Nom : Clairval

Prénom : Enide

Age : 26 années.

Sexe : Féminin.

Situation : Célibataire.

Rang : Milice extérieure (soldat)

Lieu de vie : Caserne.

Carrière envisagée & tableau de départ avec les 4 PCs :
Carrière du Milicien |+1 HAB, +1ATT, +1 PAR, +1TIR

Compétences et objets choisis :

SANG FROID | ADRESSE AU TIR | ANTICIPATION | DISCERNEMENT

Arc | Dague | Gants de Cuir | Veste de cuir | Jambière de cuir |

Son corps tombe lourdement sur le sol, alors que son pantalon trop grand baigne désormais dans une flaque d'eau crasseuse. Le milicien l'observe avec un dégoût à peine dissimulée, elle, petite fille encrôtée. Petite fille qui cherchait à réparer les erreurs qui continuerait encore aujourd'hui de la tourmenter, qui cherchait une aide qu'elle ne trouverait finalement jamais. Lorsque les nouvelles se portent jusqu'à ses oreilles, elle comprend que Vérité devra se terrer. Des pillards auraient massacrés un village sans rien laisser, hormis des cendres et des cadavres calcinés...Mais elle, elle l'avait vu, elle en était certaine, cette forme monstrueuse qui avait tentée de la dévorer...

Un jour, elle serait capable de le prouver, qu'elle n'avait pas rêvé. Qu'il ne s'agissait pas seulement de l'imagination d'une enfant effrayée mais bien de ce qui s'était réellement passé. Parce qu'à chaque fois qu'elle finissait par évoquer cette monstruosité qu'elle avait observé, qu'elle avait laissé s'approcher jusqu'à ce qu'il soit trop tard pour se sauver, personne ne la croyait. On la pensait folle à lier, alors elle avait arrêtée d'en parler, elle avait sali la mémoire de sa famille et de ses amis en préférant croire à un mensonge. Bientôt, elle oublia jusqu'à son emplacement, alors que le visage de ses parents et de sa grande sœur s'érodaient par l'effet du temps. L'adulte qu'elle était devenue avait finalement oubliée jusqu'à leur existence, leurs voix. Même son prénom, elle avait choisi de s'en détacher. Elle s'était détournée du passé, sans pour autant être capable d'avancer. Aujourd'hui, ces cauchemars menaçaient de la submerger.

L'enfant innocente et cherchant de l'aide inespérée s'était renfermée, elle ne pourrait plus désormais que se méfier. Sous les traits d'un petit garçon, elle avait travaillé pour quelques pièces et de quoi pouvoir s'alimenter. Elle avait choisi de s'isoler pour ne pas blesser ou être blessé. Pendant des années, elle avait continué de travailler pour des hommes qui jamais ne l'avait remarqué. Si elle en était venu à disparaître, personne n'en aurait été inquiété. Finalement, elle avait continué de grandir dans la société, affamée et émaciée. C'est finalement un vieux milicien à la retraite qui lui avait donnée l'envie d'avancer. Il avait été le seul à parler. Lui non plus, elle ne connaîtrait jamais son identité. Elle avait subitement rebroussée chemin et postulée pour rejoindre la Milice, alors que les femmes étaient finalement autorisée à guerroyer.



Le plat de sa main vibrait d'une vive douleur, alors que ses yeux fiévreux se redressaient pour fixer l'adversaire qui lui faisait face. Il était agacé, et n'avait jamais cessé de la mépriser depuis qu'elle était arrivée. C'était lui, qui avait fait en sorte de la confronter, pour être le premier à la voir ployer.
Dos ployée, elle fixa le sol, ses yeux humides ne cessant de vriller, alors que la colère aurait voulu parler. Mais finalement, elle était seulement effrayée. Epuisée, à force d'être malmenée. Depuis qu'elle était arrivée, on lui avait fait comprendre qu'elle ne serait jamais un de ces grands guerriers, qu'elle devait seulement se faire engrossée comme la salope qu'elle était.

Après avoir erré sans volonté pendant des années, le souvenir de son foyer calciné revenait la hanter. Elle n'avait nul part où aller, et elle ne pouvait plus se permettre de reculer. Le menace des Fangeux avait fait s'éveiller dans son esprit étriqué des souvenirs qu'elle avait toujours voulu oublier. Aujourd'hui, il menaçait de la consumer. Elle ne pouvait plus se cacher, elle ne pouvait plus choisir d'oublier. Elle devait explorer, retrouver cet endroit qu'elle avait déserté, retrouver celle qu'elle avait été.

C'est la rage, qui la fait vibrer, rage sourde alors même que son visage détaché ne laisse aucun sentiment extérioriser, alors qu'elle tente de reprendre le pommeau de son épée sans attendre qu'il soit préparé. Mais c'est finalement elle qui finit sur le sol, écrasée, après un simple coups de pied. Effrayée, elle avait implorée pitié, avant que l'Instructeur ne vienne la délivrer, pour lui ordonner de se remettre sur pied et continuer. Le soir même, elle n'avait pas réussi à s'alimenter, parce qu'on l'avait frappé et enfermé dans une des nombreuses salles de la caserne. Le message était passé, elle était indésirée.

Et chaque jour, sans discontinuer, ils avaient continué de la malmener, l'observer comme si elle était quelque chose qu'il fallait voir ployer. Une femme, qui refusait de s'agenouiller, mais qui portait pourtant les marques d'un dos ployé. Elle était effrayée, mais refusait de le montrer. Pourtant, c'est ce même air détaché qui participait à ce qu'ils continuent de l'humilier. Ce qu'ils voulaient, c'étaient la voir pleurer, la voir supplier et implorer. Parfois, oui, elle s'autorisait à se laisser aller. Le masque fissuré se mettait parfois à tomber, mais elle était seule avec personne avec qui partager cette douleur qui continuait de la tirailler. Chaque coups qu'elle recevait, chaque coups qu'elle rendait, c'était en voyant la forme d'une de ces monstruosités. Humanité déformée. Était-elle ici pour protéger, ou uniquement pour tuer ? Enide cherchait seulement son identité.

Peut être, oui, finalement, n'était-elle présente que pour connaître la Vérité, celle dont elle avait toujours été intiment persuadée mais qu'on lui avait ordonnée de laisser cacher. Elle avait la marque pour le prouver, mais encore aujourd'hui elle ne désirait pas la montrer. Mais alors que l'humanité faisait face à ces prédateurs nés, une part d'Enide, qu'elle ne saurait montrée, était satisfaite de ce qui était arrivée : Elle ne s'était pas trompée. La forme du passé, qu'elle avait choisi de garder sceller, était en tout point semblable à celles qui menaçaient aujourd'hui le monde entier...



C'est la voix d'un enfant en colère qui vient fendre l'air, alors qu'un gros caillou s'abat à ses pieds. Revêche, le petit tente de s'approcher, avant qu'une forme ne vienne s'interposer, et que son corps ne s'écrase sur le sol puis s'agiter tandis qu'il se met à pleurer. Elle observe le soldat qui s'était interposé avant de baisser ses yeux vers ses pieds, dos ployé. Enide avait continué d'avancer, elle ne voulait pas le provoquer et finir elle aussi sur le sol glacé... Son village devait certainement ressembler en tout point à ce petit hameau pratiquement abandonné...Mais elle ne parvenait toujours pas à s'en rappeler...

Une chèvre continua de bêler alors que son regard s'égarait sur l'horizon voilé. Parviendrait-elle à le retrouver, ce village oublié, ou le temps avait-il tout érodé ? Peut être qu'un nouveau Hameau avait été reconstruit sur le corps de sa famille ? Son supérieur leur intima qu'ils devaient continuer d'avancer, avant que la nuit ne viennent les surprendre et ne les mettent en danger. Une dernière fois, elle posa ses yeux sur l'enfant qui continuait de la défier, alors que de grosses larmes s'étaient mises à perler.

Sillonnant un chemin tout tracé, elle tente parfois de se rappeler, de dessiner un passé qu'elle avait choisi jusqu'alors d'effacer. Non. Elle n'avait pas rêvé, c'était bien une de ces monstruosités qu'elle avait croisé, dans le passé. C'était celle là même qui avait réduit son village à feu et à sang, jusqu'à ne plus rien laissée hormis une enfant esseulée, qui resterait à jamais marquée. Parfois, la marque irradiait jusqu'à la faire flancher, dernier vestige d'un passé dépassé.

Un soldat lui propose de continuer d'avancer, alors que son corps s'était arrêté. Sa main contre son dos s'était refermée. Sans prendre la peine de le regarder, ses pas s'étaient de nouveaux dirigés vers le soleil, qui continuait de baisser. Conservant toutefois une certaine proximité, elle restait pourtant incapable de lui témoigner la même amabilité qu'il avait su lui montrer. Elle avait vu, ses yeux briller. Ce qu'il attendait d'elle, ce n'était pas qu'une simple amitié, tout ce qu'il voulait s'était la posséder. Elle les entendait murmurer, à qui serait le premier à la défourrer. Elle était une femme, fragile et "mal baisée" comme ils aimaient à le rappeler. Alors, constamment, elle devait veillée à sa sécurité.

Cernée entre une monstrueuse humanité et une des monstres aux relents d'humanité. Pour ne plus être blessée, pour ne plus avoir à porter le poids d'être aimé puis abandonné, elle avait choisi de ne jamais s'attacher. Sans lien ni repère, hormis cet arc de guerre dont le bois lisse s'ancrait dans son dos. Elle ne pourrait jamais se pardonner, mais elle se devait d'avancer, même si elle était fatalement effrayée.

C'est à renfort de fourches, qu'ils l'ont chassé, alors de nouveau, elle avait continué d'avancer. Elle était effrayée et épuisée, son corps entier ne cessait de trembler. Personne ne pourrait donc l'aider ? Cela faisait plusieurs jours, qu'elle avait continué d'avancer. Personne ne la croyait, personne ne voulait entendre ce qu'elle affirmait. Une bête, monstrueuse et hideuse, dans son village...Elle devait les aider...

Épuisée, son corps maigrelet se met à trembler, alors qu'elle sort de sa poche un morceau de pain qu'elle avait volé. Ses doigts sont encrassés, nettoyée seulement par toutes les larmes qu'elle a versé. La douleur, lentement, se met de nouveau à la cisailler, alors que ses yeux révulsés remontent jusqu'à la plaie. Épaule ensanglantée, dont le tissu coagulé ne peut plus rien protégé. C'est dans un petit cours d'eau qu'elle va se nettoyer, empêchant la plaie de s'infecter et suppurer. Sa maman lui avait montré, à chaque fois qu'elle y pensait elle ne pouvait pas s'empêcher de pleurer.

Trois autres villages furent traversés, encore une fois, personne ne voulait l'écouter. On lui affirmait qu'elle allait être châtiée si elle continuait de parler. Les villageois avaient peur, ils étaient terrifiés à l'idée que de nouvelles monstruosités puissent venir les terrorisés une fois la nuit tombée.
Alors, ils préféraient garder les yeux fermés, chasser cette petite endiablée, qui clamait qu'un grand malheur allait arrivé. Personne n'aurait voulu l'aider ni même la garder pour la soigner. Tout ce qu'ils pouvaient faire, c'était la chasser pour pouvoir garder le village sécurisé. D'enfant, elle était devenue indésirée. Et plus les jours passaient, plus elle perdait son identité.

Lorsqu'elle arriva dans la Cité, elle n'avait plus la force de crier, ni même celle de murmurer, mais elle avait continué d'avancer. Elle devait les aider. Elle les avait...abandonné. Encore aujourd'hui, elle refusait de se le pardonner. C'était elle qui avait la monstruosité. C'était elle, qui avait fait s'écrouler la torche sur le côté, et créer un brasier. Elle, qui n'avait pas crié, pas même lorsque la bête l'avait mordu sur sa petite épaule dénudée. C'était sa grande soeur, qui l'avait sauvé, même pas encore assez âgée pour enfantée, elle l'avait poussé sur le côté, avant de brandir une fourche trop grande pour elle, et d'hurler.


Et c'est ce qu'elle avait fait. Elle ne s'était pas retournée, même en l'entendant se faire dévorer. Et le silence avait de nouveau régné, alors que le feu continuait de crépiter et que la créature s'en venait chasser. Elle n'avait pas crié, elle s'était seulement sauvé. C'est par sa faute, s'ils avaient tous été oublié. Tous ces visages, qu'elle avait choisi d'effacer...Qui aujourd'hui revenait la tourmenter...

" Aidez moi, une bête a... "
" Dégage de là "

C'est sur le sol, qu'elle s'était une nouvelle fois écroulée. Elle ne comptait plus le nombre de fois où on l'y avait poussé. Affamée, les cheveux enchevêtrés, elle ressemblait à un monstre des marais. Le sang séché sur sa robe déchirée ne faisait que contraster avec le visage de l'enfant qu'elle était.
C'est la vieille souillon, qui s'était approchée. Elle non plus, plus personne ne voulait la regarder. On disait qu'elle était folle à lier, qu'elle avait tué tous ses bébés parce qu'une forme éthérée lui avait "demandé". Mais elle n'en avait jamais parlé. La vieille souillon l'avait soignée, dans le petit clapier dans lequel elle s'était réfugiée. Elle lui avait appris à se cacher, à oublier qui elle était pour mieux se protéger. Ses cheveux coupés, sa maigre poitrine bandée, sa jupe remplacée par un pantalon deux fois trop grand. C'est son esprit qui avait cédé le dernier, alors que les mots de la vieille souillon venait s'ancrer.



Alors Enide avait oublié son vrai prénom, elle s'était entêtée à penser qu'elle était un garçon, influencée par la voix de la Vieille Souillon. La morsure pansée avait bien cicatrisé, mais pour toujours elle resterait marquée. Là encore, elle lui avait ordonné de la cacher, sous peine d'être aux yeux de tous une de ces monstruosités qu'il fallait éviscérer. Et la vérité, celle qu'elle avait si longtemps clamée ? Elle devait la garder secret. Ne plus jamais en parler, sous peine d'être comme la Vieille Souillon une pestiférée. Parfois, il valait mieux se cacher plutôt que scander une Réalité que personne ne voulait voir dévoiler.

Enide avait continué de grandir à ses côtés. Le jour, elle s'était mise à travailler, parfois seulement pour porter les affaires d'une noble pressée, parfois pour porter des outils avec les ouvriers. Elle était un petit garçon plein de ténacité, dont la douleur était toujours dissimulée. Tout ce qu'il fallait, c'était avoir une pièce pour manger, voilà tout ce qu'il y avait à désirer. Même alors que sa poitrine s'était mise à gonfler, elle avait continuer de la cacher, la bander. Ses cheveux, toujours coupé, sa voix éraillée faisant preuve de masculinité. Le travail était devenu plus compliqué, elle était éreintée, mais son corps s'était musclée et son esprit était focalisé. Il fallait manger. Parfois... Elle voyait tous ces hommes défiler, dans leurs armures argentées. Elle voulait leur ressembler, mais elle finissait toujours par se rappeler, qu'elle ne pourrait jamais. Elle n'avait plus aucune identité, petit pantin désarticulé.

Le soir, lorsqu'elle rentrait, la Vieille Souillon et elle pouvaient festoyer. Pas grand chose mais c'était assez. Parfois, le pain était tellement dur à mastiquer qu'elle devait le faire tremper pour que la Vieille Souillon puisse s'alimenter. La vieillesse continuait de la dévorer, bientôt, elle ne pouvait même plus se lever. Elles étaient les seules à pouvoir se compléter, cette vieille femme, elle jurait l'avoir aimer.
Et comme tous les soirs, elles s'étaient endormis dans leur petite paillasse, son visage d'adolescente ne cessant de contempler cette lune qui l'avait guidé. Aujourd'hui, cette vie, elle semblait capable de pouvoir s'en contenter. Au moins, ici, elle était en sécurité...

C'est un contact glacée qui l'avait réveillée, alors que son corps se tournait sur le côté, pour rencontrer les yeux vitreux de la vieille femme qui l'avait élevée. Enide n'avait pas pu s'empêcher de hurler, alors que la vision de son corps décharné resterait à jamais gravé. Elle était décédée. Ses doigts sinueux était resté accroché à son bras, tellement fort qu'elle avait du tirer pour se libérer. Sa peau semblait émaciée, ses lèvres s'étaient compressées et ses dents étaient apparentes. Chicots noircis par la misère et le temps. Ses cheveux filandreux semblaient s'écrasaient sur le sol poussiéreux. Pendant quelques secondes, la vision de la créature qui avait tenté de la dévorer s'était écrasée dans ses pensées érodées. La marque brûla tellement fort qu'elle s'écroula sur le sol, vomissant son maigre repas avant de se relever, désemparée. Une nouvelle fois, elle avait abandonné la seule famille qui ne l'avait jamais aimé.
Elle avait couru sans se retourner, en proie à une malédiction qui ne pourrait jamais la quitter. Cette créature, qu'elle avait tant voulu chasser, revenait désormais dans toutes ses pensées. Lorsqu'elle était revenue chercher le corps de celle qu'elle avait aimé, le croquemort était déjà passé. Enide savait ce qui allait arriver, la vieille souillon n'aurait jamais le droit d'être enterrée... Elle serait brûlée ou jeter dans une fosse, où elle serait finalement oubliée. Encore une fois, elle avait abandonné. Elle avait fui sans se retourner et sans crier. Encore une fois, elle n'avait plus aucune identité.

Les années ont continué d'avancer, cette fois, elle était seule et sans aucune volonté. Pour survivre, elle avait continué de se cacher, mais le corps de l'enfant puis de l'adolescent avait laissé place à celui d'une jeune femme... Ses cheveux, elle les avait finalement laissé pousser, pour pouvoir les couper et obtenir quelques pièces pour s'alimenter...Elle avait dû faire des sacrifices pour pouvoir se nourrir et se loger...Des choses qu'encore aujourd'hui elle se refusait à énoncer ou même penser. Toutes ces choses... Elles appartenaient au passé...Et les dieux savent combien elle aurait voulu pouvoir les oublier.

C'est sa rencontre avec un vieux milicien à la retraite qui avait tout changé, alors la menace des Fangeux était désormais assurée. C'était à ce moment, que les cauchemars avaient commencé à la maintenir éveillées. Elle devait savoir, si tout ce qu'elle avait choisi d'effacer sans pourtant y arriver était la Vérité. Si c'était bien une de ces bêtes, qu'elle avait croisé. Elle ne voulait plus se permettre de se cacher, elle voulait pouvoir les chasser, pour tout ce qu'ils lui avaient fait, pour tout ce qu'ils lui avaient retiré. Elle voulait pouvoir retrouver les vestiges de son passé, retrouver son identité, qu'elle avait trop longtemps enterré. Faire que les cauchemars puissent enfin cesser !



Peut être qu'elle avait seulement rêvé, peut être que ce vieil homme n'avait jamais parlé, ou peut être même n'avait-il jamais existé. Peut être avait-elle seulement fait un cauchemar éveilé, mais c'était assez. Elle avait couru sans se retourner, pas pour abandonner mais au contraire pour pouvoir avancer. Il était trop tard pour les sauver, mais elle voulait pouvoir se rappeler, se rappeler son passé pour ne plus avoir à les oublier, tous ces visages qu'elle avait abandonné. Alors, elle s'était engagée, dans la Milice extérieure, section exploration. Elle voulait pouvoir fouler de nouveaux de ses pieds, ce village qu'elle avait autrefois délaissé.



Cette fois, alors que l'homme se met à la pousser, elle n'est plus cette enfant qui se serait écroulée. Elle était restée ancrée sur ses pieds, avant de le balayer d'un coup de pied et le voir tomber, le souffle coupé. C'était sa fierté blessée qui avait parlée, alors qu'elle avait refusé des avances qui, selon lui, aurait dû la combler. Femme entêtée, il avait pensé que lui serait capable de s'approcher, de la toucher et l'explorer, pour ensuite l'abandonner comme une vulgaire poupée. Bien sur, elle savait qu'elle allait le payer, par ce que sitôt qu'il allait se relever il ne se contenterait pas de la gifler.


Mais personne ne pourrait l'arrêter, pas maintenant qu'elle était si près de retrouver la Vérité. Elle ne pouvait pas laisser sa peur la dominer, même alors qu'elle sentait tous ses membres trembler. Elle avait besoin de retrouver son identité, besoin de ne plus se sentir comme une de ces monstruosités. Enide aussi, voulait rire et pleurer. Trop longtemps cachée, maintenant, elle était apeurée par son propre reflet. Enide, qui était-elle, l'enfant effrayée et ensanglantée, petit larbin voleur de pains, jeune femme prête à tout sacrifier pour pouvoir se sentir en sécurité, ou guerrière au regard glacée ? Pantin désarticulé, sans aucune volonté. Elle n'était pas là pour tous les sauver, elle était trop égoïste pour s'en préoccuper, trop détruite, pour ne serait-ce que se lier une nouvelle fois à un être aimé. C'est dans la solitude qu'elle s'était réfugiée...


C'est un soldat apeuré, qui se met subitement à hurler, alors que la forme continue d'avancer. Ses dents semblent tranchantes et acérées comme l'acier. De loin, elle était certaine qu'il s'agissait de la Vieille Souillon, qu'elle avait choisi de ne jamais oubliée. Forme humanoïde, au regard argenté. Pourtant, elle ne fait en rien parti de l'humanité, qu'elle s'entête à chasser pour tous les dévorer. Enide sent ses muscles se contracter, à l'idée de revoir une de ces monstruosités. Tout son corps ne cesse de trembler, alors qu'elle l'observer, effrayée. Seront-ils capables de la terrasser ? Ses camarades brandissent leurs arcs et leurs épées. Bras bandés, elle s'apprête à tirer. Ce n'est que lorsque l'ordre est donné qu'elle sent tout son poids se relâcher, alors que la flèche vient se ficher dans le corps de la monstruosité. Un cri déchiré, avant qu'elle ne se jette sur eux et ne menace de tous les cisailler. Les guerriers armés de leurs épées sont les premiers à la taillader, alors que l'un d'eux tombe, la nuque dévorée. Lorsqu'elle s'est trop approchée, l'arc finit par tomber, remplacée par une dague aux reflets argentés. Ses doigts serrés ne cessent de s'agiter, elle n'arrive plus à bouger et pense qu'elle va elle aussi être condamnée.

Ils sont trois à la planter, sa propre dague venant se ficher dans la nuque de la pestiférée, le relent de marée leur donnant tous la nausée. C'est la première qu'elle a tué. Le premier Fangeux, souvenir de son passé. Maintenant, elle était capable de s'en rappeler. Cette forme qu'elle avait vu s'approcher... A ce moment, l'enfant qu'elle était avait été assurée qu'il ne s'agissait que d'une villageoise qui venait leur demander d'aller se coucher, plutôt que continuer de jouer alors que la lune s'était levée. Ce n'était que lorsque ses crocs s'étaient plantés, que sa grande soeur lui avait dit de courir sans se retourner, qu'elle avait su que cette créature était là pour tous les condamner.

Aujourd'hui, elle voyait le corps mou et vaseux de la monstruosité s'écraser sur le sol boueux, la marque sur son épaule ne cessant de la tirailler. Sa lame était restée fichée, mais elle avait bien trop peur pour a retirer. Finalement, on l'avait poussé pour mieux se féliciter. Les guerriers étaient parvenus à sauver l'humanité. Elle, elle n'était qu'une indésirée, à peine digne de s'occuper des blessés. Lorsqu'elle s'était approché d'un corps encore agité, elle avait également vu le premier soldat mourir à ses pieds, la gorge tranchée. Ses yeux n'avaient cessé de la fixer, même alors qu'elle s'en était allée.

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Vos premières impressions ? L'univers apocalyptique et médiéval m'intéresse particulièrement, à première vue le Forum a tout pour me combler.

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