Nom : D’Elrisor
Prénom : Jehan
ge : 24 ans
Sexe : Masculin
Rang : Victomte, Haut-prêtre d’Anür
Carrière envisagée & tableau de départ avec les 4 PCs : Carrière du haut prêtre
CHA +2, INT +1, INI +1
Compétences et objets choisis : Alphabétisation, Doctrine du Culte, Baratin, Chance, Divination
Veste et jambières de cuir, coutelas.

(Petite précision : La divination telle que la pratique Jehan implique un petit sac de pierres polies (pas plus grosses qu'une graine de tournesol) de toutes natures et de toutes couleurs. La personne qui se soumet à la divination (elle doit le faire de son plein gré), doit d'abord piocher une pierre (en aveugle), la sortir du sac, puis y renoncer pour en piocher une autre. Jehan est intimement convaincu que la trame du destin peut se lire sur ce changement forcé. Repiocher la même pierre est par exemple un très mauvais présage, le signe que la déesse s'est désintéressé du sujet, à moins qu'il ne s'agisse à l'inverse du signe d'une très forte détermination...)

Le physique de Jehan tient d’un paradoxe subtile, né de l’indécente facilité pourvue par sa naissance dans un quotidien pourtant rude. Ses yeux acérés d’un bleu très pâle tranchent sur un visage doux, épargné par les cicatrices de la guerre et les stigmates de la maladie. Il se rase régulièrement, les mauvaises langues suggérant qu'il refuse toute barbe naissante reconnaissant par avance que celle-ci ne serait jamais suffisamment épanouie pour lui donner le sérieux dont elle dotait son paternel. A l'inverse, il se donne rarement la peine de se coiffer. S'il apprécie d'arborer des cheveux d'un noir d'encre, tel l'oriflamme d'un corbeau de mauvais augure, il se contente généralement de les couper lorsque ceux-ci menacent de dépasser ses épaules.

Grand de taille mais de carrure modeste, Jehan impressionne davantage par son assurance que par sa musculature. Il a en vérité plus de ténacité que de force, et ses mains trahissent une existence sacrifiée aux livres et aux prières plus qu’au maniement des armes.

Jehan possède deux garde-robe distinctes, la première, de bonne facture mais plutôt sobre, s’assortit à merveille avec son armure de cuir, et c’est ce qu’il revêt lorsqu’il ne se consacre pas explicitement au service de la déesse. Lorsqu’il entend guider le peuple dans la voie d’Anür, il cède parfois à la fantaisie d’une cape de velours, d’une chemise de soie, ou de bijoux étincelants, optant pour un signe distinctif rappelant en ce monde éphémère l’indicible beauté de la déesse.

A son poignet droit, il garde toujours un bracelet métallique de nacre dont les motifs irisés miment les écailles d’un poisson. Il n’était encore qu’un jeune adolescent débutant sur les voies de la prêtrise lorsqu’il l’a revêtu, et serait bien en peine de le retirer sans le secours d’un forgeron. Il y voit un rappel de son engagement vis-à-vis de la déesse.

Il s'est vu doté récemment d'une autre marque impérissable, la morsure sournoise d'un fangeux sur son bras gauche, comme une menace gravée sur ses jours en lettre de sang.

S’il est une leçon qu’a retenu Jehan en son jeune âge, c’est qu’il est donné à chacun de se battre avec les armes en sa possession. Être le troisième enfant d’une fratrie n’a fait que renforcer sa ténacité, et, s’il n’était ni destiné à hériter de ses terres, ni destiné à prendre les armes pour le duché, Jehan n’en a pas moins appris assez tôt à tenir tête à leur père. Sans la promesse faite à sa défunte épouse - et une promesse au nom d’Anür faite à une mourante ne se reprend pas - il aurait volontiers choisi une voie pour son fils qui n’impliquât pas le poison des mots.

S’il est une forte tête, Jehan n’en a pas moins appris à se taire. Il sait être mielleux et condescendant quand la situation l’exige, et il a appris à revoir ses ambitions et ses valeurs à la baisse. Ses croyances religieuses le poussent à voir une épreuve en tout obstacle et il a acquis une vision de l’existence à la fois cynique et pragmatique, ce qui le rend parfois doucement cruel. Jehan a un penchant marqué pour l’hypocrisie : ses engagements religieux le poussent à aider le peuple, mais sa prudence l’incite à ne pas s’impliquer émotionnellement dans les malheurs d’autrui.

De fait, rares sont les individus qui trouvent grâce et importance à ses yeux. Et tous les autres ne sont jamais que des pions entre les mains des dieux.

Jehan goûta à une enfance sans histoire. Troisième enfant de sa fratrie, l’on imaginait parfois faire de lui un marchand d’importance, là où son aîné Ulrich hériterait du titre de leur père, et où Maurin, le cadet, embrasserait la voie des armes. Jehan avait quelque entendement pour les chiffres et un goût certain pour la lecture, même si son père, Sigmund, se plaisait de ne voir là qu’un caprice d’enfant.

L’avenir tout tracé de Jehan bascula dangereusement à la naissance de sa sœur Sélénée. L’accouchement ne se passa pas sans heurt, et l’odeur du sang répandu hanta les couloirs du manoir des jours durant. Eliane, leur mère, ne devait jamais se remettre de l’épreuve et fit jurer à son époux de consacrer leur troisième fils au culte de la déesse. Alitée, l’esprit enfiévré, Eliane exposait l’ire divine avec un chavirement tel que, terrassé d’effroi, Sigmund, son époux, lui jura tout ce qu’elle voulait entendre.

Les fils d’Eliane encaissèrent sa mort avec la gravité et le sérieux que leur maître d’armes peinait tant à leur inculquer. Alors que la haute prêtresse achevait son office et suppliait Anür de prendre soin de l’âme de la défunte, Sigmund fendit les rangs, se saisit du bras de Jehan et le traîna à sa suite comme s’il n’était rien de plus qu’un fétu de paille et le jeta dans les jambes de la prêtresse, lui clamant avec une ferveur glacé qu’il était le dernier de son sang qu’il confiait aux bons soins de la déesse.

Dès lors, il se comporta comme un étranger à l’égard de Jehan. Il n’avait jamais caché combien sa préférence allait à l’aîné, ni quelle fierté il tirait de l’habileté aux armes de Maurin. Ulrich eut beau avoir la fantaisie de mettre un arc entre les mains de son frère pour le plaisir d’avoir un compagnon de chasse à ridiculiser, ce dernier n’obtint jamais la grâce paternelle, quand bien même il rapportait un trophée inattendu de la traîtrise silencieuse des bois.

Jehan préférait de loin se consacrer à ses études, et avait assez d’espièglerie pour menacer d’horreurs effroyables quiconque le houspillait. Quand la prêtrise le rabrouait pour ses manières indignes, il feignait l’indifférence, prétendait qu’il n’était qu’un humain et ses pairs des sots pour prêter à ses mots la volonté de la déesse. Alors qu’en présence des petites gens du manoir, il gardait son air entendu de cruel augure.

Anür dut s’agacer de l’insolence de la maison d’Elrisor car elle réclama Sigmund au détour d’un hiver cruel, où de mauvaises humeurs gagnèrent ses poumons avant de l’emporter. Comme attendu, Ulrich prit la tête de la maison, Maurin connut ses premières campagnes et Jehan s’isola plus encore, se perdant dans ses livres et ses sermons d’interminables journées, lorsqu’il n’allait pas méditer dans les bois. Il passait tant de temps à ne rien faire ni dire - de l’avis de ses frères - qu’il fut plus d’une fois désigné comme chaperon pour leur sœur.

Lorsque ceux-ci lui cherchaient querelles, il leur répondait cyniquement de songer à chercher femme, sans quoi il risquait de ne se réimpliquer dans la vie familiale que pour des funérailles de plus. Ulrich ne tarda pas à le prendre au mot pour prendre femme, tissant une union profitable hors des murs de Marbrume. Hélas, la douce épousée était de constitution fragile et mourut en couches, sans même lui donner d’enfant.

Refusant de renoncer à lier leurs deux familles, Ulrich, encore endeuillé, offrit la main de Sélénée à ses généreux voisins, laquelle fit la joie de son époux lors de noces somptueuses, et Jehan s’attrista de ne trouver aucun haut prêtre pour autoriser son voyage. Certains avaient en effet tendance à lui faire payer ses frasques passées, et il était assez turbulent pour qu’une telle excursion ne soit pas forcément de tout repos.

Maurin, quant à lui, décida que la seule femme de sa vie était d’acier mortel et ne chercha pas d’autre compagnie que celle des filles à soldat.

Lorsque la menace des fangeux atteignit Marbrume, Maurin eut l’effroyable chance de les voir de ses yeux et d’en revenir vivant. Les terres environnantes n’étaient plus sûres, tout n’était que charnier et terres désolées. L’on trouvait des fruits pourrissant sur les arbres et des bêtes emprisonnées, comme si toute la population s’était simplement évanporée. Certains domaines luttaient encore, affirmait Maurin. Et, sous les regards pesants de ses deux frères, il finit par avouer que ses pas ne l’avaient pas porté jusqu’à Sélénée. Il ignorait si elle et les siens avaient survécu, mais il était de leur devoir de lui porter secours.

Ulrich protesta, railleur, que c’était à l’homme qui avait placé sa main de la sienne de protéger ses jours, et Jehan marmonna qu’il ne serait que d’une aide limitée sur un champ de bataille surtout s’il fallait combattre des monstres. Maurin s’emporta, leur demandant sans détour si leur père n’avait engendré que des pleutres ou s’ils étaient plutôt nés du cul d’un bourrin que des jambes de leur mère. Ulrich, offensé, finit par accepter de se joindre à la périlleuse mission.

Jehan ne céda qu’au chantage, à la menace que, s’il ne venait pas, il n’aurait plus qu’à déclamer à sa déesse sa plus belle oraison. Il leur emboîta le pas sans un mot, scella sa monture sans desserrer les dents, et la fratrie d’Elrisor fila à travers la lande à la faveur de la nuit.

Hélas, leur imprudente mission n’atteignit pas le but escompté, ils tombèrent dans une embuscade et ne durent la vie sauve aux qu’aux réflexes de Maurin. Jehan vida les étriers et récolta une vilaine morsure au bras, tandis qu’Ulrich repoussait l’agresseur du mieux qu’il pouvait sans blesser son frère…

La chevauchée du retour fut plus silencieuse encore que l’aller. Maurin maugréa des excuses que Jehan n’attendait pas. Songeur, incapable d’écarter ses pensées de la douleur lancinante, il ne pouvait s’empêcher de se demander s’il s’agissait d’une épreuve de la déesse. Pourtant, Anür avait plus souvent réclamé les siens qu’elle ne leur avait accordé de sursis...

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