Un dîner presque parfait [Pv Gisèle Messonnier]

Godefroi c'était habillé d'une chemise de soie rouge, brodée de fils d'or, de braies de même couleurs, de bas de soie noires et de chausse de cuir. Il enfila sa cape, prit sa bourse et son épéé et par cette belle après-midi de mai, il avais décidé de se rendre à la Hanse pour faire son marché et peut être s'acheter de nouveaux vêtements.

Le soleil brillait haut dans un ciel d'un bleu immaculé, les mouettes volait au dessus de la cité lâchant ici et là leurs cris stridents. Des gamins jouaient, dans les rues qui menait à la Hanse, sous l’œil amusé de leur mère, au sein de laquelle tétait le petit dernier.
Il arriva, enfin,sur la place du marché, elle était beaucoup moins bien achalandée que lors de son arrivée à Marbrume, prêt d'un an plus tôt, et les prix avait doublé voir triplé pour certaine marchandises. Il flânait dans les allées du marché un panier en osier à la main, qu'il remplissait en avançant dans le marché. Il avait acheter des soles, un kilo de pommes de terres, quelques poireaux, une demi livre de beurre, de la crème fraiche et deux bouteille de vin blanc qu'il avait payé une petite fortune, ce qui n'avait pas manqué d'attirer l'attention de Jack la main leste, un petit voleur à la tire, pas petit par ses compétences mais bien par sa taille, en effet il ne devait pas mesurer plus de cinq pieds de haut (1m50).

Alors qu'il examinait une belle chemise de velours bleu turquoise, Jack lui subtilisa discrètement sa bourse, Godefroi ne sentit même pas les doigts du voleur qui le délestait de sa précieuse bourse de cuir noir. Mais heureusement quelqu'un d'autre avait vu la scène....

Le petit Jack, personne ne le connaissait dans le quartier de la Hanse, alors ça rendait son activité plus facile : les gens se méfiaient pas de lui. Y avait du monde au marché aujourd’hui en plus, il faisait beau et les gens avaient faim surtout. Ils se battaient pour quelques navets, tentaient de négocier les prix pour pas s’endetter sur quinze ans juste pour manger. Jack, lui, se moquait silencieusement de ces honnêtes gens. Avec les fangeux, avec la famine, fallait vraiment être con pour jouer les honnêtes gens. Il mâchait la pomme qu’il venait de soustraire du panier d’une vieille femme d’un air distrait, faussement insouciant. En réalité, ses yeux évaluaient chacune des personnes qui se trouvaient autour de lui, cherchant le meilleur pigeon. Et c’est là qu’il le vit. Un riche bien habillé, occupé à admirer une chemise en soie. Certains se seraient dégonflés à la vue de la longue épée qui pendait à sa ceinture, mais pas Jack. Le temps qu’il la sorte son épée, il serait déjà loin. C’est sans difficulté qu’il se glissa vers l’homme, ses doigts passant habilement sous sa cape pour se saisir de la bourse de cuir. Il repartit l’air de rien, fier de son méfait et se demandant déjà où il irait dépenser tout cet argent. Malheureusement pour lui, Jack n’avait pas été aussi discret qu’il avait pu le croire. Il s’arrêta net lorsqu’il croisa le regard accusateur d’un visage qui lui était familier.

« Et merde, fait chier ! »


C’est l’air déçu que Gisèle accepta le marché : deux bouteilles de vin contre une botte de carottes. C’était de l’arnaque. Avec la famine, certains commerçants se permettaient bien des choses, ils avaient le pouvoir et n’hésitaient pas à en abuser, attitude que Gisèle trouvait détestable. Dans un autre contexte, elle aurait probablement invité le marchand à se les mettre quelque part ses carottes (ou alors elle l’aurait pensé très fort), mais quand on a toute une taverne à nourrir, on devient vite moins difficile. Elle compta les légumes composant son panier, doutant qu’ils leur dureraient plus de quelques jours. C’est qu’elles étaient nombreuses à la taverne, certaines avaient des enfants en plus, et il y avait le vieux aussi. Elle soupira doucement, fatiguée de sauter la plupart des repas. Elle s’apprêtait à prendre le chemin du retour quand ses yeux se posèrent sur une silhouette qu’elle connaissait bien : Jack, le fils de l’une de ses collègues. Elle n’eut même pas besoin de se demander ce qu’il faisait là, c’était devenu évident lorsqu’il déroba la bourse d’un homme sous ses yeux. Tandis qu’il repartait avec un air faussement innocent, Gisèle s’avança vers lui, barrant sa route. Elle ne pouvait pas le laisser partir comme ça. Jack la remarqua à son tour et, au lieu de partir en courant, il s’arrêta, marmonna quelques mots dans sa barbe, et lui tendit la bourse, l’air plus énervé qu’embarrassé.

« C’est la deuxième fois que je t’y prends, Jack. Si tu continues comme ça tu vas finir par avoir de vrais ennuis, et pas qu’avec ta mère. Fais donc autre chose de ton temps libre, les miliciens ne sont pas aussi cléments. »

A nouveau, il marmonna quelques mots qu’elle ne put pas entendre. Elle se demandait vraiment si le petit finirait par comprendre que faire ce genre de choses présentait de gros risques et ne lui permettrait pas de vivre une vie décente. Elle soupira, réellement inquiète pour l’avenir de cet enfant. Il n’était pas méchant, et il n’était pas idiot non plus, ç’aurait été dommage qu’il se lance dans une voie pareille.

« Ah et tiens, ramène ça à la taverne, veux-tu ? » dit-elle en lui tendant ses courses. L’air dépité, le petit Jack lança un regard au panier trop peu rempli et s’en alla sans dire un mot.

Gisèle, elle, s’approcha de l’homme qui venait de se faire détroussé. Vêtue comme ça, elle faisait un peu tâche à ses côtés. Lui était habillé de vêtements de soie, tandis qu’elle ne portait qu’une simple robe, différente de celles qu’elle portait lorsqu’elle travaillait car plus modeste. La différence de statut entre eux était évidente, mais Gisèle n’en était pas intimidée. Il n’était pas le premier noble qu’elle croisait.

« Messire, tenez, dit-elle en lui lançant la bourse, vous avez fait tomber ça. Vous devriez faire un peu plus attention à vos affaires, vous savez, tout le monde ne se donnerait pas la peine de vous les rendre. » Y en a même qui n’hésiteraient pas à partir avec, pensa-t-elle en parcourant la foule des yeux, cherchant à voir si Jack avait vraiment quitté les lieux. Elle n’aimait pas mentir, mais elle se voyait mal avouer à un noble qu’un petit voleur lui avait dérobé son argent, il serait capable d’appeler la milice et de le faire enfermer, et Jack ne méritait pas ça. Détournant son attention de la foule, elle remarqua alors l’épée accrochée à la ceinture de l’homme, ce qui lui soutira un petit rire. « Jolie épée, vous l’emmenez souvent avec vous pour faire vos courses ? »