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 L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin

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Adeline DelormeAlchimiste
Adeline Delorme



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MessageSujet: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyLun 24 Déc 2018 - 16:39

Août 1165



-De l’Aigremoine ? sembla s’estomaquer ma mère en me lançant un regard étonné. Mais, enfin Adeline, je n’en n’ai plus depuis des mois.

Évidemment,le contraire m’aurait étonné. La fameuse plante entrait dans la composition de nombre de ses remèdes personnels, si bien qu’elle en utilisait bien plus qu’elle ne le devrait. En particulier, lorsque l’on pouvait obtenir le même résultat avec des herbes bien plus simples et cultivable, tel que le chou ou simplement l’ail. Je ne pus donc que soupirer en constatant ce gâchis qui n’en n’aurait pas été un à une autre époque, pas si lointaine.

Pour ma part, je ne m’intéressais pas à cette plante pour ses propriétés communes. Je ne comptais pas en faire une vulgaire infusion pour calmer quelques maux de ventre ou rétablir mes humeurs. Non, je voulais en extraire son essence, son huile… Son coeur et son sang simplement parce que combiné à d’autres essences, l’aigremoine pouvait aider à accélérer les effets du remède que j’avais en tête. Mais, visiblement, inutile de compter sur la réserve personnelle de ma mère, il me faudrait aller voir ailleurs… Ce que je fis, sans un mot.

Si au début Yolande s’offusquait de mon manque de manière, ce n’était dés lors plus le cas. Néanmoins, avec le temps et le nombre de changements bien plus important que celui tenant à mon comportement, ma mère avait finit par voir le monde avec beaucoup plus de philosophie et ainsi, passer outre le caractère de sa fille. Ainsi donc, je quittais la maison Delorme, à présent bien trop grande pour ses quelques occupantes. Malgré sa taille et sa beauté, j’évitais d’en observer la façade. Ce qui fut autrefois la fierté de mon père, l’expression matérielle de la réussite familiale n’était plus qu’une vieille bicoque vide et lugubre. De quoi, donc, éveiller chez moi, quelques sentiments dont je me passerais volontiers.

Lui tournant le dos, je me dirigeais vers le vieux marché, ou du moins, l’une de ses boutiques en particulier. La mandragore avait toujours été là. Ses murs doivent d’ailleurs être aussi ancien que ceux de la cité. J’exagère probablement, mais la famille Jasquier a su fournir nombre de remèdes efficaces aux habitants du quartier depuis bien des générations. D’ailleurs, Adalbert Jasquier, maître apothicaire et herboriste de génies, était l'homme qui avait sauvé la vie de Yolande lorsqu’elle nous a mis au monde, mon frère et moi.

J’entrais dans l’échoppe, me poussant légèrement pour laisser passer une cliente visiblement mécontente. Celle-ci me bouscula, sans prendre le temps de se confondre en excuses et choisit plutôt de claquer la porte.

-Plus de Valérianne pour soulager les écoulements menstruels, Jasquier ? lançai-je à l’apothicaire avec un certain humour soigneusement dissimulé sous mon masque d'indifférences.




-Tiens donc, Adeline, cela faisait longtemps que je ne t’avais pas vu ici, s’exclama le vieil apothicaire en venant à ma rencontre. Tu as bien changé...

Loin de moi l’idée de m’épancher sur ma situation et ce fameux changement qui faisait tant parler mon entourage. Aussi, je balayais volontairement ses paroles d’un geste de main, signe évident qu’il valait mieux changer de sujet. D’autant plus que nous n’étions pas seuls dans l’officine et que j’aimais mieux ne pas évoquer certains sujets en public… Non, je ne voulais tout simplement pas en parler.

-Qu’avait-elle ? lui demandai-je en désignant la porte du menton. Il est rare de voir tes clients partir en claquant la porte.
-Juste quelques divergences d’opinions concernant la milice. Cette pauvre femme vient du sud. Elle fait partis des réfugiés… Disons qu’elle pense que les miliciens devraient s’occuper de réduire les fangeux à néant pour récupérer les terres perdues, et non de perdre du temps à faire leur marché.

À son tour de désigner l’homme présent dans la boutique. Je le saluais d’un bien discret mouvement de tête. S’il m’arrivait encore de vaguement communiquer avec quelques-unes de mes connaissances, il m’était bien moins évident de me montrer amicale, ou au moins polie, envers des inconnus.

-Que puis-je pour toi ? Je doute que tu sois simplement venue saluer un vieil homme.
-Je cherche de l’aigremoine, en aurais-tu ?
-De l’aigremoine ? Je crains bien que non, ma fille. L’on n’en trouve qu’à l’état sauvage, ce sont des plantes impossible à cultiver, pas sans en perdre les vertus du moins. Pourquoi donc t’en fallait-il ? Je peux peut-être te proposer autre chose en remplacement.
-Malheureusement, je doute que tu ais ce que je cherche. Est-il possible de passer commande ou que sais-je ?
-Je suis navré, mais je suis bien trop vieux pour m’aventurer à l’extérieur des murs de la cité.
-Je vois, murmurais-je, comme pour moi-même tout en réfléchissant aux options qu’il me restait… À savoir, aucune de connu actuellement.

Mon regard remonta jusqu’à celui du vieil homme qui lui se portait ailleurs, vers l’inconnu toujours présent dans l’officine.

-Pourquoi ne pas t’y rendre toi-même ? Pas seule, évidemment. Tu connais bien les plantes, leurs propriétés… Et nous manquons tous d’herbes médicinales. La période de floraisons est bientôt terminée, c’est le moment ou jamais.

Je le dévisageais, un peu perplexe. Pour être franche, je ne compris pas immédiatement que l’apothicaire cherchait surtout à attirer l’attention de l’inconnu.

-Qu’en penses-tu, jeune homme ? Te serait-il possible de l’escorter à l’extérieur afin de remplir nos bocaux vides ?
-Mais enfin, m’offusquais-je. Tu ne peux pas demander une telle chose à un inconnu !

J’eu alors un mouvement de recul. À quoi jouait ce vieux fou ? Sans compter le fait que je n’avais absolument pas le temps de m’absenter aussi longtemps de mon laboratoire, je ne me voyais pas vagabonder en dehors des remparts avec un homme dont je ne savais rien.

-Toi, tu ne le connais peut-être pas, mais moi, j’accorde toute ma confiance à ce jeune homme. A toi de voir ce que tu comptes faire, Adeline.

Bon sang, il me restait encore tant de choses à faire… Mais d’un autre côté, il me fallait cette plante. Je n’avais pas besoin que de quelques fleurs, mais du plan en son intégralité, chose que personne ne pourrait me fournir. Je connaissais Jasquier depuis des années, sa famille et celle de ma mère étaient proches… Pouvais-je donc faire confiance en son jugement ? Mais après tout, que me restait-il à perdre ?Face à ce constat fortement navrant, je ne pus que soupirer avant de me tourner vers l’homme.

-Le pouvez-vous ? lui lançais-je finalement.



Dernière édition par Adeline Delorme le Lun 14 Jan 2019 - 13:45, édité 1 fois
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Séraphin ChantebrumeAdministrateur
Séraphin Chantebrume



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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyMar 1 Jan 2019 - 16:43
    Les missions extérieures étaient devenues finalement presque moins déroutantes que la garde de la ville, un fangeux hurle et vous arrache la tête avant de passer au suivant presque comme si de rien n’était, alors que cette vermine croulante qu’est l’humanité ne peut se satisfaire de choses simples. Il se sentait presque étranger au milieu de tous ces visages - gais ou maussades - qui se mouvaient bruyamment, avec une fluidité insouciante qu’il haïssait autant qu’il ne la comprenait pas. Il était de ces gens autrefois, finalement il n’y a pas si longtemps, presque comme eux avant que tout ne bascule et lui avec.

    Lui restait ce sentiment d’être un étranger, teinté d’un mépris pour ceux qui semblaient - en apparences - se satisfaire d’une situation catastrophique. Et cette sensation de danger permanent, de tension presque palpable. Ça c’était la milice, l'entraînement laisse ses marques et les quelques frères d’armes dont il avait eu à ramasser les morceaux étaient un bon moyen d’apprendre la prudence. Une prudence extrême certes, mais ce monde ne l’était il pas devenu?

    Il se tenait là, droit comme un pique à l’entrée de l’échoppe d’un apothicaire, presque écrasé par la montagne de fioles et de flacons qui trônaient sur les rayonnages. Il y en avait de toutes sortes, de toutes formes et l’odeur qui s’en dégageait produisait un parfum unique entêtant qui se mêlait à la poussière pour donner au lieu une atmosphère particulière, presque reposante malgré les allées et venues incessantes des clients. Pourquoi se trouvait il là? Il n’en avait aucune idée et n’avait pas pour habitude de poser trop de questions, tout ce qu’il savait était que l’apothicaire avait besoin de protection, aussi se contenait il d’avoir l’air renfrogné et belliqueux tout en caressant distraitement le pommeau de son épée. Curieusement c’était la partie la plus naturelle de son travail, observer en silence et impressionner sans faire - trop - peur.

    La journée s’étirait et ses jambes raidies par l’immobilité hurlaient silencieusement dans ses bottes. Un peu d’activité aurait été la bienvenue, d’autant que la dinde qui venait d’entrée en hurlant ne méritait - à son avis - rien d’autre qu’une épée en travers de la poitrine. Finir embroché contre un mur serait la meilleure des fins pour quelqu’un qui semblait si peu se soucier d’autre chose qu’elle-même.

    La vieille carne s’était avancée, furibonde, pointant un doigt accusateur dans sa direction alors même qu’elle n’avait pas adressé la parole à l’apothicaire.

    Et vous! Vous devriez être dehors, à tuer ces choses plutôt que de vous cacher! N’avez vous donc aucune conscience? Des gens meurent là-bas pendant que vous prenez la poussière ici! C’est une honte! Vous m’entendez? Une honte!”

    Un geste furtif en direction de son épée suffit à la faire taire tandis qu’un ballet de sang et de mort se jouait dans l’esprit du milicien. Oh comme il aurait voulu contempler son regard choqué lorsque sa lame l’aurait fendue du nombril à la gorge, empalée comme une vulgaire grenouille gigotant au bout de sa broche. Un geste, une fraction de seconde et toute cette frustration aurait pu trouver un parfait exutoire. Elle dut le sentir car elle blêmit un bref instant avant de faire volte-face et sortir en bousculant une jeune femme qui entrait.

    Le calme revenu Séraphin s’en retourna à sa morosité, se contentant d’être un meuble adossé contre un autre. Les affaires des gens ne le concernaient pas plus qu’elles ne l’interessaient, et ce n’était pas son rôle. Ce n’est que lorsque la jeune femme lui adressa un signe de tête qu’il réalisa que l’on parlait de lui. Et cet air qu’elle renvoyait, à la fois jeune jolie et totalement dévastée. De ce regard presque brumeux qui tente d’éviter la réalité du monde dans lequel ils vivaient. Elle était comme lui, brisée, et très certainement d’une manière assez similaire.

    S’il haïssait profondément la plupart de ces congénères il était d’un autre côté pratiquement incapable d’ignorer une souffrance dans laquelle il se reconnaissait. Etait-ce une forme d’égoïsme ou n’était il capable de tolérer que ce qu’il pouvait comprendre et juger digne? Il n’aurait su le dire. Prêtant l’oreille il apprit qu’il était question d’une plante au nom vaguement douteux, et d’une mission pour en récupérer. Pour quoi faire? Supposément une fiole ou une concoction malodorante de plus, et qu’est-ce que ça pouvait bien lui faire? Il servait pour protéger ces gens qu’il méprisait paradoxalement, pas pour cueillir des pâquerettes ou danser sous les arbres.

    Mais ce regard… Il n’aurait su dire s’il s’y reconnaissait ou si ce qu’il y lisait lui parlait, mais il ne put - à son grand désespoir - refuser et soupira en s'avançant d’un pas en direction du marchand et de la jeune femme.

    Très bien, j’accepte.” Il tendit la main “Séraphin, Chantebrume. C’est de plantes dont vous avez besoin?”
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Adeline DelormeAlchimiste
Adeline Delorme



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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyMer 2 Jan 2019 - 14:03
En un sens, j'avais l'impression que l’on me forçait la main pour forcer celle d'un inconnu. Je n'aimais pas cette sensation, même si je n'avais, malheureusement, aucun autre choix. Il me fallait cette plante, peut-être d’autre si, par chance, nous passions aux côtés d'un plan intéressant et fournis. Le désordre régnant à l’extérieur rendait les sorties hasardeuses et dangereuses, si bien que plus personne ne se risquait à une cueillette autrefois bien banale… Alors, peut-être, aurai-je l'occasion d'en ramasser plus qu’à l'accoutumée.

Mon regard éteint croisa celui de l'homme qui l'était tout autant. Encore l'une de ces victimes de la fange et de la volonté divine qui était de nous priver de tout. Nous étions nombreux à afficher cette lueur ternie par le désespoir, il suffisait de se montrer un minimum observateur pour s'en rendre compte. Le monde que nous connaissions, toutes ces petites choses que nous prenions pour acquises n'existaient plus. J'avais perdu la vie en même temps que celle de mon frère, peut-être était-ce le cas pour cet homme aussi.

Je répondis à sa main tendue, ferme et masculine, par la mienne faiblarde et amaigri. Je le laissais se présenter, acquiescant je-ne-sais quoi par un signe de tête, comme si un simple nom pouvait tout changer. Il acceptait, juste comme cela… Ne posant les questions qu'après avoir pris une décision. Cela m'étonna si bien que je penchais la tête sur le côté, visage fermé, mais mon incompréhension bien visible toutefois.

-Adeline Delorme, me présentai-je à mon tour. C'est bien ça, l'aigremoine est une plante sauvage qui possède un certain nombre de vertues. Les herboristes en raffolent pour son efficacité pour traiter certains maux. Moi, j'en ai besoin pour tout autre chose.

Malgré la curiosité parfaitement visible dans l'expression de Jasquier, je décidais de ne pas en dire plus. Ce serait trop. Aucun d'eux ne pourrait comprendre et ce ne serait que perte de temps, alors autant en venir directement au but. Heureusement, et contrairement à ce que je pus croire sur le moment, l’apothicaire garda le silence et nous laissa discuter.

-Elle n’est pas si difficile à trouver et plutôt bien visible avec ses feuilles jaunes. Il doit en pousser un peu partout, autour des murailles de la cité, cela ne devrait pas être bien long, du moins...en théorie.

Le temps et les épreuves m'avaient rendu méfiante, si bien que je n'aimais pas m'avancer avec certitude quand je ne savais pas ce qu'il se passait dehors. De la fange… Je n’avais vu que ses effets sur le cadavre de mon frère. Je n'en savais donc pas grand-chose, bien que beaucoup plus que certains… Encore trop peu pour moi… Mais ce n'était pas encore le moment, pour l'heure, je ne pouvais que me contenter de mes observations bien que brouillées par ce lien bien trop personnel pour rester objective. Je devrai donc faire avec ce rien pour seulement espérer y faire quelque chose.

-Je vous promets de me faire aussi petite que possible. Je ne suis pas bien bavarde habituellement… Vraiment, je ferais au mieux pour ne pas être un poids pour vous… Combien voulez-vous pour cette mission officieuse ? Votre prix sera le mien.

Une telle affirmation devait lui paraître bien étrange étant donné mon accoutrement. Ma robe était tâchée à de nombreux endroits, brûlée au niveau de la manche… Elle fut une jour bleue pastel, aujourd'hui elle arborait une teinte grisâtre des plus disgracieuse, si bien que l'on ne pouvait jurer de sa bonne facture. Je ne devais pas ressembler à grand-chose dans cette tenue, probablement à l'une de ces personnes sans le sou, ce qui au final, est bien loin d'être le cas.

-Quand pouvons-nous partir ? demandai-je finalement.Devrai-je prévoir quelque chose de particulier ?


Dernière édition par Adeline Delorme le Lun 14 Jan 2019 - 15:31, édité 1 fois
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Séraphin ChantebrumeAdministrateur
Séraphin Chantebrume



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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyJeu 10 Jan 2019 - 15:49
     Mais qu’est-ce que tu fous? La première blondinette qui passe et te voilà parti pour courir les marais en quête de fleurs? *  

    Et est-ce qu’il y a des fleurs dans ces foutus marais? Il aurait été bien incapable de le dire. Il y a des monstres ça oui, de l’eau boueuse et puante assez sombre pour que ces saloperies s’y cachent pour mieux sauter sur l’aventurier qui passe. C’est tout ce que ces étendues perdues représentaient pour lui, une zone de guerre où les plantes qui poussent et les animaux qui crèvent n’ont aucune espèce d’importance. C’est à peine s’il était capable de faire la différence entre une pâquerette et un saule, alors de l’aigremoine…

    Elle parlait des murailles et ça le rassurait un peu, plus ils se tiendraient près des murs de la ville et mieux ils se porteraient. Et si jamais les choses tournaient mal, peut-être qu’un garde en faction sur les remparts aurait la gentillesse de les cribler de flèches avant qu’ils ne se fassent arracher les os un par un. C’est pas grand chose, mais c’est toujours mieux de savoir que quelqu’un aura le bon sens de mettre fin à vos jours avant que vous ne veniez gonfler les rangs des mordeurs.

    Mais avec un peu de chance tout se passerait bien, les fangeux se faisaient rare en plein jour. L’été étant chaud et les journées longues ils n’auraient à craindre que les rôdeurs que cela n’incommodait pas. Pour ce qui était de la cueillette, la jeune femme s’en chargerait. Chacun son domaine après tout, lui tâcherait de les ramener en vie pendant qu’elle collecterait ce dont elle a besoin, quoi que ce soit d’ailleurs.

    Je vous laisse vous charger de la récolte, pour ce qui est du reste, plus on sera proche des murailles et de la côte mieux ce sera.”

    Comme il comprenait ce besoin, ce qui était presque devenu une nature, de se taire, de laisser ses doutes au silence plutôt que de s’épancher en banalités stupides. Il ne comprenait pas ce besoin que certains avaient de bavasser, d’étaler leur malheur au premier venu. Dans leurs yeux on comprenait que la misère du monde se dégustait seul et à l’abri des regards, ce n’est pas Séraphin qui serait venu se plaindre du manque de conversation.

    Il essaya de la rassurer d’un signe de tête, qu’ils avaient de toutes façons peu de choses à dire et que le silence irait très bien. La deuxième question était plus délicate, que voulait-il? Il n’avait pas besoin d’or et la milice fournissait une pitance passablement infecte qui lui suffisait. Le milicien n’avait pas la moindre idée de ce dont il pouvait avoir besoin, ses espoirs et rêves d’avenir étant assez minces…

    Je sais pas, qu’est-ce que vous avez à offrir?”

    L’idée de faire son devoir, de protéger était suffisant pour lui sans pouvoir toutefois justifier une sortie à titre personnel, il ne pouvait pas travailler et risquer sa vie gratuitement et la jeune femme n’accepterait probablement pas dans tous les cas. Quelques pièces lui permettraient peut-être de se payer une bonne cuite ou bien d’acheter un nouveau couteau.

    Ce que vous voudrez.”

    Un rapide coup d’oeil à la tenue d’Adeline lui indiqua qu’elle n’avait pas dû beaucoup quitter la ville. Une robe c’est parfait pour s'emmêler les pieds, tomber et mourir. Féminité et survie avaient peu en commun, mis à part ce détail il ne voyait pas réellement quoi conseiller. Lui se chargerait de l’aspect militaire et sécurité pendant qu’elle ferait son travail de collecte, en apparence c’était simple comme bonjour, et pourtant ils savaient tous deux que tout pouvait dégénérer en quelques instants.

    Juste un couteau. Et un pantalon, de quoi courir. On peut partir demain matin si ça vous convient? Devant les portes à l’aube, les gardes nous laisseront passer.”
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Adeline DelormeAlchimiste
Adeline Delorme



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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyLun 14 Jan 2019 - 20:44
Qu'avais-je à offrir au juste ? De l'or… Mais cela ne semblait pas l'intéresser outre mesure, sans quoi, il se serait contenté de me donner son prix, comme l'aurait fait tant d'autres à sa place. De la nourriture peut-être ? Non… Le milicien me parut bien en forme, sans doute, bénéficiait-il de ration suffisante à la caserne… De plus, il aurait su formuler cette demande… Or, il ne me demandait rien de particulier, ce qui me dérangeait quelque peu. Tout travail mérite salaire après tout, et celui-ci ne consistait pas seulement à me fournir une escorte lors d'une vulgaire balade en dehors de la cité… Plus de nos jours en tout cas…

-Je ne sais pas… Écoutez, faisons un marché. Prenez le temps de réfléchir… Je peux vous offrir suffisamment d'or pour vous faire fabriquer une armure, des armes… Que sais-je ? Je peux aussi vous fournir des remèdes, de la nourriture...

L'abstrait n'était pas une nuance que je pouvais comprendre, plus depuis la mort de Renaud. Il me fallait toujours du concret simplement pour pouvoir me raccrocher à quelque chose… Je lui laisserais donc le temps nécessaire, auquel cas, il me suffirait probablement de lui offrir une bourse suffisamment garnie pour couvrir ses besoins et envies durant un temps. Nous avions plus important à faire que de débattre sur un moyen de paiement, il me fallait encore savoir comment me vêtir pour éviter tout problème.

Un couteau, un pantalon… Rien de bien exceptionnel en soi. Je devais pouvoir trouver cela dans l’une des malles de la maison, probablement dans les affaires de mon frère… Mon regard se teinta d'une lueur toujours plus terne, comme à chaque fois que je pensais à lui. Toutefois, je me repris aussitôt, afin de ne rien laisser paraître de mes émotions toujours perturbées par mon deuil.

Le milicien m’annonça alors que nous pourrions partir dés le lendemain, ce qui m’arrangeait. Cela me permettrait de me mettre plus rapidement au travail par la suite.

-Parfait, je serais là.


*****

Je me rendis donc à l'aube au point de rendez-vous, portant une tenue plus adaptée. Je l'avais finalement spécialement achetée pour l'occasion, puisqu'il me fut impossible, ne serait-ce que de me saisir d'un seul vêtement dans ses affaires. Alors me voilà, marchant dans les rues de la cité, ma sacoche sous le bras, vêtue d'une chemise blanche, d'un pantalon en cuire et d'une paire de bottes souple. Ne me restait plus qu'à rejoindre mon protecteur à l'endroit qu’il m'avait indiqué la veille. Lorsque je l'aperçus, je le saluais d'un simple hochement de tête courtois. Humble, poli et bien loin des courbettes protocolaire que l'on imposait aux grands.

Comme il me l'avait affirmé, les gardes nous laissèrent passer et c'est avec une certaine appréhension que je franchis les portes de la cité protectrice. Ce n'était pas la première fois que je quittais la ville, bien au contraire. Mais il s'agissait d'une autre époque où la seule chose que nous avions à craindre était de tomber sur des bandits. Ce qui ne m'est, personnellement, jamais arrivé. Or, là, les choses étaient bien différentes et cette fois, ce n’était pas mon frère qui se trouvait à mes côtés, mais un inconnu armé et vigilant.

En silence, je me contentais de marcher tout en cherchant la fameuse plante. Néanmoins, malgré la présence du milicien et ma concentration, chaque bruissement me faisait sursauter. En somme, ce qui jadis aurait pu être une promenade agréable s'avérait être tout son contraire… Tout en marchant, je ramassais du thym sauvage, du romarin et autres brins de plantes séchées par le soleil… Néanmoins, je ne voyais aucune fleur jaune là, où autrefois, elles poussaient en quantité.

-Je...Je ne comprends pas… Il devrait y en avoir des tas… Ce n'est pas normal.

Nous étions pourtant en pleine période de floraison et si la fange avait contrarié nombre de choses… Elle n'avait eut aucune influence sur le temps ou les saisons… Alors, pourquoi donc ces fichues plantes ne se trouvaient pas à leur place ?

Cela m'inquiétait autant que me frustrait. Ce n'était pas normal, ni même logique. Quelque chose n'allait pas et j'avais vraiment besoin de cette plante si particulière… Alors, j'oubliais presque la fange et les dangers et commençais à chercher avec une certaine frénésie. J'espérais en trouver derrière chaque rocher, poussant dans les maigres failles comme si elles se fichaient de manquer de soleil entre les pierres. Je passais ainsi de rocher en rocher, de souche en souche sans pour autant m'éloigner des murailles ou du milicien.

-Ce n'est pas normal, répétais-je en me laissant glisser au sol pour me reposer les pieds et surtout réfléchir.

Le soleil avait déjà bien entamé sa course. Nous ne devions pas être loin de la mi-journée… D'ordinaire, je n'aurais pas hésité à continuer vers les bois, mais cela me paru bien risqué, malgré la présence de ce grand soleil estival. Si soupirais, essayant de trouver une plante de remplacement ayant des effets similaires, néanmoins, aucune ne combinait aussi bien tous les avantages de l'aigremoine... Pourquoi fallait-il que les herboristes l'utilisent à si mauvais escient ? Que pouvais-je faire à présent ?

Je levais les yeux vers le milicien, l'interrogeant du regard comme si j'attendais son autorisation...
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Séraphin ChantebrumeAdministrateur
Séraphin Chantebrume



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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyMar 19 Fév 2019 - 21:10
   Les deux acolytes du jour s’étaient mis en marche en silence, d’une manière qu’ils semblaient tous deux apprécier. Pas d’effusions de sentiments ni de torrents de paroles inutiles. Et savoir qu’en un sens il n’était pas le seul à éprouver cette attirance pour le calme et la simplicité était rassurant, presque appaisant.

    Ils cheminèrent à travers les faubourgs désormais vides de toute activité pour atteindre la limite entre l’homme et la nature. Cette étendue vierge entre les faubourgs et l’orée des marais qui n’était qu’arbustes et pierres à demi ensevelies où la petite vie prospérait à l’abri de la folie des hommes et de l’obscurité moite des marécages. De tous temps les amoureux étaient venus s’y promener main dans la main, sifflotant au gré du vent et s’amusant que cette vie qui n’était là que pour elle-même et se fichait bien du reste. C’était un autre temps qui ne vivait que par le souvenir qu’il avait laissé et les marques faites par l’homme.

    Aujourd’hui il n’était plus question d’insouciance et d’amourettes innocentes, le milicien scrutait les alentours l’épée au clair tandis que la jeune femme explorait chaque recoin, chaque talus en quête de la précieuse aigremoine. En vain semblait-il.

    Séraphin était tendu à craquer, le vent charriait parfois la puanteur des marais jusqu’à eux et il était bien placé pour savoir que ces remugles n’apportaient jamais rien de bon en dehors du présage putride qu’ils représentaient. Le soleil était haut et la fange se tenait généralement à l’abri dans la pénombre, mais ils n’étaient pas à l’abri d’un monstre aventureux, ou bien tout simplement trop affamé pour se résoudre à attendre la nuit.

    Pas de plantes? De ce qu’il en savait, certaines marchandises étaient devenues difficiles à collecter et donc rares. Il n’était pas impossible que l’on fasse appel à des mercenaires pour cueillir des plantes ou couper du bois. Il en était la preuve après tout. Fronçant les sourcils le milicien tentait d’observer les fourrés, y cherchant la teinte jaune que l’on prêtait à cette fameuse fleur, le tout sans jamais lâcher ni son arme ni leurs alentours des yeux.

    La jeune femme semblait le consulter. Il avait suffisamment parcouru cet endroit pour connaître son étendue. Cette petite bande s’étendait pratiquement jusqu’au rivage vers l’est, était-il possible que des marchands cupides aient tout cueilli? Un talus masquait la visibilité, lentement l’homme pointa cette direction de la pointe de son arme.

    Par là-bas, doucement.” Dit-il en baissant autant la voix que possible.

    Le danger était omniprésent dans cet endroit qui était et restait onirique. Et c’était ce contraste qui lui rongeait le plus les nerfs, comment se sentir menacé au milieu de fleurs et de papillons qui se pourchassent en ignorant totalement le fléau qui sévissait en ce monde? Peut-être trouverait-elle son bonheur un peu plus loin, sans quoi elle devrait probablement s’acquitter d’une coquette somme auprès de quelques marchands douteux et rapaces.

Citation :
Vraiment désolé pour ce retard!
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Adeline DelormeAlchimiste
Adeline Delorme



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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyMar 26 Fév 2019 - 21:14
À l'époque où Renaud s'amuser à croiser le fer avec notre cousin, mère aimait m'emmener dans ce même lieu...Là où la nature, par sa grandiose beauté, évinçait si majestueusement les Hommes et leurs habitudes bien trop bruyantes pour être tolérée ici. Yolande me disait, bien souvent, regretter de ne pas être fille de campagne tant elle se sentait bien ici. Pourtant, il était bien inutile de s'éloigner de la ville puisqu’une fois les portes de la grande cité dans notre dos, nos yeux ne pouvaient se poser que devant les plus belles créations des Trois.

Pour mère, herboriste émérite, il n'existait pas de mauvaises herbes, toutes avaient leurs particularités qui les rendaient si spéciales et tellement utiles à nous, pauvres humains... D’autant plus lorsque celles-ci poussaient en parfaite liberté, sans jamais être dérangées par les pieds maladroits des Hommes ou encore par l'ombre provoquée par les murs de pierres et de bois. Alors, ce qui pour beaucoup n’aurait été qu'une simple promenade en famille, avec Yolande, la balade prenait rapidement des allures de leçon sur fond de cueillette. Les plantes constituaient sa passion, tout comme la transformation de matière l'était pour moi… Avant qu'elle ne devienne une obsession, du moins.

Aujourd'hui, ce lieu ne représentait plus rien d'autre qu'un ensemble de paradoxe. La quiétude de la nature se gorgeait d’inquiétantes sensations apportées par la peur de se faire dévorer à tout moment. La brise marine, chargée d’embruns se mêlait à la puanteur des marais à laquelle nous ne donnions aucune importance… Avant… Avant que la mort ne prenne vie en son sein vaseux… Avant que les Hommes ne perdent de leur superbe à l'image des nobles qui n'avaient aujourd'hui plus rien d'autre que leur titre.

Pourquoi ne trouvais-je aucun plan d'aigremoine là où, auparavant, il en poussait en abondance ? Était-ce dû à la prolifération des sangliers qui aimaient se repaître des feuilles et des fleurs d'or, au goût légèrement sucré ? Ou encore, à l'un de ces nouveaux trafics concernant la vente de produits devenus “rares” depuis que la campagne n'avait plus rien de sûr ? Rien ne pouvait empêcher l'herbe de pousser, rien, si ce n'est les Trois qui me parurent alors d'autant plus capricieux et cruel qu'ils ne l'étaient déjà à mes yeux.

Assise dans l'herbe, pourtant encore bien grasse, j'observais le milicien silencieux. Il n'avait pas ouvert la bouche depuis que nous étions partis, si bien que sans le bruit de ses pas, je me serais crue seule… Ce qui, je dois bien l'avouer, me plaisait. Je n'aimais pas les gens, qui par crainte d'une solitude feinte, se sentent obligés de déblatérer des inepties simplement parce que le “silence” les inquiète… Pourtant, le silence n'existe pas, puisque toute chose produit un son, encore faut-il se taire assez longtemps pour écouter le bruit du vent venant chatouiller les brins d'herbe. Le son émanant du frottement des ailes d'une sauterelle… Ou plus simplement, le chant des oiseaux… Au moins, cet homme-là savait “écouter”, ce qui, à mon sens, n'était pas donné à tout le monde.

L'homme me parut alors légèrement inquiet, et son tourment, ne semblait pas résonner avec le mien… Son attention se portait ailleurs, légèrement plus loin derrière nous, lieu dissimulé derrière un amoncellement de terre recouverte d'herbes sèches qu'il pointait de sa lame… Personnellement, je n'avais rien remarqué de suspect, néanmoins, force était de reconnaître que son instinct de préservation ne pouvait être que plus développé que le mien… La faute à ma curiosité, probablement… Ou à mon esprit qui avait tendance à se disperser trop souvent avant de se focaliser sur le détail obsédant… Détail qu'il venait de me désigner…

Aussi, ne pouvais-je faire autrement que de prêter l'oreille à mon tour… J'entendis d'abord le vent venant du nord, chargé d'une touche saline indiquant son passage au-dessus de la mer… Vint ensuite le bourdonnement d'une abeille, affairée à sa tâche perpétuelle… Puis enfin, le bruit d'un caillou de petite taille qui dégringole sur d'autres attestant un mouvement derrière le talus qui ne pouvait être que provoqué… Mais par quoi ?

De nouveau, je me tournais vers le milicien visiblement très concentré. Son visage fermé, son regard perçant n'étaient que les témoins silencieux de sa méfiance… Je crus même voir sa main se resserrer sur le pommeau de son épée… Et puis, une autre pierre, probablement de taille plus importante, rejoignit les autres enrichissant ce vacarme rocailleux d'une voix perçant le calme devenu totalement illusoire.

-Fais chier, bordel !gronda une voix masculine quelque peu éraillée… Sitôt suivit par un chuchotement, parfaitement distinct...
-Par les Trois, tais-toi donc papa et arrête de bouger, ils sont peut-être avec eux.

Cette voix-ci me parut bien plus douce, plus aiguë aussi… Une femme ? Un enfant ? Difficile à dire… Néanmoins, je n'y trouvais strictement rien de menaçant… Mais, peu désireuse de provoquer une catastrophe, je laissais mon protecteur choisir de la marche à suivre…
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Séraphin ChantebrumeAdministrateur
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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyVen 12 Avr 2019 - 14:53
  Une pierre qui dégringole puis une autre. Et depuis quand les pierres se mettaient-elles à parler? Trop fort d’ailleurs, bien trop fort. Ce genre d’éclat de voix attirerait le moindre fangeux dans les parages, nul besoin d’imaginer la suite, cela se passerait mal. Très mal.

    Le milicien appuya de sa main libre sur l’épaule de la jeune femme, l’incitant à s’aplatir autant que possible. Et à ne pas faire le moindre bruit, ces deux inconscients en avaient déjà bien trop fait. Il faisait beau et chaud et cela réduisait les chances de mauvaises rencontres, mais combien avaient laissé la vie sur de telles suppositions? Une chose que Séraphin avait appris était qu’il ne fallait jamais sous-estimer la fange, ni ce pouvoir qu’elle avait de toujours surprendre, de surgir au pire moment.

    C’était ce qui avait fait qu’aujourd’hui c’était eux les proies. Et que cet équilibre renversé invitait à la plus grande prudence.

Citation :
1 - 2 : Rien ne se produit
3 - 4 : Un fangeux apparaît mais ne semble pas avoir remarqué les humains
5 - 6 : Un fangeux apparaît et se jette sur les deux inconnus

Résultat : 6

    Un grognement rauque et parfaitement identifiable leur parvint de l’autre côté du talus. Mais le cri que poussa l’imprudent, leur ôta toute chance de survie. De nouveau sa main vint chercher l’épaule d’Adeline et la retint fermement, il n’était pas question qu’ils se fassent tuer eux aussi, ces deux-là étaient perdus quoi qu’ils puissent faire. Le cri fut bientôt étouffé dans un râle humide, le hoquet de surprise de celui qui voit sa gorge arrachée. Le seul son que peut produire un tel mourant est le gargouillis du sang qui s’échappe de ses poumons et emplit sa bouche. Un son obscène et écoeurant qui fut noyé par un autre cri, celui d’une enfant.

    Aussi stupide et irréfléchi que cela puisse paraître, Séraphin sortit de sa torpeur et contourna le talus en quelques enjambées. Il lui était impossible, impensable d'abandonner ainsi un enfant à son triste sort. Là le monstre festoyait des entrailles de l’homme, ignorant l’enfant qui sanglotait blottie contre la souche d’un arbre. Il mangeait en grognant au sein d’un homme pas encore mort qui ne pouvait plus hurler mais tréssaillait toujours à défaut de pouvoir se débattre, le sang s’écoulant de ses blessures lui ôtant toute force, toute combativité.

    Saloperie.

    Une chance comme celle-ci ne se représenterait pas et la lame du milicien rencontra la nuque du monstre attablé pour ressortir de l’autre côté de son cou, séparant les vertèbres à défaut de détacher totalement sa tête. La bête était morte mais l’homme au sol vivait de pénibles derniers instants, le ventre ouvert et les entrailles répandues à même le sol.

    Avisant l’enfant et l’herboriste l’homme d’armes aboya ses ordres avant de se pencher vers la pauvre victime à qui l’inconscience se refusait toujours.

    Protège l’enfant! Qu’elle ne voit pas ça.”

    Avec une boule dans la gorge le milicien mit un genou au sol et tira sa dague pour mettre un terme aux souffrances de cet homme qui n’avait commis que le crime d’être imprudent. En était-ce véritablement un? Il le payait pourtant cher, trop cher.

    Ça va aller.” Il réalisera plus tard qu’il avait prononcé cette phrase pour eux deux, et pas seulement pour celui qui agonisait. “Ça va aller.”

Citation :
Je précise qu'il ne l'a pas encore achevé, au cas où tu veuilles rebondir là-dessus.
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Adeline DelormeAlchimiste
Adeline Delorme



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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyMer 17 Avr 2019 - 11:36
Il doit exister bien des mots pour me décrire, néanmoins “courageuse” ou encore “téméraire” n'en font absolument pas parti. Ainsi, lorsque le milicien m'invita silencieusement à me placer ventre à terre, je ne pus que lui obéir, tout en sentant mon cœur cogner contre ma poitrine. J'avais peur… Peur de l'inconnu. Peur de ce qu'il pouvait arriver à tout moment… Peur de ces ennemis morbides tapis dans l'ombre et qui n'attendaient qu'une invitation pour en sortir et qui ne tarda malheureusement pas à le faire.


La créature était seule, affamée comme si son seul et unique instinct consistait à se nourrir. Brusquement, elle se jeta sur le pauvre homme impuissant pour se repaître de ses chairs sanguinolentes, sauvagement arrachées par ses dents déroutantes… Mais malgré l'effroi évident que je ressentais, je ne pus que songer à l'enfant non loin de la proie agonisante. Mon propre instinct, celui dont je n'avais nullement conscience, me poussa à me relever, les genoux tremblants et le cœur battant à tout rompre. Néanmoins, à peine galvanisée, je fus sitôt arrêtée par la main ferme du milicien posée sur mon épaule.

Je le voyais dans ses yeux, lui aussi pensait à l’enfant, mais était bien assez réfléchi pour me savoir impuissante. Que pouvais-je faire, moi, pauvre femme misérable ? Je n'étais ni armée, ni capable de combattre. Je n'avais rien d'une guerrière ou d’un soldat et ne représentait finalement rien d'autre qu'une proie faible et vulnérable supplémentaire. Il me fallait m'y résoudre, j'étais totalement inutile… Aussi me contentais-je d’obéir, une fois encore et restait là alors que mon guide armé m'abandonnait pour mieux rejoindre l'endroit où se déroulait l'effroyable scène.

Je le vis contourné le talus, l’air alerte et volontaire, tandis que moi… Je restais planter là où il m'avait laissé. Mon regard glissa sur mes mains, vides mais tremblantes sous le poids invisible de la culpabilité. J'avais l'impression d'abandonner une âme innocente et plus vulnérable encore que moi-même simplement parce que ma nature de femme me rendait faible. Alors certes, je ne pouvais combattre, je ne pus que rester réaliste sur ce point. Et même si l’homme était déjà condamné, je pouvais néanmoins mettre l'enfant à l'abri.

Personne n'est inutile.


Voilà pourquoi je m'avançais à mon tour, tout en veillant à rester à bonne distance pour ne pas gêner le milicien dans la sombre tâche qui était la sienne. Lorsque j'arrivais, ce ne fut que pour voir la tête de la tête de la créature dégringoler sur le sol entendre mon guide m'ordonner de préserver l'enfant de la vue de ce qui allait se produire. Je n’attendis pas pour obéir et saisis la petite pour plaquer son visage couvert de larmes contre ma poitrine. J'avisais ensuite l'état de l'homme qui devait probablement être son père… Il était fini. Jamais de telles blessures ne pourraient guérir et il ne restait malheureusement qu'une seule chose à faire : achever le malheureux.

Et encore… Cela ne suffirait pas. Mes pensées ne purent qu'aller vers mon frère, à ses derniers instants puis à ceux qui suivirent : la perte de son âme et sa transformation en monstre. Voilà tout ce qui attendait ce pauvre homme, j'en étais certaine. La mort ne le préserverait pas de cette fatalité, mais si j'ignorais tout du processus. Je fermais les yeux, déglutissant avec difficultés avant d’intervenir:


-Je sais que vous n'avez pas d'autres choix, mais peut-être pourriez-vous les laisser se dire adieu...

Je me souvenais de mes regrets, ceux liés à ce manque précis venant du fait de ne pas avoir pu embrasser une dernière fois mes chers disparus… Mon père, ma sœur, et même mon jumeau qui est pourtant mort sur ma table. Je ne voulais pas que cette petite souffre de tels regrets et tenais donc à lui laisser cette chance unique.

Tenant ses petites joues sales et inondées de larmes entre mes mains, je me baissais pour me mettre à sa hauteur afin qu'elle puisse voir mes yeux.

-Je suis désolée mon enfant, mais ton père doit s'en aller. Les Trois veilleront sur lui, je te le promets, mais il est temps de lui dire au revoir.

La vérité, même sous forme de simples mots, blesse parfois bien plus que toutes les lames du monde. L'enfant peinait à encaisser la nouvelle, même si la réalité ne pouvait que forcer son âme à comprendre qu'il n'y avait pas d'échappatoire. Pas cette fois. Silencieuse, la petite fille secoua la tête avant de s'approcher de son père. Ses yeux se posèrent partout, parcourant chacune de ses blessures immondes comme pour réaliser que le temps était compté.

Touchée bien plus profondément que je ne voulais me l'avouer, je me détournais de la scène pour porter mon regard vers les bois. Je n'écoutais rien de leur échange de paroles, préférant les ignorer pour mieux retenir mes larmes. Leur situation me ramenait indéniablement vers mes propres blessures qui n'avaient pas encore eut le temps de cicatriser. Je maudissais ce monde atroce pour ce qu'il était devenu. Je méprisais les Trois pour cette épreuve qu'ils nous imposaient sans même nous regarder. Ma colère était toute aussi profonde que ma tristesse et je me devais pourtant de les ignorer pour mieux les faire taire… Les étouffer pour en venir à ne plus rien ressentir du tout.

Un peu plus tard, je tenais la main de l'enfant dans la mienne. Elle était calme, presque éteinte… Ce que je ne pouvais que comprendre. Le monde était devenu totalement irréaliste, comme si le cours des choses avait été inversé. Jadis, nous avions encore l'espoir, mais qu'en était-il à présent ?

-Que va-t-il advenir de la dépouille de mon père ? murmura l'enfant.

Consciente de la portée de sa question, je ne sus néanmoins que lui répondre. Mon regard glissa vers le milicien, cherchant involontairement son appui. La milice prendrait-elle le risque de se rendre jusqu'à son cadavre pour ériger un bûcher ? Rien n'était moins sûr …

-Qu'étiez-vous venud faire ici ? lui demandais-je à mon tour.

-Maman est malade. Elle a de la fièvre… Mais nous sommes bien trop pauvre pour pouvoir acheter les remèdes de l'apothicaire… Alors nous sommes venus cueillir des plantes...

-Quelles plantes?


-Je ne connais pas leur nom, mais regardez, répondit-elle en ouvrant sa besace.

Là, je découvris plusieurs fleurs connues, certaines leur seraient totalement inutiles, mais l'une d'elles attira mon attention. Je me saisis du petit brin rassemblant plusieurs fleurs jaunes… Il y en avait, hélas, bien trop peu pour en faire une décoction efficace, mais ce petit brin attestait néanmoins de la présence de plan entier, quelque part.

-De l'aigremoine... murmurai-je face à cette surprise. Où Avez-vous trouvé cette fleur ?

-Au sud des remparts… Papa en avait bien plus dans son panier. Mais des vilains nous ont attaqué… Je n'ai pu que ramasser ce qu'ils ont fait tomber en partant

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Séraphin ChantebrumeAdministrateur
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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyLun 22 Avr 2019 - 21:59
   Le milicien détourna les yeux, incapable de faire face au spectacle affreux d’une enfant qui fait ses adieux à son père mourant. C’était trop, bien trop à supporter pour chacun d’entre eux. Quand les râles de l’homme ralentirent qu’il commença à geindre Séraphin posa une main douce sur l’épaule de l’enfant pour l’attirer vers lui.

    Il est temps. Je suis désolé.”

    Il aurait voulu s’agenouiller et serrer cette petite contre lui, lui dire qu’il était désolé et qu’ils auraient peut-être pu arriver plus tôt. Peut-être qu’ils auraient pu faire quelque chose, peut-être que non. Il n’en fit rien, mais le regard qu’ils échangèrent était clair pour eux deux, elle ne lui en voulait pas. La petite réfugiée dans les bras de l’apothicaire il put achever sa sinistre besogne, non sans avoir rassuré le mourant qui perdait peu à peu ses forces.

    Ce sera rapide.”

    L’homme hocha la tête. Un instant plus tard celle-ci roulait dans les herbes folles. Respectueux le milicien la replaça là où elle devait être et referma les paupières du mort. Il n’avait pas à contempler d’où il était le spectacle du visage brisé de sa fille.

    Triste monde.

*  *  *  *  *

    La question qu’elle posa était inattendue pour une si jeune enfant. Et aucun des deux ne sut quoi répondre, Séraphin se pencha devant elle et tenta de contourner le problème, sans être certain d’y parvenir.

    Je ne sais pas. Mais il ne se relevera pas, tu peux me croire pour ça. Moi c’est Séraphin, et elle Adeline.”

    Il lui tendit sa grosse main gantée et s’amusa de la taille de la sienne. Ses propres enfants ne devaient pas être plus vieux que ça quand… Il secoua la tête, chassant les ombres qui y rôdaient. Ils écoutèrent son récit et comprirent pourquoi il n’y avait aucune fleur dans les parages, ces plantes médicinales valaient désormais plus que de l’or, ce n’était pas étonnant qu’on songe à détrousser ou même à tuer pour de telles choses.

    Allons chercher le panier de ton père tu veux?”

    Après tout les brigands, c’était bien sa spécialité. D’autant que ces bougres venaient indirectement de faire une veuve et une orpheline. Ça ne serait pas gratuit. Certainement pas.
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Adeline DelormeAlchimiste
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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyMer 24 Avr 2019 - 11:48
-Et moi Juliette, se présenta la gamine à son tour.

Juliette… Elle ne devait pas avoir plus d'une dizaine d'années, probablement mois. Ses joues, même sales et humides, n'en étaient pas moins ronde et rosées que celles des autres enfants de son âge. Ses cheveux blonds, bouclés lui donnaient quelques traits angéliques ajoutant une certaine impression de douceur… Une enfant, ce n'était encore qu'une enfant et pourtant, en une seule journée elle venait de perdre la moitié de sa famille, et ce, de la pire manière qui soit.

Malheureusement, la jeune Juliette n'était pas la seule à subir ce genre de perte. J'imaginais bien mon père mourir de la même manière que ce pauvre homme, même si je doutais qu'il ne se trouvât alors avec lui une personne aussi charitable que Séraphin. Ainsi, il était fort possible que le cadavre de mon père, comme celui de ma sœur, se trouvait encore là, dehors, quelque part… Déambulant misérablement dans la pénombre dans le seul et unique but de commettre ces atrocités. Cette seule pensée me donna la nausée…

Seulement, les paroles du milicien me tirèrent brutalement de ma torpeur… Que disait-il ? Pourquoi ? Comment comptait-il s'y prendre ?

-Aller la chercher, mais...

Nul besoin d’être un génie pour comprendre les intentions du milicien. Il ne s'agissait pas seulement de reprendre un panier rempli de fleurs jaunes, mais plutôt de punir ceux étant indirectement responsable de la mort du père de la fillette.

-Vous êtes le seul capable de combattre Séraphin ! Vous ne savez même pas combien d'hommes se trouvent là-bas, s'ils sont armés… C'est trop dangereux...

Ma main se resserra autour de celle de la petite. J'étais indéniablement touchée par son histoire, et même s'il me fallait ces plantes, je ne pouvais courir le risque de la mettre en danger. Je n'avais rien sur moi qui serait susceptible d'aider le milicien. Point d’ampoule à fumée, ni même de boules urticantes… Rien mis à part un vulgaire couteau bien inutile dans mes mains d'alchimiste…

-Mais ma mère… Elle a besoin de ces plantes...

Une nouvelle larme coula sur sa joue et mon cœur trop fragile encore se brise une nouvelle fois. Des remèdes, je pouvais en fabriquer par centaines sans jamais rien lui faire payer… Je pouvais acheter les herbes chez un apothicaire, sans même me préoccuper du prix… Encore fallait-il que l'officine soit approvisionnée ce que rien ne garantissait. Je ne trouvais donc rien de rassurant à lui dire, mais il était hors de question d'être celle qui priverait l'enfant de sa mère par manque de bravoure ou excès de prudence… Après tout, je n'avais strictement rien à perdre, ma vie ne valait rien et ne se résumait qu'à mes recherches…

- Très bien, allons-y… Où avez-vous été attaqué exactement ?

La petite sembla réfléchir, se perdant quelque peu dans ses pensées afin de nous fournir autant de renseignement que possible.

- Nous avions fini la récolte, non loin de la route menant à Menerbes. C'est là que nous vivions avant… L’herboriste du village nous avait indiqué l'endroit. Nous remontions en longeant la côte, parce qu’on nous a dit que les bêtes n'aimaient pas l'eau… On voyait bien la ville de là où on était quand… Les bandits ont attaqué...


Je me demandais qui avait pu affirmer de telles choses, d'autant que tout ceci était totalement faux, en sachant que les fangeux semblaient affectionner les marais. Peut-être faisait-elle simplement allusion au sel, mais là encore, cela venait d'une simple supposition jamais démontrée. Rien de suffisamment tangible dans cette théorie pour s'y appuyer... Néanmoins, il fallait aussi reconnaître que pour garder espoir, les gens avaient toujours eu ce besoin de se raccrocher à quelque chose... N'importe quoi, simplement pour ne pas sombrer dans le doute et la folie... Un espoir précaire dont la réalité et la logique m'avaient probablement privé.


Mais tant pis, ce n'était pas le moment de se focaliser sur quelques menus détails lorsqu'il y avait plus important à savoir.

-Tu peux nous dire combien ils étaient ?

-Trois hommes et une femme… Il y a une petite cabane par là-bas. Vraiment petite… Peut-être que c'est là qu’ils vivent, je ne sais pas. La femme avait une marque sur le poignet, papa m'a dit que c'était comme ça qu'on reconnaissait les bannis… Ce sont des gens méchants, c'est ça ?

Méchants… Il s'agissait peut-être bien d'un raccourcis un peu simpliste pour décrire des criminels exilés, mais il n'en était pas moins juste… Mes yeux, chargés d'inquiétudes se posèrent alors sur Séraphin.

-Que feraient des bannis aussi près de la ville ? Cela me semble bien téméraire de leur part... Comment comptez-vous vous y prendre ?


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Séraphin ChantebrumeAdministrateur
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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyJeu 2 Mai 2019 - 21:47
   Séraphin se tenait debout, penché contre la dépouille encore fumante du dernier banni, à bout de souffle, comme vidé d’une énergie et d’une frustration qu’il peinait à contenir. Curieusement l’horreur qu’il avait éprouvé lors de ses premières mises à mort avait disparu, remplacée par une sorte de satiété, une béatitude morbide. Ces gens-là avaient amplement mérité leur sort et c’est tout ce qui l’empêchait de s’agonir de remords. Ils avaient attenté à la vie et l’avaient payé de la leur, ce monde était assez fou pour que cela ait un sens après tout.

    L’attaque, le massacre, n’avait duré que quelques instants. Quelques instants d’une sauvagerie bestiale à peine dissimulée. Est-ce que les deux femmes avaient assisté à tout ça? Il aurait souhaité l’éviter mais n’avait pas pour autant honte de ce qu’il était devenu. Cette guerre l’avait forgé en une sorte d’arme insensible qui n’avait pour le sang qu’un goût charnel, carnassier. Et il n’y avait pas de retour en arrière, pas pour lui en tous cas.

*  *  *  *  *

    La femme se tenait un peu en retrait de la cabane qu’occupaient les bannis, peut-être mue par un besoin physique ou le désir de fuir cette compagnie masculine qui pouvait parfois être plus pénible qu’une rage de dents. Un petit caillou lancé dans sa direction et la donzelle avait tourné la tête pour que vienne s’y abattre le front du milicien, le nez et les dents brisées elle n’avait pas eu le temps de crier tandis qu’une main saisissait ses cheveux et que l’autre enfonçait un demi-mètre d’acier dans sa cage thoracique. La lame se fraya un chemin à travers ses organes pour venir percer son coeur dans un hoquet de surprise.

    Sa dépouille décapitée fut jetée dans les fourrés comme si elle ne valait rien. Et à ses yeux c’était le cas. Il était la main armée du Duc et son devoir était d’occire cette vermine marquée, de les traquer un par un jusque dans les moindres recoins des cloaques puants dans lesquels ils se terraient. Essuyant du dos de la main le sang qui était venu moucheter son visage le milicien se retourna un bref instant et avança discrètement en direction du petit cabanon où attendaient les trois derniers bannis.

    Restez ici.”

    Leur guet étant morte ils ne virent rien venir, probablement trop bêtes ou confiants pour avoir pris la précaution de sortir leurs armes. La porte vola en éclats et le premier larron n’eut pas le temps de se retourner avant que sa tête ne quitte ses épaules. Une gerbe de sang éclaboussa l’intérieur du cabanon tandis que l’acier quittait la chair pour venir cueillir le suivant en plein ventre. Il s’écroula en tentant de maintenir ses intestins à leur place de ses mains tremblantes. Il était foutu, il le savait. Et pourtant la douleur était tellement intense qu’il ne pouvait que balbutier et trembler à mesure que toute couleur quittait son visage, visage sur lequel un air de panique insondable s’était installé.

    Le troisième et dernier reculait en tenant de ses deux mains une dague ridicule à la lame aussi émoussée que dentelée, signe qu’elle avait servi à tout sauf à ce pour quoi elle était destinée. Il trébucha et tomba en arrière sur les fesses alors que l’épée du milicien sifflait et vint le saisir en pleine bouche, l’acier traversa tête et cou, le clouant sur la fine paroi de bois du cabanon miteux qui n’était plus désormais qu’une mare de sang et d’organes.

    Il arracha l’épée d’un geste rageur et fit quelques pas pour achever le second blessé, s’ils avaient mérité leur sort il était inutile que le bougre se mette à brailler et attire se faisant tous les fangeux du royaume. Tout cela n’avait duré que quelques instants pendant lesquels il n’avait pas prononcé le moindre mot, ni même esquissé la moindre pensée. Il avait simplement agi comme la bête sombre qu’il s’était senti devenir et tentait tant bien que mal de contenir la plupart du temps.

    Un coup d’oeil dans un coin de la cabane et le fameux panier était là, chargé des précieuses fleurs et légèrement taché du sang qui venait de voler en tous sens. Séraphin remarqua d’ailleurs qu’il en était couvert, sans encore une fois qu’il en éprouve une quelconque gêne ou honte, c’était presque devenu habituel, la seule différence était que pour une fois le sien n’y figurait pas, il n’y avait laissé que le peu de sanité qu’il possédait encore.

    Après avoir décapité les cadavres le milicien se saisit du panier et quitta le cabanon sans même un regard derrière lui, ils ne méritaient ni sa pitié, ni ses regrets. Et vint déposer le panier où l’attendaient ses deux protégées.

    Voila”

    Dit-il. Parce que rendu là c’était à peu près tout ce qu’il pouvait dire ou penser. Mais une part de lui-même se demandait jusqu’où tout cela pouvait aller...
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Adeline DelormeAlchimiste
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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyVen 3 Mai 2019 - 18:48
Impuissante, inutile, je ne pus que serrer l’enfant effrayée dans mes bras bien trop fins pour apporter un quelconque réconfort. Malgré la bise, malgré le bois encadrant la scène d'horreur se déroulant dans la minuscule cabane, nous entendions absolument tout. Mon sang se glaça lorsque que nous parvinrent les râles de douleurs émis par des êtres qui seraient pourtant sauvés de l’agonie…Pour la petite contre moi, je dus à nouveau tout enfouir. Ma propre peur, pour le milicien solitaire à l’intérieur, pour les créatures que ce vacarme pouvait attirer. Ma culpabilité, puisque je n’étais pas moins complice de meurtre, même si aux yeux du peuple, ces gens ne valaient rien. Mes souvenirs, ceux de Renaud se tordant de douleur sur ma table de travail tandis que je lui coupais la jambe… Ces gens, pour moi, ils restaient des êtres humains, malgré tous ceux que l’on avait condamné à une agonie vicieuse sans leur laisser la possibilité de se racheter de tous leurs péchés.

Ce monde était malade, touché par une maladie morbide, semblable à la gangrène rongeant tout sur son passage. Les hommes n’étaient plus des Hommes, mais des animaux effrayés, acculés, capables de tout simplement pour espérer survivre une journée de plus... quitte à se ronger la patte pour se libérer d’un bien obscur piège. Comment en était-on arrivé là, au juste? Pour quelle raison devrions-nous avoir le droit de vivre si ceux-là devaient mourir ? En quoi ma vie, si misérable, avait-elle plus de valeur que la leur… La mort de Renaud, la destruction secrète de son corps, auraient pu me faire partager leur sort…

La petite pleurait et je ne savais que faire… Je ne pouvais qu'attendre que tout cela se termine ou que la mort vienne pour nous. Je ne pouvais qu'espérer que Séraphin s'en sorte indemne… Prier, peut-être ? M'en remettre aux Dieux, mais s'ils ont décidé de nous tourner définitivement le dos… Certainement pas... Au lieu de quoi, j’entraînais la petite vers le sol, nous recroquevillant l'une contre l'autre, comme si nous cherchions à nous protéger du froid… Je la serrais contre mon cœur paniqué, lui couvrant l’oreille privée de protection de ma main tremblante…. Attendre… Juste attendre…

Et puis… Au bout d'un certain temps qui me semblait interminable, le milicien réapparut. Son visage, ses vêtements, ses mains… Tout était recouvert de sang, une vision que j'accueillais d'un regard exorbité. Inquiète, je voulus lui demander s'il était blessé, mais ses yeux m’arrêtèrent aussitôt. Il y avait comme une sorte d'avertissement dans son regard… “Ne t’approche pas, ne dit rien.” Aussi me contentais-je de me saisir du panier ensanglanté qu'il me tendait, le remerciant d'un simple hochement de tête… Je ne fus pas la seule à ressentir le malaise. Je le compris en sautant la petite Juliette se placer derrière moi, s'agrippant avec vigueur à l'un des pans de ma chemise.

Tuer n'est jamais un acte anodin, c'est un geste contre nature qui chaque fois, nous prive d'un fragment de notre âme pour le remplacer par autre chose de plus sombre… Quatre morts… Quatre vies perdues ici… Mais qu'avait perdu Séraphin ? En quelle quantité ? Que ressentait-il exactement ? Que se passait-il derrière ses yeux sombres à la lueur inquiétante ? Nul ne pouvait le savoir, à part lui-même. Aussi décidais-je de me tenir à l'écart, lui laissant un peu de temps pour se remettre de tout ceci… En espérant qu’une telle chose soit possible.

Je l'observais, de loin, tenant fermement la main de la petite au creux de la mienne tandis que Séraphin semblait observer avec attention, l’une des carcasses carbonisées. Il me parut tellement las, épuisé… Je délaissais l'enfant, lui demandant néanmoins de ne pas bouger pour me rendre auprès du milicien. Doucement, je déposais une main compatissante sur son épaule. Point de jugement dans mon regard, seulement une sincère inquiétude pour son état. De ma sacoche, j'en sorti un bout de tissus ainsi que ma gourde. Je versais l'eau sur le linge encore blanc avant de l’approcher du visage entaché du milicien. Je l'interrogeais du regard, lui demandant l'autorisation de le débarrasser de ces taches de sang séchées…

Le sang… Je me souvenais encore de son poids sur mes mains, la sensation ne m'avait jamais réellement quitté. Tuer n'est jamais anodin, même lorsque l'on soulage le monde d'une pourriture. Le poids d'une vie, aussi horrible, soit-elle, n'en reste pas moins lourde. J'espérais le soulager ainsi, juste un peu, en retirant doucement les plaques sèches et craquelées parsemant son visage fermé.
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Séraphin ChantebrumeAdministrateur
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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyDim 5 Mai 2019 - 16:18
  Il se haïssait de ce qu’il était devenu, un monstre qui répandait la mort sans y songer un seul instant, sans se poser la moindre question. C’était devenu un réflexe, un automatisme, frapper pour éviter de parler et tuer quand on pouvait - parfois - l’éviter. En un sens tout était d’une simplicité absolue, sa vie résumée en un combat perpétuel qu’il ne pouvait concevoir ou accepter de perdre. Alors il frappait, défenestrait et tuait parce que c’était ce qu’on attendait de lui, si sa vie d’autrefois était simple celle-ci l’était plus encore, mais elle était tout sauf paisible. Tout sauf agréable.

    Un monstre qui terrorisait femmes et enfants, et le regard de cette petite qu’il aurait aimé porter et soulager du drame qu’elle venait de subir était insupportable. C’était donc ça le bras armé du Duché? Un tueur couvert de sang qui faisait trembler ceux qu’il entendait aider? Les aidait-il vraiment?

    La jeune femme s’approcha avec un linge humide, et il repensa à l’apparence qu’il devait avoir. Nul doute que la petite avait pris peur, il devait avoir l’air à moitié mort. Et pourtant il était indemne, physiquement du moins. Il hocha doucement la tête et ferma les yeux en guise de réponse, conscient qu’elle ne lui voulait aucun mal. Pourtant une part de lui-même était toujours sur le qui-vive et le poussait à rester vigilant, rester méfiant. Il la fit taire en rangeant son épée dans son fourreau, peut-être que le geste apaiserait un peu l’enfant qui tremblait comme une feuille en n’osant le regarder, cachée derrière l’herboriste.

    Le contact de l’eau était frais, ravigorant et il se sentait curieusement plus humain à mesure qu’il retrouvait une apparence engageante, du moins normale. Il restait quelques traces de l’affrontement, mais assez peu pour qu’il puisse être vu sans déclencher de mouvement de panique, le risque étant d’être pris pour un fangeux et criblé de flèches avant d’avoir pu prononcer le moindre mot. Le milicien posa une main sur l’épaule d’Adeline et esquissa un sourire maladroit, pas gêné mais finalement si peu habituel qu’il en oubliait presque comment faire.

    Merci.”

    Puis il s’accroupit et chassa du plat de la main les quelques gouttes de sang qui maculaient le couvercle du panier et l’ouvrit devant Juliette qui roula de grands yeux ébahis.

    J’ai trouvé les plantes pour ta mère, tu veux lui ramener? Ces gens ne te feront plus de mal, tu peux me faire confiance.”

    Il espérait que ça suffirait, qu’elle comprendrait qu’elle n’avait rien à craindre de lui. Bien qu’il ne lui en voudrait pas si elle continuait à le fuir, après tout il en avait bien trop fait pour son petit esprit. Et elle avait bien trop vu pour la journée. Pauvre gamine se dit-il à lui-même, voilà qu’elle rejoignait les rangs innombrables de ceux à qui la fange avait pris une part de vie, une part d’eux-mêmes.

    Vous vivez à Marbrume maintenant?”

    Si elle ne répondait pas Adeline parviendrait sûrement à avoir des réponses, la petite semblait l’apprécier autant qu’elle le craignait lui. Comment est-ce qu’il aurait pu lui en vouloir?
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Adeline DelormeAlchimiste
Adeline Delorme



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MessageSujet: Re: L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin   L'Aigremoine {Flashbak} Pv Séraphin EmptyLun 6 Mai 2019 - 18:15



J'avais craint qu'il me repousse ou qu'il ne me laisse pas l'approcher tant son attitude m'évoquait celle d'un animal blessé. Néanmoins, il me laissa faire, même si je voyais bien que cela ne fut guère évident pour lui. Le milicien était aux aguets, se tenant prêt à intervenir épée en main si jamais j'esquissais le moindre geste un peu trop vif… Je n'étais donc pas réellement rassurée, même si je m'efforçais de ne rien laisser paraître de mon trouble. Mon cœur affolé ne s'apaisa que lorsque la lame du milicien fut rangée hors de ma vue… Ainsi, je pus m’appliquer à retirer toute trace de sang de son visage laissant ainsi apparaître le visage de l'homme et non plus de la bête ensanglantée.

Une fois le masque morbide disparu, le milicien me remercia d'un geste amical et d'un sourire quelque peu crispé, certes, mais tout de même sincère et bienveillant. Les temps sombres ne laissaient guère de place à ce genre d'expression pourtant si propres aux humains. Lui aussi semblait en avoir été privé, comme si son sourire avait été effacé par trop de malheurs endurés… Comme le mien. Je hochais donc la tête, m'efforçant de lui rendre son sourire comme pour les rassurer tous deux… Comme si un “simple” sourire suffirait à chasser la frayeur ou la méfiance, deux choses que l'on pouvait lire dans les yeux de la jeune Juliette.


La petite se tenait légèrement en retrait, comme je le lui avais demandé un peu plus tôt. A présent rassurée et soulagée de retrouver mon guide, je pus enfin l’inviter à se rapprocher également. Son regard ne cessait de passer de Séraphin puis à moi, ne se posant que quelques secondes… Juste le temps de lire dans nos propres yeux qu'il n'y avait effectivement plus rien à craindre ici. Pauvre enfant… Difficile de passer pour un sauveur lorsque l’on est couvert de sang après tout… Je me sentais sincèrement désolée pour Séraphin. Son regard, habituellement aussi éteint que le mien, semblait se charger de regrets lorsqu'il se posait sur la petite fille effrayée.

Le milicien lui désigna ensuite le panier contenant autant de plantes constituant une lueur d'espoir pour la jeune Juliette. Son père avait fait tant d'efforts pour rapporter ces quelques brins d'herbe à sa mère… Il avait tant souffert simplement pour pouvoir sauver sa vie… Ce n'était rien pourtant, seulement quelques plantes légèrement fanées, des choses que l'on trouvait jadis partout et qui valaient à présent le prix d'une vie… Voir plusieurs. L'enfant semblait enfin rassurée, visiblement heureuse d'avoir au moins la possibilité de sauver sa mère. Son regard se chargea de stupéfaction avant de se tenir de nouveau.

-Je le voudrais bien, oui… Mais je ne sais pas qu’en faire.
-Moi, je sais, alors ne t'inquiète pas pour ça, lui dis-je en lui ébouriffant légèrement sa tignasse blonde ce qui, au moins, eut le mérite de la faire sourire.

Lorsque Séraphin lui demanda si sa famille vivait à Marbrume, la petite hocha vivement la tête avant de répondre:
-Oui, mais on n'a pas de maison, on vivait dans la rue jusqu'à ce que maman tombe malade… Une gentille dame nous a prêté une chambre.
-Tu peux nous conduire jusqu'à elle ? lui demandais-je avant de lever les yeux au ciel. Il est grand temps de rentrer en ville.

Le soleil déclinait vers l'horizon teintant ainsi le ciel de lueurs jaunes et orangées, signe que la menace ne se ferait que plus dangereuse encore. Un regard entendu vers mon guide, je me saisis du panier d'une main et du panier de la petite de l'autre. Nous marchâmes lentement et prudemment vers la cité, même si je mourrai d'envie de courir m'y réfugier au plus vite. Les miliciens postés aux portes nous laissèrent rentrer, non pas sans s'assurer qu’aucun de nous ne portait la marque des damnés. Les lourds battants refermés, je pus enfin m'offrir le luxe de respirer doucement… Sortir ainsi ne pouvait que mettre mes nerfs à rude épreuve aussi me demandais-je comment certains pouvaient vivre à l'extérieur.

Je me tournais de nouveau vers le milicien. Sa mission accomplie, rien ne le retenais mis à part son paiement. Nul doute que l'homme devait avoir besoin de respirer lui aussi, plus particulièrement après une telle journée.

-Merci infiniment, Séraphin lui dis-je pour le libérer. La mission pour laquelle je devais vous payer ayant pris une tournure des plus fâcheuse, et inattendue… soupirais-je, ne voulant guère poursuivre cette phrase. Bref, quoi que vous vouliez en guise de paiement, comptez donc le double, je vous prie...

Si tout travail mérite salaire, que valent la peine et les regrets ? Combien coûte la douleur ? Peu importe la somme, à mes yeux, ce ne sera toujours que trop peu…

-Vous ne venez pas voir maman avec nous ? murmura l'enfant en s'accrochant à la manche du milicien.

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