Apollin, Un sac vide ne tient pas debout!
◈ Identité ◈
Nom : (de) Fierchant d’Ocreval
Prénom : Apollin
Age : 52
Sexe : Masculin
Situation : Veuf
Rang : Noble natif, Baron d’Ocreval
Héraldique : D’Azur à trois chevrons d’Or, sommés d’un huchet d’Or.
Lieu de vie : L’Esplanade
Carrière envisagée & tableau de départ avec les 4 PCs : Voie du Noble Mondain
+2 INT et +2 CHA
Compétences et objets choisis : (voir topic Système Rp & Xp - Compétences)Compétences :
- Diplomatie - Niveau 1
- Discernement - Niveau 1
- Eloquence - Niveau 1
- Etiquette - Niveau 1
- Alphabétisation – Niveau 1
Objets :
- De riches vêtements faits de brocarts et de soie
- Une épée longue d’apparat
- Une canne ornementée
◈ Apparence ◈
Si l’on murmure qu’Apollin de Fierchant aurait bien porté son prénom dans sa prime jeunesse, bon nombre de personnes l’ayant côtoyé depuis de nombreuses années assureraient à qui veut bien les entendre avoir toujours connu le baron bien portant, voire d’une corpulence bien supérieure à la moyenne, à en faire rougir plus d’un prêtre de Sérus. Façonné par des décennies de bonne chère, le seigneur d’Ocreval dépasse bien le quintal, malgré les années écoulées plus maigres. Son visage rougeaud ne détrompera en rien cet aspect de bon mangeur, centré sur un nez épaté, surmontant une fine moustache savamment taillée, le tout participant à lui donner cette impression de bonhommie qu’il cultive activement afin de paraître un peu moins habile orateur qu’il ne l’est et emporter des négociations qui apparaissaient négligemment entamées autour d’une bouteille de vin.
Veillant à être bien vêtu en toute circonstance, en portant des brocarts brodés d’or et d’argent issus de ses ateliers, le baron se fait vitrine du savoir-faire de ses artisans, afin d’attiser toujours plus l’avidité du milieu mondain pour les beaux atours et favoriser ainsi l’achat compulsif afin de préserver le paraître à la cour royale.
Malmené par des crises de podagre à répétition, et une arthrose conséquente du fait de son embonpoint, Apollin se déplace en toute occasion en s’appuyant sur une canne richement ouvragée, tout en gardant à la ceinture en signe de son rang une épée d’apparat, aussi belle qu’elle lui serait d’une utilité toute relative en main.
◈ Personnalité ◈
Sous des derrières affables et débonnaires, Apollin est fin calculateur, et réfléchit toujours à son profit ainsi qu'à la préservation de sa famille, qui a un intérêt capital pour lui.
N'étant pas cruel par nature, il pourra pourtant être amené à prendre des mesures drastiques au nom de la préservation de sa famille, ou face à quelqu’un qui mettrait en péril la sécurité de la cité. Pour autant, en affaires, il saura toujours préserver la fierté de ses interlocuteurs, veillant toujours à ne pas dépasser les limites de l’indécence dans ses transactions face à la forte demande de soie.
Sa loyauté va bien plus à sa famille qu’à la ville, ou à un royaume en ruines, mais Apollin a bien conscience de l’importance de préserver les apparences afin de ne pas servir de bouc-émissaire valable, ainsi que de l’importance de se rendre indispensable, raison pour laquelle il a toujours veillé à participer à l’effort de guerre. A force de côtoyer ses semblables, le baron a pris l’habitude de catégoriser les aristocrates en deux groupes bien distincts : les hédonistes et les pragmatiques. Et s’il peut comprendre le désir d’évasion des premiers, encore plus en ces temps troublés, amateur de bonne chère qu’il est, il ne peut s’empêcher de regarder avec amertume les plus inconscients qui longtemps se sont complus dans cette attitude, et ont semblé tomber des nues face aux mesures prises par le Duc désormais couronné. Et il éprouve de fait un profond respect pour le Roi Sigfroi de Sylvrur, dont il appuie fidèlement la lutte contre les Fangeux, ainsi que ses mesures aussi drastiques soient-elles allant en ce sens.
Car s’il est un sujet qui peut mettre l’affable Apollin hors de lui, c’est bien la Fange. Il exècre les Fangeux qui lui ont dérobé une partie de sa famille, autre raison pour laquelle il finance l’effort de guerre du Roi et de la Milice. Il reste par ailleurs très protecteur envers les survivants de sa maisonnée. En de rares occasions, on pourra le trouver mélancolique en privé, généralement lorsqu’il se sera retiré dans ses appartements, seul, et se permettra de repenser aux êtres aimés dont ces dernières années l’ont privé.
Si Apollin est un fervent croyant en la Trinité, les événements des dernières années ont néanmoins été difficiles à appréhender d'un point de vue religieux, le baron cherchant encore parfois dans la prière et l'échange avec des prêtres un sens, aussi ténu soit-il, à ces pertes répétées.
◈ Histoire ◈
Apollin vit le jour au sein de la famille Fierchant d’Ocreval en une froide nuit de novembre 1113, sur les terres familiales, au sud de Marbrume. Son père, Cassien, baron d’Ocreval, avait épousé Odile de Colnet la fille d’un baron voisin, l’année précédente, et eut l’agréable surprise d’obtenir un héritier mâle plus rapidement qu’il ne l’avait escompté au sein de ce mariage éminemment politique, décidé peu après leurs naissances respectives bien des années auparavant. Le seigneur en conçut une certaine fierté, ainsi qu’une forme de reconnaissance et d’attachement envers son épouse, qu’il connaissait encore bien peu après une année de vie commune, tout occupé qu’il était à gérer ses terres, ses gens, ainsi qu’à s’adonner à son passe-temps favori : la chasse.
La naissance du bambin vit ainsi s’adoucir les relations entre les époux, le baron s’impliquant désormais plus au sein de son couple, et veillant à s’appuyer sur des tuteurs compétents pour l’éducation de son héritier. Les terres d’Ocreval, fertiles et d’un climat plutôt sec et tempéré, étaient propices à la culture, et plantées de nombreux vergers. La baronne d’Ocreval, alors que le petit Apollin commençait à peine à marcher, se prit d’intérêt pour un nouveau domaine, la sériciculture, et décider d’en tester l’implantation sur une petite parcelle de la baronnie, au sein de laquelle poussaient des mûriers. L’import de vers à soie ne fût pas une mince affaire, les fragiles créatures supportant difficilement les longs voyages, mais après une paire d’années à s’entourer d’ouvriers compétents et veiller à la bonne implantation des vers, la production de soie sur le domaine put commencer. Apollin grandit donc en même temps que la sériciculture sur les terres familiales, suivant sa mère dès son plus jeune âge dans la mise en route de cette culture, sous le regard bienveillant du baron. Bientôt la production devint suffisante pour pouvoir ouvrir un atelier de filage et de teinture, et commencer à vendre les premières toiles aux maisonnées voisines, à la grande satisfaction d’Odile de Fierchant.
Le jeune héritier grandit donc sans autre préoccupation que son prochain repas, acquérant néanmoins très tôt une certaine fascination pour la production de soie depuis l’élevage des vers jusqu’au tissage de la toile. La famille s’agrandit bientôt, lorsqu’après deux fausses couches Odile donna naissance en 1117 à un second fils, Bélanger. Les années passèrent, et la fratrie ne connut pas de nouvelle arrivée, malgré les multiples tentatives infructueuses du couple. Les deux frères grandirent de manière diamétralement opposée. Si Bélanger poussa rapidement, devenant athlétique et filiforme, il n’en fût pas de même pour son aîné, qui gagna très tôt un certain embonpoint dont il ne sût se départir malgré tous les remontrances de ses tuteurs et parents : le jeune homme aimait la bonne chère, et ne s’en cachait pas.
Sous ce physique charnu, Apollin développa une personnalité très amène et un esprit affûté, passant le plus clair de son temps en lectures diverses pour satisfaire un insatiable appétit de connaissances. S’il participait toujours aux passes d’armes quotidiennes imposées par le maître d’armes du domaine en présence de son frère, le jeune ne s’épanouissait jamais autant qu’en société à deviser de sujets divers et variés, faisant la fierté de sa mère. Pour autant, malgré tout son bon vouloir, le caractère pataud de son escrime navrait d’autant plus son paternel que la maison était issue d’une longue lignée guerrière, et avait acquis ses lettres de noblesse autant que son nom de Fierchant sur le champ de bataille, où ses ancêtres avaient pris l’habitude d’entonner un hymne pour rallier les troupes à eux et les galvaniser.
Pour autant la parole aisée de l’héritier d’Ocreval rendit service plus d’une fois au baron lors de tractations avec d’autres maisonnées, le jeune noble camouflant sous des airs débonnaires un œil avisé et un sens aigu du détail. C’est ainsi que la famille acquit en 1129 un hôtel particulier dans les beaux quartiers de Marbrume, Cassien de Fierchant profitant du commerce florissant de la soie dans le duché pour développer ses possessions, et se doter d’un pied-à-terre à proximité de la cour du Duc, afin de développer des relations avec d’autres maisonnées que leurs seuls voisins. La soie d’Ocreval commença alors à faire son entrée à la cour du Duc, au plus grand plaisir du baron et de sa famille.
L’année 1130 fût faste, marquant l’union d’Apollin avec Ugoline d’Audéac, la fille d’un baron installé en Marbrume et ayant ses entrées à la cour. Cette union fit la fierté de ses parents, tant ils estimaient qu’elle avait un impact politique pour le futur de la famille, aussi modeste soit-il en réalité. Et la dot qui l’accompagnait n’était pas des moindres, comptant entre autres une petite parcelle agricole au sein du plateau du Labret, au nord-ouest du duché, que la jeune femme appréciait particulièrement. Parcelle très limitée, pour tout dire, englobant quelques arpents de terres et un hameau, mais dont le climat clément avait tout de suite donné des idées à la baronne et à son aîné, qui envisageaient d’y faire planter des mûriers, afin de préparer le futur.
Le mariage d’Apollin et Ugoline sembla dans un premier temps plutôt plat, le caractère effacé de la mariée n’aidant pas à tirer l’héritier d’Ocreval de ses ouvrages et discussions mondaines, le jeune homme paraissant bien moins à l’aise avec son épouse qu’il ne le paraissait en société, se montrant même parfois fuyant eu égard à ses devoirs conjugaux, et il commença bientôt à se murmurer nombre de rumeurs sur ses lubies et son incapacité probable à faire perdurer la maison de Fierchant dans le temps. Rumeurs qui furent par la suite démenties, lorsqu’Ugoline annonça attendre un heureux événement, s’affichant par la suite régulièrement au bras de son mari à la cour, tous deux radieux.
Le tournant dans leur relation fût du fait de la jeune femme, qui prit le temps de cerner la personnalité absorbée d’Apollin, et de distinguer son attachement profond aux projets de sa mère concernant la sériciculture. Dès lors qu’Ugoline fit mine de s’y intéresser, son époux devint intarissable sur le sujet, lui exposant la complexité de cet élevage, la fragilité des vers à soie, mais également la finesse de la toile obtenue, ainsi que l’ouverture récente d’un atelier de tissage dans les faubourgs de Marbrume dans l’idée d’une meilleure réactivité lors des commandes venant de nobles de la cour pour des toiles filées de motifs particuliers. Les époux en vinrent ainsi à s’investir conjointement dans le projet, passant plus de temps ensemble, et apprenant bien mieux à se découvrir en quelques semaines qu’ils ne l’avaient fait au cours des huit saisons précédentes.
C’est ainsi qu’au printemps 1133 vint au monde l’aîné de leur descendance, Valère, alors que la ferme du Labret balbutiait également sa production, alors bien plus limitée que celle d’Ocreval, tant du fait des différences climatiques que de l’étendue plus limitée des terres disponibles, qui avaient peu à peu rogné sur les vastes vergers du fief familial. L’année suivante vit la naissance de leur cadette, Hermeline, au cœur de l’hiver, mais également le trépas d’Odile, brutalement emportée au cours d’une épidémie de pneumonie. Perdre sa mère affecta fortement le jeune noble. La relation probablement inhabituelle qu’il entretenait avec elle du fait de leur passion commune avait nourri le caractère doux et rêveur du garçon devenu adulte, parfois au grand dam de son père, qui n’en manquait pas moins de lui inculquer la gestion du domaine, et reportait son désir de prouesses martiales sur son cadet. Ainsi, au lieu de resserrer les liens avec son père, cet événement rapprocha encore plus l’héritier Fierchant de son épouse, qui avait vu de son côté parents et fratrie foudroyés par cette même congestion pulmonaire sans qu’aucun mire du domaine n’ait rien pu faire pour eux.
Ce rude hiver 1134 entacha durablement le caractère joyeux et rêveur d’Apollin, laissant filtrer progressivement au cours des mois suivants un certain cynisme que sa femme eut grand mal à museler au cours des années suivantes. Voir grandir leurs enfants permit à l’héritier de la baronnie d’Ocreval de se recentrer sur sa famille et leurs propriétés, dans une volonté bien pragmatique d’assurer la pérennité de la famille, tant sur le plan financier que politique. Le premier plan permettant de servir de support au développement du second, avec l’organisation de nombre de dîners mondains et réceptions afin de développer le réseau de connaissances et d’acheteurs de soieries de la famille au nom de son père le baron d’Ocreval. Ces mémorables ripailles se multiplièrent donc au fur et à mesure des années, amenant l’embonpoint de l’héritier Fierchant à se développer à mesure qu’elles se succédaient.
Les années passèrent, marquées tant par la ferme implantation de la famille de Fierchant dans le commerce local de la soie, permettant à mesure de limiter les importations hors de prix venues d’autres régions, et d’installer petit à petit la réputation des toiles de soie au sein de l’aristocratie de la cour marbrumienne et des environs. Dans le même temps, Valère et Hermeline virent leur fratrie s’agrandir, avec l’arrivée successive de Foulques, d’Iphigénie puis du benjamin Loric, ce dernier voyant le jour à l’automne 1148. L’allégresse accompagnant la naissance du dernier-né fût néanmoins teintée d’une amertume immense, puisque l’épouse d’Apollin, Ugoline, ne s’en remit pas, rejoignant les Trois quelques jours plus tard, des suites d’une forte fièvre survenue en couches alors même qu’elle était déjà exténuée.
Laissant aux bons soins des précepteurs de la famille l’éducation de ses enfants, Apollin se mura une fois de plus dans les tractations et la gestion du domaine familial, créant une certaine distance avec les plus jeunes de ses enfants, plus marquée qu’avec les plus âgés. Ceci se renforça d’autant plus après que son père Cassien mourût à son tour l’hiver suivant, amenant le nouveau baron à prendre officiellement sa place, ainsi que l’entièreté des tâches incombant à cette charge.
Les années qui suivirent furent donc marquées par une forte expansion du commerce de la soie et des champs de mûriers, tant sur le domaine d’Ocreval que sur la parcelle du Labret, afin d’optimiser l’élevage de bombyx muri, en vue d’ouvrir d’autres ateliers et de former de nouveaux tisserands à des techniques de filage toujours plus raffinées. Ceci permit à Apollin de conserver à ses côtés des tuteurs compétents pour ses enfants, les formant ainsi pleinement tant à l’étiquette qu’aux arts politiques, martiaux, ou encore à la religion, afin de vénérer les Trois comme il se doit.
Le mariage d’Hermeline au sein de la noblesse marbrumienne en 1152 fût un véritable choc pour le baron d’Ocreval, et s’il avait participé tout du long aux tractations, réalisant bien le pendant politique d’une telle union, ainsi que la constitution de la dot, le père de famille ne réalisa que mis devant le fait accompli l’emménagement de sa fille au sein de sa nouvelle famille, et la place vacante qu’elle avait par la même occasion laissée au sein de la demeure familiale. Place vacante où, par certains côtés, la jeune femme avait compensé plusieurs années durant la disparition d’Ugoline, stabilisant par sa douceur et son calme une fratrie bien meurtrie par ce décès, tout comme la distance inconsciemment créée par un paternel plongé corps et âme dans l’administration de son fief et l’éducation de son aîné à prendre sa suite.
Le déséquilibre familial entraîné par le départ de sa fille laissa pendant un temps Apollin décontenancé, devant les frasques soudaines de ses enfants les plus jeunes, jusqu’alors bien canalisés par la jeune femme. De longs mois et de constants efforts furent alors nécessaire au patriarche afin de pouvoir ramener un semblant de sérénité au sein de la maisonnée. Equilibre qui fût mis à mal avec le mariage de Valère, et l’arrivée de son épouse au domaine, puis le départ d’Iphigénie quelques années plus tard pour un domaine voisin. Si les affaires familiales étaient désormais bien huilées, permettant au baron de déléguer certaines tâches à des employés de confiance, et lui permettant ainsi de se concentrer sur les négociations avec les autres maisonnées nobles, au cours de réceptions et dîners fastes, faire ainsi bonne chère de manière répétée signa le début de douloureux désagréments pour le baron d’Ocreval, qui comment à souffrir terriblement du pied droit un beau matin de printemps 1157. Consultant nombre de mires itinérants, peu efficaces dans leurs remèdes prescrits, Fierchant dût se résoudre à gagner son pied-à-terre marbrumien afin de consulter des praticiens plus expérimentés, jusqu’à ce que l’un d’eux ne finisse par identifier une première crise de podagre, liée à un train de vie trop fastueux. Train de vie, il va sans dire, qu’Apollin n’était pas prêt à réduire, aussi accepta-t-il la proposition « radicale » vantée par le mire d’une cure de décoctions de colchiques pendant plusieurs jours jusqu’à régression du mal. Cure qui se révéla il est vrai fort efficace, mais ne fût pas sans lui provoquer de sévères désagréments digestifs, qui entraînèrent une convalescence de plusieurs jours, où le baron prit alors cruellement conscience de sa solitude, Foulques et Loric étant restés aux côtés de son aîné Valère afin de l’aider dans la gestion du domaine pour le premier, de rester sous sa surveillance pour le second.
Dès lors, le seigneur d’Ocreval reprit ses tractations politiques en vue de trouver une épouse pour lui-même en même temps qu’il cherchait à marier son fils cadet Foulques. Et ce fût à peu de choses près à la même période, à l’automne 1157, qu’il trouva une prétendante satisfaisante, tant pour son fils que pour lui. De plus de vingt ans sa cadette, Lauriane de Monceaux était un parti avantageux tant de par sa dot honorable que de par l’influence que pouvaient avoir ses parents sur une partie des nobles de la région, ouvrant la perspective de proposer ses soieries à toujours plus d’aristocrates. Si la jeune femme, dernière-née de sa famille, avait manifestement placé bien peu d’attentes en ce mariage éminemment politique, Apollin œuvra assidûment à se montrer aimable et avenant auprès de sa nouvelle épouse une fois le mariage passé, dans un désir un peu irréaliste de retrouver l’entente presque fusionnelle qu’il avait pu partager avec sa première épouse Ugoline.
Si les premiers mois de tels efforts furent peu fructueux, un véritable fossé séparant l’imposant baron de sa jeune épouse, qui passait le plus clair de son temps en prière au sein de la vétuste chapelle du domaine, Fierchant s’employa à façonner patiemment une passerelle ténue entre leurs deux êtres, qui prit la forme d’une nouvelle chapelle, aux bas-reliefs richement ouvragés à la gloire des Trois. Si ce chantier contenta grandement le prêtre local officiant sur ses terres, il permit également de briser la glace entre les deux époux, ce premier pas fait par le baron d’Ocreval permettant de créer un terrain de discussion à mesure des travaux, et des suggestions de Lauriane, qu’Apollin s’appliquait à faire appliquer au mieux. Et si ce rapprochement resta long et laborieux, sa nouvelle épouse souffrant régulièrement de petites remarques de la maisonnée la comparant à la défunte Ugoline, le couple prit la décision de venir plus régulièrement séjourner à Marbrume afin de s’extraire d’un domaine où nombres détails rappelaient à tout instant la présence passée de sa première épouse. Les deux nobles commencèrent ensuite à s’afficher occasionnellement à la cour, là où la multiplicité des ragots à leur sujet avait été le plus rude à supporter pour la jeune femme auparavant, et amené le baron à une discrétion sur le plan politique de longs mois durant.
Cette dimension religieuse plus marquée de la nouvelle baronne d’Ocreval sembla amener de nouvelles opportunités à son mari, fournissant des toiles de soie fort ouvragées à certains dignitaires du Temple à mesure que la jeune femme s’épanouissait en société. Et l’affection qui se forgea progressivement entre les deux époux, à mesure que le mur entre eux deux se brisait, aboutit même contre toute attente à la naissance de jumeaux à l’été 1160, qu’ils prénommèrent Eudes et Garance. Nombre de rumeurs eurent pendant quelques temps cours à la cour ducale, d’autant plus alors qu’Apollin, cloué au lit par une nouvelle crise de podagre, s’était temporairement éloigné des mondanités usuelles, en confiant la charge à son aîné, Valère, qui l’accompagnait depuis plusieurs années désormais afin de le préparer à prendre sa suite. Satisfait de la tournure des événements, le baron d’Ocreval commença une fois remis à déléguer d’autres tâches à son héritier, profitant du temps dégagé pour prendre une part dans l’éducation de ses autres enfants, bien plus qu’il ne l’avait fait au cours des années précédentes, sélectionnant avec soin le futur époux d’Iphigénie, désormais en âge de se marier, et qu’il œuvra à unir au fils du Baronnet d’Auguenas, vivant à l’ouest du Duché, dont le réseau de connaissances lui serait utile dans le développement de voies commerciales.
Lorsque les rumeurs autour de monstres s’en prenant à la populace à l’ouest arrivèrent à ses oreilles, à l’aube de l’été 1164, Apollin n’y fit au départ guère attention, certain qu’il ne s’agissait que de nouvelle fariboles et billevesées inventées pour faire peur aux garnements. Il prit le chemin de Marbrume, accompagné de Loric, afin de vaquer à ses obligations mondaines, laissant son aîné administrer leur domaine épaulé par son cadet Foulques, et son épouse diriger les travaux bientôt terminés de la nouvelle chapelle. Et bientôt tout bascula. La nouvelle de la chute d’Auguenas et du massacre de tous ses habitants sans exception vint à la connaissance du baron au gré de l’arrivée massive de migrants venus de l’ouest, qui ne put que pleurer sa fille disparue. Le seigneur d’Ocreval envoya alors en toute hâte des gardes rapatrier le reste de sa famille vers Marbrume, effrayé à l’idée que l’avancée de cette « Fange » ne gagne bientôt Ocreval. Les jours passèrent, lui semblant durer une éternité alors qu’il restait sans nouvelle des siens à l’exception du jeune Loric qui était à ses côtés. Bien que rongé d’inquiétude, Apollin eut la présence d’esprit d’envoyer des serviteurs récupérer à la ferme du Labret et dans les ateliers des faubourgs les différentes toiles de soie tissées pour les entreposer au sein du manoir, à l’abri des murs de la cité. L’intendant de la ferme eût même la présence d’esprit d’emporter avec lui une partie des œufs de bombyx déjà pondus par les individus adultes en cours de récolte, afin d’envisager l’hivernage.
Le mois d’août 1164 fût des plus longs pour le baron, et lorsqu’enfin le convoi d’Ocreval arriva le patriarche ne put que constater la mine défaite des survivants, ainsi que leur nombre limité. Blanc comme un linge, il ne put qu’écouter impuissant le récit que lui fit son aîné des événements des jours précédents, alors qu’il énumérait les yeux voilés, comme éteint, la populace en ébullition, provoquant des émeutes par endroits, des vols, une instabilité globale, et… les Fangeux. La première évocation de ce terme par son fils fût d’ailleurs pour décrire la scène intenable de l’invasion du domaine par les vergers et l’assaut de la chapelle isolée, les cris de ses occupants, et une tentative de sauvetage qui se solda par de lourdes pertes sans résultats malgré tout, face à la sauvagerie et la puissance des créatures. Et finalement, une fuite désordonnée, où les survivants se regroupèrent à mesure qu’ils faisaient route en direction la capitale du Morguestanc, et arrivèrent donc ensemble à l’hôtel particulier familial de l’Esplanade. Apollin mit quelques instants suite à ce récit pour réaliser l’implication de ces propos… avant de constater, impuissant, que ni son épouse ni Eudes n’étaient entrés dans la résidence le temps de ces explications. La petite Garance pour sa part semblait comme une coquille vide, inexpressive, aréactive, réagissant à peine aux stimuli de manière automatique. Les victimes étaient nombreuses, tant parmi le personnel que la famille, Valère avait de la même manière vu périr sa femme et ses enfants, également réfugiés dans la chapelle, sans aucune chance de les sauver, et n’avait dû son salut qu’au sacrifice d’une bonne partie de leurs gardes pour escorter en toute hâte les survivants vers l’écurie et atteler une carriole tant bien que mal.
Anéanti, le baron pleura longuement la perte des membres de sa famille dans l’intimité familiale, organisant une veillée funèbre qui se poursuivit pendant plusieurs jours, limitant fortement ses interactions avec le reste de l’aristocratie. Aucun au sein de la maisonnée ne fût d’humeur pour participer aux réceptions qui se poursuivaient sur l’esplanade au cours des semaines qui suivirent. Et lorsque Valère, encore marqué par le deuil familial, décida au nom de la famille de s’engager aux côtés du Roy qui levait le ban et l’arrière-ban dans une croisade contre l’horreur qui assaillait le royaume de toute part, le baron ne put trouver les mots pour le retenir, faisant face à une détermination morbide mais sans faille, et ne put que se résoudre à lui faire ses adieux, avec le douloureux sentiment de perdre son héritier. Sentiment qui se vérifia malheureusement dès les premières nouvelles de la déroute royale. Accablés par ce deuil supplémentaire, Apollin et son entourage ne furent donc pas aux premières loges au cours de l’affaire de Sarosse, le mois suivant, mais des éléments qu’il en recueillit, le seigneur d’Ocreval se prononça plus d’une fois par la suite en public en faveur de la décision ducale, qui avait pour lui préservé l’intégrité de la cité et de ses habitants face à l’imminente menace d’un assaut de fangeux, peu importait alors qu’hors des murs se fût agit de brigands ou d’une famille aussi illustre que les Sarosse, certains sacrifices étaient inévitables afin d’assurer la survie du plus grand nombre.
Si la perte de leur fief familial ainsi que de la petite ferme du Labret fût un coup de massue supplémentaire pour la famille de Fierchant, la présence d’esprit de rapatrier le stock de soie directement en Marbrume fût salutaire, particulièrement lorsque le patriarche commença à émerger d’une longue période de dépression, alors que leurs réserves de vivres étaient au plus bas, mais que le troc commençait à se généraliser. Soucieux de préserver les apparences, nombre de familles nobles étaient prêtes à échanger des vivres contre des toiles de soies et de brocarts tissés, tissus qu’Apollin et sa famille prirent soin de n’écouler qu’en quantités fort limités, afin de pouvoir négocier des échanges favorables. Désormais héritier de la famille, Foulques de Fierchant assista sans mot dire en compagnie de son père à la réunion ducale où fût décidée la reprise du Labret, à la grande satisfaction du patriarche, qui voyait déjà une potentielle reprise de la production à moyen terme, alors que l’unique atelier marbrumien était à l’arrêt depuis un moment déjà, faute de matière première. Au cours des manœuvres qui suivirent, Foulques participa à l’effort de guerre avec son jeune frère Loric, joignant en diverses occasions d’autres nobles et la milice, alors que leur père tentait de ménager les susceptibilités de différentes maisonnées au cours de tractations commerciales, et se résolvait à fournir au duché une proportion toujours plus importante de ses gains comme de ses réserves.
Ceci permit à Apollin, une fois la situation au Labret mieux stabilisée, de pouvoir récupérer la gouvernance du champ de mûriers qu’il avait perdu, ainsi que des quelques arpents environnants, dans l’optique de pouvoir redémarrer la production de soie. Et la première année de reprise de l’activité fût surtout consacrée à faire proliférer les bombyx muri, afin d’obtenir une population suffisante pour assumer une production un peu moins ridicule l’année suivante. Et les premiers lés de soie sortis de l’atelier furent symboliquement offerts à la famille ducale, marquant la reprise d’une activité attendue tant par l’ensemble de la famille qu’un certain nombre d’aristocrates soucieux de préserver les apparences en société.
Le couronnement du nouveau Roy au premier jour du mois de mai 1166 fût à nouveau un jour bien sombre pour la famille Fierchant. La cohue qui résultat de l’attaque de fangeux en plein cœur de la cité sépara le patriarche et ses enfants, malgré tous leurs efforts. Guidé par quelques serviteurs fidèles, le baron d’Ocreval regagna miraculeusement sa demeure, alors que l’enfer s’abattait de toute part autour de lui. Il y retrouva quelques minutes plus tard un Loric naïvement fier de les avoir rejoints, et se targuant de s’être vaillamment battu, malgré des atours impeccables. Foulques lui ne reparut qu’au petit matin le lendemain, hagard, le bras ensanglanté. Seul. Nulle trace de son épouse, ni de leur jeune fils. Un chirurgien-barbier fut semble-t-il quis en toute discrétion le jour-même, toujours est-il que l’héritier de la maisonnée n’apparut pas en public de longs mois durant. Et sa première apparition aux côtés de son père fût d’autant plus remarquée que leurs différences étaient marquées : Foulques était émacié et désormais manchot, mais marchait d’un pas sûr là où Apollin était gras, mais ne se départissait désormais plus d’une canne tant il peinait à marcher. Le premier restait en toute circonstance austère lorsque le second cherchait à se montrer avenant en société afin de préserver les relations politiques de la famille. Intérieurement pour autant, la flamme de l’un comme l’autre semblait vaciller, d’une ardeur incertaine, alors que Loric, de son côté, se montrait désormais de plus en plus audacieux, à la limite de l’imprudence, lorsqu’il accompagnait régulièrement la milice au nom de l’effort commun. Un souci supplémentaire à gérer prochainement pour le baron, qui ne pouvait pour autant actuellement pas empêcher complètement son benjamin de participer à ces missions, sous peine de mécontenter le Roi. Pour autant, il lui faudrait jouer serrer en négoce au cours des prochains mois, avec la reprise de la production de la soie, s’il voulait obtenir à nouveau pour sa famille un train de vie confortable.
◈ Résumé de la progression du personnage : ◈
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