Quiproquo sur les docks [PV Noah]

Le père de Jehanne n’appréciait pas qu’elle se promène seule dans la ville, encore moins la nuit tombée. Pourtant, après avoir effectué ses corvées et lorsque son père n’avait pas besoin d’elle au service, elle s’accordait quelques escapades à l’extérieur de leur établissement. Elle arpentait les rues du quartier de Bourg-Levant, qu’elle connaissait tant. Toutefois, ce soir, une ruelle en entraînant une autre, elle s’éloignait de cet endroit familier. Ses pas l’entraînèrent jusqu’au port.

La rouquine ne fréquentait la zone portuaire que très rarement. Son père, quant à lui, s’y rendait souvent, pour ses échanges commerciaux. Il avait de très bons contacts parmi les pêcheurs du coin, il parvenait à avoir des produits frais et de très bonne qualité, pour la Biche Rieuse. Certains de ses plats à base de poisson, étaient réputés dans le quartier. Puis, avec les temps difficiles pour la chasse et donc la viande, le poisson faisait très bien l’affaire.

Le port n’était plus celui qu’elle avait connu plus jeune. Il était toujours animé, l’activité de pêche étant très importante à Marbrume, encore plus depuis la Fange. Mais il était plus sale, plus sombre. La peur s’y faisait sentir, masquant presque cette sinistre odeur de poisson. Odeur qui prenait aux tripes, mélangée à la crasse, il ne fallait pas se mentir. Qu’est-ce qu’une jeune fille faisait ici, le soir… Sa curiosité était-elle si forte, qu’elle la poussait à se mettre en danger.

Loin de l’effervescence de la journée, le lieu était lugubrement calme. Elle ne comptait pas s’éterniser. Prête à tourner les talons, elle entendit des voix non loin. Elle s’approcha doucement, posa ses mains sur les murs et pencha légèrement la tête. Cachée derrière une des petites bicoques du quartier, qui faisait l’angle, elle comptait observer discrètement les inconnus, connaître leur discussion. Elle trouvait tout cela bien excitant, elle s’inventait une aventure, où elle serait une espionne en quête d’indices… Elle souriait toute seule de son imagination débordante. Il s’agissait de deux hommes, vêtus de tenues très sombres, un des deux avait le visage masqué, le deuxième lui tournait le dos, impossible de voir les visages et donc, éventuellement les reconnaître. Il parlait de collier, ils ricanaient et semblaient faire une transaction louche. Des voleurs ou des escrocs, ce qui expliquerait le masque. L’aubergiste pensait à la pauvre victime de ces hommes malhonnêtes. Peut-être ce collier était celui d’une femme esseulée, que son homme lui avait offert en cadeau de mariage, peu de temps avant de mourir… Oui, Jehanne se plaisait à imaginer des histoires, cela faisait partie de son travail d’apprentie détective imaginaire.

Ainsi, perdue encore une fois dans ses pensées, elle ne prit pas la peine de se cacher et fut surprise par le regard de l’homme en face d’elle. Malheur, prise de panique, elle tourna les talons sans demander son reste et se mit à courir à toute vitesse.

« Hé la rouquine, reviens par là ! » L’homme avec le masque était à ses trousses. l’autre avait certainement pris la poudre d’escampette. Elle n’avait pas vu son visage, il ne risquait rien. Et en tant qu’escroc, il souhaitait retourner à l’abri avec son butin.

Elle courrait, le plus rapidement qu’elle le pouvait, elle tourna dans une ruelle. Le virage était sec et elle évita de justesse un tonneau posé là. Le voleur n’eut pas la même chance qu’elle, il courrait encore plus vite qu’elle et souhaitait ardemment l’ attraper, pour s’amuser un peu sans doute. Il prit le tonneau de plein fouet, celui-ci renversa tout son contenu et roula sur l’homme déjà à terre. Suite à tout ce fracas, Jehanne osa se retourner, puis vit la scène. Elle stoppa alors sa course, comprenant ce qu’il venait de se passer. Elle approcha, très lentement, ayant peur que l’homme en noir se relève. Tout doucement, elle faisait les derniers pas qui l’éloignait de l’homme. Elle approcha sa main, dans le but de démasquer son visage, lorsque celui-ci lui attrapa fermement le poignet. Elle ne put retenir un petit cri de stupéfaction. Par réflexe, elle tenta de se dégager, tout en cherchant de l’autre main un quelconque objet. Dès qu’elle eut quelque chose en main, elle le frappa avec au visage, de toutes ses forces. Ce qui semblait être un morceau de bois, avait fait mouche ! Le voleur était assommé, pas prêt de se relever. Elle émit un léger soupir de soulagement et aperçut un objet brillant, en se relevant. Le fameux collier ! Elle le prit, sans réfléchir plus loin, bien décidée à ce que l’objet retrouve le cou de sa propriétaire. Puis elle repartit, collier en main, en courant, dans le but de quitter le port.