien que pour moi… Tu pissais dans ton froc à l’idée de m’affronter ? le railla-t-elle en se désignant à deux mains.

Dit comme ça, c’était effectivement ridicule : Hermine ne mesurait pas plus de cinq pieds de haut et toute son anatomie était à l’image de l’animal dont elle avait le nom, c’est-à-dire très mince. On aurait pu la faire passer dans le chat d’une aiguille alors que fallait-il craindre d’elle ? Sa tenue de main noire était juste assez près du corps pour laisser deviner qu’elle était une femme et chacun sait comme la racaille se sent supérieure aux femmes. Plusieurs clients levèrent le nez vers elle, par curiosité, avant de détailler le tatoué. On entendit deux ou trois ricanements anonymes, ce qui agaça assez le marin pour qu’il se lève, le front rouge de colère.

Ta gueule. Tu vas prendre pour c’qu’on a pas pu mettre à Lovis, grogna-t-il entre ses dents.

La jeune femme plissa les yeux dans ce qui était clairement une expression pleine de colère et de dégoût. Voilà donc pourquoi cette enflure lui avait refilé le boulot, il savait qu’une correction l’attendait et préférait s’y soustraire. Au moins l’argent qu’il avait donné serait bien dépensé et permettrait de nourrir correctement les anciens de la troupe pour plusieurs semaines. Elle avait monnayé cher la raclée qu’elle allait se prendre.
Plongeant la main dans son aumônière, elle en sortit le bracelet et le tint à deux doigts devant elle pour le présenter au commanditaire de cette sinistre entreprise.

C’est ça que tu veux ? Il est pas question que tu me fasses la peau, gueule de cul. Alors si tu veux récupérer ton bien, t’as intérêt à me ménager une sortie royale.

Pour appuyer sa menace, elle attrapage le bijou à deux mains en faisant mine de forcer pour le faire rompre. Le bracelet avait une forme de serpent enroulé, il n’était donc pas fermé et en y allant avec assez de force, il était facile de le briser en deux. Allez savoir de combien sa valeur pourrait alors diminuer, une fois cassé.
Le grand tatoué frappa du plat des deux mains sur la table et ses compères lui jetèrent un regard, incertain sur ce qu’il fallait faire. Le plan initial était sans doute de simplement la passer à tabac avant de la fouiller, mais s’ils devaient perdre leur butin c’était tout de suite moins ingénieux comme plan. Elle ne valait pas la peine de s’asseoir sur pareil trésor. Pourtant le patron de la bande n’hésita pas une seconde à donner son ordre en beuglant :

ATTRAPEZ-MOI CETTE GARCE !

Les cinq lourdauds se mirent en branle, mais pas aussi vite que la voleuse. D’un bond agile, elle se retrouva sur la table suivante, soulevant une vague de protestations et d’injures. Le tatoué barrait toujours l’accès à la fenêtre, mais elle pouvait maintenant espérer s’enfuir par le toit ou la porte de derrière, qui se trouvait toute proche.
Encore deux tables avant que l’un des molosses à ses trousses ne se jette sur elle de toutes ses forces. Hermine atterrit sur le dos, écrasée par le poids du ladre, et se retrouva le souffle coupé. Son assaillant s’était sans doute cogné la tête au passage car il tenta de se relever en grognant, les gestes gauches et lents. Sans se préoccuper de ses poumons brûlants, la jeune femme se tortilla en lui envoyant des coups de pieds jusqu’à pouvoir se dégager, mais le temps qu’elle y parvienne, un autre était sur elle et l’attrapait par le col pour la soulever de terre. Il ne fallait pas espérer beaucoup d’intelligence de ces hommes, mais pour ce qui était de la force brute, ils n’en manquaient pas. Avec un rugissement, le type l’expédia cul par-dessus tête derrière le comptoir, où elle s’écrasa douloureusement. Sonnée mais surtout paniquée, la voleuse put compter sur un sursaut d’adrénaline pour ne pas être tout bonnement assommée et se redressa vite, avec des gestes un peu désordonnés. Son regard allait d’un coin de la pièce à l’autre, en passant pas ses assaillants, jusqu’à ce qu’elle ne tombe sur l’éclat d’un couteau posé là, juste à portée de main, parmi d’autres ustensiles de cuisine. Celui qui a dit un jour qu’un outil de cuisine ne pouvait pas être une arme est un complet imbécile. Se jetant sur la lame avec l’énergie du désespoir, Hermine évita de peu un poing énorme qui lui filait droit en plein visage et elle fila à l’autre bout du comptoir, en direction de la porte du fond.

Les trois hommes à ses trousses se trouvant le plus proche d’elle furent encombrés par les clients assit là ainsi que les tables trop resserrées les unes des autres, ce qui permit à la donzelle de prendre un peu d’avance. D’un bond agile elle sauta par-dessus le coude que formait le comptoir, à seulement trois mètres de la sortie. Elle y était presque ! Mais la silhouette imposante du tatoué se dressa alors devant l’issue de secours, infranchissable. Et ses compères arrivaient déjà derrière elle.
Ce ne fut qu’à cet instant que la jeune femme remarqua une présence qui lui était restée invisible jusqu’alors, bien cachée derrière un tonneau près du mur. Impossible de ne pas reconnaître le damoiseau qui avait attiré l’attention du tatoué un peu plus tôt. Une idée complètement folle traversa l’esprit de la voleuse.

Sans se soucier de la porte, elle plongea derrière le tonneau pour y cueillir l’intrus, passant un bras autour de sa gorge, la lame dans son autre main pointée sur sa carotide. Lorsqu’elle se redressa dos au mur, cachée par son bouclier humain, le tatoué aboya l’ordre de s’arrêter à ses complices. Dociles comme des chiens bien dressés, ces derniers s’exécutèrent.
Haletante, le cœur si proche de l’explosion qu’elle ne doutait pas que sa victime puisse le sentir battre contre son dos, Hermine raffermit sa prise. Pour une si petite femme, elle ne manquait pourtant pas de forces.

Dégage de là, sinon je lui perce un joli trou dans le cou et il se videra comme une outre.

Peu importait que ces deux-là soient amis ou non, du moment que le chantage marchait. Toute la racaille entassée dans cette taverne était sans doute violente et alcoolique, mais le meurtre était un vice dans lequel peu de personnes trempaient réellement. On pouvait frapper, casser des os ou faire sauter des dents, on pouvait même faire du chantage ou violer à tous de bras, mais tuer était encore un crime assez lourd de conséquences pour que chacun pèse le pour et le contre avec attention. Un meurtre dans cette taverne signait de gros ennuis pour tous les clients et aussi pour le patron. On ne voulait pas de la milice par ici. Ce fut d’ailleurs le gérant qui intervint, d’une voix forte.

Pas de ça ici, vous avez causé assez d’emmerde chez moi. Réglez vos affaires dehors !

Une vague de grognements s’en suivit dans la masse des clients, certains se levant même comme pour partir avant que les choses ne dégénèrent.
Hermine, elle, n’avait d’yeux que pour le tatoué qui lui bloquait encore le passage. Elle piqua un peu plus la peau de sa victime dans l’espoir que le voir s’effrayer suffirait pour qu’on lui permette de sortir.

Ça tient qu’à toi mon gros. Bouge ton cul de là.
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Matteu
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MessageSujet: Re: À travers les eaux troubles [Matteu]   À travers les eaux troubles [Matteu] EmptyDim 18 Nov 2018 - 23:02
Je m'extirpai un peu plus de ma cachette pour élargir mon champs de vision. Et quelle ne fut pas ma surprise lorsque je m’aperçus que l'ennemi publique qui nécessitait tant de paire de bras, était en fait une frêle jeune femme tout de noire vêtue qui venait de se hisser sur l'une des tables de la taverne. Elle provoquait ouvertement celui qui, encore quelques instants auparavant, me conseillait de filer. La voix et les intonations de ce petit bout de femme me semblait terriblement familières. Loin d'être du goût de ce gaillard, ce dernier engagea les hostilités à grand coup de menaces. Au fond de moi, je ne savais pas trop qui soutenir : une femme de petite stature faisant face à cinq hommes robustes, ou le dadais, certainement un pirate, qui m'avait fourni de quoi manger le pain. La témérité de la voleuse ne fut plus à prouver lorsqu'elle renchérit, en menaçant de rompre un bracelet précieux que l'autre semblait convoiter.

- ATTRAPEZ-MOI CETTE GARCE ! hurla le marin tatoué.

S'en suivit un tumultueux combat, et plusieurs personnes en profitèrent pour s'évader. Des tables furent retournées, des choppes furent brisées, et je demeurait caché dans mon petit coin de pénombre. Mais bientôt, le gaillard déviant se planta non loin moi, et je craignis qu'il ne m’aperçoive, alors je glissai de l'autre côté de ma cachette en bois. Et avant même que je ne puisse réagir, je me retrouvai captif de la voleuse, coincé dans son étreinte, une lame sous la gorge. Elle m'avait pris en otage, pour tenter de s'ouvrir une sortie. Mon cœur battait à tout rompre, mais je pouvais sentir que mon ravisseur n'était pas beaucoup plus sereine.

- Dégage de là, sinon je lui perce un joli trou dans le cou et il se videra comme une outre.

Ma terreur fut profonde lorsque je réalisai que ma vie pouvait prendre fin ici à cet instant. Peut-être que finalement les dieux l'avaient envoyée à moi, comme un ange de la mort qui viendrait condamner mes instincts pervers.Je songeai à mes bravades incessantes dans mes prières, et ne pus que me résoudre intérieurement de l'ironie sadique que je leur connaissais. Mourir sous les griffes d'un fangeux aurait été une mort bien trop douce, pour moi qui ne cessais d'offenser les trois à chaque fois que je touchais un homme. Mais non! Pour l'heure j'étais toujours en vie, et encore à même de me battre pour survivre. Alors que le taulier braillait pour que tout ce grabuge ne cesse dans ses murs, je pris une profonde inspiration pour me regonfler. "Ça tient qu’à toi mon gros. Bouge ton cul de là." grogna celle qui enfonçait sa dague un peu plus dans ma peau. Je posai ma main sur la sienne pour verrouiller son mouvement, et me tenir prêt à agir. J'entrepris de chercher le regard du tatoué, qui avait déjà blêmit en m’apercevant. Je le toisai avec malice, en frottant bruyamment l'une contre l'autre, deux des pièces que j'avais encore à la main. Sa panique momentanée se mua en rage, et son teint pâle devint presque aussi rouge que le sang. Il n'était plus temps de savoir pour lequel d'entre eux je parierais, car il était clair que le marin avait déjà rejeté toute accointance entre lui et moi.

Il se rua alors sur nous, et d'un bond je sautai prestement sur le côté, emportant la fille en noir avec moi. Me rattrapant au rebord d'une caisse, j'avais glissé hors de son étreinte, mais malgré tout je me refusais à l'abandonner à son sort dans cette taverne miteuse. J'aurais pu courir le plus vite et le plus loin possible, ces nigauds n'auraient sans doute pas détacher leur attention de leur proie. J'attrapai alors la voleuse par le bras, et la tirai à ma suite vers la porte arrière. Emporté par l'adrénaline, je ne réalisai pas immédiatement que tentais d'ouvrir la porte dans le mauvais sens, et ces quelques secondes perdues pourraient s'avérées fatales. Je me pressai de corriger mon erreur, et entraînai ma nouvelle acolyte dans les ruelles sombres et étroites du port.

- Court! lui criai-je, en essayant de penser à un endroit suffisamment contigu pour pouvoir semer nos poursuivants.

J’espérais tout de même ne pas me retrouver de nouveau un couteau sous la gorge, une fois que notre course effrénée se terminerait.
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HermineSaltimbanque
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MessageSujet: Re: À travers les eaux troubles [Matteu]   À travers les eaux troubles [Matteu] EmptyLun 19 Nov 2018 - 23:17
Elle n’avait pas vraiment prévu que le gros tas de crottin qui lui barrait la route puisse perdre son sang-froid à ce point, ni que sa victime soit tout à coup son sauveur. Ce fut donc avec un étrange sentiment d’être spectatrice des instants suivants qu’Hermine se vit basculer au sol, qu’elle heurta avec force de l’épaule, tandis que le jeune homme qu’elle tenait les éjectait de la trajectoire du tatoué en furie. Bon, l’avantage c’était que la voie était désormais libre…
Mais le geste de l’étranger pour la relever – il lui venait en aide, elle n’était pas en train de rêver – acheva de la rendre tout à fait perplexe sur la tournure que prenaient les événements. Mais qu’est-ce qui était en train de se passer ? Son otage jouait les sauveurs tandis que la victime de son chantage essayait désormais de leur faire la peau à tous les deux. Quelque chose allait de travers dans tout ça, mais il n’était pas temps de s’interroger. Une fois sur pieds, Hermine se secoua les puces mentalement et embraya pour suivre la cadence qu’on lui imposait. Pour courir, ce n’était pas elle la dernière, aussi dès que le courant d’air frais venu de l’extérieur caressa son visage elle se rua dehors.

La voleuse se serait sans doute amusée de voir qu’ils couraient presque aussi vite l’un que l’autre s’il n’y avait pas ces beuglements enragés à leurs trousses. Vite, un coin sombre, une cachette étroite, une entrée pour la Grande Route des voleurs… Ah non, pas ça, son compagnon d’infortune ne devait pas aimer la haute voltige autant qu’elle et puisqu’il lui était venu en aide, pas question de le laisser tomber au moment critique. Elle se contenterait donc d’une planque sur le plancher des vaches.

Ici, tourne ! lança-t-elle tout en entraînant à son tour le jeune homme dans une ruelle si étroite qu’ils pouvaient à peine y tenir à deux de front.

L’avantage de ces vieilles maisons vermoulues pleines de sel et d’algues, c’était qu’avec le temps elles avaient tendance à s’affaisser les unes contre les autres, ce qui créait naturellement des impasses là où il devait y avoir des rues et des rues là où il n’aurait pas dû y avoir de chemin. Par bonheur, la mémoire d’Hermine fonctionnait parfaitement et elle se souvenait des endroits où il ne fallait surtout pas aller, au risque de s’y retrouver coincé.
Les molosses à leurs trousses étaient plus lents, mais assez nombreux pour ratisser large, ils n’hésitaient pas à prendre deux rues parallèles pour s’assurer de capturer les fuyards dans leurs filets. Dommage pour eux, Hermine avait fait de la fuite un art à part entière. Elle avait à son tour prit le jeune homme par le poignet et l’entraînait désormais de droite à gauche dans ce qui ressemblait à une course hiératique alors qu’il n’en était rien. S’ils prenaient à droite, puis à gauche, descendaient deux rues et prenaient encore à gauche, ils s’éloigneraient assez de la taverne pour atteindre les entrepôts, ce qui signifiait une myriade de cachettes possibles dans un environnement trop vaste et trop peu éclairé pour que leurs poursuivants puissent correctement fouiller la zone.

Avisant du coin de l’œil une petite ruelle entre deux grands bâtiments, la jeune femme tira son compagnon à sa suite. Un empilement de petites caisses leur barrait la route, mais rien d’insurmontable.

Un peu d’escalade, ça te tente ? demanda-t-elle avec l’air de s’amuser malgré le danger omniprésent. On pourra se glisser dans l’entrepôt, il devrait y avoir une porte de l’autre côté. Vite !

Aussitôt dit, aussitôt fait, elle bondit prestement sur la première caisse, se jouant de la gravité avec une facilité déconcertante. Bonne âme, elle tendit la main à son sauveur pour lui venir en aide et franchir l’obstacle plus rapidement. Les voix furieuses résonnaient toujours, mais plus lointaines déjà. Il leur suffirait sans doute de se cacher et d’attendre que l’affaire se tasse avant de quitter le quartier… Comme prédit, une petite porte s’ouvrait à leur droite sur l’un des bâtiments et sa serrure grossière ne résista pas longtemps au rossignol de la demoiselle. Avec une référence exagérée, elle ouvrit la porte et invita l’autre à entrer dans le grand espace plongé dans les ténèbres.

Si monsieur veut bien se donner la peine. Allons nous pelotonner dans un coin pour nous faire oublier, ça vaut mieux pour nous deux je crois. La nuit est encore jeune, on pourra se faufiler plus tranquillement dehors quand ils se seront fatigués.
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Matteu
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MessageSujet: Re: À travers les eaux troubles [Matteu]   À travers les eaux troubles [Matteu] EmptyMar 20 Nov 2018 - 17:38
Courant à grandes enjambées à travers les rues du port, je n'arrivais pas à me concentrer suffisamment pour trouver un chemin adéquat, qui nous permettrait de nous mettre à l'abris de nos poursuivant. Le vent glacé qui fouettait mon visage, et la faim qui me tiraillait les entrailles, jouaient de concert à me faire perdre mon orientation. Mais avant que mon rythme de course ne s'amoindrisse, la petite voleuse prit les devants, me tirant à son tour de gauche à droite parmi ces ruelles étroites que je n'arrivais plus à identifier. Elle se déplaçait avec une aisance incroyable, comme si elle glissait sur sol, sachant exactement quelle direction prendre. Finalement nous nous retrouvâmes devant un empilement de caisses entre deux bâtisses, qui barrait notre route et nous offrait tout juteux à nos poursuivants dont les pas se faisaient de plus en plus bruyants à mesure qu'ils approchaient. Mais la jeune fille en noir ne semblait pas si déstabilisée par cette situation, et paraissait même en être satisfaite. Elle se tourna vers moi pour me proposer une petite grimpe, et c'est à cet instant que je fus frappé d'une fulgurance évidente.

Le visage brouillé par la pénombre, ne me dévoilant que l'éclat de ses yeux et son petit sourire en coin, je ne pu que reconnaître avec une quasi-certitude celle avec qui m'avait volé un baiser au bal masqué quelques semaines plus tôt. Sans un mot, je la regardai s'envoler comme une feuille jusqu'au dessus de l'obstacle, sûre de trouver notre salut de l'autre côté, aussi je m'empressai d'y grimper à mon tour avant que l'on ne me voit. Une fois mon effort terminé, je l'observai crocheter le plus facilement du monde, la serrure rouillée de la porte qui se trouvait effectivement là. Elle devait avoir fait bon nombre d'heures de repérage dans le secteur, pour en connaître aussi bien tout les recoins. D'un geste souple, elle poussa la porte avant de m'inviter à entrer avec une révérence espiègle :

- Si monsieur veut bien se donner la peine. Allons nous pelotonner dans un coin pour nous faire oublier, ça vaut mieux pour nous deux je crois. La nuit est encore jeune, on pourra se faufiler plus tranquillement dehors quand ils se seront fatigués.

J'en étais certain alors, je ne pouvait pas me tromper : c'était elle ! Après une brève hésitation, je m’enfonçai dans l'obscurité totale de la pièce. Avançant à tâtons, je pouvais sentir quelques outils sur ce qui devait être un établi, et à ma droite quelques tonneaux stockés dans un coin. J'étouffai un petit couinement de surprise lorsque mes cheveux se prirent dans une toile d'araignée gigantesque. Je détestait ces sales bestioles, aussi je priais pour que l'une d'elle ne fut pas déjà en train de galoper sur ma tête ou mes habits. La jeune femme referma alors la porte sur nous, éteignant ainsi la dernière lueur qu'il nous était encore possible d'apercevoir. Je m'accroupis sur place pour ne pas buter contre un quelconque obstacle, cherchant une manière subtile de briser la glace pour faire redescendre un peu la tension.

- Dit, qu'est ce qu'ils te voulaient ? J'veux dire, t'as pourtant pas l'air d'être une figure du grand banditisme....Je m’arrêtai un instant, puis une étincelle de malice s'alluma dans mes yeux. Peut-être qu'une fleur pour un baiser pourrait...démêler la situation ?

Par cette perche tendue, j’espérais obtenir un peu plus d'informations, mais mon incapacité à établir un contact visuel pour pouvoir la jauger rendait mon attente insoutenable. Je ne pouvais entendre que les brèves respirations de ma nouvelle compagne d'infortune, et les échos sourds de mon ventre qui criait famine.
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MessageSujet: Re: À travers les eaux troubles [Matteu]   À travers les eaux troubles [Matteu] EmptyJeu 22 Nov 2018 - 20:56
Un rapide coup d’œil à la rue et elle refermait la porte pour se mettre à l’abri. Il ne faisait pas de doute que les lascars n’allaient pas fouiller l’endroit, ils se contenteraient de rôder un moment autour des entrepôts avant d’aller jouer plus loin.
Trébuchant un peu sur un bout de cordage ainsi que sur les pieds de son compagnon, ses mains trouvèrent ce qui devait être une caisse ou un tonneau et elle put se hisser dessus pour s’asseoir un peu. L’air était à peine moins froid ici, mais au moins il n’y avait pas de vent.

Ce fut son étrange sauveur qui prit la parole le premier et sa remarque fit naître un rire dans la gorge de la jeune femme, qu’elle étouffa juste avant qu’il ne franchisse ses lèvres. C’est qu’il fallait être discret. Mais s’imaginer en figure du grand banditisme lui plaisait beaucoup, même si c’était une situation peu enviable puisque très dangereuse. Tout l’avantage d’être « du menu fretin » était justement dans le fait de ne pas être connue. Pas de battue pour être chassée de la ville, pas d’affiches avec son nom ou sa tête vaguement dessinée dessus, pas de rondes intensives et pas de concurrents aux dents longues. Elle faillit répondre lorsqu’il ajouta quelques mots qui firent écho à des souvenirs récents.

Oooh, c’était donc toi ! dit-elle simplement.

Ce soir de fête, elle n’avait pas cherché à deviner l’identité de celui qui avait tant amusé son frère, mais elle n’avait pas non plus oublié. Dans l’autre sens, elle n’était pas plus étonnée que cela qu’on puisse la reconnaître : avec sa chevelure sombre au volume indomptable c’était parfois difficile de se faire oublier.

Je n’pensais pas te revoir et certainement pas ce soir. M’enfin c’est comme ça. C’est gentil de m’avoir tiré de là, j’aurais sans doute pris quelques sales coups sinon… Et désolée pour le couteau. Je t’aurais pas fait de mal, je voulais juste que ces gars reculent.

Des voix à l’extérieur se firent entendre un instant avant de s’éloigner. Hermine reprit, un peu plus doucement.

Je devais juste livrer une babiole, mais je me doutais qu’il y avait anguille sous roche. Faut savoir prendre des risques pour gagner sa croûte. Et toi alors, qu’est-ce que tu fais fourré avec des gugusse pareils ? Je t’ai vu causer avec le gros tatoué, mais il a pas hésité avant de sauter à la gorge alors j’imagine que vous n’êtes pas copains comme cochon. Avec ta jolie frimousse, c’est pas vraiment dans cette taverne que j’aurais imaginé te revoir. Sans offense.
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