Nom : Furibarde

Prénom : Kanna

Age : 28 ans

Sexe : Féminin

Situation : Célibataire

Rang : Bannie, révolutionnaire.

Lieu de vie : Village des bannis, la plupart du temps.

Carrière envisagée & tableau de départ avec les 4 PCs : (voir topic Système Rp & Xp - Carrières)
+1 ATT / +1 TIR / +1 HAB / +1 INT

Compétences et objets choisis : (voir topic Système Rp & Xp - Compétences)

Kanna attire les regards bien malgré elle, non pas pour sa beauté (car si beauté il y a, elle est très bien cachée), mais pour la couleur de sa peau, brune, peu courante dans cette région du monde. L’un de ses parents était sans aucun doute d’origine étrangère, mais elle ne pourrait vous le dire avec certitude, car elle n’a jamais connu ses parents. Aucun souvenir, aucun indice ne lui permettrait de retrouver leur trace et elle n’en a pas le désir : que cette couleur particulière lui vienne de son père ou de sa mère ne l’intéresse plus depuis longtemps.

Ses yeux constamment cernés sont d’un noir profond : les ténèbres y ont élu domicile et il n’y brille plus rien d’autre qu’un feu rageur, violent. Son regard est assassin, effrayant : l’on n’y trouve aucune compassion, aucune pitié. Il n’a pas toujours été ainsi, mais ces nombreux mois passés hors des murs de Marbrume à devoir lutter pour sa survie ont laissé leurs traces.

Beaucoup de choses ont changé depuis son bannissement, dont sa posture : autrefois plus détendue, plus assurée, elle semble désormais toujours sur ses gardes, peu importe où elle se trouve. Ses mains sont toujours prêtes à dégainer sa dague ou son arc, ses jambes sont toujours prêtes à s'élancer pour lui permettre de sauver sa peau. Son passé de voleuse lui avait permis de développer un corps athlétique, mais la faim lui a grandement fait perdre en musculature. N’étant pas très grande, elle semble désormais nager dans la plupart des haillons qu’elle a pu récupérer (ou voler) par-ci par-là.

Si elle avait eu la chance de connaître une vie normale, Kanna aurait pu être jolie, elle aurait pu avoir le désir de plaire, de prendre soin d’elle. Ce n’est pas le cas, et son statut de bannie fait qu’elle porte encore moins d’intérêt à son apparence désormais. Ses boucles noires et épaisses sont constamment emmêlées, ses lèvres pulpeuses sont gercées par le froid et ses ongles sont courts et sales, ce qui lui donne un aspect négligé qui ne laisse aucun doute sur son rang.

Kanna est une femme dangereuse. Si elle l’estime nécessaire, elle n’hésitera pas à recourir à la violence, à tuer. Le peu de scrupules qu’elle avait, elle les a perdus depuis son bannissement. On ne peut survivre avec une bonne conscience.

Elle accepte difficilement l’autorité : tout ordre qu’on ose lui donner, elle le voit comme une provocation, ce qui peut réveiller en elle une vive colère qui ne s’exprime pas toujours par des mots. Son tempérament impétueux et son arrogance l’ont mise dans bien des situations délicates, desquelles elle se sort parfois avec quelques bleus. Habituée aux bas quartiers, elle a appris à utiliser ses poings très tôt : quand les paroles ne marchent pas, il n’y a pas tant d’autres options, surtout qu’elle n’a jamais été très douée avec les mots. Elle dit les choses comme elle les pense, sans filtre. Faire preuve de tact, tourner autour du pot, cela ne fait pas partie de ses compétences.

Kanna n’a pas d’amis et n’en a jamais eu. Elle a des contacts, des partenaires, des recrues, mais pas d’amis. Elle garde une certaine distance entre elle et les autres, car elle ne sait pas accorder sa confiance. Il ne faut pas croire qu’elle n’apprécie personne, car c’est faux : elle se montre moins froide avec certains, mais cela ne veut pas dire pour autant qu’elle les considère comme des amis. Toutes ses relations sont basées sur une nécessité mutuelle, sur les objectifs qu’elles permettent d’atteindre. Dès lors que les intérêts divergent, la relation est un risque et il est temps de couper les ponts.

Gamine des rues ayant grandi dans la misère, elle a toujours éprouvé un fort ressentiment pour toute institution représentant l’autorité : milice, clergé et, par-dessus tout, noblesse. Elle voue une haine féroce à tous les nobles. Depuis son bannissement, cette haine s’est encore renforcée et elle l’a transformé en quelque chose de plus productif : un objectif. Elle fera tomber la noblesse de Marbrume, coûte que coûte.

Kanna n’a jamais connu que la rue. Elle grandit avec une bande d’orphelins qui la recueillit elle ne sait trop quand et elle ne sait trop comment. Aucun souvenir de ses parents, de sa vie avant de faire son entrée précoce dans la pègre de Marbrume. Elle apprit à voler et à arnaquer très vite, car c’était pour elle le seul moyen de se nourrir. Il fallait être rapide, observateur, discret et habile : difficile lorsque l’on est aussi jeune d’être tout cela à la fois, mais elle avait appris (après maintes erreurs certes).
La vie avec cette petite bande était compliquée. Les butins étaient en général moins importants que leur nombre et la faim les rendait égoïstes : faisant partie des plus petits et des plus faibles physiquement, Kanna allait bien souvent se coucher le ventre vide. La petite n’était cependant pas du genre à se laisser abattre. Elle apprit par elle-même à faire preuve de ruse et à ne faire confiance à aucun de ses camarades. Les premières fois, elle avait essayé de cacher quelques miches de pain dans ses haillons, trop grands pour elle, mais s’était toujours fait attraper. Finalement, elle avait trouvé une planque où elle pouvait cacher une partie de ses larcins : bonne grimpeuse, elle les cachait en hauteur, quelque part où seule une personne de sa taille pouvait se glisser. Elle s’assurait de ne pas être suivie et se délectait d’un maigre festin pour lequel elle n’avait pas besoin de prendre des coups. Sa vie s’était résumée à cela pendant plusieurs années : voler quelques denrées et les cacher pour ne pas crever de faim.

Voleuse depuis sa plus tendre enfance, Kanna finit par devenir très douée à cet exercice et acquit une petite renommée parmi ses pairs. Elle connaissait les bas-quartiers comme sa poche, savait où se trouvait chaque entrée des égouts et pouvait s’y orienter comme personne. De plus, même après s’être séparée de la petite bande avec laquelle elle avait grandi, elle conserva plusieurs contacts qui avaient eux-mêmes su se faire une petite place dans le milieu criminel. Kanna fut l’une des premières à quitter la bande : elle avait à peine une quinzaine d’années lorsque, un soir, elle ne rejoignit pas leur planque. La décision ne fut pas bien difficile, aucun lien particulier ne s’étant formé entre elle et les autres et elle se savait capable de voler de ses propres ailes. Elle avait appris tout ce qu’il fallait en leur compagnie.
Sachant très bien que son passé de délinquante et son teint de peau lui donnait peu de chances de trouver un métier honnête, elle ne se donna même pas la peine d’en chercher. Et puis, étrangement, la vie de criminelle lui plaisait. Elle n’était pas faite pour une vie bien tranquille, sans risque, sans excitation. A ses débuts, elle volait pour son propre compte, vendait ses quelques butins à des marchands peu scrupuleux pour pouvoir se payer de quoi vivre convenablement. Elle aurait pu se contenter de ce style de vie, ne pas mettre son nez dans les affaires trop louches des bas-quartiers, mais Kanna était une femme ambitieuse et n’aimait pas se contenter. Elle voulait toujours plus, toujours mieux. Sa motivation cependant ne se résumait pas à la simple cupidité, il y avait quelque chose de plus profond, de plus personnel : l’envie de se prouver. Elle détestait l’anonymat. Elle avait besoin de susciter quelque chose chez les gens : admiration, crainte, haine, peu importait. C’était sa façon d’exister.

Elle se fit ainsi rapidement connaître des grands noms de la pègre de Marbrume, le genre de types avec une organisation comparable à une petite armée derrière eux. Kanna préférait garder son indépendance, mais ne disait pas non aux bourses remplies d’argent qu’ils lui filaient quand ils avaient besoin de ses services. Ses talents de voleuse n’étaient plus à prouver, et elle vivait des missions qui lui étaient confiées. Elle travaillait seule la plupart du temps, mais il lui arrivait de s’associer à d’autres lorsque les circonstances l’exigeaient.
La voleuse faisait son travail sans trop d’obstacles, parfois elle comptait sur ses talents pour ne pas se faire choper, parfois il suffisait simplement de corrompre quelques gardes pour être tranquille. Elle entendit parler de la Fange pendant l’été 1164, mais cela l’inquiéta peu. Ce qui se passait en dehors des murs de la ville n’avait que peu d’importance à ses yeux, elle n’en sortait jamais de toute façon. Elle aurait dû s’en préoccuper un peu plus. L’arrivée des réfugiés et la menace extérieure avait rendu les miliciens plus tendus, et un nouveau type de punition fit son apparition dès septembre pour vider les prisons : le bannissement. Kanna ne s’imaginait pas recevoir un jour la marque rouge qui caractérisait cette punition, surtout pour quelque chose d’aussi stupide.
L’une de ses connaissances avait perdu gros aux dés et lui avait demandé de récupérer son argent (il ne cessait de répéter que l’homme avait triché et que le voler n’était que justice). Facile. Le vol à la tire était sa spécialité, il lui suffisait de suivre sa victime sans éveiller les soupçons et attendre le bon moment pour lui subtiliser sa bourse. Elle qui avait fait cela toute sa vie ne pensait pas qu’elle pouvait se faire prendre aussi facilement. Elle n’avait même pas remarqué le milicien qui l’observait, il lui avait semblé apparaître de nulle part. Lui l’avait bien vue par contre : à peine s’éloigna-t-elle de la foule qu’elle fut attrapée, encerclée par les collègues de l’homme, comme s’ils l’attendaient. Ne trouvant aucun moyen de s’échapper, la voleuse dut se résigner à son sort.
Elle avait voulu faire connaître son nom : la milice le connaissait aussi. La rançon de la gloire. Le délit était sans grande gravité, mais la Fange qui les menaçait les rendait particulièrement zélés et certains de ses exploits passés étaient remontés jusqu’à leurs oreilles. Comment, elle l’ignorait. Elle était connue dans les bas quartiers, ils auraient pu entendre parler d’elle par n’importe quel moyen. Cela avait de toute façon peu d’importance désormais : ils la bannirent de la ville. Marquée au fer rouge et condamnée à une mort certaine. Ils ne lui laissèrent aucune arme, aucune chance de se défendre. Elle ne savait rien sur les fangeux (hormis le fait qu’ils pouvaient déchiqueter un soldat entraîné à mains nues) et elle ne savait rien des alentours de la ville. Elle avait toujours vécu à Marbrume, elle n’en était jamais sortie. Comment pouvait-elle survivre seule et désarmée dans un endroit qu’elle ne connaissait pas, entourée de monstres assoiffés de sang ?

Elle se réfugia dans un premier temps dans les faubourgs, chez une sorcière qui accepta de l’héberger brièvement, car elle était l’une de ses bonnes clientes. Kanna la surnommait « vieille folle », mais elle avait malgré tout un certain respect pour elle. Elle venait souvent la voir pour qu’elle lui lise les cartes, car elle avait don de clairvoyance : la vieille n’était pas l’une de ces arnaqueuses (filles que Kanna connaissait bien, d’ailleurs) qui racontaient à leurs clients ce qu’ils voulaient entendre ; elle avait un vrai don, ça la brune en était persuadée. Elle ne put rester longtemps cependant, car les faubourgs étaient bien trop proches de la ville et la milice y patrouillait régulièrement. Elle savait qu’elle finirait par y être découverte, et par mettre en danger en plus d’elle-même la vieille qui avait eu la gentillesse de l’héberger. Elle ne repartit pas les mains vides : la sorcière lui offrit une dague qui ne payait pas de mine mais qu’elle avait elle-même enchantée et une information importante ; elle devait trouver un homme aux yeux d’argent, marqué lui aussi. Selon l’ancienne, il se cachait dans les marais. Comme si elle allait s’y aventurer : avec tous ces fangeux, s’enfoncer dans les marais était pure folie ! Il y avait des petits villages encore habités pas loin, il lui suffisait de suivre les chemins des convois et elle se mêlerait à la population, tout simplement. Pas la peine de prendre des risques inconsidérés pour une jolie paire d’yeux.
Malheureusement pour elle, être bannie de Marbrume signifiait ne pas être la bienvenue ailleurs non plus. Elle prit la direction de Menerbes, village le plus proche d’après la vieille, mais elle y fut accueillie avec beaucoup de méfiance, son teint de peau et son air patibulaire n’attirant aucune sympathie de la part des habitants. Après à peine quelques jours, sa marque fut découverte et elle fut chassée du village.
Elle suivit les routes, errant sans but réel. Dès que le ciel se couvrait ou que la nuit tombait, elle se réfugiait là où elle le pouvait, là où les fangeux ne pourraient la trouver. Elle avait la chance de ne pas être encore tombée face à l’un d’eux, mais elle pouvait entendre leurs grognements le soir venu, entendre le bruit de leurs pas lourds sur le sol humide. Ils la terrifiaient. Que pouvait-elle faire seule face à de telles bêtes ? Une dague, même enchantée, ne lui était pas d’une grande utilité face à ces monstres, d’autant que celle-ci était à peine assez aiguisée pour dépecer un lapin.
Kanna la solitaire, Kanna l’indépendante ; sans famille ni amis. Elle n’avait pourtant jamais connu une telle solitude. Elle était habituée aux rues bruyantes de Marbrume, elle se sentait à l’aise dans la foule même sans y être à sa place. Elle ne la reverrait plus jamais. Bannie, elle était condamnée à errer dehors, là où il y avait trop d’espace, là où il n’y avait pas suffisamment de bruit. Elle se sentait étouffer à l’extérieur. « Je vais mourir, je vais mourir… » se répétait-elle chaque soir, comme une berceuse. « Je vais mourir comme j’ai vécu : toute seule, abandonnée. »

Ses premières semaines hors des murs de la ville, hors des faubourgs, avaient été une véritable épreuve. Si elle ne l’avait pas rencontré, elle n’aurait pu survivre plus longtemps. Comme à son habitude, le soir venu, elle se réfugia dans une maison abandonnée et se recroquevilla dans un coin en attendant que la nuit se passe. Chaque bruit qui venait briser le silence captait son attention. Cette nuit-là, se furent des bruits de pas, hâtifs, qui se rapprochaient rapidement de sa planque. Tapie dans l’ombre, le cœur battant, Kanna attendit la main serrée sur le manche de sa dague, prête à se défendre. La porte fut tout juste ouverte que la bannie se jeta sur l’arrivant, parvenant à lui faire perdre l’équilibre grâce à l’effet de surprise. Malheureusement pour elle, l’inconnu avait de bons réflexes : son poing rencontra sa mâchoire et, Kanna sonnée, il put se libérer de son emprise. Il profita de cet instant pour refermer la porte par laquelle il était entré, puis sortit une épée courte qu’il pointa vers elle.
« - Sale connard, cracha-t-elle avec haine.
- Je vais pas te tuer, pas tout de suite en tout cas, mais continue comme ça et je risque de changer d’avis. Montre-moi ton bras.
La brune l’observait avec défiance, immobile. Elle ne capitulerait pas. D’un mouvement rapide, l’homme saisit son bras droit et la força à lâcher sa dague, puis leva sa manche, où la marque rouge était discernable même dans l’obscurité. Un sourire se dessina sur le visage de l’inconnu, et pour la première fois, Kanna remarqua ses yeux d’un gris étincelant. Il la relâcha, rangea son épée dans son fourreau et montra sa marque à son tour.
- Tu vois ? Pas la peine d’être aussi méfiante, on est dans la même merde toi et moi. La prochaine fois parle avant d’essayer de m’égorger.
- Et ? T’es banni, je suis bannie, ça change quoi ? Je devrais te faire confiance parce qu’on a ça en commun ?
- Non, tu devrais me faire confiance parce que sans moi tu survivras pas. Tu crois que tu peux te planquer ici à bouffer des vers indéfiniment ? Regarde ça, il prit la dague jetée au sol, passant un doigt sur la lame, tu pourrais même pas tuer un chat avec, si tu tombes sur un fangeux tu vas faire comment ?
- File moi ton épée si tu t’inquiètes tant pour ma survie.
- J’ai mieux à te proposer : un village où tu peux vivre, où tu seras pas toute seule.
- J’ai l’habitude d’être seule, je sais me débrouiller. De toute façon je vois pas quel village accepterait des bannis.
- Tu m’as pas compris, je parle d’un village peuplé de gens comme toi et moi, une communauté de bannis. On est encore trop peu nombreux, il nous faut du monde si on veut vraiment bâtir quelque chose. Alors je te donne deux options : demain matin, toi et moi on quitte cette cabane et je t’emmène au village, où tu pourras avoir une vraie vie et être en sécurité – enfin plus qu’ici au moins, ou tu refuses de me suivre et je te tue tout de suite. T’as pas l’air bien bavarde, mais on est jamais trop prudent, tu comprends ? »
Elle ne répondit pas tout de suite, afin de ne pas le laisser penser que son ultimatum avait le pouvoir de l’effrayer. Elle était bien trop fière pour ça. Kanna attendit un long moment, son regard planté dans le sien. Était-ce l’homme dont la vieille folle lui avait parlé ? Il correspondait à la courte description qu’elle lui avait donné. Malgré l’attente, il gardait une expression sereine, comme si peu lui importait le choix qu’elle ferait, celui-ci lui conviendrait. La jeune femme donna finalement sa réponse : elle le suivrait. Il lui adressa un sourire et lui conseilla de dormir un peu, ce qu’elle ne fit pas.

Le village des bannis se trouvait loin de toute civilisation, dangereusement enfoncé dans les marais. Aucune route encore praticable n’y menait : personne ne risquait de les trouver, personne n’était assez fou pour essayer de les chercher là. Si Kanna eut quelques réticences au début, elle finit par s’intégrer à cette communauté grandissante, et à réellement s’y investir. D’abord froide, sa relation avec l’inconnu (qui n’en était plus un, après quelques échanges pas toujours courtois, elle apprit qu’il se prénommait Conrad) alla en s’améliorant et ils finirent par tisser des liens. Ce n’était pas tout : la vie parmi les autres bannis lui avait permis de réaliser que nombreux étaient ceux qui partageaient un fort ressentiment envers Marbrume et son Duc, qui les avait tous condamnés à une mort plus terrible que la pendaison. Ses idées sur la noblesse s’étaient radicalisées : elle voulait tous les voir morts, libérer Marbrume de leur tyrannie. Une alliance fut formée entre elle et plusieurs bannis qui souhaitaient retrouver la sécurité de la ville. Elle se trouva à la tête de ce petit groupe, organisant de petites attaques pour fragiliser la stabilité de la ville, notamment en s’attaquant aux convois qui y ramenaient des vivres.
Être la cheffe d’un groupe composé essentiellement d’hommes n’était pas aisé. Elle savait très bien que la plupart la suivaient parce qu’elle était proche de Conrad, qui, même sans faire partie de cette bande, avait une influence suffisante au sein du village pour que sa position ne soit pas contestée. Ceux qui lui étaient réellement loyaux se comptaient sur les doigts d’une main. Elle choisissait ses cibles avec une grande prudence : chaque butin devait être suffisamment important pour satisfaire leurs besoins, sans pour autant que le risque soit trop grand, car ils n’étaient pas assez nombreux pour se permettre de perdre des hommes. Ces attaques n’étaient pas encore suffisantes pour déstabiliser Marbrume, mais elles leurs permettaient au moins de remplir leurs ventres, parfois même de s’armer.
Même si le but premier de cette bande était de faire tomber la noblesse, leurs attaques permettaient principalement d’approvisionner le village. Kanna s’impliquait réellement dans la vie de cette communauté, soutenant partiellement la vision de Conrad de faire de cet endroit un lieu de vie sûr pour les gens comme eux. Cependant, elle avait beaucoup de mal à l’imaginer comme une solution permanente. Ils faisaient de leur mieux pour sécuriser le village, mais le danger restait présent, constant. Il n’y avait qu’un lieu où ils seraient réellement en sécurité : Marbrume. Elle ne comptait pas rester terrée dans ces marais puants indéfiniment, ce n’était que temporaire. Elle voulait la ville, elle voulait retrouver sa maison. Et elle l’aurait, peu importait les moyens qu’elle devait mettre en œuvre pour parvenir à ses fins.

Elle s’était résolue à se battre et elle avait réussi à entraîner un certain nombre de bannis avec elle dans sa quête de vengeance, mais certains au village pensaient que son combat était sans espoir et que ses ambitions finiraient par être un danger pour eux. A force d’attaquer convois et fermes, Marbrume finirait par se rendre compte que les fangeux n’étaient pas la seule menace extérieure et que des bannis parvenaient à survivre en dehors des murs, parvenaient à bafouer l’autorité du Duc en échappant à la mort à laquelle il les avait condamnés. Il finirait par envoyer des hommes les chercher et terminer le travail que les fangeux n’avaient pas fait pour lui.
Kanna ignora ces craintes. Ironiquement, les fangeux protégeaient le village de toute menace venant de Marbrume : elle voyait mal le Duc risquer ses hommes pour quelques bannis. Si les choses étaient loin d’aller pour le mieux, elles n’allaient pas trop mal malgré les circonstances. A force d’entraînement ils devinrent mieux organisés, ce qui augmentait fortement le nombre d’attaques qu’ils réussissaient. Kanna se sentait également plus à l’aise dans son rôle de cheffe. Elle n’était pas un leader charismatique apprécié de ses hommes, mais elle savait choisir ses cibles intelligemment, savait planifier ses attaques avant de frapper comme elle savait improviser dans l’action.


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