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 Tout ça pour des prunes | Alaïs & Gauvin

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MessageSujet: Tout ça pour des prunes | Alaïs & Gauvin   Tout ça pour des prunes | Alaïs & Gauvin EmptyVen 2 Aoû 2019 - 11:35
Un souffle d'effort, un raclement du bois sur le bois avant d'entendre le bruit du roulement intermittent d'un tonneau. Dans la pénombre du chai, Gauvin Lucquet était en train d'évaluer le poids du tonneau et le chemin qu'il lui restait à faire jusqu'à la charrette de son acheteur. Pas mécontent d'avoir réussi à vendre une aussi belle quantité d'alcool de prune, qui irait certainement remplir la cave d'un riche marchand ou d'un nobliaux, le rouquin faisait rouler par à-coup son chargement afin d'éviter d'endommager les autres barriques.

Il se gratta un peu la joue, en souvenir de la mandale que son père lui avait mis le jour où il avait percé un fut par accident. Le fils y repensait aujourd'hui par nostalgie, mais à l'époque ça avait suffit à le faire partir de la distillerie pour quelques jours. Il y était revenu, comme à chaque fois, comme si on avait lancé un sort sur lui et ce lieu, les empêchant de se quitter vraiment.

"Fils, il va pas attendre toute la journée dans ce cagnard !"

Le sortant de sa rêverie, la voix rauque et peu utilisée de son père le ramena à lui. Finissant sa tâche, le tonneau contre un petit sac de pièces, les deux hommes regardèrent ensuite le chargement partir avec le domestique qui avait servi d'intermédiaire. Cet instant suspendu ne dura que quelques secondes, c'est tout ce qu'ils pouvaient se permettre comme répit ses temps-ci.

"Va me chercher une barrique moyenne. Je vais relancer le petit alambic."

Et le fils s'exécuta sans un regard, partant à la recherche d'une barrique vide encore en état d'accueillir le précieux liquide. C'était toujours le même rituel, un emplacement vide devait être immédiatement rempli d'une nouvelle eau-de-vie. Non pas que la demande était là, mais s'ils ne le faisaient pas, alors leur stock de fruits et plantes allaient dépérir. Mieux valait conserver autant d'alcool et aussi peu de fruits fermentés que possible, car l'étape d'après c'est la pourriture et une perte pour Lucquet.

Trouvant son bonheur, le bonhomme fit avancer le tonneau jusqu'au pied de l'alambic alors que son père était en train d'attiser les flammes du foyer, son regard fixé sur les braises. Depuis combien de temps le père et le fils n'avaient pas échangé un tel regard ? Le rituel était toujours le même, c'était lui qui connaissait les plantes qu'ils avaient en stock.

"On devrait faire les prunes de juin, elles doivent être à point."

Un hochement de tête, la concentration tournée vers le feu. Gauvin savait qu'il n'obtiendrait rien de plus de son père. Le vieil homme était comme animé par une volonté extérieure depuis des mois, comme soutenu par des fils invisibles qui lui permettait de continuer à faire ce qu'il avait toujours fait sans avoir à réfléchir ou à s'émouvoir. Gauvin s'en rendait bien compte, il avait encore ses deux parents, mais étaient-ils encore là ?

Le rouquin n'avait pas vraiment le temps de s’appesantir dans la mélancolie. Lui aussi parfois, les fils lui commandait d'avancer. Alors, il retraversa la cour arrière longeant la façade réchauffée par ce soleil d'après-midi, l'astre faisant jouer les reflets dans les cheveux du distillateur, donnant l'impression d'un feu en mouvement qui se dirigeait vers la large double porte de l'entrepôt.

Il savait déjà où aller chercher les prunes les plus mures dans un premier temps, cette ancienne écurie présentant encore des box bien distincts. Son arrière-arrière grand-père, dans un souci d'économie et de garder l'âme du lieu, avait conserver peu ou prou tout ce qui faisait l'identité d'une écurie. Sauf que les quatre chevaux qui pouvaient être accueilli avaient été remplacés par des caisses de bois ou des sacs en vrac pour chaque saison.

C'était l'une des pièces préféré du jeune Gauvin à l'époque, les odeurs entêtantes des fruits en fermentation ou en train de sécher lui avaient permis de développer sa capacité à reconnaitre les plantes et également à deviner les arômes des alcools qui sortiraient des alambics. La saison vers laquelle il allait n'était pas sa préférée, trop marquée et puissante écrasant la subtilité des autres. Alors qu'à l'automne...

Arrivé à proximité de la porte d’Été, le rouquin se figea, le sang glacé. Il avait entendu un bruit et la porte était entrouverte.

La moiteur de cette journée ne cessait pas, la sueur mêlant l'effort de la journée, la chaleur passée du soleil et la peur instinctive du moment se mélangeait sous sa chemise en lin. Il n'arrivait pas à ce souvenir s'il avait fermé la porte hier soir. Foutu automatisme des tâches habituelles. Fermer le loquet, passer la barre de métal dans l'anneau, fermer la double porte de l'écurie.

La barre était bien là, au sol. Avançant alors que sa nuque était couverte de chair de poule, que ces sens étaient en alerte. Le grand roux attrapa la barre, s'en saisissant telle une matraque. Il posa lentement sa main sur le loquet, immobile ne sachant pas s'il devait faire ça lentement ou, au contraire, que ses précautions allaient lui coûter s'il y avait un intrus de quelque sorte dans cette pièce.

Gauvin se saisit du loquet et dans un grand fracas ouvrit la porte en faisant un pas de côté pour voir en premier la personne ou la chose qui sortirait de ce box. La main blanchit tellement il serrait fort sa matraque de fortune.

"SORTEZ DE LÀ! MAINTENANT!"

Son regard était fou, il l'était peut-être. La paranoïa arrivait maintenant bien plus vite que le bon sens chez le rouquin. Mais qui n'en aurait pas fait autant après avoir tant perdu à cause du Fléau ?
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Alaïs MarlotVoleuse
Alaïs Marlot



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MessageSujet: Re: Tout ça pour des prunes | Alaïs & Gauvin   Tout ça pour des prunes | Alaïs & Gauvin EmptyDim 4 Aoû 2019 - 15:20
Bon sang qu’il faisait chaud. Alaïs s’éventait comme elle pouvait de sa main en trainant ses guêtres sur les pavés de Marbrume, et guignait d’un oeil alangui par la touffeur ambiante une opportunité de subsister. Elle avait espéré tirer quelques miettes d’un marché quelconque plus au nord du Goulot, s’extrayant de la masse grouillante et suante des Bas Fonds. Mais les heures passant, elle traînait seulement de la patte et s’était arrêtée près d’une fontaine pour se rafraîchir un peu au milieu des oiseaux. L’eau y avait un goût saumâtre des plus douteux et elle préféra s’arrêter avant de tomber malade. Elle aurait bien voulu se rendre utile, ramener quelque chose à grapiller à la troupe des Macchabées. Elle avait même fait quelques tours sur une place, mais les passants l’avaient tout bonnement ignorée, tête basse pour se réfugier à l’ombre d’un porche ou dans leur masure branlante.

Soit. Il faudrait trouver autre chose. Alaïs se remit en marche en rasant les murs pour espérer capter un peu d’ombre, puis déboucha naturellement sur Bourg Levant, sans même s’en aperçevoir. Ici les rues étaient plus larges, un peu mieux entretenues, on voyait même quelques pots de fleurs aux fenêtres des maisons, luxe étonnant en ces temps de disette. Qui avait donc encore le temps de s’occuper de la décoration quand la plupart crevait de faim dans les caniveaux ? Alaïs s’arrêta néanmoins pour en humer le parfum, instant de grâce fugace, avant de tourner à un nouvel angle. Même les chats se planquaient à cette heure.

Puis son nez flaira quelque chose. C’était léger, comme un parfum de sucre, un peu éthéré, et cela lui tordit aussitôt les entrailles, lui rappelant qu’elle avait toujours faim. Qu’est ce que c’était que ça ? Intriguée, elle poursuivit sa route avant de s’apercevoir que cette douce odeur provenait de vapeurs provenant d’une vaste maisonnée et qui s’échappait par des fenêtres entrouvertes. S’approchant comme une ombre elle longea un porche obscur encore ouvert, et distingua des silhouettes dans une cour. Des hommes discutaient autour d’un chariot, roulant quelques tonneaux prêts à être chargés sous ce soleil de plomb. Une distillerie. C’était donc ça.

Alaïs marqua un temps d’arrêt, ses sens en alerte, sa cervelle pleine de malice de nouveau à plein régime, motivée par les contorsions de son estomac. Une distillerie ne pouvait dire qu’une chose : des réserves de fruits en pagaille, gardés pour la fermentation. Elle ne connaissait que trop bien le procédé, en bonne petite paysanne du Labret. Elle repéra non loin une grange ou une sorte d’écurie dont une porte restait entrebâillée. Elle s’y faufila sans plus réfléchir. C’était risqué mais les hommes semblaient occupés à charger leur charrette et à voir l’effort qu’ils devaient fournir pour rouler les lourds tonneaux, elle disposait bien de quelques minutes avant de filer avec son maigre larcin. Ils ne se rendraient compte de rien, et du reste, un peu de fruits en moins ne leur manquerait pas, n’est ce pas ?

Elle pensait déjà avec gourmandise au jus des fruits coulant dans sa gorge en feu, et au plaisir qu’elle lirait dans les yeux de ses amis du Goulot quand elle leur ramènerait cette manne providentielle. Il fallait saisir les occasions quand elles se présentaient et c’est ce qu’elle fit. Cette porte entrouverte était une invitation impossible à refuser et elle fut saisie par la fraîcheur ambiante une fois à l’intérieur, dans l’ombre d’anciens boxes réaménagées en grenier à fruits. Elle se coula jusqu’à l’un d’eux, et se laissa enivrer par les parfums de sucre, qui lui montaient à la tête autant qu’un bon verre de vin. Elle plongea ses mains dans une caisse et découvrit des prunes qui semblaient tout à fait juteuses et mûres à souhait. Elle se mordit la lèvre et finit par en manger une, puis deux, puis trois, recrachant les noyaux comme autant de petits cailloux insignifiants.

C’était diablement bon. Elle s’y oublia un instant, ou peut être un peu plus, avant de se morigéner. Pas le moment de se laisser aller, Alaïs, ni d’oublier pourquoi tu es là ! Elle tira un petit sac de toile qu’elle gardait sur elle et qui lui servait d’escarcelle, et commença à remplir sa besace de fortune aussi vite qu’elle pouvait. Pas assez vite sûrement. Soudain, elle entendit un bruit.

Des pas. Le raclement lourd d’une planche, et un souffle profond. Oh oh. Alaïs se tendit, l’angoisse lui poissant les paumes, figée un instant par la peur d’être découverte. Nulle issue si ce n’est la porte de la réserve. Elle ne s’en tirerait jamais comme ça. Elle se planqua donc derrière la lourde caisse, oubliant de respirer, parfaitement immobile. Si le visiteur n’y regardait pas de trop près, il ne la verrait peut être pas ? Il ne lui resterait plus qu’à espérer ne pas se faire enfermer à l’intérieur ou à attendre une occasion propice pour sortir. Mais les pas se rapprochaient inexorablement, et le nez à l’affût de son adversaire semblait la flairer aussi sûrement qu’un chien pisteur.

"SORTEZ DE LÀ ! MAINTENANT !"

Alaïs sursauta au timbre de la voix forte et bourrue qui l’interpellait brutalement. Une voix d’homme puissante. Nul doute qu’il la trouverait. Il suffirait de l’attraper par le col derrière cette fichue caisse qui demeurait le seul endroit où se cacher. Elle réfléchit à toute allure. Si elle sortait maintenant, elle aurait peut être une chance de partir par là même où elle était venue. A en croire la grosse voix, l’individu devait être massif, surtout s’il s’agissait de l’un des hommes qu’elle avait aperçus dans la cour. Il lui suffirait de passer sous son bras avec un peu d’agilité et de courir le plus vite possible pour lui échapper avant qu’il ne puisse l’arrêter. Une opération risquée, mais pas impossible. Elle était difficile à rattraper sur le plan de la vitesse pure. Elle inspira profondément, tous ses muscles prêts à agir, gonflés d’adrénaline.

C’est ainsi qu’elle sortit donc, lentement d’abord, par l'entrebâillement de la porte pour éviter de se faire assommer. Elle distingua en contre-jour les contours d’un homme massif dont la crinière de feu lui rappelait la forme d’un lion dont la mine féroce ne présageait rien de bon. Et dans sa main une lourde planche, de celle qui devait habituellement servir à fermer la réserve et qu’il avait oublié à ses dépends la veille et qu’il brandissait maintenant comme une massue, prête à l’écraser comme la mouche qu’elle était. Elle n’attendit pas une seconde de plus, et fit une roulade souple en avant, passant sous la barrière de chair et de bois pour échapper au sort qui l’attendait et se rua vers la sortie, avec l’énergie du désespoir.

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MessageSujet: Re: Tout ça pour des prunes | Alaïs & Gauvin   Tout ça pour des prunes | Alaïs & Gauvin EmptySam 28 Sep 2019 - 3:24
Ainsi la blondinette s'élança-t-elle, avec toute l'énergie du désespoir. La petite proie, piégée, tentait le tout pour le tout, dans une roulade désespérée pour fuir le piège dans lequel elle s'était si admirablement fourrée. Elle s'élança, en tenant son sac d'une main, vers la sortie. Bras en avant, elle se réceptionna en souplesse sur le sol pour rouler sur le sol et tenter d'échapper à la barrière qui la séparait de la liberté.

Jet de dé :

Ainsi passa-t-elle avec l'agilité d'un chat, pile entre les jambes de Gauvin qui ne comprit pas de suite ce qui se passait. S'attendait-il à voir surgir quelqu'un de derrière la porte du box? Oui et non. Pas comme ça, en tout cas. Il misait plutôt sur un voleur prêt à en découdre, paré à l'affronter. Gauvin n'en était pas à sa première bagarre et pensait pouvoir avoir raison de l'intrus... mais il ne s'attendait pas à ce que l'intrus esquive l'affrontement pour se carapater de la sorte. La suprise mêlée à la tension qui habitait maintenant son corps l'avaient, un instant seulement, figé sur place. Mais déjà, le frôlement de l'intrus qu'il avait surpris contre ses jambes le ramena à la réalité. Il fallait agir, l'arrêter, le neutraliser. Gauvin se retourna vivement, et, se servant de son élan, fit décrire à la planche un arc de cercle qui vint s'abattre sur la pauvrette, laquelle avait à peine eut le temps de se remettre sur ses pieds.

Jet de dé:

Emportée par son propre élan, Alaïs, désormais debout, avait déjà amorcé sa course vers la porte, tenant son sac fermement. Pas question de le laisser derrière elle. La planche se fracassa contre le sol poussiéreux sans même la frôler. Trop lent, l'artisan poussa un grognement qui se transforma en un cri, qui résonna dans tout le bâtiment, alors qu'il regardait la blondinette se ruer vers la double porte de l'écurie.

- ALEEEEEEERTE! INTRUUUUUS!

Il devait se lancer à la poursuite du voleur. Plus robuste, plus pesant, il courrait bien moins vite que la garce qui venait de lui dérober des fruits. Pourtant il devait tenter le coup. Si son père arrivait, ils pourraient peut-être la coincer quelque part. Le plan était clair, mais réalistement irréalisable. Que ferait donc un vieillard contre cette petite silhouette qui se faufilait déjà par la porte avec l'agilité d'un chat traquant une souris. Et que ferait-il, lui, Gauvin Lucquet, s'il continuait de rester planté là, sa planche contre le sol, ses jointures blanchies à force de la serrer dans ses mains?

Gauvin secoua la tête, souleva la planche et partit à la suite d'Alaïs, en hurlant.

- PÈRE! UN VOLEUR AUX ÉCURIES!

Jet de dé :

Alaïs courait, en sachant exactement où elle allait. En passant la porte, elle bifurqua à gauche pour longer le bâtiment et s'éloigner de l'autre homme qu'elle avait aperçu plus tôt. Il n'était d'ailleurs pas en vue, une chance! Elle profita de l'ombre pour filer droit vers la rue, à pas légers, et se fondre dans la foule des badauds, tenant contre elle le précieux petit sac de prunes, son trésor, son butin du jour, sa promesse d'une belle fin de journée. Là, elle reprit une attitude et une allure normale, malgré son coeur qui galopait encore dans sa poitrine, pour éviter qu'on la remarque. Elle tourna au premier coin de rue et poursuivit son chemin, se retournant de temps à autres pour vérifier qu'elle n'était pas suivie.

A la Distillerie des Lucquet, le père et le fils constataient le vol. Certes, il n'était pas d'une importance folle, quelques prunes ce n'était rien, mais tout de même, il avait le mérite de les obliger à reconsidérer les mesures de sécurité prises pour conserver les fruits hors de portée des voleurs. Dès le lendemain, elles seraient renforcées et, pendant de longs mois, plusieurs voleurs essayeraient, en vain, de réitérer l'exploit de la jeune Marlot, la voleuse de prunes dont Gauvin ne connaîtrait finalement ni le nom, ni le visage.
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