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 Du beau mot : « cœur »

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Éon AldermanMilicien
Éon Alderman



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MessageSujet: Du beau mot : « cœur »   Du beau mot : « cœur » EmptyMar 15 Nov 2022 - 23:32
11 mai 1167

Surprenant.

J’avais constamment le sentiment que ma poitrine allait exploser pour laisser en charpie toute ma carcasse. Je retenais une colère insoupçonée en moi ; ce sentiment je le connaissais trop bien. Ce que je n’arrivais pas encore à identifier, c’était la cause. Elle n’avait pas la même saveur que les sombres sentiments que j’éprouvais à l’égard de mon plus grand bourreau, l’Épurateur — lui, c’était de la haine brute. Non. Là, c’était une colère bien mal refoulée. C’était ce sale connard de borgne que j’avais dans l’œil, et ça me faisait un mal fou de l’admettre. Parce qu’il avait ses raisons, que j’avais les miennes et que j’avais été incapable de montrer patte blanche et de clarifier le caractère noble de mes intentions.

Pour éteindre ce semblant de brasier qui me consumait intérieurement, j’avais entrepris de passer au Temple, profitant de l’acalmie temporaire dans ma coutillerie. Mon coutiller était toujours hors fonction et mes collègues étaient désemparés, pleurnichant à l’idée de ne pas réclamer un solde pour une ronde qu’on ne leur aurait pas assignée. Des vrais chiens en manque de pitance qui ne voyaient que leur nombril avant de servir les intérêts de la couronne. Je les détestais tous. Desmond de Rochemont m’avait rendu un fier service, même si son entreprise était dommageable envers la royauté ; il faudrait tôt ou tard l’enjoindre de se racheter de cette faute que d’avoir presque torturé à mort un officier de la milice. Le vendre ou non ; dilemme dont je m’acquitterai plus tard.

Je pénétrai dans l’intérieur religieux, me sentant tout à coup envahi d’une sensation de quiétude ineffable, me ramenant à ma condition de moins que rien, de fourmi éphémère dans la fourmilière, de sujet du roi, d’une créature à l’image que les dieux ont voulu nous attribuer. Le visage détendu, la mine penaude, je progressais dans la gigantesque enceinte, accordant parfois des regards avenants tant aux visiteurs qu’aux dévôts. Je me dirigeai le pas décidé, m’éloignant dans des annexes moins désservies, jusqu’à une salle baignée dans un silence salvateur, où quelques petites gens de mon acabit attendaient sachement, assis, voutés devant l’effigie de Serus le Magnifique. C’était là que des prêtres se présentaient et proposaient une oreille attentive à l’abri des indiscrétions malvenues.

Était-ce ça dont j’avais besoin ? De m’en remettre à un de ces hommes des dieux ? De lui témoigner de la suie qui souillait mon âme ? Du mépris que j’avais pour ces sous-êtres qu’eux-mêmes avaient pardonné d’avance ? Était-ce cela, être fort d’esprit ? Pourquoi subsistait-il encore quelque chose en moi qui me dissuadait d’accepter de me conduire en bon enfant, bravant les sentiers de la piété et de l’amour ?

Il t’avait fait massacrée, bon sang !

J’eu un sursaut suite à cette pensée assassine, et pourtant, à mon tour, le dos vouté, les yeux clos, j’essayais de l’écouter, ce silence, comme s’il me permettrait en fait de m’écouter moi-même, de me retrancher dans cette forteresse de mépris et de haine que je m’étais forgée suite à aux horreurs que j’avais traversées. Du bout de mes doigts, je sentais encore la cicatrice de mon poignet. Mais dans mon esprit la plaie était encore béante…
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Gauhar LanisPrêtre de Rikni / Purificateur
Gauhar Lanis



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MessageSujet: Re: Du beau mot : « cœur »   Du beau mot : « cœur » EmptySam 19 Nov 2022 - 19:31
Depuis combien de temps n'avez-vous pas effectué vos devoirs au sein du Temple ?

Foutue Grande Prêtresse. Cette sinistre guenon aux cheveux argentés avait le don d'exaspérer Gauhar dès qu'elle ouvrait sa bouche pour lui annoncer le montant de sa solde. Son petit air pompeux, ses traits stricts qu'elle dissimulait en accueillant le moindre pélerin à la bourse bien remplie. Elle représentait si bien ce qui clochait dans la cité. Trop de membres du clergé se contentait d'être les toutous des puissants en dénigrant leur vraie mission. De plus, même s'il avait toujours réussi à donner le change quand à l'affiliation au Trois et à Serus en particulier, il lui devenait de plus en plus difficile de supporter la coquetterie des pensionnaires du Temple et encore moins le faste ostentatoire qui habillait les murs jadis épurés de la bâtisse. Là, des chandeliers en or, ici des tentures de soie, ici encore, du mobilier en cerisier et en ébène, don d'un riche "croyant" tentant de purger ses pêchés. Il dut se mordre la joue pour ne pas aboyer sur cette vieille carne et lui répondre avec déférence.

Des semaines, ma Mère. Mais les habitants du Goul...
Ne faites pas porter vos manquements sur les frêles épaules de nos plus pauvres ouailles.

Espèce de sorcière mangeuse de merde ! Fond de fût masséré au rat crevé ! Immonde ribaude ! Furoncle ! ...

Bien ma Mère.
Vous pouvez donc recevoir les âmes en peine qui cherchent à être guidé en venant dans nos murs.

Traînée du bas ruisseau ! Crémon de la Fange ! Grosse dinde galleuse ...

Bien, ma mère.
Allez-y. Je suis sûr qu'ils sont déjà nombreux à attendre.

Il s'empara de son bâton, le fit claquer sur le sol pavé et sortit du petit bureau en attendant de ne plus avoir le visage visible de la Grande Prêtresse pour froncer les sourcils en signe de mécontentement. Il pénétra dans la nef, précéder par l'écho de son bâton heurtant le sol. Il balaya les bancs du regard. De prime abord, il ne vit personne, laissant échapper un petit sourire satisfait. Comme si la chance lui souriait en le soustraynt au douloureux exercice d'entendre les confessions inutiles d'une personne trop riche pour ne pas être corrompu. Puis, il le vit. La chance était une catin et elle s'était montré plus capricieuse que jamais. À demi-dissimulé entre les bancs, la tête penchée dans une prière muette, il était là, ce fumier. Gauhar risqua un regard par-dessus son épaule pour apercevoir la silhouette ratatinée de la Grande Prêtresse qui surveillait. Elle aussi l'avait vu. Pas moyen d'y échapper. Il allait devoir faire semblant de s'intéresser aux déboires de cet inconnu et de répondre à ses craintes. Après tout, c'était qu'il savait bien faire ; prétendre. Il fit un petit sourire et un hochement de sourcil presque complice vers la vieille bique qui le toisait et se dirigea vers l'homme. Il s'arrêta à ses côtés, attendant qu'il relève le front et rouvre les yeux. Puis d'une voix mielleuse, il se lança en tentant de faire preuve d'une bienveillance convaincante.

Quelle passion, l'ami ! Êtes-vous venu quérir quelques conseils auprès de Serus, notre Dieu très Saint ?
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Éon AldermanMilicien
Éon Alderman



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MessageSujet: Re: Du beau mot : « cœur »   Du beau mot : « cœur » EmptyMar 13 Déc 2022 - 21:07
Je sentis mon cœur se fendre, comme m’avertissant d’un danger imminent, alors qu’une voix rocheuse, émanant d’un homme marqué par la vie, retentit au point de m’arracher à toute quiétude. Contrôlant un sursaut, je tournai à demi la tête vers le trouble-fête, éteignant d’office mon regard assassin alors que je compris qu’il ne s’agissait pas d’un ennemi en ces lieux. J’avais décidément pris de mauvaises habitudes et je venais déjà à regretter que l’autre queutard à l’œil de verre ne soit pas derrière mes fesses pour m’accorder un sursis de tranquillité qui sierait trop bien à ma situation de pseudofélon accusé du plus grand crime qu’on pût connaître après celui du paricide. J’ai cru l’espace d’un instant que ce dévôt au poil incolore et aux rides sillonnantes se foutait ouvertement de ma gueule. Et puis je me suis souvenu que j’étais effectivement une personne très pieuse. J’avais envie de lui répondre « Quel dieu n’est pas très sain ? » tant j’étais encore sous tension, faute d’avoir été désagréablement surpris. Mais à la place, je me contentais d’un :

« Je ne me sens présentement pas perméable aux psaumes de Serus le Magnifique, mon père. Sans nul doute ma piété m’a-t-elle permis de lui arracher une faveur, celle de rester en vie… »

J’attachai un regard à la cicatrice de mon poignet, l’air songeur, le reste de ma prose ne venant pas de suite. Puis je repris.

« Je fais face à d’autres préoccupation. Des pensées noircissent mon cœur, et il me faut les chasser. Je n’ai trouvé meilleur endroit que celui-ci pour se faire. Accorderiez-vous à un pauvre milicien veuf quelque entretien clos ? Notre dieu vous le rendra. »

Honteux, je baissais le regard, sentant un arrière-goût de défaite amer dans la bouche. Je n’arrivais plus à penser correctement et il me fallait de l’aide.
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Gauhar LanisPrêtre de Rikni / Purificateur
Gauhar Lanis



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MessageSujet: Re: Du beau mot : « cœur »   Du beau mot : « cœur » EmptyJeu 15 Déc 2022 - 12:43
Je ne me sens présentement pas perméable aux psaumes de Serus le Magnifique, mon père. Sans nul doute ma piété m’a-t-elle permis de lui arracher une faveur, celle de rester en vie…

Ah ! Le brave homme ! Probablement que cet individu allait sauver sa journée. Cette vieille carne de Haute Prêtresse était témoin qu'il avait essayé et cet homme n'était visiblement pas prêt à confier ses maux. Excellente nouvelle que celle-ci, le prêtre allait pouvoir retourner à ses pérégrinations usuelles. Et là ...

« Je fais face à d’autres préoccupation. Des pensées noircissent mon cœur, et il me faut les chasser. Je n’ai trouvé meilleur endroit que celui-ci pour se faire. Accorderiez-vous à un pauvre milicien veuf quelque entretien clos ? Notre dieu vous le rendra. »

... C'est le drame. Si proche et à la fois si loin. Le bougre l'avait piégé dans un ascenseur émotionnel ridicule. En deux phrases, il l'avait libéré de la corvée de confession pour l'y inviter explicitement. Du coin de l'oeil, il vit la vieille bique qui souriait d'un air narquois, lui lançant un regard qui signifiait "Je t'ai bien eu vieux machin". Il détestait cette bonne femme. Quand l'heure serait venue, elle serait une des premières à goûter la chaleur du bûcher en place publique. Et il savourerait les cris de détresse de cette gueunon ridée. Il déssera les mâchoires pour offrir un sourire au milicien.

Bien sûr, mon jeune ami. Venez.

Gauhar se tourna en faisant crisser le bout de son bâton sur le dallage du temple. Il se dirigea vers une alcôve dans le fond de la nef après s'être assuré d'un regard par-dessus son épaule que l'homme le suivait. Quelques cierges offraient une lueur mordorée dans la petite pièce dissimulée derrière un rideau de velours vert. Le prêtre écarta la tenture du bout de sa crosse tordue, invitant le milicien à prendre place sur un des petits bancs qui y étaient installés. À son tour, il s'assit avant de déclarer.

Bien ! Quel est donc votre trouble, mon ami ? Je vous écoute.
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Éon AldermanMilicien
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MessageSujet: Re: Du beau mot : « cœur »   Du beau mot : « cœur » EmptyLun 13 Fév 2023 - 21:28
Je croyais sentir un soupçon de mépris ou de réticence dans l'attitude de mon aîné. Ou peut-être avais-je été accoutumé au rejet constant de la part de collègues un peu trop zêlés qui se donnaient à cœur joie de contempler mon ineffable déchéance, eux qui naguère jalousaient ma position ou craignaient mon courroux lorsqu'un fanfaron échouait à exécuter les ordres. Ah, pensais-je, quel dommage que ces goules ne connaissaient pas la peur qu'une proie peut ressentir face au prédateur.

Nous étions tous des victimes ici bas.

Et la victime que j'étais se voyait toute dévouée à l'homme ès spiritualités qui serait susceptible d'éclaircir mes horizons, à défaut de laver mon nom par un coup du sort dont j'aurais ignoré les subterfuges les plus profonds. Non. Ce qui importait n'était pas de se dérober de l'opprobre qui souillait mon nom et les générations qui me suivraient si Mort Subite ne m'arrachait pas jusqu'aux domaines d'Anǜr.

Ce qui importait, c'était d'avouer, à quelqu'un, derrière cet opaque tissu peut-être trop modeste pour que j'explicitasse avec un zèle bien à moi les obscurs desseins que je caressais dans mes heures sombres :

« Je suis le mari de feu Marcelle Alderman, née Doucet, ancienne grande prêtresse de Serus et, plus tristement encore… Purgatrice de ce dernier. »

Ma voix s'était réduite en un chuchot étouffé. Je demeurai de marbre face à ce vieil homme, dont le reflet flammes dansantes semblaient se lover dans ses rides sillonneuses. Il devait avoir ton âge, mais la société accordait davantage de crédit aux vieux hommes qui s'accordaient la fraîcheur des petites vierges, et non l'inverse. Connaîtront-ils cet amour dont tu m'as abreuvé et dont je manque à en mourir aujourd'hui ?

« J'étais prêt à la tuer pour affirmer mon allégeance suprême au Roi. Nous avions pu néanmoins trouver un accord, celui de vendre l'Épurateur et de trahir son immondice de secte pour le bien de l'Humanité, mais nous avons été pris de court. Ils l'ont tuée et m'ont fait porter le chapeau des horreurs qui ont eu lieu lors du couronnement. J'ai pu prouver mon innocence, mais je me suis retrouvé déchu de mes fonctions de Sergent, et maintenant je regarde derrière mon épaule pour guetter une enième tentative de meurtre dont je serais la cible. Il m'est fatigant de ne pas pouvoir simplement me retourner et égorger celui ou celle qui me cherchera noise ; il me faut faire profil bas et encaisser les heurts qu'on m'afflige à cœur joie. »

Je déglutis avant de marquer un silence, essayant de décrypter, autant que possible, les potentielles réactions de mon interlocuteur. Mais j'avais, vraisemblablement, le cœur trop lourd pour envisager qu'il eût s'agit d'une personne à éviter. J'étais peut-être influencé par une dernière rencontre salvatrice.

« J'ai fait la connaissance d'un collègue pour le moins amical. Je sais qu'il ne viendra pas m'occire dans mon sommeil, mais l'idée qu'il ne partage pas mon ressentiment face à la situation me consume de l'intérieur. Je me sens encore plus insulté que si j'avais affaire au dernier des simplets qui voulait ma mort. Je me sens ignoré dans mon désespoir, baffoué dans mon honneur, discrédité dans mon immense désir de vengeance. Et pourtant, cela me tue de vous le confesser, Mon Père, mais j'ai besoin de cet homme à mes côté, ses convictions fussent-elles différentes des miennes. Il saura m'aider à élargir mon sursis, mais j'ai peur qu'il me fasse oublier ce pourquoi je me bats encore aujourd'hui… »

Je pris une inspiration, détournant le regard, m'assurant qu'aucune ombre ne se reflétât sur le rideau qui nous isolait dans l'alcove, le mieux et moi.

Personne ne devait nous entendre.

« Je veux faire tomber la Secte des Purificateurs. »
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Gauhar LanisPrêtre de Rikni / Purificateur
Gauhar Lanis



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MessageSujet: Re: Du beau mot : « cœur »   Du beau mot : « cœur » EmptyLun 20 Fév 2023 - 14:43
L'homme ne se fit pas prier pour débuter sa confession.

Je suis le mari de feu Marcelle Alderman, née Doucet, ancienne grande prêtresse de Serus et, plus tristement encore… Purgatrice de ce dernier.

Ah ! Il serait donc question de ça. Cela faisait plusieurs semaines qu'il n'avait plus de nouvelles des extrémistes qu'il avait intégré pour les corrompre et les dissoudre de l'intérieur. Voilà que le Damné mettait sur son chemin un autre homme qui leur était lié.

J'étais prêt à la tuer pour affirmer mon allégeance suprême au Roi. Nous avions pu néanmoins trouver un accord, celui de vendre l'Épurateur et de trahir son immondice de secte pour le bien de l'Humanité, mais nous avons été pris de court. Ils l'ont tuée et m'ont fait porter le chapeau des horreurs qui ont eu lieu lors du couronnement. J'ai pu prouver mon innocence, mais je me suis retrouvé déchu de mes fonctions de Sergent, et maintenant je regarde derrière mon épaule pour guetter une enième tentative de meurtre dont je serais la cible. Il m'est fatigant de ne pas pouvoir simplement me retourner et égorger celui ou celle qui me cherchera noise ; il me faut faire profil bas et encaisser les heurts qu'on m'afflige à cœur joie.

Les mains jointes devant ses lèvres, Gauhar observait sans bouger le visage torturé du confessant. Leurs regards se croisèrent dans un moment de silence. L'histoire devenait intéressante, aussi le prêtre s'efforça de rester de marbre pour inviter l'homme à poursuivre son histoire.

J'ai fait la connaissance d'un collègue pour le moins amical. Je sais qu'il ne viendra pas m'occire dans mon sommeil, mais l'idée qu'il ne partage pas mon ressentiment face à la situation me consume de l'intérieur. Je me sens encore plus insulté que si j'avais affaire au dernier des simplets qui voulait ma mort. Je me sens ignoré dans mon désespoir, baffoué dans mon honneur, discrédité dans mon immense désir de vengeance. Et pourtant, cela me tue de vous le confesser, Mon Père, mais j'ai besoin de cet homme à mes côté, ses convictions fussent-elles différentes des miennes. Il saura m'aider à élargir mon sursis, mais j'ai peur qu'il me fasse oublier ce pourquoi je me bats encore aujourd'hui…

Il balaya l'alcôve du regard, s'assurant nerveusement qu'ils étaient bien seul. Gauhar tourna les yeux par mimétisme, tentant de masque son incrédulité face à l'attitude du bonhomme.

Je veux faire tomber la Secte des Purificateurs.

Le silence retomba comme un voile de poussière. Sans un mot, le vieux prêtre observa roidement l'homme. Il avait du mal à comprendre l'extrême précaution qu'il prenait pour prononcer ces paroles qui étaient tout sauf répréhensibles. Le fait qu'il se confessait à un membre de cette secte -infiltré et ayant les mêmes ambitions que lui certes- était cocasse. Gauhar se redressa doucement, plongeant son regard dans celui en quête de réponse de son interlocuteur. Pourtant ce sont des questions qui furent formulés.

Une noble quête à n'en point douter, mon ami. Cependant, j'ai envie de demander : "Pourquoi ?"

Le ton était égal, bienveillant, et imité le ton de confession qu'avait adopté Alderman. Il poursuivit.

Si votre nom et votre honneur ont été lavés de tous soupçons, y a-t-il un vrai intérêt à cette vendetta ? Que pensez-vous avoir à prouver ? Et à qui ?

Les questions étaient ouvertes, sans jugement de valeur, cherchant simplement à ce que l'homme ne cherchasse lui-même les réponses. Le prêtre n'en avait pourtant pas fini.

Ce camarade dont vous parlez, n'est-il pas une preuve que tous vos maux ont déjà trouvés une fin ? Même si cette fin ne vous satisfait pas pleinement, je l'entends bien.

Gauhar leva les mains en signe de paix, anticipant une saute d'humeur d'Alderman. L'homme était à fleur de peau, il valait mieux prendre toutes les précautions.

Ne voyez aucune pique dans mes propos. Seul vous pouvez avoir la réponse à ces questions et je ne cherche qu'à vous accompagner sur le chemin de la paix en les posant. J'en ai d'ailleurs une dernière. Est-ce vraiment pour aider l'Humanité que vous brûlez de détruire les Purificateurs, ou pour vous aider vous ?

Le grand barbu joignit de nouveau les mains devant ses lèvres pour accompagner son silence et laisser l'homme tant à sa réflexion qu'à ses réponses.
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Éon AldermanMilicien
Éon Alderman



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MessageSujet: Re: Du beau mot : « cœur »   Du beau mot : « cœur » EmptySam 11 Mar 2023 - 16:06
Je me sentais délesté d’un poids. Comme si mon cœur s’était retrouvé à flotter dans ma poitrine, léger comme l’air ; cet ineffable sentiment de déclarer, à cet homme affable, quelle était ma raison de vivre, ma raison d’être, et ce sans être jugé. La tête du borgne me revenait encore à l’esprit. Ça n’était pas lui qui aurait été capable de telle prouesse.

Il se trouvait même que l’aîné faisait montre d’une certaine curiosité flatteuse. Aussi répondais-je de manière calme et posée à chacune de mes questions. Pour que le beaume eût agi, il fallait s’ouvrir. Chose dont j’étais très peu capable dernièrement.

« Une noble quête à n'en point douter, mon ami. Cependant, j'ai envie de demander : "Pourquoi ?"
Parce qu’ils ont montré ô combien ils sont dangereux, lors du couronnement du Roi. De surcroit, il n’y a que l’autorité du Roi qui prévaille désormais. Je suis au service du Roi et les Purificateurs figurent parmi les nombreux ennemis de la couronne. Il est de mon devoir de les détruire. Ce qu’ils m’ont infligé à titre personnel n’est qu’une motivation supplémentaire. Personne d’autre que moi n’a autant envie de les brûler. »

Oui, l’on pouvait mesurer une certaine violence dans mes propos. Mais le timbre de ma voix, lui, n’avait nullement vacillé.

« Si votre nom et votre honneur ont été lavés de tous soupçons, y a-t-il un vrai intérêt à cette vendetta ? Que pensez-vous avoir à prouver ? Et à qui ?
J’étais naguère un Sergent respecté et craint des plus infâmes miliciens. Certains naissent grands et vivent loin de certains heurts, bien retranchés dans l’Esplanade. D’autres conquièrent les grandeurs. Présentement, des trouffions se donnent un malin plaisir à me malmener, parce qu’ils ont la force du nombre que je n’ai plus. La seule personne à qui j’aurais des choses à prouver n’est autre que ma défunte épouse. Sinon, seul les Trois peuvent décider de mon sort. Le reste… »

Le reste pouvait crever la gueule ouverte.

« Ce camarade dont vous parlez, n'est-il pas une preuve que tous vos maux ont déjà trouvés une fin ? Même si cette fin ne vous satisfait pas pleinement, je l'entends bien.
Castaing a ses préocuppations, il m’est interdit de lui tenir rigueur de nos derniers accrochages. Enfin, c’est davantage lui qui doit être remonté. Mais s’il a le temps de se laisser heurter par ses petits sentiments, grand bien lui fasse. D’autres luttent pour leur survie ici bas, alors, je doute qu’il se confonde en remords à mon égard longtemps. C’est un homme de valeur, après tout. »

Mais le collègue en question ne pouvait pas étancher à lui seul ma soif de vengeance. Seule la tête de l’Épurateur au sommet d’une pique me rendrait la sérénité qu’on m’a arrachée.

« Ne voyez aucune pique dans mes propos. Seul vous pouvez avoir la réponse à ces questions et je ne cherche qu'à vous accompagner sur le chemin de la paix en les posant. J'en ai d'ailleurs une dernière. Est-ce vraiment pour aider l'Humanité que vous brûlez de détruire les Purificateurs, ou pour vous aider vous ?
C’est une question orientée que vous me posez là. L’Humanité n’a pas besoin d’être aidée, c’est à elle seule de décider de son sort, Purificateurs comme non Purificateurs. Pour ma part, je suis ce que je suis et les Trois m’ont voulu ainsi. C’est bien évidemment pour m’aider moi que je veuille parvenir à mes fins. Ce sera aux Trois de décider de l’issue, quelque part. Ma piété, elle, n’en sera que plus grande, indépendamment de l’issue de cette entreprise. »

Je me sentais dès à présent enhardi, capable de soutenir mon interlocuteur du regard. Une partie de moi avait encore bien envie de profiter de sa quiétude et de sa sagesse.

Une autre avait envie de repartir en guerre. Parce que mon ennemi juré n’attendait que ça : que je baisse les bras. Il en était tout simplement hors de question.

« Aussi, les Trois veulent que je prenne congé. Il y a d’autres âmes bien plus égarées que la mienne qui pourraient avoir besoin de vous en ce moment même, aussi vais-je retourner à mes plus prompts engagements. Mes respects, mon père, et que Serus vous accorde plus de longévité qu’il vous en faut. »

Sur ces vœux, je disparus, filant derrière le rideau et me dérobant à toute présence dans le Temple.

L’heure était venue pour moi de battre en retraite. Pour l’instant.
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