Marbrume


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 Donne un poisson à un homme.

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Lucain d'AgranceBanni
Lucain d'Agrance



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MessageSujet: Donne un poisson à un homme.   Donne un poisson à un homme. EmptySam 1 Juil 2017 - 21:53
Le point de côté ; C’était ça que je voulais éviter. Ma course a été un poil trop long et j’ai pas pu respirer un instant, et voilà maintenant qu’une sorte de crampe m’assaille le flanc. Je ralentis en toussant, en faisant remonter des glaires le long de ma gorge, et, par mégarde, je trébuche sur la racine d’un arbre. Un vol plané en l’air, et je me viande sur les mains dans un petit cri étouffé de douleur. En levant le crâne je peux voir devant moi, à dix pas, Mervault qui continue de courir, mais il s’aperçoit vite que je traîne et a le bon genre de s’arrêter pour revenir vers moi en m’appelant.

« ça va ?! Qu’est-ce qui se passe ?! »

Je lève la paume de ma main pour le faire s’arrêter. Mais c’est trop tard. Il pense que je suis blessé, peut-être que j’ai été touché par une flèche. Voilà qu’il glisse devant moi pour se retrouver à genou, et en m’attrapant le bras, me force à me relever tout en me touchant partout comme s’il était mon amant, tout en déblatérant à toute vitesse, essoufflé, quelques questions pour s’enquérir de mon état de santé.

« T’es blessé ?! Tu peux courir ?!
...Oh merde ! »


Ses yeux s’écarquillent et il me lâche en faisant un pas en arrière. Je me retourne lentement.
Ils nous ont rattrapés.

Sur nos talons, une bande de truands nous ont poursuivi. Le plus athlétique de la bande arrive vers nous un poignard à la main. Très vite, deux autre le suivent, puis encore deux, mais ceux-là en crachant leurs poumons et en posant leurs mains sur leurs genoux. On aurait presque pu les semer, si seulement le connard de tête n’avait pas su tenir la distance aussi longtemps. Instinctivement, je fais plusieurs pas en arrière, tout en poussant Mervault pour le forcer à se tenir derrière moi. Mais très vite, je comprends que c’est une mauvaise idée quand double-mètre devant moi étend son bras et rugit un seul mot, clair et compréhensible.

« STOP ! »

Je pose une main sur mon fourreau, l’autre sur la garde de mon arme, et je tire lentement l’épée pour mettre la lame au clair. Les crétins nous poursuivant se tiennent immédiatement prêts à se battre, et s’ils sont essoufflés, ils ont tout de même l’avantage.
Des bosquets dans notre dos, à Mervault et moi, Gérald revient. Il ne se presse pas. Je l’entends respirer fort, mais il marche, à grandes foulées, mais sans laisser paraître la moindre urgence. Il arrive à mon côté, et se met à ricaner à l’attention des cinq abrutis qui essayent de nous buter.

« C’est quoi votre problème les gars ?
– Notre problème c’est vous. Pas la première fois qu’on vous a dit de pas traîner dans le coin. On devrait vous crever pour régler définitivement la question. »

Quatre hommes et une femme. C’est ça le groupe face auquel je me retrouve. Des gars que j’ai déjà croisés, avant d’intégrer le groupe de Clahauser, mais qui font chier tout le monde de toute manière, peu importe qu’il s’agisse de bannis ou non.
Je vais vous la faire courte, pour que vous puissiez comprendre et qu’on perde pas de temps. L’Obliance, que ce soit ses marécages ou les parties asséchées, ça manque pas de nourriture, de gibier et de plantes à cueillir ; Ce qu’il manque, c’est des endroits de ce genre et où il y a pas de fangeux. Des miliciens, des chevaliers, des bandes de cottereaux participent tous à la lutte vaine et dangereuse contre les fangeux, ce qui libère parfois des territoires, patouillés et plus sûrs que d’autres, où chasser est moins risqué.
Naturellement, il y a concurrence pour ces lieux. Naturellement, alors que moi, Mervault et Gérald nous avons passés la journée à chasser des oiseaux, il a fallut que ces cinq connards viennent nous chercher des noises. Si moi et Mervault avons la marque, Gérald n’est pas banni, et il connaît personnellement le type en face, qui m’a hurlé stop : C’est son demi-frère. Vous savez ce que c’est, les relations entre beaux-frères...

« T’as pas de couilles, j’ai du mal à croire que t’aies la force pour m’étripailler ; Encore moins si c’est à la loyale !
– C’est à la loyale !
Je rajoute avec un sourire sardonique, en regardant l’un après l’autre les cinq gens du groupe. Regarde-les putain, même à moi tout seul j’les bouffes ! »

Je fais alors une grimace pour montrer mes crocs. Je vois l’un des quatre hommes, un petit blondinet qui doit même pas avoir quinze ans, qui a les sourcils qui obliquent. Il a sûrement entendu parler du cannibalisme que font certains bannis. Je fais semblant de croquer quelque chose, en claquant les dents trois fois très vite. J’espère que ma bravade les fait reculer.

« Salope dégénérée ! C’est donc avec cette chienlit que tu traînes Gérald ?
– Gare petite oie ! Tu veux voler la bouffe de mon copain, mais quand il a les crocs, il est pas très regardant sur la provenance de la viande.
– Vous êtes trois, on est cinq, faites pas les malins.
– Vous êtes trois hommes et deux femmes
, je corrige en faisant un clin d’œil au blond qui s’imagine que je vais bientôt me nourrir de lui. Je dis que ça se tente. »

En réalité, ça ne se tente absolument pas.
Ça ne se tente pas, parce que Mervault n’a pas le profil d’un combattant. Parce qu’il pleure tout le temps, parce qu’il s’est déjà enfuis plusieurs fois quand on tombait sur un fangeux, parce qu’il est manipulable et couard. Il a d’autres qualités certes, la preuve, quand j’ai trébuché, il s’est élancé pour venir à la rescousse ; Mais comme on dit, il est courageux mais pas téméraire.
Gérald non plus c’est pas un combattant. Il est vieux, ça se voit à sa chevelure qui blanchit légèrement. Il a le regard cave, mauvais, il ne court pas parce qu’il n’a pas de souffle. S’il en impose et qu’on ose pas s’attaquer à lui, c’est parce qu’il a de la gueule, mais certainement pas de la force, ni même de la taille, car il m’arrive seulement à l’épaule ; Que cela lui plaise ou non, son demi-frère semble bien plus féroce et dangereux.
Il reste que moi pour faire la bagarre. Moi avec mon épée que je viens de sortir. Moi, un homme aux joues creuses, aux mains tremblantes, au corps endolori par des courbatures et assailli par un vilain point de côté. Moi, Lucain d’Agrance, ou plutôt Godfroi. Parce que je n’ai pas donné mon vrai nom à Clahauser et aux autres, parce que j’ai rangé mon tabar et caché mes bijoux dans mon paquetage, afin que personne n’aille crier partout ma vraie identité. Je trouve ça plus simple. Au départ, je n’étais pas censé rester longtemps avec eux, je n’ai fais que squatter une semaine, le temps qu’ils me soignent d’une vilaine et immonde blessure, mais après j’ai voulu rester pour payer ma dette, et au final, je commence à faire traîner mon soi-disant départ. Maintenant j’aurais honte de tout leur raconter. Et puis j’ai toujours été fort pour jouer la comédie et déblatérer des mensonges.

« On peut vérifier ça tout de suite.
– On peut.
– T’as le cran ?
Renchéris Gérald.
– Bien sûr, mais on va pas vous tuer. On va vous péter les dents. Et vous pendre, pour que vous soyez un exemple aux yeux de tous.
– Moi je compte t’ouvrir,
je raconte avec le même sourire sardonique. J’suis content que vous ayez amené de la garce, belle lurette que j’ai pas tiré ma crampe, je vais m’amuser avec elle avant de m’occuper de votre cas à tous.
– Vous irez cramer, ce sera un beau feu de joie.
– Gérald m’a dit que t’étais le genre à pleurer quand t'as mal...
– Messieurs, messieurs ! S’il vous plaît, y a pas besoin d’avoir recours à la violence ! »


Qu’est-ce que je disais ?
Mervault s’est décomposé, d’un coup. Il s’est mis à sortir cette dernière phrase en bredouillant, et il continue, s’enfonçant dans la peur, peur qui me gagne également, car elle infecte de façon insidieuse bien plus sûrement de façon bien plus contagieuse que la vérole.

« On peut s’arranger ! O-On... On peut discuter ! On... On voulait juste chasser, et on a prit des oiseaux, ce gibier on peut le trouver partout ! On voulait pas vous ennuyer !
– C’est ça ouais. Bande de voleurs, va.
– Si on vous donne une partie de ce qu’on a attrapé, ça vous va ? »

Moi et Gérald pivotons tous les deux la tête vers le gamin. Hors de question, nous disons-nous dans nos âmes, et ce malgré les supplications peinées mais silencieuses que ses yeux de chien battu nous lancent. Hors de question. Hors de question. Hors de question de donner de magnifiques oiseaux bien gras, pas pendant que je crève de faim, pas alors que mon estomac grouille et que mes joues restent blanche par le manque de nutrition. La faim est une mort lente et infamante. La lame est une mort rapide mais honorable. Mon choix est déjà fait, et Mervault a intérêt à faire le même que moi, ce poltron.

« Mouais... Moi je dis que vous allez pas me donner une partie, mais absolument tout, et en échange je veux bien me casser.
– ça le fait pas.
– Tu veux mourir Gérald ?
– Ouais j’ai pas trop peur de mourir, tu vois. Pas par ta main. Mais tu vois cette bouffe c’est nous qui l’avons prise, elle est à nous. Allez marauder vous-même si vous crevez la dalle, bande de rats.
– On devrait limite vous demander réparation pour le dérangement ! Je hurle alors. Vous êtes tous très chanceux !
– S-S’il vous plaît ! Y a aucun besoin à devenir violent ! Renchéris Mervault. On peut vous donner un peu de notre chasse et en échange vous partez ! »

Le demi-frère de Gérald crache par terre. Moi, je trace une ligne sur le sol avec la pointe de mon épée. Le type en face soulève un sourcil. Il a reconnu le geste que je viens de faire.

« C’est quoi ça ?
– Je reculerai pas au-delà.
– ça me va tout aussi bien.
– Réfléchis à tes options, Fabien ! Mon ami là c’est un taré, il est banni, c’est déjà un homme mort. Que tu le crèves ou qu’un fangeux le crève, ça change rien. En revanche, si tu t’obstines à vouloir nous planter, tu crois que tu vas le faire sans accroc ?
– Même si vous vous jetez à cinq sur nous on va se battre
, je continue mon bluff. Combien d’entre vous je vais décapiter ? Y suffirait de vous planter la lame au fond de la cuisse ou du ventre pour vous condamner, parce que vous serez entièrement saignés avant d’arriver chez un chirurgien. Tu trouves que c’est un bon plan pour voler trois hérons ?
– En résumé
, reprend Gérald. Cassez-vous. »

Je pivote ma tête sur le côté, comme une chouette, pour regarder Mervault. Il se donne un peu de contenance. Tout se joue au bluff, tout se joue tout le temps au bluff chez nous. Nous ne sommes pas en état de nous battre, mais parce qu’on arrive à leur faire croire qu’on est dos au mur, ils vont se reculer.
Et voilà qu’ils discutent entre eux. Mon cerveau se déconnecte. Leurs plaintes et leurs doutes partagés ne m’intéressent pas. Moi je me contente de sourire, de me donner un air mauvais, violente, psychotique. Qu’importe que je ne sois pas vraiment taré, qu’importe qu’en réalité je suis incapable de faire des horreurs : Il faut que les gens le pensent, sinon ils me roulent dessus. C’est ce qui se passe dans le groupe que j’ai rejoins, qui grille sa viande près du littoral ; Godfroi c’est pas Lucain. Et en restant dans mon coin à manger sans parler à personne, tout le monde s’invente une histoire à mon propos plutôt que de réellement à savoir qui je suis. J’ai jamais dis être cannibale, mais quand Mervault me l’a demandé, j’ai pas osé démentir.
Alors Fabien et les chasseurs sont partis, nous tournant le dos qu’après s’être éloignés de quarante pas. On a soupiré, je me suis assis un instant pour ne plus avoir mal aux jambes, et nous sommes retournés au campement.

***

La viande cuit. Les hérons que Gérald fait saisir au feu ne sont pas assez gras. Tout autour, assis en cercle, neuf personnes attendent en se léchant les babines. Si on rajoute les vigiles qui, armes à la main, protègent le camp, on arrive à onze. C’est une bonne troupe, trop pour la maigre viande qu’on nous sert. À côté, dans une grande casserole, on fait bouillir du grain, parce qu’on a pas le matériel pour faire du pain, et qu’on doit se contenter de ces grumeaux de farine pour se remplir l’estomac. Comme d’habitude, le repas va être spartiate, et on ira au lit sans véritablement être bien nourris.
C’est dans ces instants-là que je jalouse mon cheval. Témérité XVII de Morne-Nuit est juste à côté, près des tentes, en train de brouter l’herbe. Il est l’une des deux seules bêtes dont le groupe dispose, l’autre étant un mouton que nous essayons de faire grossir afin de pouvoir le bouffer le moment venu. Une jolie prise échangé contre un tas d’or que nous avons pillé dans une vieille maison abandonnée. On a vraiment réalisé une perte sèche sur ce coup, mais dans les marais, la valeur de la bouffe est plus importante que la valeur métallique.
Et comme d’habitude, ça se plaint, silencieusement, sans véritablement protester. Ça se plaint que Untel n’aurait pas dû avoir le luxe de manger ce délicieux héron, cette viande fondante en bouche, et qu’il aurait dû se contenter de la bouillie, parce qu’untel en tant que sentinelle n’a pas participé à la chasse. Ça se plaint que Unetelle a eut un morceau un poil plus gros qu’un autre, et que c’est choquant parce qu’elle fout toujours la mauvaise ambiance à table. La faim ça rend fou, c’est une torture qui met à mal les relations humaines.
Voilà pourquoi ce lâche de Mervault n’a pas encore été viré. Parce qu’il meuble les silences autour du feu de camp. Parce qu’il raconte des blagues et qu’il chantonne. Parce que sans lui, je suis sûr que Gérald ce serait mit à sortir son épée pour crier sur Jehan Clahauser, ou une autre connerie de ce genre.

« N’empêche cette rencontre avec mon connard de demi-frère j’ai pas aimé...
– Il est pas vraiment dangereux
, dit une femme du groupe entre deux bouchées.
– Non. Mais il serait capable de nous suivre. Prévenir des miliciens. J’ai pas envie de lui donner une raison, vous voyez.
– Si c’est que lui qui gêne, on peut régler le problème définitivement. »


Tous les yeux se tournent vers moi. Je ne leur réponds pas. Moi c’est le feu que j’observe, tout en mangeant.

« Tu veux dire... Balbutie Mervault.
– Bah le buter. Quoi ? Ça te pose des problèmes moraux ?
– Mais...
Hésite-t-il. Si c’est pas lui, ce sera un autre. Chasser c’est pas facile, pas dans ce coin-là, et j’ai pas envie d’attirer l’attention...
Non je me dis... On pourrait procéder autrement. Je vous en ai déjà parlé ! Pas loin y a un village de pêcheurs. Abandonné. Peut-être qu’on peut partir là-bas demain. Si on trouve une barque, des filets, on peut peut-être récupérer quelque chose.

– T’as déjà pêché toi ?Je demande, ce qui fait ma troisième phrase de la soirée, bien plus que ce à quoi je suis habitué.
– Moi non... Mais d’autres gens de la bande oui. Le seul danger c’est la route d’ici jusqu’à l’ancien village, mais j’veux dire, le jeu en vaut la chandelle. Je trouve que c’est mieux que retourner sur un sentier où on risque de recroiser mon demi-frère et sa troupe.
– Je continue à croire que le faire canner ça réglerait le problème, mais c’est pas moi le chef.
– Ouais, c’est pas toi le chef
, acquiesce méchamment Gérald. »

Je baisse les yeux et continue de grailler, pendant que Gérald s’adresse à Loreline Clahauser.

« T’en pense quoi toi ? On fait ce que Godfroi il dit ? Ça risque de nous attirer des ennuis mais ça réglerait l’emmerde... Ou bien on va visiter les cabanes de pêche que le petit a dit ?
– Ouais dites-moi ce que vous avez choisi, il faut que j’aille pisser. »


Je me lève sans attendre que quelqu’un me parle. Même si, en m’éloignant, Gérald ne peut pas s’empêcher de me demander s’il doit venir m’aider « la » tenant, ma verge. Que voulez-vous ? Je suis habitué à m’annoncer, ne serais-ce parce qu’on risquerait de trouver impoli que je m’éloigne du feu qui réchauffe pendant qu’on discute d’un truc important. Mais je me sens modérément concerné.
De toute façon, c’est surtout que j’ai peur qu’on parle de mon idée. Du fait de tuer un type. Je n’ai pas envie de le faire ! Oui, je pense que tuer Fabien ça réglerait un problème de merde, parce que Fabien est un abruti, avec tout le monde, même ceux qui sont pas bannis, tous ceux qui traînent près de ce qu’il estime être « son » territoire. C’est pas pour autant que j’aurais le courage de lui planter mon épée à moi dans le cœur. Ce qui me reste de scrupules, j’ai pas envie de le montrer, on pourrait croire que je suis faible alors que tout le monde compte sur moi pour être le névrosé violent de service. Le groupe manque de tarés, pourtant il ne me semblait pas que c’était un critère d’embauche difficile à récupérer.

Du coup je me suis approché de mon cheval, pour lui tapoter sur l’encolure, le temps qu’on dise quel est le plan pour la journée de demain.
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Loreline ClahauserBannie
Loreline Clahauser



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MessageSujet: Re: Donne un poisson à un homme.   Donne un poisson à un homme. EmptyDim 2 Juil 2017 - 16:26
Les pieds dans l’eau, sur le bord, à regarder la mer à peine agitée elle avait l’air contrariée la blonde. Elle bloquait depuis un petit moment déjà, à scruter l'étendue grise vaguement bleue qui se perdait sur l’horizon. Autour ça s’affairait, ça remuait le sable, fouillait les algues, essayait de se maintenir en état physique et moral, puis ça pansait les blessés du mieux que ça pouvait.

Au milieu de l’agitation le bruit de pas se rapprochant ne l’avait pas vraiment inquiété. Ça allait et venait autour d’elle depuis qu’elle s’était arrêtée, ça ne fit que lui faire tourner la tête. Habitude, il fallait toujours voir ce qui nous arrivait dessus, même en terrain ami, ou au moins pas ennemi. C’était que ça rendait complètement trop anxieux pour son propre bien la vie comme ça…

« Tu vas finir par te transformer en statue d’sel. »

Il semblait calme le Jehan, ça lui ressemblait pas tant, d’ordinaire c’était plus lui qui était plus agité de pas savoir de quoi le lendemain serait fait. Étrangeté aux vues de toute leur vie qui avait jamais été qu’ainsi. Loreline lui avait seulement haussé un sourcil un peu désabusé et un peu amusé.

« Ça s'rais pas plus mal… Si seulement on était foutu de prendre le large.

On mourrait à p'ti feu en mer de faim de soif. Puis qui dit qu’il y a quelque chose de l’autre côté ?

Personne. Comme qui dit qu’un jour prendra le dessus sur les mordeurs ? Personne. Rester ici pris au piège, c’est mieux . En prenant la mer au moins on aurait l’impression d’aller quelque part, au lieu de celle d’être coincée ... Jehan fit la tronche, dur de dire s'il était convaincu ou non, seulement c’était pas vraiment le propos. Ils sont pas encore revenus Gerald, Mervault et Godfroid ?

Non, puis je ne sais pas toi, mais moi j’ai vu que d'la mer dans ce que la mer a rejeté.

La Déesse est mal lunée aujourd’hui. »

Qu’elle soupira la Lore en se détournant de l’étendue salée.

Le camp était là depuis quelques jours, loin de la route, en bord de mer. Au moins c’était sûr que la partie qui donnait sur le domaine d’Anür était pas à surveiller. C’était bien le seul endroit duquel cette saloperie pouvait émerger. Quelques jours aussi qu’il était plus que leur petite dizaine à se chier dessus au moindre bruit. Yves et sa bande s’étaient ramenés pas fiers. Visiblement les crétins s’étaient attaqués à un des pillards pour leur piquer de la nourriture. Il en était sorti visiblement gagnant de ce qu’ils avaient ramené mais trop affaibli pour survivre seul.
On pouvait pas dire que c’était l’amour fou entre Clahauser et Yves, seulement la faim justifiait les moyens. Protection contre mise en commun de tout. Le marché avait clairement été à son avantage, elle n'avait rien pour elle, et lui il avait des gars qui savaient se sortir les doigts du fondement quand il fallait se taper dessus, même si là ils étaient amochés, et de la bouffe. Qu’elle y était allée au culot, tablant aussi sur l’aura du dernier arrivé. Le chevalier, il savait foutre la trouille à quelqu’un ce type, mais finalement il faisait pas de vagues… C’était un peu tout ce qu’elle lui demandait au fond.
C’était passé, comme quoi parfois fallait seulement savoir se montrer butté et indifférente.

Le soir c’était toujours calme, une tranquillité de façade calmée par la chaleur et la lumière du feu. Ils avaient fini par revenir les trois et pas les mains vides en plus, comme quoi parfois le sort était presque favorable, presque parce qu’il y avait pas assez pour tout le monde, mais au moins chacun aurait un peu de quoi se remplir le ventre.

Autour de l’âtre quelque chose faisait toujours grogner les hommes, toujours une chose de la journée qui leur avait pas plus les avait mis de travers et qu’ils se sentaient obliger de toujours remettre sur le tapis. Ce soi c’était la rencontre avec le demi-frère du Gérald.
Encore des foutues histoires de famille à la con.

Parce que de toute façon t’aime jamais le voir couillon … Aussi crétin l’un que l’autre, sûrement un truc de famille.

Appuyée sur Jehan, bectant doucement dans sa part, Lore écoutait ce qui se disait, pas toujours partie prenante dans leur complainte. Mais d’un coup ça s’était mis à parler de dérouiller un gus, fatalement, d’un coup fallait plus s’en mêler, par particulièrement que la mort de l’autre l’émouvrait outre mesure, mais elle aimait pas bien l’idée que proposait le chevalier, d’ailleurs, il faisait pas vraiment l’unanimité.

« Et moi on me demande pas mon avis . La moitié des connards ici ils sont avec moi. »

Yves avait démarré dans la seconde se redressant trop vite, il avait posé une main sur ses côtes montrant une faiblesse une blessure en cours de guérison. Il essayait de bomber le torse pour faire imposant, seulement sa carrure en avait pris un coup à cause du manque de tout.

« Ouai mais c’est toi qu’est venu la queue entre les jambes nous demander s'tu pouvais rester vu vos états de loques, alors tu f'ra c’qu’on fait, ou si t’es pas content, tu t’casses.

Putain tu t'sens plus pisser La Lore depuis que t’as trouvé des plus affreux qu’toi, t’étais plus docile… bien en vue d’Yves le frangin Clahauser tira sa dague. Ouai, ouai c’est bon t’donne pas la peine de défendre l'honneur familial Jehan... »

Pour ce qu’il avait été de toute façon, entre alcooliques, incompétents, arnaqueurs et petites frappes, y'avait pas de quoi être fier. Au moins ça avait eu le mérite de désamorcer la tension avant que qu’un fasse quelque chose de stupide. Personne à part eux trois savaient depuis vraiment quand se connaissait la fratrie et l’autre chef de bande, quelques rumeurs courraient, de quoi occuper l’esprit pour pas penser à pire.

« On va pas buter Fabien, c’est une crevure, mais une crevure débile, pis on le connaît, s'équi a l’air d’être un bon gros malheur, mais qui l’est pas tant. Mervault l’a dit, on sait pas qui pourrait le remplacer. Vous imaginez on tombe sur des salauds pires encore, le genre qui nous tombe vraiment dessus sans prévenir et qui nous égorge bien comme il faut juste pour l’assurance de faire place nette. »

Et évidemment l’idée plaisait pas à grand monde, c’était un peu leur seul but de rester en vie.
Il y eut un grand silence, que personne n’osa vraiment rompre, chacun finissait sa pitance. Godfroi se faisait attendre, mais personne ne semblait vraiment s’en formaliser, d’habitude il était moins sociable que ce soir. Dans la pénombre on avait vu sa silhouette passer pour aller voir les bêtes.

« Bon j’vais aller lui dire. »

Elle s’était levée non sans que ses articulations endolories lui rappellent les jours de marche, les fuites, les coups. Au moins elle tenait encore bien sur ses jambes c’était le plus important. S’approchant, elle était restée à distance, pas qu’elle avait la trouille, seulement elle préférait éviter tout emmerde, s’était pas vraiment son gars le Godfroi, chose a pas oublié.

« Demain on va parti à cinq-six pour aller voir la barque d'Mervault. On part juste après l’aube. »

Sous-entendu que ça serait plus que bien que lui et son épée fasse partie des cinq-six qui prendraient la route. Puis elle était repartie comme elle était arrivée, s’attardant pas plus que ça, ça semblait pas demander plus de social cette affaire.

« Si vous m'cherchez j’vais prendre mon tour de garde. »

Qu’elle dit en passant à côté du feu. Quelques grognements et quelque hochement de tête avaient seulement salué sa déclaration.
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Lucain d'AgranceBanni
Lucain d'Agrance



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MessageSujet: Re: Donne un poisson à un homme.   Donne un poisson à un homme. EmptyLun 3 Juil 2017 - 19:21
Les gestes pour harnacher mon cheval ne sont pas réellement habituels. Avant, dans ma vie d’avant, j’avais un page et un écuyer qui s’occupaient de tout ça pour moi, mais aujourd’hui ma suite s’est réduite à moi et à moi tout seul. C’est donc avec mes propres bras que je soulève la selle que je place sur le canasson, au-dessus d’une couverture puante de sueur, avant de m’occuper de lui placer les mors et les rênes. Les autres me regardent, un peu pantois, ou tout du moins les quelques curieux qui sont déjà réveillés alors que le soleil n’est pas encore tout à fait levé, et se contente d’être un disque rougeâtre qui brille à l’horizon, par-delà la mer.

« Tu as vraiment besoin d’embarquer ton cheval ? Me demande Gérald dressé au-dessus du feu de camp qui n’a pas cessé de brûler toute la nuit, préparant un maigre petit déjeuner constitué d’une bouillie d’orge et de blé, et de quelques œufs volés dans un village.
– On se déplace, et en règle générale, je ne laisse jamais mon cheval seul.
– Les autres peuvent le garder tu sais.
– Qui a dit que je vous fais confiance ? »


Il tique, arquant la bouche de côté, et continue de se concentrer sur la popote. Moi, je peux enfin me mettre nu.
Vivre au milieu des marais a bien supprimé ma pudeur initiale, celle que j’avais en bonne société. Je me retrouve vite à poil pour changer mes vêtements, les mêmes que je porte depuis maintenant deux semaines. J’en profite surtout pour vérifier la blessure qui m’a amené à rejoindre le groupe, m’assurant que les points de suture ne sont pas infectés, que tout cicatrise correctement. Même si j’ai encore mal, c’est une douleur qui s’amoindrit et à laquelle je m’habitue.
De toute façon, il ne fait pas frais. Mais je crains déjà ce qui se passera quand l’hiver arrivera.

Une fois à poil, je peux me changer. Mes nouvelles braies sont un peu trop longues, mon nouveau doublet est lui trop grand pour moi. Je ne m’en formalise pas, et décide finalement de reprendre mon armure. En une quinzaine de minutes, à force de faire glisser les manches et le gilet de maille tout le long de mon corps, je me retrouve cuirassé des pieds jusqu’aux omoplates, laissant ma tête nue, le camail et le heaume attachés sur le cheval. Viendra un moment, inévitable, où je me mettrais à vendre des pièces de ma cotte pour pouvoir me nourrir, mais alors, je me retrouverai à exposer ma gorge, l’aine de mes cuisses, le dessous de mes aisselles, tous ces endroits où l’on pourra planter une dague ou bien des dents. Voilà la seule raison qui explique pourquoi je me trimbale encore avec cet encombrant et coûteux équipement qui m’a toujours été sur le dos depuis les lices de tournoi où je paradais et cherchait une vaine gloire.

Gérald se mouche dans la manche de son haut avant de venir m’apporter du manger dans une gamelle en bois. Il regarde rapidement ma bête, qui penche sa tête pour brouter de l’herbe comme une vache.

« Elle arrête pas de bouffer ta bête...
– Un cheval ça a besoin de manger
, je lui dis en commençant à béqueter la bouillie à l’aide d’une grosse spatule en bois également.
– Mouais, on a la chance d’avoir trouvé ce terrain herbeux... Mais entre lui et le mouton ça va tout béqueter.
– Le plus simple ça doit être d’avoir des poules, non ?
– Oui mais les poules c’est complètement con, ça se casse, il faudrait un enclos ou une cage. C’est lourd et encombrant à porter, ça va pas avec notre idée de rester tout le temps en mouvement et de se nourrir sur le pays.
– Oui oui, c’est très bien tout ça. Mais là on est en été, c’est encore facile de trouver du gibier et des fruits. Ta Clahauser, elle a pensé à ce que vous allez faire quand l’hiver sera là et qu’il gèlera les marais, et que les oiseaux partiront au sud ? »

Gérald hausse les épaules, tout en préparant les œufs brouillés en surveillant bien le feu.

« Tu sais en règle générale on réfléchit pas à survivre plus loin que la semaine, voire le mois prochain. Alors l’hiver... L’hiver c’est encore loin.
– Mouais. »


Je respire la morve de ma narine, et très vite, la seule chose qu’on entend de moi, ce sont des bruits de mastication tandis que je me nourris de cette maigre substance. Au moins elle a l’avantage de ne pas trop me filer la chiasse, chose qui sera plus compliquée quand mon corps se mettra à digérer les hérons de la nuit dernière.

Le camp se réveille petit à petit. Et les gens viennent s’agglutiner tour à tour devant le feu pour manger. Au bout d’un moment, on constitue un groupe de « volontaires » pour aller suivre la piste proposée par Mervault.
Clahauser est de la partie, mais pas son frère ; Je pense que c’est parce que Yves a décidé de rester surveiller le camp, et que les deux frangins sont légèrement paranoïaques par rapport à sa présence, chose qui est marrante, car le truand est tout aussi suspicieux des deux gamins, d’où une espèce d’équilibre de la peur un peu étrange et malaisant.
Gérald est de la partie, parce qu’il prétend qu’il connaît très bien le pays, normal puisque lui et son demi-frère Fabien font partie d’un petit village de bûcherons, même pas indiqué sur la carte, qui existe depuis quelques générations au milieu des marais. On a aussi dans les pattes deux gens de la bande d’Yves, que je connais pas vraiment, un gars petit et fin, qui parle toujours avec une voix faible et timide, qu’on appelle « Tartin » et qui prétend avoir été pêcheur dans une autre vie ; ainsi qu’une femme à l’allure d’hommesse, qui a la démarche d’un bonhomme et qui a ma taille, même si elle garde une certaine finesse du sexe faible. Elle s’appelle Lulie, nom qui lui va vraiment pas vu son allure.

On a rapidement fait connaissance et on s’est préparés à partir, tout bardés d’armes. J’ai sifflé à l’attention de Mervault pour qu’il s’approche, tout souriant.

« Tiens gamin, je commençais à lui dire, une insulte un peu étrange vu que je devais être à peine plus vieux que lui d’une ou deux années. Tu vas m’être utile. Tu vas être mon écuyer.
– Écuyer ? Tu veux que je fasse quoi ?
Qu'il demandait avec un grand sourire étendu d'une oreille à l'autre sur son visage.
– Je veux que tu portes mon écu. »

Entre ses mains je lui filais le gros morceau de bois renforcé d’une feuille de métal. Sur le dessus étaient représentées, de manière éraflée et attaquée par l’usure, les couloirs de la maison d’Agrance. Aucun des gens du groupe n’avait reconnu cette héraldique, et je n’avais pas vraiment peur d’être démasqué, puisqu’il fallait être un noble pour connaître les différents symboles des tas de maisons qui se disputaient, à une époque, les places de l’aristocratie Langroise.

« C’est lourd !
– Bien sûr que c’est lourd. C’est pour ça que tu le portes. »


Je lui donnais une tape condescendante sur l’épaule, tout en lui faisant un grand sourire, avant de tirer les rênes sur mon cheval. Je m’éloignais du camp, sous le regard mauvais de Lulie qui était en train de discuter avec miss Clahauser.

« Tu montes pas dessus ton cheval ?
Qu’elle demande.
– J’économise ses forces. Je ne monte dessus que si l’urgence le commande.
– Oui ; Pour pouvoir t’enfuir par exemple. »

Le sous-entendu ne me plut pas du tout, et mes sourcils s’arquèrent au-dessus de mes yeux de façon sévère.

« Par exemple. Si tu me donnes une raison de m’enfuir. »

Un sourire canaille éclaircit ma face. Mais je ne pense pas que les autres avaient pris ça pour une plaisanterie. Certainement pas Gérald, qui se mit à tousser pour de faux avant de regarder Loreline.

« Bon... Le truc dont le gamin il parle, c’est pas un vilage. C’est juste trois cabanes et un ponton face à la mer. On peut y accéder en suivant le littoral, et vu que la marais monte, c’est assez pratique au cas où des fangeux arrivent, on marchera les genoux dans la mer...
Y a une petite heure de route, mais moi c’est pas l’aller qui me gêne, c’est le retour. On y va juste pour de la reconnaissance ? Ou bien si on trouve une barque et tout on tente une petite sortie avec des filets ?
– Peut-être que les pêcheurs sont jamais partis
, nota Mervault. Si c’est le cas ils nous laisseraient probablement pas entrer.
– On est nombreux et armés,
je me permis de noter à l’attention de Loreline. Dans le cas hypothétique où on trouve des gens, ça sera facile de les forcer à se montrer un peu coopératifs, vous êtes pas d’accord patronne ? »
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Loreline ClahauserBannie
Loreline Clahauser



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MessageSujet: Re: Donne un poisson à un homme.   Donne un poisson à un homme. EmptyMer 5 Juil 2017 - 22:06
Alors qu’elle sortait de leur tente, enfilant une veste trop grande, elle était suivi par le membre de sa fratrie. Ce dernier semblait pas vraiment jouasse de ce qui s'était décidé.

« laisse-moi v 'nir !

Non, tu restes.

La logique voudrait que’ça soit toi qui restes. C’est toi là … Le ton sarcastique de la fin de phrase passerait pas.

je te conseille de la boucler, tout d'suite… Il n'était pas passés au vu de l’acidité des mots. Tu restes, c’est tout. »

L’ordre était passé. Loreline s’étonnait parfois elle-même de tout ça, ça avait jamais été son genre d’aboyer sur tout le monde, de façon si feutrée que ça puisse être. Elle avait été plutôt du genre à la boucler et à se laisser faire. Oh … elle le faisait encore, ses gars c'étaient des grandes lavettes ou des grandes gueules avec pas grand-chose dans le froc donc ils lui faisaient pas peur et eux ils acceptaient qu’un pas trop con leur dise quoi faire. Pourtant, dès que ça devenait plus gros en matière de carrure ou plus imposant, y'avais plus personne nulle part, plus de blondinettes balafrées. Le naturel revenait aussi vite que la marée montante.

« J’ai pas confiance à Yves j’pense qu’il se tiendra plus à carreau si c’est toi qui restes. C’est con, mais il respecte plus que t’as encore les jambes que ce que j’ai moi. »

Elle avait chuchoté pour que seul eux sachent ce qu’ils se disaient. Jehan la ferma, elle marquait un point. Mais lui ça lui plaisait pas vraiment de rester à surveiller loin de l’intérêt, un peu du danger aussi, mais ça finalement ça lui faisait pas tant de mal. N’empêche qu’il avait regardé d’un œil pas bien sympathique le groupe se constituer tandis qu’un grain mal cuit lui croquait sous la dent, ce qui n’avait rien d’agréable. Mais au moins qu’il pouvait manger quelque chose ce matin et s'ils rentraient peut-être ce soir. Sans être des jours fastes, c’était bien mieux que beaucoup d’autres qui étaient passés.

Lore regarda le chevalier filer son gros bout de métal au gamin. Elle était pas vraiment jouasse de ça, si elle l’épuisait, si quoi que ce soit qu’il puisse leur tomber dessus, déjà qu’il était pas bien féroce ils se seraient encore moins. Enfin, même s'ils l’appelaient la gamine le Merlvaut était assez grand pour pouvoir dire ce qu’il pensait au Godfroi, qu’il le fasse pas parce qu’il avait la trouille c’était pas ses oignons.

Qu’est-ce qu’il pourrait bien faire si effectivement y'avait du peuple dans le petit hameau en bord de mer ? Le chevalier lui semblait du genre à penser que passer tout le monde par l’épée serait une bonne idée. Pas étonnant, il était un peu comme ça, du genre à penser que tout se réglait avec le tranchant d’une lame. C’était bien une attitude de gars qui savait s’en servir, puis qui avait la carrure pour impressionner. Les choses étaient différentes pour Lore, elles avaient toujours été différentes de toute façon. Incapable de prendre le dessus par la force, la blonde, elle savait soit ruser, doit s’écraser quand c’était pas possible.

« On est … cinq clampins maigrichons en sale état et un chevalier tout aussi vaillant avec une épée et un cheval. Ouai on peut dire qu’on est beaucoup et armés… »

Fallait bien être réaliste deux minutes, même si ça pétait l’ego et les couilles des hommes, se surestimer ça entraînait que des emmerdes. Enfin on avait fait des miracles avec moins que ça, mais bon ça aidait pas à partir serein dans l’hypothèse hypothétique où la chose se corserait. Après, effectivement, six, c’était pas plus mal, mais fallait voir qui savait vraiment manier une arme dans le lot, parce que dans une bagarre devait pas y avoir grand monde qui s’en sortirait en fait. Si, le Godfroi, assurément, et peut-être le gamin, il pourrait assommer quelqu’un avec ce qu’on lui avait foutu dans les mains, enfin il on lui avait pas repris avant ou qu’il arrive vraiment à le soulever. Les restes pas sûrs que ça vole très haut. Lulie avait bien quelques jolies balafrées qui attestait qu’elle devait savoir se défendre …

« Puis si on y va c'pas pour admirer l'paysage… »

Une heure de marche pour seulement constater qu’on pouvait pas faire grand-chose c’était stupide, puis un des types du Yves avait affirmé être un ancien pêcheur, il devait savoir faire quelque chose.

« Mais pourquoi je dois pas porter ça ? Pourquoi on le met pas sur le cheval ? »

Qu’il avait demandé le Mervault visiblement pas bien content de son sort après quelque temps à poser un pied devant l’autre avec l’écu à bout de bras ou sur le dos ou partout où il essayait de rendre le porter le plus confortable. Leurs pas étaient accompagnés de manière plus ou moins éloignée par le bruit de la mer, le reflux des vagues.

« D’ailleurs pourquoi que’vous gardez un canasson, ça fait beaucoup de viande, une fois sécher ça peut durer un moment. Parce qu’un plus plusieurs, s'pas d’une grande utilité. »

Lulie semblait pas mesurer ce qu’elle demandait.
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Lucain d'Agrance



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MessageSujet: Re: Donne un poisson à un homme.   Donne un poisson à un homme. EmptyVen 7 Juil 2017 - 14:13
Ouin ouin ouin ouin. Les gens avec qui je marche ne sont pas des lumières. Leur intellect inférieur, probablement frappé par la consanguinité ainsi que leur mauvais sang de roturier devait déjà leur valoir une bêtise crasse bien avant l’arrivée de la fange et leur ostracisation au milieu des morts. Mais là il faut dire qu’ils gagnaient le ponpon. À peine avions-nous commencé à quitter le campement, longeant la mer agitée dont la houle nous faisait un fond sonore assez agréable, que les imbéciles autour de moi piaillaient sur mon cheval en se plaignant, comme à leur habitude, de tout et n’importe quoi. J’ai donc fait ce qu’il m’a semblé nécessaire, c’est-à-dire, montrer les crocs et grogner.

« Tu portes l’écu parce que je te demande de le porter. Ça exercera ton bras faible, bien plus efficacement que lorsque tu tires ta crampe avec ton poignet ! »

Gérald sourit, car il aime que je fasse des blagues sur la masturbation, mais c’est un sourire mauvais, dents retroussées, qu’il efface très vite lorsque je le remarque en pivotant ma tête en arrière comme une chouette.

« C’est pas une raison pour-
– Je portais l’écu lorsque j’avais treize ans ! J’y ai exercé tout mon bras et mon dos ! Je l’ai utilisé pour parer des chocs qui auraient pu me tuer une centaine de fois ! Fut un temps, avant que les morts viennent, où porter l’écuyer d’un sire était un grand honneur réservé uniquement à de pieux damoiseaux braves et courageux ; Tu devrais être heureux, que je considère quelqu’un comme toi pour garder mes armes ! Si tu n’en veux pas, je reprends mon bouclier, hein, c’est ça que tu veux ?! Cela m’arrange bien, gros con ! »


Et ayant dit cela, je tends mon bras pour lui arracher l’écu des mains. Gérald soupire en me voyant faire, mais il ne s’arrête pas de marcher pour autant. Pour lui, cette bagarre n’est qu’enfantillages. C’est qu’il se rend pas compte de l’importance que j’y porte, moi.
Je tire donc la sangle du bouclier, afin qu’il repose sur mon dos comme un sac. Et je remarche à nouveau en avant, tout en grommelant d’autres insultes dans ma barbe.

Et puis c’est là que Lulie a fait le truc qu’il fallait pas faire. C’est dommage, moi qui pensais la draguer pour espérer tirer la mienne, de crampe, et surtout pour pouvoir passer une nuit avec une fille dans les bras, chose qui m’est pas arrivée depuis super longtemps. Elle menace de bouffer tout cru mon animal. Mon Témérité ! Mon magnifique cheval blanc si mignon qui hennit quand on lui gratouille l’oreille ! En temps normal, j’aurais raisonné l’utilité de ma bête en expliquant que je peux l’utiliser en éclaireur, ou pour éloigner les fangeux en servant de distraction pour le groupe. C’est l’explication que j’ai déjà donnée à Gérald et à Clahauser. Mais là, face à elle, parce qu’elle menace véritablement de le faire cuire et de le grignoter, je vais recourir à une autre solution.

« Si tu veux toucher à mon cheval, alors va falloir me le prendre des mains, garce ! Appelle ton Jules, cette sale tanche, qu’on se batte en duel, fer contre fer ! Le sang poisseux qui file entre ses dents, je me demande si tu continueras à me servir de telles salades ! Si j’ai le choix entre te sauver toi et sauver mon cheval, devine à qui je vais donner ma vie ! »
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Loreline ClahauserBannie
Loreline Clahauser



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MessageSujet: Re: Donne un poisson à un homme.   Donne un poisson à un homme. EmptyDim 9 Juil 2017 - 15:03
Le fait prévisible que le chevalier n’apprécie nullement qu’on râle que son écu était trop lourd ou qu’on cause de sa monture comme d’une orgie de bouffe sur patte, ne manqua nullement provocant moult effusions verbales peu délicates et le fait qu’il soit partie plus avant bouder quelque peu.

Lore, elle, elle avait regardé tout ça un peu neutre à côté de Gérald, un peu de son avis aussi, le gamin il faisait ce que faisait tout crétin qui se respectait un peu, il râlait, pas de quoi s’émouvoir outre mesure, mais bon si ça lui faisait plaisir au Godfroid de le prendre à cœur, elle le laisserait faire composant avec. De toute façon essayée quoi que ce soit d’autre ça aurait fait tout l’inverse de ce qui aurait été bien. Alors elle avait trop rien dis regardant de loin.
Du moins jusqu’à un certain point.

« Mon jules ?! Je ne suis pas une pute qu’ouvre sa gueule et frémit quand ça devient sérieux. S'tu t’bat pour c'que je dis c’est avec moi ! »


Elle s’était avancée la grande couillonne, visiblement pas très heureuse qu’on ait sous-entendue qu’elle savait pas se défendre seule. En même temps vu le physique qu’elle se traînait elle devait pas avoir bien de mal à défendre elle-même sa vie ou ce qui restait de son honneur. Mais bon la vie en groupe ça permettait de mieux survivre et Yves c'était un crétin, mais un crétin qui tapait assez fort pour se faire respecter de quelques glandus.

Avançant l’air d’avoir envie de lui mettre un pain plus que de lui faire un câlin, Lulie s’approchait un peu trop du chevalier pour que ça plaise à la blonde. L’ego d’une grognasse valait pas un incident diplomatique majeur dans le groupe.

Un signe de tête de la balafrée, un coup de coude au Gérald et la furie avait fini par terre maintenue. Le vieux était pas un bagarreur mais ça va avoir le dessus, par surprise, sur une femme il pouvait encore toute masculine qu’elle pouvait être.

« Personne se bat avec personne. Compris ? »

Qu’elle avait demandé Lore, calme, ferme, légèrement penchée au-dessus de Lulie qui pestait comme elle pouvait. Son petit mangé dura bien cinq minutes avant qu’elle veuille bien articuler qu’elle avait bien enregistré ce qui lui était demandé.

« Vous faites chier. On bouffe pas d’cheval et on s’bat pas, c’est simple non ? »

Avait déclaré Clahauser dans un soupire en reprenant son chemin gardant tout de même un œil sur tout le monde, on savait jamais que la connerie humaine refasse surface. ‘Fin elle avait pas fait trois pas que l’autre bonne femme vexée avait ouvert son clapet.

« L'frangin t'suffit plus ? T'sais je ne sais pas s’prendre sa défense ça lui donnera envie d’isoler deux minutes avec toi. »

Bah tien, l’attaque facile, ça aurait été dommage de par la sortir.
Tout ce que ça avait produit comme effet s’était fait haussé un sourcil à la blonde.

« Que deux minutes ? C’est un rapide le Yves … »

Elle avait pas moufté, remettant un pied devant l’autre un peu à la traîne, visiblement courroucée de s’être fait moucher grossièrement.


Les trois bicoques étaient enfin en vue, c’était pas trop tôt. Ça aurait le mérite de distraire de la merde du trajet, une heure s’était trop longue surtout dans une ambiance tendue. Il avait été hors de question de foncer la tête la première comme des crétins pour aller voir s'il y avait quelqu’un ou quelque chose à récupérer.

Il n’y avait eu que le bruit des vagues, les clapotis brutaux de l’eau contre les rochers et la plage pour meubler l’attente, celle du retour du gamin. C’était lui qui avait été désigné volontaire pour aller faire un tour des lieues et désigner si c’était dangereux ou non.

Revenu au pas de course, enfin si vite qu’il pouvait s’était précipité derrière le gros roché où tout le monde était caché.

« Y'a quelqu’un dans la première maison, mais je crois qu’les autres sont vides. Qu-est-ce qu’on fait ?

Y'a qu’un mec ? Questionna Loreline un peu sèchement.

Bah eh … je ne sais pas, y'avais du bruit à l’intérieur. »


Des informations sommes toutes d’une utilité exemplaire.
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Lucain d'AgranceBanni
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MessageSujet: Re: Donne un poisson à un homme.   Donne un poisson à un homme. EmptyDim 9 Juil 2017 - 23:58
J’assiste à la scène grotesque de Gérald qui se jette sur l’hommesse pour la mettre à terre. Et voilà que Clahauser prend ma défense. Étais-je censé bien le prendre ? J’ai presque envie de grogner, les dents serrées. Une femme et un vioc qui règlent un litige que j’aurais pu arranger tout seul comme un grand, et sans avoir besoin de me rouler dans la boue ou de coller des beignes.
Du coup je suis reparti le dernier, après que tout le monde soit en marche, afin de faire de la distance. Je grommelle dans ma barbe de quelques jours tout en traînant des semelles, pestant tout le long, contre cette bande de bras cassés pas bien débrouillards. J’ai jamais été fait pour le travail en groupe. Il vaut d’ailleurs mieux rien dire que régler des problèmes. C’est franchement bien relou.

Au moins plus personne ne m’a embêté tout le long du trajet jusqu’à ce qu’on atteigne les cabanes. En attendant le retour du Mervault, je me suis assis par terre, fesses sur le sol, à regarder ce qui nous attendait. Trois petits bâtiments en bois et en terre cuite, des chaumières à l’apparence morte. Mais c’est surtout les deux petits canots qui ont attiré notre attention, et ayant le sens du détail, je ne peux pas m’empêcher de noter quelque chose :

« Les embarcations sont pas encore bouffées par la mousse. C’est qu’on doit les utiliser. »

Quand Mervault revient, je me lève, aidé de Tartin qui me tend la main pour me soulever. Le petit qui a refusé d’être mon écuyer fait un mauvais rapport à la cheffe, et ça se voit qu’il n’a malheureusement pas l’habitude d’être éclaireur. Il déclare qu’il y a du bruit, sans apporter de réelle précision, au point de laisser un silence gênant dans le groupe.

« Tu dis qu’il y a quelqu’un ou qu’il y a du bruit ?
Je répète après Loreline. C’est pas la même chose. Réfléchis et concentre-toi. T’as regardé par la fenêtre de la chaumière, au moins ?
– Non, j’ai pas osé...
Répondit-il en regardant ses pieds.
– Quoi comme bruit ? Un raclement de chaise, des paroles ? T’as senti des odeurs ? Du pain chaud ? Du feu ? Les habitations elles sont sales ou pas ? T’as vu des traces de pas ? Ça te semble habité ou pas ?
Mervault, quand on te demande d’aller de l’avant essaye de tout noter ! »


Gérald acquiesce d’un simple mouvement de tête. Le vieux est censé s’occuper de l’enseignement du cadet, mais il semblerait qu’il traîne de la patte.

« Bon on fait quoi ? Bégaye Tartin, impatient et appréciant peu le manque de réaction générale.
– ... Bah j’y vais moi, je dis subitement, voyant que personne ne se dévoue.
– Tu vas faire quoi ? Questionne Gérald.
– Je sais pas. Je vais voir autour. S’il y a des gens on peut simplement toquer, il y a aucun besoin de devenir violent.
– C’est ton genre de pas être violent ?
– Oui, si on me fait pas chier. Je peux être charmant Gérald, tu sais ! Fut un temps où je faisais rougir des gamines en robe et parfumées, c’est te dire ! »


Je donne une tape sur l’encolure de mon cheval qui se remet à brouter l’herbe grasse, et va en avant, tel un petit soldat.

La main sur le fourreau, je tiens bien mon épée à mon corps, et je fais les pas qui m’amènent là-bas, en trottant tout en voûtant le dos. Ma course n’est pas très discrète, parce que mon armure cliquette avec les anneaux de maille et les pièces d’armures que je me trimbale. Il n’empêche. Je parviens à traverser un no man’s land où un archer aurait pu me cribler de flèches tel un hérisson s’il s’agissait d’un château-fort. Pas de trace de charrette, ni de mulet, ni de la moindre bête. En revanche, en disparaissant du champ de vision de mes camarades bannis, longeant l’une des premières cabanes, je découvre un petit enclos. Je saute par-dessus la petite barrière et approche pour voir de petites cages. Point de poules, je suppose que Mervault aurait entendu leurs « cot-cot » et leurs plumes qu’elles dandineraient dans tous les sens. En revanche, j’ai l’aimable surprise de voir une lapine bien grasse et des lapereaux qui sautillent un peu partout. J’en ai la bave aux lèvres.
La première bicoque est complètement abandonnée. Il n’y a qu’une seule fenêtre, couverte de poussière et de merdaille. Le bois est pourri, gagné par des infections ; Elle va bientôt s’écraser. En sautant pour regarder à l’intérieur, je vois du bric-à-brac, des bibelots, des outils, quelques chaises sur une table. Rien qui soit bien utile, mais c’est là un bon endroit pour roupiller une nuit.
Je quitte l’enclos de l’autre côté, et je sors instinctivement de mon manteau une miséricorde, un long couteau pour achever les blessés. Les deux autres baraques, elles, sont jointes par un ponton qui donne directement sur la mer. En m’avançant, peut-être que Gérald et les autres peuvent voir mon ombre traverser leur champ de vision. J’espère qu’ils prient pour ma réussite.
Je colle mon oreille à la chaumière que Mervault est allé voir.

Deux minutes plus tard, j’ai réussi à faire tout le chemin inverse, et je retourne vers Clahauser, ma miséricorde à nouveau sous mon manteau. Je me dépêche vite de parler à voix basse une fois devant la cheffe.

« Y a une famille. J’ai entendu un monsieur qui racontait une histoire à deux enfants. Un gamin et une gamine, je crois, ils avaient la voix aigue, compliqué de savoir si c’était des petits ours ou des fillettes.
– Une famille ?
Répète Gérald, les yeux écarquillés.
– Pas osé regarder par la fenêtre. J’aurais pu les alerter. Mais c’est bien habité.
Et heu, c’est une mauvaise idée de foncer en leur faisant peur... J’ai vu une belle épée qui dorait au soleil. Ma théorie à moi c’est que le type qui vit ici c’est un dur pour protéger les gamins au milieu des fangeux.
Loreline, je me disais... ‘Fin, en vrai, vu notre groupe, t’as quand même la plus jolie gueule ici. J’veux dire, tu fais pas aussi peur que Gérald et sa tronche de soudard. Tu crois que toi et moi on peut aller se présenter et lui demander si on peut emprunter ses bateaux ? Je suis sûr qu’on est capables de résoudre ça sans aucune histoire. T’en penses quoi ? »
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