Marbrume



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 Qui part à la chasse... [Terminé]

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MessageSujet: Qui part à la chasse... [Terminé]   Qui part à la chasse... [Terminé] EmptyDim 11 Aoû 2019 - 21:26
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Le Goulot - Premiers jours de juin 1166

Il y avait foule ce matin là, une fois n’est pas coutume, quelques arrivages étaient rentrés dans la ville et avaient miraculeusement réussi à atteindre les Bas Quartiers. Depuis que le Labret avait été repris, que les paysans étaient repartis vers leurs terres pour cultiver, la situation s’améliorait un peu, comme un signe que le nouveau roi en place était celui choisi par le destin pour tirer Marbrume et ses environs des griffes de la Fange. Il ne fallait qu’un peu de pain pour redonner confiance à tout un peuple. Et lorsqu’on parle de pain, on trouve toujours des moineaux pour ramasser les miettes. Alaïs était de ceux-là. Elle se glissait comme une vipère des sables entre les uns et les autres, et ses mains se baladaient entre les escarcelles, chipant une bourse ici, une pomme là, une miche de pain ou un peu de grain. Elle frappait au hasard, afin de traiter chacun équitablement.

Et elle n’était pas la seule à graviter dans la masse assemblée dans les rues étroites bordées d’étals, la concurrence était rude, et il fallait être le plus rapide ou le plus habile pour s’en tirer à ce jeu-là. Ne pas se faire repérer de la milice qui pouvait passer dans les environs rajoutait une difficulté supplémentaire. Alaïs n’était pas la meilleure, loin de là, elle n’avait pas l’expérience des natifs, et des gredins des Bas Fonds, mais elle apprenait vite. Elle jouait des coudes et avait un certain don pour repérer les ennuis à une certaine distance. Assez pensait-elle pour s’échapper rapidement si le besoin s’en faisait sentir. Surtout elle était souple, un corps dédié aux acrobaties les plus fantasques, les muscles taillés pour l’effort répondant au moindre de ses caprices.

Elle venait justement de soulager un nouveau passant de quelques piécettes sous le nez de son concurrent le plus proche et ne s’en trouvait pas peu fière que ce dernier lui dédia un regard mauvais. Elle sentit soudain l’espace se réduire autour d’elle. Apparemment, elle avait énervé le mauvais malandrin. Il n’était pas seul. Les regards qui se tournaient dans sa direction désormais signifiaient clairement une chose : elle avait mal choisi son terrain de chasse. Et elle allait le regretter. Alors que l’étau se resserrait doucement autour de sa personne, elle comptait rapidement les silhouettes qui allaient à contre-courant de la foule pour la retrouver. Trois, ils étaient trois, en comptant son concurrent le plus direct et le plus proche. Elle songea un instant à crier à l’aide pour se faire passer pour la victime d’une agression. Mais elle n’avait ni la mise, ni les mains propres pour être crédible. Elle aperçut une ruelle transversale à quelques pas de l’endroit où elle se tenait, mais elle devina dans le regard du jeune garçon qu’il y pensait aussi.

Elle fit deux pas en arrière, bouscula une dame qui s’insurgea aussitôt et renversa un étal dans son dos, créant une diversion et un barrage de quelques instants entre elle et le voyou. Alors que le jeune homme aussi fin qu’un renard tentait de contourner ce nouvel obstacle, les deux autres maintenant à portée se jetèrent en avant comme un seul homme pour l’attraper. Elle bondit entre eux d’une roulade souple qui les étonnèrent pendant une seconde, et elle repartit aussi sec à travers la foule, son sac serré contre elle, usant de son agilité pour se glisser entre les badauds et les étals. Son souffle s'accélérait, le soleil lui tapait sur le crâne, il valait mieux trouver un moyen de repli rapidement si elle ne voulait pas se voir alpaguée et pire encore. Elle avait une petite idée de ce que ses collègues des Bas Fonds lui réservaient s’ils parvenaient à leur fin, et elle n’était pas très disposée à leur donner satisfaction de sitôt.

Quelques rapides coups d’oeil au dessus de son épaule lui donnèrent un bref soulagement, les hommes étaient loin, plus lourds et massifs qu’elle, ils parvenaient à peine à se dégager des badauds indolents et le danger s’éloignait de minute en minute, au moins pour un temps. Elle commençait à réduire l’allure, reprenant haleine, lorsqu’elle sentit qu’on l’attrapait vivement par le coude. Elle eut juste le temps de retenir un cri, qu’on l’attirait déjà à l’écart, l’extirpant du refuge de la foule. Décidément, au Goulot, prédateur et proie avaient vite fait de se confondre.


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MessageSujet: Re: Qui part à la chasse... [Terminé]   Qui part à la chasse... [Terminé] EmptyLun 12 Aoû 2019 - 3:11
Les taudis du Goulot se ressemblaient tous. Il fait presque aussi froid dedans que dehors et l’humidité attaquait le bois qui se retrouvait aussi gonflé que la panse d’un noble. Pourtant les quatre murs offraient une sécurité bienveillante bien que relative, comme la couette d’un enfant qui pense qu’elle va le protéger du monstre caché sous son lit.
Celui de Rance n’échappait pas à la règle, ils s’entassaient à sept dans une piaule qui aurait convenu à deux et tout ce beau monde était silencieux.
Parce que le pauvre Rance était entrain de crever sur une couverture à même le sol, la fièvre lui faisait déjà voir un autre monde et seuls ces gémissements le rappelait à la réalité.
Il devait à peine avoir vingt ans et sa pauvre mère lui tenait la main comme si son amour pouvait payer la dette qu’Anür demandait. Aucune chance, le jeune homme s’était fait mordre par un rat dans les Égouts alors que l’équipe revenait avec un chargement, manque de chance la bête avait planté ses dents dans une partie mal protégée.
C’était quitte ou double mais avec la vermine à poils, on ne danse que rarement plus d’une fois et en moins de deux semaines l’infection avait quasiment tué Rance.

Karl ne travaillait qu’avec les meilleurs, en tout cas c’est ce qu’il aimerait faire croire. La réalité c’est qu’il travaillait avec ce qu’il trouvait de mieux par rapport à ce qu’il pouvait offrir et Rance loin d’être meilleur, faisait l’homme idéal pour un Grimpeur de par sa musculature sèche et sa souplesse.
Il travaillait avec une petite équipe, son équipe qu’il avait construite à force de promesses et de services. Ainsi dans un schéma relativement simple, chacun avait son rôle : Celui du chef lui revenait, deux gros bras pour transporter les chargements autant que jouer des muscles, un éclaireur toujours en avance sur le groupe et qui s’assure que la voix est libre car personne n’aime tomber sur une patrouille de milicien dans les Égouts ou pire. Et enfin un Grimpeur.
Le dernier rôle, primordial pour une seule tâche et pas la moindre, celle d’ouvrir la dernière grille pour sortir de Marbrume.
Et son Grimpeur allait sans doute rendre l’âme dans quelques jours si ce n’est quelques heures or aussi insensible que cela pouvait paraître, Rance l’emmerdait. Il devait faire rentrer du blé d’ici quelques jours, la Trinité seule savait qu’il avait besoin de ce chargement mais sans une équipe complète, il ne risquerait pas l’entreprise.

Le néophyte de la contrebande chassa ses problèmes qui reviendraient bien vite d’eux même, il ne pouvait rien pour l’homme mais sa mère l’avait fait demander. Elle espérait sans doute qu’il lui apporterait un remède miracle fait par un apothicaire des hauts quartiers ou qu’il confirmerait que la fièvre allait bientôt cesser et que son fils se remettrait bien vite comme l’espérait sans doute cette vieille femme.
Hélas pour elle, il n’avait qu’un pochon de riz pas bien gros pour elle. Une belle somme dans le coin, c’était ce qu’ils avaient négocié tous les deux, lui et son fils, si ce dernier venait à mourir, sa mère recevrait une double paye.
La réaction ne se fit pas attendre, larmes et injures venait de remplacer l’atmosphère morose de la petite maison. Elle voulue le gifler, un coup qu’il aurait pu facilement esquiver mais la colère d’une mère n’est jamais injuste et sa joie droite brûla.
Il aimait bien Rance, un gars un peu moins triste que la moyenne et prêt à tous les dangers pour nourrir sa mère, un brave type qui avait manqué de chance.

Karl ne s’éternisa pas. Non seulement, il n’avait pas le temps mais l’ambiance devenait vraiment hostile à son égard. Alors qu’il passait la porte, la chaleur du soleil le percuta et il ferma les yeux, savourant l’instant.
Mais il remonta bien vite la rue de l’infortuné Rance. Il avait besoin d’un nouveau Grimpeur, des gars agiles ça manquaient pas dans le Goulot, la fiabilité c’était autre chose.
Il traversa une autre rue puis décida de couper par une ruelle qu’il savait peu dangereuse avant de déboucher sur une avenue où se déroulait un drôle de spectacle mais pourtant pas si rare dans les Bas Quartier.
Le hurlement d’une femme, le bruit de la marchandise qui tombe par terre et le grondement de la foule. Pas de doute quelqu’un faisait des siennes, sans doute un voleur, un ivrogne ou un pervers, peut être les trois en même temps.
Alors qu’il observait le brouhahas, son œil fut attiré par la scène qui se jouait dans ce décor et de ce qu’il arrivait à comprendre une bande essayait de coincer un rouquin.
Ce dernier échappait aux pièges tendue par ses poursuivants grâce à une agilité et une audace digne des voleurs des bas fonds. Soudain il percuta alors que le fugitif se rapprochait de lui à vive allure, il la connaissait car c’était bien bien une femme et non un homme.
Alaïs, une jeune femme au sourire facile qui n’avait toujours pas compris qu’on ne chassait pas sur le territoire d’une meute de loup quand on était un renard. Mais plus que ça, il venait d’avoir une idée, il connaissait la femme depuis quelques temps déjà et il la classait dans les personnes potentiellement fiable. Il n’en était pas encore sûr mais elle était ce qui se rapprochait de plus à un Rance de rechange.
Il ne pouvait pas manquer cette opportunité et quand elle passa à côté de lui, il lui attrapa le bras pour l’amener dans la ruelle d’où il venait.
Tirer brusquement une femme dans un coin sombre alors qu’on se trouve dans le Goulot ne fût pas la meilleure idée de Karl Stanner. La petite rousse lui balança son poing dans l’entrejambe ce qui lui coupa le souffle alors qu’il reculait d’un pas plié en deux dans une souffrance que tous les hommes connaissent.

« Bordel, Alaïs ! C’est moi, c’est Karl ! » Tout en montrant ses deux paumes ouvertes à la rousse en essayant d’être rassurant.
Cette dernière semblait outrée mais soulagée de tomber sur un visage connu.
« Je t’ai vu faire ton numéro et je me suis dit que tu pouvais avoir besoin d’un coup de pouce. Je regrette. » La voix est cassante mais pas méchante, il se redressa dans un souffle rauque avant de poursuivre.
« Tu ne veux pas marcher avec moi ? Tes amis ne vont pas abandonner aussi facilement. De plus j’ai un travail à te proposer. »
Il se mit en route, la démarche un brin tendue par une douleur qui avait du mal à passer.


Dernière édition par Karl Stanner le Lun 12 Aoû 2019 - 23:16, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Qui part à la chasse... [Terminé]   Qui part à la chasse... [Terminé] EmptyLun 12 Aoû 2019 - 11:47
Elle avait frappé sans attendre. L’effet de surprise était primordial quand on devait s’échapper. Elle n’avait pas la force de son côté, dans un combat rapproché, elle privilégiait la vitesse et la fuite. Elle n’avait pas même eu le temps de distinguer le visage de celui qui l’avait entraînée là. Elle évalua le grognement qui s’ensuivit avec une certaine satisfaction et s’apprêtait déjà à filer plus loin quand elle reconnut la voix. Une voix qu’elle n’avait pas entendu depuis des mois, et encore moins depuis l’attaque de la Fange dans le Goulot. Pour un peu, elle se sentit presque prise d’un remord.

“Karl ! Quelle surprise ! T’as de la chance, j’aurais pu viser ta sale trogne.”

Elle n’en pensait rien, et son sourire démentait clairement son propos. Elle avait toujours trouvé Karl assez charmant, à sa façon, même si son regard bleu avait parfois des lueurs inquiétantes, comme un trou d’eau glacé qui vous guette en hiver, attendant le moindre faux pas pour vous engloutir. Et puis du reste, ils s’étaient déjà mutuellement rendu service, et il demeurait un des rares à ne pas la considérer comme une gamine ou un roseau fragile, du fait de son jeune âge et de sa carrure fine. Elle appréciait son sens de la répartie, également et ne prenait jamais très au sérieux les petites piques qu’il lui lançait. Celle-là était méritée, du reste.

“Moi pas ! Je suis contente de te voir, tu as l’air en vie et en forme, ma foi ! Ca faisait un moment que je ne t’avais pas vu...”

Il y avait presque un fond de reproche dans cette dernière répartie, manière de dire qu’entre amis, ou partenaires commerciaux, il était de bon ton d’envoyer des nouvelles. Malicieuse néanmoins, elle se fit pardonner d’une pression sur l’épaule du contrebandier et d’un baiser piqué sur sa joue rugueuse, aussi fugace qu’un battement d’aile de papillon. Du reste, il n’avait pas tort, il ne fallait pas traîner dans cette ruelle. Elle passa donc son bras sous le sien, tandis qu’il reprenait contenance, la démarche raide, et ne put retenir un sourire taquin devant les souffrances qu’elle lui avait infligées.

“Du travail, hein ? Pourquoi est ce que je sens que tu vas m’attirer des ennuis, toi ?”

Le contrebandier avait toujours une idée derrière la tête. Alaïs avait vaguement conscience de n’être qu’un larbin dans les plans de cette matière grise et froide qui sommeillait entre ses oreilles, mais elle l’ignorait un peu. Karl s’était toujours montré juste et payait sa part du marché. Une qualité assez rare pour être appréciée. Et ce qu’il proposait s’avérait souvent plus juteux que les petites rapines qu’elle était obligée d’effectuer pour survivre et faire vivre sa troupe. Elle le guida donc à travers les ruelles étroites, s’éloignant de ses poursuivants potentiels, non sans jeter quelques regards furtifs autour d’elle, régulièrement, pour s’en assurer. Elle déboucha bientôt vers un bouge où tout le monde était sourd et aveugle, façon de dire que chacun se mêlait de ses affaires, et attendait la même politesse en retour.

“Ici on sera tranquilles. Tu me paies un verre ?”

Jet de dé 20:


Dernière édition par Alaïs Marlot le Mer 14 Aoû 2019 - 19:56, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Qui part à la chasse... [Terminé]   Qui part à la chasse... [Terminé] EmptyMer 14 Aoû 2019 - 19:04
Il l’aimait bien.
Elle avait le regard vif, celui qui a déjà repéré ce qui l’intéressait chez son interlocuteur et si ce n’est pas votre bourse c’est sans doute votre point faible. Il en avait fait l’amer expérience.
Il était difficile pour lui d’en vouloir à Alaïs, principalement car c’était sa faute et d’autre part à cause du sourire qui éclairait son visage redonnant un peu d’éclat aux sombre ruelles qu’ils empruntaient.
Un sourire franc ou drôlement bien simulé, enjôleur ou malicieux il ne quittait que rarement son visage. Même dans l’adrénaline, il avait remarqué un rictus sur le visage de la rouquine.
Karl se demandait si elle avait besoin de cacher, de compenser quelque chose avec ce sourire ou si elle voyait simplement la vie un peu moins grise que la moyenne de Marbrume. Dans tous les cas, c’était rafraîchissant.

Il ne connaissait pas la taverne, mais il en avait retenu le chemin. Pas plus miteuse qu’une autre, il appréciait ce genre d’endroit avec des règles tacites que personne n’avait besoin d’évoquer.
Elle avait envie d’un verre. Lui aussi. Après tout c’était une norme de commencer par partager un verre pour ensuite parler travail.
Sans doute avait elle l’envie de boire avec une connaissance mais Karl s’interdisait de voir autre chose qu’une négociation quand il avait besoin des services de quelqu’un, même de quelqu’un qu’il appréciait pour autre chose que sa valeur marchande.

« Je t’offre le premier. »

D’un geste simple il avait indiqué le bar pour s’y installer. Il retira ses gants, pas gêné de sa vieille blessure et fit signe au tenancier.
Il commanda ce qui ressemblait à une bière distillée dans le coin, peut être même dans les Égouts du moins elle en avait l’odeur mais ça restait tout à fait correct par rapport à ce qu’on pouvait trouver dans le Goulot.
Le tavernier, un homme grisonnant au teint hâlé apporta deux chopes qu’il venait de remplir dans un énorme tonneau et Karl lui glissa quelques sous.

« Tu es une fille douée, Alaïs. J’ai perdu un de mes gars pour ma prochaine rentrée et j’ai besoin de tes talents pour compenser cette perte. Ça te rapportera plus que tes petites courses d’agilités. »

Alors qu’il prenait sa chope pour trinquer avec ce qu’il espérait être sa future recrue, trois jeunes hommes entrèrent dans la taverne. Ils étaient rouges et suants, l’un d’entre eux avait l’arcade ouverte, ils observaient la peuplade du bouge. Pas besoin d’être devin pour savoir qu’il cherchait quelqu’un et que cette personne allait passer une mauvaise journée.

Il n’avait pas besoin de regarder Alaïs pour savoir qu’elle ne souriait plus, lui aussi avait reconnu la bande qu’elle avait fait tourner en bourrique au marché.
D’un point de vue purement professionnel, ces gars étaient doués car Alaïs avait bien joué le coup en serpentant dans les ruelles pour perdre la piste or sans être natif du coin ça relevait de l’exploit d’avoir retrouvé la taverne.
Il fût sortit de ses pensées quand le groupe se dirigea vers une table vide avant de prendre place, leurs regards étaient braqués sur le couple qu’il formait avec leur fugitive qui ne touchait plus à sa chope depuis plusieurs minutes.
Seule contre trois, sans l’aide de quelqu’un il ne donnait pas cher de sa peau. Un dilemme comme on en trouve bien trop dans les Bas Quartiers. Néanmoins quelque chose faisait pencher la balance en faveur de la rouquine, une vieille histoire d’acrobaties et de famine.

Il posa sa main mutilée sur l’épaule de la voleuse avant de se lever pour rejoindre la table de la bande, tenant sa chope avec sa main intacte.
Il observa les réactions à son arrivée, celui au centre avec l’arcade ouverte lui lança un regard dédaigneux et méprisant, le plus à droite eu un mouvement de recul et alterna plusieurs fois son regard entre le voyou au centre et Karl et le plus à gauche ne l’avait pas quitté des yeux, une main dans son veston prêt à dégainer au moindre signe la lame qu’il cachait à peine.

Celui du centre pris la parole après un bref silence.

« On n’a rien contre toi. »

Phrase courte. Une porte de sortie pour Karl mais il n’avait pas l’habitude d’abandonner sans négocier.

« Et je n’ai rien contre vous. Mais cette jeune fille vient d’accepter de travailler pour moi. Je ne peux pas vous laisser mon associée. »

Le contrebandier prenait un peu d’avance sur la réponse de son potentiel Grimpeur. Il devait bien jouer ses cartes.
La réponse ne se fit pas attendre, dure et sèche.

« Ce n’est pas un estropié qui va me faire peur, rentre chez toi avant que je coupe le reste de tes doigts. »

Ses deux sbires accompagnèrent la tirade de ricanements et les regards se firent pressant.
Karl hocha la tête avant de répondre calmement. Il avait une ou deux minutes avant que ça ne dégénère.

« Je n’ai aucun doute sur l’issue d’un combat entre nous. L’important c’est de connaître sa place. Je fais des affaires dans le coin, pas les plus importantes mais assez pour toucher un certain nombre de personnes. Des personnes qui chercheront des coupables quand ils ne toucheront plus leur part du gâteau . »

Il laissa sa phrase en suspend le temps d’une respiration. Pas de mouvements en face de lui, il pouvait continuer.

« Vous voulez faire votre scène dans une taverne bondée ? Ça manque de discrétion à moins que vous n’ayez pas l’attention de laisser un seul témoin. Une envie de vengeance ça cause rapidement des problèmes.»

Il y avait une dizaine de clients en comptant les protagonistes. Il exagérait la chose pour donner à réfléchir à ses interlocuteurs.

« Ça vaut vraiment le coup ? »

Il avait fini son discours, un mélange de vrai et de faux, juste assez pour paraître crédible, après c’était chacun pour soi, il n’allait pas mourir pour son beau sourire.
Des échanges de regards entre les sbires et le chef. L’un voudrait aller jusqu’au bout l’autre n’aimerait pas prendre de risques. Karl avait la main sur le manche de sa dague et conservait un air calme pour donner le change. Celui du centre se leva brusquement, suivi rapidement par ses frères de rue.

« Si on la revoit sur notre territoire, ça sera la dernière fois. »

Une menace pour garder la face, le contrebandier le laissa faire volontiers et le trio fila par la grande porte après un mauvais regard en direction du comptoir.
Karl retourna à sa place et poussa un long soupir.

« Tu m’en dois une. »


Dernière édition par Karl Stanner le Jeu 15 Aoû 2019 - 17:48, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Qui part à la chasse... [Terminé]   Qui part à la chasse... [Terminé] EmptyMer 14 Aoû 2019 - 20:58
Alaïs avait cessé de respirer. Elle avait regardé Karl en silence, suspendue dans l’air sur un fil ténu, entre la décision qu’il prendrait et celle des trois voyous qui la dévisageaient maintenant avec un air chargé de menace. Il lui avait déjà rendu service, et il n’avait pas besoin d’une fille qui lui attire des problèmes. Karl n’était pas du genre sentimental et elle ne se faisait aucune illusion là dessus. Le passé se comptait en une monnaie fluctuante au sein du Goulot, parfois infiniment précieuse, parfois réduite à peau de chagrin par les aléas de la vie et de l’intérêt personnel de chacun. Et Karl n’avait presque aucun intérêt à y gagner, si ce n’est une promesse d’embauche qu’elle avait rechigné à accepter.

“Alors, laisse moi deviner ? Ca commence par des flatteries, et ensuite ça nous plonge dans les emmerdes, hein.” Elle avait fanfaronné avant que les trois types débarquent dans la taverne, et avait juste eu le temps d’ajouter, presque trop assurée, mais à voix basse, se penchant vers lui par dessus sa chope.

“Ne me dis pas que tu veux m’emmener dans les Égouts, Karl, car je te le dis tout de suite, je préfère encore mourir de faim plutôt que de me balader là dedans.” Elle exagérait peut être un peu, mais à peine. Et puis leurs échanges s’étaient arrêtés là, et Karl avait mis fin à la tension en se redressant dans un raclement de tabouret, posant sa main sur son épaule avec ce demi-sourire de requin qui la rassurait autant qu’il lui collait des frissons dans le dos. Il s’approcha de la table des trois qu’elle avait fâchés, et commença à négocier de sa voix posée, assurant qu’elle était son associée. Elle devina à son ton que s’ils s’en sortaient à bon compte, elle était foutue pour d’autres raisons. Épargnée par les gros poissons d’une petite mare, elle finirait bouffée par un adversaire plus gros dans l'océan. Mais chaque chose en son temps. Elle avait saisi son poignard, discrètement, et tenait fermement sa chope de l’autre. Si elle devait fuir, elle n’aurait que quelques secondes de répit. Elle repéra l’escalier dans son dos, et tenterait probablement de fuir par l’étage, avant de trouver une fenêtre et de se jeter dans la rue ou sur un toit adjacent.

Mais elle n’eut pas à bouger. Là où elle excellait à courir, Karl savait user du verbe et de sa voix calme comme un lac gelé. Les trois types sortirent du bar, et Alaïs se surprit à respirer de nouveau. Et comme elle s’y attendait, Karl n’allait pas lui accorder de service gratuit. Dans le Goulot, il y avait peu de règles, sinon celle de la survie. Mais si on voulait s’y conformer, il y avait tout un tas de petites choses à savoir et de conditions à respecter. L’une d’elle voulait qu’il valait mieux avoir ses comptes à jour, et ne pas fâcher la mauvaise personne. Et de ce qu’elle savait, elle préférait ne pas fâcher Karl, ni lui être en dette. Même si cette rencontre risquait de lui coûter cher. Elle soupira longuement à son tour, pour d’autres raisons, probablement. Elle était coincée.

“Alors, c’est quoi ce travail, au juste ? Il va me falloir un peu plus de détails, surtout si tu comptes m’emmener dans un endroit où personne d’un tant soi peu sain d’esprit ne mettrait pas les pieds…”
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MessageSujet: Re: Qui part à la chasse... [Terminé]   Qui part à la chasse... [Terminé] EmptySam 17 Aoû 2019 - 16:21
Karl savait qu'il avait l'avantage maintenant, mais il ne comptait pas en abuser plus que cela. Elle avait raison sur un point : Les Égouts ne sont pas fréquentables, néanmoins le contrebandier avait mis en place un chemin que l'on pourrait qualifier de sûr, si on le compare à la dangerosité du dédale.
La plus grande partie du trajet se trouvait sur le territoire d'un gang des Égouts auquel il payait un droit de passage. La suite consistait à éviter la Milice qui effectuait des rondes dans un des boyaux et enfin atteindre la grille située en hauteur pour sortir dans les Faubourgs.
Son groupe avait une fenêtre de tir serré, entre le départ de la Milice et la sortie des Fangeux.
Mais cela, Alais n'avait pas besoin de le savoir, nul besoin de stresser la voleuse plus que ça.

« On va descendre dans les Égouts avec mon équipe. On a un chemin sûr et chacun sait ce qu'il a faire. Toi, tu as juste besoin de grimper et d'ouvrir une grille. Un minimum de danger pour un salaire honnête. »

Il savait qu'elle avait peur et elle serait stupide de ne pas l'être. Lui non plus n'était pas serein quand il descendait dans les Égouts, mais il comptait sur les talents de son équipe, de son travail en amont et sur une faveur Rikni qu'il n'oubliait jamais de prier avant d'emprunter son chemin de contrebande.
Il lui laissa le temps de digérer l'information avant de continuer sur un ton calme et assuré.

« Je vais te fournir des bottes et un pantalon de cuir pour descendre là dedans, Ambre se chargera de les ajuster à ton gabarit. On te trouvera aussi un foulard et une petite capuche de laine.
Je ne te laisserais pas venir avec moi si j'avais le moindre doute sur tes capacités. Je préfère ne rien faire rentrer que de mettre en danger tout ce que j'ai mis en place depuis quelques temps.»


Il pris le temps d'observer son nouveau Grimpeur. Il était partagé.
Elle avait le gabarit et les compétences, ça il en était quasiment certain, par contre au niveau de son mental, si quelque chose venait à se compliquer dans le sombre dédale elle pourrait poser problème.
Il lui recommanda une chope.

« Tu n'as pas besoin de penser ou de réfléchir. Personne dans l'équipe ne va te donner un ordre, tu es au même niveau qu'eux. Le seul qui parle et qui décide de la marche à suivre, c'est moi. Si tu fais ce que je dis, ça va bien se passer.
Tu grimpes, tu ouvres, tu accroches la corde et tu redescends. Quand on a terminé, tu grimpes, tu décroches la corde, tu refermes et tu redescends. Ce n'est pas compliqué. Tu ne fais rien d'autres et tu restes avec moi.
Tu toucheras ta part comme les autres... Et ta place si tu y prends goût. »


Il avait ajouté cette dernière phrase sans grande conviction, mais l'appât du gain pouvait vaincre les plus grandes peurs. Il lui indiqua par la suite un lieu de rendez-vous, une date et un horaire, en précisant qu'il ne fallait pas qu'elle soit en retard.

« Fais attention à toi, Alais. »

Il l'avait laissé finir sa chope seule, son problème résolu.
C'était une fille bien, elle viendrait l'aider comme il l'avait aidé avant, raison de plus pour prendre soin de cette rouquine souriante.





Dernière édition par Karl Stanner le Mer 21 Aoû 2019 - 23:11, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: Qui part à la chasse... [Terminé]   Qui part à la chasse... [Terminé] EmptySam 17 Aoû 2019 - 17:20
Il la jaugeait tout en lui expliquant le travail. Son regard d’hiver l’analysait comme s’il pouvait juger de la valeur de ses muscles et de sa résistance dans un territoire aussi hostile que les Égouts. C’était la guerre là dessous. Une guerre pour la survie, entre les infâmes rongeurs plein d’infection, les bandits de la pire espèce et les Fangeux qui pouvaient s’y être égarés… Et sans parler de la milice qui pouvait les choper à l’aller comme au retour. Toute chose que Karl ne mentionnait pas, mais qu’elle savait fort bien.

Elle ne pipait mot, écoutant attentivement, posant seulement ça et là une question sur le fameux chemin “sûr” qu’il prévoyait d’emprunter. Mais finalement aussi assuré et calme que pouvait paraître Karl, c’était un jeu de dupes. Lui comme elle ne pouvaient absolument pas être certains de ce qu’ils ressortiraient des Égouts et elle se demanda si le service qu’elle lui devait valait la peine de risquer sa vie dans cette entreprise hasardeuse. Elle devait néanmoins prendre une décision, et pencha la tête tout en observant le contrebandier.

Donne moi une bonne raison de faire cette folie, semblait-elle lui demander. Elle pesait les mots qu’il énonçait, avare de fioritures, ce qu’elle appréciait en un sens. Ses paroles, comme ses actes étaient toujours pesés, comptant les syllabes comme un connétable pointilleux. Il ne cherchait pas à jouer avec elle, encore moins à tirer sur le lien ténu qui datait d’un triste hiver. Et elle appréciait cela aussi. Et puis, après tout, le danger était partout, et pas toujours où l’on croit. L’appât du gain n’était pas foncièrement ce qui la motivait, elle était toujours guidée par autre chose, de plus instinctif, et qui jusque là, l’avait plutôt bien servie. Elle avait eu le temps de se forger les muscles et le tempérament depuis le départ de son père. Si un ivrogne lui tombait dessus de nouveau, elle n’aurait pas besoin de Karl pour lui planter la pointe de sa dague entre les côtes.

Mais il manquait quelque chose... Tu n’auras qu’à rester avec moi. Il n’était pas question de la couver excessivement, elle le savait, mais il cherchait tout de même à la protéger. Sursaut d’orgueil masculin ? Peut être pas. Elle le jaugeait à son tour, maintenant. Il voulait voir si elle pouvait faire une digne partenaire, une “associée”, en somme, ce qui était radicalement différent de ce qu’elle avait connu jusque là. Il la regardait d’égal à égale. Il était question de trouver une place, place dont elle ne manquait pas parmi les Macchabées. Mais elle restait une chose à protéger, tandis que Karl proposait tout autre chose. Il semblait douter, du reste, assez hésitant sur cette partie là.

Elle devinait la solitude de l’homme derrière le contrebandier uniquement occupé de ses affaires et de sa comptabilité d’épicier. Il achetait ses partenaires parce qu’il ne pouvait avoir confiance en personne. Et dans ce monde où chacun était en sursis, elle ne pouvait guère l’en blâmer. Qui voudrait avoir la folie de se faire réellement des amis quand tout semblait compromis, le lendemain ? Elle était de ces fous, Alaïs, non pas par choix, mais parce qu’elle était ainsi. Elle pensait que le risque de perdre était mieux que de ne rien posséder du tout. Sinon autant se jeter immédiatement dans la gueule d’un Fangeux. Fais attention à toi, Alaïs. Etait-ce une lueur d’amitié qu’elle percevait dans son regard ou dans l’intonation un peu lasse de sa voix ?

Alors qu’il se relevait, elle n’avait toujours pas décroché un mot. Mais avant qu’il ne se retourne tout à fait, elle posa une main sur son bras et ajouta à voix basse, mais plutôt ferme.

“Compte sur moi.”
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