Comme une esquisse d'avant la Chute [pv Talhya Ervin]

En ce début du mois de Mars, les températures s'adoucissaient enfin, laissant un commencement timide de printemps se présenter à la place du froid mordant de l'hiver. Le ciel se tentait d'un bleu outrancièrement accueillant qui détonnait assez follement avec la gravité et surtout l'incertitude la survie du dernier bastion de l'Humanité.

Cette douceur donnait envie aux gens de toutes les extractions de sortir et de se laisser aller à quelques folies sur les marchés. La hanse se parait alors d'étals aux produits aussi beaux que chers devant lesquels s'extasiaient les badauds. C'en était presque navrant de voir ces gens jouer à faire semblant que tout allait bien.

Logan se baladait parmi les étals, mais au fond, lui aussi cherchait à retrouver ce sentiment de sécurité, retrouver sa vie d'avant la Chute. Ici, il faisait partie de ce qu'on pouvait appeler la petite bourgeoisie: pas assez riche pour être un vrai noble parmi les plus puissants, mais pas non plus pauvre et avec une affaire rentable qui le maintenait à flot tant qu'il ne sombrait pas dans les orgies de débauche.

Il flânait lui aussi, mais en tant qu'artisan, laissait son œil entraîné se poser sur chaque produit, essayant de trouver des matériaux nouveaux ou des idées ambitieuses pour se démarquer des concurrents. Là un forgeron semblait proposer des prix plus qu'honnête, ici cette gravure était très inspirante pour son projet de fabrication de coffres.

Tout se notait dans un coin de sa tête, garnissant un carnet secret de plans et idées plus ou moins loufoques.

Sur le bord de la rue, un étal se démarquait des autres par des couleurs flamboyantes et des textures dont les souvenirs remontaient à ses sens avec difficulté.
Ici la soie raffinée d'une chemise qu'il avait porté pour une représentation officielle, ici une laine immaculée qui lui rappelait les chaudes couvertures de son enfance pour résister aux hivers glaciaires. Et sur le bord, une cape aux motifs d'une exquise précision.

En observant ces tissus, il se rendit compte à quel point il devait faire peine à voir pour un châtelain. Sa garde robe était la même depuis son arrivée et il n'avait jamais prit le temps d'en changer tant il s'était concentré sur son affaire. Mais il devait revenir dans le champ politique et ne pouvait se laisser paraître comme un paysan plus riche que les autres.

La jeune femme qui tenait la boutique se tenait derrière l'étal, il la questionna avec un sourire:

-Bonjour mademoiselle, comment parvenez vous à obtenir des teintes aussi chaleureuses?

Il prit un ruban de tissu vert sapin entre ses mains, appréciant la douceur de son contact puis, une fois qu'il eu sa réponse, il posa une seconde question:

-Vous serait il possible de coudre sur ce ruban un motif spécifique, un emblème pour être précis? Et si possible avec un fil doré?

Si renouveler ses vêtements était le premier projet qui lui venait en tête, ce ruban là lui permettait d'imaginer autre chose: demander en mariage Adélaïde. Bien évidemment, c'était fou comme idée...mais les beaux jours devaient avoir un effet bénéfiques sur son humeur.