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 L'écume des mots

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Darius VortigernPirate - Capitaine
Darius Vortigern



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MessageSujet: Re: L'écume des mots   L'écume des mots - Page 2 EmptySam 4 Jan 2020 - 18:30
Eeeet c'est reparti. La jeune femme, toute insultée, se met à lui expliquer ce qu'elle doit faire en tant que noble. Elle a raison, il peine à comprendre, surtout que tout ce qu'elle lui dit relève pour lui de simples choix. Elle ne doit pas faire. Elle choisit de faire. Là est toute la nuance. Elle n'a pas choisi d'être aveugle, mais elle décide comment elle vit son handicap, décide de se conformer aux normes de son monde. Pour Darius, toutes ces histoires d'apparences et de bien paraître qu'elle lui raconte semblent insignifiantes. Les nobles évoluent vraiment dans leur propre petit monde...

« Une étiquette, ça s'enlève. Il faut juste être prêt à subir les conséquences. Gardez la vôtre si vous voulez, ça change rien à ma vie. »

Darius se contente de cette réponse. Qu'elle fasse ce qu'elle veule, qu'elle soit malheureuse comme les pierres parce que la société lui impose d'être comme elle est, si ça lui chante. Une chose est certaine : lorsque leurs chemins vont se séparer, lui, il sera libre, et elle, elle retournera volontairement dans sa cage dorée.

Eeeet elle reprend. Le pirate n'est même pas certain qu'elle a écouté sa réponse. Il la laisse râler. Il roule les yeux. Elle est gentille, apparemment. Quand elle lui dit qu'il devrait être content de côtoyer une comtesse, il éclate tout bonnement de rire. Bon sang, que pense-t-elle? Qu'elle est plus importante que lui parce qu'elle est affublée d'un titre? Il n'a pas vérifié, mais aux dernières nouvelles, quand ils vont aux latrines, c'est la même chose qui sort chez elle comme chez lui. Par Rikni, que c'est drôle. Il ne prend même pas la peine de dire quoi que ce soit. Il la laisse s'énerver et s'enfoncer dans ses illusions, l'insulter à l'envi. Quand elle a fini de lui faire son caca nerveux, il lui parle de ses passe-temps, en rajoute une couche. Cette fois, il est allé trop loin. Elle se lève, tente de lui balancer un morceau de pain qui va s'échouer misérablement contre la tête du lit. Elle ne renonce toutefois pas à abattre sur lui sa colère vengeresse et lui lance ensuite un oreiller qui, cette fois, l'atteint.

Darius n'en peut plus et explose de rire. La noble continue de l'insulter copieusement, mais tout sonne comme de mignons petits reproches à ses oreilles habituées aux jurons de marins. Elle lui donne même des ordres! Ah, petite comtesse de Brisevent...

La jeune femme finit par se calmer, même si son visage est encore cramoisi. Elle semble un peu gênée de son éclat et c'est probablement pourquoi elle prend quand même la peine de répondre à la question qu'il lui a posée. De son côté, il laisse son hilarité s'atténuer. Il sait qu'elle le prend certainement pour un énergumène, mais elle ne donne pas sa place. C'est un drôle de bout de femme, capable de hurler au scandale une seconde et de se montrer timide et presque triste celle d'après. Et d'avoir l'estomac qui gronde pendant tout ça.

« Vous voyez, on a un point en commun : je sais pas lire non plus. Pas pour les mêmes raisons, mais quand même. J'aimerais bien aussi. Surtout pour des raisons pratiques. Pour le divertissement... C'est pas vraiment nécessaire. Au fond, les histoires qu'on trouve dans les livres, ce sont celles qu'on raconte à voix haute, mais sur papier. C'est probablement un peu différent, mais une histoire reste une histoire, peu importe comment elle est relatée. »

Darius s'étire un peu en regardant cette noble prude au caractère de merde.

« J'espère que le mari qu'on vous trouvera pour vous aura de l'expérience avec les tempêtes, en tout cas, parce que vous pouvez être un vraie tornade quand vous vous y mettez. J'espère aussi pour lui qu'il sera plus poli que moi et qu'il sera capable de se sentir honteux, contrairement à moi. »

Darius ricane. Soudain, sans prévenir, il prend l'oreille sur laquelle il est appuyé et la lance en direction de la comtesse. Il fait mouche et celle-ci reçoit le tout dans le dos.

« Œil pour œil, dent pour dent, Comtesse », dit-il d'un ton moqueur.

Il reprend un peu son sérieux et, comme pour atténuer la furie qui risque de se réveiller, demande :

« Ce serait quoi, votre vie idéale? Vous avez pas l'air de vouloir grand-chose de ce que vous avez, alors je suis curieux. Si vous me donnez une réponse honnête, je vais peut-être même redescendre chercher quelque chose pour faire cesser les grondement incessants et indécents de votre estomac. »
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Eve de BriseventComtesse
Eve de Brisevent



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MessageSujet: Re: L'écume des mots   L'écume des mots - Page 2 EmptySam 11 Jan 2020 - 1:56
Eve se demandait bien ce qui rendait cet homme aussi énervant. Était-ce ses rires incessants, ce petit ton prétentieux qui le suivait dans toute ses phrases ? En tout cas, il était doué le bougre. Il avait un don pour la faire enrager avec une facilité déconcertante. L'aveugle commence à se demander ce qu'elle faisait ici, coincé avec cet inconnu désagréable. Elle se doute que ses vêtements n'ont pas eu le temps de sécher, mais y gagne t'elle quelque chose à rester parlementer avec lui ? Il s'en fichait d'elle, il venait même de lui dire plus ou moins clairement. Elle pourrait très bien se fondre dans le silence qu'ils n’avanceraient à rien l'un et l'autre. Leurs visions des choses étaient tout bonnement trop différentes. Leur parcours aussi. Avait-il seulement quelque chose en commun ? Il semblait avoir une vie de pauvre, une éducation inexistante et se fiche de tout ce qui l'entourait. A contrario, la blonde en plus d'avoir eu une vie luxueuse, ne dépendait que de son éducation et de l'image qui peut découler d'elle. Aucun membre de la noblesse ne ressemblait un tant soit peu à cet énergumène.

La comtesse réfléchit. Peut-être n'était-elle juste pas assez compréhensive du peuple. Trop baigné dans son monde et devenu imperméable à tous ceux qui sont différents des sangs bleus. C'était un triste constat pour elle, qui n'avait pas vocation à être méchante. Seulement, son enfance l'avait tellement moulé et forgé à cette vision du monde qu'elle n'arrivait plus bien à distinguer le bien du mal. Et si c'était eux, les aristocrates, les méchants ? Et si cet inconnu avait raison, et qu'il lui suffisait d'enlever cette étiquette comme une simple chemise ? Que rien ne la retenait d'être elle-même ? Serait-elle plus heureuse ainsi ? Arriverait-elle à vivre avec la même désinvolture que le pirate dont elle ignorait tout bonnement le métier à ce moment même ? Son ventre se serra, devant la multitude de doutes qui l'envahissait. Non, surement n'arriverait-elle pas à vivre comme Édouard.

Quand l'homme évoqua la lecture, elle rit. Surement n'avait-il jamais rencontré de bon conteur pour dire ça.


« La lecture est une des choses les plus merveilleuses. Vous pouvez voyager dans des mondes qui n'existent pas. Des mondes ou le mot Fange n'a pas lieu d'être. Vous pouvez même être quelqu'un d'autre. C'est une activité merveilleuse ! Je peux vous jurer qu’une histoire racontée à voix haute et une histoire que vous lisez n'a rien à voir, à moins d'avoir un excellent conteur ou un excellent barde. Vous pouvez bien plus facilement ressentir les émotions aux fils des pages. Un peu comme avec la musique d'ailleurs. C’est pour ça que j’aime m’y perdre souvent, au moins je sais à quoi ressemblent les émotions. »

Heureusement pour lui, leur conversation était devenue assez sérieuse pour qu’elle ne parte pas à nouveau dans les tours. Elle fit juste un mou énervé dans sa direction et croisa les bras.

« Je n’en veux pas, et je me débrouillerais pour ne pas en avoir ! Les hommes ne servent à rien à part nous donner des maux et se croire plus important. Et si c’est pour me retrouver avec quelqu’un dans le même style que vous, plutôt mourir ! Pour la politesse ce n’est clairement pas difficile de faire mieux que vous… Je crois que même les fangeux le sont un peu plus ! Et en pl… »

Mais avant de finir sa phrase, elle se prit un oreiller dans la tête. Un « Oh ! » toujours aussi outré lui vint sous la surprise et elle lui renvoya de manière plus douce dans le visage.

« Vous ne manquez vraiment pas de toupet ! Vous savez que si j’avais un de mes gardes avec moi, vous pourriez prendre des coups de fouet pour moins que ça ! Heureusement que je suis VRAIMENT sympa et que je ne dirais rien pour ne pas vous abimer, paysan. »

Elle lui lança un sourire moqueur avant de réfléchir un peu plus sérieusement à sa demande. Elle resta de longues secondes silencieuses.

« C’est bizarre à dire… mais je ne sais pas. Naturellement, je dirais que je voudrais récupérer la vue. Mais après quoi ? Ce n’est pas une vie complète, de juste voir. Et si je voyais, tout serait différent. Peut-être que j’aurais envie de liberté, que la noblesse ne me plairait plus. Mais alors quoi ? Je ne sais pas. Si je ne devais pas récupérer la vue, je n’ai même pas de vie idéale à rêver. Les femmes nobles, surtout les hauts rangs comme-moi, n’apprennent pas vraiment à rêvasser de ce qu’elles souhaitent. Je sais que ma vie est vouée à me marier à un homme aussi riche que moi et à enfanter. C’est tout. Je ne veux pas de mari, je ne veux pas d’enfant, aimer ne m’intéresse pas et ne me sera surement jamais permis. Mais la liberté ne me donne pas envie, parce que je sais que je ne pourrais quasiment rien faire. Du coup, honnêtement ? Je n’en sais rien. »


Eve baissa la tête, toujours perdue dans ses pensées. Elle ne ce n’était jamais posé cette question. A quoi les autres personnes pouvaient elles rêver au juste ? Fonder des familles ? Prendre plaisir dans leur métier ? Voyager ? Tout ceci ne lui parlait absolument pas. Son cœur se serra quelques instants, se demandant si elle était aussi vide que ses pupilles.

« Quelle est la chose la plus belle que vous ayez vu ? Ça peut paraitre stupide, mais j’aime quand les gens me décrivent ce qu’ils voient. Ça m’aide un peu à me faire une idée de ce qui m’entoure. D’ailleurs, je ne vous ai même pas demandé, vous ressemblez à quoi ? Je vous imagine bien avec une tête effrontée et un gros nez ! Un début de calvitie et un peu de ventre je dirais ! »

La blonde pouffa en l’imaginant de cette manière. A vrai dire, elle n’avait strictement aucune idée de ce à quoi il pouvait ressembler mais son assurance lui faisait penser que ce n’était pas le plus laid des hommes du port. Ou alors il se donnait du style face à une aveugle mais ressemblait à un affreux bonhomme. Elle rigola encore plus à cette idée mais n’en dit pas mot. Ce léger moment d’amusement lui fit oublier son estomac gargouillant de plus en plus violemment. Elle se prit le ventre sous la violence du monstre.

« Je ne dirait pas non à un bout de repas. Voulez-vous un peu d’argent ? J’ai quelques pièces dans ma robe au besoin. Je pense vous devoir bien ça pour m’avoir sauvé. Avez-vous trouvé une idée de ce que je pourrais vous offrir comme remerciement ? Je suis peut-être une tempête comme vous dîtes, mais je n’oublie pas mes promesses. Je vous dois la vie. »


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Darius VortigernPirate - Capitaine
Darius Vortigern



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MessageSujet: Re: L'écume des mots   L'écume des mots - Page 2 EmptySam 11 Jan 2020 - 17:49
« Oh, vous seriez surprise d'entendre les conteurs et les bardes du peuple. Ils sont doués. J'en ai même déjà vu réussir à tirer quelques larmes à des marins endurcis avec une histoire dramatique! »

Darius rit avec amusement en se rappelant ces hommes aux gros bras, ces mercenaires professionnels, ces pirates sanguinaires verser une larmichette après une histoire touchante ou une chanson émouvante. Certains artistes ont réellement un talent étonnant et savent, par leurs mots, leur voix ou leur musique, toucher même les cœurs de pierre.

Si une chose est claire, c'est que la comtesse ne veut pas d'un mari. Il rit un peu en l'écoutant. Les hommes, ça ne sert à rien pour elle. À rien sauf donner des maux aux femmes et se croire plus importants qu'elles. Et quand elle se remet à l'insulter, à dire qu'un Fangeux serait plus poli que lui, il décide de la faire taire en lui jetant un oreiller. Elle est évidemment outrée. Il est évidemment mort de rire.

« Oh oui, heureusement que vous êtes vraiment sympa, se moque-t-il. J'ai de la chance. »

La noble est malgré tout moqueuse et, même si elle ne peut pas le voir, un sourire moqueur flotte aussi sur les lèvres de Darius. La conversation redevient un peu plus sérieuse et la comtesse admet qu'elle ne sait pas trop quel genre de vie elle voudrait mener si elle était libre. Son rang ne lui donne pas l'occasion de rêvasser, selon elle. C'est dommage. Il semble pourtant à Darius qu'avec sa condition, elle aurait bien le temps de se perdre dans des vies imaginaires, même si elle ne pourrait jamais les vivre. Ça ne coûte rien et personne n'a accès à ses pensées. Elle pourrait au moins s'offrir ça. Mais bon, peut-être qu'elle ne veut pas se faire du mal non plus. Darius se contente de lui répondre d'un « Mh ». Ça veut dire je vois, je comprends. Pour une fois, il ne lui oppose pas de ricanement ou de paroles déplacées. Il peut être vraiment sympa, lui aussi. Par contre, quand elle lui demande à quoi il ressemble et décrit à peu près tout ce qu'il n'est pas, là, il se remet à rire. Et encore plus quand il entend les gargouillements intenses qui émanent du ventre de la noble.

« J'ai pas besoin de votre argent, je connais l'aubergiste. Ça ira. Quant à votre promesse, je l'ai pas oubliée. Je vais trouver quelque chose, vous en faites pas. Je cogite. »

Darius se redresse dans le lit, puis se lève. Il n'a pas encore répondu aux questions de la comtesse, mais il juge bon de régler le problème de l'estomac avant.

« Je reviens. »

Ses pas s'éloignent, la porte se referme derrière lui. Il revient moins de cinq minutes plus tard.

« Ça va être prêt dans une vingtaine de minutes », annonce-t-il.

Il s'assoit cette fois non loin de la noble sur le bord du lit et observe un instant ce drôle de bout de femme. Ils ont vraiment une dynamique étrange. Une seconde ils semblent prêts à se sauter à la gorge, l'autre, ils discutent de façon presque civilisée de sujets relativement sérieux. Ils ne seront jamais amis, ils se tolèrent par la force des choses, mais c'est déjà ça.

« Pour répondre à votre question... La plus belle chose que j'ai vue? C'est la mer. Pas ici, près de Marbrume, parce que c'est plutôt moche au final. Mais quand on s'éloigne, c'est beau. Elle peut être belle parce qu'elle est calme et paisible, parce qu'elle brille de mille feux sous les rayons du soleil, parce que le clapotis des vagues est apaisant. Paradoxalement, elle peut aussi être belle quand elle se déchaîne, quand elle est chaotique et dangereuse. Elle est alors belle parce qu'elle est libre et que personne, peu importe son titre, son nom ou son argent, n'a le pouvoir de la maîtriser. Elle fait ce qu'elle veut, épargne qui elle veut, emporte qui elle veut. Elle n'a pas de maître. Et elle est impressionnante, peu importe son humeur. Elle s'étend à perte de vue sans qu'on sache où elle finit, un peu comme le ciel. Elle est unique. »

Darius marque une pause, puis enchaîne sur la deuxième question posée par la noble :

« Pour ce qui est de ce à quoi je ressemble... Où est le plaisir si je vous le dis? »

Sans prévenir, il prend tranquillement la main de la jeune femme pour la porter à son visage à lui.

« Tentez de me voir à votre façon et de deviner, plutôt. »

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Eve de BriseventComtesse
Eve de Brisevent



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MessageSujet: Re: L'écume des mots   L'écume des mots - Page 2 EmptyLun 20 Jan 2020 - 17:45
Eve soupira d’aise en s’imaginant entendre un conteur capable de la transporter par ses paroles. Elle en rêverait. Hélas, elle savait aussi que les plus talentueux étaient souvent des inconnus du regard des nobles et que le seul moyen d'en trouver un était de traîner dans des lieux où ils de produisaient. Souvent dans des auberges et des bars ou la populace se regroupait. Des endroits où peu de nobles de bonne famille pouvaient trainer avec allégresse sans y risquer de bourses. Des perles inaccessibles. L’aveugle se résigna. Elle savait qu’elle serait vouée à écouter les mêmes rares domestiques capables de lire consciencieusement. Hélas sans fantaisie aucune dans leurs paroles. Heureusement qu’elle avait une imagination large et foisonnante. Malgré ça, la blonde ne pu s’empêcher de lâcher d’une voix rêveuse.

« J’aimerais bien entendre ça en effet… »

Mais la conversation vagua doucement vers la nourriture, non sans déplaire à la petite affamée. Elle l’entendit partir chercher le précieux et tant attendu repas et en profita pour se lever rapidement. Il refusait son argent, mais l’idée de lui devoir plus que ce qu’elle lui devait déjà l'horripilait. Elle lui paierait son repas qu’il le veuille ou non. Consciencieusement, essayant de ne pas penser à toute les crasses qu’elle sentait sous sa voûte plantaire en grimaçant, elle avança vers ses vêtements qu’elle avait étalé tant bien que mal sur le siège à côté duquel elle c’était déshabillé plus tôt. Une autre grimace se suivit quand elle entra en contact avec ses vêtements encore froid et humide. Ils n’avaient pas l’air décidé à sécher rapidement ! De des petites mains, elle tata le tissu jusqu’à trouver une poche bien discrète ou elle attrapa une bourse, cette fois ci de cuir. L'aveugle hésita. Tendit l’oreille. Pas un bruit. Elle attrapa son gros sac et fouilla dedans pour attraper sa lyre. Avec appréhension, elle l’a tâta dans tout les sens pour voir si l’humidité et le froid ne lui avait rien fait. Ouf, rien. Elle l'a pris et fit chemin inverse pour retourner sur son bout de lit. Guettant les bruits provenant du couloir, Eve profita de ce petit moment de solitude pour jouer une mélodie simple et reposante. Cela lui permettait de se calmer et réfléchir à cette situation totalement incongrue dans laquelle elle c’était fourré. Eve réfléchit bien évidemment à cet inconnu. Il n’était clairement pas méchant, ou du moins pas avec elle. Pour autant, elle n’avait pas vraiment confiance en lui et se méfiait. Elle ne l’appréciait pas particulièrement non plus. Trop immature, trop joueur. Elle avait l'impression d’être avec un enfant incapable à gérer, rigolant devant sa préceptrice qui le grondait tant bien que mal. Si Vavert ne s’était pas soudainement prit d’amitié pour lui, si elle n’avait pas glissé tel un phoque sur le ponton, sûrement ne se serait il jamais adressé la parole. Et peut être cela aurait été mieux pour eux deux.
Un bruit dans le couloir coupa court à ses pensées. La blonde s’empressa de cacher sa lyre sous sa cuisse, caché par cette robe bien trop grande et elle resta à attendre l'homme. Celui-ci revint et l'informa de l’arrivée des plats d’ici 5 minutes. Son ventre lui répondit à sa place, elle sourit, gêné. L'inconnu s'installa non loin d’elle, au bord du lit. Elle pinça les lèvres mais ne dit rien. La proximité avec quelqu’un qu’elle ne connaissait pas, qui plus est un homme, la mettait particulièrement mal a l’aise. Mais elle n’avait pas envie de se crêper à nouveau le chignon. Elle resta donc coite et écouta l'homme énoncer la plus belle chose qu’il connaissait. Un soupire d'envie lui échappa à nouveau devant telle description. Fille de Brisevent, la mer l’attirait le plus naturellement.

« Vous paraissez bien rustre parfois, mais vous savez décrire avec finesse une chose aussi merveilleuse que la mer. Vous êtes étonnant. Je vous envie en tout cas. La mer me fait beaucoup de bien, hormis quand je tombe dedans bien sûr. J’aimerais pouvoir naviguer dessus librement, je l’avoue. Je me contente de profiter de son air et du son de ses vagues, mais la sensation de naviguer par soi même dessus doit être merveilleuses. Qui sait, peut être que j’aurai finit pirate si j’avais la vue »

Elle rigola naturellement derrière cette phrase aux allures impossibles. Et pourtant, Eve ne savait pas qu’elle s’adressait à un véritable pirate, sûrement aurait elle moins rigolé en l’apprenant. Son rire cristallin s'arrêta net quand il lui attrapa les mains pour les poser sur son visage. Elle poussa un petit cri de souris et les retira aussitôt.

« Qu…Mais vous êtes fou ! C’est très personnel de toucher le visage des gens comme ça ! Je ne l’ai fait qu’à ma famille quand j’étais enfant ! »

Elle tiqua à sa propre phrase. En effet, elle n’avait pas touché le visage de personne depuis son enfance. Tant et si bien qu’elle n'avait aucune idée de ce à quoi ressemblait son entourage au jour d'aujourd’hui. Elle n’en avait jamais éprouvé le besoin, n'aimant particulièrement pas les contacts physiques de manière général. Les mains en suspend à quelques centimètres du visage de l’inconnu, elle hésita. Sa curiosité l’emportait. Elle rougit et, décontenancé, elle posa ses mains sur son visage un peu précipitamment, faisant un « Plof » un peu sec sur le visage de l’autre.

« Ah oh euh pardon ! Je vais essayer, mais je n’ai pas l'habitude alors désolée d’avance… »


Rouge comme une tomate, trouvant ce contact bien trop intime pour elle, l'aveugle donna d’abord des coups de mains un peu brusque sur le visage de Darius. La panique ne la faisait pas du tout analyser celui-ci et c’était presque une caricature d’aveugle cherchant quelque chose de manière gauche qui se déroulait dans la chambre de l’auberge. C’est donc après lui avoir pincé le nez, mit un doigt dans l’œil et un coup de griffe sur le front qu’elle retira à nouveau ses mains.

« Olala désolée je suis si peu habitué au contact des gens. Et je ne vous connais même pas, c’est vraiment étrange pour moi ! »


Eve inspira calmement. Elle se savait rouge de honte avec ses joues en feu. Elle devait faire des efforts. C’est donc plus doucement cette fois qu'elle posa ses mains sur le visage du pirate. Ses joues creusées piquaient. Visiblement le rasage de prêt n’était pas dans les cordes du monsieur. La comtesse pensa que ce n’était pas étonnant quand on voyait l'état de sa chambre. Elle atterri sur des pommettes hautes, trahissant un sourire amusé qui semblait accroché là sans cesse. Pour le coup elle était bien contente de ne pas le voir celui-là. Cela l'énerverait encore plus. Son nez n’était ni gros, ni petit. Il semblait uniforme et aquilin. Elle remonta petit à petit, arriva sur des yeux rieurs aux rides légèrement présentes. Des petites pattes d’oies. Ses membres finirent leur chemin sur le front large de son cobaye. Il était évidemment difficile pour la jeune femme de donner vraiment un visage sur un simple passage rapide comme celui-ci. Mais elle se doutait bien qu’il ne faisait pas parti des plus laids de Marbrume, loin de là. Cependant, le côté fier de la noble l’empêcherait de dire ce qu’elle pensait vraiment de lui. Alors qu’elle allait lui lancer une petite pique de son cru, son index frôla sa cicatrice au front et elle sursauta brusquement. Curieuse, son doigt remonta tout le long de la marque, le touchant à peine mais refusant de s'en éloigner, comme attiré. C’était la première fois qu’elle touchait une cicatrice de sa vie. Une telle marque sur la peau la fit frissonner d’horreur. Elle retira sa main, comme si elle venait de toucher quelque chose de brûlant.

« Comment vous vous êtes fait ça ? C'est horrible… vous avez dû avoir mal… sinon dans l'ensemble vous êtes…. A peu prêt symétrique ! C’est déjà au dessus de ce que j’imaginais, mais ça reste un peu quelconque. »

Elle sourit. Quoi de mieux que l’humour pour se détourner de la gêne.
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Darius VortigernPirate - Capitaine
Darius Vortigern



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MessageSujet: Re: L'écume des mots   L'écume des mots - Page 2 EmptyMer 22 Jan 2020 - 22:28
Qui sait, peut être que j’aurais fini pirate si j’avais la vue. La déclaration ne manque pas de tirer un sourire amusé à Darius. Elle, pirate? C'est une drôle d'image. Très drôle, même. Elle doit avoir une vision bien romancée de ce qu'est la vie de pirate ou même de simple marin. Même en essayant, il peine à l'imaginer parmi les voiles en pleine tempête, sur un bateau qui tangue parfois violemment au gré des vagues. Non, il est à peu près certain qu'une existence passée sur la mer n'est pas pour elle. Néanmoins, il peut comprendre son attrait pour la vaste étendue bleue – elle est, après tout, de Brisevent et, là-bas, tout ou presque tourne autour des trésors que la mer a à offrir. Enfin. Tournait.

« Je pensais pas que vous aviez l'âme criminelle », la taquine-t-il, non sans se dire qu'elle aurait probablement une réaction terrible si elle apprenait que lui-même était pirate.

Darius propose à la comtesse de découvrir par elle-même son apparence et lui prend une main pour la porter à son visage. Elle accueille la suggestion avec un cri de surprise. Elle n'a touché le visage de personne depuis qu'elle est enfant.

« Personne d'autre?... », laisse-t-il échapper, incrédule.

Darius des tonnes de choses sur le fait d'être aveugle, mais s'il y en a une dont il est certain, c'est qu'à sa place, il serait toujours en train de toucher à tout, visages compris. Comment fait-elle pour s'imaginer de quoi ses interlocuteurs ont l'air? Elle se contente de se fier aux descriptions qu'on lui donne? Impensable. On ne peut pas faire confiance aux gens à ce point.

La noble hésite. Elle finit par laisser sa curiosité prendre le dessus, visiblement, et par tendre les mains vers lui. Darius grimace vaguement quand elle lui tape le visage un peu sèchement. Elle est embarrassée, ce qui la rend terriblement maladroite et expéditive dans ses gestes. Elle lui pince le nez, tente de crever son œil et lui griffe le front. Il grommelle un peu. Pour la délicatesse, on repassera!

« Allez-y doucement et ça va beaucoup mieux se passer », dit-il en espérant que ses mots trouvent écho chez elle avant qu'il perde un œil de façon définitive.

La noble reprend. Cette fois, elle est beaucoup plus délicate dans son exploration et prend le temps de tracer chacun de ses traits. Il la laisse faire sans rien dire. Un sourire en coin étire ses lèvres lorsqu'elle touche sa balafre et sursaute. Comme quoi cette cicatrice surprend même les aveugles.

« Un peu quelconque? répète-t-il, une pointe d'amusement dans la voix.
De votre part, ça sonne presque comme un compliment. En fait, on dirait même que vous me trouvez diablement séduisant. »

Darius ricane, puis enchaîne :

« Et cette cicatrice... La vie en mer, c'est pas toujours de tout repos. Les pirates attaquent et laissent parfois des souvenirs de ce genre. »

C'est évidemment un mensonge éhonté. Enfin, presque éhonté. Techniquement, son cousin est un pirate, et c'est à lui qu'il doit sa balafre. Bon, ils avaient huit ans, mais ça compte quand même.

Darius regarde la comtesse un instant. Il regrette presque de l'avoir vue et de savoir à quoi elle ressemble, car il se demande quel genre de portrait on peut dessiner d'une personne en se contentant d'étudier ses traits de ses doigts. Si rien ne l'empêche de tenter l'exercice, il le juge plutôt inutile vu les circonstances – et elle ferait probablement une autre crise.

« Comment vous faites pour vous imaginer à quoi les gens ressemblent si vous touchez pas leur visage? demande-t-il. Vous leur faites assez confiance pour vous dire la vérité? Vous pensez pas qu'un de vos gentilshommes de la noblesse puisse profiter de la situation pour vous faire croire n'importe quoi? »

Quelques coups à la porte. Darius se lève et ouvre. Le fumet d'un ragoût emplit la pièce. Après avoir remercié l'aubergiste, Darius referme la porte.

« Attention, c'est chaud », dit-il en déposant tranquillement un bol entre les mains de la comtesse.

Le plat sent plutôt bon, mais il n'a certainement pas la qualité des repas des grandes auberges. Darius s'en fiche bien – il apprécie juste avoir un repas chaud et pas trop mauvais en généal. Après avoir repris place à côté de la noble, il commence à manger sans plus de cérémonie. Par Rikni que ça fait du bien!
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MessageSujet: Re: L'écume des mots   L'écume des mots - Page 2 Empty
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