[TERMINE] L'esprit pour seule arme [PV Victor de Rougelac]

7 mars 1166
(lendemain de l'entretien avec Adelaïde)

Lyanna n'aurait jamais imaginé en arriver là un jour.
Oh, bien-sur, elle ne manquait pas de confiance en elle. Elle avait toujours su qu'elle n'était pas n'importe qui, pas une voleuse de bas étages, et que ses talents dépassaient de très loin la majorité des autres malfrats de la cité.
Mais il y avait encore quelques mois, Rubis n'était qu'un petit nom courant dans l'ombre. Les contrats étaient rares, les vols de moindre envergure. Elle bataillait pour survivre, mettant peu de côté pour ses projets avenirs, mais jouissant d'une liberté des plus totale.
Or, subitement tout avait changé. L'identité fictive de la voleuse s'était retrouvé propulsée d'un coup, sans qu'elle ne sache réellement pourquoi. Cela avait conduit à une réaction en chaîne qui l'avait finalement amenée à repousser ses limites, s'introduisant chez un noble pour un autre larcin sur demande. A voler trop près du soleil, on finit par se brûler... Un piège... Victor... Envolée la liberté.

Lyanna avait fait tout ce qu'elle pouvait, et si elle avait de quoi être fière, c'est maussade qu'elle se préparait à un nouvel entretien chez l'homme qui la maintenait prisonnière de son autorité. Deux missions, les deux concluantes. Personne ne l'avait démasquée, et elle était arrivée aux fins qu'elle s'était fixée qu'avec de légers encombres. Oui, elle avait dupé ses victimes, et pour cela elle serait sans doute récompensée d'un surci dans la fatalité de sa position. Mais elle avait le coeur lourd, pleins de regrets, car en soit elle n'avait pas voulu venir entâcher la vie de ces gens de la sorte.
Il y avait eu Ulysse, d'abord. Le baron de Sombreval et elle avait passé une après-midi des plus amusantes... Et charmantes. Si Lyanna avait eut les informations recherchées? Il lui semblait que oui, mais rien ne garantissait que ce soit de l'avis de Victor. L'ennui... C'est que la voleuse s'était attaché à ce pauvre veuf éploré, et que dans son envie de l'apaiser, Lyanna et lui s'étaient prêté à un petit jeu d'alcool qui s'était soldé d'une manière des plus surprenantes... La rousse s'en voulait terriblement de s'être joué de lui, et livrer ce qu'elle savait à son propos au Comte de Rougelac ne faisait que meurtrir un peu plus son coeur, qu'elle pensait pourtant fait de glace.
Puis il y avait eut Adelaïde de Rougesoleil. Lorsqu'elle avait postulé dans sa maison pour y devenir une domestique, la Baronne ne s'était pas laissé attrapé si facilement et l'avait directement accusé de travailler pour le compte de Victor. Grace à un jeu d'acteur brillant, Lyanna avait apaisé tout ses soupçons, et la Dame de Nerra l'avait engagé en s'excusant platement. En vérité, la voleuse n'avait pas une grande sympathie à l'égard de la noble, mais elle s'en voulait de se jouer d'elle en faveur d'un homme qu'elle haïssait intensément et qui s'apprêtait à entraver à son tour la pauvre brune des beaux quartiers.
Nous étions au lendemain de cet entretien et Lyanna appréhendait de faire son rapport au Compte de Rougelac. La dernière fois qu'ils s'étaient vu, elle avait gardé la tête haute, prenant comme une infime victoire le petit jeu de séduction auquel elle avait mis court. Mais aujourd'hui, allez savoir quelles nouvelles règles il se permettrait de réécrire...

Ils ne s'étaient pas fixé de date de rencontre. Aussi, la maison ne serait pas libre d'accès pour l'arriver de la voleuse le soir même. Il aurait fallut pour cela qu'elle avertisse le compte de son désir de s'entretenir avec lui. Ce n'était pas aisé : Rubis et Lyanna ne devaient pas être mis en relation, pour que personne ne puisse faire le lien. Et Victor ne pouvait pas se permettre d'être lui aussi associé à son nom.
Ne sachant pas écrire, la rouquine pensa à un petit signe à faire à son maître pour l'avertir de son arrivé le soir même.
Guettant l'arrivé de l'une des domestiques de la maison, la jeune femme l'interpella alors.

- Je m'excuse, mademoiselle... Pourriez vous donner cette rose au Comte de Rougelac pour moi, s'il-vous-plait?

Méfiante, la servant saisit malgré tout la fleur d'un rouge sang que lui tendait la voleuse.

- De la part de qui, dois-je la lui donner?

- De personne en particulier. Donnez la lui simplement. Il comprendra. N'oubliez pas surtout, mademoiselle. Je vous remercie.

*~*~*

La nuit était tombée sur Marbrume et un épais brouillard noyait les derniers rayons de lune qui perçaient parfois entre les nuages.
La voleuse passa par le côté de la résidence, comme elle l'avait fait la fois précédente. Arrivée dans le jardin, aucun garde à l'horizon. La jeune domestique avait tenu parole. Le Comte avait sans doute deviné le message que la rose renfermait. Tant mieux... Enfin, il n'y avait pas de quoi se réjouir malgré tout. Mais au moins, la tâche serait moins compliquée.
Lyanna traversa le jardin à grand pas. Il faisait froid dehors, à croire que l'hiver n'était pas prêt de partir. Malgré la cape de voyage qui lui couvrait la tête et le corps, il lui semblait sentir l'humidité impringner ses vêtements, mouillée sa peau comme ses cheveux. Même si c'était pour se retrouver nez à nez avec Victor, il lui pressait de se mettre au sec et de jouir du bon feu qui devait crépiter dans la cheminée.
Elle arriva devant la porte du petit salon où ils avaient convenu de se rencontrer à présent. C'était préférable, Lyanna n'avait aucune envie de se retrouver à nouveau seule à seul dans la chambre privé du Compte. Un endroit sans quiproquos , avec une échappatoire... C'était idéale. La rousse s'assura qu'il ne se trouvait aucune personne indésirables l'attendant à l'intérieur. La lueur du feu lui révêlait partiellement la pièce, qui semblait parfaitement vide. Etrange... Elle pensait que Victor l'attendrait déjà.
Elle abaissa la poignée avant de se glisser à l'intérieur et refermer derrière elle. Elle scruta encore l'obscurité. Il lui semblait encore une fois que personne ne s'y trouvait.

- Eh oh?

Dit elle timidement. Pas de réponse.
La jeune femme se dévêtit de sa cape, à présent trempée par la bruine, et la posa sur l'accoudoir d'un des canapés qui faisaient face au feu. Il lui importait peu que l'eau puisse les abîmer. Elle n'accordait de valeur qu'à ce qu'elle pouvait dérober. Et elle se fichait bien de causer du tord dans la maison de son bourreau.
La rousse se mit face au feu, à un rien de l'âtre, tendant les mains pour se réchauffer, frissonnant du contraste chaud/froid brutal qu'elle subissait. Ca faisait tant de bien de trouver un peu de chaleur...
Son regard azuré se perdit dans la danse furieuse que formaient les flammes...

L'ensemble des pions du Comte de Rougelac étaient déployés sur ce vaste échiquier et à mesure que les intrigues progressaient, les premiers résultats voyaient le jour. Tel un pêcheur lançant différents hameçons à la mer, Victor scrutait l'horizon attendant patiemment les premières touches pour ensuite ferrer les poissons au moment opportun. Il eut tout d'abord le Baron de Sombrebois, puis la Dame de Rougesoleil, mais d'autres lignes méritaient que l'on laisse le courant œuvrer suffisamment longtemps afin d'en retirer une prise bien plus difficile à extraire des fonds marins. S'il accordait confiance à l'espionne qui sévissait sur Marbrume sous le surnom de Rubis, il lui laissait une certaine liberté d'action toute relative et attendait d'elle des résultats. Certes, il ne l'avait pas ménagé, lui confiant deux missions d'importance, mais après tout, ne devait-elle pas faire valoir sa réputation dans le milieu ?

Lorsqu'il reçu la fameuse rose de la part d'une des domestiques revenant du marché, Victor comprit immédiatement le message. "de la part de personne en particulier'. Qui pouvait-donc être "personne" si ce n'est le seul individu qui ne pouvait que taire sa réelle identité. Lyanne Desroses raisonna alors dans l'esprit du Comte qui saisie la fleur avant d'en humer la senteur si particulière. Esquissant un fin sourire à la commissure de ses lèvres, il congédia la domestique afin que dans le plus grand des secret, il ne prépare la venue de son "Rubis". L'homme fidèle à lui même, allait lui accorder, lui réserver une entrée théâtrale, conscient que sa position lui permettait cette fantaisie qu'il appréciait par dessus tout face à des personnages qu'il savait sous sa coupe de gré ou de force. Ainsi, le soir venue, il laissa un feu nourri crépiter dans l'âtre du petit salon cossu, lieu de villégiature entre employeur et employer.

La patience était d'or et désireux de briser la coutume, laissa-t-il son fauteuil vide face à feu crépitant. Tapis dans l'ombre, un peu comme il l'avait fait lors de leur première rencontre où son traquenard avait contraint la jeune femme à se plier à ce chantage malhonnête, Rougelac l'attendait. Lorsqu'elle apparut, son regard se riva sur elle, détaillant chaque de ces gestes et naturellement un sourire diabolique s'afficha sur ses lèvres lorsqu'elle pénétra le lieu prudemment et prononça quelques mots timidement. Cette simple scène le conforta dans sa démarche et dans cette complexe relation qu'il entretenait avec la voleuse. Il lui avait inspirer la peur au point qu'elle s'offre à lui telle une brebis égaré devant l'âtre. C'était le moment de faire son entrée en scène. Judicieusement, il avait troquer ses bottes en cuirs pour des chausses plus fines qui lui permettaient de se délacer silencieusement. Il attendit donc que le regard de la rouquine se perde dans les flammes pour glisser dans son dos dague dans la main droite.

Il laissa alors s'échapper dans la nuque de Lyanna un souffle chaud que lorsque le tranchant de sa lame vienne flirter avec le cou de sa victime. Le froid de la dague devait sans doute venir contraster avec l'intense chaleur que se diffusait des flammes et pour parfaire son introduction, Victor se pressa contre le corps de la jeune femme, cerclant sa taille par son bras gauche venant ainsi l'étreindre. Décidé à provoquer des stimulations contradictoire à travers l'esprit et le corps de la voleuse, il fini par déclarer de son timbre de voix le plus roque.

- Vous m'avez manqué... mon précieux Rubis... j'espère que vous apportez à votre Maître de bonnes nouvelles ? Je ne voudrais ternir un si beau joyaux par le sang... bien que les deux couleurs soient sensiblement similaire.

Provoquant, Victor cherchait immédiatement à garder le contrôle sur les événements. Il le savait, avec un tel personnage, le moindre faux pas vous promettez les pires déboires. Pressant la dague contre la gorge de Rubis, il embrassa sa nuque tandis que sa main libre serrait un peu plus la taille fine de la voleuse. L'homme était persuadé qu'elle le répugnait et cela faisait parti de son vicieux jeu.

- Sentirais-je l'odeur de la peur et du dégoût ? Hmmmm... est-ce si aphrodisiaque.

La sublime danse du feu avait quelque chose de réconfortant... Captivée, douillettement bercée par la chaleur émanante, la jeune femme en oublia le décor glaçant de sa rencontre prochaine et abaissa ses défenses comme son attention pour profiter davantage ce bref moment de sérénité durement gagné.
Erreur fatale. Ne jamais baisser sa garde si proche de la tanière du loup...
Avant qu'elle n'ait pu se rendre compte de quoi que ce soit, il était déjà trop tard. Une chose métallique, froide et... tranchante? ... venait de se glisser le long de sa gorge et y restait solidement - dangereusement même - attacher, griffant légèrement sa peau. Un souffle chaud vint caresser sa nuque, faisant s'hérisser les petits cheveux qui s'y trouvaient, et un terrible frisson parcourue son dos alors qu'elle comprenait, trop tard, qu'un homme s'y trouvait, si prêt d'elle que leurs corps devaient se frôler à un rien l'un de l'autre.
La jeune femme poussa une petite exclamation étouffée, tant d'effroi que de surprise. Instinctivement, Lyanna eut l'envie de se retourner pour faire face à son agresseur, mais le filet accéré de ce qu'elle devinait être un poignard l'en dissuada. Un mouvement trop.brusque, et il lui déchirerait la gorge, volontairement ou involontairement...
Même si elle avait été en mesure de le faire à cet instant, en vérité cette possibilité s'envola en une fraction de seconde. Comme si la dague n'avait pas suffit à la tenir tranquille, un bras vint encercler sa taille fine avec une volonté à laquelle elle ne s'était pas attendue. La poigne était ferme. Loin d'être brutale ou blessante. Mais suffisamment forte pour empêcher le gros des mouvements de la rousse qui se raidit à ce contact aussi inattendu qu'indésiré.
Préférant ne pas prendre davantage le risque de se faire égorger, la voleuse demeura immobile, le coeur battant à ton rompre, le visage livide.
Aucune surprise en revanche à entendre la voix de Victor se glisser à son oreille. Qui d'autre que lui, après tout? Si elle s'était attendu à une nouvelle entrée théâtrale, celle-ci dépassait de loin toutes celles qu'elle avait imaginé.
On eut dit que le baron employait son timbre de voix le plus viril. Ses paroles, caressantes, chatouillaient les oreilles de la pauvre voleuse impuissante. Il était fier de lui, nul doute. Se désignant lui même comme étant son maître, il ne tarda pas à lui glisser une nouvelle menace devenue coutumière dans leurs échanges. La gorge de Lyanna se contracta. Il avait toujours été effrayant, davantage par son pouvoir que par sa réelle dangerosité. Mais là, il faisait preuve d'un audace et d'une tactique à laquelle elle ne s'était pas préparée.
La voleuse, impuissante, contrariée et prise au dépourvue, ne parvenait pas à articuler un traitre mot. Ses paroles se mélangeaient dans son esprit alors que pour la toute première fois, elle réalisait que Victor n'était pas juste un bon stratège, dangereux par ses mots et son influence, mais aussi un homme, plus fort et plus entraînée qu'elle ne l'était elle même.
Le souffle chaud du Comte continuait de déferler sur sa nuque, alors que soudainement se fut autre chose qui vint en caresser la surface. Les lèvres de l'homme se posant sur la peau lui arrachèrent un violent frisson qui parcourue l'ensemble de son corps et la jeune femme hoqueta tant de surprise que de désapprobation. Ce fur pire encore lorsque de son bras l'entourrant il resserra l'étreinte, l'approchant tout à fait, faisant se toucher leurs deux corps non plus de manière abstraite, mais bien réelle. Lyanna, emprisonnée entre le feu ardent de la cheminée et les propres ardeurs de son bourreau, ne pouvait plus bouger d'un pouce.
Fixant le brasier comme s'il renfermait la réponse, elle repensa à Dic... A sa poigne ferme... A son désir cruel... A l'impitoyable morsure du cuir de son ceinturon... A ses propres larmes quand, sa faim assouvie, il la laissait repartir, misérable petite pauvresse, esclave qu'elle était, pour retourner voler pour son compte...
En était elle de nouveau réduit à cela? Travailler contre son gré pour un homme qui en voudrait toujours plus?
Mais elle n'était plus une enfant. Elle était une femme. Elle avait assimilée les règles du jeu. Elle n'était plus si démuni que ça...
Si elle ne l'appréciait pas jusqu'ici, pour sûr, le Comte venait de se faire une ennemie.
Tâchant de reprendre son calme, la rousse respira quelques secondes et elle se dit que le batement de son coeur devait forcément avoir donné raison à Victor. Puis, elle voulut répondre, avec conviction, reprendre les reines... au lieu de cela, ce fut une voix brisée et saccadée, ravagée tant par la peur que la stupeur, plus aigue que sa voix suave et mordante de d'habitude, qui passa l'ouverture de ses lèvres :

- Lâchez moi...

Elle manqua d'ajouter un "je vous en prie" mais s'en retient juste à temps. Inutile de donner davantage de plaisir à Victor dans son petit jeu.
Comme il ne bougeait pas tout de suite, la voleuse reprit :

- Je pense avoir de quoi combler vos attentes. Il n'est pas utile de vous en prendre à moi de la sorte.

Levant doucement ses mains tremblantes pour que le Comte ne croit pas qu'elle allait lui jouer un mauvais tour jusqu'à l'arme qu'il maintenait sur sa gorge, la demoiselle attrapa la main de Victor et la déserra de sorte que la lame cesse d'être en contact avec sa peau.

- Je n'ai pas d'arme sur moi. Il est déloyale de votre part d'user d'un poignard sur une femme désarmée.

Mensonge... Bien sûr... Au fond de sa botte dormait son propre poignard dont la garde était sertit d'un rubis. Mais comme il lui était impossible de l'atteindre pareillement entravé...
La jeune femme voulut également donner un peu coup de bassin, de sorte à se dégager de l'emprise que Rougelac exerçait sur son corps toujours collé à celui de son agresseur, dont la chaleur tranchant avec le froid de son propre corps était des plus déroutante. Si la situation eut pu être excitante en d'autres circonstances, pour l'heure, elle n'inspirait qu'un dégout profond chez la belle rousse, qui réprimait cette émotion pour ne pas donner le plaisir à Victor de lui donner raison. La vérité était qu'en comparant leur force respectives, il semblait évident qu'elle ne saurait s'en défaire pour l'heure que si le Comte y consentait....

Victor obtenait aisément ce qu'il été venu chercher au contact de la voleuse. Mêlant la menace au rapprochement physique, il œuvrait de la sorte dans le seul objectif de tourmenter et de maintenir sa position dominante face au petit bout de femme qu'il savait pourtant bien dangereuse. Lyanna était incapable de se défaire de son emprise, il le savait et le froid de la lame rappelait d'ailleurs à la rouquine qu'elle n'était pas en mesure de se rebeller. Des frissons la parcoururent, était-ce dû à ces baisés dans le cou ? Ou tout simplement les conséquences d'une peur chronique ? Rien n'était moins sûre, mais le Comte de Rougelac se délecta sans vergogne de cet instant où il était juge de vie ou de mort sur Rubis. Naturellement, le mondain était un homme à femmes, avec un "s" et cette entrée théâtrale ne pouvait qu'exciter cette libido tenace encore plus vrai par ce sentiment de dangerosité qui parfumait l'air ambiant. Il savait fort bien que cela n'était réciproque et qu'elle aurait en cet instant plus que jamais désirer la mort de son employeur indésirable par nature. Tout ceci rendait les retrouvailles du duo piquante, laissant un goût acide au palais.

Ce qui était alors prévisible se produisit, la situation devenait insoutenable pour la voleuse qui réclamait d'être relâcher de cette malsaine emprise. Elle se retint de le supplier mais Victor pu sentir qu'elle puisait dans ces ressources pour ne pas s'abaisser à une telle demande et cela aurait en effet été de donner du plaisir à son hôte dans son jeu savamment orchestré. Puis soudain la verbe de la rousse s'en trouva plus concrète, affichant ses intentions de satisfaire ce dernier de sa présence, accompagnant ses dires par un geste audacieux qui porta finalement ses fruits. Le sang-bleu desserra son étau et bientôt la lame qu'il tenait ne caressait plus la douce peau de sa captive de circonstance, mais pour autant, le Comte ne la rengaina nullement, restant en alerte encore quelques instant par mesure de précaution. Lyanna prônait sa bonne fois, son intrusion dans l'Antre de son Démon sans aucune arme pour lui nuire. L'homme ne lui accordait que peu de confiance sur ce sujet.

- Vous transpirez le mensonge, mon précieux Rubis...

Il la renifla de manière caricatural et exagéré avant de se permettre une fouille au corps non sans garder la pointe de sa lame à proximité de la gorge de sa sbire. Sa main gauche se retira alors de sa taille, venant palper ses hanches, le revers de sa ceinture avant de remonter jusqu'au discret décolleté que portait Lyanna pour y fourrer sa main qui se montrait un peu baladeuse, fallait-il l'avouer.

- Vous m'excuserez mais je connais les femmes... elles savent fort bien usé de leur atout physique pour dissimuler quelques menaces. Et croyez-vous que je me soucis d'être loyale ou déloyale devant une femme ? C'est mal me connaître...

Roulant un téton entre son pouce et son index, il retira rapidement sa main de la poitrine qu'il violait impunément avant de continuer son oeuvre de manière toujours salace jusqu'à coincer sa main entre les cuisses de la rouquine. Satisfait, il dessina les contours de l'intimité de Lyanna avant d'enfin terminer ses tourments. La lame quitta ensuite la vision de la demoiselle Desroses tandis qu'elle pouvait sentir sa liberté de mouvement retrouvé. Il recula de quelques pas puis puis prit la direction de son fauteuil en attendant qu'elle se retourne avant de lui indiqué de la pointe de sa dague qu'elle pouvait également s’asseoir dans l'autre siège laissé libre face à une table passe garni de boisson alcoolisées.

- Servez-vous quelque chose à boire. Avec ce temps, cela ne pourra que réchauffer vos entrailles. Vous m'avez manqué et je ne puis qu'espérer que votre présence est synonyme de très bonnes nouvelles. Je ne vais point vous le rappeler, mais vous m'êtes précieuse et il serait navrant pour vous que vous me déceviez, vous savez ce qu'il en coûterait... ma couche n'est pas loin et cordes et baillons vous attendent volontiers si vos mots qui vont suivre me feraient froncer les sourcils.

La menace était clair et il était toujours bon de rappeler certains termes du contrat, d'ailleurs, il n'avait encore évoquer la rétribution pour le travail accompli, cela dépendrait évidemment de la teneur et de l'importance des informations glanées vis à vis de Sombreval et de sa capacité à tromper sa future épouse en se faisant engager auprès de son petit personnel. Victor était prêt, il croisa les jambes, posant sa dague le long de son accoudoir droit.

Petites précisions...:

Mimant la sentir, le Comte ne perdit pas de temps à flairer sa duperie. Il devait se douter que pour rien au monde elle ne viendrait sans aucun moyen de défense chez un homme qui ne lui inspirait que si peu confiance.
Serrant les dents pour ne pas laisser jaillir sa colère, Lyanna réussit néanmoins à repousser le poignard qu'il portait sur sa gorge. Il l'immobilisa pourtant, non loin d'elle, prêt à en user à la première tentative déplacée. La jeune femme, quant à elle, tenait d'une main le poignet de son agresseur, et levait la deuxième en un signe de capitulation. Ce qu'elle n'attendait pas, en revanche, ce fut la suite qui n'allait pas aller pour arranger son état aussi bien de choc que de rage.
Victor la relâcha de son étreinte à la taille. Elle sentit une vague de soulagement la gagnée en sentant une part de sa liberté revenir. Pourtant, la jeune femme n'était pas au bout de ses peines, car déjà la main gauche nouvellement vacante de son bourreau venait chercher aux abords de sa taille et des ses hanches une arme qui aurait pu y être dissimulée. Prenant son mal en patience, consciente qu'il n'y trouverait rien l'incriminant, la rousse serra les dents un peu plus, regardant le feu brûler dans l'âtre sans réellement le voir. La sensation dèsagréable de Victor dans son dos, de sa main palpant son corps, puis son ventre, n'était qu'un bref moment à passé. Il la lâcherait ensuite, convaincue de son innocence... Mais elle savait dors et déjà qu'elle lui ferait payer cher cet audace mal venu.
Or, ce ne fut pas la fin, contrairement à ce qu'elle aurait cru. La main de l'homme remonta doucement le long de son buste avant de venir effleurer sa poitrine. Lyanna sentit la tête lui tournée et une nausée violente tordre son ventre alors qu'il enfouissait sa main dans son décolté, cherchant entre ses seins l'objet de son investigation. Ses ongles se plantèrent dans la peau du Comte, sur son poignet, mais il ne sembla pas y preter attention, tout occupé qu'il était à sa chasse aux trésors qui ne semblait plus tant être sa priorité sur l'instant. La paume chaude de Victor dévia alors, passant sur son sein qui n'avait alors plus aucune protection vestimentaire. La caresse qu'il produisit, suivit d'un léger pincement, provoqua une violente remontée de souvenirs chez la voleuse qui aurait pu vomir ses tripes sur le tapis en revoyant, bien malgré elle, l'enfance et adolescence torturée qu'elle avait eut. Elle eut beau cherché à le retenir, un gémissement de supplication passa ses lèvres et elle sentait ses yeux lui picotés, comme si elle était sur le point de pleurer...
S'il prenait du plaisir à la torturer, elle n'y trouvait que de la honte, du dégoût et de l'indignation.
Ses ongles se plantèrent un peu plus dans la chair du Comte et sa main trembla légèrement.
Pour sur, il se fichait bien des femmes... Il était comme Dic. Il pensait que que toutes la gente féminine n'était là que pour assouvir ses appétits et envies, qu'elles étaient inférieures, trop faibles pour se défendrent...
Aussi vite qu'elle était rentrée, la main ressortit de son décolté pour s'attaquer à un autre lieu de fouille qui lui arracha un terrible frisson d'effroi. Au travers de sa robe, elle sentit le contact de Victor sur sa cuisse, insistant, sans pudeur. Il remonta tout du long, et Lyanna sentait de terribles spasmes parcourirent son corps alors que l'envie de se retourner pour lui rendre la monnaie de sa pièce devenait la chose la plus irrésistible de son existence. Pourtant, elle restait pétrifiée, baissant ses yeux sur la danse diabolique des doigts du Comte sur ses vêtements, seule chose le séparant de son intimité.
Finalement, Rougelac se retira tout à fait, la lâchant et s'éloignant d'elle pour gagner son fauteuil habituelle. Aux coins des yeux de la jeune femme perlaient deux petites larmes qu'elle se forçait à réprimée. Sa fureur était telle qu'elle sentait la totalité de son corps tremblé, l'adrénaline montée...
Elle baissa les mains et se retourna doucement pour faire face à son agresseur qui s'était déjà assit. Sur le visage de la belle, on lisait sans mal toute la haine et le dégoût qu'elle pouvait éprouvée à l'égard du personnage qui se tenait devant elle. Sifflant entre ses dents, à la façon d'un chat pestant son ennemi, sa voix se fit noire, venimeuse :

- Vous n'être vraiment qu'un porc...

Elle resta droite et fière, bien qu'intimement blessée et salie, devant son bourreau qui, tout sourire, continuait son entrevue avec son petit discours théâtral faussement amical. Il l'invitait à s'asseoir de la pointe de sa lame, mais elle se refusait à obéir, bouillonnant, cherchant le moyen d'évacuer la frustration qu'elle avait à ne pouvoir se défendre de la manière qu'elle aurait souhaité.
Finalement, en entendant ses nouvelles menaces au caractère que trop limpide, elle fit au plus simple et cracha à la figure du Comte. Si elle n'était pas tout à fait soulagée de sa colère, elle sentait au moins qu'elle reprenait un semblant d'emprise.
Il lui semblait encore sentir les odieuses caresses sur son corps... Une nouvelle nausée... Les visages de Dic et de Victor se mélangèrent...
Détournant son regard du monstre qui la faisait sortir hors de ses gonds, Lyanna s'approcha à pas fébriles de la table et attrapa la première bouteille qui passait. Non, elle ne s'avouait pas vaincue... Ce n'était pas ça... Seulement, elle avait combattu durement la fantôme de son ancien maître durant tant d'années... Pour le voir resurgir, plus violent et féroce encore, dans sa vie, avec une autre apparence... Il lui fallait se remettre. Il fallait qu'elle retrouve son esprit clair et lucide. Pourvoir réfléchir, ne pas se précipiter... Trouver la solution pour se défaire de ses chaînes.
La jeune femme apporta directement le goulot à sa bouche et en bu une rasade, puis deux.
Son poignard était toujours dans sa botte... Victor ne l'avait pas trouvé... Il suffisait d'attendre le bon moment...
La jeune femme reposa la bouteille sur la table, plus doucement, plus mesurément. Deux gorgées, pas plus. Il ne fallait pas cédé à l'ivresse... Pas maintenant. Il fallait lui tenir tête, il fallait le rendre misérable...
La jeune femme jeta un regard en coin au Comte, toujours empreint d'une haine sans faille.

- Le dernier qui a osé posé la main sur moi de la sorte n'est plus de ce monde...

Bref silence...

- Ne vous avisez jamais de recommencer, sinon, je vous enverrai le rejoindre.

La rousse repoussa une mèche de ses longs cheveux roux, devenue bouclée, et qui était retombée devant ses yeux. Elle croisa les bras sur sa poitrine, attentive au moment le plus opportun pour mettre ses menaces à exécutions.

- Vous, vous ne m'avez pas manqué. Tout au contraire ! Moins je vous vois, mieux je me porte. Je ne vous donnerai pas le plaisir de m'offrir à vous : vous ne m'aurez jamais. Je ne vous appartiens pas, pour la simple et bonne raison que je n'appartiens à personne. Vous n'êtes qu'un salaud profitant de l'obscurité pour jouer vos sales tours aux plus faibles. Vous êtes un rat, Victor. La peste.

Elle se montrait ferme dans ses mots, cassante de sa voix, mais ne criait pas. Elle mesurait chacune de ses paroles, de sortes à en faire ressentir toutes la véracité à son auditeur.
Le message était clair : un beau jour, vous allez me le payer !

Le salon du Manoir Rougelac était en cette soirée le théâtre d'une pièce mélodramatique dont le réalisateur n'était autre que le Comte en personne. Mêlant la menace à la perversion, Victor n'avait la moindre place pour le hasard ou l'improvisation et chacun de ses mots, chacun de ses gestes n'en étaient que finement calculés et ce malgré les apparences. S'il avait tourmenté des zones érogènes et intimes chez la voleuse, c'était bien dans l'unique objectif de la pousser à montrer les griffes. Il l'avait sali de ses mains intentionnellement, lui faisant goûter à la froideur d'une lame et à la perspective d'une d'une séance bien particulière que les Trois auraient volontiers dénoncés. Seulement, aurait-il eut la moindre intention de passer à l'acte ? Pas le moins du monde, mais il laissait pourtant cette perspective se frayer un désagréable chemin dans l'esprit du pion qui se trouvait face à lui.

L'entracte venait donc de prendre fin et nul doute que Lyanna en ressortirait aussi perturbé que requinquer par la haine, le dégoût, mais ce qui prévalait était bel et bien qu'il se fasse craindre plus encore de sa sbire dont l'importance tendait à croître dans les prochaines semaines voir mois. Fort de son jeu d'acteur, il s'était donc réinstaller presque comme si de rien était dans son fauteuil au légendaire dossier qui semblait presque ne jamais prendre fin. Satisfait, il n'avait plus qu'à attendre que les graines qu'il avait semé ne germent. Sa première réaction fut de siffler entre ses dents pour enfin cracher son venin qui sonnait dans l'esprit du Comte comme une douce victoire. Lui adressant un sourire à la commissure de ses lèvres, le mondain resta stoïque, impassible face à l'insulte qui n'était qu'un prémisse à la rage qu'elle allait extérioriser à n'en point douter.

Il ne fut presque pas surprit de recevoir bien vite un cracha en plein visage, la salive de Rubis venant s'écraser sur sa pommette, propulsant quelques éclat liquide sur son œil gauche. Il ferma ce dernier par réflexe avant de le ré-ouvrir tandis que la salive dégoulina jusqu'à flatter sa lèvre supérieur. Sans la moindre réprimande, sans la moindre réaction de colère, il resta de marbre, toisant de son regard azur la silhouette qui prenant la direction de la table basse pour s'offrir le luxe de boire au goulot de la bouteille d'alcool qui s'y trouvait. Silencieux, scrutateur, il garda sa main droite sur la garde de sa dague tandis que sa gauche vint machinalement fouiller la poche extérieur de sa tunique pour en retirer un mouchoir en soit. Le temps semblait se figer, Lyanna sans doute en proie à moultes pensées réussit pourtant à retrouver son calme en apparence, une bonne chose, une très bonne chose même car pour jouer sur le long terme sur l'échiquier du Comte, il fallait prouver ses capacités à garder la tête froide en toute circonstance.

Leurs regards se croisèrent alors qu'elle reprenait de sa verbe menaçante et inquisitrice. Victor lui s'essuya méticuleusement le visage en gardant cette air presque hautain et fier. Il l'avait amené là où il l'avait souhaiter, elle ne pourrait être efficace qu'en étant le moins proche de lui. Pourquoi me direz-vous ? N'était-il pas faiblesse que de nourrir quelqu'affection avec un pion qui avait pour rôle d'espionner pour son compte des êtres proches ? Adélaïde était une intrigante hors pair, moins elle pourrait ressentir de proximité entre Victor et sa futur usurpatrice de domestique, moins elle serait enclin à faire le moindre rapprochement. Seulement en contre partie, nourrir une haine profonde avait ses désavantages et Victor savait qu'au moindre faux pas, il se retrouverait sans vie, gisant dans son propre sang.

Ferme dans son ton, la voix cassante, Lyanna fustigeait son interlocuteur, allant jusqu'à le comparer à un rat et pire encore, à la Peste. En retour, Rougelac sourit de toutes ses dents. Si le message était clair, le Gouverneur de Sombrebois ne prenait cette menace que comme un rappel à l'évidence même. Un beau jour oui, il le payerait, mais ce beau jour arriverait-il vraiment ? Manipulateur et calculateur, Victor allait forger ses propres défenses pour que jamais n'arrive ce jour ô combien espéré par son interlocutrice. Finalement, il rempoigna sa dague et de sa pointe, indiqua pour la seconde fois le siège vide, ses sourcils se fronçant alors que sa voix possédait des note lugubre.

- A...SSE...YEZ... VOUS!

Rangant soigneusement le mouchoir en soit dans sa poche, il releva le menton avant de venir lisser sa courte barbe bien entretenu du matin même. Croisant les jambes, il toisa Lyanna d'un regard carnassier avant de rajouter d'un ton plus calme et neutre, presque espiègle sur certaines ponctuations.

- Vous vous considérez donc comme une "faible" ? Allons, allons... Il hocha caricaturalement de la tête en guise de désapprobation tout en poursuivant. Je vous ai déjà mon préciiiieeuuux. Vous m'appartenez et vous êtes venu me délivrer de bonnes nouvelles, sinon vous auriez déjà fuit la cité, n'est-ce pas ? Vos insultes ne sont que compliments à mes oreilles. Vous vous permettez de me juger alors que vos talents vous servent à violer l'intimité des gens. De la part d'une voleuse, je trouve cela bien malvenue, n'ai point raison ? Rappelez-vous que votre situation, voter destin m'appartient. J'ai bien assez de preuve pour que la Milice vous passe la corde autour du coup sur la Place du Pendu... Alors cessez les menaces. JE peux m'offrir ce luxe que VOUS n'avez pas.

Il se racla la gorge en la dévorant du regard, de ces yeux lubriques qui venaient détailler les courbes se cachant sous la robe de la rouquine en guise de pique supplémentaire.

- Bien. J'attend votre rapport. Ne me faite pas perdre patience voulez-vous ?

Lorsqu'elle cracha, le Comte ne réagit pour ainsi dire pas. Il ne s'indigna pas, ne perdit pas son sang froid, resta neutre et stoïque face à son agression. Ce eut don d'énerver encore un peu plus la jeune femme. Consciente de n'avoir que de maigre chance de faire le poids lors d'une confrontation physique contre l'homme qu'elle haïssait, surtout lors d'une attaque de front, elle tremblait de tout ses membres, frustrée de ne pouvoir lui réserver le sort qu'elle avait à l'esprit dans l'heure. Pour passer sa colère intérieure, elle prit résolument l'une des carafes de vins, et en prit quelques gorgées. Elle n'en apprécia pas le goût, trop occupée à se calmer. Durant ce temps, Victor lui s'essuyait, pas vexé pour deux sous du geste de la rousse.
Il ne réagit pas non plus lorsqu'elle tenta de le mettre en garde et de lui faire peur à son tour. Il demeurait hautain, fier de son coup et de lui, la toisant d'un regard détestable. Elle le lui rendait avec haine, debout, cherchant à retenir le peu de dignité qu'il lui avait laissé.
Un jour, pour sûr, elle le lui ferait payer. Si ce n'était pas en lui enfonçant un poignard en plein coeur, ce serait en démantelant une à une chacune des pierres de l'empire qu'il s'était construit. Ca serait encore plus jouissif, d’ailleurs. Le regarder dégringoler dans un trou, du haut de son rebord, et lui sourire. Lui sourire pour lui faire comprendre qui était le plus malin d'entre eux deux, qui gagnait cette guerre qu'il avait été seul à lancé, avec sa confiance de mâle dominateur. Et le regarder pourrir, devenir le moins que rien qu'il méritait d'être, le voir sombrer tout à fait... Avant de s'en détourner.
Le Comte lui ordonna une nouvelle fois avec fermeté d'aller s'asseoir sur le divan. Lyanna hésita, fixe, méprisant une nouvelle fois Victor du regard. Si elle rêvait de lui tenir tête, elle savait que dans sa position actuelle, il valait mieux montrer patte blanche et se résoudre à se soumettre. Question de survie... Il était en sursit pour le moment. S'il gardait l'avantage dans sa position naturelle de force, un beau jour la roue tournerait... Et rirait bien qui rirait le dernier.
Aussi, Lyanna gagna sa place, sans quitter son hôte du regard. Bien qu'elle fut outrée et furieuse, ses mouvements demeuraient silencieux et félins, en alerte.
Si tôt le Comte reprit la parole, posant un peu plus son autorité de bourreau sur sa captive qui s'efforça de demeurée la plus neutre possible face à ses affirmations de mâle dominant. Elle brûlait de l'envie de lui faire ravaler sa fierté. Mais elle prenait le partie de se dire que rester le plus loin et intouchable possible pour Rougelac était sans doute le meilleur moyen de le frustrer, pour l'heure.

- Je me contente de survivre en essayant de faire le moins de mal possible aux autres. Pour vous, c'est différent. Vous voyez tout le monde comme de vulgaires pions dont on peut user et sacrifier à sa guise. Vous manipulez des gens qui ne méritent pas de souffrir et d'être bernés. Vous êtes cruel et arrogant. Mais soyez en sûr, Monsieur de Rougelac... On finit tous un jour par récolter ce que l'on sème.

La rousse avait réussit à retrouver un peu de son sang-froid, et sa voix bien que sèche et cassante ne tremblait plus autant d'une colère débordante. Elle intériorisait, c'était bien mieux.
Les yeux de l'homme parcoururent une nouvelle fois l'ensemble de son corps. Elle se sentait comme à nue, salie, honteuse... Pourtant elle soutint son regard, dans une volonté de défi, dans son désir de sauver les apparences et de ne pas s'abandonner en victime à son bourreau.
Il la pressa d'en venir à son rapport. Aussi, obéit elle sans tarder, pressée d'en finir et de pouvoir repartir au plus vite de ce salon lugubre, coincée avec cet inquiétant personnage.

- Je me suis présentée chez la Baronne de Rougesoleil pas plus tard qu'hier. J'ai postulé en tant que domestique dans sa maison, comme nous en avions tout deux convenus lors de notre précédente rencontre. Elle s'est très vite montrer suspicieuse, soucieuse de mon identité...

Lyanna eut un petit rictus méprisant à l'égard du Comte, s'amusant de le détromper au sujet de ses prétendus talents de manipulations.

- De toute évidence, votre douce promise se doutait que vous enverriez quelqu'un chez elle pour la surveiller. Elle a tout de suite pensé que j'étais votre espionne. Elle m'a même proposé de me retourner contre vous pour son compte...

Elle laissa couler un silence, laissant un petit doute s'installer quant au déroulement final de sa mission. Puis elle reprit.

- Ne vous en faites donc pas, je me suis abstenue d'accepter. Heureusement, je me suis montrée suffisamment convaincante pour qu'elle pense avoir fait une terrible méprise. Elle m'a engagé sur le champs. Je commence dès demain, en tant que sa propre femme de chambre.

Se pliant finalement aux exigences de son employeur, la voleuse retrouvait enfin son calme, tout du moins en apparence car il ne faisait aucun doute qu'elle bouillonnait intérieurement et le regard qu'elle adressa à son hôte sans le quitter une seule seconde des yeux était plus que révélateur de l'ardant désir de le voir un jour "manger les pissenlits par la racine". Paradoxalement, c'était bel et bien ce que recherchait à entretenir le Comte qui n'aurait vu que faiblesse si d'aventure il se serait acoquiner à la rouquine. En l'état, la savoir lui vouer une haine incommensurable faisait ses affaires même si il devait veiller à ce que certaines limites ne soient pas franchies. En réaction à ses propos, Lyanna Desroses s'essayait au talent de la prose, ce qui amusait grandement le Comte qui lui offrit en retour son plus beau sourire carnassier.

- Je ne le vous fais pas dire. Et j'ai bien l’intention de récolter ce que je sème depuis de nombreuses années. Et pour un résultat optimum, rien de mieux que d'entretenir ce vaste champ d'engrais. Vous y contribuez à votre niveau et je vous en remercie.

Prenant à contre pied le discours de la rouquine, Victor voyait les choses bien autrement, avec plus de hauteur peut être.

- Manipulation, cruauté et arrogance sont là les ingrédients d'un terreau propice au succès, je vous l'accorde volontiers mon précieux.

Nul besoin de débattre plus encore à ce sujet, ne serait-ce que perte de temps et échanges stérile, tout deux avaient mieux à faire. Ainsi, l'entretien se recentra rapidement sur l'objet de la visite de la voleuse au Manoir Rougelac à une heure tardive, propice à un débriefing tant attendu par le mondain. Et le discours qui suivit de la part de Lyanna fut plus que satisfaisant, même si cette dernière n'avait abandonner son air méprisant à l'endroit de son employeur. Si Adélaïde était de nature soupçonneuse tout portait à croire que son pion avait su se faire accepter et berner la Comtesse. Un échec aurait évidemment compromis l'entente entre employeur et employer mais finalement, Victor n'aurait point besoin de prendre des mesures correctives qui lui aurait coûter en temps et en argent assurément. Approbateur, le Comte acquiesça finalement, pas peu fier d'enfin placer un pion dans l'entourage de sa promise et ainsi pouvoir l'espionner et épier ses moindre faits et gestes.

- Femme de chambre... Pensa-t-il à voix haute. Voilà qui est bien, même très bien je dois dire. Vous pourrez alors, user de vos talents pour fouiller ses effets s'en qu'elle ne s’aperçoive de rien. Vous pourrez ainsi me faire des rapports régulier au cœur même de cette intrigue. Entretenait la supercherie, mieux encore, faite vous apprécier de sa cours, de ses domestiques, de sa dame de compagnie, mais surtout méfiez-vous car la moindre erreur pourrait compromettre votre couverture.

Si Lyanna semblait pressé d'en finir, d'écourter l'entretien, elle allait probablement devoir ronger son frein car le Comte était loin d'en avoir fini avec elle ce soir car après le rapport de ces différentes missions, il allait devoir lui donner de nouvelles directives, mais avant cela.

- Et concernant Sieur de Sombreval, qu'avez-vous trouvé à son sujet? N’omettez rien car ce qui peut vous paraître un détails anodin pourrait avoir son importance.

Impossible de dérouter le Comte de Rougelac qui restait passif et souriant, malgré tout ses efforts et ses menaces dissimulées. C'était comme si rien ne l'atteignait. Il restait hermétique à ses reproches, ses insultes, ses mises en gardes. Il se contentait de sourire et de les balayer en quelques phrases à peine, ce qui irritait la voleuse qui était à bout de nerfs, malgré le fait qu'elle mit toutes ses forces pour se contrôler.
Elle baissa les yeux sur sa botte, dans laquelle elle voyait timidement flamboyé le joyau rouge de la garde de son poignard, reflètant timidement la danse furieuse des flammes dans l'âtre de la cheminée. Qu'il était tentant de le saisir et de le lui balancer en plein coeur... Ou se ruer sur lui, pour lui trancher la gorge. De plus, elle était parfaitement sûr qu'ils étaient seuls dans la pièce en cet instant, car sinon Victor ne se serait certainement pas permis un pareil petit manège sur une simple et vulgaire fille du peuple comme elle, qui baignait sans nul doute pour les employés de cette maison dans des affaires douteuses. Personne n'aurait eut le temps de venir à son secours, et elle aurait eut loisir de le faire agoniser, voyant sa vie s'éteindre alors que sa liberté revenait au galop...
L'ennui, c'était qu'il était lui même armé. Sur la table d'appoint à côté de lui était posé son propre poignard et il avait montré avec quelle habilité il lui serait aisé d'en user. Au combat de front, à force contre force, elle était bien certaine de perdre. Il faudrait attendre...
Et puis, l'idée de le voir souffrir était bien plus attrayante que de simplement le supprimer. Elle aurait sans doute bien des ennuis, même si le tout était fait proprement. En homme malin qu'il était, le Comte avait sans doute déjà prévenu quelqu'un de son identité, en cas "d'accident".
Elle ne répondait rien à son discours. A quoi bon tergiverser? Elle n'avait aucune envie de passer la nuit ici et connaissant son théâtral interlocuteur, si elle répliquait, il ne tarderait pas à partir dans d'autres explications aussi stratégiques qu'énigmatiques, et ils n'en finiraient plus. Or, il lui tardait de regagner son repaire au plus vite, seul et unique endroit sur terre où elle se sentait parfaitement en sécurité.

Victor semblait satisfait des nouvelles qu'elle lui avait apporté. Elle releva la tête, lasse de ce petit jeu du paraître dans lequel se complaisait son bourreau. Ses yeux bleus étaient perçants et méprisants, mais elle les gardait bien plantés dans ceux de son hôte, tâchant de garder son sang froid et la tête froide, tâchant de retenir le peu de dignité qu'il lui laissait encore. Elle ne voulait pas détourner les yeux, parce qu'elle n'avait aucune raison de le faire. Un beau jour, ce serait lui qui se sentirait humilié, la suppliant du regard de bien vouloir mettre fin à ses tourments. Elle en était convaincue, car par le passé, elle avait déjà eu raison de son ancien et unique ravisseur...
La rousse approuva d'un petit geste de la tête, et sa voix se fit froide et sèche, comme à l'accoutumé en présence de son patron forcené.

- C'est ce que j'avais dans l'idée, en effet. Je serais aux premières loges dans les intrigues privées de la Baronne. Vous pourrez ainsi apprendre tout ce qu'il vous chantera de savoir sur votre promise, pour ainsi mieux la tenir sous votre emprise et la manipuler à votre guise...

Elle le darda d'un regard haineux et ironisa, un sourire méprisant aux lèvres.

- Quelle chanceuse, cette chère Dame de Nerra, de vous avoir pour prétendant et futur époux !

Il n'y avait pas de doute possible sur ce qu'elle pensait alors. Elle ne cherchait pas à dissimuler quoi que ce soit, de toutes manière. Elle était toujours dans l'attente de le voir contrarié, vexé peut être... Ou mieux encore : de le faire sortir de ses gonds. En bref, avoir la sensation de le tenir un petit peu, d'être capable de se défendre d'une manière ou d'une autre, de pouvoir l'atteindre ou tout du moins effleurer ses nerfs qui semblaient hélas que trop solides.
Il l'avait déjà que trop mis en garde sur le bon sens de sa femme en devenir. Elle ne répliqua pas plus, répondant par l'affirmative à ses nouveaux avertissements. Pour qui il l'a prenait au juste? Elle n'était pas une amateur. Elle revenait victorieuse des deux missions qu'il lui avait donné. Si ce n'était pas des preuves de l'étendu de ses talents, ça... Tromper une Sang-Bleue acculée à tout bout de champs, ça ne serait tout de même pas si sorcier...
Enfin... Ca c'était parce qu'elle était bien loin de se douter que la chance n'est pas toujours favorable aux même personnes... Elle l'apprendrait que trop vite...

Au plus grand déplaisir de la voleuse, Victor détourna la conversation sur son autre victime. Le coeur de Lyanna loupa un battement alors qu'il la questionnait sur les résultats de son entrevue avec le Baron de Sombreval... Autrement dit : Ulysse.
La jeune femme du crisper des dents pour ne pas faire étalage du vilain coup dans le ventre qu'elle venait de se prendre, sans qu'il n'y prenne garde. Elle avait eu des remords très vite après avoir rencontrer le noble, sur la place de la Hanse. Leur ballet effréné, en plus d'être amusant, avait été le prémisse d'une soirée des plus agréables, intenses... Surprenante. En plus d'être un homme bon et gentil, Ulysse était quelqu'un de très particulier... Doux et sensible, flatteur attentionné doublé d'un plaisantin joueur, il n'avait pas laissé insensible la demoiselle, pourtant réputée pour son coeur de pierre et ses règles des plus stricts.
Elle ne retrouva sa voix qu'au bout de quelques longues secondes, rendue muette par le flot de souvenirs confus qui la submergeaient comme un ras de marée sur le port.
Lyanna s'éclaici la voix d'un petit toussotement. Elle se détestait encore plus de lui livrer toutes ces informations, à présent. Très clairement, Ulysse ne méritait pas qu'on le donne en pâture à un monstre avide de pouvoir tel que Victor de Rougelac.
Sa voix se voulait assurée, mais elle avait une légère teinte, une nuance changeant. Elle priait pour qu'elle demeure imperceptible... Bien qu'elle savait qu'il serait loin de deviné la raison de cette mue.

- Le Baron de Sombreval a une caserne, une compagnie martiale du nom des Griffons Moqueurs, située sur le port. Ses hommes sont mi-mercenaires et mi-défenseurs de la cité et prêtent main forte à la milice. Il est toujours escorté par trois d'entre eux : Ser George, Sam et Enzo, si j'ai bonne mémoire... Ils sont plus là par mesure de prévention, et pour dissuader quiconque de s'en prendre à lui. Ulysse ne se connait pas d'ennemis réels pour l'heure.

Elle réfléchit un instant, le coeur serré, se demandant s'il fallait vraiment livrer des informations plus personnelles à son propos, et donc lui faire encore davantage de tord.

- Il est veuf et a perdu ses deux enfants dans la Fange. Il n'a plus d'autre famille et est, de ce fait, le dernier Sombreval.

Lyanna préféra s'en tenir là. Peut être ceci serait il suffisant, pour le Comte...

La voleuse n'avait évidemment de cesse de laisser s'exprimer son méprit pour ce personnage influent et calculateur qui lui faisait face, confortablement installé dans son fauteuil, une lame posée non loin de sa paume droite par sécurité. Si la verbe de la rousse n'était plus aussi acide, Lyanna n'en demeurait pas moins piquante mais à présent d'une manière bien plus subtile et fluette. Victor ne le savais que trop bien, s'il laissait la moindre moue sur cette laisse imaginaire qui maintenait Rubis sous son contrôle, il risquait de se faire mordre voir pire. Alors, la prudence était de mise. Un nouveau sourire taquin presque honoré illumina son visage alors que son agent infiltré se montrait ironique au sujet de la chance qu'avait la Baronne de Nerra d'avoir un tel promis. Force est de constater que Lyanna remplissait fort bien le contrat qui la liait avec le Comte, ainsi il pouvait se tenir au fait des agissements de sa future épouse ce qui lui permettait de garder toujours un coup d'avant tant que la supercherie n'était pas dévoilée au grand jour.

- Parfait, parfait... mon précieux Rubis.

Sans autre forme de procès, les échanges amenèrent alors le duo à évoquer la seconde affaire, celle du Baron de Sombreval. Sur ce sujet, Lyanna semblait un instant interdite. Pourquoi donc restait elle étrangement muette ? Cherchait elle simplement ses mots ou alors quelque chose troublait les pensées de la rouquine. Fronçant un sourcils, l'air suspicieux, Eougelac interrogea du regard la voleuse qui finalement reprit constance et déroula son rapport dans un timbre de voix qui lui était quelque peu changeant. Le sang bleu était donc aussi bien voir mieux entouré encore que sa propre personne, rien d'étonnant lorsqu'on savait qu'il menait une troupe de mercenaires. Chose intéressante, l'homme était veuf et avait perdu sa descendance ce qui faisait de lui un personnage au passé maudit.

Acquiescant par de multiples hochements de tête, le mondain cherchait également à lire les émotions sur le visage de la rouquine sans pour l'heure parvenir à déceler le moindre secret qu'elle pouvait cacher a son employeur. Conscient d'avoir bien assez malmené la jeune femme, il se montra alors prudent, croisant puis décroisant les jambes non sans effleurer le pommeau de sa dague d'un index pensif.

- Si je comprend bien, c'est un personnage plutôt droit qui possède de profondes blessures. Tu n'as point décelé d'addiction aux jeux, à l'alcool ou aux filles ? Si tel n'est pas le cas alors il me semble probable que je puisse faire affaire avec lui.

Satisfait, le Comte de Rougelac laissa son regard se perdre sur la silhouette de la rouquine aussi belle que dangereuse. De sa main gauche, il récupéra dans le revers de son pourpoint une bourse qu'il lança dans la direction de la voleuse. S'offrant le malin plaisir de faire choir le contenant en sonnantes et trébuchantes aux pieds de Lyanna, il la laissa s'accroupir pour mieux la scruter de bas en haut sans jamais réussir à détecter l'arme qu'elle portait, dissimulée dans une botte.

- Voila ta solde. Si le temps te le permet, tu as tout loisir de continuer ton enquête auprès du Baron, mais il ne s'agit plus là d'une priorité, même si cela gonflerait le poids de ta prochaine solde. Concentre toi déjà sur ton usurpation auprès de ma future Dame. Tu es une grande voleuse, tu saura fouiller ses affaires sans qu'elle s'en aperçoive. Nous nous reverrons d'ici à deux mois. A moins que certaines informations ne soient capitales à me livrer rapidement, bien entendu.

Il se releva, rangeant sa lame à sa ceinture, hors de portée de Lyanna Desroses et vint se poster devant elle, bien moins fourbe et arrogant qu'il l'avait été depuis le début.

- Tu as fait du très bon travail. Continu ton œuvre en ce sens. Et si ta participation se révèle plus bénéfique encore, je te fais la promesse de te libérer de mon joug. Mais il va falloir mériter cela et être patient.

Toujours finir sur une note d'espoir, donner le sentiment à la proie qu'elle possède un échappatoire, cela la rendrait plus vive et déterminée.

Lyanna crispait les dents, tâchant de retenir chaque petites parcelles susceptibles de trahir ces émotions et sentiments confus à l'égard du Baron de Sombreval. Elle n'avait dit que l'essentiel, dans le simple but de donner satisfaction à son employeur forcé, sans pour autant mettre Ulysse dans une fâcheuse position si les deux hommes venaient à se rencontrer. Or, Lyanna se doutait que le Comte ne s'en contenterait pas. Ce qu'il voulait, c'était avoir une emprise sur son futur partenaire d'affaire, pas simplement connaitre l'étendu de son nouveau joujou.
Il se permettait à présent de la tutoyer. Cela l'irrita encore un peu plus. Elle préférait toujours prendre la distance avec les autres, et plus particulièrement avec Victor. Cette familiarité ne lui annonçait rien de bon, et elle le toisa d'un regard méprisant lorsqu'il commença.
Eh, ils n'avaient pas élevé les cochons ensembles ! Eh ils n'étaient pas potes, loin de là...
Pourtant elle demeurait silencieuse, sans protestation. A quoi bon? A part lui tendre la perche pour qu'il recommence à asseoir sa domination masculine... Elle grinçait des dents, tant ce comportement la mettait en rogne, et tant elle se sentait frustrée de devoir avouer quelques informations de plus sur le bon et gentil Ulysse à ce sauvage de Comte de Rougelac.

- Méfiez vous, sa défunte femme est un sujet sensible... Il se ferme complètement dès qu'on y fait allusion. Quand aux addictions... Je crois que ce cher Baron cumule. Il aime autant la boisson que les femmes...

Son coeur se serra à ce dernier mot. Oh, elle n'était pas stupide... Leur petit jeu n'avait sans aucun doute été qu'une brève parenthèse aussi amusante que divertissante pour le charmant jeune homme. Il ne faisait nul doute qu'il ne s'en souviendrait plus d'ici peu. Elle n'était pas la première et ne serait pas la dernière à avoir tâter de son charme et de ses compliments ravageurs. Au moins se consolait elle en se disant qu'elle n'avait pas été suffisamment stupide - ou saoul - pour se laisser entraîner plus loin dans leur ensorcelant échange. Malgré cela, il semblait bien qu'elle avait surestimée ses capacités à résister à son charme... Et sous-estimée la puissance de l'intérêt qu'elle lui porterait après.
Elle chassa d'un battement de cil la pensée d'Ulysse. Ce n'était ni l'endroit ni le moment. Toute son attention se reporta sur le Comte qui lui souriait, satisfait des nouvelles qu'elle avait eu à lui porter. Il sortit une bourse qu'il lui lança. Pourtant réactive d'ordinaire, elle tendit la main dans l'intention de la rattraper au vol. Mais Victor avait bien calculé son lancé, et le petit sachet s'écrasa par terre, à ses pieds, répandant son contenant un peu partout autour d'elle. Elle lui lança un regard furieux et hésita même à se lever.
Mais finalement - et ce ne sera une surprise pour personne -, elle se baissa pour ramasser une à une chacune des piécettes éparpillées sur le sol. Vénale, direz vous? Non, maligne. La demoiselle, bien que ne disant jamais non à l'opportunité d'accroître sa petite fortune, avait un tout autre dessein à se retrouver ainsi, presque à quatre pattes, à farfouiller le plancher. Furtivement et avec l'habilité qui faisait sa renommée, elle retira le poignard soigneusement dissimulé dans sa botte et le glissa à l'intérieur de sa manche droite. Au cas où, sait on jamais, les mains du Comte redeviennent baladeuses... Elle aurait ainsi tout loisir de se défendre... Aux risques et périls de son bourreau.
La rousse se releva finalement, comprenant dans les mots de Rougelac qu'elle pourrait très vite disposer. Ca, c'était un véritable soulagement... Sa proximité, en revanche, l'était bien moins. Elle continuait de le fusiller du regard, la haine ancrée sur son visage. Oserait il seulement avancé sa main?
Et voilà qu'il lui faisait des promesses de liberté future, à présent ! La prenait il pour une idiote? Un être aussi assoiffé de pouvoir ne serait pas prêt de se défaire d'un pion, surtout pas un aussi talentueux qu'elle ne l'était dans son domaine. Si cédé à l'espoir était tentant, Lyanna n'était pas du genre à croire aux jolis contes de fée. Elle siffla entre ses dents.

- Encore faudrait il que votre parole est une valeur ! Je ne suis pas sotte, vous savez. Ne me faites pas de promesses que vous n'avez pas l'intention de tenir. Je préfère encore que nous jouions cartes sur table et que vous montriez honnête. D'ailleurs... A quoi bon me mentir, Victor, si vous êtes si sûr de m'avoir sous votre contrôle?

Même s'il était plus grand elle, elle le regardait littéralement de haut. Comme s'il était un minable, un menteur et un tricheur. Comme s'il n'était rien, ou qu'il ne le serait bientôt plus. Sa voix, cassante et sèche, n'avait plus ce timbre enjôleur qu'elle gardait à l'ordinaire. Elle était venimeuse, comme un bruit avertissant l'animal de ne pas s'approcher.
Sa dague était prête, en cas de mauvaise surprise...

- A moins que vous ne me fassiez demander, je ne reviendrais pas avant ces deux mois écoulés. Moins je vous vois, mieux je me porte.

Elle ne bougeait pourtant pas. Sa cape se trouvait sur le canapé, et il lui aurait fallut passé devant le Comte en lui tournant le dos pour la récupérer...
Et son sang bouillonnant lui criait de lui trancher la gorge en l'instant...

La voleuse dénotait d'une certaine crispation face au comportement de son hôte. Pourtant s'armant de sang-froid, la rouquine ne semblait désireuse d'exprimer toute forme de réaction belliqueuse et ce malgré le tutoiement que semblait instaurer le Comte de Rougelac à son endroit. Malgré tâche ingrate qui lui incombait, Lyanna lâcha un dernier détail non sans importance au sujet d'Ulysse de Sombreval, gage que malgré la relation hostile qu'elle entretenait avec le mondain, l'intérêt primait sur ses sentiments. Apres quoi Victor, bien malin, taquin et calculateur qu'il était, laissa choir la bourse au pied de la jeune femme alors qu'elle avait présenté ses mains pour la recevoir.

L'insolence caractérisée du Comte avait donc fait se rabaisser la voleuse, réduite à ramasser les pièces de monnaies à meme le sol. Une sorte d'humiliation toute subtile soit elle qui venait bel et bien confirmer que la jeune femme était des plus vénale, provoquant un sourire amusé chez le sang-bleu pas peu fier de sa manigance. Ce à quoi répondit naturellement la rouquine par l'adresse d'un regard furieux. Le geste de Victor etair bien loin d'être anodin, asseyant ainsi sa domination sur cette alliée de circonstance qui lui vouait une haine indescriptible.

Ce petit jeu semblait de plus en plus agacer Lyanna qui ne croyait pas un traître mot des promesses de son employeur de la liberer un jour de ses services. Ce qu'elle pensait de lui, il n'en avait cure mais il fallait bien admettre qu'elle possédait un certain cachet et la perspectives de succulentes saveurs aussi douces que pimentées. La lorgnant, il la laissa cracher son venin, trouvant la scène aussi excitante que dangereuse, à n'en point douter, il jouait avec le feu.

- Vous êtes un spécimen bien féroce. J'aime cela, assurément. Mais prenez garde, je vous ai effectivement sous mon contrôle, seulement si vous montrez trop vos crocs, serais-je peut-être amener à vous dresser. Une laisse vous irez à ravir et quelques séances d'obéissance feront le reste.

Avisant la cape qui se trouvait derrière lui sur le canapé, Rougelac recula de quelques pas pour laisser la voleuse avoir la possibilité de récupérer son effet sans que le Comte ne fasse obstacle non sans toutefois qu'elle se mette à nouveau à découvert.

- Et bien qu'attendez-vous ? Prenez la. Pensez vous que je vais vous mordre ? Pas ce soir. Et cela dépendra de votre comportement ainsi que de vos talents à entretenir l'usurpation auprès de vos proie.

Il la darda d'un regard carnacier et taquin avant de conclure.

- Je n'ai point bâti ma fortune, mon influence et ma réputation uniquement sur le mensonge. Croyez ce que bon vous semble. Lorsque l'épaisse brume de haine et de colère se dissipera, vous constaterez qu'un horizon profitable et confortable vous tend les bras mon précieux Rubis et ce jour, vous comprendrez alors que ma promesse de liberté prendra tout son sens. Et de fait vous verrez, vous réclamerez à me voir plus souvent car vous en aurez le besoin.

Teinté de vérité et d'ironie, nul doute que la voleuse ne comprendrez pas sa tirade car ils entretenaient une relation des plus malsaine. Le temps allaient sans doute creuser ce faussé et pourtant telle une sphère, tout était toujours amené à se rejoindre.

- Vous pouvez disposer. Ne relâchez pas vos efforts ou bien... vous savez ce qui vous attendra.

Lyanna dardait d'un regard profondément noir le Comte qui semblait s'amuser de plus en plus de l'animosité qu'elle lui vouait. Ses doigts étaient crispés sur la garde du poignard qu'elle avait savament dissimulée dans sa manche lorsqu'il l'avait contrait à se baisser pour récupérer sa rançon. S'il se croyait plus mâlin que tout le monde – ou au moins d'elle -, il semblait que la furtivité et l'habilité de la jeune femme était bien loin d'être de sa portée. Son excès de confiance était sans nul doute sa faiblesse, et la rousse à cet instant réprimait un sourire victorieux, car en son fort, elle savait aussi que ce serait ce qui causerait la perte du noble, et bien plus vite qu'il ne le pensait.
Mais pas ce soir, sauf s'il se montrait hostile. Allez savoir si quelqu'un n'était pas au courant de sa venu ici en cette soirée... S'il fallait se débarasser d'un problème – et quel problème ! - pour se retrouver milice aux trousses, elle ne serait pas plus avancé. Rubis était déjà activement recherchée... Mieux valait pour elle que Lyanna reste une fille parfaitement anonyme. Sans quoi, elle n'aurait plus qu'à se sauver le plus vite possible hors des murs de la cité. Et ce qu'il l'attendrait là-bas, aucune duperie ne serait capable d'en venir à bout...
Une petite menace en passant, devenue coutume entre eux deux, arracha une nouvelle expression de mépris de la part de la jeune femme à l'égard de son bourreau. Il était si tentant de faire deux pas en avant et de lui planter le poignard dans le coeur, ou à travers la gorge... Mais il ne fallait pas réagir de façon impulsive : il ne fallait pas oublié que Victor était lui aussi armé, et qu'il devait avoir reçu une bien meilleure formation au maniement aux armes qu'elle. Et puis... Il se serait immédiatement douté... Il aurait vu clair en son jeu à peine aurait elle fait un pas...
La prochaine fois serait la bonne.

- Je préférerai encore mourir que vous appartenir, Victor ! Ce n'est que partie remise : un beau jour vous vous mordrez les doigts d'avoir cru pouvoir me mettre en cage !

Le Comte se décala, lui laissant le champ libre pour récupérer ses affaires laissés sur le canapé derrière lui. Sans le quitter un instant du regard, elle lui passa devant, le frôlant au passage avec un soupçon d'impertinance effrontée, désireuse de repartir un peu moins honteuse et soumise qu'il ne l'avait contraint à l'être. Elle se montrait méfiante, se voulait volontairement sauvage.
A tâton, elle récupéra sa cape, sans avoir défixé un instant Rougelac, et les doigts toujours en alerte, renfermés sur sa dague toujours dissimulé dans sa manche. Elle prit son vêtement au bras, incapable de l'attacher sur elle sans lâcher son arme.
Le son de sa voix avait le timbre sifflant d'un serpent qui avertit son adversaire d'une potentielle future attaque.

- Permettez moi de douter que je vous apprécierai un jour. Je ne suis pas là de mon plein gré. Vous m'avez piégé. Et si je semble vous obéir, ne doutez pas que je ne rêve que de me défaire de vous et de vos chaînes. Ca viendra un jour... Et vous regretterez sans doute de m'avoir traité de la sorte. Nous aurions pu travailler ensemble en d'autres circonstances, mais vous avez voulu vous approprier Rubis. Il en coûte cher à tout ceux pensant pouvoir en obtenir l'exclusivité, et soyez sur que vous ne ferez pas exception.

La jeune femme appuya sa propre menace par un nouveau regard furieux, puis, à pas lents, sans le lâcher des yeux, le courtourna à nouveau pour prendre la direction de la porte donnant sur le jardin. Une fois sa main posée sur la poignée, Lyanna se tourna une dernière fois vers le Comte.

- Il est temps pour moi de prendre congé. Ce fut encore une fois un réel plaisir de converser avec vous, Monsieur de Rougelac ! Il me tarde d'être à notre prochaine rencontre !

Il n'y avait aucun doute possible sur l'ironie cassante de ses mots. Une fois de plus, elle souhaitait irriter l'homme avant de s'en aller. Sans prendre la peine de le saluer davantage, elle tourna la poignée et s'enfila dehors, sans prendre la peine de la refermée derrière elle. Un vent froid ballayait le jardin. Elle fit quelques pas dans l'allée, désireuse de mettre de la distance entre elle et son bourreau. Arrivée sous un arbre, pourtant, elle s'arrêta. Retirant le poignard de sa manche, elle posa son arme sur un petit banc qui se trouvait en dessous. Elle passa alors sa cape autour de ses épaules, s'emmitoufflant dedans pour ne pas souffrir davantage du froid et de l'humidité environnante. Elle releva la capuche sur sa tête de sorte à dissimuler son visage.
Inutile de provoquer de nouvelles mauvaises rencontres pour ce soir, elle en avait eu son compte avec Victor. Elle serait ainsi plus au sec et à l'aise pour rentrer jusqu'au port...

HRP: