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 Botte secrète et coup de maître - Raimond

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Jacob de RivefièreComte
Jacob de Rivefière



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MessageSujet: Botte secrète et coup de maître - Raimond   Botte secrète et coup de maître - Raimond EmptyDim 9 Aoû 2020 - 1:17
10 août 1166


D'un geste vif, Jacob réajusta le gant de cuir qui recouvrait sa main directrice. La matinée touchait à sa fin. Le soleil, qui dès les première lueurs du jour avait annoncé la chaleur à venir, se trouvait désormais installé au zénith de son empire d'azur. Il était temps de mettre un terme à ce calvaire pour glorieusement retourner à la paperasse entassée sur l'ancien bureau de son père. Ce ne serait pas aujourd'hui qu'il trouverait à engager un autre maître d'armes et même si cette perspective amenait Jacob à la plus évidente des insatisfactions, il ne pourrait rien y changer. Pour autant, il détestait cette idée d'être encore privé d'un digne adversaire, quand ses nouvelles fonctions de Comte ne lui apportaient qu'un lot d'ennuyeuses occupations. Soufflant sa rancoeur par le nez, il se fendit d'un soupir avant de plisser les lèvres.
Son père tout juste décédé et son frère déclaré mort depuis quelques jours avaient laissé retomber sur lui le poids du devoir. Une charge dont il se serait bien passée et qui rendait sa pensée toujours plus chaotique. Jamais l'absence ne s'était faite plus cruelle alors que le manque - celui d'Alys - et la perte de l'Alcyon – étrangement douloureux – achevaient de le mutiler. En proie à ses vieux démons et livré aux caprices d'un Destin gouailleur, il vivait ses anciennes et nouvelles blessures comme d'avides écorchures. Des fêlures qui avaient ancré la douleur à ses yeux et coincé le chagrin dans sa gorge. Ce cocktail d'émotions, assurément imaginé par les Dieux, rendait son humeur aussi instable qu'explosive. Ainsi, son panache bouillonnant nourri de frustrations avait amené la colère à s'épanouir dans ses gestes et cela jusqu'à rendre son escrime vindicative. Une gageure pour ceux qui avaient voulu croiser le fer avec lui et qui s'étaient ainsi heurtés à l'ire d'un fraîchement orphelin accablé de doutes, de craintes, et de remords.

Définitivement mécontent et implacablement déçu de ne pas trouver adversaire à sa taille, le Rivefière restait tendu au point d'en avoir les doigts tremblant. Son agressivité exacerbée par les passes d'armes échangées depuis l'aube, avait amené deux de ses adversaires à jeter l'éponge avant la fin d'un premier tour. Un comble qui l'amenait à sérieusement douter des lettres de recommandation fièrement tendues par ceux venus répondre à l'offre d'emploi récemment proposée. Il cherchait un nouveau partenaire d'entraînement. Un potentiel « Magister » qui saurait remplacer Hugues et lui enseigner ce qu'il était persuadé n'avoir pas encore acquis.
Hugues de Camaris, celui qu'il avait affectueusement surnommé « Barquiel », estimait n'avoir plus rien à lui apprendre. Il aimait à répéter que l'élève avait dépassé le maître, mais omettait de préciser que cela n'était que le fruit d'un événement terrible : l'apparition de la Fange. Si Barquiel n'avait pas été gravement blessé sur le chemin de l'exil, s'il n'avait pas sacrifié son bras pour sauver la vie de son apprenti, Jacob se trouverait toujours incapable de rivaliser avec lui. Alors le Rivefière s'agaçait de l'entendre faire son éloge. Certes, aucun des cinq candidats n'était parvenu à lui tenir tête. Cependant, Jacob en était convaincu, il était bien loin d'être à la hauteur de ce que tous étaient désormais en droit d'attendre de lui.

Serrant dents et mâchoire, il ravala son amertume, avant de tendre le bras pour aider le dernier de ses opposants à se relever. L'espace d'un instant, pendant leur combat, il avait cru devoir changer sa lame de main. Contrairement aux apparences et même s'il savait escrimer des deux mains, Jacob n'était pas droitier, et cette particularité avait souvent eu le don de surprendre les plus habiles duellistes. Cependant, l'espoir de se trouver enfin en difficulté s'était rapidement éteint, quand son adversaire avait engagé les premiers mouvements de la botte d'Ulmar Cernan. Une position de combat impressionnante, mais surtout connue pour son aspect effrayant. Elle menait le bretteur à utiliser une garde très haute et le rendait vulnérable aux attaques sur les flancs, la taille, et les jambes. Le bénéfice tiré de cette posture n'avait de sens qu'en cas de victoire assurée et il n'était pas recommandé de l'utiliser face à un épéiste aguerri. Une erreur presque de débutant. Jacob en conclut que le postulant avait préféré écourter leur échange et s'en trouva d'autant plus agacé. Prêt à laisser filer une remarque acerbe, il fut néanmoins coupé dans son élan par Hugues.

« Merci beaucoup Aymar. Je suis certain que Monsieur le Comte aura apprécié ce petit combat.
- C'est surtout vrai pour moi. Sa Grandeur est très bon épéiste. J'ai eu bien du mal à tenir la cadence. »

Il s'inclina, tandis que Jacob se forçait à sourire.

« Vous vous êtes bien défendu. »

Avançant sur le sol sablonneux de l'arène jusqu'à pouvoir poser son unique main sur l'épaule de son ancien élève, Hugues appela Jacob au calme. Il n'était pas nécessaire d'en dire plus et afficher trop clairement la défaite d'un adversaire tendait vers la basse insolence. Aymar était un ancien bretteur et un maître d'armes reconnu. Ses homologues le considéraient comme une pointure, mais comme tout un chacun, il avait pris de l'âge et les années écoulées n'avaient pas épargné ses articulations. Il n'en demeurait pas moins de bon conseil et savait bien évidemment reconnaître le talent couvant sous la fougue revendicatrice d'un jeune épéiste.

« Margareth va vous raccompagner. J'ai été ravi. »

Le ton était poli, mais un peu sec. Cependant Aymar ne s'en offusqua pas. Comme cela lui avait été annoncé, la domestique l'invita à la suivre et sur une nouvelle inclinaison, il prit congés. Resté seul avec son ancien élève, Hugues attendit un instant avant de reprendre la parole. Il en profita pour imiter Jacob, tandis que ce dernier s'offrait une gorgée d'eau fraîche et laissa son regard parcourir le carré d'entraînement qu'il avait imaginé avec lui. Leur projet n'avait pas obtenu l'aval de la Comtesse douairière. L'idée de voir ses parterres fleuris arrachés et remplacés par une arène de terre battue l'avait même tout particulièrement irritée, mais Jacob était au moins aussi têtu que sa mère. La négociation âprement menée des deux côtés, avait finalement aboutie sur une entente. Jacob avait obtenu son terrain d'entraînement et la douairière avait gardé ses rosiers, ne cédant qu'une partie de ses plantations à l'entreprise de son fils. Le terrain à peine plus petit que ce qu'ils avaient initialement espéré, offrait une bonne emprise au sol. Il avait été complété de quelques mannequins assemblés avec les vieux meubles du grenier. L'un d'entre eux, le ventre gonflé d'un duvet rembourré de paille, avait été pourvu d'une perruque faites de vieilles fripes et tendait ses bras en accoudoirs de fauteuil, comme pour agripper l'inconscient qui s'approcherait trop près de ses doigts en cuillères. Hugues esquissa un sourire en se souvenant que Jacob avait voulu le baptiser du prénom de son aîné.

« Je ne voudrais pas paraître prétentieux, mais.. J'avais raison. » Il annonça cela d'un air presque triomphant. « Ce n'est pas un maître d'armes qu'il te faut trouver, mais un rival. »

D'un regard coulé en direction de son interlocuteur, Jacob l'interrogea non sans ironie.

« Et je suis sûr que tu as déjà trouvé cette perle rare... Hmm ?
- Effectivement.
- Alors tu m'as fait perdre mon temps ce matin ? »

Hugues se mit à rire en voyant le Rivefière froncer les sourcils.

« Oui... Et non. Je te sais suffisamment borné pour refuser de m'écouter sans preuve. Je t'avais dit que tu n'avais plus rien à apprendre de moi ou d'un autre maître d'armes. Tu ne m'as pas cru. Maintenant que tu as pu en faire le constat par toi-même, peut être accepteras-tu d'entendre ma proposition. »

Faisant mine de se trouver ennuyé, Jacob l'invita à continuer son explication, d'un vague geste de la main.

« Ton escrime est bonne, parfaite même. Cependant, elle est trop classique. Dis-toi que si tu es capable de reconnaître bottes et feintes, un adversaire qui aura eu le même entraînement que toi pourra le faire de la même manière. Si tu veux progresser au-delà de ce que j'ai pu t'enseigner, tu dois te mesurer à d'autres guerriers. Des gens qui sauront être au moins aussi efficaces que toi, mais qui ne vont pas s'encombrer de règles et de techniques. 
- En somme, tu me proposes de défier le premier marin venu. »

Secouant la tête, Hugues fit mine de talocher son ancien élève.

«  Vas-tu me laisser finir oui ?!
- Tsah ! »

Il avait souri – enfin - et Barquiel reprit son explication.

« Je te parle d'affronter un vrai combattant. Un homme d'expérience qui a connu la guerre. Un de ceux qui a été au contact dans une mêlée dédiée à Rikni !
- Oui oui... Et ton champion est au courant de tes ambitions ? »

Souriant de toutes ses dents, Hugues opina du chef.

« Il ne devrait plus tarder. Alors prends le temps de te reposer, parce que je parie ma barbe qu'il va te botter le cul ! 
- Tenu. »

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MessageSujet: Re: Botte secrète et coup de maître - Raimond   Botte secrète et coup de maître - Raimond EmptyLun 24 Aoû 2020 - 16:44
Les rayons cléments d'une belle journée perçaient au travers des rideaux froissés et blêmes de la résidence d'Adeilhac. La fenêtre de la chambre de Raimond-Pons donnait sur une petite cours elle même rattachée aux grandes allées de l'Esplanade, mais la beauté du décors si rare en ces temps malheureux ne désorientèrent pas Raimond-Pons qui d'habitude s'accordait à lorgner le grouillement des rues si singulier aux quartiers-nobles. Il se préparait assiduement, après avoir fait ses ablutions dans un sceau d'eau posé sous sa fenêtre il quitta la pièce afin de revêtir son armure au rez-de-chaussée.

Il avait été retenu comme candidat pour prétendre au poste de maître d'arme, une maison influente dont même Raimond-Pons, aussi mal-informé soit-il, avait eut vent voulait s'enticher d'une fine lame. C'est avec une hâte certaine qu'il avait accepté l'offre, lassé de jouer les redresseurs de torts à temps partiel pour les petites gens, bien qu'il en émanait un certain prestige ces activités bienveillantes ne faisaient pas échos à l'esprit belliqueux du baron d'Adeilhac. Il utilisait le grand salon dont il disposait comme un véritable barda où trônait au centre un tabouret brut faisant face à une petite cheminée, sur lequel il s'appuyait pour ne pas tomber à la renverse lorsqu'il ajuste méticuleusement les sangles et cordelettes de sa gambison. Il enfila une paire de braie noirs et d'un habile mouvement de balancier saisit un quartier de viande enveloppé dans un torchon qui était posé sur la tablette de la cheminée avec un canif. Il déposa le morceau sur une poêle et la laissa chauffer au dessus des braises de la veille, sa pauvre notoriété et ses revenus presque inexistant ne lui permettait pas d'avoir de servants et encore moins de cuisiniers. Un mode de vie très austère qui ne l'indisposait pas plus que ça puisque habitué, mais qu'il se gardait de divulguer à quiconque.

Alors que la viande crépitait sur la fonte il s'éloigna de l'âtre et farfouilla dans une grande armoire à l'opposé du feu. Il en retira son haubergeon, son camail et ses deux jambières de maille, soigneusement pliées et empilés les uns sur les autres. Bien qu'il ne s'agissait que d'un entrainement pour se faire valoir, il paraissait naturel pour Raimond-Pons de venir armuré bien qu'après une courte réflexion il se détacha du camail, jugeant plus sage de se montrer à tête découverte surtout lors d'un premier contact avec des gens de haute stature. Une fois avoir bien enfilé sa dernière jambière il coiffa rapidement ses cheveux et sa longue barbe, il engloutit son quartier de viande encore chaud et sortit de son petit manoir en ayant pris soin de s'encombrer de sa rondache.

Ses mailles scintillaient à la manière des filets de pêches matinaux que les marins soulèvent et qui emprisonnent de fines peaux d'eau salée en leur quadrillage faisant miroiter les rayons de la journée au travers. Il claqua la grande porte de sa propriété qui était plantée entre deux grandes fenêtres dont certains carreaux étaient plus mat et jaunis que d'autres, chatouillé par un lierre rampant vigoureux qui finit sa course sinueuse sur les dernières marches du perron usé par d'autres familles avant la sienne. Raimond-Pons en sa qualité de dernier et unique membre de sa lignée s'efforçait de ne pas entrevoir le destin funeste et presque inévitable de cette dernière, sa plus grande crainte étant de s'éteindre sans ne jamais raviver la flamme de ses armoiries. Il voulait y faire face corps et âme, laissant volontiers les moins fier-à-bras se confire et se ratatiner dans leurs résidences, véritable refuges. C'est pour cette raison qu'il ne porte que très peu d'attention à ses biens matériels à l'exception de ceux qui l'accompagnèrent jusqu'ici lorsqu'il dût fuir ses terres.

Le ventre plein et les yeux encore plissé le temps d'apprécier la forte luminosité du plein dehors qui ne faisait pas aussi vivace dans son chez-lui, il s'activa d'un pas fort et décidé après avoir pris soin de fermer le petit portillon qui séparait sa cour extérieure de la rue. Les honnêtes gens et les passants ne se cachaient pas pour dévisager le bonhomme de mailles qui cliquetait nonchalamment arborant un blason aux allures païennes ou pastiches pour certains qui s'apostrophaient à la vue de ce drôle.

Il se moquait bien de ce que les ventres-mous et les tire-au-flanc pouvait persifler derrière son dos, il avait rendez-vous dans l'un des endroits les plus somptueux et mieux préservé de l'Esplanade. Plus il s'avançait dans le quartier noble et plus les bâtisses étaient ornées, bourgeonnant de parures et de bas-reliefs soulignés par des jardins chatoyant délivrant dans l'air des senteurs agréables qui volèrent un sourire nostalgique à Raimond-Pons. Ses yeux attirés par les fulgurances de couleurs se posèrent sur la façade du Manoir Rivefière où il devait se rendre. Il croisa un homme de toute évidence contrarié la tête encore ensablée qui lui souhaita bonne chance d'un ton moqueur tout en suivant son propre chemin, haussant les épaules et trop occupé à scruter la propriété de ses hôtes le baron d'Adeilhac s'avança jusqu'aux grilles délimitant le domaine n'osant y pénétrer de son propre chef. Il pouvait apercevoir plusieurs figures au loin dans ce qui semblait-être une arène d'entrainement aménagée en extérieur, en espérant s'être fait voir à force de bomber le torse il disposa ses mains autour de sa bouche afin de se faire entendre.

Je me présente. Raimond-Pons baron d'Adeilhac pour vous servir, j'ai été convié ici pour affaires !

Penaud et peu à l'aise il passa une main sans sa barbe et réajusta tout ce qu'il pouvait réajuster, la tête haute et la stature confiante. Il ne savait pas vraiment à quoi s'attendre et se trouvait un quelque peu intimidé par la splendeur de ce qu'il lui était donné de voir, mais il restait confiant car en pleine possession de ses capacités. Il était épris d'une ferveur caractérisée par des picotements dermiques comme un bouillonnement intérieur, un élan sain que tout le monde expérimente lorsque son nom sort d'un lot, lorsque l'on gravit un échelon sur un podium ou lorsqu'on triomphe d'un duel. Simplement il avait hâte de prouver sa valeur au combat, bien qu'il ne soit pas maître d'arme de profession et qu'il n'ait jamais pris le temps de développer sa fibre pédagogique il se projetait déjà, peut-être trop, entrain de croiser le fer avec de jeunes lames. Le style de combat de Raimond-Pons diffère désormais avec celui qu'on lui avait enseigné lors de ses plus jeunes années, toujours conscient et adepte des préceptes et des gardes phares de la discipline il ne trouve plus de charme dans l'escrime prude et conventionnelle n'hésitant pas de jouer de sa masse et de ses muscles directement contre son adversaire. Une philosophie plus terre à terre avec les mœurs du moment selon lui, ce qui explique son choix de venir armuré, même si des passes doivent être faite avec des épées d'entrainement il lui est plus agréable de pouvoir donner des coups puissants et violents sans y risquer des fractures inutiles. C'est une façon de faire qui ne convient pas à tout le monde, on en dit que c'est sans manière, que ça manque cruellement de tact, mais c'est bigrement redoutable. La fange ne joue pas selon des règles et ne soucie pas des bonnes manières, les brigands et les coupes-jarrets non plus.
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MessageSujet: Re: Botte secrète et coup de maître - Raimond   Botte secrète et coup de maître - Raimond EmptyJeu 10 Sep 2020 - 21:53
S'il existait une seule règle à ne jamais négliger au cœur de l'Esplanade c'était bien celle qui consistait à strictement respecter les usages imposés par l'Étiquette. Plus que des prescriptions, ces préceptes bien au-delà de la simple recommandation, tenaient de la plus élémentaire leçon de survie. À l'Esplanade, là où se débattait encore le cœur agonisant d'une noblesse sur le déclin, il était essentiel de conserver les apparences intactes. C'était tout un art et un savoir-faire inculqué à l'élite qui, dès son plus jeune âge, devait savoir comment se tenir dignement au-dessus de la masse des ignorants. Une manière de se distinguer des autres et de se reconnaître entre eux, mais qui ne les empêchait pas de se dévorer les uns les autres.
Margareth avait appris cela assez tôt et bien qu'elle ne fût pas de noble naissance, elle connaissait les us et coutumes qui avaient cours dans le beau monde. Oh bien évidemment, ses manières n'avaient jamais eu la même grâce que celle dont les jeunes aristocrates savaient faire montre. Ses révérences n'étaient pas non plus aussi amples et ne pouvaient se targuer d’être aussi profondes. Non, Margareth n'était pas une noble dame, mais elle était au service des Rivefière depuis bien assez de temps pour dire ce qui était ou n'était pas de bon aloi.

Alors quand aux abords de la belle propriété cédée à ses maîtres, elle vit un énergumène piétiner sans vergognes les plus admirables parterres fleuris plantés en décor devant les grilles, son sang ne fit qu'un tour. Bien sûr, elle se doutait que le sauvage venait ici pour participer à l'exercice imaginé par cet excentrique de Barquiel. Cependant et alors qu'elle voyait ses énormes panards écraser les tout jeunes pousses d'églantiers et les roses encore en bouton, elle laissa filer un sifflement colérique, avant d'armer un pas décidé dans sa direction.
Il lui tournait le dos et ne se souciait pas une seule seconde de ce qu'elle pouvait dire de son comportement, alors qu'elle avançait vers lui en agitant les bras. Monsieur était bien trop occupé à ravager les pauvres petites plantes, tandis qu'il se redressait pour voir par-dessus le fer de la clôture forgé en arabesques. Et voilà qu'il plantait ses grosses paluches dans le feuillage touffu des aronias admirablement taillés, pour en écarter les branches et espionner. Un vrai barbare ! Avec sa cotte de mailles rutilante, plus brillante qu'une argenterie fraîchement lustrée et son bout de bois – une espèce de rondache miniature - ornementé d'un vilain cochon poilu, il avait tout l'air d'un drôle... Un malappris à n'en pas douter, ou pire encore... Un manant ! Tout partait décidément à vau-l'eau dans cette cité ! D'autant plus que l'ostrogoth se pavanait ! Dandinant et se balançant d'un pied sur l'autre il bombait le torse.

Ah ! Il pouvait être fier !

Mécontente et fermement décidée à corriger le rustre, Margareth s'arrêta dans son dos pour tendre la main vers son oreille. Elle allait lui apprendre les bonnes manières à ce gredin. Maître d'armes ou pas, il n'était pas question de laisser passer cela. Elle ne faillirait pas et ce n'était très probablement pas un rustaud qui lui ferait peur, fusse-t-il capable de tenir tête à une armée de fangeux entière ! Foi de Ferino ! Il était...

BARON ?!

Écarquillant les yeux, elle laissa filer un plaintif gémissement à l'instant même où ses doigts pincèrent l'oreille du noble. Il avait mis ses mains en porte-voix pour se faire entendre et se présenter ; Raimond-Pons, BARON d'Adeilhac. Par les Trois, le Temple, le Clergé et toutes les saintes pousses de l'univers... Elle était en train de tirer l'oreille à un Baron. Sévèrement et sans la moindre retenue, elle tirait et secouait le petit bout de peau coincé entre la pulpe de ses doigts. Le choc avait même rendu son geste mécanique et comme si elle était en train de corriger le premier garnement venu, elle se livrait à la tâche avec la maîtrise d'une femme de poigne. Anür lui vienne en aide... L'instant lui parut durer une éternité avant qu'elle ne parvienne enfin à lâcher le lobe rougi par l'outrageuse punition.

D'hâlé à presque cuivré, son teint devint blême. Ses yeux, habituellement pétillants, perdirent de leur éclat. Comment trouverait-elle à justifier son emportement ? Éloïse, la Comtesse douairière, ne lui pardonnerait jamais un tel impair. Comment le pourrait-elle ? C'était sans conteste la pire maladresse possible et alors qu'elle s'était imaginée – seulement quelques instants auparavant - triomphante face à un pitaud armé jusqu'aux dents, elle se voyait maintenant affreusement gênée. Penaude, ridicule même, tandis qu'elle marmonnait d'incompréhensibles excuses tout en se fendant d'une révérence si profonde, qu'elle paraissait prête à embrasser le sol.
Bien évidemment et pour ce faire, elle avait relâché l'oreille du Baron d'Adeilhac. D'ailleurs, sa main tremblante tenait à présent les pans de sa robe de domestique. Pourquoi Barquiel ne l'avait-il pas informée ?! Si elle avait su qu'un baron viendrait à se présenter pour le poste de maître d'armes, elle aurait veillé à l'accueillir comme il se doit et n'aurait jamais pris le risque de commettre une telle gaffe. Attendant cependant la sentence en toute humilité, elle laissa son regard glisser sur le côté, là où elle avait entendu quelques pas malmener le gravier de la cour intérieure.

« Monseigneur d'Adeilhac ? » 

La voix d'Hugues de Camaris arracha un soupir de soulagement à la domestique qui n'osait plus bouger.  Elle devina, au bruissement des feuilles d'aronia, qu'il devait - lui aussi - en écarter les branchages pour voir au travers de la barrière végétale. 

« Ah ! Margareth est avec vous ! Venez, elle va vous guider. Monsieur le Comte vous attend et se trouve bien impatient de croiser le fer avec vous ! »

Ledit comte était resté en retrait. La mine soucieuse et le geste toujours nerveux, il continuait de ruminer sa frustration en vérifiant l'état de son équipement. Il était plutôt rudimentaire. Pas de broigne, aucun camail, ni même une cervelière pour protéger la tête du fieffé cabochard qu'il était. Seulement une chemise sur laquelle il avait passé un gambison à l'allure surannée et des chausses au cuir élimé. Un attirail usé, marqué des stigmates d’entraînements et de combats passés qui jurait abominablement avec son physique de jeune homme, ses yeux bleus et ses longs cheveux d'or noués dans un catogan. Seule ombre au portrait du bellâtre, la balafre qui avait entaillé sa joue gauche marquait ses traits d'une once de sauvagerie. Une âpreté qui ne manqua pas de se glisser dans le ton de sa voix..

« Oui ! Que Margareth le conduise ! »

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MessageSujet: Re: Botte secrète et coup de maître - Raimond   Botte secrète et coup de maître - Raimond EmptySam 3 Oct 2020 - 20:09
Une douleur vive et lancinante prit d'assaut le médaillon de chair meurtrit qui n'avait plus d'un lobe d'oreille que le nom. Quel aiguillon empoisonné, quelle queue acérée de chimère pouvait piquer avec tant de ferveur ? Raimond-Pons avait sans nul doute perturbé un insecte butineur fâché de voir ses réserves de nectar réduites en bouillies par ses pieds encombrants, ou alors avait-il embouti la porte sablonneuse d'une colonie de rampants qui se faufilaient dans ses étoffes pour lui en faire payer le prix. D'un geste instinctif que l'on prête à tous les animaux de ferme se faisant grignoter la croupe par des nuées de mouches il porta sa main à son oreille boursouflée. La grimace pénible que dardait son visage se changea en grimace de surprise lorsque le bout de ses doigts caleux se heurtèrent au bombé soyeux d'un ongle, puis à la chair adipeuse de l'extrémité d'un pouce qui pressait toujours l'oreille du baron d'Adeilhac, puis tout ce qui s'en suivait, les doigts, les phalanges, la main et le poignet.

Il se retrouvait avec l'entièreté de sa paluche gauche enroulée fermement autour de l'avant-bras de son agresseur et plongea son regard froid et interrogateur dans le sien. C'était une femme à la fière allure et aux cheveux sombres qui arborait une mine penaude de repentir aussitôt qu'elle avait compris son erreur. Sa moue basse et son peu de fioritures aussi bien dans ses cheveux que sur elle indiquait qu'elle était issue d'un milieu inférieur, probablement une servante ou une intendante étrangement peu renseignée sur qui devait aller et venir dans la propriété. Le sang du baron ne fit qu'un tour. Une femme, véhicule malicieux et perfide de ses maux, bouc-émissaire de ses frustrations. S'il eut fallu que l'Homme et la Femme à l'origine du tout naquissent ensemble sur une même chaine de montagne, l'un comme l'autre auraient vu le jour sur des coteaux parfaitement opposés. C'est ce que pensait le piétineur de fleurs alors que la rage montait à sa tête, si bien que son front et ses pommettes s'empourprèrent s'accordant avec son lobe égratigné. Il était proie à une absence belliqueuse, courroucé et humilié de s'être courbé et d'avoir plissé son visage sous le joug d'un pouce et d'un index.

Mais le regard de repentance qu'il soutenait se changea en celui d'un agnelet et le voile de ténèbres qui se jetait sur les yeux du baron s'atténua. Il affichait désormais le même rictus jaune désolé et après quelque secondes de battement libéra le bras de la servante. Ces péripéties lui faisant presque oublié ce qu'il faisait planté là devant une barrière, il remarqua après un rapide coup d'œil ses chausses crottées et enfoncées dans la terre riche et friable que l'on reconnait aux parterres de fleurs. Il réajusta sa tonsure comme essayant de l'allonger à la manière d'un cache-misère pour cacher celle qu'on lui avait faite puis se pencha pour remettre en vain quelques tiges et pétales en ordre. “Pourvu qu'on ne me fasse pas fouler des carrelages somptueux ou des essences de bois onéreuses” se murmurait-il à lui-même, puis il se tourna complétement devant la servante qui semblait désormais apaisée et comme pour les fleurs il réordonna les manches de cette dernière et épousseta les quelques mèches de jais bâtardes qui passaient sur son front délicat, séparées de sa coiffure lors de l'attaque. Il se redressa comme un piquet et s'écarta d'un pas chassé de la grille, de la terre et des plantes.

Si vous pensiez m'occire du pouce et de l'index comme l'on éteint une chandelle, je recommande de vous y reprendre par trois ou quatre fois ! Je suis de ces cierges oints de graisse animale que même les plus grandes bourrasques ne peuvent réduire au silence, époumonez-vous à essayer vous n'y trouverez jamais triomphe. Les fleurs repoussent et les blessures cicatrisent, mais celle que vous venez à l'instant de m'infliger m'a atteint dans l'orgueil.

Il se voûta en se rapprochant d'elle pour se faire plus discret et lui chuchota rapidement le petit marché qui lui traversa l'esprit, autant disposer de toutes les chances de son côté.

Je ne dirais mot quant à votre accueil pour le moins acéré aux gens de cette Maison sur laquelle vous veillez comme un véritable oiseau de proie. Mais en contrepartie si jamais quelqu'un vous consulte à mon sujet vous ne manquerez sûrement pas de leur parler avec toute la bonhommie du monde de mes bonnes manières et de ma courtoisie sans faille.

Il accompagna sa phrase d'un rictus chaleureux interrompu par monsieur de Camaris qui l'invita à le rejoindre lui et le fameux comte de Rivefière. Il salua très formellement Hughes de Camaris, chassa les évènements récents, et douloureux, de son esprit et se concentra sur ce pourquoi il était là. N'osant pas utiliser sa main comme une ombrelle pour préciser ce qu'il se tramait devant lui alors que le soleil lui tapait dans les yeux, il suivait ses hôtes d'un air strict vers la somptueuse demeure Rivefière dont les latrines devaient sûrement être à elles seule plus richement décorées et apprêtées que l'entièreté de la masure honteuse du baron d'Adeilhac.
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MessageSujet: Re: Botte secrète et coup de maître - Raimond   Botte secrète et coup de maître - Raimond EmptyDim 11 Oct 2020 - 0:26
Toujours gênée, Margareth eut bien du mal à rassembler sa contenance éparpillée aux quatre coins de l’Esplanade. De toute sa carrière et depuis toutes ses années passées au service de la famille Rivefière, jamais elle ne s’était aussi terriblement fourvoyée. Cette bévue, car il était tout bonnement impossible de parler de simple erreur, était l’incontestable fruit des récents événements. Toute la maisonnée avait été chamboulée par la disparition de Roland, le fils modèle et l’héritier parfait. D’autant plus que ce malheur se trouvait précédé d’à peine deux mois par la mort du Seigneur et Maître de la lignée, feu le Comte Wymarc de Rivefière. Cependant, cela ne valait pas excuse suffisante et Margareth avait toutes les peines du monde à seulement relever les yeux vers son interlocuteur.

Ce dernier était devenu tout rouge de colère. Son visage d’une teinte presque cramoisie et entièrement livré à la colère, grimaçait un rictus mauvais. Oh Dieux ! Margareth sentait ses jambes trembler sous ses jupons rien qu’à avoir croisé son regard. Il avait des yeux petits et d’une effrayante noirceur, enchâssés comme des billes sous deux sourcils si fins qu’ils en paraissaient inexistants. Il lui sembla même que son nez exhalait les vapeurs de son emportement, alors qu’il soufflait sa hargne par ses narines dilatées.

Vraiment, Margareth en était certaine, le Baron d’Adeilhac allait lui faire payer très cher le prix de sa méprise.

La tête basse, la domestique riva un œil inquiet sur les bottes crottées de terres. Elles demeuraient plantées dans le parterre qu’elles avaient sauvagement piétiné, affichant sans gêne la marque de leur méfait. Pendue à leurs larges boucles, la triste fleur d’un narcisse avait rendu son dernier souffle, alors que sous les énormes semelles, quelques bourgeons voulaient reprendre un peu d'air. Lui - le Baron - ne semblait pas s'en soucier. Il mit même un instant encore, avant de se rendre compte de son crime et s'il ne bougeait plus, Margareth craignait surtout qu’il ne s’emporte bien au-delà de ce qu’elle pouvait imaginer de pire.

Elle déglutit, imaginant les larges mains aperçues tout à l’heure, s’abattre sur elle et l’agripper. Elle s’inquiétait de ce qu’elles pouvaient lui infliger de blessure – à juste titre – et de toutes les autres punitions qu’il aurait été en droit de réclamer à son endroit. Elle voyait déjà ses maîtres, forcés de réparer l’affront qu’elle avait causé et le souci barrant le front de la douairière à laquelle elle était profondément attachée.

Cependant et contre toute attente, rien ne vint. Ni coup répressif, ni injurieuse remontrance, ni même aucun appel au scandale. Non, le Baron d’Adeilhac se contentait pour l’heure d’aplatir ce que ses cheveux avaient de coupe, pour tenter de recouvrir son oreille malmenée. C’était là l’expression même de la cruauté. Faire durer cette attente déjà interminable qui tenait le condamné devant l’échafaud, pendant que son bourreau en préparait les artefacts. Il allait sévir. Margareth s’en persuadait de plus en plus. Elle s’y préparait et l’observait tandis qu’il se penchait pour…

Mais… Que faisait-il ?

De ses larges paluches indélicates il s’évertuait à effacer les traces de son crime. Espérait-il se voir entièrement disculpé pendant qu’elle porterait seule la faute du quiproquo ? Si c’était là l’espoir qu’il nourrissait en redressant ce qu’il pouvait des jeunes pousses à l’agonie, il pouvait bien s’en éviter la peine. Elle n’était qu’une domestique et n’aurait rien à dire pour sa défense. Son seul droit à la confession lui permettrait peut-être d’affronter son sort dignement. Aussi décemment qu’elle se tenait présentement devant le noble qui la toisait.

Il eut un geste vers elle, mais elle ne bougea pas. La surprise cependant se peignit sur son visage tandis qu’il en vint à réajuster quelques mèches sur son front et la manche de sa mise dérangée. Quel mauvais coup préparait-il ? Parce qu’il était tout simplement impossible qu’il en aille autrement. Le noble devait avoir quelques plans machiavéliques derrière la tête. Elle ne fut donc pas étonnée quand il se pencha vers elle pour lui proposer les termes d’un marché qu’elle ne pouvait refuser. Les Rivefière et leur nouveau Comte avaient bien d’autres choses à gérer déjà, que l’incompétence de leur domestique.

Elle acquiesça donc, silencieuse et seulement soulagée d’avoir entendu les voix d’Hugues puis de Jacob lui enjoindre de mener le visiteur jusqu’à eux.

Après avoir effectué une nouvelle révérence – maintenant que les présentations étaient faites – elle invita le Baron à la suivre tandis qu’elle le menait vers l’entrée principale de la demeure. Il n’était plus question de le faire passer par la petite porte. Il entrerait par le grand hall et aurait ainsi loisir de contempler l’illustre tenture qui y figurait les armoiries familiales. Il pourrait également admirer les marbres ainsi que les bois précieux des sols, et apprécier son reflet dans les hauts miroirs ornementés ou dans les bronzes lustrés. Il serait conduit comme un Prince, jusqu’à pouvoir fouler le sable de ce que les hommes de la maisonnée appelaient le carré d’entraînement. Là, elle le laisserait aux bons soins de ce gredin de Barquiel !

C’est d’ailleurs lui qui les accueillit, tandis qu’ils arrivaient enfin et dans un silence de mort. L’ancien maître d’armes de la famille dont le cheveu gris était devenu de plus en plus blanc au fur et à mesure que les années passaient, salua Raimond avec discipline et respect. Il s’inclina et se dépêcha de faire les présentations, alors que Margareth s’enfuyait sans demander son reste.

« Votre Grandeur ! Voici le Baron Raimond-Pons d’Adeilhac. Je vous ai parlé de lui comme d’un adversaire à votre taille, je ne puis cependant que vous laisser juge. »

Le jeune homme ainsi apostrophé, s’avança d’un pas souple vers le nouvel arrivant. Il n’était pas bien vieux. La vingtaine tout au plus. Pour autant son regard, même souligné de cernes, se faisait le témoin d’un tempérament fort, que ses gestes secs ne venaient pas contredire. Fin et élancé, pour ne pas dire grand, il avait le physique affûté d’un combattant misant principalement sur l’agilité. Sa mine, cependant, lui donné l'air fatigué et ses joues creusées disaient son chagrin récent et réel.
Jacob de Rivefière avait perdu son père et son frère aîné en l’espace de quelques semaines seulement. Un drame et des malheurs que personne n’ignorait à l’Esplanade.

Néanmoins, le nouveau Comte s’efforçait de donner le change.

« Soyez le bienvenu Monsieur. » Il esquissa un sourire et le salua poliment. « Barquiel m’a vendu vos mérites avec force et emphase. Le moins que je puisse en dire, c’est qu’il m’a rendu curieux ! »


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