Petit boulot pour un brin de confiance [Lupio]

Sujet: Petit boulot pour un brin de confiance [Lupio] Lun 10 Oct 2022 - 21:32

Il devait être midi lorsqu’Alaïs s’autorisa enfin une petite pause bien méritée. La commande conséquente passée par un négociant du coin pour des présentoirs assortis venait tout juste de sortir du four et il lui fallait maintenant refroidir en paix. La jeune femme devait également se décider sur les touches décoratives qu’elle allait y apporter avec le peu de matériel qu’elle avait sous la main. Lointains étaient les jours où elle travaillait les pierres précieuses. Elle s’avouait désormais contente avec deux, voire trois si elle avait de la chance, couleurs de peinture et, Anûr l’en préserve, une occasionnelle plume.

Alaïs délaissa donc son dernier ouvrage dans l’arrière-boutique où se trouvaient les fours et revint dans l’échoppe à proprement parler. Elle s’assit sur le seul tabouret de la pièce et attrapa la miche de pain qu’elle avait conservée pour ce midi. Depuis l’avant-veille… Et oui, entre une nouveau pot de peinture et de la nourriture, il fallait parfois choisir. Elle dévora donc la miche en quelques bouchées, la tête ailleurs toutefois. Ses yeux étaient rivés sur le colis, empaqueté dans un coin, qu’elle avait préparé la veille. Était-ce vraiment une bonne idée ?

Il était trop tard pour faire marche arrière maintenant. Et puis, les risques n’étaient pas si terribles, n’est-ce pas ? Elle se leva donc pour aller entrouvrir la porte de la petite bâtisse, chose qu’elle faisait souvent lorsqu’elle était disponible et encore plus lorsqu’elle attendait quelqu’un. Comme maintenant.

Alors qu’elle reprenait sa place, l’air frais du mois d’avril s’engouffra dans la pièce en une brise bienvenue face à l’habituelle chaleur étouffante qui régnait en ces lieux. Car même si Alaïs n’avait pour l’instant allumé qu’un seul des deux fours afin de ne pas gaspiller de combustibles, cela suffisait à chauffer outrageusement toute la maison. Et probablement même celles des voisins…

Ce n’était pas la peine de commencer une autre tâche en attendant son invité, elle n’aimait pas être interrompue. La jeune femme, toujours assise sur son tabouret, repensa donc à sa rencontre avec la personne qu’elle attendait patiemment. Le jeune garçon lui avait fait pitié, soyons honnête. Mais des enfants ou jeunes adolescents qui faisaient pitié dans les rues de Marbrume, il y en avait à la pelle. Alors pourquoi avait-elle décidé de tenter d’aider celui-ci ? Il n’avait pas l’air d’avoir un mauvais fond, certes, mais il restait un voleur. Alors pourquoi s’embarrasser d’un tel profil pour le travail qu’elle avait à lui confier ?

Se prenant la tête entre les mains, Alaïs se maudit silencieusement. Parfois, elle n’avait vraiment que de terribles idées. Peut-être, au fond, espérait-elle simplement être celle qui donnerait ce petit coup de pouce en vue de remettre une âme perdue sur le droit chemin ? Bon, d’accord, c’était un chouïa prétentieux… Voire très prétentieux.

Un petit bruit à la porte interrompit alors ses pensées et elle se redressa de toute sa hauteur pour vérifier qui entrait dans sa boutique.

Un soir, autour d'un petit repas, d'une bonne soupe de légumes, Lupio et son père eurent une grande et longue conversation. Ils étaient partis dans un débat sans fin, étaient dans un désaccord. Lupio volait pour survivre, pour nourir la maison et son père tenta de rapporter de l'argent de façon honnête, légal avec son petit travail. Il avait bien sur connaissance des mauvais tours de son fils et ce fut la raison de sa colère. A chaque fois, lupio se mettait en danger, risquait beaucoup et il s’était fait un bon cercle d ennemis. A la longue, il allait finir ses jours en prison, au fin fond d’un cachot et pour rien au monde le père voudrait un tel avenir pour son enfant. Ce soir la, il avait tenté en vain de lui faire entendre raison, de lui donner d’autres pistes pour l’aider. Il avait peur pour lui, Lupio l avait vite compris or c’était la meilleure solution pour avoir a manger dans son assiette le soir. Le père ne pouvait lui en vouloir, il savait au combien le fils avait souffert de s’endormir le ventre vide. Lupio finit par céder, par promettre à son père de faire plus d’efforts, de se chercher un petit boulot honnête.

Les jours suivants, le jeune homme fit un effort de bouger les fesses, de chercher de lui même un petit boulot dans plusieurs quartiers. Il avait même eut l’idée de faire un petit tour dans les faubourgs de la ville, la ou il y avait en général pas mal de paysans des campagnes. Lupio avait réussi à avoir un ou deux contacts dont une jeune femme qui tenait une boutique non loin de chez lui. Ils avaient un peu échangé et elle semblait conquis par le profil du jeune voleur au point ou elle lui avait accordé une chance, un rendez vous. Il n’avait pas intérêt à etre en retard, ce pourquoi il s’était haté à prendre son dejeuné, se changea vite fait dans sa chambre. Il prit une pomme pour la manger en chemin, fit un bref résumé à son père et fila dans la rue à grand pas. Il devait bien sur la retrouver dans la boutique, il y arriva vite devant. Il reprit son souffle, jetta le reste de sa pomme sur le coté avant d ouvrir la porte en toquant en même temps. Il pénétra dans la boutique, petit sac à l’épaule avec un petit sourire chaleureux

“ Bonjour, j espère que je ne vous ai pas fait attendre”

Lupio avait fait une promesse à son père, celle de ne rien voler sur ses futurs lieux de travail. C’était une chose à ne surtout pas faire s’il espérait avoir un vrai boulot à temps pleins et bien payé. Le but était plus de tenter de gagner la confiance de ses patrons en ayant un bon comportement et une motivation dans son travail.

“ Que puis je faire pour toi alors ?”

Il posa le sac sur le coté, se releva les manches. Il était prêt a se mettre au turbin et le bon point fut la motivation qui se dégageaitr de son corps, son interlocutrice allait sans toute l’apprecier pour cela.

« Bonjour Lupio, sois le bienvenu. »
Alaïs salua le jeune garçon d’un sourire bienveillant et lui fit signe d’avancer un peu dans l’échoppe.

Elle observa un instant son coursier de la journée. Il présentait un peu mieux que le jour où elle l’avait rencontré dans la rue. Un poil mieux nourri peut-être.

« Ne fais pas trop attention au désordre… », ajouta-t-elle en englobant l’atelier d’un large mouvement du bras. « Ça ne fait pas très longtemps que je suis installée et je viens de terminer une commande, je n’ai pas encore eu beaucoup de temps pour… ranger. »
Elle fit une petite moue – elle n’aimait vraiment pas le désordre – et se leva de son tabouret.

« Comme je te l’ai dit, j’ai parfois besoin de quelqu’un pour m’aider avec la boutique. Je n’ai pas encore beaucoup de travail, ça ne fait que trois semaines que j’ai ouvert, mais c’est difficile pour moi de quitter l’atelier quand le four est allumé. Du coup, j’ai surtout besoin de quelqu’un pour livrer certaines commandes ou faire quelques courses. Pour le moment. »

Elle fit une pause. Un voleur pour des livraisons… Vraiment, elle avait de ces idées... Mais c’était tout ce qu’elle pouvait se permettre financièrement à l’heure actuelle. Elle précisa donc :
« Je ne suis pas en mesure de te proposer un emploi stable actuellement. Peut-être plus tard, si la boutique fonctionne. Dans l’intervalle, ces livraisons te permettront de rencontrer des patrons qui auront peut-être quelque chose à te proposer. Ce sera alors à toi de jouer, si ça t’intéresse. »

Elle fit le tour de l’établi, ramassa le petit colis qui se trouvait toujours dans le coin de la pièce et le déposa sur la table éraflée par le labeur.

« La livraison du jour, si tu l’acceptes, t’amènera dans le quartier portuaire. Mon ancien patron tient l’atelier de poterie, au nord. Les entrepôts sont assez faciles à trouver. Il m’a demandé de l’aider pour une grosse commande d’amphores. J’ai modelé les poignées ornées. », fit-elle en posant la main sur le colis. Séparément, ces poignées n’avaient du coup aucune valeur. Peu de risques donc que le jeune garçon prennent ses jambes à son cou avec… des poignées d’argile.

« Bauduin est un peu imposant mais il a un grand cœur. Ne te laisse pas impressionner. En échange des poignées », Alaïs poussa la colis vers Lupio, « Bauduin doit te remettre deux petits pots de peinture et un ensemble de pinceaux. Quand tu me les rapporteras, je te payerai un sou pour la course. Je me suis renseignée auprès de mes collègues et c’est le prix moyen pour ce genre de besognes. Ça te va ? »

La jeune femme attendit la réponse du jeune garçon. Si elle était un peu appréhensive quant à son profil, elle espérait aussi que son expérience de voleur lui permettrait d’éviter les pièges qui pourraient se dresser sur sa route.

en fichait normalement et vu l’tétat de sa propre chambre, il était mal placé pour critiquer or la il n’avait pu s’empêcher de s’y attarder : Ce désordre dans cette boutique était fort gênant, surtout pour se déplacer à l’intérieur. Le jeune homme avait bien faillit se prendre les pieds dans le tapis, faire une chute à cause d’un objet mal placé. Il avait du faire des enjambés, se tenir deux ou trois fois pour arriver à la hauteur de son interlocutrice. Là, il décida de ne plus bouger, de prendre une petite chaise pour poser ses fesses. Bien entendu, la vendeuse s’excusa et lui expliqua le pourquoi du comment de ce bazard: Elle venait juste d’arriver ici, de s’installer à sa boutique et n’avait pas eut le temps de tout finir. Elle se plaignait plus ou moins de sa solitude ou une idée vint de suite se loger dans l’esprit de Lupio.

“ je peux..ah”

Il n’eut pas le temps de lui proposer son aide, elle enchaina de suite avec le boulot à faire : Elle avait fait appel à Lupio pour des livraisons dans la ville, il aurait du s’en douter. Seule dans cette boutique, elle ne pouvait pas se permettre de la quitter comme ça, de la laisser sans surveillance, il lui fallait quelqu un pour livrer des produits aux personnes qui ne pouvaient pas se déplacer en boutique; Là, il devait tout simplement se rendre dans le quartier portuaire de la ville pour remettre un colis à l’ancien patron de la jeune fille, en echange d’un autre colis. C’était assez simple comme tache à accomplir, lupio connaissait en plus un petit raccourci.

“ Oui bien sur, j’y vais de suite .. Oups “

Sa motivation était si grande qu’il en avait oublié le désordre dans la boutique et vint de se prendre les pieds dans le tapis. Il perdit un peu l’équilibre mais parvint de justesse à se rattraper à un truc pour ne pas tomber à la renverse avec le colis dans les mains.. Ca aurait été la pire chose, une catastrophe, il aurait tout cassé à l’interieur. Un petit sourire sur les lèvres, un signe de la tête pour lui faire comprendre que tout va bien, le jeune homme sorti vite de la boutique.

Ce fut sa première tache, une facon pour lui de gagner sa confiance donc pas question de faire un choux blanc. Il ne traina en chemin, se hata de faire un aller retour. Ca lui avait quand meme prit une bonne heure, fut esténué de retour au point de départ. Il était revenu avec les fameux pots de peintures et les pinceaux.

“ voila, je peux vous aider pour tout ranger ou je peux peindre?”

Ca l’arrangeait dans les deux cas, il avait quand meme couru pour faire sa course donc un peu de repos ne lui ferait pas de mal sans compter que ça devenait urgent ici. Un peu d’ordre leur faciliterait leur futur tache, évitera surtout de se retrouver avec une jambe en moins à la fin de la journée.

“ laisses, je fais le faire ? Enfin si tu veux”

Lupio avait une logique dans le rangement et selon lui, il fallait commencer par empiler ces cartons les uns sur les autres au fond de la salle.

Alaïs était restée plongée dans ses pensées pendant quelques minutes après le départ du jeune garçon. Elle se demandait comment passerait le contact entre cet ours de Bauduin et le gamin. Quoi qu’il en soit, Lupio avait eu l’air motivé et désireux de bien faire.

Elle réfléchissait au meilleur moyen de s’occuper – il faudrait un moment à son jeune livreur pour faire l’aller-retour et ses dernières créations n’étaient toujours pas froides – quand elle fut interrompue. La visite d’un potentiel client puis de deux livreurs plus tard, et la jeune femme n’était toujours pas plus avancée. L’un des livreurs lui avait ramené de l’argile, dont quelques échantillons de faïence qu’elle rêvait de tester, et l’autre deux sacs de petits bois pour démarrer le four. Ils avaient empilé le tout dans un coin, et lorsqu’Alaïs releva la tête de ses comptes, Lupio était revenu et une heure s’était écoulée.

Elle réceptionna les pots de peinture ainsi que les pinceaux puis remercia le jeune garçon, tout en vérifiant la qualité du matériel.
« Merci, merci… »
Les pinceaux avaient l’air solides et ne devraient pas se défaire au premier lavage – comme les précédents. La peinture n’était pas la plus pigmentée qu’elle ait vu mais c’était le mieux qu’elle pouvait s’offrir à l’heure actuelle…
« Pas de problème sur le chemin ? », s’enquit-elle, un peu par politesse. Il était clair qu’il n’avait pas trainé en route, et donc qu’il n’avait pas dû rencontrer d’obstacle particulier.
Elle était un peu soulagée, et ses doutes s’étaient apaisés. Tout s’était bien passé…

Quand Lupio demanda s’il pouvait faire autre chose, elle réfléchit un instant en jaugeant le tas de nouveau matériel dans un coin. C’était un peu lourd mais à son âge…
« Tu peux effectivement ranger les livraisons du jour à leur place. Les sacs de bois vont à côté du four, dans la pièce suivante, et les stocks d’argile vont sur l’étagère, dans l’arrière-boutique, tout au fond. C’est gentil. »
Elle l’observa du coin de l’œil tout en cogitant à ce qu’il avait dit. Peindre ?
Le gamin était un peu vieux pour un apprentissage. On commençait bien plus jeune, normalement. Les aspirants casés par le Temple avaient quoi ? Dix, onze ans quand ils étaient placés ?

Alaïs attrapa un bout de papier et le morceau de fusain qu’elle avait utilisé plus tôt pour faire ses compte et les garda sous la main. Dès que Lupio eut terminé, elle l’interrogea, penseuse.
« Tu parlais de peindre, plus tôt. Tu sais dessiner ? »
Elle-même ne pouvait pas prendre d’apprenti à l’heure actuelle, elle n’avait clairement pas les moyens, mais si le gamin avait du talent, une recommandation ou l’autre ne ferait pas de mal.

Dernière édition par Lupio Colins le Dim 15 Jan 2023 - 13:32, édité 1 fois

Un petit signe de la tête, un hochement des épaules en guise de réponse. Rien à signaler de ce coté la, la course pour aller chercher les peintures et donner le colis c'était bien passé, sans encombre. Les rues étaient presque vide à cette heure ci, personne n'avait interrompu le jeune homme dans sa course. En preuve, le temps de trajet s'était fait en un temps record, moins long que la normal et pour cause son rythme de marche. Lupio marchait très vite, peu de gens arrivaient à le suivre. Son entourage, son père en particulier, le lui repprochaient souvent d’ailleurs. Un défaut qui allaient se transformer en atout dans le cas présent, sa nouvelle patronne allait sans doute être contente de le voir à chaque fois arriver plutot que prévu, ça allait être pour elle un bon gain de temps. A voir maintenant s’il allait aussi bien se débrouiller avec le rangement, la nouvelle tache à accomplir. Il devait mettre dans l’ordre la dedans, en commençant par la livraison. Il devait ranger des sacs de bois à coté du four dans la pièce à coté ainsi que les sac d agiles sur une étagère dans l’arrière de la boutique. L’enfant des rues eut le réflexe d’aller voir lequel des deux était le moins lourd histoire de ne pas se fatiguer trop vite. C’était les sac de bois, il les prit un par un et les mis la ou il devait les mettre. Il fit plusieurs aller retour devant la jeune femme sans trop faire attention à son occupation, il était vraiment concentrer à la tace dans le seul et unique but de lui plaire, de se faire bien voir. C’était important dans un travail, il n avait pas le choix, encore moins le droit à l’erreur s’il tenait à garder ce travail. Ce fut cette raison qui le poussa à la fois faire attention à ne pas faire tomber les sacs tout en gardant un bon rythme de vitesse. Une fois finit, environ une bonne trentaine de minutes, il revint vers la seule personne dans la salle en se frottant les mains sur son pantalon avec un petit sourire de coin. Non seulement il était satisfait de son travail bien fait mais en plus il avait réussit à ne pas trop se fatiguer à la tâche. Les sacs n’étaient pas lourds au final.

“ voila, j espère que ça ira”

Il s’autorisait une petite pause rapide, le temps d’aller chercher une petite gourde d’eau fraiche dans son sac. Il en bu,à faillit tout recracher suite à la nouvelle demande inattendu et quelque peu déroutante de sa patronne ; Elle voulait connaitre ses aptitudes en dessin, lié a la peinture. Les joues de Lupio se mirent à chauffer et à virer au rouge sur le champs: il n’avait aucune connaissance et aucun savoir faire dans ce domaine du dessin par contre, il se cru être mieux habille pour la peinture ce qui le réconforta un peu.

“ je ne dessine pas, j’en ai jamais eut l’occasion”

Il coupa son petit monologue en deux, le temps de se rapprocher du matériel de peinture. Motivé pour reprendre du travail, il attrapa un pinceau dans sa main et se retourna avec un petit sourire de coin.

“ mais peindre est dans mes cordes ! enfin je crois”

Alaïs fronça légèrement les sourcils. Si Lupio avait l’air extrêmement motivé, il était aussi évident qu’il n’était pas très au fait de ce que la profession de potier impliquait. Manipuler et mouler l’argile ainsi que gérer les cuissons étaient certes l’essentiel du travail mais la décoration, seule chose qui pouvait réellement différencier une simple assiette d’une autre par exemple, était également primordiale. Et c’était dans ce domaine que la jeune femme se devait de se démarquer de ses concurrents.

« Il n’y a plus assez de peinture dans tout Marbrume pour peindre entièrement les pièces de poterie comme on le faisait avant… », commença-t-elle à expliquer.

Il était vrai qu’à une époque, bien avant qu’elle-même ne mette ses mains dans la boue, il était commun de peindre ou d’émailler entièrement les créations d’une couche uniforme de couleur, voire, pour les plus grosses pièces, de créer des contrastes. Mais dans le situation économique actuelle, alors que tout le monde n’avait pas encore suffisamment à manger et que la production d’à peu près tout était réduite, ce n’était juste plus possible.

« Aujourd’hui, on n’utilise plus la peinture que pour des détails. »

Elle se leva de son tabouret et s’approcha du mur sur lequel était accroché un présentoir. Elle sélectionna une coupe et la posa sur l’établi, devant Lupio. Elle n’avait pas encore eu beaucoup de temps pour préparer des pièces à exposer - la moitié des présentoirs étaient encore vides - mais elle aimait bien celle-ci. La coupe d’un ocre très doux, couleur naturelle de la terre qu’elle avait utilisée, était très fine, autant qu’on le pouvait avec de l’argile, et tant le pied que les bords étaient ornementés de délicats entrelacs blancs.

« C’est d’ailleurs là-dedans que je suis spécialisée, la finesse des détails. Ça demande un peu de talent et beaucoup de pratique. »

Elle refit le tour de l’établi pour retourner à sa place et poussa la feuille de papier ainsi que le morceau de fusain vers le jeune garçon.

« Tiens, essaie. », fit-elle avec un sourire encourageant, en pointant du doigt la coupe puis la feuille de papier.
« Tente de reproduire les entrelacs sur le papier. Tant que tu n’essaies pas, tu ne peux pas savoir si tu es doué, ou même si tu aimes ça. »

Lupio était un novice dans ce domaine, sans oublié bien sur une petite naïveté. Il se voyait déjà avec un pinceau à la main, un pot de peinture sur le coté entrain de repeindre toute la boutique. Ca ne saurait pas une si mauvaise idée en soit, elle en aurait grand besoin et ça lui donnerait un petit airs nouveau, propre et frais, rien de tel pour attirer les clients. En plus de cela, ça semblait être dans les capacités de l'enfant des rues, il avait déjà vu des gens peindre des grandes maisons ou des meubles, ce qui lui avait paru être un vrai jeu d'enfant. Ca allait être facile cette petite tache; il la vie comme une autre occasion de montrer à cette jeune femme ses qualités et son efficacité dans le travail. Lupio avait remit sa bouteille dans son sac, s’était relever les manches pour éviter de tacher son t’shirt. La motivation et les espoirs du jeune homme partirent en fumée à la remarque de son interlocutrice, à ses prochains faits et gestes. Le jeune homme avait été à coté de la plaque, loin du compte: Elle voulait peindre les poteries, il aurait du le deviner par la question sur le dessin, elle n avait pas été innocente celle la. Sa confiance en lui avait prit un sacré coup, avait diminué à vue d’oeil. Il se sentait pas du tout capable de dessiner sur ce genre de support, trop petit. Ca demandait une certaine dextérité, précision, chose qu’il doutait avoir. Une peur, la crainte d’échouer ne tarda à naitre dans son esprit. Cela se traduisait dans ses yeux, ils étaient rivés sur le sol, son changement soudain de comportement..

" Je ne suis pas sûr de pouvoir le faire. Je ne voudrais pas abimer vos creation”

Le jeune homme était vraiment hésitant pour ce coup ci. Ses yeux étaient devenus rond comme des billes d’un chat apeuré, les riva sur les matériels de peintures. Il les fixa pendant un long moment, eut le souffle court. Il reprit une grande inspiration, son courage à deux mains grâce à une pensée dans son esprit: Il n’allait pas baisser les bras, abandonné à la première difficulté. Hors de question, il avait une chance d avoir un travail dans toute légalité, il devait essayer de le garder à tout prix. La jeune femme fit le tour de l’établi pour aller lui chercher un papier et un petit bout de fusain pour tester le dessin. Devant le fait accompli, le mur, il n’avait d’autre choix que de se plier à sa volonté. Il prit le petit objet dans ses doigts, commença à faire des traits sur la feuille histoire de le prendre en main. Lupio fut soulagé de constaté une certaine facilité à dessiner certaines formes. Une fois prêt, assez à l aise avec cet outil de dessin, il retourna la feuille et fit des entrelaces comme elle lui avait demandé

“ comme ça ?”

Lui même ne pouvait juger la qualité de son travail; il lui tendit la feuille a la fin de son travail. D’un point vu extérieur, il avait pas un bon niveau; Il appuyait trop sur son stylo et ses traits étaient tordus et hésitant. Ce fut une mauvaise idée de le mettre au dessin, une très mauvaise idée.

Alaïs observa le jeune garçon se décomposer face à elle. Il était assez clair que le gamin n’avait aucune idée de ce que son travail, et probablement beaucoup d’autres, impliquait. Les patrons capables de payer de simples ouvriers manutentionnaires étaient devenus rares. Les gros négociants et entrepreneurs du quartier portuaire pouvaient peut-être encore se le permettre mais pour tous les autres, quelque chose d’unique, dans la créativité, la technique ou la gestion par exemple, était indispensable chez chaque candidat.

Lupio se reprit toutefois et prit le fusain comme s’il s’agissait d’une queue de rat. Il s’essaya à quelques traits grossiers puis, enfin, les fameux entrelacs.

Alaïs examina chaque aspect de la tâche : comment le gamin se tenait, comment il tenait le fusain, combien de fois il se reportait à l’écrin, l’assurance de ses traits,…

Ce n’était pas si mal pour une première fois. Les formes générales étaient là. Pas de tremblement intempestif. Mais ce n’était pas non plus agréablement surprenant. Pour un jeune de son âge, le tout manquait de précision, de finesse.

Le jeune garçon semblait en être conscient mais la potière décida de ne pas être trop dure avec lui. Elle se souvenait trop bien d’à quel point la dureté des adultes pouvait être blessante. Elle ne pouvait pas non plus lui mentir… et risquer qu’il se fasse de fausses idées.

« C’est un bon début ! Avec de l’entrainement, ça pourrait devenir intéressant », remarqua-t-elle avec un sourire encourageant. « Si ça te plait, tu peux toujours y travailler, au dessin. Quand j’étais dehors, je dessinais avec un bâton dans la boue, ça ne marche pas trop mal. » Il valait mieux oublier le papier, c’était impayable. Elle-même ne s’en procurait que le strict nécessaire pour ses comptes et quelques esquisses.

Enfin, Alaïs plongea la main dans une de ses poches et en sortit pas un mais deux sous. Elle refit le tour de la table pour s’approcher.

« Tiens, un sou pour la course d’aujourd’hui, comme convenu. Et un autre pour le rangement. Je vais laisser trainer mes oreilles, si jamais j’entends que quelqu’un d’autre a besoin d’aide. Et je sais où te trouver quand j’aurai de nouveau besoin d’un coursier. Merci pour ton efficacité aujourd’hui », fit-elle chaleureusement en donnant les deux pièces à Lupio. Ce n’était pas grand-chose par les temps qui courraient, mais c’était le prix que les autres artisans du coin payaient à leurs jeunes coursiers.

A peine posé le morceau de fusain sur la feuille, a peine il remarqua l'état lamentable de ses mains, de ses doigts: Ils avaient changé de couleur, étaient devenus noir, bien noir comme les ténèbres. Cette découverte était surprenant, il laissa un petit cri aigu s'échapper de sa gorge, se décala sur le coté. Il lui fallu une demi seconde pour comprendre: Le fusain en était la cause, ca ressemblait à du charbon de bois. Le jeune homme s’était frotté les mains sur son pantalon, avait mis un petit coup dans le morceau pour le sortir de la feuille. Juste à temps, il n avait eut le temps de tacher son dessin, enfin les entrelaces.

“ j’ai fait ce que j’ai pu’

Il avait reprit sa feuille dans les doigts, regarda son travail. Une déception se lu dans son regard, le résultat était loin de le satisfaire. Il avait beaucoup de défauts dans son dessin, il pouvait les voir avec le recule et c’était vraiment pas encourageant. Il avait l’impression d avoir devant lui un dessin d’enfant et encore il était pas sur d avoir ce niveau la. Il avait fait l’effort de tenter quelque chose, de sortir des sentiers battus, c’était le plus important. Le résultat était secondaire dans ce cas de figure, il fallait bien commencer quelque part et ce n’était pas si mal pour une première fois. Loin d’en être complètement découragé, l’enfant des rues eut une petite idée: Celle d’apprendre le dessin avec elle. Ca saurait un bon point; elle semblait très forte et surtout elle verrait sa motivation et son désir de s’investir dans cette boutique, une chance pour lui d'obtenir ce travail à temps pleins. Le petit avait reposer la feuille sur la table, s’était remit à faire deux ou trois formes de bases en guise de tests; Un cube, une phère et une pyramide a moitié raté sur le socle

“ Mai.. Ah ..”

La fête était fini, elle vint de lui donner sa paie, de l’argent pour les services rendus ce matin. Si tôt dans la journée, ca rendit lupio perplexe, le rempli d’une tonne de questions. Il avait une mauvaise sensation, un pressentiment peu agréable; Il l’avait le sentiment de se faire gentiment jeter à la porte.

“ Merci mais je peux..”

La grave erreur ici aurait été de se montrer insistant, d aller contre sa volonté. Lupio mis les quelques pièces dans sa nouvelle bourse. Il l avait changé, avait prit une qui se fermait bien avec un noeux coulant. Plus de pertes accidentelles et surtout plus de vol. Lupio avait été marqué par celui dans la taverne de rozen, eut du mal a le digérer avec la promesse de ne plus jamais se faire avoir comme un bleu. Il l’avait rangé au fond de sa poche. Normalement, c’était le temps pour lui de reprendre son sac et de repartir chez lui or sa détermination et sa motivation étaient encore la, le poussa à se retourner vers elle, à faire cette demande.

“ Est ce que je peux rester ? J’aimerais bien apprendre à faire du dessin avec.. toi ?”

Il y tenait, il devait bien osé dans la vie. Qui ne tentait rien n’avait rien et il n’avait plus grand chose à perdre de toute manière .

Spoiler:

Alaïs observa le jeune garçon paniquer en remarquant les traces de fusain sur ses mains et le rassura.

« Ne t’inquiète pas, ça part à l’eau. »

Il s’essaya ensuite à d’autres formes, sans beaucoup de succès, et balbutia quelques mots, hésitant. Enfin, il lui demanda de rester et… de lui apprendre le dessin ?

La jeune femme ne put empêcher son étonnement de s’afficher sur ses traits. Ce n’était pas du tout ce dont ils avaient discuté préalablement. Elle avait toujours été très claire : elle n’avait besoin de quelqu’un que pour effectuer quelques livraisons de façon très ponctuelle. Ça ne faisait que trois semaines qu’elle avait ouvert son échoppe et elle n’avait ni le temps, ni l’argent, ni l’énergie de s’occuper d’un gamin. Et même si elle avait eu toutes ces choses, Lupio était déjà bien vieux pour commencer un apprentissage dans un art pour lequel il n’avait pas de talent naturel.

Et puis, apprendre à dessiner ? Elle savait que c’était possible. D’autres artistes passaient par cette étape : quelqu’un leur apprenait les bases ou, au contraire, les aidait à se perfectionner. Mais il fallait, à son sens, un minimum de talent à la base. Et ça n’avait jamais été le cas d’Alaïs. Personne ne lui avait appris quoi que ce soit. Elle avait juste… dessiner. Alors apprendre à quelqu’un d’autre ? Elle ne saurait même pas par où commencer.

Mais comment refuser le gamin sans le blesser ?

Son expression se fit grave. Elle n’aimait pas se retrouver dans ce genre de situations. Elle n’aimait pas beaucoup qu’on la mette dans ce genre de situations non plus. Elle avait pourtant été claire dès le début.

« Ça ne va pas être possible, Lupio, j’en suis désolée. Je n’ai pas de temps à consacrer à quoi que ce soit d’autre que mon atelier pour le moment. »

Elle espérait sincèrement que le gamin n’insisterait pas. Elle ne mettrait pas le projet de sa vie en danger pour rien au monde.