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 Océan et tumultes[ft. Sydonnie]

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Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



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MessageSujet: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyJeu 26 Mar 2020 - 8:11
Les pavés défilaient sous les sabots du cheval. Bien plus vite qu’ils n’auraient dû, bien moins qu’elle l’aurait voulu. Elle avait déjà manqué percutée deux passants dans les rues grouillantes même en ce milieu de matinée. Pourtant elle devait contrôler chaque fibre de son corps pour ne pas talonner l’animal sous elle. Décidément elle avait un mal fou à gérer ses réactions quand cette stupide et captivante créature était le sujet de ses pensées. Deux jours à lui trouver les noms d’oiseaux les plus inventifs et percutant n’avaient finalement que peu aider à la faire patienter, ni même à taire ses inquiétudes. Deux jours qu’elle avait entendu la rumeur deux jours qu’elle tremblait dans ses robes même après s’être assurée trois fois de son état par ses contacts. Elle avait attendu aussi longtemps qu’il lui avait été humainement possible, enfin dans ses limites à elle au moins. Comme elle lui avait promis, elle avait essayé de respecter son espace personnel, de la laisser confier elle-même ses pensées sans chercher à les extirper par un jeu de manipulation ou de contrôle.
Résultat, quarante huit heures à se demander tout ce qui avait bien pu passer par la tête de cette milicienne si agaçante par la manière dont elle parvenait à l’intéresser malgré le quelque millier de mur qu’elle établissait entre elles.
Essayer d’être une bonne amie était franchement la chose la moins pratique de la terre.


Car malgré toute la colère et l’agacement qu’elle éprouvait, rien n’atteignait le niveau d’inquiétude qu’elle ressentait. Sa monture braqua dans un virage sous une pression de ses jambes et repartit presque aussi vite faisant voleter ses cheveux d’argent.
Était-ce la peine indicible que son corps exprimait l’autre jour qui l’avait poussée ? Sydonnie avait-elle découvert sa nature profonde, la bête en elle et voulue s’en débarrasser ? Ou la bête elle-même s’était-elle fatiguée de son hôte ? Elle n’en savait foutre rien ! Elle ne savait foutre rien de cette milicienne au regard froid, à part qu’elle s’inquiétait de sa santé. Et c’était pour cela qu’elle dévalait les rues comme une cavalière de la fin de temps. Enfin la petite caserne apparue à ses yeux, ses double battant grand ouvert. Des miliciens par petits groupes entrant et sortant. Elle ne décéléra qu’assez légèrement pour indiquait aux deux gardes à l’entrée que c’est bien vers eux qu’elle se dirigeait. L’un des deux un peu moins prompte à réagir du bondir sur le coté pour ne pas être percuter alors qu’elle s’engageait sous l’arche en baissant tête, arrivant dans la petite cour d’entrainement. Elle s’attira de nombreux regards surpris et inquiet alors que son cheval cabrait pour freiner au mieux. Elle n’en teint pas compte, le regard haut et lointain, comme si leur visage n’entrait pas même dans son champ de vision. Un bon moyen de crier son statut de noble important malgré sa tenue de monte très loin de ses robes extravagantes. Une chemise à jabot enserrée dans un gilet de cuir étroit et sombre, un pantalon fin collant à sa peau et de haute botte de daim lui montant aux genoux.
Elle serait arrivé avec un crieur public que son rang aurait été moins évident. Elle bondit à bas de sa monture et entreprit de l’attacher à un de barreaux. Attendant visiblement qu’on vienne lui demander ce qu’elle venait faire, comme si c’était naturel. Elle n’aimait pas vraiment ce rôle de la riche héritière à qui tout est dû, mais elle savait qu’on posait nettement moins de questions à une personne qu’on pouvait facilement caser dans une petite case bien définie. Les nobles étaient excentriques et égoïstes, s’il venait voir quelqu’un c’est qu’ils en avaient le droit. Les jolis préjugés de la société humaine.
Un homme assez massif, du moins comparé à sa petite corpulence se sacrifia pour le bien général et vint lui demander la raison de sa présence.

Comtesse de Valis, je viens voir la sergente de Rivefière. » Dit-elle d’une voix presque aimable. Le petit rictus qu’il eut à l’entente du nom de la sa supérieure déplut fortement à la noble. Il se gratta la tête comme pour se mettre à réfléchir. Elle ne lui laissa pas le temps de le faire, elle ne voulait pas perdre la prochaine heure à voir si c’était un exploit réalisable.

Maintenant ! » Ajouta-t-elle d’un ton beaucoup moins amical et patient. L’idée de se la mettre à dos, ou plutôt les ennuis qu’elle avait sans doute les moyens de lui provoquer, surtout si elle avait une bonne raison d’être là comme l’indiquait son attitude, finirent par le décider. Il hocha la tête. Elle tira un petit éventail de nacre replier de la selle de son cheval et le suivit. Elle sentit de nombreux regards peu courtois sur le bas de son corps moulé par le pantalon mais fit comme si de rien était. Les hommes pouvaient bavés devant un postérieur même caché sous trente bons centimètres d’épaisseurs de robe. Alors c’était comme la pluie, inutile de s’en offusquer, on ne peut rien y faire. Son guide et elle s’enfoncèrent dans les couloirs de la bâtisse jusqu’à une porte fermée que le milicien ouvrit après avoir hésité à toquer, comme si la personne à l’intérieur ne méritait pas qu’il se donne la peine.
Il le fit quand même. Une réaction intelligente pour qui savait que la concernée était, de son propre aveu, une spécialiste de la douleur infligée. Il n’empêche qu’elle apprécia encore moins l’énergumène. Il entrouvrit la porte pour l’annoncée. Elle était déjà à moitié penchée derrière le colosse.

Euh, sergente, y un d’me qui veut vous voir et… »

Ayant reconnue la silhouette derrière le bureau Irène se glissa devant lui dans la petite pièce en le coupant.

ça ira à partir d’ici, je vais me débrouiller, merci milicien. » Elle le repoussa en appuyant son éventail sur son torse et lui claqua la porte au nez avant de s’appuyer dos à celle-ci. Quelques instants plus tard elle l’entendit s’éloigner dans le couloir, les laissant seules.

Seule avec elle. Elle sentit la température de son corps grimper presque instantanément de quelques degrés en détaillant le visage en face d’elle et s’agaça de son incapacité à se contrôler comme à son habitude. Flore l’avait presque poussée à bout en lui retournant les émotions, Sydonnie la faisait sentir fébrile rien qu’en la fixant ainsi de son regard bleu acier. Elle s’ébroua comme pour se libérer d’un maléfice et vint s’asseoir sur une chaise de l’autre coté du bureau avec nettement moins de grâce et de maintient que son rang ne l’exigeait. Son regard se promena dans la pièce, très à l’image de celle qui y travaillait. A part l’absence de tableau, on retrouverait presque la même ambiance que dans sa maison qu’elle avait visité quelques jours plus tôt, peut être un peu moins de la sensation que l’endroit avait été retourné par une bande de pillards ivres. Ce souvenir la fit sourire et atténua ses craintes plus que toutes ses pensées des dernières quarante-huit heures.

J’ai ouïe dire tu étais si impatiente de m’emmener voir l’océan que tu n’avais même pas pris la peine de contourner la muraille pour aller tâter l’eau ? Tu aurais dû me prévenir, je t’aurais attendue en bas. Résultat on doit refaire la route ensemble. »

Elle avait cru comprendre par leurs échanges que Sydonnie n’avait rien contre un sarcasme ou deux, du moment que le sens caché était assez évident pour ne pas dissimuler la pensée de l’auteur. De la franchise mais pas sans esprit. Le concept pouvait être plaisant, s’il marchait. Elle manquait d’expérience pour le savoir, trop habituée aux couches dans les couches sous les couches des joutes dans la noblesse. Elle décrocha un petit porte rouleau de se ceinture et en déroula son contenu sur le petit bureau.

Un acte de vente de ta propriété, ainsi que les titres de marques en guise de paiement, au prix du marché. Pour la maison et l’atelier attenant. Je pense que le lieu a du potentiel et j’ai déjà une personne motivée pour relancer l’entreprise. J’ai aussi fait un premier tri dans tes affaires, le quotidien que je peux livrer à l’endroit de ton choix. » Elle regarda autour d’elle, dubitative sur le fait que la caserne était un bon choix, mais s’abstint de tout commentaire pour poursuivre. « Je me suis permise de prendre contact avec la famille Rivefière, pour l’accord de transaction, je me suis dit que tu ne voudrais peut-être pas t’en charger. En clair il ne te reste qu’à signer. Si c’est ce que tu veux… Pour ce qui est des choses plus… hum… sensibles dans tes possessions, je les ai fait livrer chez moi. Ne me regarde pas comme ça, je t’ai dit que je ferais des efforts pour ne plus te manipuler afin qu’on se voit, pas que je réussirais forcément du premier coup ! »

Elle sourit franchement avant de fixer son regard plus profondément dans celui de Sydonnie et demander…

ça va ? »

Parce qu’au fond, malgré son débit de phrase et de sujets, c’était tout ce qui lui importait à cet instant.


Dernière édition par Irène de Valis le Lun 1 Juin 2020 - 19:58, édité 2 fois
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Sydonnie de RivefièreSergente
Sydonnie de Rivefière



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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyJeu 26 Mar 2020 - 11:15


Deux jours seulement et la noiraude avait déjà la sensation qu’une éternité c’était écroulé entre le moment où elle avait sauté, que Henry Duchemin était venu la récupérer tel un noble chevalier sur son poisson en guise de monture. Deux jours qu’elle supportait les regards remplis de reproche, deux jours qu’elle ne cherchait pas à se justifier, estiment que cela ne regardait qu’elle et elle seule. La compassion n’était pas présente dans la milice, il y avait deux catégories de personnes : les forts et les faibles. Si elle avait jusque-là prouvé plus qu’il ne fallait qu’elle était dans la première catégorie, une seule et minuscule action l’avait fait chuter drastiquement jusque six pieds sous terre dans le rang des faibles. Regrettait-elle ? Difficile à dire, cette non réaction d’Anür la rendait nerveuse, voyant cet ultime affront comme une véritable preuve que les dieux l’avaient définitivement abandonné. La noiraude réalisait alors ce qu’elle savait le mieux faire : travailler. Rapport qui avait soudainement doublé en lecture, tâche particulièrement administratrice qu’elle détestait, la sanction était bien là, pas clairement prononcée, pas clairement jugée, mais présente. Certains sergents étaient venus s’enquérir de son bien-être, sans jamais rentrer dans les détails et par expérience la femme d’armes savait qu’il était inutile de prétendre avoir glissée ou toute autre foutaise.

Installée à son bureau, elle rédigé donc, sans se soucier du reste, essayant de moi, de toute manière avait-elle un chaperon ayant sauté des remparts qui était désormais persuadé qu’il avait un rôle à jouer la concernant. Pauvre homme, comprendrait-il un jour qu’il n’y avait plus rien à sauver ? Laissant un soupir fuir ses lèvres, elle avait comme bien souvent des douleurs dans son dos et sa cicatrice. Fermant les yeux elle essayait de balayer l’ensemble, regrettant sans doute un peu d’avoir une nouvelle fois échoué à quitter toute cette vie de déception, sans réellement l’admettre. Tenant sa plume, elle appliquait sa signature à chaque document lu entièrement, avec cette même rengaine, ce même soupir. Enfermée dans sa zone de sécurité que représentait son bureau, elle fuyait les autres, autant que les autres la fuyaient. Une honte pour la milice qu’elle avait entendu dire à son sujet d’un autre sergent, une perte de l’espoir, coupable d’avoir affecté le moral des troupes. Se pinçant les lèvres, la sergente essayée tant bien que mal d’ignorer tout ça, à quoi bon. Au moment même où elle aurait donné n’importe quoi pour rester ainsi cloîtrée la porte s’ouvrit pour lui annoncer une présence, présence qui se glissa rapidement à l’intérieur du bureau avant de refermer la porte au nez de son subalterne.


- « Irène… » son prénom lui avait échappé dans un souffle qu'elle n'avait pas maîtrisé, sans comprendre si cette découverte était positive, ou négative.

La noble n’était pas dans sa tenue habituelle, ce qui provoqua cette légère surprise dans l’esprit de la noiraude, sans la bouleverser pour autant, avait-elle eu l’occasion de comprendre que la comtesse avait de multitudes de facettes. Incapable de sourire, elle l’avait simplement suivi du regard dans le moindre de ses mouvements, appréhendant la raison de sa venue, tout en ayant cette sensation de savoir exactement pourquoi elle était là. Irène s’était installée face à elle, sur la chaise dans cette désinvolture non maîtrisée, dans cette manière de presque non-contrôle qui surprit une nouvelle fois la femme d’armes. Se pinçant les lèvres, elle s’était redressée elle-même sur sa chaise, réprimant une grimace de douleur. Clignant plusieurs fois des yeux, l’ensemble lui sembla presque surréaliste, alors que cette femme ayant hurlé vouloir être son amie venait à présent la rabrouer sans réellement le faire. Le tout teintée d’une sincérité qui ne semblait pas feinte, cette attention, aussi incompréhensible soit elle pour Sydonnie, lui tira cet étrange sourire qui devait laisser penser qu’elle se moquait d’Irène, alors qu’il n’en était rien.

Plus la noble parlait et plus la jeune femme souriait sans la quitter des yeux, elle aurait presque pu rire, tant l’ensemble lui semblait improbable, tant les mots utilisés en demi-mesure étaient si justes et si… surprenants. Silencieuse, la noiraude ne prononçait pas le moindre mot, l’avisant, suivant le mouvement de ses lèvres, l’expression de son regard, sa manière de se mouvoir lorsqu’elle s’exprimait avec, elle en avait presque la certitude cette inquiétude. Finalement, l’ensemble aurait pu s’arrêter là, à cette fin de phrase, cette histoire de route à refaire. Cela lui aurait parfaitement convenu, mais Irène ramena l’histoire de la vente et la jeune femme dut admettre ne pas s’être attendue à ce que ça arrive si vite, trop vite. Son cœur s’était arrêté dans sa poitrine, alors que son visage se parait de cette froide inhumaine, carapace qu’elle avait l’habitude d’user sans même s’en apercevoir. Voulait-elle réellement abandonner la demeure familiale, l’atelier ? N’était-ce pas un nouveau caprice ? Elle n’en savait plus rien. Pourtant, elle récupéra l’ensemble, trempa la plume dans l’encre pour y apposer sa précieuse autorisation. Sydonnie n’était plus dans le cœur des Trois, elle n’avait de ce fait plus aucune raison d’essayer de retrouver un passé agréable, un présent supportable ou un avenir probable. Autant recommencer ailleurs, peut-être dans une vieille bicoque au port, qu’il faudra retaper entièrement, peut-être. La sergente n’avait toujours pas prononcé le moindre mot, abandonnant son attention d’Irène pour venir lire les documents, survolés tout du moins, avant de repousser l’ensemble du bout des doigts.

Elle était convaincue, sa mère hurlerait dans sa tombe si elle avait eu l’occasion d’en avoir une, si elle n’avait pas été brûlée pour éviter tout risque. Roland aussi se serait sans doute emporter de la voir ainsi se détacher de sa famille, de leur famille, mais qu’est-ce que son souvenir avait bien comme autorité désormais, alors que lui avait agis comme le plus gros des lâches ? Un soupir avait fui ses lèvres, alors que la fameuse question qu’elle redoutait venait de tomber. Ça va. Elle aurait pu lui répondre de cette manière tout aussi désinvolte que son amorce de la conversation, mentir en prétendant que tout allait parfaitement bien, alors que tous ici –et peut-être plus encore- savaient que la Sergente Sydonnie de Rivefière avait sauté des remparts dans l’espoir de se donner la mort. Alors, elle se contenta de ne pas répondre, pour déjà, ne pas se prendre la colère de la noble qui devait –elle en était convaincue- s’animer en son for intérieur, et d’autres pars pour s’éviter le supplice de ne pas savoir quoi véritablement répondre à cette question.


- « Merci » se contenta-t-elle de dire « Pour » elle hésita un instant « Ta présence, la maison et les affaires… Je n’ai pas d’endroit pour l’instant, j’irais peut-être à la chope sucrée, ou je vais rester ici le temps qu’un mort ayant une bâtisse se pointe pour pouvoir acheter la maison. » c’était très réaliste « Je pense que je vais m’installer au port, loin de la caserne des rues agréables, des gens qui ont tendance à viser plus haut que leur cul. » Conclut-elle dans cette presque vulgarité qu’elle avait de temps à autre.

Elle s’était redressée, récupérant un étrange récipient contenant cette mixture malodorante qui la soulageait au niveau de son dos, la faisant rouler jusqu’à devant Irène, avant de faire sa chemise pour pivoter. Dévoilant simplement les dégâts de griffe de fangeux, comme si la créature l’avait enlacé pour charcuter la moindre parcelle de sa peau. Toujours pas véritablement beau, toujours pas réellement refermé, l’ensemble avait de quoi alerter le clergé, mais la noiraude n’en faisait pas toute une histoire, elle attendait, comme bien souvent que l’ensemble passe et puis… Flore lui avait offert un moyen de se soulager, n’était-ce pas le plus important après tout.

- « Tu peux ? » questionna-t-elle alors que déjà elle était dos à elle, la moitié du corps dévêtu.

La noiraude avait pris cette inspiration, comme pour se préparer au contact de doigt sur sa peau, mais aussi à cette pluie de question que devait instaurer son comportement, ce manque de réponses à des questions parfaitement compréhensible. N’en était-elle simplement pas capable, incapable de communiquer, de sortir de sa réserve, d’exprimer les moindres maux avec des mots. C’était comme un récipient dont le couvercle était parfaitement scellé, qui finirait par exploser tant le contenu devenait trop gros pour le contenant. Et puis, tout ça n’avait pas vraiment de sens pour elle, repousser encore et encore les autres lui prenaient trop d’énergie, en cet instant, préféra-t-elle laisser une chance à celle qui pour une raison qu’elle n’identifiait toujours pas avait décidé de faire partie de sa vie.

- « Si tu veux… » souffle-t-elle « Après ça, je t’emmène à la plage, madame la comtesse. »

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Irène de ValisComtesse & Modératrice
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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyJeu 26 Mar 2020 - 18:54
D’une certaine façon, la réaction de la milicienne était plus positive que ce qu’elle avait espéré. Avec ses gros sabots elle avait pensé réussir à lui extirper un mensonge de convenance sur son état. Mensonge du quel elle aurait pu retirer une ou deux bribes de vérité en lisant son comportement, ses temps, son regard. Non, au final la noiraude avait simplement choisi d’éviter la question, ce qui venant d’elle ressemblait presque à un aveu de son état. Non ça n’allait pas, et elle n’avait pas envie de dire l’inverse. Pas à elle du moins. La comtesse en tira un certain orgueil comme si elle était passée du statut de l’inconnue lointaine et repoussée, à l’inconnue lointaine et supportée. Un point très positif n’est-il pas ?
Elle se contenta donc d’hocher la tête en signe de compréhension, sans insister. A partir de là, viendrait peut-être le moment ou Sydonnie aurait besoin de se confier à une inconnue lointaine. Elle aurait pu se faire à cette avancée dans leurs relations, et y penser pour la dizaine de jours à venir afin de comprendre ce qui venait d’arriver. Mais le tout fut bien vite balayé par le comportement soudain de la femme au regard bleu acier. La comtesse intercepta le pot par pur réflexe alors que son regard était totalement rivé sur le corps qui se dévoilait à elle. Si elle avait très souvent imaginé cet instant, elle fut surprise d’en ressentir l’impact, et plus encore qu’il n’arrive réellement. Malgré les marques anciennes, celles récentes et visiblement douloureuses, les épaules presque carrées dû à des années de combat, ce dos restait d’un parfait érotisme pour ses yeux. Comme un aventurier découvrant les ruines encore magnifiques d’un temple antique.
Elle avait très envie de le parcourir. Mais elle parvint à prendre une certaine distance avec ses propres émotions. Sydonnie lui demandait de l’aide, lui accordait un accès à ses blessures, aussi physique que mentales. Un accès temporaire, mais un accès tout de même. Il était temps d’être un peu à la hauteur de ses aspirations. Alors elle avala sa salive, et malgré ses joues rosies elle se contenta d’un :

Bien entendu. » presque assuré.

Elle se leva et entraina sa chaise avec elle pour se placer juste à coté de Sydonnie afin qu’elle n’ait pas à se contorsionner sur sa chaise, tirant sur des blessures déjà pas très belles à voir bien qu’en voie de guérison selon elle. Elle ouvrit le pot, et cela lui rappela quelque peu le produit que Flore lui avait confié pour chassait les douleurs de feu son mari.
Décidément les signes s’accumulaient. Elle se demanda quels étaient les échanges qu’elles avaient pu avoir alors qu’elle plongeait ses doigts dans la mixture avant de l’étaler avec précaution et douceur le long des plaies en pleines cicatrisations. Elle analysa les blessures comme elle en avait pris l’habitude en aidant au temple.

Trop d’honneur que tu me fais sergente ! Mais je prends volontiers. » Elle fronça les sourcils malgré le sourire qui étirait ses lèvres à leur échange. « ça guérit, trop doucement puisque tu le traites ainsi, mais ça guérit. Je pense cependant que tu devrais envisager de me laisser recoudre le haut de la plus longue estafilade, ou de trouver quelqu’un pour le faire. Si tu laisses ton muscle se distendre sous une cicatrice aussi large, tu risques de finir par avoir du mal à lever le bras au-dessus de ta tête. C’est un “peut-être“ pas une promesse, juste un avis de ma courte expérience sur les blessés de la fange. »

Elle finit d’appliquer généreusement le baume.

Et voilà ! Comme neuve ! » Plaisanta-t-elle. Elle aida la milicienne à enfiler avec précaution sa chemise en se retenant de ne pas jeter un coup d’œil alors qu’elle se penchait sur elle. C’était terrible de se sentir tant le besoin de la découvrir.

Je sais que tu n’es pas très à l’aise sur l’esplanade, mais si tu as besoin d’un lieu ou dormir, juste histoire de t’éloigner d’ici et en attendant de trouver la perle rare à l’odeur de poisson dans le port, je devrais pouvoir te trouver un petit coin où mettre une paillasse dans mon humble demeure. Pas d’obligation, juste une proposition. Tu n’en auras peut-être pas l’utilité, mais peut-être qu’un moment.... Qui sait je pourrais même laisser trainer la clé de ma cave à vin ! Si cela te va, je vais faire livrer toutes tes affaires chez moi hormis quelque tenue de rechanges. Malgré la bonne réputation de la chope sucrée ou de la caserne, je me sentirais plus tranquille si tu choisis toi-même ce que tu laisses sur place. Je te ferais une liste de tout ce que j’ai préparé. Ça te convient ? »

Sydonnie finit de reboutonner sa chemise alors qu’Irène s’essuyer les doigts sur un chiffon qui devait servir à essuyer son épée ou une chose du genre vu son état. Lui laissant volontairement le temps de le faire à son rythme. Vu son état c’était déjà un miracle qu’elle ne soit pas allongée en permanence, alors elle essaierait de la soulager sans pour autant la traiter en infirme. Juste assez pour que la noiraude puisse prendre le temps de faire ses gestes sans se presser.

Alors jolie guerrière , où est ma plage de sable blanc et mon océan infini ? » demanda-t-elle en posant ses mains sur ses hanches et gonflant les joues comme une enfant boudeuse à qui on aurait promis un gouter qui tardait à venir
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Sydonnie de RivefièreSergente
Sydonnie de Rivefière



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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyJeu 26 Mar 2020 - 20:44


La gêne, le principe de protéger son corps, de ne pas le dévoiler à quiconque, la noiraude ne le connaît plus. Elle avait déjà une relation particulièrement avec son corps : femme milicienne, se retrouvant au milieu d’une horde d’hommes sans possibilité de se couvrir, de se dissimuler à leurs yeux, devoir se changer entouré de regard, devoir se débarbouiller entouré de regard, devoir se faire soigner entouré de regard, vraiment, la noiraude a dû très rapidement mettre de côté sa pudeur. Davantage lorsqu’après sa perdition dans sa relation avec Chris, elle avait eu une aventure avec un prêtre, davantage encore quand elle avait senti son cœur se serrer en retrouvant Serena puis définitivement lorsqu’après l’événement de la fange, l’entièreté du temple –elle exagéré un peu- avait dû venir regarder sa plaie, son corps malmené et cette femme qui n’avait pas su conserver la vie en son intérieur. Pourtant, dans les conditions plus intimes, la jeune femme n’osait jamais regarder les autres, ni masculins, ni forcément féminins. Néanmoins, ici c’était différent, elle répondait à une proposition d’Irène passée d’observer sa blessure. Se relevant dans cette grimace sincère, elle avait fini par déboutonner sa chemise pour la laissé glisser le long de son dos pour se retrouver sur le sol, dévoilant cette plaie qu’elle-même n’avait jamais vue. Le peu qu’elle imaginé devait être bien pire que la réalité, tant les surprises dans les mots, les signes de dégoûts, de crainte, de ceux l’ayant vu avaient été nombreux.

Irène pour autant n’avait pas lâché de soupir, ni de « oh », ni de mouvement de recul, c’était presque différent. Tournant légèrement la tête pour lui offrir un regard, essayé tout du moins, elle avait fini par fermer les yeux, contractant les muscles de cette manière involontaire alors qu’elle sentait les doigts parcourir sa peau, étalant cette mixture qu’elle appréciait autant qu’elle détestait par l’odeur, par ce qu’elle représentait elle aussi. La comtesse avait fini par faire son rapport, son analyse de cette plaie prenant l’ensemble de son dos, proposant de recoudre une partie. Trop de personnes différentes avaient donnés leurs avis, trop d’individus s’étaient mis à essayer, pour autant, elle ne se voyait pas lui dire non. Non pas par respect, ou une quelconque bienveillance, mais plus parce qu’elle aurait apprécié croire qu’Irène la soulagerait où les autres –hormis Flore- avait la plupart du temps échoué. Néanmoins, elle ne répondit pas positivement ni négativement se contentant de laisser échapper un « mh » incertain qui promettait d’y songer, de prendre le temps de la réflexion.


- « Si tu préfères ne pas toucher, je peux l’entendre, j’ai bien compris que c’était hideux » fit une sergente complètement détachée de la réalité « Si ça s’améliore, ça tient déjà du miracle visiblement » souffla-t-elle presque amusée « Les Trois ont de drôle de manière de se manifester, doivent-ils sincèrement s’amuser avec moi. »

Cette dernière phrase lui a échappé, sans qu’elle ne trouve le moyen de la retenir, le silence qui suit indique la gêne de celle qui commence à s’ouvrir tout en se fermant à la fois. Cette colère qui la ronge est toujours présente, l’ensemble de ses doutes également, elle aurait pu en vouloir à Henry, il n’en n’est rien, regrette-t-elle, culpabilise-t-elle de l’avoir fait prendre des risques pour elle, pour elle qui n’en valait sans doute pas la peine. Un déchet, c’est cette propre vision qu’elle maintenait de sa propre personne. Celle que les Trois ne désiraient plus, mais qui maintenaient tout de même en vie, sans doute pour ses compétences, celle qui n’avait pas été en mesure de trouver meilleure à faire que d’aimer un banni, de lui permettre de rentrer dans la cité, d’envisager de fuir avec lui, avant qu’il ne décide de l’abandonner de la plus violente des manières. N’avait-elle rien trouvé de mieux que de se réfugier dans l’alcool, dans les aventures, chaque fois qu’elle avait eu le malheur de s’attacher, avait-elle fini abandonnée ou déçue. Enfin, avait-elle échoué dans la satisfaction qu’une femme était censée offrir à son mari, pas su maintenir la vie en elle. Ses les doigts d’Irène sur sa peau, l’aidant à remettre sa chemise qui l’avait ramené à la réalité, alors qu’elle lui offrait ce simple regard pour la remercier. Comme neuve. Cela pourrait presque la faire rire.

- « Neuve bonne à jeter ou neuve bonne à encore se battre avant de chuter ? » questionna-t-elle cependant avec cette voix plus fermée.

La chemise est ouverte encore, elle pivote simplement pour la refermer avec cette lenteur, alors la noble s’essuie les mains sur le tissu qui lui sert normalement à astiquer son arme. Plus la noiraude l’avise, plus l’incompréhension est forte, que peut bien faire cette femme-là, pourquoi semble-t-elle s’inquiéter si fort au point de la soulager en lui badigeonne la substance. L’ensemble des mouvements de la sergente s’immobilise, alors qu’Irène vient de lui proposer de s’installer chez elle, l’idée même de passer la porte de l’esplanade une nouvelle fois est déplaisante. Aussi, une nouvelle fois, Sydonnie opine, reprend ses mouvements un léger « mh » s’échappe de ses lèvres, une nouvelle promesse d’y songer, alors que l’une comme l’autre doivent bien avoir conscience que pour l’heure, cela ne sera sans doute pas envisageable.

- « Je suis presque déçue que tu n’es pas envisagé de m’apporter une bouteille ce jour. » fit-elle simplement en fermant la dernière ouverture «Le reste me convient, mais. Je suis certaine que même dans une demeure empestant le poisson vous ne pourrez pas vous empêcher de venir me rendre visite, comtesse. Qui sait, peut-être apprendrez-vous-même à préférer ma maison en ruine que votre magnifique demeure qui resplendie sous l’application de votre domestique. »

La noiraude la contourne par la suite pour récupérer ses dagues, ses lames, par habitude, mais aussi par sécurité, on ne décide pas de sortir comme ça, sans prendre de précaution. Il y a bien un petit temps à se déplacer à cheval, longer les faubourgs, traverser l’ensemble pour enfin arriver à la plage. Dans cet humour qui pourrait paraître dérangeant, elle ajoute :

- « Tu préfères sauter des remparts ou passer par le chemin long ? » elle s’arrête dans ses gestes, cherche à provoquer, ou observer une réaction sur son visage « Qu’as-tu fais durant les derniers jours ? » l’interrogea-t-elle avant de lui montrer d’un bref signe de tête la porte.

Elle abandonne son bureau, sous les regards jugeurs de ceux non loin, les regards lourds de sens, mélange de crainte, de colère, d’inquiétude aussi parfois et de révolte sans doute. Si habituellement elle répondait par ce même regard provocateur, cette fois-ci, elle n’en faisait rien, détournant simplement les yeux pour descendre les escaliers et retrouver une monture qu’elle ne reconnaît pas et qu’elle suppose être celle d’Irène, dans ce réflexe, elle pique gentiment la comtesse :

- « Tu peux aussi utiliser tes pieds tu sais, pour venir jusqu’ici » parce que si comme elle le pense elle est venue dans un élan important de révolte, c’était évident que cela allait parler davantage « Tu veux prendre une monture ou deux ? »

La question avait été faite alors qu’elle se tenait devant l’animal, songeant simplement à la meilleure solution. C’est la voix masculine d’un autre sergent qui la fit se décider :

- « Rivefière, on peut savoir où vous allez en charmante compagnie ? »
- « J’accompagne la comtesse à sa demande à un rendez-vous extérieur » mentit-elle consciente que la vérité n’aurait pas été favorable à son départ.

Le sergent avait dû jauger la comtesse, puis la noiraude avant d’opiner.

- « Bien, pas de gestes déplaisants mh, vous en avez suffisamment fait les derniers jours. Une monture devrait suffire, madame à la chance d’avoir sa propre monture. »

Silencieuse, la jeune femme opine simplement, garde ses pensées pour elle. Elle prend les devants, monte sur l’animal avant de tendre la main à la comtesse. Puis dirige l’ensemble pour guider le petit groupe jusqu’aux portes de la ville sous le regard jugeur de l’ensemble des miliciens présents. Le duo, presque trio passe les portes de la ville, la sergente laisse l’animal sans pour autant s’autoriser un galop, dans les faubourgs, cela ne serait pas raisonnable. Son regard ne peut s’empêcher de surveiller l’environnement, ralentissant par instinct, ce n’était pas si simple de retourner là ou Henry l’avait sortie de l’eau. Prenant une légère inspiration, elle s’autorisa à tenter la conversation.

- « Quels sont vos projets Irène ? »

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Irène de Valis



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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyJeu 26 Mar 2020 - 21:55
Neuve bonne à me fréquenter disons ! Si tu veux que je m’en occupe je le ferais. Il n’y a rien d’hideux à une blessure qui veut guérir. » Dit-elle en la regardant se lever. « Attention, je pourrais presque y voir une invitation, et on devrait se trouver une maison avec deux chambres, ou avec un très grand lit, je bouge beaucoup quand je dors. Et promis je me ferais pardonner pour cet oubli de bouteille ! » Ajouta-t-elle en lui tirant le bout de la langue.

Un geste dont l’audace spontanée la surpris elle-même. C’était tellement loin de ses propres habitudes comportementales. Le paraître, encore et toujours, et voilà qu’elle tirait la langue à quelqu’un. Heureusement Sydonnie la tira de sa réflexion avec une reprise de sa pique rendue encore plus noire par le fait qu’elle était prononcée par celle qui avait sauté. Elle prit un instant pour y songer alors que la milicienne s’armait. D’une certaine façon cette façon très naturelle de se préparer au pire la rendait plus séduisante.
La comtesse claqua des doigts comme si elle avait une soudaine illumination.

Ma paire d’ailes ! Je savais bien que j’avais oublié quelque chose ! Satanée mémoire, on va devoir faire le tour. »

Elle lui sourit et se plia à son ordre gestuel en se dirigeant vers la porte. Visiblement elle passait des sortes de test, dont elle ignorait la nature. Sydonnie la couvait du coin de l’œil, l’analysant comme si elle avait été un champ de bataille étendu devant ses yeux. Elle ne comprenait pas vraiment les règles, parce qu’elle-même ne savait pas vraiment qu’elle partie elle jouait. Elle voulait passer du temps avec elle, et quelque chose chez elle lui permettait de mettre moins de forme, moins de subtilités, moins de masque que d’habitude.
Elle pouvait être plus directe, plus méchante même, pas devoir cacher son amertume et son ironie presque insultante vis-à-vis du monde. Elle passait tellement de temps à aider les autres, ou à manipuler pour leur perte, qu’elle en avait oublié d’être simplement elle-même par moment. Était ce ce qu’elle était Sydonnie ? Elle-même ? Cette possibilité ne manquait pas d’intérêt.

Et bien je regarde principalement une jeune femme voler le cœur du capitaine de ma garde ces derniers jours. Elle sait le faire avec talent, mais c’est une personne plutôt sympathique, sans doute bien meilleure que nous ne le serons jamais. Alors je ne lui en veux pas trop. A vrai dire, je suis à peu près certaine que c’est elle qui t’a fourni cet onguent. Une raison de plus pour l’apprécier. »

Le trajet jusqu’à la cour se fit sous les regards nombreux, plein de ce qu’elle avait vu chez son guide à l’aller. La rumeur. La rumeur et la bêtise humaine. Elle se demanda s’il lui faudrait beaucoup de ressource pour préparer l’incendie de cette caserne avec ces gens dedans. Elle aurait juste à faire sortir Sydonnie un soir, quelques barriques d’huile, et une torche…
Non ce n’était pas le meilleur moyen de gagner l’amitié de la noiraude que se contentait de faire le dos rond et d’encaisser à cet instant. Non ce n’était pas une bonne idée. Quoique…
Heureusement cela ne la prive pas de sa répartie, et même dans cette situation elle trouve le moyen de lui détourner l’esprit et de lui arracher un sourire taquin.

J’ai bien plus d’allure les cheveux au vent ! »

La proposition de se retrouver contre elle sur le même cheval faillit bien lui faire remonter le rouge aux joues mais un lourdaud se donna la mauvaise peine de venir interrompre l’instant histoire de bien faire comprendre à sa compagne qu’elle était surveillée et pas oubliée. Si Sydonnie se contenta d’encaisser la remarque, la comtesse n’y parvint pas. Une erreur sans aucun doute, elle devrait s’en excuser auprès de l’intéressée.

J’en suis fort contrite sieur. Je pensais vraiment que vous aviez toute une écurie à votre disposition. »

Elle fronça le nez pour lui indiquer que son odeur corporelle n’était pas étrangère à cette conclusion, puis saisit la main tendue de la milicienne sans plus un regard pour l’animal sans poil et se hissa devant elle dans un geste souple pour ne pas s’appuyer sur son dos. Elle lui laissa cependant les rennes, c’était ce qui lui semblait naturel. Elle se sentait toute petite entre les bras de la milicienne. Pourtant, Jehan qui lui avait appris à monter peu ou prou de la même manière était bien plus grand, plus imposant. Mais elle avait son aura unique.
Elles parvinrent enfin aux portes de la ville et avancèrent dans les faubourgs. Sydonnie retrouva enfin assez de liberté loin des regards pour rétablir la conversation interrompue.

Dans la prochaine heure, uniquement mettre mes pieds dans l’eau si elle n’est pas trop froide. En accompagnant cela d’une conversation avec une femme taciturne. » Elle s’appuya un peu plus contre Sydonnie pour pouvoir la regarder en tournant la tête.

A plus long terme, j’essaie de convaincre mon beau frère de participer plus activement à la production de tenue pour l’hiver qui s’en vient. Avec les étrangers qui viennent de nous rejoindre, il y a plus de gens à garder au chaud. Comme le tiens beaucoup d’atelier son fermé par simple manque de personnels. Pourtant la main d’œuvre ne manque pas. Même si elle doit être en partie formée. »

C’était la première fois qu’elle exprimait en réalité ses plans en cours à voix haute avec quelqu’un d’autres depuis le départ de sa scribe. Elle ne confiait à Jehan que les détails qui l’intéressé, et presque plus aucun maintenant qu’il allait prendre ses distances. Bien sûr elle gardait pour elle les buts profonds de ses actes. Mais ce n’était pas désagréable de simplement pouvoir parler des actes en question. Même si Sydonnie devait en avoir autant à faire que de sa dernière chemise.

Et toi ? En dehors de tes essais d’apnée et du début de ton empire immobilier portuaire, des choses sur le feu ? »



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Sydonnie de RivefièreSergente
Sydonnie de Rivefière



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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyVen 27 Mar 2020 - 0:46


- « Cela commence à faire beaucoup chose d’oublié, comtesse. » souffla simplement la noiraude « La bouteille » fit-elle en levant un doigt « Les ailes… Et le troisième, ça sera quoi ? »

Si elle n’a rien laissé paraître, par habitude sans doute, cette discussion légère, cette histoire de grand lit, ou de deux chambres, lui a fait du bien, apportant un peu de distraction à son esprit tourmenté. Toujours dans cet étrange jeu d’analyse, alliant méfiance et envie de s’essayer à faire confiance, la jeune femme observe celle qui s’est présentée sans réel but. Celle qui a soigné son dos, sans trop exagérer en réflexion, celle qui ne dit rien vis-à-vis des nombreuses provocations qu’elle formule. Sydonnie ne parvenait pas à comprendre, jouant à ce jeu avec la sensation de ne pas en connaître ni les règles ni les limites. Cette unique question hantait encore et encore son esprit : Que cherchait réellement Irène de Valis, comtesse native de Marbrume et proclamée veuve récemment. Balayant l’ensemble de sa tête, terminant de se vêtir pour se préparer par habitude pour n’importe quelle sortie, en oubliant sans doute que même si le risque reste très présent, sur la plage il était tout de même moindre. Elles avaient fini par s’échapper du bureau, pour descendre les quelques marches, sortir était finalement une bonne idée, puisque désormais même à la caserne, la noiraude avait la sensation d’étouffer. Sydonnie comprenait bien plus que certains qui la détestait déjà. Elle-même se détestait, non pas pour son geste, mais pour une multitude d’autres raisons. Si les piliers de la milice se mettaient à trembler, c’était la caserne entière qui était mise en péril. On ne percevait jamais suffisamment la responsabilité d’une prise de poste, pourtant elle était bien réelle. Un coutilier pouvait mettre à mal l’ensemble de la troupe le suivant, un sergent l’ensemble des coutileries sous ses ordres… Les capitaines, la caserne dans son ensemble. L’espoir tenait parfois dans le creux d’une main bien fragile.

- « Plutôt sympathique» répéta-t-elle en offrant un coup d’œil à Irène, certaine qu’elle comprendrait son doute. Si on a confiance en quelqu’un on n’utilise pas le mot ‘plutôt’, ni semi, ni en partie, c’était entièrement là, un simple mot compromettait le reste de son argumentation « Je suis vexée » ajouta-t-elle l’air franchement sérieuse –alors qu’il n’en était rien- « je pensais être la meilleure chose que madame la comtesse avait pu rencontrer. » elle lui fit ce presque tirage de langue, presque car si l’envie avait été là, sa bouche resta bien fermée «Mon père m’a appris une chose, ce qui semble être le plus fragile, le plus doux, est le plus redoutable et celui dont on doit le plus se méfier. »

C’était dans la souffrance qu’on se forgeait, dans la perte, dans la tristesse et dans le désespoir, c’est lorsqu’on a plus rien à perdre qu’on devient le plus redoutable et c’est lorsqu’on retrouve quelque chose à perdre qu’on devient le plus monstrueux, prêt à tout pour conserver le peu qu’on possède de nouveau. Le savait-elle bien, avait-elle sacrifié son honneur pour pactifié avec Rougelac, simplement pour sauver la famille Rivefière d’un mauvais pas. Grave erreur, sans doute. Ordure de Roland qui malgré tous ses efforts avait préféré fuir lâchement. Si Flore était véritablement cette femme, cela signifiait d’autant plus qu’elle avait raison, parce que la femme, ou plutôt l’animal dévasté qu’elle avait rencontré était déjà prête à tout, le cœur plein de rancœur contre le royaume entier. Elle n’en dit cependant rien, Irène a déjà eu bien plus qu’une occasion pour comprendre qu’elle n’était pas une femme à donner sa confiance facilement, tendre la main, certainement, prendre des coups, sans le moindre doute, souffrir ou faire souffrir, possiblement, mais faire confiance était sans doute l’objectif d’une vie qu’elle n’obtiendrait plus. Descendant les quelques marches sous les regards hostiles, secouant doucement la tête en direction de celle qui évoquait avoir plus de prestance les cheveux au vent, elle se contenta de rester une nouvelle fois silencieuse. Détaillant par la suite la monture de la comtesse. Avait-elle un animal bien plus performant que la plupart des cheveux ici.

Le sergent présent avait échangé brièvement, Sydonnie avait choisi la carte de la soumission, une habitude quand la plupart de sa carrière on s’est fait malmener, secouer, presque violé, rué de coups. Une simple erreur –était-ce réellement une erreur- lui avait coûté bien plus cher, lui avait fait perdre tout ce qu’elle avait gagné durant les années précédentes, ou presque. La remarque d’Irène lui fit légèrement écarquiller les yeux, certaine qu’elle venait de tendre le bâton pour qu’on la batte. Comment pourrait-elle lui en vouloir, alors qu’elle n’avait sans doute pas connu la difficulté d’être une femme dans la milice.


- « C’est très juste comtesse, pour ceux qui ne vont pas nous faire perdre un animal dans un caprice suicidaire, nous avons des chevaux, pour les autres, on va attendre que les preuves de l’implication soient faites. Vous n’avez pas nécessairement choisi le meilleur sergent pour votre petite sortie, la perte d’une dame comme vous serez une grande perte pour notre ville. »

Ce fut comme un coup de poignard douloureux, un instant la noiraude c’était vu céder à cette colère, cette pulsion dégainer sa lame, la laisser glisser dans cette gorge qui se glousser de cette souffrance, de ce moment de perdition, de ce doute. Un instant seulement, le temps de cligner des yeux pour se rendre qu’elle n’avait pas bougé, qu’elle était restée immobile, tendant simplement une main à celle qui se trouvait à terre, alors qu’elle était montée sur l’animal.

- « J’ai dû faire bien plus dans ma carrière que vous n’en ferez sans doute jamais, à moins que nous venions à compter les vas et vient de votre queue dans le cul des catins, en ce cas obtiendrez-vous sans aucun doute le point. Chacun sa manière d’aider après tout. Avec tout le respect que je vous dois, sergent, évidemment. À tout à l’heure. »

C’était sa voix, elle l’avait reconnue, sa froideur, son agressivité maîtrisée, ce grognement silencieux. Oui, c’était bien ses lèvres qui s’étaient exprimées alors que ses prunelles claires dévisageaient celui qui se trouvait par la force des choses, physiques inférieurs à elle. La noiraude le dévisagea un long moment, alors que l’homme se bouffait de rage la lèvre, devenant aussi rouge que le sang fraîchement coulé. Il n’en dit rien, elle non plus, restant dans cette promesse que cela n’allait pas rester là. Sans aucun doute oui, cela n’en resterait pas là, mais là encore, savait-il qu’elle n’avait pas tort. Elle était montée en grade par son implication, il était devenu sergent grâce au vagin trop noble qui l’avait expulsé. Lentement, elle avait dirigé l’animal pour qu’il s’éloigne et si avoir formulé le fond de sa pensée lui avait du bien, il n’en restait pas moins que par expérience, elle savait qu’elle allait devoir faire attention à elle durant les prochains jours. L’égo d’un homme pouvait lui faire bien des choses, surtout si lui-même avait eu dans l’idée de tenter de courtiser la charmante comtesse qui se trouvait derrière elle. Qui sait, peut-être qu’Irène aimait simplement les titres, était-elle peut-être femme à s’abandonner une nuit, elle n’en savait rien.

Le duo s’était éloigné, tout en faisant attention à l’environnement, aux personnes présentes, elles avaient fini par passer les portes de la ville pour se retrouver dans cette végétation immédiatement plus denses. Le silence avait été maître jusque-là, mais la noiraude avait fini par le briser, portant la conversation sur celle qui devait avoir l’habitude d’être le centre d’attention. Son envie de mettre les pieds dans l’eau eut soudainement quelque chose de très fragile, enfantin, inconscient et cela suffit à convaincre la femme d’armes d’avoir fait le bon choix de l’accompagner. Un moment de liberté pour oublier un instant la fange et tout le reste, cela ne pouvait être que bénéfique. Elle lâcha les rênes d’une main pour venir attraper celle d’Irène, la positionner au bon endroit, au niveau de son ventre pour l’aider à se maintenir. Mais aussi parce que l’endroit choisi initialement était douloureux. Elle opina sans être certaine d’être vue, alors qu’elle évoquait son envie de fabriquer davantage de vêtements en prévision de l’hiver.


- « Méfie-toi des étrangers » ordonna-t-elle presque « J’ai un mauvais pressentiment à leur égard » il n’y avait pas d’argumentation, pas de point, rien, mais quelques choses la tracassait, elle en avait déjà parlé à Henry dans une lettre « On ignore tout d’eux, on ignore ce qu’ils ont du faire pour survivre. Ils avaient pour habitude d’user d’esclave pour toute sorte de pratique, qui sait de quoi ils sont véritablement capables, mh ? »

Sydonnie restait une sergente, avec sa perception son analyse et même si elle était plutôt du genre aventureuse, la nouveauté avait toujours eu ce don de l’effrayer à raison ou à tort. Fermant les yeux un infime instant, elle eut du mal à réaliser qu’il y a deux jours à peine, elle avait sauté dans le vide avec la ferme volonté d’en terminer, de rejoindre Anür, elle eut du mal à réaliser que cela faisait maintenant plusieurs mois que Roland n’était plus, que son bébé non plus, qu’Anne avait disparu, que ses amis aussi. Elle sentit son cœur battre fortement dans sa poitrine, dans cette irrégularité douloureuse, et lorsqu’Irène l’interrogeait sur sa volonté d’avenir, ce ne fut que du vide, que cet immense vide qui se dressa comme une unique réponse.

- « Hormis faire comprendre à Henry Duchemin qu’il n’a aucune responsabilité dans ma tentative de me transformer en poisson ? » questionna-t-elle en tentant de lui adresser un regard « Je ne crois pas, je ne vais pas pouvoir partir en mission avant un moment… » c’était son principal regret « Alors, je suppose que ça signifie remplir pas mal de dossiers, entraîner les coutilerie aussi… Et réparer ma future maison dans le port pour avoir cette délicieuse odeur de la mer en permanence sur moi » conclut-elle

Elle avait fait ce drôle de bruit avec ses lèvres et sa langue, permettant à l’animal de prendre une allure un peu plus rapide alors que les habitations se faisaient désormais plus rares. Avancer globalement, plutôt que reculer, c’est ce dont elle essayé de convaincre tous ceux qu’elle connaissait, sans doute tâchait-elle de s’auto persuadée elle-même. L’air, la sortie, le bruit de la nature avait toujours su lui apporter un réconfort, aujourd’hui encore, confirmait-elle cet état de fait alors que son regard vagabondait sur l’ensemble, alors qu’elle laissait l’animal ralentir pour mieux pouvoir contempler l’ensemble.

- « C’était quand la dernière fois que tu es sortie, Irène ? » l’interrogea-t-elle « Et qu’est-ce qui te manque le plus d’avant tout ça ? » poursuivit-elle avant d’arrêter la monture pour lui montrer dans un geste très lent le haut d’un arbre, en y regardant bien, en s’appliquant un peu on pouvait y apercevoir deux écureuils se pourchassant.

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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyVen 27 Mar 2020 - 13:04
La comtesse s’appliqua à prendre la pose qui dérangerait le moins sa cavalière en suivant ses indications. Son esprit tournait légèrement autour de la réponse que lui avait offert Sydonnie. Elle ne pouvait pas dire qu’elle s’attendait à une liste longue comme le bras d’objectifs et de volonté. Mais pour le moment cela ressemblait presque à un remplissage avec ce qu’elle pouvait trouver à dire. Sydonnie n’avait pas d’objectif, pas d’envie, pas de souhait. Roland était parti, avec lui ses rêves d’être une femme heureuse, une mère peut être un jour. Et cette femme-là, cette, comment était-ce déjà ? Serena ? Oui c’est cela. Pourquoi n’était-elle pas présente ? Elle avait cru en les rencontrant y voir une amie, presque une rivale vu la réaction de celle-ci à son égard. Elle avait vue bien plus de complicité entre elles d’ailleurs qu’avec son futur époux, au point de s’être, pendant un temps, questionnée sur l’arrangement de la famille autour de Sydonnie. Roland n’était-il pas celui bon à marié pour que Sydonnie puisse voir sa sœur sans éveiller des soupçons ?
Mais aujourd’hui elle non plus ne semblait plus graviter autour de la noiraude. De qui était-ce le choix ? La milicienne près d’elle avait-elle coupé tous les ponts avec la famille de son époux ? Mais n’était-ce justement pas le rôle d’une amie que de franchir les distances pour rester proche ?
Irène ne comprenait pas encore grand-chose à ce genre de lien, mais c’était le point qui lui semblait important à elle.
Soit ! Elle elle se battrait pour franchir la distance jusqu’à Sydonnie, puisque personne ne s’en donnait tant la peine dans son entourage. Chacune avec leur solitude et leur noirceur, elles feraient le chemin ensemble, le chemin jusqu’à la fin ou jusqu’à ce l’envie de vivre ne les retrouve.

Je n’ai pas besoin de leur faire confiance pour éviter au plus malchanceux d’entre eux de mourir de froid. Mais tu as raison, certaines choses chez eux, surtout les plus élevés d’entre eux, méritent d’être surveillée. Leurs mots et leurs croyances ne sont pas ce qu’il y a des plus rassurant pour une intégration sans heurts, si intégration il doit y avoir. » Répondit-elle en pour réagir à ses propos quelques instants plus tôt. Mais au fond, ici, en sa compagnie peu d’autres sujet qu’elle l’intéressait vraiment.

J’ai vraiment hâte de profiter de ton nouveau fumé. Même si celui actuel ne m’est pas désagréable. » Ajouta-t-elle en toute honnêteté alors que l’arôme du corps de la milicienne lui parvenait par cette proximité qu’elle partageait.

Elle ne sentait pas les fleurs comme les femmes de la cour, pas non plus l’odeur du citadin forte et capiteuse. Un mélange de peau chauffée, de cuir, et un soupçon de plante, sans doute du au baume qu’elle avait appliquée sur son dos. D’une façon ou d’une autre cela n’était pas désagréable pour elle. Elle se raidit un instant quand l’animal pris un rythme plus intense sur une simple intonation de bouche de la noiraude, puis se détendit à nouveau. Sans aucun doute, par ce simple geste, la milicienne se serait fait un fervent admirateur de son capitaine. Dès qu’une personne traitait correctement un cheval et savait le guider, elle entrait dans la catégorie des gens fréquentable selon lui.
Ses interrogations suivantes la surprirent un peu si bien qu’elle eut besoin de se mettre à réfléchir. Fallait-il vraiment être honnête ? Avait-elle envie de mentir ?

Dans les faubourgs, uniquement quelques jours. Au-delà des réelles limites de la cité… des mois. Peut-être une année… oui cela doit être cela. Je suis bien incapable d’assurer ma propre survie au-delà des murs. Et je n’ai pas l’égo de penser qu’il est normal que des gens la risque pour que je puisse sortir gambader par simple plaisir. Enfin... sauf avec toi ! » Finit-elle par conclure, pouffant en regardant les petits animaux avec un certain émerveillement s’égayer entre les branches. Sydonnie avait un œil de faucon, elle-même aurait été bien incapable de les remarquer sans avoir suivi son doigt. La différence sans doute entre celle qui prenait le risque de quitter la cité, et celle qui ne s’éloignait plus guères des murs.

Tu veux que je sois parfaitement honnête ? Peu de choses me manque d’avant. Aussi horrible que cela puisse paraître face à tout ce qui a été perdu, et à toutes les souffrances que cela a causé et cause aujourd’hui. Ma vie me semble avoir commencée avec la fange. » Elle avançait sur des œufs à présent, elle ne pouvait pas tout dire à cette femme, sinon elle serait surement décapitée dans les minutes à venir. Mais d’une autre façon, elle ne se voyait pas lui mentir directement et tenir son petit discours habituel de noblesse peinée. Elle voulait juste dire ce qu’elle ressentait, même si cela devait paraître horrible à une personne qui avait tant perdu ces derniers temps.

Je n’avais le droit que d’être une ombre auparavant. Toujours à suivre ce qu’on me demandait, sourire quand je le devais, paraître sans jamais avoir d’avis ou de pensées propres. Je ne pouvais pas être en colère, ni même triste. Aujourd’hui je dois me battre pour vivre, mais au moins je vis. Je peux dire non quand je ne suis pas d’accord, je peux négocier avec un homme, presque comme son égal. Je passe des nuits entières à faire des comptes et des calculs, à écrire des lettres. J’ai le droit de penser, d’être. D’être ici avec toi, sans mettre demandée si c’était bien où avoir besoin d’une permission. Non le monde d’avant ne me manque pas réellement… »

Le cheval reprit son avancée, Sydonnie avait-elle fait quelque chose ? perdue dans sa tirade et son observation des rongeurs, elle n’avait pas vraiment fait attention à ses gestes. Elle nuança tout de même légèrement ses propos. Par un souvenir.

Mais j’aimais beaucoup rejoindre une propriété que mon mari possédé dans le duché voisin. Nous devions voyagée des semaines. Loin des manoirs, de la cour, des soirées. Le matin je me levais et j’accompagnais Alice laver des tuniques dans les rivières que nous longions, elle me permettait de mettre beaucoup de savon pour faire mousser le tissu bien plus que nécessaire. Le soir, Jehan et son frère me laissaient les aider à soigner les chevaux. Je me faisais souvent… disputer ensuite, car mes tenues étaient salies. Mais je recommençais aussi souvent que je le pouvais.
J’adorais ces instants, car je pouvais faire comme si je n’étais pas moi…
»

Elle adoucit les détails, mais les images étaient bien réelles.

La taille du monde me manque. Voilà ma réponse. »

Une grande tirade inutile, bien jouée. Maintenant elle devait paraître parfaitement égoïste à la milicienne. Toute centrée sur elle et ses libertés. Bien digne d’une noble qui n’avait pas eu grand-chose à risquer dans sa vie. Comme de se plaindre de devoir dormir dans des draps de soie et pas sur de la paille. Elle soupira. C’était difficile d’être honnête.

Et toi Sydonnie, tu as des choses qui te manque d’avant ? »

Petit à petit le terrain s’inclinait et la végétation changeait à leur approche du littoral. En effet, elle n’avait pas vécu cela depuis trop longtemps. Depuis son bureau, le monde se résumait à des chiffres et à des plans.
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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyVen 27 Mar 2020 - 14:05


Sydonnie n’avait rien dit, néanmoins, elle s’interrogeait sur ce qu’Irène voulait dire vis-à-vis de la croyance des étrangers. Elle trouvait bien évidemment plus que généreux de sa part de se soucier des plus faibles. C’était étrange, de constater celle qui semblait si différente, s’inquiéter sincèrement des plus miséreux, au premier coup d’œil, la noiraude ne l’avait pas vu comme ça. N’arrivait-elle plus aussi bien à juger les gens du premier coup d’œil, ou c’était-elle à ce point laissé Roland l’influencer ? Elle l’ignorait, néanmoins, elle avait laissé un instant courir ses doigts sur celle d’Irène, comme si ce simple geste lui permettrait de comprendre de l’analyser, de savoir tout ce qu’elle ne savait pas d’elle. Sa phrase vis-à-vis de son odeur ne fut pas soulevée, n’obtenue pas de réponse, sans doute parce que la jeune femme ne savait pas réellement comment le prendre, comme l’entrevoir. Jamais ne pourrait-elle imaginer ce qu’Irène avait dans la tête, dans le cœur. La sergente s’était contentée d’avancer sagement, surveillant les alentours, la lame à la taille qui devait de temps à autre effleurer les jambes de la noble. La femme d’armes préférait se détendre, oublier quelque peu le passé, l’ensemble des événements, savourer la nature, l’environnement, cette compagnie qu’elle se surprenait à tolérer plus qu’elle ne l’aurait pensée. S’autorisant une question, afin de faire la conversation, afin de l’éloigner de ses pensées, afin d’éviter qu’on ne parle d’elle et d’uniquement d’elle. Irène avait semblé hésiter, ne pas souhaiter répondre de suite, sans surprise, celle à la chevelure sombre lui laissa le temps de la réflexion.

Converser permettait de faire passer le temps, de ne pas remarquer les minutes qui s’écoulaient, elle lui avait montré un duo d’écureuil se chamaillant, avant de reprendre la route, toute ouïe vis-à-vis de l’explication de la comtesse. Ainsi venait-elle de temps à autre dans les faubourgs, peut-être pour voir Flore, puisqu’elle semblait la connaître et que cette dernière tâchait de séduire le garde personnel de la sang bleue. Chaque fois qu’Irène s’exprimait, Sydonnie semblait surprise de la réponse. Elle ne sortait pas pour éviter de mettre en danger les autres, elle n’était pas égoïste, semblait faire attention sincèrement à son entourage. Un coup d’œil en arrière, une curiosité beaucoup plus sincère.


- « Parce que moi je ne suis pas si facilement tuable, tu ne dois rien craindre de ce fait
n'est-ce pas ?
» la phrase aurait dû être rassurante, mais elle était terriblement douloureuse pour celle qui n’en pouvait plus de cette étrange réalité.

Syonnie ignorait toujours d’où venait l’intérêt que lui portait Irène, résigné sans doute à ne jamais le comprendre. Elle était là, armée de cette étrange volonté à voir s’écrouler les murs que la sergente avait dû bâtir autour d’elle pour se protéger. Pourquoi ? L’interrogation la hantait toujours, alors qu’elle faisait silence pour écouter une comtesse se livrer davantage. Contrôlant l’animal, la noiraude n’était pas franchement surprise de cette révélation, pour les femmes nobles, la fange aussi terrible soit elle avait également instauré ce vent de liberté. Néanmoins, cette vie paisible passée pouvait manquer par certains aspects. Sans jamais juger, sans jamais offrir une réaction, elle écoutait, sagement, penchant la tête en arrière pour offrir quelques attentions visuelles à celle qui ne lui paraissait pas réellement égoïste, mais beaucoup plus humaine que la vision qu’elle avait d’elle jusqu’ici. Elle avait quitté des yeux les écureuils pour reprendre la route, écoutant cette simple certitude que pour la comtesse le monde d’avant ne lui manquait pas, pourtant il y aurait eu une multitude de raisons pour ce soit le contraire. L’évocation du souvenir et de cette notion de dispute qui revenait lui tira un nouveau regard, regard dont elle ne fit rien pour camoufle son interrogation.

- « Je comprends » souffla-t-elle simplement sans s’autoriser la moindre question, elle était libre d’en dire davantage ou de rester dans cette superficialité, chaque chose venait avec le temps « La vie, je crois. » répondit-elle à son tour.

L’environnement avait changé, trop rapidement à son goût, le temps du trajet lui avait parût étrangement court alors que la position du soleil lui indiquait pourtant qu’un sacré bon de temps s’était écoulé, sans que rien ni personne ne soit venu interrompre la conversation. Prenant une étrange inspiration, elle ignorait si elle devait véritablement argumenter sa pensée, qui aux oreilles d’Irène devait paraître très flou, alors qu’aux siennes c’était si simple à comprendre.

- « Le hurlement des crieurs publics me manque, le marché du poisson dégueulant de poissons justement… Le marché avec les fruits et les légumes en quantité, avec la commerçante hurlant auprès de ce gamin qui a volé une pomme et qui s’enfuit, le bruit de la vie des faubourgs, de l’odeur des convois revenant d’une bataille fraîchement gagnée contre un duché voisin. Les nuits entièrement allongée sur le toit à regarder les étoiles avec cette crainte qu’un jour tout s’écroule sur notre tête. C’est tout ça qui me manque, je crois. » elle prit une nouvelle inspiration « Aujourd’hui, plus rien n’a le même bruit, on vient éteindre nos lumières des rues avec la peur au ventre, on regarde la mort avec révolte en craignant qu’elle ne se relève, on ne s’offusque plus d’un vol de pomme, on tue le voleur ou lui-même va se faire voler, les crieurs publics ne hurlent plus de la même manière, la vie n’a plus le même son, la même joie, la même caresse agréable… On est dans cette survie, dans cet égoïsme permanent, on tue plutôt qu’être tué, on prend ce que les autres possèdent pour améliorer un peu notre quotidien, on ignore ceux qui crèvent de froid de faim, on ignore ceux qui meurent pour sauver le plus grand nombre, on ignore tellement… On accuse les autres de nos maux, on n’assume plus rien. »

Et son père, son père lui manquait terriblement, plus que personne ne lui avait jamais manqué, sa mère avec qui elle avait été en conflit aussi lui manquait. Sydonnie aurait voulu refaire le passé, être une femme plus douce, plus conciliante, mais en même temps… Sans fange, elle n’aurait jamais rencontré Chris, ni Gabriel, ni Roland, elle n’aurait jamais eu la chance de voir le gonflement de joue de Anne lorsqu’elle était contrariée, elle n’aurait jamais pu être milicienne, ni coutillière, ni sergente. Alors, pouvait-elle réellement regretter quoi que ce soit ? Elle n’en savait trop rien et elle avait senti cette étrange émotion s’enrouler dans sa gorge, la serrant avec cette force agréable et désagréable à la fois, la poussant à ce silence étrange. Sydonnie était dévoré par la culpabilité, la culpabilité ne pas avoir réussi à sauver ceux qu’elle aime, d’avoir abandonné, de ne pas réussir à sauver le royaume entier, de ne pas tendre suffisamment la main, de ne pas être un bon exemple, d’avoir trop souvent trahi les Trois pour son propre plaisir. Elle était indigne et les Dieux eux-mêmes n’avaient de cesse de lui rappeler en lui refusant le royaume d’Anür.

- « Tu oublies un élément important » souffla-t-elle finalement pour détourner le sujet, essayé de désencombrer sa gorge « L’odeur de la mer, la sensation de l’eau froide sur tes pieds, le sable s’insérant entre tes orteils offrant cette envie de se gratter, ça te manque aussi ! C’est la raison pour laquelle nous sommes là je rappelle. »

L’animal s’était immobilisé, alors que les derniers arbres laissaient place à ce sable, cette immense étendue d’eau d’un bleu si intense qu’on pourrait s’y perdre durant des heures. Le soleil n’était plus camouflé par les branchages et était sans aucun doute venu éblouir un instant celles qui se trouvaient justes là. Elle avait laissé Irène descendre la première avant de faire de même, retirer tout ce qui pouvait encombrer l’animal avant de le laisser s’éloigner gentiment. Elle ne craignait pas de le voir fuir, pour la bonne et simple raison qu’elle le pensait fidèle à sa propriétaire, déposant sur le sable l’ensemble de l’équipement de la monture, avant de s’éloigner de quelques pas pour détailler ce liquide si attirant et terrifiant à la fois. Son regard se portait sur la silhouette féminine, cherchant à déterminer si elle était satisfaite de ses retrouvailles.

- « Alors, madame la comtesse, êtes-vous satisfaites ? »

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Irène de Valis



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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyVen 27 Mar 2020 - 15:12
J’aurais aimé voir ce monde-là avec tes yeux. » Dit-elle en simple réponse à son explication. « C’est à la fois amusant et triste de s’apercevoir que la vie d’une personne s’avère n’être qu’un bruit de fond inatteignable pour une autre. Je n’ai jamais connu le monde dont tu te souviens. Et tu n’as jamais connu le miens… Peut-être que les choses ne seraient pas ce qu’elles sont, si de telles différences n’avaient pas exister entre des gens comme nous. »

Si les hommes n’avaient pas été si égoïste, si cruel. S’ils n’avaient pas bâti un monde fais de murs invisibles, de classes sociales, de règles de conduite, de faux semblant, de différence de sexe. La fange serait-elle venue ? Aurait-elle pu faire tant de dégât face à une humanité unie ?
Si la jeune Sydonnie et la jeune Irène si elles avaient pu être des sœurs d’espèce, semblable en droit et en devoir. Seraient-elles aussi malheureuses aujourd’hui ? Auraient-elles pour compagnon cette noirceur qu’elles partageaient ?
La voie de Sydonnie était presque enrouée quand elle reprit. Pas pour ces paroles, non, Irène ne le pensait pas. Plutôt pour toutes celle non dites. Celles que la comtesse espérait, un jour, être en droit de connaître après avoir gagnée au près de la noiraude, la place qui lui permettrait de l’écouter se confier.

Comme elle lui décrivait les sensations de leur destination, l’odeur iodée vint en effet lui chatouiller les narines, la piquant presque. Elle avait oublié cet effet. Les arbres s’ouvrirent et la plage s’offrit à eux dans son entièreté, belle, vierge, s’étendant à leur gauche comme leur droite. L’océan d’un bleu profond s’étirant pour rejoindre le ciel dans le lointain de l’horizon. Elle descendit la première, aidée par la main puissante de la milicienne. Son regard se décrochant difficilement de la vue. Comment avait-elle pu l’oublier si complètement ? Elle se battait pour libérer le monde de l’humanité qui la souillait. Mais elle avait finalement perdu tout lien avec lui. Elle avait oublié les miracles de beauté qu’il abritait. Elle passait à sa bordure sans plus jamais le voir. A vrai dire aujourd’hui était sa seule sortie depuis des années, avant même la fange, ou elle n’avait d’autre motivation que de pouvoir l’admirer en compagnie d’une personne avec qui elle voulait être. Elle tourna les yeux vers cette personne qui la regardait aussi, avec curiosité peut-être ?
Son cœur se gonfla d’un plaisir non feint, et elle sourit à pleine dent.

Pas mal sergente, pas mal ! » Répondit-elle en gloussant presque avant de courir au bord de l’eau, là où l’écume des vagues s’étirait sur le sable.

Elle s’accroupit juste au bord, l’eau venant lécher la pointe de ses bottes. Elle tendit la main et laissa l’eau caresser la pointe de ses doigts. C’était froid et mouiller, presque granuleux, surement à cause du sable soulevé. Elle rit en enlevant sa main. Et recommença. Comme une enfant qui découvre pour la première fois. Ce qui n’était pas si loin de la vérité. Elle n’avait pas le droit de s’approcher de l’eau quand elle venait avec son époux. Elle assistait à la cérémonie pour les trois, mais se contentait de rêver du contact de l’eau en l’observant s’agitée. Pourquoi depuis qu’elle avait repris le contrôle de sa vie, n’avait-elle pas connu plus de moment comme celui-ci, de simple découverte ? Elle regarda la noiraude par-dessus son épaule, à quelque pas d’elle. Attendait-elle que quelqu’un le vive avec elle ?

Alors elle l’éclaboussa d’un mouvement brusque. Pas assez pour vraiment pouvoir la mouiller, mais la faire briller sous une myriade de petites goulette brillantes comme de l’argent sous la lumière. Qui s’accrochèrent dans ses longs cheveux noir, ses vêtements, et les traits de son visage si intense.

Elle est bonne ? » Demanda-t-elle avec un sourire particulièrement peu innocent.



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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyVen 27 Mar 2020 - 17:29


Irène avait deux visages. C’était soudain devenu une certitude, alors que la noiraude l’avisait s’éloigner en gloussant, alors qu’elle courait déjà sur le sable, les yeux brillants. Elle avait ce sourire qu’elle ne lui avait de mémoire, jamais vu, elle était là, semblant véritablement heureuse le temps d’un moment échappé, comme suspendue dans le temps. Sydonnie l’avait observé, réellement pour la première fois, il n’y avait pas d’analyse derrière tout ça, ni d’arrière-pensée, juste une femme en observant une autre. Pas de mauvaise idée, non, elle appréciait la vision qui s’offrait à elle, cette sensation d’avoir aujourd’hui, apporté un peu de joie à quelqu’un, de joie sincère, non sur jouée, non feintée, avec quelque chose de simple, de si simple que cela en était presque ridicule à ses yeux. Ses prunelles effleuraient sa silhouette, s’arrêtaient sur ses lèvres à demi visibles par sa position, écoutaient ce rire qui lui semblait presque inconnu. Accroupie au bord de l’eau, une main l’effleurant, les cheveux encore attachés, elle semblait s’amuser, réitérant à de multiples reprises le contact avec le liquide pour le retrouver. La jeune femme avait mis un temps avant de s’approcher, faisant quelque pas avec lenteur pour réduire la distance qui la séparait de celle qui sur l’instant, ne lui faisait plus penser à la comtesse. Non, elle était juste Irène, une femme qu’elle apprenait à découvrir petit à petit, en ayant toujours la sensation d’être un peu privilégiée de la voir ainsi.

Recevant une éclaboussure qu’elle aurait dû voir venir si elle n’avait pas été concentrée par tout le reste, elle se recula d’un pas, surprise, sans pour autant rire. L’eau était fraîche, lui avait de ce fait apporté cette sensation agréable sur sa peau, dans un réflexe naturel elle avait passé ses doigts sur son visage, puis dans sa chevelure qu’elle détacha avant de tendre sa main pour éclabousser légèrement du bout des doigts Irène. C’est après ce simple mouvement qu’un sourire s’afficha sur ses lèvres. Un peu gauche, la femme d’armes ne savait désormais plus trop se concentrer, n’était plus certaine d’être là pour les bonnes raisons. Elle découvrait véritablement son interlocutrice, Irène était insouciante, presque enfantine, douce, fragile ? Une énième fois, la sergente fut silencieuse, le regard rivé vers celle qui semblait pour la première fois épanouie.


- « Un peu fraiche » répondit-elle enfin avec cet instant de décalage « Tu vas pouvoir tremper tes pieds dans l’eau… C’est agréable, tu verras. »

Elle s’était approchée dans ce geste étrange, lent, suspendu dans une hésitation, avant de glisser ses doigts dans la chevelure de la comtesse, dénouant sagement le chignon de la pulpe de ses doigts. Avant de se reculer une nouvelle fois d’un pas, la noiraude lui offrit ensuite ce sourire pincé, avant d’avancer tout aussi doucement le long de la plage, sans réellement s’approcher de l’eau, émettant cette légère pause pour démontrer son attente vis-à-vis d’Irène. D’une main, effleura sa lame, comme pour se rassurer, avec cette hésitation à la décrocher de sa ceinture, renonçant néanmoins rapidement à l’idée.

- « Je n’ai aucune affinité particulière avec l’eau, tu me pardonneras pas. Elle me fait peur autant qu’elle m’attire » avoua-t-elle simplement en croisant les bras sous sa poitrine, laissant ses pieds s’enfoncer dans le sable pour mieux y ressortir « Je suis contente si ça te plaît, tu as l’air si différente ici… » murmura-t-elle par la suite.

C’était ridicule, c’est ce qu’elle n’avait de cesse de se répéter avant de passer une main derrière sa nuque pour la frotter. Elle lâcha un bref soupir, sans trop savoir comment faire pour réaliser une véritable conversation. L’action était son rythme de vie, le combat, le dynamisme, alors quand elle se retrouvait là, seule avec une comtesse, elle était bien incapable de savoir quoi dire, quoi faire pour rendre le moment moins étrange, moins ce petit quelque chose de gênant.

- « Quand je venais ici, avant… Je faisais la course avec mon cousin ou mon père, ça te tente ? Tu verras, ça apporte des bruits encore différents. » fit-elle simplement « Et nous ne sommes pas si différente, Irène, avant la milice, je n’étais pas très loin de la noblesse, mais encore un peu trop jeune pour devenir l’épouse de qui que ce soit » ses doigts avaient effleuré son menton « À moins que ce ne soit mon caractère, je ne sais pas… Enfin mon père était un chevalier de la couronne et ma mère une haute bourgeoise. » elle se mordille la lèvre inférieure « j’ai toujours eu une fâcheuse tendance à ne pas respecter les règles. J’aimais la forêt, chasser, j’aimais me bagarrer avec mon cousin –qui était comme un frère- et je n’étais vraiment pas bonne dans les leçons de l’étiquette. »

Sydonnie avait simplement roulé des épaules, il n’y avait dans le fond pas grand-chose à dire, pas grand-chose à rajouter. Jamais elle n’avait trouvé son histoire très intéressante, les buts de la noiraude avaient toujours été très terre à terre et courts sur la durée. Finalement, en y réfléchissant, depuis petite, elle avait toujours été incapable de se projeter bien loin dans l’avenir. Et puis elle eut cette question, qui lui traversa l’esprit, question qui lui semblait soudainement réalise, étrange, elle repensait à la séance de peinture… Roland avait insisté pour qu’elle y participe, c’était la raison qu’elle était venue… Peu de temps avant, elle s’était abandonnée à lui et l’avait ensuite laissé sans nouvelles des jours durant, le couple c’était retrouvé devant chez Irène le cœur remplit d’incompréhension. À ce moment-là, Sydonnie n’aurait jamais dû lui pardonner, pourtant, elle avait une nouvelle pliée l’échine.

- « Pourquoi avoir voulu me peindre, réellement ? »

Finalement, il manquait vraiment une bouteille de vin à cette étrange conversation et cet étrange moment.

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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyVen 27 Mar 2020 - 18:48
La comtesse cligne des yeux pour se protéger des rares gouttes qui l’atteignent et les rouvre pour découvrir un vrai sourire sur le visage de Sydonnie. Discret, presque hésitant, mais bien réel. Cela lui réchauffe le cœur et son propre sourire s’élargit en réponse. Elle se rapproche encore. Irène ne bouge plus d’un centimètre en regardant la main se rapprocher. Le rythme cardiaque s’emballe, mais elle ne fait rien pour éviter le geste. Les doigts glissent dans ses cheveux et elle les sent cascader jusqu’au bas de son dos maintenant, effleurant ses reins. Décidément elle les laisse beaucoup pousser ces temps-ci. Elle regrette surtout de voir sa compagne refaire un pas en arrière ensuite, sa présence lui apporte une chaleur inexpliquée. Mais elle apprécie ces gestes qu’elle se permet, ou les remarques qu’elle lui envoie.
Alors que c’est surement la personne qui la soupçonne le plus de n’être qu’une manipulatrice cherchant à obtenir quelque chose de leurs échanges. C’est aussi celle qui la traite le plus comme un autre être humain. La vie est bien étrange. Irène se laisse tombée sur son séant et se dépêche d’enlever ses bottes alors que Sydonnie prend de l’avance.
La morsure fraîche de l’eau sur ses pieds nu est agréable mais la saisi tout de même, lui faisant pousser un petit bruit aigu entre le couinement et le gloussement. Elle se relève rapidement et rattrape la milicienne.
Elle revient à son niveau et lui réponds, toujours le sourire aux lèvres.

Rien à pardonner, ta promesse est tenue, je suis à la plage, pas besoin de t’immerger jusqu’aux oreilles pour que je sois contente. J’ai toujours aimé l’eau, elle me fait un tout petit peu moins peur qu’elle ne m’attire. »

Elle se pencha pour étudier le visage de Sydonnie suite à sa remarque.

Différente ? En bien ? »

La noiraude semblait songeuse, mais moins sombre qu’il y a quelques minutes, plus tournée vers l’instant. Pas à l’aise quand même, mais assez pour montrer que l’instant la tracassait, par de petits gestes, des soupirs. C’était plaisant, sans pouvoir définir pourquoi. Comme si elle ne pensait pas comme la milicienne face à la comtesse, plutôt comme une personne qui n’a pas l’habitude d’en fréquenter une autre et cherche.
Elle lui confia d’ailleurs des anecdotes bien plus personnelle qu’elle n’en avait fait jusque là lui semble-t-il. Elle avait évoqué sa mère à l’époque en voyant ses rosiers blancs. Mais en dehors de cela elle était plutôt secrète au sujet de sa famille. En vérité malgré leurs quatre rencontres à présent, elle en avait plus appris sur Sydonnie en rangeant sa maison que par sa bouche. Alors elle savoura d’autant plus les mots qui sortaient de sa bouche.

J’avais cru noter en effet que l’étiquette et toi étiez de vieilles ennemies. Je suis contente de voir que ça ne date pas de moi ! » La taquina-t-elle en songeant à ce qu’elle avait entendu, et à ce qu’elle pouvait permettre de dire à ce sujet.
Être invitée à entendre quelqu’un parler de son passé ne voulait pas dire qu’on avait le droit d’y réagir. Du moins c’est la conclusion qu’elle avait tiré avec le temps. Elle osa quand même.

Je ne dirais pas que je suis une grosse adepte de la bagarre fraternelle, je n’ai pas vraiment eu de famille ou de gens de mon âge pour m’y essayer. Mais la manière dont tu en parles me donne à croire que tu te ressemblais déjà énormément plus jeune. Je suis heureuse que des personnes comme toi se soit battu face aux règles imposées, avant tout ça. Peut-être qu’avec une ou deux décennies de plus, des femmes dans ton genre auraient pu faire bouger les choses quoi qu’il arrive. »

La soudaineté de la question, ou plutôt de son sujet surpris la comtesse au point de lui faire faire un arrêt dans le sable, les vagues frappant ses chevilles nues. Pourquoi ?
Elle avisa quelque chose un peu plus loin.

Tu vois la grosse pierre noire là-bas ? à une centaine de mètre, qui dépasse du sable ? »

Sydonnie confirma.

Si tu arrives là-bas avant moi je te le dirais ! »

A peine sa phrase finie, elle était déjà partie, courant de toute la force de se jambes en riant, ses bottes serrées sous son bras. Bien entendu, et malgré ses efforts, elle perdit lamentablement. Même blessée et prise en traître Sydonnie avait une forme physique qu’elle n’avait pas. Elle l’avait tranquillement rattrapée sur la première moitié pour la distancer ensuite et même lui mettre une petite pointe de vitesse sur les derniers mètres. Elle était tranquillement assise sur la pierre quand Irène arriva finalement à bout de souffle avant de se laisser tomber sur le sable comme une étoile de mer, sa poitrine se soulevant à un rythme saccadé. Elle parvint à sourire tout de même.

La prochaine fois, je serais moins clémente, te voilà prévenue ! » dit-elle à dire entre deux reprises de souffle.

Elle finit par retrouver assez de souffle et de force pour s’appuyer sur un coude et regarder Sydonnie.

Je n’ai pas menti à l’époque Sydonnie, l’artiste en moi voit des merveilles dans ce que tu as accomplis, pour la milice, pour le peuple, pour les femmes. Tu es un fruit de notre époque. Peut-être pas le plus joyeux, mais pas le plus triste non plus. J’aimerais que si notre espèce, ou un autre a la chance d’étudier notre histoire, il y ait une toute petite chance qu’il tombe sur cette peinture et se dise qu’à cette époque de malheur, des choses importantes se sont passée dans notre société. »

Elle laissa s’écouler une seconde et baissa un peu les yeux, pas certaine de vouloir lire la réaction qu’elle aurait aux mots suivants. Mais elle lui avait promis la vérité en cas de victoire. Et elle avait envie, pour une raison qui lui échappait, de tenir sa parole.

Si tu me demandes cela à un niveau plus personnel. Je te trouve belle Sydonnie, vraiment très belle. Ne me demande pas de t’expliquer pourquoi. Je ne sais pas si c’est physique, émotionnel, spirituel. Peut-être est-ce ta personnalité ? Ton humour ? ta tristesse ? Tes joies ? Je n’en sais rien, c’est un simple fait que se renforce à chacune de nos rencontres, je ressentais avant même de te parler ce jour là à ma fête. Je le ressens aujourd’hui plus encore. A mes yeux, à mon cœur, tu es belle. »

Elle se relaissa tomber sur le dos en soupirant.

Pas terrible hein comme explication ? »

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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyVen 27 Mar 2020 - 21:47


- « Je crois »

Elle avait répondu avec sincérité, sans parvenir à affirmer avec certitude que ce soit en bien ou en mal, la noiraude avait manqué de lui dire qu’elle ne savait pas nager, mais avait finalement renoncé. Certaine qu’avec cette information supplémentaire son acte passé finirait définitivement par paraître pour un suicide, une tentative. Pour autant, elle-même n’était pas sure qu’en sautant, elle voulait vraiment que sa vie s’arrête, Sydonnie avait juste eu ce besoin que sa douleur s’arrête un instant, qu’Anür lui réponde enfin, obtenir un signe, un geste, un petit quelque chose qui lui permettrait de croire que tout ce qui était arrivé avait un sens. Un putain de sens. Avisant les vagues, avisant Irène qui s’était déplacée très légèrement, elle lui avait offert un maigre sourire, mais un sourire quand même. Sydonnie aurait voulu pouvoir communiquer, évoquer ses pensées, mais il restait ce doute, cette méfiance naturelle qui l’empêchait de passer le pas. Fallait-il simplement du temps, sans doute plus qu’elle n’aurait voulu le croire. S’ouvrir sans s’ouvrir, voilà un exercice bien difficile, alors elle évoquait son passé, son cousin, son père, sa difficulté à respecter les règles de bonnes conduites. Un pincement de lèvre régulier, une petite inspiration alors qu’Irène évoquait avec malice l’idée de se satisfaire de ne pas être responsable de son hostilité habituelle.

- « Tu aurais apprécié que ça date de toi ? » l’interrogea-t-elle sans trop comprendre.

S’immobilisant un instant, elle l’avisait, cherchant à comprendre, essayant de lire entre des lignes qu’elle ne percevait pas. Irène avait ce besoin d’évolution, c’est ce qu’elle comprenait finalement. La comtesse cherchait cette autonomie, sans doute se détacher définitivement de l’emprise d’un homme lorsqu’on est noble, c’est un fait, on est l’ombre d’une ombre, on se tait, on obéit, on conserve juste un sourire, une façade… Une façade. C’est cette réflexion qui fit relever les yeux vers Irène, comme si elle venait de comprendre, comme si l’évidence lui sautait aux yeux. Irène était habituellement une façade, peut-être plusieurs, pourquoi.

- « Le changement n’est pas toujours une bonne chose » murmure-t-elle « Je ne suis personne, Irène pas plus importante que toi, ni des autres, je ne fais rien qui change les choses non plus, comme toi, je m’applique juste à essayer de survivre »

Femme sauveuse, héros, elle n’avait jamais cru l’être, elle refusait même de l’être. Elle réalisait ce qui lui semblait juste, cela s’arrêtait là, ainsi, définitivement. Son regard s’était relevé vers Irène avisant la source d’attention qui semblait soudainement obnubilée la comtesse, opinant simplement, elle n’avait qu’à peine eu le temps de formuler un oui qu’elle l’avait vu filer. La geste provoqua un petit rire chez la jeune femme, avant qu’elle ne s’élance à son tour, non pas sans éprouver des difficultés, non pas sans afficher des douleurs vis-à-vis de son dos, pourtant, la noiraude avait fini par la rattraper, par la dépasser. Essoufflée, le cœur tambourinant avec force dans sa poitrine elle avait fini par s’installer sur une roche, la roche, patientant. Irène était arrivée peu de temps après elle, se laissant tomber sur le dos, dans le sable chaud, le souffle court, la respiration bruyante due à l’effort. La sergente était dans le même état, s’appliquant, essayant du moins à reprendre son souffle. Elle avait fini par éclater de rire alors qu’Irène lui promettait d’être moins clémente la prochaine fois, comment pourrait-elle en douter en la voyant ainsi complètement épuisée, les joues rouges, les yeux vibrants, le souffle court.

- « Je n’en doute pas, pour t’offrir une chance de me battre tu viendras courir avec moi le matin » proposa-t-elle le plus sérieusement du matin « P’tetre que comme ça à force tu pourras me dépasser, qui sait. »

Finalement, la comtesse avait fini par se relever sur ses coudes, l’avisant avec un tout autre sérieux pour répondre à sa question première. Elle avait entrouvert légèrement ses lèvres, laissant un souffle s’échapper alors qu’elle ne comprenait toujours pas ce qu’Irène percevait en elle. Non elle n’était rien de tout ça, ni un exemple pour les femmes, ni un élément important. Elle ne méritait pas de laisser une trace, elle était convaincue. Conscience que le formuler serait sans aucun doute frustrant pour celle qui était convaincue du contraire, elle n’en dit rien se contentant de se redresser la détaillant, alors qu’elle se détournait pour poursuivre dans une tout autre mesure. Cette fois, c’est une véritable gêne qui avait fini par animer celle à la chevelure sombre. Irène la trouvait belle. L’ensemble se répéta un long moment, sans qu’elle ne parvienne à traduire ce que cela signifiait, ce qu’elle essayait de dire, ou de ne pas dire. Son cœur avait fini par se calmer dans une lenteur déraisonnable, tout comme sa respiration, alors que ses deux prunelles claires fixaient sans interruption la silhouette féminine installée à même le sable. Sans doute pour dédramatiser, sans doute aussi pour ne pas réfléchir à cette étrange révélation, elle reprit la parole :

- « Pas terrible non. » se contenta-t-elle de dire avant d’ajouter « Et puis la beauté… c’est propre à chacun, ça ne veut pas dire grand-chose » ajouta-t-elle simplement.

Elle avait fini par glisser sur le sable, le dos légèrement contre la pierre, les jambes tendues, ses doigts dessinant des cercles dans l’ensemble chaud. Elle avait fermé les yeux, penché légèrement la tête en arrière pour prendre une inspiration. Pas très doué dans le contact humain, d’autant plus dans tout ce qui était de l’ordre du relationnel sentimental, elle alternait entre cette sensation qu’Irène tentait un rapprochement autre qu’amical, tout comme en cette culpabilité de l’envisager. C’était impossible, se faisait-elle des idées. Pourtant elle s’était surprise à porter ses doigts à ses lèvres, se souvenant de ce contact qu’elle avait jugé maladroit. Elle-même avait déjà embrassé Serena mais tout était différent, si différent, trop différent.

- « J’ai perdu mon bébé » ce fut brutale et d’une violence inouïe pour celle qui venait de le formuler alors que ses doigts glisser sur son front, puis dans sa crinière sombre « J’étais enceinte… » ajouta-t-elle comme pour clarifier l’ensemble, comme si le doute pouvait encore subsister alors que sa mâchoire se contractait « Je n’en voulais pas, je n’en voulais pas » murmura-t-elle alors que sa voix s’était mise à vibrer « Mais il était heureux…. Si heureux… Et il est mort, il a fui ses responsabilités, en me laissant avec ce que je n’arrivais pas à aimer, ce que je ne méritais pas. »

La noiraude avait fini par enfouir sa tête dans ses mains, rapprochant instinctivement ses jambes contre elle, même à Flore elle n’avait rien dit vis-à-vis des circonstances de cette perte, précisant simplement que les membres du clergé n’avaient rien pu faire, c’était ensuite la soigneuse qui l’avait soulagé de sa douleur, de sa perte, sans préciser ce qui c’était passé.

- « Ils ont dit… que c’était de ma faute » peut-être était-ce le cas « Que avec ma blessure j’aurais dû me reposer, que j’aurais dû, qu’il fallait, mais je n’en voulais pas, j’étais incapable de l’aimer alors qu’il était parti, incapable de devenir mère, incapable et… » et pourtant elle l’avait aimé du plus profond de son cœur cette enfant, cette créature qui avait fait l’espace de quelques instants gonfler son ventre « Il n’y a rien de beau chez moi Irène… J’ai pas su retenir mon mari, je n’ai pas su le rendre heureux et lui donner envie de ne pas fuir, je n’ai pas su… » sa gorge était noué, sans qu’aucune larme ne parvienne à s’échapper, elle n’arrivait plus non plus, avait-elle versé trop d’eau salée dernièrement « Je ne suis pas une héroïne ni une princesse des contes de fées Irène, je n’ai pas su être une épouse digne, je n’ai pas réussi à donner la vie, j’attire la mort, je la provoque. » elle avait fini par ramasser un petit galet qui se trouvait là, pour l’envoyer dans l’eau tout en se redressant « Définitivement Irène, il n’y a rien de beau chez moi ni aux yeux des Trois, ni aux yeux de quiconque. »

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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyVen 27 Mar 2020 - 22:56
Elle aurait aimé une autre réaction, mais elle s’attendait à une pire. Ses sentiments étaient donc des plus mitigés à cet instant. Oui la beauté était propre à chacun. Et pour elle Sydonnie était la plus belle chose qu’elle ait vue. Elle avait vue des femmes plus belles, des guerriers plus impressionnants, des paysages plus splendides et vaste. Mais si on lui demandait son avis Sydonnie dépassait tout cela, c’était ainsi.
Mais elle n’avait rien à argumenter à cela. Oui ce n’était que subjectif, que l’expression de sentiments qu’elle ne comprenait pas. Elle ne pouvait en convaincre Sydonnie. Elle avait déjà la gorge étroite quand elle reprit, elle s’en retrouva totalement nouée. Elle ne pu que se contenter d’écouter en silence. Pas étonnant qu’elle ait sentit en Sydonnie une douleur aussi profonde que la sienne. Elle avait cru alors qu’elle avait toujours été là, et que la disparition de Roland n’en était qu’une révélation.

Mais elle se rendait maintenant compte que l’humanité avait décidé de creuser dans son être et d’y instiller le mal si profondément et récemment qu’elle devait à peine tenir debout sous la douleur qu’elle devait vivre. Elle avait essayé de construire, de donner la vie. Et on lui avait tout pris. Pire, on l’avait rendu responsable. Comme son père qui lui ordonnait de prier chaque fois qu’il…
La haine d’Irène flamba si puissamment en elle qu’elle crut un instant sentir le sol se vitrifier sous elle. Oh oui ce monde et ses coutumes brûlerait, elle en fit à nouveau le serment.
Mais la haine fut noyée, balayée par la peine qu’elle ressentait pour la femme près d’elle. Pas de la pitié, ni de la compassion. Plus une forme de complète injustice.

Elle se redressa sur les genoux, délaissant ses bottes derrière elle pour avancer ainsi jusqu’à Sydonnie. Doucement, sans un mot, sans arrière-pensée, elle passa ses bras derrière la tête de la noiraude qui fixait l’horizon et la pressa contre son buste, caressant doucement sa chevelure de suie avec légèreté.

Ils t’ont menti. Ils t’ont toujours menti, car ils ne savent rien faire d’autre. Ils veulent exactement ce que tu leurs donnes. Ils veulent que tu penses être coupable, ils veulent que tu supportes la peine, la douleur, la solitude. Ils veulent que tu dises que ça n’émane que de toi, car si tu venais à penser l’inverse alors tu verrais qu’ils ne peuvent pas te promettre en retour un amour inconditionnel, une compassion divine, une place dans la voûte. Si tu n’es pas responsable de tout, de quel droit pourraient-ils te juger ? Sois-tu les en remercies, soit tu finis par te jeter du haut d’un mur en espérant une réponse différente. C’est ça le monde qu’ils ont construit. Un monde où la culpabilité est notre seule récompense. »

Elle se recula légèrement pour poser ses mains sur les genoux de Sydonnie.

Peu importe ce que tu en penses, je t’ai vu aimer Roland, assez fort pour en avoir mal. Assez fort pour surmonter tes peurs. C’est lui qui est partit, seul, en foulant au pied les sentiments que tu déroulais sous ses pas. Tu as franchi ma porte il y a des mois, emprunte de doutes et de peurs, mais tu étais là, parce que tu l’aimais. Il t’a abandonné. Ils vous abandonnée toi et ton enfant. Tu as perdu deux êtres chers. Jamais tu n’aurais dû avoir à t’en blâmer. Je crache au visage de tout ceux qui te diront l’inverse, qu’ils soient hommes ou dieux. »

Sa voix avait presque pris un ton de menace à la fin de sa tirade, serrée par l’émotion, elle se sentait pleine de rage pour ceux qui avait amené une mère ayant perdu son enfant et son homme à croire qu’elle puisse en être responsable.
Elle se laissa glisser près d’elle contre la pierre, son épaule contre la sienne. Elle doutait d’avoir vraiment aidée Sydonnie par ses paroles, mais elle avait essayé sincèrement. Essayé de lui faire voir à quel point c’était le monde autour d’elle qui n’avait pas de sens, et pas elle.

Tu n’es pas une héroïne, tu n’es pas une princesse. Tu as été abandonnée par un homme. Et tu as eu le malheur de perdre ton enfant. Tu es la pire mauvaise gagnante à la course que je connaisse. Et peut-être bien que la mort te suit de près. » Elle inspira longuement avant de poursuivre. « Mais rien de tout ça ne te rends moins belle à mes yeux. Car rien de tout ça n’est de ta faute. Cela fait partie de toi, c’est indéniable, mais cela ne t’en rend pas coupable. Peu importe pour les yeux des trois, les yeux de la milice, les yeux du peuple, du clergé.
Tu veux savoir pourquoi je te trouve belle alors que toi-même tu te condamne de laideur ?
»

Elle glissa sa main sous celle de Sydonnie et la serra fortement.

Parce que je sais que cet enfant, que tu le veuilles ou non, tu l’aurais aimé de toute ton âme, car c’est ainsi que tu aimes. Pas a moitié, pas selon des attentes, pas selon une éducation. Malgré ce monde, malgré ta douleur, malgré l'absence de Roland, malgré les jugements. Tu l’aurais juste aimé de tout ton cœur, jusqu’à mourir pour lui, jusqu'à tuer pour lui, jusqu'à te damner aux yeux des trois. C’est ce genre de personne que tu es. C’est cela que je trouve beau. »

Elle libéra la main, sans pour autant ôter la sienne. Juste pour laisser la milicienne libre de toute entrave.
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Sydonnie de RivefièreSergente
Sydonnie de Rivefière



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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptySam 28 Mar 2020 - 21:23


Son cœur avait tremblé, la noiraude avait perçu ce battement hésitant puis vibrant à l’intérieur de sa poitrine, émanant cette douleur si poussée qu’elle avait cru la voir se répandre sous la moindre parcelle de sa peau, sous le moindre de ses membres. Les mots prononcés semblaient se répéter dans une boucle infinie dans son esprit, était-ce la première fois qu’elle formulait cette perte de cette manière si sincère, si brutale. Ses doigts avaient fini par se positionner sur ce bas ventre qui ne contenait plus une once de vie, coupable, coupable, coupable. Coupable de tous les maux, de toutes les pertes, incapables de sauver, coupables de détruire, d’anéantir, de perdre. Elle a perçu les mouvements de la comtesse, à sentie son corps venir contre le sien, ses mains l’ont amené à se retrouver contre elle, contre ce buste qui se soulevait dans ce rythme rapide, bercé par la mélodie d’un cœur qui palpite sans aucun doute trop rapidement pour ne pas être sujet à la moindre émotion. Aucune larme ne vient tracer le moindre chemin sur ses joues, pourtant ses lèvres tremblent de cette manière si visible, si expressive, trahissant cette douleur la rongeant intérieurement. Ses bras viennent s’enrouler dans ce réflexe presque naturel autour du corps si frêle de la noble, émettant cette légère pression, percevoir simplement ce corps contre le sien, savourer un contact presque réconfortant. Était-ce seulement suffisant ?

Sydonnie est présente et ailleurs à la fois, alors que dans son esprit s’enchaînent les mots d’une femme qu’elle ne comprend pas, ou qu’elle ne veut pas comprendre. Le sens des phrases se bouscule, un « ils » omniprésent qu’elle n’identifie pas, ses lèvres se pincent, se tordent dans de légère et futile grimace, alors que ses doigts cherchent le contact d’une peau réconfortante, que la pulpe de ses doigts écrase dans cette douleur agréable. Le tissu est présent, trop présent à son goût, ses sourcils se froncent, alors qu’elle prend une profonde inspiration, percevant sans aucun doute pour la première fois, l’odeur féminine d’Irène. Incapable de comprendre ce qui lui a pris, pourquoi elle a révélé cette information. Soit tu finis par te jeter du haut d’un mur. N’est-ce pas ce qu’elle a fait, son menton se redresse légèrement, son nez aussi, son visage s’extrait de la proximité du buste d’Irène, elle ne comprend pas. L’évocation de Roland provoque cette vague d’amertume, de tristesse, non, elle ne peut pas, ne veut pas l’entendre. On n’abandonne pas sans raison, on ne lâche pas la vie sans raison, il n’y a jamais qu’un seul coupable, la sergente ne peut en être que convaincue. Silencieuse, la femme d’armes n’avait pas su trouver les mots, n’avait pas su trouver la force de lui répondre, peut-être n’y avait-il rien à dire, simplement ?

Elle percevait l’épaule d’Irène contre la sienne, alors que son visage avait fini par se relever que son regard fixait un point imaginaire au loin, au large, qu’elle sentait encore le froid de l’eau sur sa peau, le liquide s’infiltrait dans son corps, l’étouffant, qu’elle revoyait dans ce brouillard aquatique les silhouettes si chères à son cœur. Ce palpitant, le percevait-elle battre dans sa poitrine à ce rythme aléatoire, trop rapide, trop lent, trop hésitant. La colère rongeant son âme n’avait pas disparu, tapie, juste là, au plus profond d’elle-même alors qu’elle pourrait hurler cette rage, hurler cette rancœur, hurler son incompréhension. Fermant les yeux, soupirants, elle perçut la conversation, cette non-héroïne qu’elle était, cette non-princesse qu’elle était, cette non-personne. Personne, elle n’avait envie d’être personne, juste cette feuille à la dérive flottant au grès des vagues jusqu’à sombrer dans les méandres des abysses les plus profonds. Belle. Un mot qui attira une nouvelle fois son attention alors que la paume chaude d’Irène se retrouvait contre la sienne, alors qu’elle pliait légèrement son coupable pour regarder les deux mains féminines unies, alors qu’elle entrelaçait ses doigts dans ce silence de circonstance, qu’elle émettait cette légère pression agréable et désagréable à la fois.

Ses lèvres tremblèrent sans doute plus que de raison, alors qu’elle aurait voulu pouvoir formuler que tout ça n’était pas vrai, qu’elle aurait voulu trouver le courage de réfuter la moindre affirmation. Mais n’était-elle pas cette femme, celle vivant les éléments si forts, trop forts, ne l’avait-elle pas déjà aimé, n’avait-elle pas souhaité sa disparition pour mieux le protéger ? Parce que naître dans un monde en ruine, qui se meurt, n’était pas une vie, parce que vivre en ayant cette crainte de voir les êtres aimés disparaître du jour au lendemain n’était pas une vie. Fallait-il sans aucun doute du courage pour le reconnaître, pour l’accepter. Sa tête vint glisser sur l’épaule d’Irène, alors que les doigts lui échappant furent une nouvelle capturée, alors qu’elle se contenta de laisser ses lèvres se déposer sur cette épaule couverte de tissu, alors avant de simplement s’y reposer un instant les yeux fermés. Parfois, il n’y avait simplement rien à répondre, rien à dire, rien à formuler. La noiraude avait laissé le silence qui n’en était pas un imprégner le duo et le lieu. Le bruit des vagues venant s’abattre sur le sable chaud, le bruit des oiseaux à l’arrière chantant à s’y égosiller la gorge, le bruit du vent soufflant sur le liquide d’un bleu profond et éloignant les quelques nuages venant de temps en temps apporter quelques ombrages. Et puis il y eut cette phrase, cette simple phrase :


- « Il est si simple d’en vouloir aux autres Irène, tellement plus difficile de s’en vouloir à soit même » les yeux toujours fermés, elle poursuivit, inspirant avec cette intensité propre « Plus difficile de détruire que de sauver, plus facile de ne plus croire que de continuer à espérer. »

Détruite, en ruine, anéantie, elle l’était sans aucun doute, sans la moindre erreur possible et pourtant, alors qu’elle creusait encore le trou de sa déchéance, la noiraude ne semblait pas avoir perdu ni la raison, ni la logique, ni son sens du devoir, des responsabilités et surtout…. Son espoir, aussi maigre restait-il, aussi friable était-il, il était encore là, présent.

- « Promet moi de ne jamais cracher sur les dieux où sur les Hommes » murmura-t-elle en redressant légèrement la tête, laissant ses prunelles s’ouvrir sur la mer « Déjà, parce que… ce n’est pas digne d’une comtesse, digne de toi et parce que tu userais ta salive inutilement et qu’il y a de tellement meilleures façons de l’utiliser » s’autorisa-t-elle dans un demi-sourire presque invisible « J’ignore… J’ignore pourquoi les Dieux nous regardent ainsi succomber, j’ignore si j’aime encore mes dieux, j’ignore même si ils ne nous ont tout simplement pas abandonnés, nous et notre laideur, nos erreurs… Mais je ne veux pas te voir renoncer ni même cesser d’espérer, c’est pour ça que je me bats, que j’affronte les créatures, pour laisser une chance à ceux qui ont encore à construire de construire, tu comprends ? » elle fit une légère pause, triturant ses doigts des siens avant de les relâcher « Succomber dans la folie, se perdre, en vouloir au royaume entier, cela ne changera jamais ni le passé, ni le présent, ni l’avenir… Nos dieux sont là, peu importe ce qu’ils font… C’est à nous de prouver que nous sommes dignes de leur aide… Après tout ce qu’ils ont fait pour nous durant des décennies entières, n’est-ce pas lâche de les abandonner alors que pour la première fois, ils ne nous tendent aucune main et d’ailleurs… Qu’est-ce qu’ils nous prouvent qu’ils ne nous tendent aucune main ? Le labret a été repris, ton mari est mort te libérant de tes chaînes, le duc est devenu Roi, des multiples de personnes ont survécu… Alors est-ce qu’ils nous ont vraiment abandonnés ? Je n’en suis pas certaine… C’est juste plus difficile à croire dans certaines situations… »

Elle fait silence un instant, avise l’ensemble, offre un bref sourire. Sa pensée elle ne la partage pas souvent, parce qu’elle à la fois cohérente et incohérente, ne correspond pas toujours avec ses actes, change de couleur en fonction de son émotion du moment.

- « Pardon, Irène, j’ai pourri ta sortie à la mer… Profite donc je ne suis pas certaine qu’elle se reproduira aussi vite. »

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Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



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MessageSujet: Re: Océan et tumultes[ft. Sydonnie]   Océan et tumultes[ft. Sydonnie] EmptyLun 30 Mar 2020 - 6:00
Que dire, la main serre à nouveau la sienne quand elle lui offre une chance de s’échapper, le contact est brutal, mais pourtant sans violence, presque désespérer, alors elle serre les doigts aussi pour assurer de sa présence.
Le silence s’éternise presque, elle regarde les vagues, une tête posée sur son épaule. Leurs gorges sont serrées, mais aucune larme, pas un sanglot ne vient perturber la tranquillité du milieu. C’est un peu leur vie qui se présente en ce moment. Condamnées qu’elles sont à vivre leur tristesse, leurs espoirs en silence tandis que le monde continue de défiler dans cavalcade sans cohérence, à la fois beau et tumultueux comme cet océan. Une merveille aussi profonde et sombre que la mort. Des mots finissent par quitter les lèvres de la noiraude. Pas ceux qu’elle pensait entendre, il la surprenne même. Pourrait la mettre en colère, mais étonnamment prononcé par la milicienne, ils n’éveillent pas la rage habituelle en elle. La bête reste assoupie et lui permet d’entendre sans pourtant être d’accord. Comme si cela pouvait être un sujet à discussion pour une fois.

Je ne pourrais pas te contre dire sur ce point, a ceci près qu’il ne faut pas avoir à se blâmer des actes des autres. Parfois les gens agissent si mal qu’on en vient à se dire que tout détruire s’avère peut-être la seule solution.
Comme un membre trop malade pour être sauver et qui peut tuer le patient. Il faut le trancher à la base, si l’on veut sauver quelque chose.
»

Elle eut plus de mal à accepter le message suivant de sa compagne. Elle pouvait y voir une forme d’espoir qu’elle aurait presque voulu effleurer du doigt par moment. Comme le début d’un autre sentier dans une forêt sombre qui parait plus dégagé que celui que l’on suit. Mais elle ne pouvait accepter qu’on rende hommage aux dieux pour des actes dont seuls les hommes étaient responsables. Elle en fit d’ailleurs part à Sydonnie non sans capturer ses doigts de nouveaux alors qu’elle tentait de lui échapper.

Les dieux n’ont pas fait que mon mari disparaisse, c’est une créature bien plus déterminée qui s’en est chargé. Le duc est devenu roi parce qu’il gère la milice, la distribution de nourriture, et les approvisionnements du Labret. C’est un manipulateur et un ambitieux, mais il est avisé, et la plupart de ses décisions méritent louange. Pas parce qu’il est influencé par les dieux, mais parce qu’il est intelligent. Les dernières décennies ne viennent pas me convaincre de la bonté divine, ni même de sa présence. La fange est brutale, une horreur sans limite, mais elle n’est que la version la plus radicalisée de notre propre déchéance. Nous ne l’avons pas attendue pour nous entretuer, nous haïr, nous rejeter, nous écraser les uns les autres, faire souffrir ceux qu’on aime, ou les voir nous faire souffrir.
Nous avons tous peur aujourd’hui, nous nous battons pour survivre. Tout ce qui change, c’est que pour une fois, c’est toute l’humanité qui est concernée, et que nous ne sommes pas responsables de cette peur chez les autres. Tout ça, je ne vois que la marque des hommes, si dieux il y a encore, je doute grandement qu’ils soient de notre côté.
Je ne peux pas te faire de promesse de ce genre, car je ne sais pas s’il n’est pas déjà trop tard pour moi.
»

Elle pencha légèrement la tête pour observer Sydonnie, et se surpris quand elle rajouta quelque chose à sa tirade. Secouant la tête à la remarque de Sydonnie sur leur possible moment gâché par tout ça.

Tout ce que je peux dire, c’est que quand je suis avec toi, je suis un peu moins certaine que tout est déjà perdu. Car j’ai envie de vivre d’autres moment, même aussi triste que celui-ci. J’ai envie d’avoir d’autres discussions, j’ai envie de te voir sourire, j’ai envie de voir des choses nouvelles, j’ai envie de croire que peut-être, je me trompe. Cela ne représente surement rien pour toi, les élucubrations d’une petite comtesse. Mais pour moi, ce genre de pensée est nouvelle. J’espère l’explorer encore. »

De l’espoir ? C’était ridicule. Rien ne pouvait allez mieux. Rien. Tant que l’homme serait en vie. Car l’homme était mauvais par nature. Que ce soit par la main des dieux ou sa propre volonté, il s’était enraciné dans le mal. Et elle, elle avait une occasion de le détruire. Oui c’est ce qu’elle voulait, ce que la bête tapie en elle l’encourageait à faire depuis des années.
Pourtant elle n’avait pas menti. Sydonnie, d’une manière ou d’une autre arrivait à faire diminuer ce bruit ambiant de haine et de conviction pour laisser émerger des pensées différentes, faibles, presque éphémères, mais bien réelles. Cela la terrorisait, elle s’en rendait compte à présent. Mais pour une fois, cette peur, elle ne voulait pas l’expulser, pas la transformer en colère. Juste voulait-elle la comprendre. Comprendre pourquoi. Pourquoi la femme qui aurait dû haïr le monde autant qu’elle, nourrir ses convictions et damner l’humanité. Qui possédait une noirceur aussi profonde que la sienne. Pourquoi elle parmi tous les autres parvenait à la faire douter. Même en désaccord avec ses paroles, même convaincues de la voir se tromper, elle doutait en sa présence.
Y avait-il vraiment quelque chose à sauver dans l’humanité ? Y avait-il vraiment une chose à sauver dans cette pitoyable créature nommée Irène ?

Viens ! » Dit-elle en se relevant, aidant Sydonnie à faire de même.

Elle l’entraina vers le bord de l’eau en la tirant par la main, un sourire aux lèvres. Malgré leur échange lourd de sens, elle se sentait plus légère. Elles firent face à l’océan infini.

Crie avec moi Sydonnie. Crie pour montrer à ceux qui sont là-haut qu’il y a encore des gens en vie ici-bas. Crie pour te révolter, pour montrer qu’on se bat encore pour vivre. Crions ! »

Elle serra les doigts de Sydonnie qu’elle gardait entre les siens. Elle se sentait plus forte ainsi. Elle hurla. Un cri presque animal, venant du fond de son être. Elle hurla sa peur, sa tristesse, sa haine. Elle hurla pour ses espoirs, elle hurla pour son mari, pour son enfance détruite, pour Jehan et Flore qui l’abandonnaient, elle hurla pour ce jeune soldat qu’elle avait tuée de peur qu’il la rende heureuse. Elle hurla pour l’égoïste Roland et l’enfant perdu de Sydonnie. Elle hurla pour cette cité qu’elle détestait tant. Elle hurla pour ce monde qu’elle croyait perdu. Elle hurla, parce qu’avec Sydonnie, elles n’arrivaient plus à pleurer. Elle avait envie de hurler, et de voir ce qui restait après tout ça.

Le silence ou du moins le bruit des vagues finit par reprendre ses droits et à imposer son ambiance. Irène inspirait profondément pour reprendre de l’air. Elle serrait toujours la main de Sydonnie, mais plus faiblement pour qu’elle puisse ôter ses doigts à sa guise, sans pour autant prendre cette décision pour elle.

Tu es libre ce soir ? J’aimerais te montrer un endroit, et m’occuper de ton dos par la même occasion. Loin de l’esplanade, c’est promis. Mais j’amènerais une ou deux bonnes bouteilles quand même. »

Elle se demanda pourquoi elle faisait ça. Pourquoi montrer cet endroit à Sydonnie. Elle en avait envie. Envie de la revoir. Envie de douter encore.
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