Des Cubes dans les rues[Animation RP]

Sujet: Des Cubes dans les rues[Animation RP] Dim 8 Jan 2023 - 15:05

30 juin 1167
Marbrume

Etait-ce l'aube ou le crépuscule ?

Etait-ce au coin d'une échoppe ou au pied d'un arbre tordu par les années ?

La chaleur s'était emparé des rues, chassant grisaille et morosité d'un printemps trop long et trop morne. À travers la cité, disposés là, apparemment sans raison, plusieurs habitants trouvèrent des cubes.

Ils ne pesaient presque rien. Ils tenaient dans le creu de la main. Noirs, les bords saillants, presque tranchants, ces objets attirèrent nombre de questions aux curieux qui les remarquèrent. Miliciens, nobles gens et humbles survivants, toutes personnes légèrement attentives à où le menaient ses pas sembla trouver ces objets énigmatiques.

Et toi ? Les as-tu aperçu ?

Où ?

Qu'est-ce ?

HRP:

Sujet: Re: Des Cubes dans les rues[Animation RP] Mar 10 Jan 2023 - 20:30

30 juin.
Fin d'après-midi.

- Dégage, Ladeg ! grogna le tavernier qui tentait de mettre le poivrot à la porte. Ca fait deux fois qu'on te le dit, tu n'as plus intérêt à mettre un pied à l'Albatros ! C'est bien compris !
- Matez-moi c'tavernier qui r'fuse les clients, brailla le nommé Ladeg dans sa barbe.
- Matez-moi ce maroufle qui veut aller à la potence ! lança une voix forte.

Ladeg se retourna pour voir passer celle que le quartier commençait à connaître, Claire Corbac, la milicienne à la chevelure noire d'encre et à la langue aussi acérée que sa rapière. Elle avait déjà corrigé un infâme qui avait eu le malheur de créer des ennuis à la ravissante fleur de trottoir Clémentine, et l'on se souvenait également qu'elle avait été la seule capable de retrouver une portée de mouflets kidnappés par d'infâmes sectaires.
Et ceux qui avaient été témoins de ses interventions savaient parfaitement qu'il valait mieux ne pas la contrarier quand elle prenait le ton que voilà.
Mais seulement, le Ladeg faisait partie de ces abrutis qui considéraient les femmes comme tout juste bonnes à écarter les jambes, et qui plus est, ne se sentait nullement impressionné en voyant une femme porter l'épée.

- Eh quoi, la poulette, mêle-toi un peu d'tes affaires ! Tiens, pourquoi tu m'ferais pas une petite gâterie au lieu de...

Ni une ni deux, le malotru se retrouva couché au sol avec un genou sur l'entrejambe, et une dague lui caressant la glotte.

- Je compte jusqu'à dix. Si à ce moment-là, tu n'es pas déjà deux rues plus loin, je te couperai la langue et je la donnerai aux corniauds ! Tu as compris ?
- Pfffeuh, tu vas faire qu...

Clervie appuya très légèrement la pointe de la lame. Il couina en sentant une goutte de liquide perler sur son cou.

- J'ai dit : tu as compris ?
- Ou... Oui, oui !
- Allez, dégage ! Pauvre déchet !

Le sac à vin se releva à grande peine sous les rires de certains passants ayant assisté à l'échauffourée. Clervie avait la chance d'être plutôt grande et agile, à défaut d'avoir une réelle force physique et après un an à la milice, savait en jouer pour gagner les bagarres. En particulier face aux ivrognes minables à peine capables de marcher. Dire que la soirée n'était même pas encore entamée... Par les Trois, c'était l'arrivée des jeux d'été qui rendaient les gens aussi excités ?

- Déjà la troisième bagarre que l'on empêche, commenta-t-elle en rejoignant son ami. Qu'est-ce qu'ils ont bien pu boire, ce soir ?
- J'sais pas... Rikni leur a p'têt lancé une malédiction...
- Bref, allons voir ailleurs...

A cet instant, un jeune homme accourut vers eux :

- Corbac ? Milicien Julius ? Y'a du barouf du côté de chez Anaïs Beauregard ! Son bon à rien d'mari a encore trop forcé sur la bouteille !
- Très bien, on y va !

Anaïs Beauregard était une jeune tisserande aux grands yeux bleu pervenche et aux boucles brunes, mariée à un homme de dix ans de plus qu'elle. Elle occupait une adorable petite maison à colombages autour de laquelle poussait des fleurs roses inspirant la douceur. Mais douceur, la pauvre Anaïs ne connaissait point, car son époux, sûrement jaloux de voir sa femme avoir plus de succès que lui avec son modeste commerce de tissu, n'hésitait pas à la battre les soirs où il buvait.
Clervie et Julius arrivèrent juste à temps pour trouver le mari menaçant avec un tesson de bouteille Antoine Lepic, l'un des braves voisins d'Anaïs, qui tentait de l'empêcher de frapper de nouveau la malheureuse.

- J'suis sûr qu'tu te tapes ma femme ! tonnait-il. Tu t'la tapes, c'est bien ça ? C'est pour ça qu'tu la défends ?
- Mais non, tu dis n'importe quoi ! Allez pose ça !

Julius se précipita avec un cri de rage et jeta l'homme à terre.

- Alors maraud, tu fais moins le malin, par les couilles de Serus, quand t'es ace à un homme, un vrai, hein ? T'as pas honte de battre ainsi ta pauv' femme ? Hein ? Hein ?
- L'ai à peine touchée...
- Ben voyons, c'est ça ! Allez, ça plus le fait d'essayer d'poignarder ton voisin avec une pointe de verre, ça va t'valoir au moins trois jours d'cachot, ptête même la potence, au moins, ça délivrerait enfin cette pauv' Anaïs de toi !
- Non, ne le pendez pas, gémit Anaïs. Il a fait cela parce qu'il a bu... Même si... Je ne comprends pas pourquoi il était aussi en colère aujourd'hui... Ce n'est pas... son état normal...
- Comment cela, ce n'est pas son état normal ? répliqua Clervie. L'Antoine nous soutenait il y a trois jeudi qu'il vous avait déjà frappée plusieurs fois.
- Jamais vraiment fort et jamais il n'a essayé de... Non, je ne comprends pas.

En avisant le sol, Clervie remarqua à cet instant l'autre moitié de la bouteille fracassée. Au milieu se trouvait un étrange objet cubique qui brillait à la manière d'une obsidienne à la lueur de flammes.

- Tiens donc ! Qu'est-ce que c'est que ça ?
- Une nouvelle drogue, à tout parier, grogna Julius. La voilà, l'explication ! Non content du vin, il s'ajoute quelques petites épices dedans pour être encore plus ivre et défoncé ! Par les miches de Rikni, j'ai hâte d'aller faire mon rapport à Blancfer, cette fois, il laissera pas passer, le Leandre Beauregard ira danser avec la veuve à la jambe de bois avant la fin d'la huitaine !
- Non... C'est trop cruel, gémit Anaïs en se laissant tomber sur son perron, en larmes.
- Hum.

Clervie examinait longuement le petit objet. Elle renifla, passa son doigt dessus et le lécha.

- Hey, fais gaffe, Corbac ! dit Julius. C'est p'têt du poison !

Sujet: Re: Des Cubes dans les rues[Animation RP] Lun 16 Jan 2023 - 22:45

Des Cubes dans les rues

Bourg-Levant, Marbrume
30 Juin 1167 | Fin d’après-midi.

Ses bottines en cuir brun clair dotées de semelles en bois claquant bruyamment sur les pavés d’un pas frôlant le colérique, le visage barré d’un air renfrogné ; c’est ainsi que l’on retrouve le jeune Violette marchant d’un pas rageur dans les rues embourgeoisées de Bourg-Levant. Il était déjà la fin d’après-midi et cela semblait fortement agacer la Fille d’Anür qui aurait certainement préféré rejoindre l’échoppe de son ami Edgar avant que la journée se termine, croquant violemment dans le restant d’une pomme obtenue un peu plus tôt au cours de ses diverses livraisons.

En réalité, la jeune femme escomptait être à la boutique de l’architecte dans le courant de la matinée, mais elle eut le grand malheur de parler un peu trop fort non loin des autres Filles à l’une de ses comparses et soudainement, elle s’était retrouvée entourée de plusieurs corps féminins, tous piaillant à qui mieux-mieux, comme si brailler plus fort que sa voisine permettait à la sylphide de les entendre plus clairement. Ce qui n’était clairement pas le cas.

« - Dis, Violette, est-ce que tu pourrais porter ceci à ma mère ? Elle vit pas loin de Bourg-Levant et… clamait la première, rapidement suivie par une seconde.
- Vu que tu passes par ce coin, ça te dérangerait de récupérer…
- Tu penses que tu pourrais faire un petit détour pour… »

Et ça n’en finissait plus. Et malheureusement pour elle, elle ne pouvait refuser de venir en aide à ses femmes qui, comme elle, avait choisi cette situation par besoin, par manque d’argent, par manque de toît, par volonté d’offrir une vie meilleure aux enfants qu’elles avaient engendrées, à cause de la disparition d’êtres chers…

Alors l’ancienne prostituée du Port de Marbrume courut à droite et à gauche tout au long de la journée, slalomant dans les venelles étroites du quartier bourgeois pour accomplir les diverses tâches qu’elle avait finalement fait siennes, repartant parfois avec un petit quelque chose en échange, souvent trois fois rien mais qui faisait toujours plaisir à l’offrant comme au receveur.

Toujours de sa démarche décidée aux frappements assourdissants du bois contre la pierre, la lionne à la crinière bigarrée s’approchait enfin de sa destination première, un sourire bienheureux se dessinant sur ses lèvres pulpeuses. Bien que ce dernier soit absent, elle n’en demeurait pas moins heureuse de retrouver l’environnement particulier de l’architecte, mêlant créativité bouillonnante et intelligence aiguë, un peu moins de retrouver l’odeur d’alcool flottant encore dans les airs plusieurs semaines après son départ pour Sombrebois.

Elle n’eut même pas le temps d’ouvrir la porte que son regard fût attiré par quelque chose se situant non loin d’elle. Un cube d’un noir profond. Doté d’une curiosité bien trop grande pour être contenue dans un corps si frêle, la sylphide ne put se retenir d’attraper cet étrange objet de ses pâles arachnides, ses doigts fins se resserrant légèrement autour tandis qu’elle retournait la forme cubique en tout sens, passant la pulpe digitale sur les arêtes presque tranchantes, le portant à son nez pour essayer de repérer une quelconque odeur tandis que ses sourcils se fronçaient au-dessus de ses perles olivâtres dans un signe évident de réflexion mêlé à la confusion.

Et à l’entente des rumeurs alentour, elle n’était pas la seule à avoir fait cette étrange découverte. Ne serait-ce que par les paroles émanant de la maisonnée pas si éloignée d’elle.

Sujet: Re: Des Cubes dans les rues[Animation RP] Mar 17 Jan 2023 - 15:29

Quel étrange objet que celui-ci, de part sa couleur ou son absence de poids. Quelques reflets se révèlent à la lueur de l'astre, hypnotiques et diffus. Ils étaient simplement posés, là. Aux quatres coins de la cité, des curieux s'emparaient de ces objets, les inspectaient avant de les laisser sur place. D'autres s'en emparaient, s'accrochant à une richesse dont ils ignoraient la valeur. En avaient-ils une ?

Rien .

Il ne sembla rien se passer pour ceux et celles qui trouvaient les cubes. Ils étaient comme les gagnants d'une loterie à laquelle ils n'avaient jamais joués. Vraiment ?

Puis, lentement, la tête se mit à tourner. Un sentiment d'ivresse naquit au creux des corps. Les entrailles se mirent à brûler, le monde à tourner, les couleurs à s'estomper, les sons plus irritants. Les prémisces d'une maladie insidieuse qui créea des courbatures et des relents de vomi qui venait se glisser sur les papilles. Les tempes pulsaient au rythme du coeur et tout se mettait à peser plus lourd.

Un mal ? Une épidémie ? Apothicaire et rebouteux pouvaient déjà se frotter les mains. À moins que ...

Y avait-il un lien avec ces cubes ?

HRP:

Clervie:

Sujet: Re: Des Cubes dans les rues[Animation RP] Mar 24 Jan 2023 - 11:44

- A priori non, répondit Clervie après avoir terminé son expérience. Ca ne dégage même pas de liquide. Cela dit, je pense que nous devrions tout de même montrer cela à un alchimiste.
- J'en connais un, mais il est de l'autre côté de Bourg-Levant.

Les deux miliciens s'en allèrent alors porter l'étrange cube d'obsidienne jusqu'à chez Luc Lerat, un homme roux aux longs membres efflanqués presque semblables à des pattes d'araignées, qui passait pour un peu sorcier. Mais comme l'on racontait qu'il avait rendu maints services utiles à la populace, les miliciens n'allaient point trop lui chercher noise.
Il ouvrit la porte de sa mansarde poussiéreuse à la deuxième frappe. Son unique oeil gris perçant gratifia Clervie d'un regard qui lui donna la chair de poule.
- Oui, c'est pour quoi ?
- On a trouvé ceci dans la bouteille d'un ivrogne, expliqua Julius. On pense qu'c'est une nouvelle drogue. T'en aurais pas entendu parler ?
- Pas du tout, répondit l'alchimiste. Mais je veux bien faire quelques tests dessus pour voir de quoi il s'agit. Au tarif habituel.
- Soit, c'est d'accord.
- Repassez demain. J'aurais peut-être des choses à vous dire.

La nuit était à présent presque tombée alors qu'ils retournaient du côté de l'albatros. C'est là que les vertiges commencèrent.
La rue se mit à tanguer. Un violent mal de tête la saisit, et surtout, des crampes terribles.

- Julius... je crois que... c'est bien du poison...
- Par les miches de Rikni, Corbac, qu'est-ce qui t'arrive ???
- Je...

Elle ne put dire un mot de plus. Ses entrailles lui paraissaient s'être changées en serpents vivants. Elle se courba en deux.
- Oh bon sang de merde ! Corbac !!!
Julius avait vu plus d'une fois ses camarades miliciens dégobiller après avoir bu un coup de trop et ce n'était pas le genre de chose susceptible de le choquer. Mais là, en l'occurence, le problème, c'était les filets de sang visibles au milieu des restes de l'infâme tambouille qui avait été servie au déjeuner. Le brave Julius sentit les griffes d'une profonde inquiétude s'enfoncer dans son ventre alors qu'il soutenait une Clervie au regard soudain vitreux, comme si elle allait s'évanouir. Empli de détresse, il héla la première passante qu'il aperçut, une jeune femme à la chevelure aussi brune que celle de la Corbac :
- Mademoiselle ! Mademoiselle, je vous en prie, aidez-moi ! Y'a un r'bouteux dans le coin ? Un guérisseur ??? Je crois que mon amie va mourir !!!

Sujet: Re: Des Cubes dans les rues[Animation RP] Jeu 26 Jan 2023 - 23:02

Des Cubes dans les rues

Bourg-Levant, Marbrume
30 Juin 1167 | Fin d’après-midi.

La jeune femme continuait de tourner et retourner cet étrange petit cube noire aux bords presque tranchants dont le poids inexistant lui paraissait être encore plus léger que celui d’une plume. Et pour une raison abstraite qui fila aussi rapidement dans les méandres de son esprit obnubilé, elle fit demi-tour, descendant les quelques marches de pierre menant à l’antre de son ami pour retourner se faufiler entre les passants de la rue étroite, le minuscule objet d’obsidienne toujours coincé au creux de sa paume.

Jusqu’à ce que des cris parviennent à ses oreilles. Des paroles qu’elle ne comprit pas aux premiers abords avant qu’un éclair de lucidité la frappa lorsqu’elle comprit que c’était à elle que l’on s’adressait. Sans prendre le temps de réfléchir, sa dextre fine se glissa entre les plis rugueux du sac en tissu râpeux qu’elle portait en bandoulière et battait sur sa hanche ronde à chacun de ses pas cadencés, y enfouissant sa si particulière trouvaille pour se libérer les mains et prêter main forte au milicien.

« Y’a une guérisseuse qu’vit pas loin d’là, si j’me souv’ens b’en. » Pour une obscure raison, certainement dû à tout ce remue-méninge, la jeune femme reprit son parlé de naissance, arguant sans le moindre doute qu’elle provenait des bas quartiers et qu’elle n’avait probablement pas grand chose à faire dans celui-ci. Elle qui avait passé tant de temps à avoir une discussion impeccable et un langage plus joli que fleuri venait de retomber dans ses travers sans y prêter la moindre attention. Ne pouvant réellement aider l’homme à porter sa comparse, elle prit néanmoins le soin de passer par les recoins les moins peuplés, apercevant de-ci de-là d’autres personnes dans le même état que la milicienne - ou du moins, pas très loin de l’être - tandis qu’elle-même se retrouva à poser la main contre un mur dans un léger tangage, sa senestre rejoignant sa tempe l’espace d’un instant, la frottant du bout des doigts de manière appuyé tandis que sa paupière se refermait comme une forcenée sur sa pupille olivâtre.

Une profonde inspiration, suivie d’une longue inspiration. Et la Fille d’Anür réajusta son châle lavande antidaté pour reprendre sa route en direction de la petite bicoque étonnamment proprette de l’avenue marchande, donnant trois coups sur le linteau de la porte. Il ne fallut qu’à peine quelques secondes pour que celle-ci s’ouvre sur le visage empli de bonhomie d’une vieille femme rondelette au chignon blanc en parti défait. Expression accueillante qui changea vivement à la vision des trois infortunés tapant à l’entrée de sa demeure. Sans attendre la plus petite invitation à entrer, Violette se rua à l’intérieur, ouvrant grand le battant pour laisser le passage aux deux miliciens avant d’aller s’effondrer sur la première chaise venue sans la moindre grâce, croisant les bras sur la table pour y recueillir sa tête dont le visage avait viré au verdâtre, retenant à grand peine quelques haut-de-coeur.

Sujet: Re: Des Cubes dans les rues[Animation RP] Lun 30 Jan 2023 - 15:06

Les vociférations inquiètes du milicien s'estompèrent lentement au rythme des battements de coeur qui vrillaient vos tempes. Bien vite, les ténèbres vous entouraient comme un linceul rassurant qui vous extripait du tumulte de la cahute de la guérisseuse.

Bientôt ... le silence. Profond, immuable.

Une étrange sensation de calme envahit les corps alors que le silence fut brisé par le bruit d'une goutte d'eau qui s'écrasait sur le sol humide près de votre visage. Bientôt le glas d'un bourdon ébréché retentit, faisant vibrer les corps et ouvrir les yeux à quiconque l'entendait.

Où ? Quand ? Qu'est-ce ?

Une cellule aux murs de pierres grises couverts d'écritures étranges et de mousse aux reflets rougeâtres vous entouraient. Un cube, encore un, au centre duquel les corps souffreteux s'égayèrent. La pénombre régnait, mais après un certain temps, les pupilles permirent de discerner les contours d'une porte vermoulue au centre d'un côté de la pièce.

Y avait-il quelque chose au-delà ? Etait-il prudent de la franchir pour assouvrir sa curiosité ?

HRP:

Sujet: Re: Des Cubes dans les rues[Animation RP] Mar 31 Jan 2023 - 19:56

- Y’a une guérisseuse qu’vit pas loin d’là, si j’me souv’ens b’en.

La jolie jeune femme dont Julius avait imploré le secours montra une grande réactivité et sans attendre, les guida jusqu'à la mansarde de la vieille. Celle-ci, en voyant Clervie, aida aussitôt Julius à l'étendre sur un lit dans un coin de la pièce.
- Qu'est-ce qui lui est arrivé ?
- Je sais pas bien... elle a touché un étrange cube noir qu'était dans la bouteille d'un ivrogne. Pense ben que le mal vient d'là, m'dame. C'est ou une drogue quelconque ou quelque poison sorti d'la gueule d'une engeance d'Etiol. F... Faîtes c'que vous pouvez, m'dame. Corbac est comme ma soeur, j'supporterais pas d'la perdre.
La guérisseuse hocha la tête et Julius la vit attraper un bol et un pilon. L'instant suivant, elle broyait une fine poudre noire, avant de la diluer dans de l'eau qu'elle versa dans un grand gobelet.
- Là. Vl'a, faîtes-lui avaler ça tout'suite. C'est du charbon. Ca marche autant quand on a avalé d'la mauvaise tambouille que quand on s'est empoisonné avec quelque chose. Mais si ça marche pas, y'aura plus qu'à appeler un prêtre d'Anür qu'il la confesse.
Clervie était aux trois quarts évanouie, mais elle sentit Julius lui pincer le nez pour la forcer à ouvrir la bouche. Elle entendit également la guérisseuse poser une bassine de cuivre devant elle. Par les Trois ! Comme si vomir une fois n'était pas suffisant... Et voilà qu'elle recommençait, à peine quelques instants après avoir avalé le produit.
- Bien, bien, on dirait qu'ça marche. Une deuxième rasade pour être sûr, allez. Faut qu'ça sorte c'te saloperie qu'vote camarade aurait ingéré !
- Allez Corbac, l'encouragea Julius. Quand tu seras sortie, j'te paierai un bon tord-boyau à l'Albatros pour t'faire passer ça.
Clervie sentait à présent ses dents crisser à cause de la substance terreuse. Jamais elle n'avait bu quelque chose d'aussi rance. Elle hoqueta et de nouveau, vomit dans la bassine.
- Là ! Là. Ca va mieux ?
Clervie cligna des yeux. Les coliques qui lui déchiraient les entrailles semblaient en effet se calmer. Elle hocha la tête, encore incapable de parler.
- Voilà, elle se sent mieux, on dirait. Je vais préparer d'la soupe, ça finira d'lui remettre les boyaux en place. Elle risque d'avoir quelques brûlures d'estomac si elle reste le ventre vide trop long...
Clervie n'entendit pas la suite de la déblatération de la guérisseuse. En effet, il lui semblait entendre une sorte de tambour. Elle mit un moment à réaliser qu'elle entendait la chamade de son propre coeur...
Puis tout devint noir.

Un coup de gong déchira le silence.
La jeune femme ouvrit les yeux.
Elle se trouvait visiblement dans une pièce aux murailles de pierre humide, couverts de symboles étranges d'un rouge lumineux dans la pénombre. Rouge et noir.
La pièce paraissait avoir capturé les lueurs crépusculaires du couchant. Clervie ne se rappelait pas avoir vu un jour un tel phénomène.

Suis-je morte...?

Elle se pinça le bras. Bon, a priori, elle avait retrouvé toutes sensations et son estomac lui paraissait être à l'endroit. Elle vit qu'une vieille porte se trouvait face à elle et décida de l'emprunter.
Elle avançait à présent dans un long couloir à l'éclairage très faible. De chaque côté des dizaines de portes étaient visibles. Comment trouver la sortie de cet étrange endroit ? Et surtout, comment y avait-elle atterri ? L'avait-on droguée pour l'amener ici à dessein ? Où était Julius ?
Finalement, elle prit son parti et ouvrit la quatrième porte qu'elle aperçut sur la droite.

HRP:

Des Cubes dans les rues

Bourg-Levant, Marbrume
30 Juin 1167 | Fin d’après-midi.

C’est avachie sur la chaise vers laquelle elle s’était précipitée en entrant, le menton entre ses bras croisés sur la table dont elle avait déplacé une partie du contenu, l’oeil vitreux et le teint verdâtre, que la jeune femme regardait la guérisseuse s’affairait autour de la milicienne tandis que son comparse piaillait à qui mieux-mieux toute sorte de choses dont elle ne saisissait pas le sens, ressemblant vaguement à un jeune chot anxieux aboyant aux moindre bruits pouvant paraître suspects. Le tintamarre constant grésillant au fin fond de son crâne se faisant de plus en plus omniprésent, tout comme l’infâme goût de bile qui roulait sans discontinuer sur sa langue ne l’aidèrent vraisemblablement pas à se concentrer sur les paroles échangées entre la vieille Héloïse LeMercier et le grand gaillard qui l’avait appelé à l’aide ; elle sut seulement qu’elle était ravie de ne pas avoir à subir cette ignoble bouillie noirâtre qu’ils étaient entrain de faire avaler de force à la-dite Corbac.

Sa vision se brouilla d’autant plus qu’elle tentait de se focaliser sur ce qui se déroulait sous ses yeux, sa tête glissant lentement de l’appui de la paume de sa main pour glisser le long de son bras, rencontrant finalement la surface plane de la table dans un bruit sourd.

Puis… Le noir.

ₓ˚. ୭ ˚○◦˚.˚◦○˚ ୧ .˚ₓ

Quelque part
Temps incertain

Une goutte d’eau tomba du plafond. Et s’éclata au sol. Les gouttelettes créées de la rencontre entre cette larme et le sol vinrent s’écraser sur la pommette juvénile à la couleur redevenue diaphane, voilée d’une légère nuance rosée. Et s’ensuivit un grognement dépréciateur, puis un battement de paupières, puis deux, puis de multiples ; cherchant à chasser la sécheresse ayant pris place sur la cornée, cherchant à chasser les ténèbres entourant la mince silhouette allongée sur le sol humide. Les iris verdoyants de la sylphide se mirent à voyager autour d’elle, accrochant de leurs teintes verdâtres les sigils rougeoyants sur la pierre moussue des murs entourant le frêle corps féminin demeuré figé.

Violette prit encore quelques secondes avant de commencer à se redresser sur un coude, puis sur l’autre, se retrouvant finalement sur ses deux jambes alors que ses pupilles smaragdines restèrent fixées sur les étranges écritures au-devant d’elle. S’en approchant d’un pas aussi curieux que précautionneux, la pulpe de ses doigts vint effleurer la surface tout en relief, retraçant d’une arabesque attentive les courbes de quelques lettres jusqu'à la porte en bois vermoulu, seul moyen de sortir de cette minuscule et étouffante petite pièce.
S’emparant de la poignée, elle effectua une légère rotation pour entrouvrir celle-ci, passant subrepticement son visage mutin surmonté de son épaisse tignasse bigarrée par l'entrebâillement ainsi créé, ne sachant pas à quoi s’attendre sur ce qui pouvait se trouver de l’autre côté.

Ébahissement, surprise, étonnement. Tant d’adjectifs pouvant qualifier l’expression qui passa relativement calmement sur les traits encore enfantins de la prostituée, étant vivement remplacée par la nervosité et l’anxiété.
Où ai-je bien pu atterrir ? Et comment ?
Tant de questions et aucune réponse. Prenant son courage à deux mains, la petite Rate du Port entama sa progression au travers de ce lugubre couloir.
L’écho de la semelle en bois de ses bottines en cuir brun clair se répercutèrent en un écho à la tonalité gutturale sur les murs à l’aspect sordide de l’endroit, lui faisant resserrer les pans lâches de son châle lavande antédiluvien sur ses maigres épaules, cherchant à n’importe quel prix à chasser le froid mordant prenant naissance à l’intérieur d’elle-même et qui menaçait à tout instant de pénétrer et tordre ses entrailles. Tout en ce lieu sentait le renfermé, lui rappelant soudainement la cale à poissons du bâteau de pêche où travaillaient son père et ses frères avant l’arrivée de la Fange en Marbrume.

Et la vivide lionne continua d’avancer, laissant les portes défiler sur chacun de ses côtés, tout se ressemblant en tout point sans jamais s’interrompre, et ce, pendant de longues minutes qui lui parurent interminables. Du moins, jusqu’à ce qu’elle finisse par se décider à ouvrir la première à sa gauche qui se présentait à elle.

Curieuse curiosité qui pousse les coeurs et les corps à sortir de son cocon. L'humidité flottait dans ce couloir qui semblait sans fin. Le moindre pas se répercutait en écho sans fin à travers ce boyau parsemé de portes identiques.

Chacune s'arrête devant une porte avant de la pousser, fébrile.

DONG

Le glas de la cloche fêlée retentit une fois de plus pour dévoiler l'image d'un homme maigre, si maigre qu'il paraît difficile de déceler chez lui autre chose qu'un squelette sous de la peau blanche.

Recroquevillé et vêtu d'un pagne troué et poussiéreux, il tourna un regard effrayé vers cette étrangère qui pénétrait dans sa cellule. Ses prunelles grises semblaient prêtes à sortir de son visage émacié aux pommettes saillantes. Si son corps désséché remuait lentement, témoin d'un semblant de vie qui l'habitait encore, ses yeux, eux, étaient vides. Il observait l'inconnue sans réellement la voir en se redressant péniblement, faisant cliqueter les maillons des chaînes qui enserraient son cou.

Qu ... Qui ? ... Qu'est-ce que vous faites ici ?

La voix de l'homme était éraillée, les mots prononcés dans un souffle qui lui arracha une grimace. Il avança, lentement, titubant jusqu'à l'étrangère qui franchissait le seuil de sa cellule. Ses mains, osseuses et fines, tremblaient alors qu'il les tendait vers elle. Un faible rayon de lumière venu d'une lucarne au plafond révéla les scarifications qui couvraient son corps. Les murs environnants étaient couverts des mêmes inscriptions étranges et courbes que vous aviez aperçu un peu plus tôt.

Il ... Vous ne devriez pas ...

DONG

Les yeux de l'homme s'écarquillèrent un peu plus, prêt à tomber des orbites. Il observa autour de lui comme une biche ayant reniflé l'odeur du prédateur à proximité. Un frisson lui parcourut l'échine alors qu'il continuait d'avancer en traînant ses pieds nus sur le sol pierreux et froid. Les doigts frêles demeuraient tendus vers vous.

Vous ne devriez pas être ici.

Un bruissement d'abord. Puis de plus en plus, qui se muèrent en un concert de murmures sans queue, ni tête qui tournaient comme une ritournelle pesante, envahit le couloir. L'homme s'arrêta, les bras ballants de chaque côté de son torse rachitique, la tête baissée.

DONG

Il se rua en avant, tel un chien enragé et ne fut arrêté dans sa course que par la chaîne qui se tendit dans un bruit sec. Le regard était fou, de la bave écumait aux coins de ses lèvres gercées, ses mains griffant l'air devant l'étrangère.

IL ARRIVE ! IL ARRIVE !!

Il tomba à genoux, se griffant le visage jusqu'au sang en poussant des cris qui se brisaient dans sa gorge. Le corps désséché se mit à trésaillir pendant quelques secondes avant que tout s'arrête.

DONG

Le glas était plus proche. Un cri, de ceux qui vous transperçait le corps et l'âme résonna au bout du couloir. Un son à la fois gutturale et aigü, comme fait de dizaines de voix discordantes, mélant rugissement et sifflement mauvais.

Entre deux sanglots, l'homme agenouillé sur le sol souffla entre ses dents déchaussées.

Fuyez ...

HRP:

DONG !

A peine Clervie eut-elle ouvert la porte que la cloche retentit, alors qu'elle avait une vision qui lui retournait l'estomac, celle d'un homme recroquevillé et vêtu d'un pagne troué et poussiéreux. Il était si émacié qu'on aurait aisément pu le prendre pour un fangeux. Il se redressa péniblement, les maillons des chaînes qui enserraient son cou émirent un cliquetis macabre.

- Qu ... Qui ? ... Qu'est-ce que vous faites ici ?
- Vous, plutôt, qu'est-ce que vous faîtes ici ? demanda Clervie.

Etait-ce dans les cachots de la caserne qu'elle se trouvait ? Non, cela n'y ressemblait vraiment pas. Pourquoi l'homme ici était-il prisonnier ? Etait-il un innocent enlevé par des sectaires ou une crapule que des gens avaient attaché et abandonné là à raison ? Comment savoir ?
D'ailleurs, il ne semblait même pas avoir entendu ce qu'elle avait dit. Déjà il articulait une nouvelle phrase.

- Vous ne devriez pas être ici.

Ca, elle n'avait pas besoin de lui pour le savoir. Et cette terrible impression se confirma lorsqu'un nouveau "DONG !" retentit et que le prisonnier parut basculer définitivement dans la démence. Il tenta de bondir sur elle et Clervie eut un mouvement de recul. La chaîne qui le retenait tint heureusement bon. Mais à présent, l'homme s'en prenait à lui-même et se griffait le visage. Au milieu de tout cela, il hurla un avertissement :

- IL ARRIVE ! IL ARRIVE !
- Mais qui arrive ?

Un étrange cri guttural résonna soudain, venant clairement du couloir. Clervie ne put s'empêcher de penser aux hurlements des fangeux. Merde. Elle n'était pas armée, qui plus est. Si c'était un fangeux, sortir dans le couloir et fuir pouvait être la pire chose à faire, ces sales bêtes étant bien plus rapides à la course que n'importe quel être humain. D'un autre coté, rester ici, alors qu'ils étaient parfaitement capables de défoncer une porte...
Alors que son coeur battait à cent à l'heure, son cerveau réfléchissait à la vitesse de l'éclair.
Dans les deux cas, ils étaient aux mains d'Anür.
Clervie opta pour une troisième solution.
Elle ouvrit la porte, traversa le couloir comme une furie pour se ruer dans la cellule d'en face dont elle claqua la porte derrière elle.

HRP:

Des Cubes dans les rues

Quelque part
Temps incertain

Le son discordant de la cloche tinta dans les airs, se répercutant tel un sombre présage sur les parois de pierre humide du couloir, instillant un sentiment de fébrilité nerveuse au coeur des entrailles de la jeune femme. Sentiment qui ne se décupla lorsque son regard printanier se déposa sur la carcasse décharnée encore vivante qui résidait au sein de la minuscule cellule, identique à celle qu’elle avait quitté quelques minutes - heures ? - auparavant ; la regardant se déplier avec un air horrifié alors qu’une fine goutte de sueur glacée d’une sourde terreur insidieuse sinuait le long de sa colonne vertébrale, la faisant frissonner.

« Qu ... Qui ? ... Qu'est-ce que vous faites ici ?
- Je…»

Violette déglutit. Ses mots se bloquèrent instantanément dans sa gorge lorsque la silhouette cadavérique s’approchant d’elle en rampant, son propre corps se mouvant instinctivement d’un pas en arrière, son dos rencontrant l’arête de bois vermoulu de la porte qu’elle n’avait pas pris la peine de refermée derrière elle. Ses yeux effarés vagabondèrent sans le vouloir, sans réellement savoir où se poser, sur les innombrables scarifications ornant ce qu’il restait de cette apparition squelettique.

« Il… Vous ne devriez pas…»

La cloche se mit à nouveau en branle. L’écart de temps entre les chants funèbres de celle-ci paraissant de moins en moins long. Peut-être n’était-ce pas le fruit de l’imagination de la pauvresse.

« Vous ne devriez pas être ici.»

Ne pouvant plus reculer, elle s’aplatit contre le bois humide, tentant presque de s’y fondre au fur et à mesure que les doigts osseux se faisaient de plus en plus proches. L’étrange être coincé quelque part entre la vie et la mort entrant dans sa lugubre transe, entre murmures funestes et cris d’agonie, se lacérant le visage avec ce qui lui restait d’ongles ne fit que d’autant plus écarquiller les yeux de la prostituée dont les paupières ne battaient plus, tétanisée qu’elle était devant ce spectacle macabre qu’il offrait ainsi ; sa respiration s’accélérant de manière désordonnée en sa poitrine, créant une résonance, un écho d’autant plus perturbant avec son coeur apeuré, battant à tout rompre dans sa cage thoracique et le glas du destin funeste annoncé par les semonces de la cloche.

« IL ARRIVE ! IL ARRIVE !! »

Étonnamment, il n’en fallut pas plus à la diablotine dénuée de toute malice pour prendre ses jambes à son cou, laissant claquer dans un bruit sourd la porte de la cellule contre le chambranle, rebroussant chemin.

« Fuyez…»

C’est à peine si elle entendit les dernières paroles qu’il prononça, face contre terre.
Son sac tapait, rebondissant, dans un désordre proche de celui qui se tapissait sous sa sauvage crinière, contre sa hanche ; le bois clouté de ses bottines en cuir tapant durement contre les pierres humides tapissant le sol, ajoutant au tintamarre provoqué par l’ensemble des sons que ses oreilles percevaient, autant internes qu’externes. Jetant de temps à autres des coups d'œil par-dessus son épaule, essayant d'évaluer la distance la séparant des hurlements et sifflements gutturaux et pourtant si aigus de son poursuivant plutôt que de vraiment voir à quoi il pouvait bien ressembler, bien trop gênée qu’elle était par l’épaisseur et la vivacité de sa folle tignasse corbeau.

Et elle courut. Le plus vite que ses petites jambes le lui permettaient. Rejoignant sans y songer la cellule dans laquelle elle était arrivée. Et pourtant, elle s’arrêta avant. Bifurquant sur le côté, ses perles olivâtres lorgnant le fond sans fin du couloir qu’elle avait emprunté, elle ouvrit une porte au hasard sur sa droite et s’y engouffra sans y jeter un oeil, refermant doucement la porte derrière elle.

DOOOOOOOOOOOONNNNG

Clervie

Le son était tout proche, vibrant, glaçant ... Un hululement mauvais répondit au tintement métallique de la cloche. Quiconque avait déjà entendu retentir les hurlements des fangeux pouvait ressentir la même peur primal qui lui secouait les entrailles.

Seulement, c'était plus gros ... Bien plus gros ... Et le bruit de sabots claquant contre le sol dallé et frais paraissait aussi dissonnant que la cloche qui retentissait de plus en plus rapidement.

DONG

La Chose était devant la porte qui vibra en répercussion du tintement maladif ... À travers la porte, entre deux épaisses lattes de bois mal alignées, on pouvait apercevoir les contours d'une silhouette grotesque et massive.

Etait-il bien prudent de s'approcher pour regarder de plus près ? Les cris de l'homme décharné fendirent l'air avant qu'une succession de bruits spongieux donnant des haut-le-coeur au plus braves des guerriers ne lui répondit.

DONG

HRP:

******

Violette

Cours, Cours, fille d'Anür ...

DONG

Les portes défilent sous le regard apeuré de la jeune femme qui filait sans se retourner ... Au loin, le bourdon retentissait ... Encore ...

Bientôt, un cri ... Déchirant, douloureux à entendre, à l'image de la souffrance que devait endurer celui qui l'avait poussé.

Une porte, au hasard, comme protection des maux et des bruits qui semblaient la pourchasser.

De nouveau, le silence, la pénombre, une fois que cette porte bénie retrouva l'écrin de son chambranle métallique. Le souffle court, encore paniqué de sa fuite, elle fit un pas en arrière. Le sol semblait mou.

Des corps. Des dizaines de corps jonchaient le sol. Exsangues, les orbites vides et les visages émaciés figés dans des masques de terreur grimaçantes étaient tournés vers la prostituée qui se disait prêtresse. Certains étaient recroquevillés, à l'image de l'étrange type qu'elle avait fuit, d'autres allongés les bras tendus vers la porte. Un autre encore était appuyé contre le mur de gauche, ses ongles ayant réussi à creuser de légers sillons dans la pierre grise.

Un charnier répugnant ... Etait-ce la vue de ces cadavres désséchés ou le fait qu'ils semblaient tous avoir le visage tourné vers la nouvelle venue qui était le plus déroutant ?

HRP:

Des Cubes dans les rues

Quelque part
Temps incertain

Un pas en arrière et le pied de Violette ripa sur un sol mou à la texture étrange. Ses pupilles smaragdines se baissèrent et ne rencontrèrent qu’un amoncellement de cadavres dont la majorité étaient disposés d’une façon particulière, lui rappelant tous cet homme décharné dont elle avait investi la cellule. Elle ne prit pas le temps de bien les regarder, son souffle se bloquant dans sa gorge tandis qu’elle reculait, son échine le long de laquelle louvoyait une goutte de sueur glacée rencontrant la porte refermée. Elle se laissa glisser le long de celle-ci, ses paupières se plissèrent fortement sur ses billes printanières, quelques larmes de diamant liquide perlant quand le fin écrin de chair emprisonna les deux émeraudes emplis d’une terreur angoissante.

Mais que se passe-t-il exactement dans cet endroit sordide ? Sa respiration saccadée lui brûla les côtes, la rendant d’autant plus inconfortable que pouvait l’être toute l’angoisse qui avait étreint son cœur et son esprit depuis qu’elle s’était retrouvée coincée dans ce lugubre endroit. Alors elle dit ce qui lui semblait être la meilleure chose à faire à cet instant et elle reprit le contrôle de son souffle, inspirant et expirant plusieurs fois d’affilée, profondément… jusqu’à ce que ses paupières se rouvrent brusquement. Quelque chose clochait dans cette pièce. Non pas les orbites vides la fixant, bien que cela soit aussi fortement déplaisant qu’effrayant. Non, ce qui l’avait interpellée, c’était cette absence d’odeur. Un monceau de cadavres ne devrait-il pas sentir la putréfaction à plein nez ? Cette odeur caractéristique de la mort ne flottait pas dans le conduit exiguë dans lequel elle se trouvait.

Prenant appui sur le linteau contre lequel elle était avachie, la jeune femme se redressa, glissant quelques mèches de ses tortillons fous derrière ses oreilles sans que cela ne tiennent plus d’une poignée de secondes et se déplaça de quelques pas sur le côté, gardant un œil sur les corps jauchant le sol, une peur insidieuse - mais gardée sous contrôle - cherchant un moyen de rejoindre sa psyché pour s’en emparer et la faire paniquer de nouveau. Ses yeux inquisiteurs scrutèrent les lieux dont la taille était similaire aux deux autres, cherchant la trace de quelques rongeurs apparemment absents.

Sans se départir de toute prudence, elle s’avança au-devant du corps momifié le plus proche, touchant doucement du bout de sa chaussure de cuir le haut de son crâne sans que cela ne produise le moindre petit effet autre que de bouger légèrement la tête qui reprit sa place sans bruit. La prostituée haussa un sourcil, s’inscrivant en accent circonflexe sur son front pâle garni de tortillons noirs malicieux et s’agenouilla devant, posant la pulpe de ses doigts sur les joues creuses et parcheminées de la silhouette décharnée qui s’acharnait à la fixer de ses orbites vides. Ses grandes billes curieuses se déplaçèrent sur l’entièreté de la maigre figure, observant sans la moindre once de pudeur la nudité repoussante mise au grand jour. Quelques traces semblables à des coupures firent tiquer Violette, ses curieuses arachnides venant les effleurer pour s’apercevoir que cela pouvait ressembler à des petites traces de morsures qui s’étaient rétractées sur elles-mêmes, rétractations certainement causées par le manque d’hydratation de la chair.

Une flopée de questions passèrent au travers de son esprit débarrassé de toute terreur ; seule obtenir une réponse lui importait pour le moment. Alors elle dit ce que son instinct lui dictait de ne surtout pas faire et passa un autre corps, l’agrippant sous les aisselles avec force et délicatesse pour le tirer de dessus de la pile. Les bras rachitiques glissèrent et tombèrent de part et d’autres de l’hétaïre, qui ne put s’empêcher de sursauter sous l’attaque sournoise. Attaque sournoise qui lui fit lever les yeux au ciel en pestant dans sa barbe inexistante pour ne pas avoir pensé plus tôt que quelque chose dans ce genre aurait pu se produire si elle déplaçait un des corps sans vie d’aussi haut par rapport à sa petite taille. C’est en fusillant du regard le produit de sa courte terreur qu’elle remarqua un détail qu’elle n’avait pas noté sur le premier corps et qui la fit se pencher dessus prestement, attrapant entre ses doigts graciles l’une des mains desséchées, observant l’intérieur de la paume. Un « P » ?

La sylphide se mit debout sur ses pieds. Une farandole d'hypothèses plus farfelues les unes que les autres carambolait sous son crâne luisant tandis que ses yeux se fixèrent sur la porte qu’elle comptait emprunter une nouvelle fois. Tant pis pour les conséquences désastreuses qui l’attendaient. Elle avait besoin de savoir.

Mais quel était donc cet endroit ?

Un énorme amas répugnant et blancheâtre attendait la jeune femme de l'autre côté de la porte. Une vague odeur de pourriture flottait, à donner la nausée, mais en tant que milicienne, Clervie avait déjà vu pire.
Au moins, elle était sûre d'une chose, le phénomène auquel elle assistait n'avait rien à voir avec la fange ; les cadavres étaient visiblement bien trop décrépis et trop secs pour avoir trempé dans le marais récemment.
Et ils ne semblaient pas du genre à commettre l'impolitesse de se relever.
Quant à ce qui les avait tués... Ca rôdait visiblement dans le coin, à la recherche de sa prochaine victime.

DONG, DONG, DONG !

La cloche se faisait toujours entendre, de plus en plus près. Clervie comprit que ce devait être le signe particulier du malade qui avait tué tous ces gens. Il ne devait jamais s'en séparer. De nouveau, elle lâcha un juron en se rappelant qu'elle ne possédait nulle arme, hormis le stylet gardien de sa vertu, toujours coincé dans son corset. Certes, il pouvait tuer, mais cela nécessitait de réussir à prendre sa cible par surprise.
Et pour cela, il fallait déjà réussir à identifier l'ennemi. Au moins, ce n'était pas un fangeux.
Elle se rapprocha de la porte. Il y avait une petite fente dans son bois. Pile ce qu'il fallait pour épier ce qui se passait dans le couloir. Sans plus attendre, elle colla son oeil à l'interstice.
Et se figea.
Eclairé par une lumière mourante, une monstruosité arpentait le couloir.
Un cheval attaché à une charette. Non, non, il n'y était pas simplement attaché. Ses flancs écorchés et cadavériques semblaient avoir fusionné avec les traits. Sa chair à vif était encore rouge par endroit. Tout l'attellage devait empester la pourriture. Des monceaux de corps décharnés semblables à ceux qui se trouvaient dans la cellule étaient entassés sur ce véhicule cauchemardesque, la cloche suspendue au-dessus d'eux. Mais ce qui glaçait le plus le sang de Clervie était la silhouette encapuchonnée qui conduisait la macabre voiture. Immobile, beaucoup trop immobile pour être réellement humain.

DONG, DONG, DONG !

Cette maudite cloche... Il y avait de quoi rendre fou n'importe qui. Clervie se plaqua une main devant la bouche pour retenir un hoquet de terreur. Tout son être lui hurlait que la pire chose à faire serait de sortir de la cellule maintenant. Elle ne voulait surtout pas que le cocher sorti d'elle ne savait quelles ténèbres puisse l'aperçevoir. Des larmes roulèrent sur ses joue.

Je suis morte, c'est sûr. Le poison du cube a dû avoir raison de moi. Je suis morte, et cette prison, c'est dans le domaine d'Etiol. Anür a dû me refuser l'entrée dans ses eaux à cause de mes péchés...

Le cocher devait avoir damné son âme encore plus que la sienne, vu la sinistre besogne qu'il était chargé d'accomplir. Mais elle, pourquoi se trouvait-elle enfermée ici ? De quel péché voulait-on la faire se repentir ? De son avortement ? Des meurtres de bandits ? Ou simplement le fait d'avoir osé suivre la voie de la vengeance, réprouvée par les Trois ?
Elle tomba à genoux, priant pour que l'infâme créature ne ressente pas sa présence.

Que les Trois me pardonnent mes fautes. Que les Trois me pardonnent mes fautes. Pitié, sauvez mon âme... Je vous en supplie, sauvez mon âme...