Marbrume


Le Deal du moment :
Réassort du coffret Pokémon 151 ...
Voir le deal

Partagez

 

 Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
Alaïs VerdenArtisan
Alaïs Verden



Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde Empty
MessageSujet: Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde   Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde EmptyJeu 9 Mar 2023 - 18:11
Bourg-Levant
7 mars 1167

Alaïs marchait dans les rues de Bourg-Levant, le pas rendu rapide par la trépidation et un lourd sac passé en bandoulière.

Elle avait pris sa décision deux semaines plus tôt : celle de tenter l’aventure un peu folle d’ouvrir son propre atelier. Elle avait d’abord informé Bauduin, son patron, puis elle s’était discrètement renseignée sur la valeur des pierres précieuses en sa possession. Elle avait ensuite commencé les laborieuses recherches destinées à trouver un lieu adapté à son activité. Et c’est là qu’elle était tombée sur un os… Même Bauduin et ses collègues avaient commencé à laisser trainer leurs oreilles dans les marchés de Marbrume, espérant entendre une rumeur qui pourrait la mettre sur une piste intéressante, mais sans succès. Et la potière avait commencé à s’impatienter.

Peu à peu découragée, Alaïs s’était résignée à sortir son atout de sa manche. Enfin, elle priait pour que ce soit un atout, et pas un autre bourbier.

Elle avait sincèrement espéré ne pas devoir en arriver là. Lorsqu’elle avait rencontré Théodora Priost plusieurs mois plus tôt dans l’échoppe de Bauduin, elle avait été impressionnée et inspirée par la négociante. Aussi avait-elle aspiré à se présenter devant la Dame avec un projet abouti. Mais face à cette impasse qui pourrait lui faire perdre des semaines, elle avait craqué, pressentant que si quelqu’un devait être bien informée, ce serait la négociante. Parce oui, elle s’était renseignée sur Théodora Priost dès qu’elle avait quitté les ateliers du potier. Et son patron, lui aussi dans le négoce depuis des dizaines d’années, avait été sa première source d’informations.

Arrivée à destination et arrêtée devant le bâtiment qu’on lui avait désigné, Alaïs admira un instant la façade du commerce de négoce de la famille Priost et prit une profonde inspiration. ‘Prendre son destin en mains…’, allez. Elle poussa la grande porte et s’avança de le hall spacieux et animé.

Un employé d’une politesse rafraichissante l’accueillit rapidement, s’enquérant de la raison de sa visite.

« Bonjour. Je souhaiterais m’entretenir avec Dame Priost, si elle a quelques instants à m’accorder, ou fixer un rendez-vous à sa meilleure convenance. »

L’employé manifesta une pointe de curiosité et elle poursuivit.

« Je me présente, Alaïs Verden. Je suis potière dans le quartier portuaire. Dame Priost et moi nous sommes rencontrées sur mon lieu de travail il y a quelques mois maintenant. Elle m’avait alors proposé de la contacter si je souhaitais… élargir mes horizons. »

Il sembla tout à fait comprendre, et ne parut pas le moins du monde surpris.

« Je reviens… », fit-il simplement avant de disparaître dans les méandres de l’impressionnante bâtisse.

Alaïs serra ses mains abimées l’une contre l’autre, prête à patienter. Il était loin le temps où elle se sentait à l’aise dans ce genre d’endroits. Elle se savait… dissonante avec le décor. Elle avait bien apporté un soin tout particulier à sa tenue, passant des vêtements de travail propre, et à sa coiffure, mais il n’y avait des limites à ce qu’elle pouvait faire avec ses moyens actuels.


Dernière édition par Alaïs Verden le Sam 18 Mar 2023 - 13:32, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
Théodora PriostCommerçante
Théodora Priost



Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde Empty
MessageSujet: Re: Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde   Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde EmptyLun 13 Mar 2023 - 22:53
Les affaires marchaient bon train à Bourg-Levant. Malgré l’horreur qui entourait Marbrume, la nature humaine avait su reprendre bien vite ses droits. L’offre et la demande étaient toujours présentes, même lors d’une crise de leur ampleur. Il suffisait simplement de se positionner sur les bon créneaux. Le commerce Priost avait su tirer son épingle du jeu et fourmillait d’activité chaque jour que les Trois faisaient.

Dame Priost, dans son bureau du premier étage, étudiait les documents qu’elle avait récupéré, non sans mal, sur l’exploitation minière de Genevray qu’elle avait su ravir à Eden Larrive. Certaines feuilles étaient presque illisibles tant celui qui les avait annotées savait mal écrire. D’autres était abîmées par manque de soin dans leur archivage. Comment quelqu’un d’aussi peu soigneux et stupide que Larrive avait-il pu acquérir les droits d’exploitation de l’endroit ? Cette piste serait à creuser pour sûr. Il n’était pas question qu’un investisseur enragé vienne lui tomber sur le coin du nez parce qu’il avait parié sur le mauvais coq.

Des coups furent frappés à la porte et, sans lever la tête, la patronne autorisa son employé à l’interrompre dans son travail.

« Entrez »

« Madame, une damoiselle du nom d’Alaïs Verden souhaite vous rencontrer. Il s’agit d’une potière que vous auriez rencontré sur son lieu de travail. »


Théodora releva la tête vers le jeune homme face à elle en plissant les yeux, cherchant visiblement de qui il s’agissait. Une potière...ah oui, cela lui revenait. Cette jeune femme qui travaillait dans un bouge du port. Ses doigts avaient fabriqué des pièces d’une très grande finesse. Peut-être pas à la hauteur de certains maître artisan, mais suffisamment pour attirer son attention.

« En effet, je connais cette jeune femme Léo, vous pouvez la faire venir. »

Si la potière était ici, c’est sans doute qu’elle avait l’intention de prendre son destin en main, comme l’avait suggéré la bourgeoise. Théodora mis de côté ce qu’elle était en train de faire auparavant, ne pouvant décemment pas y accorder de l’attention nécessaire quand une autre affaire se présentait à elle.

Au rez-de-chaussée, l’employé revint dans le hall en pleine activité et s’approcha de l’invitée de sa patronne.

« Dame Priost est disponible pour vous recevoir. Veuillez me suivre je vous prie. »

Léo s’inclina légèrement, signe de politesse minimum pour tout client ou partenaire du commerce. Pour la seconde fois, il s'éloigna pour monter les larges marches en bois. Ancien mais entretenu, le bois prouvait la bonne santé des affaires, tout comme les quelques peintures qui décoraient les murs. Si la demeure des Priost était plutôt consacrée à la foi, le négoce était une ode au commerce sous toutes ses formes. Le minerais était tout de même le plus représenté, car étant le point de départ de toute cette entreprise. Et même si ils avaient perdu la partie exploitation lors de la fange, Théodora avait pour projet de récupérer ce bastion de leur commerce.

Une fois arrivé sur le palier, l’employé guida la jeune femme jusqu’au bureau de Dame Priost et frappa avant d’entrer directement. Cette fois-ci, il n’eut pas besoin d’autorisation, étant déjà attendu avec l’invitée. En effet, lorsqu’il s'engouffra dans la pièce, la bourgeoise avait rangé ses travaux et les attendait le dos droit, engoncée dans sa robe émeraude, ses prunelles à la couleur similaire fixées sur eux.

Comme dans son souvenir, le jeune artisane possédait un physique plutôt agréable, qui ferait probablement tourner quelques têtes. Surtout qu’aujourd’hui, la potière avait soigné son apparence. Ses vêtements étaient propres, et Théodora l’aurait parié, parmi ses plus récentes acquisitions. Ses cheveux aussi avait été lavés avec soin et coiffés avec un certain style. Elle tenait à se montrer sous son meilleur jour. Compréhensible quand on venait demander une faveur. Pour quelle autre raison viendrait-elle jusqu’ici après tout ?

« Prenez place je vous prie. »

L’expression aimable de la commerçante se fendit d’un sourire alors qu’elle montrait le confortable fauteuil de cuir face à elle. Tout aussi luxueux que le reste du commerce, c'était un élément supplémentaire pour que son invitée soit une fois de plus impressionnée par ce qui se trouvait sous ses yeux. Après tout, la bourgeoise mettait toujours un point d’honneur à montrer ce qu’elle possédait, le meilleur gage de ce que sa famille pouvait apporter à leurs visiteurs.

Une bûche craqua dans l’âtre et Léo s’empressa d’aller arranger le méli-mélo de bois et de cendres.

« Que me vaut le plaisir de votre visite Mademoiselle Verden ? »
Revenir en haut Aller en bas
Alaïs VerdenArtisan
Alaïs Verden



Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde Empty
MessageSujet: Re: Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde   Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde EmptyVen 17 Mar 2023 - 22:01
Alaïs essayait de ne pas se balancer d’un pied sur l’autre, tiraillée par la nervosité. Elle savait que c’était un pari, de se présenter sans rendez-vous directement sur place, et que la possibilité de repartir bredouille était bien présente. Mais maintenant qu’elle avait réussi à rassembler le courage nécessaire pour passer les portes du négoce, elle espérait que ses efforts payeraient. Elle regarda donc l’employé redescendre les marches avec un air de rapace et un souffle de soulagement lui échappa lorsqu’il lui annonça que Dame Priost pouvait la recevoir. Au moins n’aurait-elle pas à repasser une matinée à se motiver comme une gamine.

« Merci… », fit-elle avec un sourire sincère en lui emboitant le pas.

L’artisane suivit donc l’employé dans le grand escalier, observant chaque détail de l’imposant décor en cours de route. Ça faisait vraiment très longtemps qu’elle n’avait pas mis les pieds dans ce genre d’endroits et sa sensibilité en fut ravivée, lui rappelant qu’elle était une artiste avant tout.

Elle fut ensuite introduite dans le bureau de Dame Priost sans cérémonie – après tout, on était là pour conclure des affaires, pas danser une gigue - et elle s’approcha de la bourgeoise avec un profond signe de tête en guise de salutation.

« Dame Priost, je vous remercie de m’accorder de votre temps si précieux. » Elle était bien consciente du travail nécessité par ce genre d’entreprise. Et elle ne tenait pas à importuner la commerçante plus longtemps que nécessaire. Elle s’assit donc dans l’épais fauteuil lorsqu’elle y fut invitée et ramena le sac qu’elle portait toujours en bandouillère sur ses genoux.

« J’ai beaucoup réfléchi à ce que vous m’aviez dit, lors de notre rencontre. Vous aviez parfaitement raison mais je n’étais pas encore tout à fait prête à l’entendre et je m’en excuse. Je le suis désormais. », répondit-elle à l’interrogation de son interlocutrice avec une fausse assurance. En réalité, elle était morte de peur. Peur de se faire rembarrer ou pire, moquer. Mais quand elle ne se sentait pas à l’aise, elle avait son refuge. Son art. Sans attendre, elle ouvrit le sac qu’elle avait apporté et commença à en sortir quelques pièces de poterie fine qu’elle déposa doucement sur le bureau. Un écrin orné, une fiole de parfum et un objet purement décoratif en forme de fleur de lys. La commerçante lui avait dit d’amener ses plus belles pièces après tout.

« Je… Je ne veux pas m’imposer. J’ai déjà… pris les choses en main grâce à votre inspiration et mon projet progresse mais je rencontre un… obstacle pour lequel je pense que vous pourriez avoir des pistes. » Elle était déjà beaucoup moins assurée. Elle aurait détesté que Dame Priost pense qu’elle était là pour lui demander de l’argent… Elle enchaina donc rapidement, tout en sortant deux dernières pièces de sa sacoche.

« Je rencontre des difficultés à trouver un lieu propice pour mon activité. J’ai imaginé que, peut-être, vous auriez entendu parler d’ateliers ou de commerces vacants? »

Les deux dernières pièces, qu’elle avait placées au centre, étaient un peu différentes puisqu’elles étaient de verre. L’une était un pendentif sphérique au cœur duquel le verre teinté d’un crème et d’un bleu profond s’entrelaçait en douces spirales. L’autre était une représentation d’un petit oiseau prêt à prendre son envol. Le verre transparent dont il était constitué faisait ressortir ses yeux, d’un beau vert émeraude qui trouvait maintes échos dans la pièce.
Revenir en haut Aller en bas
Théodora PriostCommerçante
Théodora Priost



Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde Empty
MessageSujet: Re: Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde   Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde EmptyMer 29 Mar 2023 - 13:47
La politesse de la jeune femme était fort appréciable, aussi Théodora hocha légèrement la tête pour confirmer qu’elle entendait et recevait les excuses de l’artisane. Sans l’interrompre, la bourgeoise observa les poteries fines qui avaient été sélectionnées pour l’impressionner. Il était clair que ça n’avait rien à voir avec les contenants grossiers de la boutique où elle l’avait rencontrée. Son savoir-faire s’était peut-être même légèrement augmenté par rapport au poudrier qu’elle avait acquis. Ce petit objet, qu’elle voyait quotidiennement, était un rappel régulier de cette rencontre innatendue.

Ce qui étonna d’autant plus la commerçante fut d’entendre que son invitée impromptue avait déjà commencé à se lancer d’elle-même dans ce nouveau projet. Bien. Quelqu’un qui savait se donner les moyens d’avancer. La question était donc de savoir ce que Dame Priost pouvait apporter à ce poussin, et vice-versa. Un service en amenait un autre, les choses étaient ainsi faites depuis la nuit des temps. Ceux qui ne s’y soumettaient pas finissaient seuls ou bien anéantis par leurs concurrents. La négociante était bien trop avisée pour finir ainsi.

« Je rencontre des difficultés à trouver un lieu propice pour mon activité. J’ai imaginé que, peut-être, vous auriez entendu parler d’ateliers ou de commerces vacants? »

Les iris émeraude se resserrèrent sur la jeune femme. Il était évident qu’une femme seule, de son âge, avait du mal à attirer la confiance d’un propriétaire ou bien d’un des intendants de la couronne, gestionnaire des nombreux bien appartenant encore au Roi. Il lui aurait fallu venir avec un mari, ou bien avec un titre pour accéder facilement à un local situé dans un quartier correct. Bien entendu, au fin fond du port ou du Goulot, seul l’argent faisait loi.

« A vrai dire, il ne vous sera pas aisé de prouver votre légitimité à louer un commerce dans un endroit comme le Labourg ou Bourg-Levant. Même si le travail des femmes peut être reconnu à sa juste valeur, nous n’avons, aux yeux de beaucoup d’hommes, pas les capacités suffisantes pour gérer de manière perenne un commerce. Sans compter qu’avec l’arrivée massive de population et d’étrangers au Duché, les propriétaires se montrent fort méfiants. Sans compter ce que cela pourrait vous coûter. J’imagine que mes paroles ne sont pas vraiment une surprise si vous vous êtes déjà heurtés à ces difficultés. »

Théodora saisi l’un des derniers bien qu’avait apporté la potière. Il s’agissait de son art d’origine, la verrerie. L’oiseau que la bourgeoise tenait entre ses doigts comportait de remarquables détails pour une pièce de cette taille. Voilà qui témoignait de nombreuses heures de travail infructueux, avant de maîtriser petit à petit le savoir nécessaire. Aussi, le public qui était visé n’était pas n’importe lequel. Seul quelqu’un ayant un niveau de vie presque aussi élevé que celui des Priost ou de l’Esplanade pouvait de permettre d’acheter un objet purement décoratif. Au même titre que les nombreuses parures que possédait la bourgeoise.

« Avez-vous déjà songé quelle clientèle souhaitez-vous toucher ? Et vers où vous installer ? Avez-vous déjà une idée des prix que vous pourriez pratiquer ? »

Car des artisans d’élite, il y en avait déjà quelques uns. Il n’était donc pas à exclure de devoir abaisser quelque peu la qualité de ses produits, ou tout du moins leur donner une destination plus pragmatique, pour que la populace puisse elle aussi se fournir chez elle. Avant de s’engager, Dame Priost devait sonder un peu plus ce jeune poussin. D’un sourire aimable mais suffisamment discret pour quelqu’un de son rang, la négociante invita la jeune femme à répondre à ses question.
Revenir en haut Aller en bas
Alaïs VerdenArtisan
Alaïs Verden



Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde Empty
MessageSujet: Re: Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde   Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde EmptyVen 7 Avr 2023 - 19:39
Dame Priost avait bien mis le doigt sur le noeud du problème: personne - mais vraiment personne!, n’acceptait de louer à une femme seule. Ils avaient pourtant tout essayer. Oui, ils, parce que Bauduin avait fini par prendre comme une insulte personnelle le fait qu’on refuse quoi que ce soit à son petit prodige et il était entré dans la danse. Mais ils avaient eu beau argumenter de concert jusqu’à en avoir la langue toute bleue, et le maître potier s’était même porté officiellement garant d’Alaïs, ils en étaient au même point plusieurs semaines plus tard. Bredouilles.

« Effectivement, Ma Dame. C’est bien pour cela que j’ai dû changer ma façon d’aborder ce problème… Si les propriétaires refusent de me louer leurs biens de peur de ne pas être régulièrement payé parce que, qu’Anûr me pardonne, je ne suis qu’une femme, je n’ai pas d’autre choix que de devenir propriétaire à mon tour. »

Elle marqua un petit temps d’arrêt. Seul Bauduin était maintenant au courant, à demi-mots toutefois, du fait qu’elle possédait ‘des fonds’. Elle gardait un secret absolu sur ces derniers, de peur de devenir la cible de voleurs ou d’envieux. Mais si elle voulait que cette conversation progresse, elle n’avait pas vraiment le choix.

« Je peux garantir un paiement unique et immédiat pour un lieu convenable. Sauf que les ateliers de poterie à vendre, ou en tout cas un atelier avec un four à haute température, ça ne courre pas les rues, même dans les quartiers moins… favorables. »

Elle prit le pendentif de verre dans ses mains, et le retourna entre ses doigts abîmés. Il était loin d’être parfait à ses yeux aguerris. Elle n’avait plus coulé de verre depuis des années et les infimes petits défauts lui apparaissaient dans toute leur horreur. Mais elle avait été extatique en reprenant ses outils en mains. Elle eut donc un sourire un peu crispé en répondant à la question pertinente de son interlocutrice. Honnêtement, à ce stade, elle aurait pris à peu près tout ce qui remplissait à peu près ses critères…

« Je ne vous cache pas que ceci », elle montra l’oiseau et le pendentif en verre, « est mon but ultime. C’est dans la verrerie que je m’exprime le mieux. Je suis toutefois bien consciente que le marché est actuellement très réduit à Marbrume et que les matières premières nécessaires sont encore rares. »
Rien que pour les deux petites pièces en présence, ça leur avait coûté les yeux de la tête, en particulier lorsqu’elle avait essayé de se procurer du tain. Et puis, il avait fallu modifier l’un des fours de poterie pour qu’il monte plus rapidement dans les températures nécessaires à la fusion du verre, ce qui n’avait pas non plus été une mince affaire.

« Dans l’intervalle, j’aimerais me concentrer sur une poterie plus fonctionnelle tout en restant… soignée. De quoi plaire à une partie plus intermédiaire de la populace. En soit, des potiers classiques, il y en a déjà quelques uns en ville. Ils sont bien installés et je dois trouver une façon de me démarquer. Je pense qu’une touche de raffinement sans tomber dans l’excès pourrait être un bon compromis. »

Elle laissa ses yeux bleus rencontrés les prunelles vertes de Dame Priost. Consciente d'être en train de jouer une carte à double tranchant, la potière n’était toujours pas très à l’aise, bien que soulagée de ne pas s’être faite moquer à la première occasion.

« Mon autre piste, et l’une n’exclut pas l’autre, est de proposer des produits à destination des commerçants. J’ai remarqué que je recevais de plus en plus de commandes particulières d’autres artisans et négociants. Pour des présentoirs, des récipients,… qui mettraient leurs créations en valeur. Ce sont alors des commandes en gros sur lesquelles je peux me permettre de baisser la marge bénéficiaire, pour rester compétitive et attractive. Être proche de la Hanse pourrait donc être un très bon point. »
Revenir en haut Aller en bas
Théodora PriostCommerçante
Théodora Priost



Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde Empty
MessageSujet: Re: Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde   Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde EmptyLun 10 Avr 2023 - 11:51
La jeune femme s’était donc effectivement déjà heurtée aux obstacles dont Théodora venait de lui faire part. Elle était elle-même tout à fait bien placée pour savoir à quel point être lié à humain doté d’un pénis pouvait paraître important. Si la bourgeoise agissait en son nom, elle était une folle furieuse, si elle agissait en lieu et place de son époux, elle était une femme dévouée. C’est pour ça qu’avoir un mari idiot tel que Charles était pour elle d’une valeur inestimable. Mais les choses changeraient bientôt, et un titre était à sa portée. Elle ne gâcherait pas sa chance.

Les interrogations de la commerçante avaient amenée des réponses claires, précises et complète de son invitée. Ces questions avaient déjà été mûrement réfléchie. Cette petite avait une tête remplie. Entre son talent indéniable, sa capacité de réflexion et son cran, elle avait de quoi réussir, si on l’y aidait quelque peu. La bourgeoise le savait, elle avait suffisamment de contact pour tirer quelques ficelles. Pour autant, si elle devait s’y mouiller, la négociante ne le ferait pas sans quelques conseils supplémentaires et surtout, pas sans en retirer quelque chose. Toute chose avait un prix en ce monde. Immédiat ou différé, il fallait parfois être patient pour récolter les fruits d’un arbre.

« Il n’est pas exclus que vous puissiez répondre aux deux clientèles. Plus vous visez large, moins vous avez de risque de pertes d’argent. Cela est bien sûr soumis à votre capacité de travail et votre capacité à vous agrandir ultérieurement si le besoin s’en fait sentir, ou à viser une clientèle plus élevée qui vous demandera moins en quantité mais avec une qualité impeccable. »

Bien entendu, ce qui intéressait la jeune artisane était surtout l’endroit où elle pourrait s’installer. Il était assez clair que, à la vue des refus essuyés, elle était prête à s’installer n’importe où. Et, fait intéressant, elle pouvait payer en une seule fois. Certains seraient curieux de savoir comment une femme seule pouvait s’offrir un bâtiment et où elle avait eut les fonds nécessaires. Même Dame Priost s’intéressait à l’information. Non pas pour juger, mais pour en savoir plus sur ce petit poussin qu’elle surveillerait de près.

Après avoir fixé la potière un moment, la maîtresse des lieux ouvrit un des tiroirs de son bureau et farfouilla doucement. Plusieurs lettres y étaient rangées en plusieurs piles, et ce fut dans l’une de celle disposé à l’avant que Théodora choisi de chercher sa carte à jouer. Une fois trouvé, elle referma le tiroir et déplia le courrier de ses mains gantés. Ses émeraudes parcourent les lignes qui lui étaient adressées, puis le parchemin fut posé sur le bureau élégant. Théodora revint fixer les pupilles de son invitée.

« J’ai peut-être une solution pour vous. Un voisin commerçant m’a informé qu’une de ses parentes cherchait à vendre l’atelier de potier que son mari lui avait laissé à sa mort. »


Elle laissa un instant l’information faire son chemin chez la potière, puis elle reprit.

« Comprenez bien que si je vous accompagne dans cette recherche-ci, je met l’honneur de ma famille en jeu auprès de celui qui m’a donné l’information. Nous serons considéré comme étant dans une sorte de parrainage. Vous qui êtes artisane, savez ce que cela implique. Le nom des Priost sera lié au votre, que ce soit le positif ou le négatif. Bien que pour l’instant, il s’agisse plutôt d’un risque pour moi de vous venir en aide. Mais votre talent me convainc. Pour autant, je ne peux engager le nom de mon mari sans lui rendre quelques comptes. Que pourriez-vous nous apporter en échange de notre influence ? »

Les choses allaient ainsi dans ce monde. Un prêté pour un rendu, une sorte d’équilibre que les Trois prêchaient en chaque élément. Le commerce et les relations humaines ne pouvaient en être exclus.
Revenir en haut Aller en bas
Alaïs VerdenArtisan
Alaïs Verden



Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde Empty
MessageSujet: Re: Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde   Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde EmptySam 15 Avr 2023 - 16:39
Une étincelle s’alluma au fond des yeux bleus de la jeune femme à la mention d’un atelier de poterie à vendre. C’était parfait. Exactement ce qu’il lui fallait. Puis vint l’inéluctable question de la contrepartie. C’était là qu’était sa faiblesse, Alaïs en avait bien conscience. Elle n’avait aucune possession à part celles qui lui permettraient d’acheter l’atelier, aucun contact autre que Bauduin et ceux qu’elle avait rencontrés par son intermédiaire, aucune vraie réputation à mettre en jeu à son tour… Non, la potière n’avait pas grand chose à proposer à la bourgeoise.

« À ce stade, j’ai bien peur de n’avoir que ma parole à vous offrir. La parente de votre voisin sera payée au comptant pour son immeuble. Et je m’engage à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour construire et maintenir un commerce irréprochable. C’est… mon rêve, après tout, je ne compte pas gâcher stupidement l’opportunité que vous me concédez. »

Alaïs prit alors une petite inspiration en reposant le pendentif sur le bureau, en évidence. Elle avait bien une autre idée. Mais elle n’était pas certaine que c’était là le genre de carte que Dame Priost voulait la vouloir jouer. Car si elle ne pouvait rien offrir d’autre maintenant, une fois qu’elle serait installée par contre, l’artisane aurait plus de cordes à son arc. Et s’il y avait un langage que les commerçants comprenaient tous… C’était celui de l’argent.

« Dès que je serai établie toutefois… Si vous pensez que votre époux et vous-même pouvez y trouver un quelconque intérêt, je pourrais considérer de n’appliquer aucune marge sur les commandes de votre famille et de ses établissements. Qu’il s’agisse de biens communs ou de pièces sur mesure, en poterie comme en verrerie. »

Les possibilités étaient infinies. Des récipients, des présentoirs, qu’importe les formes et les couleurs. Mais aussi des bijoux pour la bourgeoise, des objets décoratifs, pour leur famille tout comme cadeaux,… Et il n’y avait pas de réel risque financier pour Alaïs dans cette proposition. Si elle ne faisait que couper ses marges, ses matières premières seraient couvertes. Elle ne serait certes pas rémunérée pour son travail mais elle n’aurait pas de loyers à payer, le bâtiment étant déjà sa propriété. Ses prix seraient alors extrêmement attractifs et probablement même imbattables par rapport à ceux de n’importe quel autre artisan. Pour les Priost seulement. Ce qui permettaient à ceux-ci de s’octroyer encore plus de raffinement et de luxe à un prix dérisoire.

À ces yeux, l’investissement et le risque en valaient la chandelle. Les Priost et leur négoce seraient la vitrine parfaite…
Revenir en haut Aller en bas
Théodora PriostCommerçante
Théodora Priost



Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde Empty
MessageSujet: Re: Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde   Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde EmptyLun 17 Avr 2023 - 13:57
Ce petit poussin avait tout à fait compris où la commerçante avait voulu en venir. Quelqu’un d’honnête, intelligent et visiblement travailleur, voilà qui lui plaisait. Il était tellement difficile d’échanger avec des personnes ayant un peu de vision. Bien entendu, Théodora ne cherchait pas en tout humain un partenaire de discussion comme le Comte par exemple. Pour autant la ville contenait tant de gens stupides qu’il ne fallait pas se demander pourquoi le royaume déclinait. Ils étaient juste bon à envoyer en pâture à la fange pour que des gens comme elle puisse étendre son commerce.

Les petits bijoux étant rares à trouver, il fallait savoir les protéger et les polir pour en tirer le meilleur. Aussi, quand la bourgeoise sentait que la jeune femme allait prendre une décision qu’elle pourrait regretter et alimenterait quelques rancœurs entre elles, Théodora ne put que rectifier quelques points.

« Je n’ai pas l’habitude d’arnaquer mes partenaires Mademoiselle Verden. Bien sûr, cela peut parfois arriver lorsque l’on tente de flouer ma famille, ou que mon auditoire est d’une stupidité si affligeante que cela lui sert de leçon. Vous n’êtes ni l’un ni l’autre, de ce que je peux en voir. Aussi, je vais vous proposer quelque chose qui me semble un peu plus juste. »

Il était sûr que Dame Priost n’avait pas ce genre d’attention pour n’importe qui. Certainement pas pour des gens comme Eden Larrive, l’homme qui avait tenté de l’arnaquer à deux reprises et à qui elle avait tout pris en guise de représailles. Le rat n’avait pas assez de pouvoir propre pour récupérer le bien, ne restait qu’à voir si ses mécènes se manifestaient. Elle saurait les recevoir. En attendant, Théodora devait continuer de traiter chaque affaire avec importance.

« Sur la première année de votre activité, il n’y aura en effet aucune marge sur les commandes que les Priost ou les Martel, ma famille maternelle, pourraient vous faire. Je vous propose que nous puissions réviser ce contrat tous les ans, sans jamais pouvoir dépasser les 5% au maximum. D’un autre côté, pour tous les clients qui viendraient de notre part, nous demanderons un léger pourcentage de la vente. Nous pouvons partir sur 0,5 % des ventes de cette clientèle, et, tout comme la marge nous concernant, nous pourrons en réviser le prix chaque année, sans dépasser la marge de 3%. »

Le contrat paraissait simple et clair, tout comme il était juste à ses yeux. Dans tous les cas, il paraissait à la commerçante bien plus fructueux qu’une simple absence de marge. Que ce soit pour elle ou ce petit poussin, c’était un pari, mais un pari qui pouvait leur rapporter à toutes les deux. Et quoi de mieux que d’appuyer son offre avec une carotte supplémentaire .

« Dernier point, si votre réputation vous le permet, vous serez éventuellement contactée par les congrégations d’artisans et de marchands de la ville. Si le cas se présente, nous pourrons appuyer votre adhésion, que ce soit avec les Martel ou les Priost. Bien entendu si nos relations sont validées par un contrat, cela paraîtra tout à fait légitime. Qu’en dites-vous ? »

Le père et le frère aîné de Théodora faisaient parti des Compagnons depuis la refondation de l’ordre, et son fils aîné avait de grandes chance d’y entrer aussi. Quand au cercle des commerçants, autant dire que les Priost y avaient aussi leur place. Bien moins francs que celui des artisan, les liens des marchands étaient tous aussi importants. Les amitiés s’y faisaient et s’y défaisaient en fonction de ce que chacun pouvait y gagner. Les inimités n’empêchaient pas les affaires, les amitiés n’empêchaient pas les désaccords. C’était un conglomérat où l’on naviguait constamment sur des eaux agitées. Un terrain de jeu parfait pour quelqu’un d’ambitieux.
Revenir en haut Aller en bas
Alaïs VerdenArtisan
Alaïs Verden



Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde Empty
MessageSujet: Re: Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde   Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde EmptyDim 23 Avr 2023 - 11:43
La proposition de la commerçante tournoyait dans l’esprit de la jeune femme qui essayait d’y donner du sens malgré la tension sous laquelle elle se trouvait. Elle ne savait ni lire, ni écrire, mais elle avait peu à peu appris à manipuler les chiffres sous la houlette de ses différents patrons. Elle était donc d’habitude plutôt à l’aise. Toutefois, tenter de projeter les marges et pourcentages avancés par Dame Priost alors qu’elle faisait déjà de son mieux pour ne pas se décomposer sur place n’avait rien d’évident.

La possibilité d’appliquer une marge sur les produits vendus aux familles Priost et Martel, aussi dérisoire soit-elle sur des produits de luxe, était certes une contre-proposition honnête de la part de son interlocutrice qui lui donna l’impression en cet instant que la Dame avait réellement l’intention de l’aider.

D’un autre côté, elle savait que les marges de Bauduin par exemple s’étalaient de 20 à 70% selon les produits, la conjoncture et la clientèle. Une retenue de 3% maximum, même si la clientèle recommandée par la commerçante venait à représenter la majorité de ses commandes, resterait une goutte dans l’océan… L’accord lui semblait opportun.

Alaïs donnait déjà énormément de valeur au simple soutien de Dame Priost, d’où sa première proposition qui pouvait paraître extrême. Elle évaluait toutefois avec justesse le fait qu’un contrat commercial allant dans les deux sens présentait les deux parties sous un meilleur jour. L’absence totale de marge pour les Priost et Martel en échange de leur soutien aurait pu sembler déséquilibré, comme si les commerçants établis profitaient de la jeune artisane inexpérimentée et naïve.

La reconnaissance de son talent par la négociante était évidente dans cette proposition et Alaïs s’en trouva émue. La mention de congrégations fut la dernière gratification dont elle avait besoin. C’était l’un de ses objectifs… Bien que plus un rêve inatteignable qu’autre chose. Elle était flattée que Dame Priost l’en pense digne, mais elle se permettait de douter. La présence de femmes parmi les congrégations restait rare et fortement contestée…

Elle inclina donc profondément la tête devant Dame Priost et chercha à nouveau ses prunelles émeraude de ses yeux bleus.

« Je suis honorée par votre proposition et par la possibilité d’un accord commercial avec vos maisons, ma Dame. »

Sans compter l’incroyable coup de pouce que des commandes quasi garanties dès l’ouverture de son atelier représenteraient. Car c’était le plus difficile pour un nouvel établissement: se faire connaître.

Plus qu’à espérer que la veuve serait complaisante et accepterait de lui vendre le bâtiment, et peut-être même une partie du matériel.

« En savez-vous plus sur la localisation de l’atelier en question? », demanda-t-elle ensuite, son front légèrement froncé par la concentration et tentant de contenir sa curiosité.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé



Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde Empty
MessageSujet: Re: Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde   Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde Empty
Revenir en haut Aller en bas
 
Quand la proposition n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Marbrume - Forum RPG Médiéval Apocalyptique :: ⚜ Cité de Marbrume - Quartiers populaires ⚜ :: Bourg-Levant-
Sauter vers: