C'était une belle soirée étoilé, à une époque où le monde tournait encore normalement, sans cadavres putrides marchant en dehors du jardin d'Anür. Un homme d'un âge respectable rentrait chez lui après une longue journée de dur labeur. Il passait un portail, l'entrée d'une maison possédant une cour intérieure, un établissement de plaisir d'une qualité moyenne, mais suffisante pour qu'un noble comme lui s'y rende. N'ayant pas de femme et d'enfants, il n'y avait que le travail qui lui occupait ses journées et il fallait bien se détendre, pour défouler toute frustration accumulée. L'homme fut reçu convenablement, en tant que client régulier, paya une somme qu'il connaissait par cœur, avant de choisir la même fille, se rendant machinalement au devant de la porte de celle-ci. L'homme ouvrit la lourde porte en chêne lustrée et s'immobilisa net. Nulle présence d'une quelconque femme, pourtant la gérante lui avait assuré la disponibilité de la professionnelle qu'il prenait usuellement, il ne devait ainsi donc n'y avoir personne d'autre qu'elle, alors qui était cet homme assit sereinement sur un siège dans cette chambre ?
L'intrus en question était un homme, son âge était celui d'un homme suffisamment vieux pour être expérimenté, mais toujours assez jeune pour avoir une vigueur au-delà des vieux de la vieille. Il était difficile de juger de sa taille, alors qu'il était tranquillement posé sur une chaise, mais sa taille devait être des plus moyennes. Cheveux bruns, de même que son bouc, le reste de son visage était doté d'un certain charme, mais la situation lui donnait un air sombre et des yeux de loup, mais c'était sûrement dû à son équipement de voleur, une combinaison de cuir noir et à l'arbalète des plus simplement posée sur une petite table.
-
Bonsoir, très cher Baron De Landerth, sergent de la milice de notre très belle cité de Marbrume ! Commença avec douceur Reyar Valthar.
-
Que ?! ... Essaya de répliquer le baron.
-
Ô par les Trois ! Je vous en conjure, réfléchissez avant d'hurler quelconque alerte. Entre de possible miliciens dans la rue et vous, il y a une porte, ainsi qu'un escalier. Alors qu'entre mon carreau d'arbalète vireton et votre torse, il n'y a qu'un mécanisme d'arrêt dont le système de déverrouillement est judicieusement à porté de mes doigts...Le baron resta silencieux, un choix judicieux dans de telles circonstances, ainsi Reyar allait pouvoir continuer sa petite conversation sans désagrément, ce qui le mit de meilleure humeur, lui qui venait de passer plusieurs jours à attendre sa cible dans cette établissement. Établissement qui faisait partie de la zone d'influence du
Cercle, c'est ce qui lui permettait d'être présent dans cette chambre sans que les gardes de la maison close viennent lui démontrer leur art dans l'incrustation de tête sur le pavé.
-
Voyez vous... Dans la vie, l'argent fait des miracles ! Une bonne utilisation de la corruption est digne des louanges de Rikni. Tout le problème est là justement, votre supérieur reçoit régulièrement de belles bourses remplies de pièces sonnantes et trébuchantes, cela fait un temps qu'il a apprit à détourner le regard de vils actions se passant sous son domaine de contrôle milicienne. Mais voilà-t-il pas qu'un de ses subordonné décide de jouer les preux parmi les braves ! À cause de votre descente de miliciens, j'ai perdu deux membres faisant parti de mon groupe, et je parle pas des trois autres qui sont des hommes de main d'un rival avec qui on trouvait un accord... Mais ça, c'était avant, le résultat de votre stupidité à fait rejaillir notre manque de contrôle sur notre territoire. Le blâme étant pour nous, nous sommes au bord du conflit ouvert entre nos deux groupes, et si cela venait à se produire... Reyar ne continua pas sa phrase, il se contenta de frapper violemment l'accoudoir de son siège.
Alors c'est simple cher Baron, si vous ne voulez pas découvrit la joie d'être le dernier représentant de votre lignée, pour ensuite connaître l'immense joie de rencontrer Anür, vous allez me sortir mes gars et les trois autres de leur trou à rats d'où vous les avez fourré !! Qu'importe la méthode...Reyar empoigna son arbalète et tira. Le carreau vola à travers la pièce avec son sifflement caractéristique. Le baron sursauta malgré lui quand le projectile s'enfonça dans la bordure de la porte, à moins d'un mètre de son visage. Reyar ramena à lui son arbalète, remettant en place le système d'armement dit de pied de biche et remit en tension son arme. S'étant équipé d'une arbalète de faible puissance, cela ne lui prit guère de temps. Même moins puissante, la vélocité du carreau à moins de trente mètres était toujours mortel. Reyar passa calmement à côté du baron et avant de partir comme il était venu, il ne pu s'empêcher d'une dernière phrase, presque murmurée à l'oreille du pauvre homme.
-
Que les riches n'oublient pas.---
Reyar Valthar flânait dans les rues de sa ville d'origine, une cité dans le sud, une région où le soleil était maître même en hiver. Le jeune voleur d'à peine une quinzaine d'années était encore en apprentissage dans une bande des bas-fonds, mais il démontrait déjà un agréable talent pour charmer les serrures, ainsi que grimper en haut des toits. En dehors de ses petites escapades dans des maisons de gens qu'il ne connaissait pas, Reyar passait une part non négligeable de son temps à chercher occupation en ville, vadrouillant et remuant les ombres des petites ruelles à la recherche de quelques coupeurs-de-bourses, parfois monteurs-sur-toit, mais plus souvent de cogneurs faisant partie d'une des bandes qui étaient ancrées dans la société de la ville. Chaque aspirant d'une bande des bas-fonds avait tendance à chercher querelle avec les gamins des autres bandes, des combats aux poings bien loin des préoccupations plus terre à terre des voleurs adultes, qui étaient plutôt enclins à la discussion autour d'une table, ou au pire, à l'élaboration d'un second sourire dans une ruelle sombre.
Reyar arriva devant une ancienne bâtisse, entretenue non sans mal, mais toujours debout. Il connaissait le vieil homme qui s'y trouvait, un des rares chef de bande à avoir atteint un âge respectable, ce qui démontrait son intelligence, mais pour Reyar, sa faiblesse physique et le nombre réduits de ses voleurs, faisait de lui quelqu'un d'assurément insignifiant.
Reyar entra d'une manière nonchalante et des plus sûrs de lui, la porte n'était même pas verrouillée. Le jeune voleur ne voulait que tirer quelques piécettes au vieux croulant. Il chercha dans la pièce principale en vain, personne. En temps normal, le vieil homme était toujours présent dans son salon, cet imprévu irrita le jeune voleur. Il allait prestement débuté un petit saccage sur les meubles pour se défouler, avant qu'un mouvement attire son attention. Une jeune fille passa par la porte du fond, elle avait l'air d'avoir qu'une quinzaine d'années, mais ne possédant pas suffisamment de forme pour intéresser le jeune dévoyé qu'il était. Reyar posa sa main sur la garde de sa dague en se tournant vers elle, comme pour essayer d’insuffler une forme de menace à son encontre, avant de lui demander où se trouvait le vieil homme. Mais avant qu'il en ait eu le temps, la jeune fille s'avança doucement vers lui, sans aucune forme d'hostilité, un sourire des plus innocents aux lèvres. Interloqué, il la laissa faire, et à deux pas de lui, elle fit ce qu'il resta pour lui une des plus importante leçon de vie. Un éclair blanc, une stupeur de mort, d'un seul coup, elle zébra l'air de sa main, accompagné d'un éclat métallique. Elle frappa son cou d'une manière précise et fulgurante, la mort était venue avec un sourire trompeur. Reyar s'effondra au sol, mais ne ressentit même pas la douleur de la chute, ses yeux se fermèrent, il ne pouvait le croire. Comment pouvait-il mourir d'une telle manière ?
Pourtant, ce ne fut pas la mort qui apposa son voile noir sur lui, mais un simple sceau d'eau. Reyar reprit conscience dans un soubresaut des plus limités, il remarqua très vite qu'il arrivait à peine à bouger. Même si à l'époque, il était un peu bête, il comprit rapidement que l'arme qui l'avait frappé avait été empoisonnée. Reyar fut saisit d'effroi, il était cloué au sol, avec une jeune fille à ses côtés, toujours souriante, qui le fixait intensément. De l'autre côté, la vieille crapule était à présent là. Il approcha le jeune idiot en boitant, en rigolant doucement. Le vieil homme se pencha sur Reyar et lui arracha une longue aiguille du cou, sans aucune douceur.
-
Ah... Mon jeune Reyar, sais-tu que si je n'avais pas pour connaissance et ami ton maître, tu ne serais plus de ce monde ? Tu aurais déjà rejoins Anür dans son domaine ! Déclama avec tranquillité le vieil homme.
Je vais te faire grâce de ta vie, mon jeune inconscient. Et pour la peine, je vais te donner une leçon de vie. Ton maître ne t'a donc pas appris que la force n'était pas grand chose ? Ta jeunesse et ta force, sont venus avec leurs amis, arrogance et imprudence. Alors voilà pour toi : Si tu veux survivre en ce monde, ouvre un peu ton esprit étriqué sur lui-même, nous vivons dans un monde où une simple enfant au sourire charmeur peut vaincre un homme en arme... enfin, si on peut te considérer comme tel.Après cela, le vieil homme s'en alla, accompagné de la jeune fille. Reyar resta là, étendu sur le plancher de bois, pendant plusieurs heures. Petit à petit, il commença à pouvoir bouger ses doigts, puis le reste de son corps suivit. Mais ce fut les trois heures les plus longues de sa vie. Pendant un long moment, il n'avait d'autre chose à faire qu'une réflexion sur lui-même. Un simple événement dans sa vie modifia radicalement sa vision du monde. Il fini par comprendre que la
force qui était montrée n'était pas importante, qu'une aussi petite bande que celle du vieil homme pouvait être la plus redoutable, simplement parce qu'elle savait se dissimuler et exerçait des activités particulières, même dans le milieu des bas-fonds. Ainsi, le jeune Reyar devint enfin un homme à part entière, son esprit n'ayant pas évolué comme son corps et ses compétences.
---
Razarh Halard siégeait autour d'une table austère, autour de lui se trouvait chaque chef des différents groupes composant le
Cercle, cet amalgame de voleurs qui s'étaient unis il y a plus d'une dizaine d'année déjà. Razarh en était à la tête, lui qui avait fondé cette alliance par le sang d'abord, puis par persuasion. Septante voleurs composaient le
Cercle, dispersés dans six groupes. C'était pourquoi dans cette entrepôt du port, où se tenait cette nouvelle réunion, il s'y trouvait six chaises au pourtour de la table. Ce qui dénotait dans la situation présente, était que l'un des sièges était vide. Quand Razarh prit la parole, son acte créa une vive tension, jamais au sein du
Cercle, une réunion avait eu lieu sans la présence complète des différents groupes.
Razarh se leva pour la forme, ainsi que pour calmer la tension ambiante, chose facile avec ses deux mètres de haut. Razarh avait un aura particulier, qui s'étendait au-delà de son physique imposant. Son intelligence s'exprimait avec facilité de par ses manières et son parlé. Avec un crâne rasé et des épaules larges, sa musculature avait tendance à faire entendre raison à ses interlocuteurs quand ses paroles n'y arrivaient pas.
-
Mes amis, voilà bien des années que notre collaboration est effective. Et l'emprise qu'on étend chaque jour un peu plus sur Marbrume démontre son efficacité ! Cela fait plus de dix ans que le Cercle existe, plusieurs groupes nous on rejoins au cours de cette épopée ! Mais... Il semblerait que nous vivions une crise sans précédent. La Taverne du Chien Galeux, repère de Reyar et sa bande, à été incendié durant la nuit. Razarh s'arrêta un moment, avant de poser ses deux poings sur la table, se penchant un peu plus en avant.
Et il semblerait que cet acte ait été volontaire, et sans nul doute avec l'objectif d'éliminer notre plus grande force de frappe. Vous savez que je ne suis pas du genre à m'étendre en lamentation, et quand bien même la perte qui nous touche, il nous faut avancer dans nos projets. C'est pourquoi je vous présente un nouveau chef que j'ai réussi à convaincre de rejoindre notre association.Un homme sortit de l'ombre qui le dissimulait, protégé des regards par des caisses de stock de l'entrepôt. Il s'approcha doucement, la pénombre de l'entrepôt empêcha les voleurs de voir son arbalète qu'il avait en main, les bougies n'éclairant que bien peu en dehors du périmètre de la table. La curiosité qui se lisait sur les visages durs des chefs voleurs, qui n'éprouvaient que peu de peine à la suite de la perte d'un des leurs, se mua en consternation et surprise. N'était-ce donc pas la Reyar Valthar ? Razarh lui ne détourna pas ses yeux perçants des quatre autres chefs voleurs une seule seconde. Parmi tout ses visages, l'un d'entre eux exprima plus qu'il n'aurait dû, il montra une peur des plus profonde. Reyar arma son arbalète à l'épaule, la braquant sur l'anomalie du groupe. L’arbalétrier ne prit qu'une simple confirmation de la part de Razarh en un coup d’œil de biais, avant d'appuyer sur la gâchette de son arme, lâchant son carreau en plein torse du chef paria, le renversant littéralement de son siège.
-
Que les voleurs prospèrent. Déclama Reyar, avant de prendre place à la droite de Razarh, sans rien laisser paraître.
Razarh avait une intelligence hors du commune pour un simple homme du peuple, c'était lui qui avait prévu ce piège pour démasquer avec facilité le traître, celui qui avait tenté d'assassiner le bras droit de l'organisation. Heureusement, la prudence naturelle de Reyar, qui avait largement fait courir le bruit que la Taverne du Chien Galeux était sa planque, lui avait sauvé la vie. Reyar, après avoir découvert les ruines de la taverne au bon matin, avait décidé de disparaître pendant une journée, tout en informant le chef du
Cercle. Si Razarh était la tête pensante de l'organisation, Reyar quand à lui, était avec ses hommes, ses bras armées. Dans le passé, Reyar après une carrière infructueuse de petit voleur, s'était engagé en tant que mercenaire. Il avait fini par tomber dans une bande d'arbalétriers, gageant leurs services. Cela durant plusieurs années, servant avant tout dans des sièges, plus qu'en rase campagne, où l'utilité militaire des arbalètes étaient moindre que celles des arcs. Cette aventure dura jusqu'au jour où un siège tourna mal. Reyar se retrouva derrière des murs pendant plusieurs mois, ayant de moins en moins de nourriture et d'eau. C'est à cette époque que Reyar connu la faim, la soif, la maladie et la peur des tunnels de contre-sape, où le châtelain força des arbalétriers à y aller de front, pour ne pas perdre des hommes à lui. Cela réveilla ses anciennes haine des gens de pouvoir, qu'ils soient nobles ou bourgeois.
Après la perte de la moitié des leurs, les mercenaires arbalétriers eurent la chance de connaître la fin du blocus du siège, sauvé par des renforts. Reyar prit quelques uns de ses amis encore en vie, et les entraîna avec lui. Il réussi à les convaincre de la futilité de mourir pour des nobles et pour une solde misérable. C'était il y a plus de cinq ans, un de ses gars étant originaire de Marbrume, Reyar décida de le suivre, jugeant que c'était un bon lieu de départ pour une nouvelle vie, une vie de voleur, usant de leur expérience à la guerre pour se faire une place de choix dans les bas-fonds, arbalètes à la main. Ce fut par la suite qu'il rencontra Razarh, intégra son organisation et fini rapidement, par ses habiles compétences, à devenir son bras droit et homme de confiance.
-
Bon... Maintenant que ce petit problème est résolu, nous pouvons passer à la suite. Dit Razarh, un sourire carnassier sur les lèvres.
Accueil
Sujet: Reyar Valthar 
