Marbrume


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 [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette

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MessageSujet: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptyMar 9 Aoû 2022 - 14:31



Une mauvaise plaisanterie.



Le Port de Marbrume – La Hanse | 10 février 1164.

Le crépuscule s’attardait en nuées frileuses sur les quais lorsque Tharcise se présenta sur le ponton contre lequel oscillait les flancs fatigués de la Distraite. Cette nuit comptait-il y rester afin d’éviter l’humeur atrabilaire de son oncle qui, vainement, avait épuisé sa salive et rompu son dos en courbettes obséquieuses auprès d’un proche courtisan du Duc de Sylvrur. Le branle-bas d’une cavalcade empreinte d’un empressement colérique ; la voix sèche et agressive d’Ogier donnant ses ordres à ses serviteurs accourus au-devant de lui ; ses œillades acrimonieuses lancées à son neveu ; toute cette fatigante comédie l’avait incité à mettre le cap en direction du Port, avant que son parent n’eût l’idée de défouler ses nerfs sur sa couenne.

Personne, à part les deux marins de faction qui martelaient de leur pas vigilant le pont de la caravelle. L’un des deux, à son approche, s’immobilisa avant de le saluer d’un élan de sa dextre au-dessus de sa tête, cette même main se portant aussitôt à sa bouche pour y accoler deux doigts et émettre trois brefs sifflements. Était-ce là un signal inédit pour avertir son binôme que l’intrus qu’il était ne représentait nulle menace ? Un vague haussement d’épaules ponctua son interrogation, tandis qu’il abordait la passerelle au petit trot. A peine eut-il franchi la coupée pour s’engager sur le tillac que quatre ombres surgirent de part et d’autre du grand mât, devant lequel avait été disposé un monticule de caisses et de barils. Figé de stupeur par ce soudain branle-bas, il n’eut guère le temps d’esquiver l’assaut que déjà il était ceinturé par trois fieffés marins sous les ordres du quartier-maître Tréville qu’il reconnut avant qu’un sac de toile fleurant la farine ne fût enfilé sur sa tête, occultant toute vision. Ses poignets, ramenés contre ses lombaires, et ses pieds furent entravés au moyen d’une corde de chanvre. Il se sentit ensuite soulevé comme un vulgaire paquet et jeté sur ce qui lui sembla être un brancard.

- C’pas possible d’traîner autant au Port et d’pas avoir tiré ton coup ! Tu t’en tireras pas comme ça, mon gaillard !
- Lâchez-moi, bon sang !
- Allez, emm’nez-moi c’peine-à-jouir !
- Je sais que c’est toi ! Tu me paieras ça, Tréville ! hurla-t-il, se démenant comme un forcené. Tu me paieras cet affront !

Le ballottement commença, escorté du souffle ahané de ses geôliers dont il distinguait les notes de l’effort à travers le tissu râpeux de cette cagoule aveugle. Plusieurs tours de sablier s’écoulèrent, interminables, avant que les coups de crocs de la brise hiémale ne fussent remplacés par la touffeur chaleureuse d’une salle animée. Le cœur battant à tout rompre, les nerfs chargés d’une tension électrique, Tharcise perçut des exclamations de surprise, des rires étouffés à la mélodie moqueuse, avant que son ouïe ne crochetât le craquement caractéristique des lattes d’un escalier que ses geôliers venaient d’emprunter. Sa gîte fut rudement malmenée en un tangage périlleux, son crâne ne cessant de dodeliner de guingois basculant vers le sol tandis que ses pieds s’élevaient vers le plafond. Le coup de semonce d’un poing frappant sèchement à une porte retentit alors que son équilibre redevenait stable. Les gonds d’une porte grincèrent. Dans un silence de plomb, des mains libérèrent ses chevilles. Il se sentit projeté à terre, sans ménagement aucun, puis remis d’aplomb d’une traction sur ses épaules pour être positionné à genoux. Un « Il est tout à toi. » claqua au-dessus de lui, avant que les planches du parquet ne protestent derechef sous le pas pesant de ses ravisseurs et dont la rumeur s’amenuisa, escortée des éclats d’un rire aussi satisfait que mesquin. Le panneau de bois fut refermé en un claquement péremptoire, l’écho de deux tours de clef condamnant l’idée de toute échappée.

Son postérieur reposant sur ses talons, mains nouées dans le dos, son ample et ténébreuse pèlerine formant d’obscures ailes autour de son corps, Tharcise retint sa respiration. Tendant ses sens vers cet environnement inédit que les marins avaient choisi comme point de chute à leurs manigances, il s’interrogeait sur ce nouveau caprice hardi. Sur sa droite accueillit-il le crépitement caractéristique d’un feu dont il devina le ballet des flammes ocrées à travers la trame serrée de la coule de toile qui pesait encore sur son crâne. Sa tête pivota vers sa gauche, son oreille cherchant la moindre rumeur parasite, le moindre son qui aurait pu trahir une présence. Et, son cœur manquant un battement, il finit par capter la furtive approche, un léger frôlement qui fit gémir les larges lattes du plancher.

Le grossier capuchon s’anima alors dans la direction supposée de ce courant d’air discret.



Dernière édition par Tharcise d'Aspremont le Jeu 22 Sep 2022 - 20:06, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptyVen 12 Aoû 2022 - 2:05



Une mauvaise plaisanterie.



Le Port de Marbrume | 10 Février 1164.

Il restait une heure, peut-être deux, avant que la douce luminosité des rayons solaires ne se soustraient à l’immensité céleste recouvrant Marbrume de sa mante d’un bleu glacial, parsemée de quelques nuées cotonneuses d’un doux rose pâle. Violette savait qu’elle avait encore un peu de temps devant elle, avant de rejoindre cette auberge qui servait parfois, souvent, de lieu de débauche d’apparence embourgeoisée où on lui avait donné rendez-vous quelques jours plus tôt. Mais malgré tout, la jeune femme s’esquiva prestement de la maisonnette familiale, celle-ci ne tenant encore debout que par un miracle quelconque prodigué par les Dieux eux-mêmes. Il ne lui fallut que quelques minutes pour le tour des habitants de la demeure, réclamant câlins et embrassades à tour de rôles, sachant pertinemment pour les plus âgés la raison de son départ précipité.

C’est avec un lourd soupir au bord des lèvres et la méfiance profondément ancrée à la surface de ses prunelles smaragdines que la Fleur s’élança dans les ruelles malfamées du Goulot, prenant le sempiternel chemin du Port sous la surveillance accrue et oppressante d’une paire colérique d’iris azur. Elle se retint à plusieurs reprises de jeter un œil par-dessus son épaule pour tenter d’apercevoir la présence constante de la matriarche, ne souhaitant pas faire tiquer Faustine quant à sa destination finale de par son comportement sortant de l’ordinaire. Pas qu’elle n’était jamais allée à ce lieu en particulier, elle y avait bien été quelques fois au cours de ces deux années en tant que prostituée, à tel point que les habitués de cette auberge plus luxueuse que ce à quoi elle était accoutumée commençaient à la reconnaître dans d’autres circonstances, ce qui lui déplaisait de plus en plus fortement au fil du temps et pourtant, elle prenait sur elle pour ne rien laisser paraître de la colère et de la peine qui envahissaient son cœur demeuré innocent comme ses tumultueuses pensées.

Déviant de la trajectoire coutumière avant d’être passée devant le Boit Sans Soif afin de ne pas éveiller les curiosités souvent mal placées de Corniaud et Martha, l’adolescente fureta autant qu’elle le pouvait dans les petites rues entourant le vieux bâtiment pour rejoindre sans trop se faire remarquer l’allée principale menant au Bourg-Levant, et plus certainement à la Hanse.
Profitant de son avance providentielle, la brunette se mit à errer dans les vastes rues animées du quartier, observant de ses grands yeux curieux le fabuleux spectacle de cette vie si différente de la sienne qui continuait d’avancer à vive allure dans une agréable cacophonie au vu de l’heure tardive. Ses perles émeraldines se posaient tour à tour sur chacune des façades entretenues des boutiques passant sous son regard tristement émerveillé, sachant qu’en dépit de tout ce qu’elle pourrait faire, tout ce qu’elle pourrait donner d’elle-même, elle ne pourrait jamais s’offrir la moindre petite chose gisant sur les tissus scintillants tapissants les présentoirs des vitrines.

Cette fois-ci, le soupir de la lourdeur du plomb finit par s’échapper d’entre ses lèvres pleines, créant un nuage de fumée filandreux au devant de son charmant minois. Charmant minois dont les mires captèrent d’un simple regard vers la toile astrale la fuite du Soleil par-delà les murs de la cité, plongeant son corps infernal dans les eaux tumultueuses de l’océan. Un frisson ébranla sa fragile silhouette, lui rappelant insidieusement la mission qui lui était escomptée depuis bien trop longtemps, peu importe la personne qui se trouvait en face, nouveau comme ancien. A baguenauder dans les traverses colorées, elle en avait complètement oublié l’heure et espérait tout de même arriver bien avant son client, ne serait-ce que pour lui permettre de pouvoir se préparer un minimum.

La belle hétaïre accéléra la cadence, les semelles de bois de ses bottillons de cuir brun claquant avec un bruyant empressement contre les pavés de l’avenue la menant au lieu convenu auparavant. Poussant la porte du plat de la main contre le battant, elle pénétra dans le noyau du bâtiment, les effluves sirupeux des alcools plus dispendieux et les relents de nourritures plus raffinées qu’elle avait l’habitude de sentir vinrent harceler ses narines ; les exclamations tantôt colériques tantôt hilares agressèrent sans douceur aucune le pavillon de ses oreilles. Se faisant la plus discrète possible, marchant presque sur la pointe de ses pieds menus, elle se dirigea vaillamment sous les regards des rares personnes curieuses ayant remarqué son entrée furtive au devant des tenanciers qui étaient parfaitement au courant de sa venue, l’un d’eux la dirigeant même jusqu'à la chambre choisie pour la nuit par son commanditaire.

Dans un chuintement sonore de gonds mal huilés, la sauvageonne se faufila à l’intérieur de la pièce, ses perles olivâtres naviguant d’un point à l’autre de la chambrée tout en s’attardant tout particulièrement sur le lit mangeant un pan du mur, en face d’une cheminée au foyer ardent dans lesquelles les flammes dévoraient les bûches de leur danse lascive, offrant une agréable chaleur à ce minuscule appartement dénué de toute décoration personnelle ; dérivant auprès d’un baquet vide vêtu d’un grand drap de lin épais n’attendant que d’être rempli par une eau aussi chaude que relaxante ; passant sur l’ombre d’une commode sur laquelle trônait un bougeoir à la bougie à demi consumée et un vase d’où l’absence de vie florale se faisait remarquer ; finissant leur course sur une petite table ronde pourvue d’une carafe de vin, de verres et de victuailles accompagnée de ses deux chaises, habillant un coin du gourbi aux allures surannées. La porte se referma dans un bref grognement agacé alors que le petit lutin mutin qu’elle était entreprenait de déposer la besace de cuir qu’elle se trimballait depuis le début de la soirée sur une des deux assises de bois vernis, ouvrant le fermoir d’argent noirci par le temps d’un geste aussi habile que coutumier, attrapant son contenu pour le déverser sur le lit en une pluie de tissus chuchotants, frottants les uns contre les autres.

Une simple œillade par la fenêtre lui indiqua que le crépuscule tardait à disparaître, les javelots astrales courroucés perçant sans faiblir la trame nuageuse, enorgueillissant la peinture nébuleuse de l’empyrée de ses couleurs chatoyantes. C’est devant ce splendide spectacle que la jeunette se débarrassa un à un de ses encombrants atours, enfouissant chemisier beige et jupe violine d’un geste preste au fin fond de son sac ; attrapant de sa dextre l’une des tenues choisies pour cette nuitée qu’elle affectionnait tout particulièrement pour la mise en valeur que cette dernière accordait à sa féminine anatomie.

Violette en était là de son inspection lorsqu’elle entendit des bruits en provenance des escaliers puis du couloir menant à la piécette où elle se trouvait, se terrant malgré elle dans un recoin près de la lucarne embuée tout en observant d’un œil circonspect les gaillards ramener celui qui devait être son client, celui-ci ne semblant avoir aucunement consenti au déroulement supposément sulfureux que se devait d’être cette veillée pour laquelle elle avait été abordée peu de temps auparavant. Le cliquetis que produisit la clé dans la serrure lorsque les apparents tortionnaires sortirent après avoir délaissé leur fardeau mains liées et sac en toile tacheté de poudre blanche sur la tête lui assura qu’ils ne ressortiraient certainement pas d’ici avant l’avènement de l’aube.

Elle demeura figée quelques instants, le regard interdit posé sur le jeune homme à genoux non loin d’elle, balayant sa haute physionomie de ses sentinelles de jade intriguées et scrutatrices. Sortant de sa transe confuse, son corps gracile se mit de lui-même en mouvement, poussé par la curiosité intransigeante chahutant sous l’affolante crinière ébène et ivoire, faisant s’affoler les battements de son cœur. La plante de ses pieds nus frôlèrent les lattes dans un son feutré, faisant craquer le plancher vétuste sous son faible poids. Dans un chuchotis d’étoffe, elle se pencha légèrement en avant, prenant le rebord du ballot farineux entre son pouce et son index pour venir délicatement le retirer afin de rendre la vue à l’étrange corbeau prostré sur le parquet. Elle ne put empêcher une exclamation de stupeur de remonter hors de sa gorge, bien trop surprise par l’identité du paquet fraîchement livré dont la sombre tignasse ébouriffée était parsemée d’une fine rosée farineuse. Toi ?!

Ses paupières papillonnèrent, occultant par leurs battements frénétiques les prunelles vert tendre dans lesquelles brillaient une surprise débordante, frôlant les pommettes voilées d’une infime touche carmine de leur longue dentelle de cils noirs. Dans quoi tu t’es r’trouvé embarqué c’te fois…? souffla-t-elle, hilare. Son joli minois fardé s’éclairant de son éternel espièglerie, ses mains vagabondant sur la rondeur de ses hanches, s’y attelant avec amusement. La jeune femme ainsi penchée laissait, sans paraître s’en émouvoir sur l’instant, une vue imprenable sur le décolleté affriolant que comportait sa longue robe de cainsil d’un blanc virant au bleuté dont l’encolure agrémenté de quelques fioritures d’aspect floral dans des nuances céruléens, pouvant être liés par deux lacets d’un blanc pur aux aglets d’étain complètement défaits, laissant entrevoir les appétissantes courbes pleine d’une orgueilleuse féminité de sa poitrine juvénile ; la taille froncée, resserrée en quelques plis exquis rehaussant la finesse de sa silhouette, là mettant subtilement en valeur, comme si elle avait été créée pour elle, uniquement dans le but d’envoûter les sens de ceux posant leurs iris sur sa personne.

Violette se redressa délicatement, faisant un simple signe de la main vers le jeune noble pour l’aider à se relever tandis que de l’autre elle replaçait une liane rebelle ayant quitté l’épais chignon flou qui la coiffait, cherchant tant bien que mal à dompter cet effroyable buisson d’ardente ténébre à l’aide d’un foulard aussi blanc que sa vêture qui ne pouvait empêcher malgré toute la volonté du monde quelques mèches indociles éparpillés de faire leur vie ; s’égayant en de lascifs frisottis sur son front et ses tempes alors que de longs serpentins entremêlés d’onyx et d’argent louvoyaient sur sa clavicule gauche, s’égarant sur l’un des seins de sa poitrine replète, caressant le mamelon rosé que l’on pouvait aisément deviner, à peine dissimulé par la fine étoffe bleuâtre.
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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptySam 13 Aoû 2022 - 18:22



Une mauvaise plaisanterie.



Le Port de Marbrume – La Hanse | 10 février 1164.

Le parquet cessa de geindre sous l’impulsion des pas feutrés de ce spectre qui hantait, Tharcise l’avait deviné, la chambre dans laquelle Tréville venait de le séquestrer. Le capuchon de toile frémit alors, glissant en une rêche caresse sur sa joue, son front, jusqu’à ce que la vue, brouillée d’une pellicule farineuse perchée sur ses cils, lui soit rendue. L’exclamation qui succéda à l’agression de ses pupilles par le halo tempétueux des flammes de l’âtre non loin le figea. Épaules raidies, buste en avant, mâchoires contractées, il avait la posture d’un félin près de bondir sur sa proie. Cependant, il n’en fit rien. Son visage strié de traînées d’albâtre se grima d’une expression aussi interloquée qu’abêtie par ce que ses iris, plus orageux que de coutume, lorgnaient en cet instant de complet effarement : une gorge gracile chamarrée de sa cascade de ténèbres et d’argent et dont la ligne ruisselait sur les lisières florales d’un décolleté bordé de deux tertres indécents. Sa bouche s’entrouvrit alors sur une note étranglée, ses prunelles se libérant de ce tableau déplacé pour juger, coléreux, le minois facétieux de l’aînée des Rats du Port.

- Vous ?!

Le murmure hilare de Violette percutant le pavillon de son oreille, Tharcise ignora le geste d’invite qu’elle fit pour l’aider à se relever, et bascula rudement sur le dos. Se tortillant comme un misérable poisson hors de l’eau, il réussit avec force ahans et râles agacés, à faire passer ses fesses puis ses pieds par-dessus ses poignets liés. Se redressant sur ses appuis en un piétinement de bottes, la sueur perlant son front, il attaqua à coups de dents le nœud marin qui scellait la corde de chanvre. Une fois libéré, rejetant dans un élan impatient l’entrave au loin, il se rua sur la porte de la chambre. Il eut beau jeu de la marteler de son poing, de la heurter de moult ruades de son épaule, de la bénir de la pointe ou du talon de ses bottes… rien n’y fit. Le battant de chêne, d’une robuste qualité, ne céda guère.

Expulsant un souffle sec tout en passant près de la prostituée dont il faisait abstraction jusqu’alors, le nobliau s’élança vers la fenêtre dont les multiples carreaux sertis de plomb étaient recouverts d’un léger voile de givre. Ses doigts fébriles s’acharnant sur le loquet récalcitrant, l’un des deux battants céda sous l’attaque tenace. Un sournois tourbillon glacial s’engouffra, perturbant le ballet endiablé des danseuses ocrées qui sautillaient de bûche en bûche. Un rapide coup d’œil en contrebas le fit renoncer à l’entreprise suicidaire que son esprit avait fomentée : nulle lumière, nulle visibilité. Le saut qu’il aurait volontiers tenté risquait de lui faire perdre davantage que la perspective de passer une nuit auprès de l’adolescente.

Et pourquoi, par les Trois, l’avaient-ils choisie, elle ?

Ses lèvres grimaçantes sifflèrent une imprécation inaudible tandis que les battants de la fenêtre retrouvaient leur position initiale. Une dernière vengeance assenée à la commode par le biais d’un coup de pied, provoquant l’ébranlement périlleux du vase dénué de toute ostentation florale et du chandelier à la bougie fatiguée, le jeune homme défit la fibule d’argent ciselé qui liait les deux pans de son ample pèlerine. D’un geste las, contrarié, il rejeta le ténébreux vêtement sur le dossier de l’une des deux chaises trônant près de la table ronde, pour s’affaler sans vergogne sur l’autre. Le coude droit reposant sur le plateau en merisier marqueté, à motifs d’étoiles et de chevrons, la jambe droite repliée, la jambe gauche tendue, Tharcise attira ses doigts à sa glabelle qu’il étreignit d’une forte pression du pouce et de l’index.

Sous le surcot à la teinte safran surpiqué de fil sinople, son buste se fatiguait d’un élan essoufflé. Il préserva néanmoins le silence, yeux clos, ses doigts triturant la racine de son nez.

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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptyJeu 18 Aoû 2022 - 19:23



Une mauvaise plaisanterie.



Le Port de Marbrume | 10 Février 1164.

La jeune femme récupéra sa main tendue dans un vague haussement d’épaule, faisant se mouvoir la triade entremêlée ébène et ivoirine reposant nonchalamment sur sa clavicule ; son regard à la fois surpris et amusé par la désormais véritable connaissance de son client du soir, ne put s’empêcher de se teinter d’un voile de compassion face à la situation actuelle du jeune noble se tortillant au sol pour se dépêtrer des liens qui retenaient ses mains mais aussi de l’ignorance dans laquelle il se trouvait avant d’être délesté du sac enfariné emprisonnant ses sens.

Au vu de l’irascibilité entourant le jeune homme telle une épaisse aura que l’on aurait presque pu toucher du bout des doigts, Violette prit le soin de prendre la fuite dans un calme démontrant toute accoutumance à un quelconque accès de violence, préférant éviter d’envenimer les choses de par son insatiable curiosité souvent déplacée en osant émettre le moindre son en cet instant, s’attelant seulement à rejoindre le large lit accolé au pan du mur le plus éloigné sur lequel elle s’asseya sagement, relevant ses jambes menues contre elle pour les entourer de ses deux bras maigres, attendant patiemment que la tempête ne se tarisse d’elle-même.

Elle demeura là, hors de portée de la folle envie presque destructrice de s’évader, de prendre le large, du grand brun ; à l’observer dans une apparente tranquillité mutique, ses prunelles smaragdines le suivant obstinément dans toute sa rage contrariée, que ce soit lorsqu’il maltraita la robuste porte de chêne restant résolumment close ou lorsqu’il ouvrit la fenêtre récalcitrante à la volée pour y passer sa tête dont la chevelure était encore parsemée de la poudre farineuse, laissant un courant d’air glacial pénétrer à l’intérieur de la petite chambre rustique, enveloppant l’adolescente de son étreinte glacée qui secoua sa mince silhouette d’un interminable frisson désagréable ; faisant vaciller les flammes ocrées dans leur foyer, les obligeant à attaquer encore plus férocement les rondins gisant sous elles dans une multitude de craquements sonores coléreux pour ne pas subir une quelconque extinction.

La sauvageonne laissa quelques grains s’écouler dans le sablier du temps pour ne serait-ce que déplier ses jambes évadées de la prison de chair de ses frêles brindilles, les étendant afin de quitter le confortable perchoir sur lequel elle s’était juchée dans sa recherche d’un lieu sécuritaire. Elle avança lentement, tâtonnant de ses pieds nus les lattes du parquet ancien dans un concert de murmures feutrés ; le doux bruissement du fin tissu délicat de sa robe blanchâtre dont l’ourlet effleurait ses chevilles en maintes cajoleries s’élevant doucement dans la chambre ; le tout accompagné des craquements des bûches dévorées par les danseuses ocrées ajoutaient une fébrile symphonie à la lourde atmosphère chargée d’une tension presque palpable.

Toujours cloîtrée dans un silence emprunté, la prostituée arrêta son court périple à la petite table ronde, sa dextre s’avançant au devant d’elle pour saisir fermement la carafe emplie d’un sirupeux liquide rouge foncé, le déversant lentement dans les deux coupes résidant sur le plateau apporté par l’un des deux gérants avant même son arrivée. Du bout de son majeur et de son index posés sur le socle, elle fit glisser le verre désormais plein auprès de Tharcise ; ses perles émeraldines accrochant le faciès rembruni de son compagnon pour la nuit, dérivant mollement sur le reste de sa physionomie, s’imprégnant de la posture amèrement résignée de ce dernier.

Ne s’embarrassant pas des manières propres aux plus éduqués, le lutin qu’elle était ne prit pas la peine d’enlever la besace de cuir et la sombre pèlerine à l’encolure surmontée de fourrure de castor recouvrant la seconde chaise. Elle choisit le parti de s’asseoir sur le bord de la table, sa jambe fuselée se croisant sur sa jumelle, dévoilant sans gêne aucune la blancheur de sa peau satinée en partie dissimulée par la finesse du tissu de sa longue chemise de cainsil nacrée ; la pointe de son pied nu se balançant à un rythme régulier, jusqu’à ce qu’elle effleure les braies ténébreuses du bout de ses orteils, alors que ses graciles arachnides s’enroulaient autour du pied de son propre verre, le portant à la pulpe carmine de ses lèvres charnues.

- Au vu de ta réaction, j’en conclus qu’en plus de ne pas être au courant, ce n’est pas ainsi que tu comptais passer la nuit. émit-elle d’une voix douce, posée, à l’articulation lente de ceux qui n’ont pas l’habitude d’utiliser des paroles autres que tronquées. Nulle lueur de moquerie, nulle éclat d'espièglerie ne vinrent troubler la surface de ses pupilles d’un vert aussi chaleureux que pouvait l’être l’étendue herbeuse d’une vallée au Printemps.

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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptyVen 19 Aoû 2022 - 9:21



Une mauvaise plaisanterie.



La Hanse | 10 février 1164.

Tout empêtré qu’il était dans l’épaisse gangue de colère qui oppressait son poitrail et nouait son estomac, Tharcise remarqua à peine la migration feutrée du petit volatile tout en tons clairs-obscurs, depuis les ramées soyeuses de ce lit isolé contre le mur opposé jusqu’à la table ronde près de laquelle le nobliau s’était lamentablement échoué. Le pouce et l’index de sa dextre, toujours crochetés à son nez, en trituraient nerveusement l’arête quand ils se figèrent à la perception d’un mouvement sur sa droite. Les paupières closes sur des pensées atrabilaires qui ressassaient inlassablement l’outrage fait à sa dignité finirent par s’entrouvrir, libérant le feu glacial de ses prunelles dont les disques incisifs s’agitèrent sous leur herse de cils noirs et se calèrent sur la manœuvre de la prostituée. Ils criblèrent de leurs dards d’acier la danse des laiteuses arachnides qui manipulaient la carafe pour remplir d’un breuvage à la robe rubis deux hanaps en étain ornés de ciselures ; chavirèrent sur la ligne de ses bras dénudés, frêles et pâles brindilles dont le derme s’enorgueillissait d’un hâle doré, chatoyant, exacerbé par la valse orgueilleuse des flammes de l’âtre ; jonglèrent, en un ballet erratique, avec les détails de cette robe à la coupe ajustée, dont la fine toile de lin soulignait les courbes d’un corps pour l’heure suggérées, et qui s’émouvaient d’esquisses aléatoires sous le jeu frémissant de ses plis.

Sans piper mot, le nobliau observa la jeune ribaude procéder au service, le regard étréci perché au-dessus de ses doigts recroquevillés sur son visage. Et lorsque la coupe rassasiée de vin lui fut offerte en pâture, ainsi traînée jusqu’à son coude replié, sa dextre s’écarta de son faciès fermé pour venir l’empaumer en un geste à l’intérêt nonchalant, ses ongles heurtant les aspérités des gravures qui en ornaient le pourtour. Lèvres pincées, dents serrées, mâchoires contractées provoquant le roulis spasmodique de leurs muscles sous ses joues obombrées de leur vague crin noir, Tharcise guetta la mise en place de ce lutin d’ordinaire facétieux et qui, en cette soirée où tout lui semblait incohérent, avait revêtu les attraits séducteurs d’un succube. Légère, l’adolescente se jucha sur le rebord de l’épais plateau de bois circulaire, une gambette à califourchon sur sa jumelle pour balancer dans le même élan un pied nu dont les orteils finirent par agacer de ses à-coups rythmés sa jambe droite, repliée, enserrée dans son sombre velours côtelé. Louchant sur ce perturbateur blafard, le jeune homme se redressa, abandonnant sa posture avachie pour adopter une assiette plus convenable.

La tension, pourtant, demeurait, tenace. Le souffle écourté, contraint, il dardait sur le minois perché au-dessus de lui les lances opalines d’un regard à la fixité prédatrice. Reniflant soudain une sèche inspiration, ce fut d’un geste abrupt qu’il porta le hanap à ses lèvres pour en vider le contenu vineux d’une traite. Claquant sa langue contre son palais, il grimaça, l’âpreté du breuvage l’ébrouant d’un frisson féroce. Il reposa le gobelet d’étain sur la table, l’accrochage émiettant un son métallique qui percuta l’espace alentour.

- Pas… ainsi. Non. répondit-il sur un ton rude, avant d’attraper le hanap et de le jeter contre le proche mur. Tréville s’acharne, et je suis fatigué de ces turlupinades ! Ce pendard paiera pour ça.

Ses mains s’élevèrent jusqu’à son crâne, ses doigts s’engouffrant dans la masse affolée et saupoudrée de farine de sa noire tignasse pour en tirailler les mèches capricieuses dans un bâillement aigu qui se mua en long râle contrarié. Elles retombèrent ensuite, lentement, mollement, ses paumes flirtant avec sa figure à l’expression lasse, dépitée, des cernes bleus souillant le pourtour de ses paupières battant au-dessus de ses iris grisâtres rivés derechef sur la prostituée. Son buste relâcha une profonde et fébrile expiration qui semblait traduire tout son désarroi. Et son impuissance.

- … Je devine qu’il a payé d’avance ? fit-il l’air grave, sur une note faussement interrogative, sa tête calée de côté sur le dossier de sa chaise, ses avant-bras ballant sur ses cuisses. Et tandis que les secondes s’égrenaient, avec pour fond sonore le crépitement des flammes de l’âtre et le sifflement de la bise hiémale contre les carreaux de la fenêtre, il ne se rendit guère compte qu’il dévisageait la demoiselle avec une intensité accrue, presque dérangeante. … Et maintenant ?

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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptySam 20 Aoû 2022 - 0:40



Une mauvaise plaisanterie.



Le Port de Marbrume | 10 Février 1164.

Violette comprenait son désarroi. Se retrouver coincée, enfermée, empêtrée, dans une situation que l’on avait ni voulu ni espéré, elle connaissait bien. Trop bien. Et elle s’en sentait presque désolée pour le jeune homme. Oui, presque. Car tout cela aurait pu être bien pire pour lui, en fin de compte. Cela aurait pu être une autre prostituée qu’elle, sans vergogne et avec bien moins de scrupules. Après tout, lorsque l’on est payé pour un travail, pour accomplir une tâche, on se doit de la mener au bout et ce, sans rechigner, n’est-ce pas ? Du moins, c’est ce qu’on lui avait inculqué, parfois durement, trop souvent sévèrement. Et pourtant… Ne pas réfléchir et agir sans songer aux malheureuses conséquences que cela pourrait entraîner, voire infliger à l’autre, cela ne faisait pas partie de sa belliqueuse personnalité. Mais malgré tout, la jeune femme avait envie de jouer avec le feu. Toucher du bout de ses doigts laiteux les flammes ardentes de ce caractère tempétueux. Et c’est ce qu’elle fit.

De sa dextre gracile, la Lionne porta le rebord du hanap en étain à ses lèvres purpurines, s’attelant à ne boire qu’une gorgée de l’épais liquide bordeaux à la saveur boisée avant de le déposer délicatement, dans une lenteur exécrable sur le plateau de la table ronde ; ses émeraudes assombries dardant ses éclats chatoyants sur le faciès las et fatigué qui lui servait un regard d’une telle intensité qu’elle sentait un long et inexplicable frisson parcourir son échine, ensevelissant la peau pâle et veloutée de ses bras de milliers de picots surprenament agréable. Et maintenant… expira-t-elle d’une voix onctueuse. Elle ne s’attarda pas sur cet étrange phénomène qui n’avait rien de comparable à l’étreinte forcée de la froideur hivernale, la jeune femme, dans toute sa prédatrice félinité, entreprit de se rapprocher sensiblement du nobliau, s’appuyant sur la paume tendre de ses mains reposant à plat sur le bois vernis pour l’aider à glisser de quelques centimètres seulement sur la surface plane, ne s’arrêtant qu’à la limite entre son perchoir et le vide. Demeurant en amazone, les jambes toujours croisées l’une sur l’autre, son malicieux pied gauche qui n’avait eu de cesse de se mouvoir dans le vide dans le jeu lancinant du pendule jusqu’à présent s’arrêta net, s’amusant à taquiner de ses orteils curieux le velours noirs en de maints et légers frôlements, se faisant perceptiblement plus appuyés à mesure que la trame du temps s’effilochait dans le plus grand silence, uniquement entrecoupée par les crépitements colériques des dansantes flammes ocrées dans l’âtre. Sa dextre rejoignit la bordure circulaire, s’y crochetant fermement alors que sa jumelle prenait lascivement son envol, le bout de ses doigts délicats effleurant dans une douce et suave cajolerie la sombre toison drue obombrant la virile mâchoire de son compagnon d’un soir, majeur et index s’arrimant finalement juste au-dessous de la pointe saillante du menton tandis que son buste s’inclinait vers lui, dévoilant sans la moindre once de gêne ni de pudeur les courbes galbées des monts satinés à demi dévoilés par la plaie béante de son décolleté délacé et le jeu de transparence de la fine vêture de cainsil ivoirine aux nuances bleutées. Les écrins de chair se rabattirent progressivement sur les perles smaragdines, les étouffant d’une embrassade protectrice, ne laissant entrevoir qu’un mince filet d’un vert printanier entre l’épaisse dentelle de cils noirs les bordant ; le bout de son petit nez rond vint flatter dans une tendre effusion son opposé, l’asujettissant d’une langoureuse câlinerie ; ses lèvres carmines, pulpeuses et tentatrices, s’entrouvrir à une courte distance de celles du brun, son haleine chaude, erratique, percutant par à-coups les lippes barbues lorsqu’elle souffla quelques mots dans un mélodieux ronronnement séducteur. Rien du tout…

Elle rouvrit brusquement ses paupières, déversant toute la facétie difficilement contenue résidant au sein de ses iris liberons ; un grand sourire chaleureux apparaissant sur sa bouche aux inflexions moqueuses. Le drôle de volatile se décidant à quitter sa volière d’une impulsion simple de ses reins, faisant momentanément remonter l’étoffe de sa robe le long de ses nivéales jambes fuselées pour retomber en un bruissement agacé, s’enroulant autour de ses chevilles lorsqu’elle entama sa courte fuite en direction du lit qu’elle avait quitté plusieurs minutes auparavant. De là, la prostituée se saisit du monceau de tissu gisant lamentablement sur la couette aux allures champêtres, la dépliant et la défroissant pensivement. J’ai beau avoir déjà été payé pour mes services, cela ne veut pas dire que je compte t’obliger à quoique ce soit. dit-elle dans un phrasé lent, apparemment peu habituée à parler correctement, paraissant être un exercice à priori difficile au vu de la concentration déformant les traits juvéniles de son visage.

Son regard dériva courtement sur la porte en chêne close, finissant par prendre le large pour rejoindre les lacs opalescents d’une contrée orageuse. Nous sommes coincés ici jusqu’à demain matin de ce que j’ai compris. Alors autant passer le temps jusque-là. Glissant ses bras dans les emmanchures béantes d’un long gilet ample dont la coupe et les teintes céruléennes mettaient d’autant plus en valeur la longue chemise de cainsil nacrée resserrée à la taille de l’adolescente, elle entreprit de récupérer la coupe en étain rageusement jetée par Tharcise et la placer sur le plateau de merisier dans un sonore bruit métallique sans cérémonie tout en virant sa besace de cuir abandonnée sur la seconde chaise d’un coup de hanche bien placé ; ses arachnides curieuses s’enfouissant dans l’intrigante fourrure de castor qui lui chatouillait les côtes comme on le ferait avec un chat s’installant avec une folle arrogance sur des genoux étrangers. Nous pourrions commencer par discuter pour faire passer le temps… Pour commencer, du moins. Qu’en penses-tu ?

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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptyLun 22 Aoû 2022 - 9:09



Une mauvaise plaisanterie.



La Hanse | 10 février 1164.

A la réponse que la prostituée parodia par l’approche lascive de son corps, chacun de ses gestes langoureux insinuant l’amorce éventuelle de ce sentier licencieux pour lequel elle avait été payée, Tharcise regretta la question évasive, sujette à moult interprétations, qu’il venait de formuler. Une boule de salive coincée en travers de la gorge secoua nerveusement sa proéminence laryngée. Son lâche métronome se mettant en sourdine le temps d’un battement de cils, il recula, épaules et dos plaqués férocement contre le dossier de la chaise. Croyait-il pouvoir s’y incruster ? Peut-être. Il en retint même sa respiration lorsque Violette s’osa à cajoler le bout de son nez du sien et que son souffle, au rythme désaccordé, bouscula de sa tiède houle les lisières de ses lèvres. A cette distance, ses prunelles d’orage jouaient la prudence entre ses paupières étrécies, louchaient sur ce minois qui vacillait tel un mirage trompeur au-dessus de lui. Il aurait été malhonnête de contester la joliesse de l’adolescente ; sa figure de lutin faussement boudeur s’anoblissait encore des douces rondeurs de l’enfance ; la lumière versatile, et vorace, des flammes de l’âtre muait la surface de ses iris olivâtres en un ballet infernal qu’altérait, par à-coups conciliants, la dentelle mouvante de ses cils ; sa bouche ronde et charnue s’entrouvrait sur les effluves tanins de cette modeste gorgée de vin qu’elle s’était autorisée ; et les appâts tentateurs qu’offrait ce buste à-demi dévoilé par tout un effet savant de teintes et de transparence, susurrèrent alors à son cervelet que nombre de lèvres affamées s’y étaient échouées avec l’appétit de la concupiscence.

Un sursaut éphémère ébroua son échine.

La vision d’un autre lieu, d’un autre temps, d’une autre prostituée, caracola sous son front blêmi, se superposa abruptement à celle de la jeune Violette, provoquant un effet de douche froide sur ses sens rudoyés par les manigances de cette dernière. Par chance choisit-elle ce sobre instant de déroute dans le fil troublé de ses turpides remembrances pour s’effacer sur une note facétieuse. Le nobliau, libéré de l’aura sulfureuse de cet espiègle lutin, profita de cette retraite volubile pour exhaler un long et profond soupir de soulagement, avant de lui infliger la vision d’un sourire tout en dents, stressé, tandis qu’elle revenait s’installer à la table, prenant place sur la seconde chaise, face à lui.

- Ce que j’en pense ? hésita-t-il, sur un ton rauque, le souffle contraint en son poitrail oppressé, ses paumes moites rampant nerveusement sur le sombre velours côtelé de ses braies. Il humecta ses lèvres asséchées, pour enchaîner sur une note garrottée. Soit. Faisons ainsi…

Sa main gauche se ferma en un poing affermi pour s’élever jusqu’à sa bouche et étouffer sous une discrète toux le chatouillis désagréable qui irritait ses cordes vocales. Épaules basses et buste s’affaissant sur ses coudes repliés, et croisant les bras, son regard vacilla, songeur, sur le faciès de la jeune fille.

- … Je suis désolé, Violette. Pour tout ça. soupira-t-il, sa senestre s’attardant près de sa tempe pour servir de pilastre de chair à sa tête penchée de côté ; ses doigts s’attaquaient mollement aux folâtres crins de sa noire et capricieuse tignasse, grattaient le sommet de son crâne. Dans un vague haussement d’épaules, il grimaça un rictus confus qui découvrit ses canines en une esquisse indûment carnassière. Et-… pour être tout à fait honnête avec toi, ce n’est pas la première fois que Tréville me confronte à cette comédie. La décence ne me permet pas de t’en confier les détails. Sache juste que j’en ai conservé un souvenir aussi indélicat que pitoyable. Il déglutit. Et peu flatteur. Il baissa les yeux, les doigts de sa dextre occupés à écailler une tache imaginaire sur le bois artistement marqueté de la table ronde. Sa voix s’alentissant au rythme de ses pudiques réflexions, et empruntant une tessiture plus grave, il releva ses prunelles pour en fustiger l’adolescente. Depuis quand fais-tu-… ça ?

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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptyMar 23 Aoû 2022 - 14:13



Une mauvaise plaisanterie.



Le Port de Marbrume | 10 Février 1164.

Assise de biais sur la chaise en bois laqué, jambes croisées l’une par-dessus l’autre dont l’ourlet remontait et descendait le long de son fin mollet pâle au rythme du balancier de son petit pied menu dont la pointe s’amusait à dessiner de petits cercles concentriques dans l’air moite de la chambrée telle une vague caressante suivant le rythme de la marée sur une plage de sable blanc en une douce cajolerie lors d’une soirée d’été ; son buste tourné vers lui, sa jeune poitrine en partie dissimulée au regard par les voiles de tissu à la mince transparence, comme monts et vallées que l’on peut à peine deviner au travers de l’épaisse toile brumeuse d’un brouillard automnale de début de matinée. L’adolescente se tenait là, en face du nobliau, son bras gauche nonchalamment posé sur la myriade d’effet graphique incrusté dans le merisier de la table, sa dextre serpentant sur celle-ci, repartant à l’assaut de son hanap en étain à peine entamé, ses frêles arachnides se refermant autour pour le soulever, l’apportant à ses lèvres pleines à la teinte vermillon.

Son geste se suspendit à l’entente de la question du jeune homme, ramenant foule de souvenirs dérangeants et honteux à sa mémoire troublée, statufiant les traits de son visage à l’exception de sa longue dentelle de cils noirs qui battaient la mesure dans l’étonnement le plus complet. Fallait-il vraiment commencer par là ? D’autres questions un peu moins personnelles ne lui avaient-elles pas effleurées l’esprit ? Ne serait-ce que pour débuter la conversation sur un terrain dépourvu d’un quelconque explosif.
Sortant de sa torpeur au fil d’interminables secondes chargées d’une surprenante tension qui n’avait rien de sexuelle, le visage de la jeune femme changea, se mua lentement au gré de sa réflexion. Ses sourcils se froncèrent perceptiblement, ses paupières ne laissèrent filtrer entre leur mince fente que le faible éclat olivâtre de ses pupilles assombries tandis que sa bouche se tordait en un rictus contrarié, sa lippe supérieure se relevant pour dévoiler une canine ivoirine dans un grondement sourd. T’avais pas d’autres questions ? J’ai même pas encore bu un seul verre… reprenant son verbiage aux phrases tronquées sans même s’en apercevoir. Son petit nez rond se retroussa dans une conclusion boudeuse, disparaissant finalement derrière l’étain de la pinte qui arriva enfin à la destination de ses lèvres carmines, la vidant d’un trait pour la reposer bruyamment sur la surface circulaire dans un claquement sonore, ses doigts se désolidarisant du contenant pour venir grappiller deux grains de raisin trônant dans leur coupole ; un qu’elle amena directement à sa bouche arrondie pour le recueillir et le deuxième, qu’elle jeta proprement dans un lancer franc au front de l’homme face à elle, transfigurant son énervement embarrassé pour reprendre sa gaieté naturelle, bien que semblant feinte sur l’instant.

Ses coudes rencontrèrent durement le bois, devenant piliers afin que ses mains aux doigts entrecroisés puissent former un pont de chair, recueillant le menton légèrement pointu du minois poupin ; ses iris smaragdins rencontrant sans flancher les opalines mouchetées d’obsidienne. Ça a fait deux ans le jour de mon anniversaire. Qu’est-ce que tu dis de ça ? Merveilleux présent, n’est-il pas ? Les lentes prosodies de sa voix éraillée s’élevèrent aussi bassement qu’un murmure, la musicalité mélancolique se voulant moqueuse, souffrant d’une intonation chagrine que l’inflexion comique n’arrivait pas à chasser. Un lourd soupir ébranla son corps, sa tête se détournant, sa joue ronde se calant sur l’entrelacs de ses rameaux laiteux ; ses dents ivoires s’attaquant, mordillant, martyrisant sa pulpeuse lippe inférieure, accentuant le rubescent de celle-ci ; ses pupilles embrumées par les réminiscences d’un passé flou affluant à sa psyché se perdant dans les flammes dansantes et crépitantes au sein de l’âtre chaleureux. Tu disais m’envier de par la présence d’mes frères et sœurs, toi, l’enfant unique… Mais… Ce qu’il y a d’bien à n’pas avoir de fratrie, c’est qu’on n’peut ni t’faire chanter, ni t’menacer d’par leur seule existence…Je n’sais pas c’mment ma mère a fait pour convaincre mon père qu’c’était une bonne idée, la seule idée, l’unique qui pourrait nous sortir de la vie misérable et miséreuse dans laquelle on s’trouve… Un second soupir, aussi lourd que le premier, aliéna l’ambiance morose dans laquelle était entourée Violette. Sa silhouette s’agita d’un frisson, s’écoulant le long de son échine, faisant relever sa frimousse nivéenne dont les pommettes s’étaient parées d’un soupçon de rosé ; plantant à nouveau ses émeraudes scintillantes d’un feu nouveau, comme si elle avait aspiré le flamboiement des fumerolles voltigeuses au coeur même du brasier ardent du foyer pour les installer dans ses pierres précieuses, dans les lacs orageux lui faisant face. Elle m’a pris à part c’jour-là et m’a dit qu’si je n’accédais pas sa d’mande, elle n’attendrait pas les quatorze ans d’Narcisse et Pervenche pour les obliger à faire c’que j’fais actuell’ment. J’me suis toujours d’mandée si elle comptait vraiment l’faire… Mais j’tiens pas à tenter l’sort pour l’découvrir.

La sauvageonne laissa retomber mollement ses bras contre l’étendue plane vernis, sa poitrine partiellement dénudée se juchant dessus, mise en avant malgré elle lorsque la jeune éplorée bascula en avant, le bout de ongles pianotant, cliquetant sur le bois stylisé dans une symphonie empressée où la gêne demeurait palpable. Voilà pourquoi je n’pouvais t’répondre lors d’la soirée Conte. Ma mère a les oreilles qui traînent partout et malheureusement, a l’ouïe très fine. se mit-elle à rire doucement, sans pour autant atteindre son regard, toute pétillance absente de ses yeux clairs. Et pourtant, son hilarité s’amplifia, changeant le mince filet faiblard dont la source prenait place dans l’âpreté en un ruisseau tempétueux poursuivant sa course effrénée, prenant l’embranchement le faisant plonger dans les chutes de l’espièglerie et de la joie qui semblaient animer la délicieuse créature en tout temps. Sincèrement, t’aurais pas pu choisir que’que chose d’plus heureux comme sujet ? A croire qu’ça t’taraudait d’savoir c’mment j’avais pu atterrir dans c’milieu. Ses prunelles d’un vert prairie se criblèrent d’étincelles d’une facétieuse tendresse tandis qu’elle regardait le faciès fatigué de Tharcise, lorgnant sur les cernes bleuâtres ornant les billes anthracites. En r’vanche, si t’as une solution à c’genre d’problèmes, j’suis preneuse. Puis… J’aurai p’têt que’qu’chose à t’proposer concernant Tréville. sourit-elle en coin.
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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptyMar 23 Aoû 2022 - 20:41



Une mauvaise plaisanterie.



La Hanse | 10 février 1164.

Fallait-il croire que la maladresse était un des traits de caractère auxquels ne dérogeait pas le déshérité ? Peut-être. Il l’avait d’ailleurs prouvé, quelques jours plus tôt, en confrontant cette redoutable aptitude à la sensible et orgueilleuse psyché de son amie d’enfance. Mal lui en avait pris. Et le malavisé semblait ne pas avoir appris de ses incartades comportementales puisqu’il venait de réitérer cette périlleuse expérience à la face de la prostituée. Et il prit conscience de sa balourde irrévérence lorsque le faciès de l’adolescente se décomposa, flirtant avec tout un cortège expressif d’émotions sournoises. Le nobliau redressa la tête, interdit, le linteau ténébreux de ses sourcils froncés jetant son ombre sur les grisâtres écus de ses prunelles, un pli soucieux souillant le derme nivéen de son front, les doigts de sa senestre écartés dressés vers le plafond en un mouvement confondu. Une inspiration profonde se hasarda à rompre cet instant d’immobilité confuse avant qu’il ne prît la parole.

- A ma décharge, la question me semblait, hm, appropriée aux circonstances de notre réclusion.

Se défendit Tharcise, ses lèvres obombrées de leur modeste crin se grimant d’un sourire tout en dents afin d’effacer l’air penaud qui chavirait sur ses traits tirés. Il chaparda quelques secondes d’un répit bienvenu à ce malaise qu’il avait provoqué, en attrapant l’aiguière en étain dont la panse au rebondi gracieux contenait le breuvage incarnat. Avec une lenteur exaspérante, il remplit son propre hanap vidé, et légèrement cabossé par le choc de son lancer colérique, et compléta celui de Violette. Le carafon allégé reprit alors sa place, tandis que le nobliau arrimait ses coudes sur le rebord de la table, ses doigts s’entrelaçant, ses pouces se choquant par à-coups nerveux.

- Et puisque Tréville a jeté son dévolu sur toi, c’était l’occasion de satisfaire ma curiosité. Tu sembles si-… jeune ?! commenta-t-il, la dentelle drue de ses cils valsant brièvement au-dessus de ses iris rivés sur l’adolescente. Je comprends pourquoi tu avais l’air si troublé, l’autre jour, à la taverne. Secouant la tête, il s’esclaffa d’un rire sans joie, l’aile noire d’un sentiment lugubre fouettant la surface de son regard vacillant, avant qu’il n’enchaînât sur ce qu'une soudaine réflexion dictait, le verbe caustique. Par les Trois, je constate qu’en matière d’intentions louables, ta mère s’imposerait sûrement en concurrente attitrée de mon oncle.

Un instant accaparé par une pensée, il attrapa son hanap au rebord bossué et l’éleva en direction de la prostituée dont le minois semblait avoir retrouvé son allant facétieux.

- Je t’écoute. Que réserverais-tu à ce bon et loyal Tréville ?
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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptyMer 24 Aoû 2022 - 16:30



Une mauvaise plaisanterie.



Le Port de Marbrume | 10 Février 1164.

Et les ronds imaginaires formés dans les airs par la pointe de ses orteils nus repartirent de plus belle dans le bruissement houleux des vagues transparentes de sa robe de cainsil nacrée. Un index aussi joueur que pensif retraçant du bout de sa pulpe dactyle le rebord du hanap d’étain désormais pleinement rempli du liquide sirupeux couleur carmin. Ses yeux en amande anobli de leur épais ramage ténébreux se refermèrent partiellement sur les prunelles émeraldines aux lueurs malicieuses qui dérivèrent lentement mais sûrement vers le coin de la pièce opposée alors que la courbure ronde de ses lèvres charnues se tordait pour laisser apparaître un fier sourire fripon.

- J’ai seize ans. répondit-elle avec désinvolture à l’interrogation surprise du nobliau, se demandant malgré tout intérieurement, sans pour autant oser le prononcer à haute voix, si les autres n’avaient pas tendance à la voir plus jeune que ce qu’elle était vraiment. Après tout, beaucoup de jeunes femmes de son âge étaient déjà fiancées voir mariées et certaines mêmes, avec un ou plusieurs enfants. Était-ce, en fin de compte, si surprenant ? La plupart des prostituées qu’elle avait croisé, qu’elle avait côtoyé au fil du temps passés à écumer les quais, les ruelles puis les tavernes et autres lieux de divertissements à la recherche de clients potentiels ou dans la simple attente d’un régulier lui faisant comprendre que oui, c’était probablement étonnant. La grande majorité d’entre elles étant déjà adultes depuis longtemps et souvent forcées à donner leur corps au plus offrant pour nourrir leur famille. Mais dans le fond, ne faisait-elle pas la même chose tout en essayant de tenir les ambitions de sa rapace de mère loin de ses jeunes soeurs ?

Violette secoua la tête, faisant voler les quelques mèches éparses évadées de son chignon flou, le foulard satiné aux nuances bleutées retenant tant bien que mal l’abondant buisson épineux qu’était sa chevelure bigarrée. Peut-être que si on les présentait l’un à l’autre, ils pourraient avoir une loooongue discussion sur tooooute l’étendue de leur fervente et ô combien délicieuse éducation parentale et nous oublier quelques instants pour nous accorder un bref répit dont ils n’auraient pas conscience. Sur un phrasé lent aux inflexions rieuses, butant contre les mots entièrement prononcés, l’adolescente saisit l’anse de la coupe au ventre rebondi entre ses serres palotes, amenant la bouche béante de l’hanap au bord de ses lippes pulpeuses, vidant le contenu vineux d’une traite telle une assoiffée dans le désert brûlant avant de le reposer dans un bruit sourd sur le plateau circulaire en merisier.

Sur ce geste, la prostituée bascula en avant, son corps se dépliant dans une exécrable lenteur. Redressée, désormais droite, au-devant de l’âtre, drapée dans son fin linceul ivoire et céruléen, les flammes mouvantes jouaient tout un théâtre d’ombres chinoises au travers du ténu voilage chatoyant, retraçant les contours de l’aguichante silhouette juvéniale, ne laissant que peu d’espace à une quelconque imagination versatile d’entrer dans à son tour dans cette danse spectrale d’une sensualité exacerbée. Concernant Tréville… Si tu tiens vraiment à ce qu’il te laisse tranquille… Elle avança imperceptiblement, à pas feutré, l’étoffe de lin ondulant autour de son allure affriolante, mettant agréablement en valeur la jeune fleur épanouie qu’était le malicieux lutin. Ses pieds se posèrent félinement sur le parquet ancien, ne provoquant que de doux chuchotis en provenance des lattes soutenant son faible poids, contournant la table ronde pour se placer au niveau de Tharcise. Donne-lui ce qu’il veut. Elle tendit une dextre câline vers le faciès masculin aux traits tirés, peignant du bout de ses doigts audacieux le contour de la mâchoire virile sans jamais y toucher. Sa bouche boudeuse esquissa un sourire, d’abord séducteur, qui se transfigura bien vite pour devenir on ne peut plus canaille. Ou du moins, fait semblant. rit-elle en descendant sa petite main gracile à un niveau plus acceptable, la lui tendant plus franchement en guise d’invitation à la suivre ; prenant presqu’immédiatement la fuite en direction du couvre-lit fleuri aux allures champêtres.

- V’nez donc, M’sieur l’Comte. Et amusons-nous comme des enfants ! L’appel du Succube, tout aussi tentateur et séducteur était-il, n’avait, pour une fois, rien à voir avec la luxure. Sautillant littéralement de la manière la plus infantile qui soit, un sourire décadent aux lèvres, Violette remonta le bas de ses robes de sa minuscule poigne pour bondir sur le confortable perchoir, agitant les douces branches enjôleuses de sa dextre dans la direction du brun pour qu’il la rejoigne dans sa lumineuse folie de l’instant.

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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptyJeu 25 Aoû 2022 - 17:37



Une mauvaise plaisanterie.



La Hanse | 10 février 1164.

Tharcise agitait son hanap en un lent ballet circulaire, la surface du liquide carmin s’irisant de délicats ondoiements, tandis qu’il écoutait babiller cette prostituée dont Tréville avait gagé les services pour cette nuit. Seize ans, disait-elle. Il l’avait crue plus jeune. Son regard se fit alors insistant, critique, ses sentinelles d’acier chavirant sur les contours de la juvénile silhouette pour en décrypter peut-être ce qui ne lui avait pas été révélé et qui, pourtant, était à sa portée ; regard qui se fit sobrement fuyant lorsqu’elle évoqua l’éventuel projet de provoquer une rencontre entre Ogier, son oncle, et la mère des Rats du Port. Une idée qui n’avait pas l’heur’ de lui plaire. Aborder le sujet de ce parent usurpateur lui hérissait le poil et…

… encore une fois, la coupe d’étain bascula contre ses lèvres pincées d’amertume. Encore une fois, il ingurgita le breuvage vineux d’une avide rasade sans que la soif n’en fût la cause. Rejetant le hanap d’un sec clapotis sur le bois de la table, il se leva d’un bond, et entreprit de faire le tour de la pièce. Ce qui fut vite accompli, après une ultime œillade sur l’unique fenêtre enténébrée de son tableau nocturne.

- … Quitte à passer cette nuit ensemble, enfermés dans cette chambre, autant éviter de parler de ce qui nous parasite l’existence. Non ?

A la réponse que l’adolescente lui fournit sur ce qu’elle réservait à Tréville, ses sourcils s’arquèrent au-dessus de ses paupières fendues, en même temps que son faciès se targuait d’un tic interrogateur. Pris d’un doute, il s’approcha à pas de loup de la porte, accolant son oreille contre l’épais panneau de chêne. La posture inclinée, empruntant un air concentré, il ferma les yeux, cajolant le battant de l’extrémité de ses doigts avant d’y accoler ses paumes, la respiration s’écourtant. Un tour de sablier s’écoula dans une atmosphère mutique, avant qu’un sourire en demi-teinte ne grimât sa bouche d’une expression entendue.

- Je vois. acquiesça-t-il sur un murmure, alors qu’il percevait de discrets craquements de lattes et raclements de gorge au-delà du seuil condamné. Il revint sur la pointe des pieds, tout en secouant la tête d’un dépit amusé. Non content de me séquestrer dans cette auberge, Monsieur Tréville se sent obligé de me surveiller. A croire qu’il se croit investi d’une mission cruciale. Rappelez-moi d’aller brûler quelques cierges au Temple pour attirer sur lui la bonne fortune.

Le vouvoiement de retour dans sa bouche au dessin rieur, il s’approcha du lit à baldaquin que Violette, en lutin facétieux, avait déjà investi pour en agresser le matelas de quelques bonds espiègles. Une épaule appuyée contre une des colonnes torsadées de la large couche, les bras croisés, Tharcise l’observa, songeur, nostalgique, son esprit jouant de traîtrise en transposant cette vision à une autre qui appartenait à un passé plus joyeux, insouciant. Innocent. S’ébrouant d’un vague haussement d’épaules qu’un frisson électrisait, il relégua cette précieuse fresque d’antan dans un recoin de sa mémoire. Lâchant un souffle de rire, il s’accroupit pour déboucler les attaches métalliques de ses bottes de cuir, avant de se redresser pour s’en débarrasser dans un maladroit jeu de cabri. Les épais houseaux chutant sur le parquet, il se jucha d’un bond sur le lit, tâtonnant du plat de ses mains la structure en bois de son ciel pour préserver un semblant d’équilibre et éviter de s’y cogner le crâne.

Un instant se fit-il hésitant.

- Prête ? Ses canines mordant la pulpe de sa lèvre inférieure, l’œil allumé d’une étincelle pitre, il attrapa la dextre tendue de la jeune prostituée. A ce jeu-là, je me targue d’être imbattable. Sans jouer le suspense, il exécuta un premier saut, puissant et bourrin, pour tester la carcasse éprouvée et observer cette insolite partenaire d’un air provocateur. Un bref coup de menton la défiant, il réitéra son méfait, provoquant un véritable concert de protestations de la charpente en merisier, craquements inquiétants et couinements misérables se disputant la scène sonore à chaque embardée que ses pieds insufflaient.

Son rire alors ébranla l’espace autour d’eux, enfla, pour les envelopper d’une aura chaleureuse, enfantine.
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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptyJeu 25 Aoû 2022 - 21:46



Une mauvaise plaisanterie.



Le Port de Marbrume | 10 Février 1164.

- AAAaaahhh…! Un cri de surprise échappa à la jeune femme, se muant rapidement en un éclat de rire sonore qui se répercuta sur les murs de pierre de la petite chambre. Elle tangua tant bien que mal sur ses pieds nus pour conserver un certain équilibre, l’épaisse couette recouvrant toute la surface du lit et qui commençait à prendre la fuite sous les assauts répétés s’avérait être une traîtresse particulièrement âpre, l’aidant aucunement dans cette tâche ô combien difficile. Sa senestre relâcha instinctivement l’ourlet de sa robe, s’élevant brusquement pour saisir de sa serre délicate le large poignet masculin retenant sa main jumelle dont les frêles arachnides s’étaient repliées autour de la paume calleuse dans le même élan.

- J’admire la technique. dit-elle, hilare, un sourire joyeux fardé de malice se peignant sur son visage, d’une oreille à l’autre, dessinant l’ombre d’une étoile solitaire dans le creux de sa joue droite. Par contre… Un petit air faussement contrit balaya d’un souffle le sourire naissant. Impossible que j’puisse r’produire ton exploit. Pour se retrouver transfigurer en une innocence presque parfaite. J’suis quand même bien loin d’peser ton poids. A l’exception de l’espièglerie qui faisait pétiller ses prunelles olivâtres, ramenant malgré eux son rire en une cascade mélodieuse sur le devant de la scène. Enfin, si ton objectif est d’casser le lit, j’en suis. Et la lueur de défi qui jaillit autant dans son regard qu’il fit apparaître un rictus en coin aux allures carnassières sur le charmant minois de l’adolescente ne faisait pas de vaines promesses.

Alors Violette libéra le bras musculeux de sa faible poigne invasive, prit son élan, et sauta de toute sa masse au centre de la structure, et bondit encore, et encore, au point de voir le foulard retenant son abondante chevelure bigarrée s’envoler, sa folle crinière reprenant ses droits sur la frêle silhouette à la transparente robe nacrée qu’elle enveloppa de sa mante enténébrée anoblie d’un rayon lunaire ; les sombres lianes cabriolant au rythme effréné d’une symphonie inconnue, dansant telles d’obscures flammèches autour du pâle feu follet malicieux.

Comme une enfant, elle s’amusait. Comme une enfant, elle se fichait éperdument de l’impression qu’elle devait donner à voltiger en tous sens, faisant craquer le bois du lit en merisier, son rire empli d’une joie pure se mêlant aux plaintes grinçantes et lancinantes de la pauvre literie malmenée. Comme une enfant, elle se gaussait littéralement de son apparence, de son épineux buisson de ronces noires battant à tous vents contre son dos, ses hanches, ses reins ; de sa robe de cainsil lactescente et de la fine étoffe céruléenne qui, dans toute leur translucidité, dévoilaient bien plus que ce que la décence autorisait. Comme une enfant, elle se moquait que ses pommettes, que ses joues, se soient parées d’un voile vermillon, lui accordant d’autant plus cet aspect juvénile qui semblait déjà lui conférer un âge qui n’était pas le sien. Le lutin mutin sautillait sur le matelas à en faire crachoter son contenu, ricanant comme une belle diablesse dans ses atours luxurieux.

Et c’est toujours comme une enfant, pouffante et gloussante, qu’elle apposa sa main gauche sur la bouche barbue, enfermant celle-ci derrière sa paume alors qu’un chuchotis jovial dont elle maitrisait mal les notes réjouies filtra de ses pulpeuses lèvres carmines. Si on continue d’rire com’ça, i’ vont comprend’ la s’perch’rie. Ses paupières s’agrandirent alors, ses yeux de chat s’arrondirent, faisant ressortir toutes les nuances de vert parsemant ses iris, faisant passer toute une foule d’émotions dont la seule thématique était désormais la bonne humeur.

Puis dans un formidable sursaut, la belle hétaïre poussa un gémissement sonore de jouissance qui remplit la pièce au même titre que leurs rires quelques instants plus tôt.

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MessageSujet: Re: [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette   [ABANDON] Une mauvaise plaisanterie | Violette EmptyVen 26 Aoû 2022 - 10:25



Une mauvaise plaisanterie.



La Hanse | 10 février 1164.

Sa dextre dressée en point d’arrimage sous le châssis de bois pour préserver son assiette rendue périlleuse par les secousses qu’il imposait au lit, sa senestre sertie des pâles arachnides s’y étant enchâssées, Tharcise s’évadait dans les élans d’une hilarité débridée. Le modeste séisme provoqué par leurs sauts réciproques s’éraflait d’une joie enfantine, de cette frivole légèreté qu’il avait depuis longtemps laissée au ban de l’infortuné qu’il était devenu, sacrifiée sur l’autel de tous les vices malsains, détraqués, d’un parent usurpateur. Lui, l’orphelin de père. Lui, qui s’était vu amputer de liens d’amitié si précieux, si vitaux. Lui, le déshérité, le rabaissé, l’humilié.

Le toit branlant, braillant son âpre complainte, menaçait de se détacher de ses quatre montants vibrants. Pourtant ce presqu’homme poursuivit sa harangue joyeuse, entrouvrant la porte à une partie de ses instincts balafrés, encalminés dans la mer de son tempétueux tempérament devenue d’huile, laissant le libre verbiage à l’insouciance et la pitrerie. Jusqu’à ce que l’adolescente, main plaquée sur sa bouche, le rappelât à l’ordre sur l’épilogue souhaité à cette mise en scène. Le souffle contraint, le feu aux joues, Tharcise s’étrangla sur un dernier soubresaut de rire, le gardant à fleur de ses lèvres entrecloses. Le sommier cessa alors de geindre, et avec lui l’écume duveteuse de la couette persécutée retomba en pluie floconneuse autour d’eux.

Et, sans qu’il eût présagé de l’issue de cet avertissement chuchoté, Violette lâcha une plainte jouissive qui le fit hoqueter d’une gêne amusée contre ses doigts. Ses paupières se plissèrent, donnant une dimension plus incisive à ses prunelles grises, réduites à deux étroites fentes. Il se pencha alors vers la frêle adolescente, sa senestre s’évadant sur la fine taille, ses doigts y imprimant leur sceau brûlant à travers le fin tissu de cainsil.

- Continue, qu’il en ait pour la poignée d’écus dont il s’est délesté. souffla-t-il, son haleine chaude percutant la délicate paume accolée à sa bouche, dont les crins qui en soulignaient l’esquisse en éraflaient le derme. Et mon ego ne s’en portera que mieux.

Chargé d’autodérision, un clin d’œil taquin, dans son écrin de cernes bleuis, conclut sa sentence. Dégageant sa main des lisières de la ronde hanche, il échappa ensuite à cette douce emprise pour s’affaler abruptement sur le dos, crevant davantage la surface de la couette martyrisée en une chute maîtrisée, et provoquant une autre explosion de plumes duveteuses. Jambes tendues et chevilles croisées, ses pieds protégés de leur bas de laine battaient une lente mesure. Adossé à un tertre d’oreillers gonflés de plumes, tête échevelée calée au creux de son coude droit replié, il abandonna sa senestre sur le plateau ferme de son ventre et inspira une goulée d’air dont la profonde vibration se fardait de satisfaction, et de soulagement. Une pâle et délicate rémige dansa devant son nez qu’un souffle indolent rejeta. Considérant longuement Violette, petit spectre aux joues rubicondes et essoufflé au milieu de cet ilot de draps défaits, il la gratifia d’un simple sourire aux effluves songeurs. Dodelinant du chef à la suite de cet examen pensif, il s’octroya une brève pause, fermant les yeux sur un autre soupir traduisant l’agréable déraison qui avait enluminé de ses teintes bariolées cet étrange tableau, en cette froide soirée d’hiver.

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