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 Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]

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Hector de SombreboisBaron
Hector de Sombrebois



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MessageSujet: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyVen 6 Sep 2019 - 10:50
Les sentiments sont des entités fortes et indépendantes. Ils guident les Hommes, bien plus que leur raison. Ils orientent leurs choix les plus cruciaux sans plus d'argument qu'un fou expliquant ses folies. Il existe néanmoins une entité plus forte encore que les sentiments : la mort. Et quand la mort pointe le bout de son nez, les sentiments sont en suspend, l'on oublie les animosités et l'on met tout en œuvre pour sauver les siens.

Hector ne pouvait donc réfléchir. Marie-Ange était en danger. Elle était gravement malade ; pâle, amorphe et fiévreuse. Ce fut donc la mort - du moins sa perspective - qui fit oublier au baron, un temps, ses sentiments pour Rosen et qui le mena sur la route du Labret, en quête de la fameuse Luna Rosae, la rose lunaire, celle dont l'infusion des pétales, selon l'herboriste consulté, guérirait la prêtresse.

Le matin du 18 juillet 1166, Hector partit, sur sa fière jument, avec armes et bagages, seul, en direction du fertile plateau nordique. Sa route le mena jusqu'à Balazuc où il se restaura rapidement puis jusqu'à Piana, où il fit une halte dans le bâtiment qu'il avait stratégiquement fait réhabiliter. Le lendemain matin, il prit la route de Menerbe, traversa marais et bosquets, jusqu'à Conques où il fit une courte pause pour s'alimenter avant de reprendre la route vers Sarrant, où il parvint à trouver une chambre dans un établissement d'aspect sûr. Enfin, le 20 juillet 1166 au matin, donc, il allait enfin rejoindre Usson, première ville sur le plateau. Il espérait bien y trouver un herboriste capable de lui fournir les pétales salvateurs, ou de le guider vers les lieux où la fleur tant désirée poussait.

Mais, alors que durant tout le voyage le temps avait été clément, les nuages finirent par se rassembler au dessus du chapeau du noble. Malgré le jour, il faisait presque nuit. Et, fatigué par les journées de cheval, rendu anxieux par la perception de cris lointains, mouillé par les premières gouttes de pluie d'un orage menaçant, incertain du chemin sur lequel il chevauchait, Hector décida de frapper à la porte de la première ferme qu'il croiserait pour y demander l'hospitalité. Et cette ferme, heureusement, ne tarda pas à paraître à l'horizon. Ce devait être le milieu d'après-midi et le cavalier solitaire lança Moto au galop pour ne pas y arrivé trempé.

Il accrocha sa jument à un pilier de bois dans un coin abrité à côté du bâtiment principal. Il la caressa avec bienveillance, la remercia de l'avoir porté jusque là et frappa à la porte. Sa cape bleue nuit et ses chausses marron étaient bien mouillées, son surcot bleu était légèrement humide. Il arborait une mine bien moins souriante qu'à l'accoutumée. On pouvait sentir dans son regard une grande détermination, une volonté forte... Il n'était définitivement pas là par hasard.

- Bonjour, je m'appelle Hector de Sombrebois, je vous demande humblement l'hospitalité...


Dernière édition par Hector de Sombrebois le Mer 1 Jan 2020 - 22:34, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyMer 11 Sep 2019 - 3:07
La pluie. Salvatrice, pour les légumes souffrant de la chaleur, en plein cagnard du mois de juillet. Porteuse de mort, pour les êtres humains qui craignaient la Fange. A la fois crainte et appréciée par les paysans du Labret, la moindre averse était synonyme d'un arrêt complet des activités pour se mettre à l'abri en attendant le retour d'un ciel clément.

A la ferme Dumas, on ne se laissait que rarement surprendre par la pluie. Généralement, le vent changeant suffisait à attiser la méfiance de la fermière et de ses apprentis. Les nuages achevaient de les convaincre, et tout le monde avait terminé ses corvées et remisé ses outils avant que le soleil ne disparaisse. Alors, la petite équipe se retrouvait dans la chaumière qui s'animait de joyeux chants, accompagnés des mélodies soufflées dans un pipeau, tandis qu'on jouait au Tric trac, aux dames, ou au jeu de Merelle. Souvent, on profitait aussi de l'averse pour suspendre des herbes aromatiques ou médicinales et les faire sécher, et les conditionner pour qu'elles se conservent jusqu'à l'été suivant.

Ce jour-là ne fit pas exception. Dès que le vent s'était levé, on s'était mis à guetter les nuages qui approchaient, une fois n'est pas coutume, par l'ouest. Convaincu que la pluie n'épargnerait pas les environs d'Usson, Mathilde et ses cinq apprentis, des hommes recrutés par l'Ordre pour se former sur une ferme du Labret, étaient rentrés pour se barricader dans la chaumière. Mathieu avait saisi son pipeau, Roger s'était mis en tête de tresser des queues d'oignons pour les suspendre et les laisser sécher, Marcus et Philippe avaient commencé une partie de Merelle, et Gauthier emballait le thym récolté le mois passé et qui séchait, depuis, dans la pièce des récoltes. Tapant du pied sur le sol pour marquer le rythme de la musique, Mathilde fredonnait une chanson en remuant le potage réconfortant qui mijotait depuis tôt le matin.

Personne n'entendit le galop du cheval approchant sur le chemin. Personne n'entendit le Hooo pourtant sonore du cavalier qui, une fois la barrière passée, fit ralentir sa monture pour l'arrêter et mettre pied à terre. C'est Philippe qui releva la tête en entendant le pas du cheval passer près de la chaumière pour s'arrêter à l'abri sous le toit. Un signe suffit. Le pipeau s'arrêta, Marcus se redressa , Roger et Gauthier interrompirent leur travail, Mathilde se retourna vers la porte, cuillère à la main. Le silence et la peur s'étaient infiltrés dans la maisonnée avec une aisance propre aux temps difficiles qu'ils vivaient.

On frappa à la porte. Déjà, Mathilde s'était déplacée près de l'échelle qui menait à l'étage, là où elle serait en sécurité. Depuis le départ des mercenaires de Sombreval, les apprentis assuraient sa sécurité de leur mieux, et la consigne était claire : tous mourraient, mais pas elle. Philippe se faufila jusqu'à l'épée qu'il gardait à portée de main et la tira de son fourreau. Elle avait appartenu à son père, soldat mort au combat. Il défit les deux verrous, fit pivoter la clé dans la serrure et entrouvrit la porte en prenant soin d'en caler le battant de son pied.

- Qui va là? Méfiant, il ne laissa qu'un demi pouce d'ouverture, juste assez pour voir qui était l'intrus tout en tenant, le long de sa jambe, son épée au clair.
- Je suis Hector de Sombrebois...

Deux secondes passèrent. Deux secondes durant lesquelles les cerveaux arrêtèrent de fonctionner devant l'énormité de l'information, que la tenue de l'individu ne pouvait que confirmer. Hector de Sombrebois. Un nom que l'on n'ignorait pas au Labret. N'avait-il pas contribué à la reprise du plateau fertile, tout comme de Terresang qu'on accueillait ici comme un ami? La porte s'ouvrit devant le Baron dont la cape était déjà humide.

- Entrez, monseigneur! Fut pas rester dehors quand le ciel se déverse!

Philippe, visiblement impressionné, laissa entrer le visiteur, et tous le saluèrent respectueusement... une fois que la porte se fut refermée derrière lui à double tour. La priorité était à la sécurité.

- Messire de Sombrebois! C'est un honneur que de vous accueillir dans ma chaumière. Mathilde Dumas, je suis la propriétaire de cette ferme. Ces hommes sont mes précieux aides et apprentis. Approchez donc du feu pour vous sécher!

En temps normal, quelqu'un aurait couru sous la pluie pour emmener la monture du seigneur au sec, la déseller et lui offrir une ration d'avoine, mais depuis l'arrivée de la Fange, ce geste pourtant élémentaire était synonyme de mort, et ce jour-là, personne ne se risquerait dehors. Marcus approcha le fauteuil à bascule des flammes au-dessus desquelles la marmite se tenait, immobile.

- Avez-vous une escorte à abriter?

Les gars ne savaient plus où se placer. Roger, qui tressait des queues d'oignons, avait saisi sa caisse de bois et se demandait où la poser pour rester proche du noble et ne pas perdre une miette de cette visite prestigieuse. Philippe avait rangé discrètement son épée près de la porte et n'avait pas bougé depuis, espérant qu'on ne remarquât pas qu'il avait presque menacé un sang-bleu avec sa lame. Marcus hésitait à ranger le jeu de Merelle, tandis que Gautier, qui voulait dégager la table de son travail faillit renverser le pot dans lequel se trouvait le thym séché qu'il avait trié. Mathilde haussa les yeux au ciel.

- Allons messieurs, reprenez vos occupations.

Le Baron avait-il pris place dans le fauteuil qu'on lui avait apporté? Sans doute. Mathilde regarda ses gars reprendre leur travail avec un petit sourire bienveillant. Elle peinait toujours à comprendre l'attitude changeante des gens en la présence d'un noble. Elle avait appris à ne pas chercher à en faire trop et à garder ses distances avec les rares sangs-bleus qu'elle croisait. Elle nourrissait une méfiance folle à leur égard, méfiance qui s'était accrue suite à la catastrophique réunion de l'Ordre, en mars dernier. Pourtant, Alexandre de Terresang était devenu un ami, tandis son ennemi, de Beauharnais, restait un voisin agréable à côtoyer. Elle soupira. Elle avait réussi, durant 26 années, à appliquer les conseils de son père et à éviter les nobles... mais depuis quelques mois, elle ne cessait de les croiser. Les Trois, parfois, lui jouaient de bien drôles de tours.

- Donnez-moi quelques minutes et je pourrai vous servir un bon repas pour vous réchauffer. Jamais je n'aurais imaginé vous rencontrer au Labret messire!


Salut Hectou!:
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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyMer 11 Sep 2019 - 9:45

- Entrez, monseigneur! Fut pas rester dehors quand le ciel se déverse !

Des paroles accueillantes, qu'il plaisait à Hector d'entendre en de pareilles circonstances, tout comme le grincement de cette porte qui s'ouvrit en grand pour le laisser passer.

- Merci, mon ami, fit-il au dénommé Philippe.

L'épée de ce dernier n'était guère menaçante et l'ambiance toute entière de la maisonnée, malgré un silence bien compréhensible et des yeux tournés, curieux, vers Hector, était amicale. Les premiers mots de la maîtresse de maison en témoignaient.

- Messire de Sombrebois! C'est un honneur que de vous accueillir dans ma chaumière. Mathilde Dumas, je suis la propriétaire de cette ferme. Ces hommes sont mes précieux aides et apprentis. Approchez donc du feu pour vous sécher!
- Madame Dumas,
fit le baron en enlevant son chapeau et en inclinant sa tête, merci pour cette accueil, je... je suis désolé de venir encombrer votre charmante chaumière... mais le temps, vraiment... Il tourna la tête de gauche à droite. Vraiment, votre ferme tombait à pic !

Le baron déposa sa cape et son chapeau près du feu, et lui même s'y plaça un instant.

- Messieurs, bien le bonjour, fit-il au reste de "l'assemblée".

On apporta un fauteuil à Hector qui refusa - pour un temps - de s'y asseoir, arguant que ses vêtements sècheraient mieux en restant debout.

- Avez-vous une escorte à abriter ?
- Pas d'escorte non, je ne suis venu qu'avec mon cheval. Je l'ai accroché sous un toit...


Il n'y avait pas grand mal à le laisser là, trouvait-il. Pour ce qui était de sa nourriture, l'herbe suffirait... Zut, il n'avait pas attention au fait qu'il y ait - ou non - de l'herbe à ses sabots... Il lui semblait que non.

- Sous le toit, là, pas loin de l'entrée... Je ne crois pas y avoir vu de l'herbe au sol... Peut-être pouvez-vous me dire à quel endroit je puis le mener pour qu'il puisse manger un peu ?

Manger. Hector ne voulait pas s'imposer. Mais il avait grand faim ! Ses provisions pour la route étaient frugales et, arrivant aux termes de son voyage, il n'en restait plus grand chose. Heureusement, l'hospitalité de son hôtesse se confirma bien vite. Après avoir enjoins aimablement "ses hommes" à reprendre leurs activités, Mathilde indiqua au baron qu'un bon repas lui serait servi. Ne voulant se montrer trop impoli, le baron ouvrit son sac de provision. Il n'y restait qu'un demi saucisson. C'était peu mais... c'était tout ce qu'il avait à offrir alors il le sortit. Trois ou quatre tranches de saucisse de sanglier, c'était toujours mieux que rien.

- Je n'ai malheureusement que ce saucisson à partager... fit-il à la fermière, mais cela nous mettra en appétit, j'en suis sûr, c'est du sanglier de mes forêts !

Il déposa le saucisson sec sur la table et s'en retourna auprès de la jeune femme et de l'agréable foyer.

- C'est vrai que je ne viens pas souvent au Labret... Ce n'est guère près de Sombrebois et avec les... obstacles qui peuvent se dresser entre nos deux... propriétés, il vaut mieux ne pas trop pratiquer ce chemin.

Les hommes avaient doucement repris leurs activités et l'ambiance était douce dans la chaumière. Chacun travaillait (ou jouait) dans un calme et une sérénité plaisante. La chaleur et l'odeur des légumes cuisant au dessus du feu ravissaient les larges narines du visiteur inattendu. Hector trouva un couteau et s'employa à couper de fines tranches de son délicieux saucisson. Ce faisant, il reprit la conversation, tranquillement... mais avec moins de joie que ce dont il faisait preuve habituellement - et pour cause :

- Je suis venu pour une urgence. La prêtresse de Sombrebois est atteinte d'un mal rare et étrange. Elle est fiévreuse depuis plusieurs jours, blanche comme un linge, ne se nourrit presque plus et... n'a plus de force. J'ai consulté quelques soigneurs et... et je n'ai qu'une piste pour sauver cette chère Marie-Ange, la Luna Rosae, la rose lunaire... Une fleur qui pousserait au Labret, m'a t-on dit.

Il avait tourné ses yeux vers la maîtresse de maison, des yeux dans lesquels on pouvait lire un détresse non feinte. Il avait besoin d'aide et cela se sentait. Comment un noble du sud du Morguestanc aurait-il pu savoir où précisément chercher cette plante ?

Le bref silence qui suivit les explications de Sombrebois permit à l'orage de se faire entendre. Lointains pour l'heure, les coups de tonnerre faisaient, malgré tout, entendre leur terrible puissance. Et la pluie, tombant à verse, accompagnait ces majestueux soli d'un bruissement continu.
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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyMar 24 Sep 2019 - 16:30
- Monseigneur, il ne serait vraiment pas prudent de sortir. Je suis désolée mais votre cheval devra patienter jusqu'à la fin de l'averse.

Une mise en garde qui avait le mérite de ramener tout le monde à la réalité. La pluie apportait le danger, la Fange guettait peut-être au-dehors. Et si c'était le cas, elle pourrait même pousser sa chance et entrer dans cette maison pour y prendre les vies de ses habitants. Bien que l'ambiance soit détendue, chacun était prêt, à sa façon, à s'agripper aux barreaux de l'échelle qui le mènerait à la sécurité de l'étage. La dame d'abord, ensuite les hommes. C'était les ordres du Vicomte, restait à savoir qui y dérogerait.

Le Baron ouvrit son sac alors qu'elle entreprenait de composer un repas digne de ce nom... du moins, du point de vue d'une fermière, bien éloignée du faste de la cour d'antan. Néanmoins, l'occasion de ne goûter ne serait-ce qu'une bouchée de sanglier, une viande qu'elle n'avait jamais eut à sa table, la fit tiquer. Était-il sérieux?

- [color=#ffffcc]C'est très généreux. Merci monseigneur! Je n’ai pas souvenir d’être allée à Sombrebois. Peut-être durant mon enfance. Nous ne sommes pas de grands voyageurs dans la famille, et si l’occasion d’une livraison ne se présente pas, nous ne quittons pas notre terre. Encore moins depuis la Fange.

Mathilde replaça une mèche tombée de son chignon juste derrière son oreille, avant de saisir un bol de bois qu’elle remplit généreusement d’une soupe fumante. Elle interrompit son geste en voyant le Baron saisir un couteau et découper lui-même le saucisson qu’il comptait bel et bien partager. Ça alors! Contrairement à ce à quoi elle s’attendait, il n’attendait pas d’être servi. Ce simple geste venait contredire, une fois encore, les paroles de son père qui avaient bercé son enfance. Durant des années, il avait dénigré la noblesse et le faste dans lequel elle vivait, parlant de ces gens comme de bons à rien attendant que tout leur tombe tout cuit dans le bec. Or, ceux qu’elle rencontrait ne correspondaient pas à cette description. Certes, ils arboraient des tenues plus soignées, témoins d’un train de vie bien supérieur à celui d’un paysan, mais au-delà des apparences clinquantes, ils étaient des hommes d’affaires et souvent des hommes de guerre, capables, la plupart du temps, de se débrouiller sans une cohorte de serviteurs. En témoignait le geste anodin du Baron, qui prenait part avec une aisance certaine aux préparatifs de la tablée.

- Je suis venu pour une urgence.

La grosse voix sourde du Baron interrompit Mathilde, dont les pensées osaient maintenant remettre en doute l’éducation qu’elle avait reçue de son bien-aimé père. La Luna Rosae. Mathilde se retourna et contourna le Baron pour déposer le bol fumant sur la table avant de souffler sur sa main gauche, laquelle arborait une fabuleuse cicatrice rosée dans le creux de sa paume. Le moindre contact avec de la chaleur avait le don de raviver la blessure, vieille d’un peu plus de deux mois.

- Je ne connais pas cette plante. J’ai quelques accords avec des herboristes du coin, mais jamais aucun d’entre eux ne m’a demandé de cultiver de la luna rosea pour lui. J’imagine que c’est une plante sauvage qu’on n’a pas encore réussi à adapter à la culture…

Elle croisa le regard plein de détresse du Baron. La malade devait être une personne importante pour lui, pour qu’il traverse les marais et arrive seul à Usson. S’il ne lui restait réellement rien à manger, et s’il n’avait pas plus de bagage que la sacoche qu’il avait déposée, il devait être parti à la hâte comme on le ferait pour un membre de sa famille. Le sourire qu’elle lui offrit se voulait rassurant.

- Nous avons de très bons herboristes dans les parages, je suis sure que vous trouverez ce dont vous avez besoin pour la prêtresse. Vous êtes-vous arrêté à Usson? Il y a un excellent soigneur au temple, arrivé depuis peu. Il s’est taillé une solide réputation dans le coin, ce qui n’est pas évident, pour être honnête. On est un peu méfiants de nature, nous les natifs.

Elle souleva le linge qui couvrait le pain, placé sur le plan de travail juste derrière elle, saisit la planche qui était juste à côté et déposa le tout sur la table. Le tonnerre grondait dehors, encore lointain. La pluie tambourinait sur les volets clos de la maisonnée, baignée par la seule lumière du feu de l’âtre et des chandelles allumées çà et là. Mathilde tendit le bras pour attraper le jambon fumé, suspendu en l’air et bien emballé dans un linge pour éviter que les mouches ne s’y attaquent, et entreprit d’en découper quelques tranches dont la finesse laissait à désirer… jusqu’à ce qu’un éclair de génie traverse son esprit.

- Mais j’y pense! Gauthier!

Gauthier était parti dans la pièce voisine. Le jeune homme, qui avait encore un visage d’enfant, sortit de derrière le rideau qui masquait l’ouverture.

- Gauthier, ton père était herboriste, pas vrai?
- Pour sûr, Ma’. Le meilleur de Najac!
- Tu as nécessairement cueilli avec lui dans ton enfance alors. Ça te dit quelque chose, la luna rosae?
Mine dubitative du blondinet en pleine réflexion, qui finit par hausser les épaules, incapable de répondre.
- C’est que j’ai pas la mémoire des noms, Ma’. Les carottes, les pois, ça, ça va, mais les noms bizarres de ce qui pousse en forêt ça veut pas rentrer dans ma tête. C’est pour ça que papa a pas voulu continuer mon éducation et qu’il m’a envoyé faire un métier à ma portée. Ça ressemble à quoi la luna rosara?
- … Rosae. Comme la rose. Avez-vous une description, monseigneur? Un dessin peut-être? suggéra-t-elle tout en attrapant des prunes confites et un fromage de chèvre tout frais pour les déposer sur la table, qui commençait à se garnir d’une façon satisfaisante… pour une seule personne. Car seul le Baron pourrait manger, avant que les restes ne soient emportés dans la pièce voisine où les gars -et Mathilde- pourraient alors manger. C’était ce qu’on lui avait appris.
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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyLun 30 Sep 2019 - 13:30

Hector consentit - non sans une certaine contrariété - à laisser Moto jeûner sous l'orage... Mathilde avait raison ; la sécurité avant tout...

Et ces bêtes, qui ne prenaient que la vie des hommes ; comment se nourrissaient-elles ? Le baron se posait de nouveau la question. Personne n'avait jamais vu l'une de ces bêtes manger un cheval ou quelque animal que ce soit. Elles n'étaient visiblement pas non plus herbivores et même les morsures qu'elles infligeaient aux hommes n'avaient pour but de se nourrir... mais uniquement de tuer ! Tuer... pour que la victime ressuscite sous les traits d'un nouveau fangeux... quelle folie ! Quel horrible châtiment ! Et quel Dieu pouvait avoir engendré ces monstruosités ? Sans doute pas l'un de nos chers Trois. Il se murmurait qu'il existait un quatrième Dieu ; un Dieu maléfique... Il y avait même, selon ces rumeurs, certains humains qui les adoraient. Peut-être était-ce cela la solution : adorer le Dieu maléfique, lui faire quelque offrande pour calmer sa colère et peut-être qu'alors, les monstres s'en iraient ? Non, Hector n'y croyait pas. Il croyait plus que ce Dieu - s'il existait - n'accepterait aucun présent car son seul but devait être de remplacer l'humanité par la fange, tout simplement...

Le geste de la paysanne, ce bol qu'elle vint poser à côté du baron, sortit ce dernier de ses pensées.

- Je ne connais pas cette plante. J’ai quelques accords avec des herboristes du coin, mais jamais aucun d’entre eux ne m’a demandé de cultiver de la luna rosae pour lui. J’imagine que c’est une plante sauvage qu’on n’a pas encore réussi à adapter à la culture…
- Il parait oui... elle est très rare et ne pousse que sur le plateau, c'est ce que l'on m'a dit...
- Nous avons de très bons herboristes dans les parages, je suis sure que vous trouverez ce dont vous avez besoin pour la prêtresse. Vous êtes-vous arrêté à Usson? Il y a un excellent soigneur au temple, arrivé depuis peu. Il s’est taillé une solide réputation dans le coin, ce qui n’est pas évident, pour être honnête. On est un peu méfiants de nature, nous les natifs.
- Ah intéressant ! Mais... je... je n'ai pas pu m'arrêter à Usson... Votre ferme est bien située avant Usson, non ?!


Le baron cru comprendre... Usson était sa destination et il pensait que la ferme où il était arrivé était sur la route d'Usson. Seulement avec l'obscurité et la pluie, il dut bien reconnaitre qu'il s'était perdu. Par chance, Usson n'était pas très loin.

- Quand la pluie aura cessé, j'irais rendre visite à ce soigneur. Connaissez-vous son nom ?

La discussion était posée, tranquille malgré la différence de sang entre la propriétaire et le châtelain. Elle coupait des tranches de jambon, déposait pain et fromage sur la table. Mais, vue la quantité de nourriture sur la table et le nombre d'estomacs à nourrir, il allait y avoir un problème. Hector se sentit tout à coup gêné d'imposer ici sa présence. Par chance, il n'avait pas eu l'impolitesse de parler de la faim qu'il ressentait depuis son entrée dans la maisonnée.

- Toutes ces histoires m'ont un peu coupé l'appétit. Je... je n'ai pas très faim. Alors faîtes moi plaisir, aidez-moi à déguster tout cela !

Voyant les regards surpris des hommes autours de lui, le baron ajouta :

- Allons, venez, j'ai coupé quelques tranches de sanglier, venez me dire ce que vous en pensez !

D'abord hésitants, les hommes, sans doute alléchés par l'odeur de la viande séchée, finirent par s'approcher de la table où le baron avait disposé les tranches de saucisson les unes sur les autres, en biseau. Il y en avait une vingtaine. Philippe, Marcus, Roger et Gauthier, Mathilde et Hector, chacun pouvait manger trois ou quatre tranches. Et le baron veilla a ce qu'il en fut ainsi, encourageant la maîtresse de maison à ne laisser sa part à personne...

- Voyons, il faut manger Mathilde ! Vous me feriez de la peine si vous ne repreniez pas de ce saucisson, n'est-il point à votre goût ?

Et pendant qu'on dégustait "l'apéritif", Hector répondit aux questions concernant la fameuse plante qu'il devait trouver...

- Je n'ai pas d'esquisse des luna rosae, tout ce que les érudits m'ont dit est qu'elles ressemblent à des roses, en plus petites, sans épines, qu'elles fleurissent au crépuscules et se flétrissent durant la nuit. Elles sont le plus souvent d'une couleur pourpre et ce sont leurs pétales qu'il faut faire infuser pour guérir ceux qui sont frappés du même mal que la prêtresse de mes terres... Outre le fait qu'elles poussent au Labret, c'est tout ce que je sais de ces plantes salvatrices.

Mais comme la description ne sembla pas éveiller de souvenirs chez les interlocuteurs du baron, il y eut un moment de flottement. Un moment de flottement qui se prolongea quand Hector vit le bol solitaire au milieu de la table. Certes, la soupe était appétissante, mais il n'y en avait pas suffisamment pour nourrir toute la maisonnée. Le baron de Sombrebois n'avait ni envie de la boire, ni l'audace de demander à la maîtresse de maison d'en servir pour tout le monde - le pouvait-elle seulement ? Aussi décida-t-il de relancer la conversation sur un sujet bien différent.

- Dîtes-moi Monsieur, quel est ce jeu auquel vous jouiez tantôt ? Il ne me semble pas le connaître...

Le pauvre Marcus rougit comme une luna rosae et balbutia un début de réponse... Seulement sa gêne était telle que personne ne comprit goutte à ce qu'il avait tenté d'énoncer ! Les autres hommes rirent à sa panique verbale tandis que le baron, quant à lui, posait une main rassurante sur son épaule.

- Soyez sans crainte, Monsieur, je ne vous tends aucun piège et ne vous veux aucun mal, vous pouvez parler tranquillement.
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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyJeu 3 Oct 2019 - 3:16
Votre ferme est bien située avant Usson, non ?!

Mathilde eut un regard plein d'étonnement. Sa ferme, avant Usson? Pas s'il était passé par Sarrant pour entrer au Labret. Il avait nécessairement dû passer par Usson avant de quitter la bourgade pour continuer vers l'ouest, et passer au large de sa ferme où la pluie l'avait poussé.

- Monseigneur, vous êtes à l'ouest d'Usson. A une demie lieue environ. Auriez-vous quitté la principale pour passer à travers champs?

Une bonne chose pour ceux qui voulaient éviter les bandits de grands chemins, qui se plaçaient le long des grands axes fréquentés. Parfois, quand elle ne suivait pas un convoi, Mathilde bifurquait vers le sentier du sud du plateau, qui l'emmenait vers la ferme après un petit trot à travers les champs de blé et d'avoine du Labret. Elle aimait ces instants paisibles durant lesquels elle avait l'impression de renouer avec la terre qui l'avait vue grandir, sa terre. Aujourd'hui, elle était peuplée d'étrangers ramassés au hasard à Marbrume dans l'espoir qu'on la cultive avec le même soin qu'autrefois, mais n'importe qui ne pouvait s'improviser fermier. Et n'importe qui ne survivait pas facilement par ici, à moins que de tisser des liens forts et solides avec les voisins qui, souvent, donnait un coup de main lorsqu'il le fallait.

Les soigneurs ne couraient pas les routes, au Labret. On allait les chercher à Usson, ventre à terre, et on revenait avec en espérant que le blessé ne fût pas mort, ou que la future mère n'ait pas trépassé entre-temps. Elle ne s'intéressait que depuis peu de temps aux herboristes, qui s'étaient fait un peu moins discrets qu'auparavant. Évidemment, ce métier s'approchait souvent dangereusement de la sorcellerie, et les croyances populaires imposaient à Mathilde de rester prudente avec ceux pour qui elle cultivait maintenant quelques plantes. Elle préférait définitivement les soigneurs. Comment s'appelait cette femme, à Usson? Cécile? Camille? C... Ah!

- Cassandra Vitalis, monseigneur. Elle réside à Usson chez une vieille femme dont elle s'occupe en échange d'un toit au dessus de la tête. C'est une ferme en marge du village, pas difficile à trouver.

Devant le petit festin improvisé, le Baron déclara qu'il n'avait pas vraiment faim. Mathilde se demanda s'il mentait, et si la perspective de manger un repas préparé par des gueux ne le répugnait tout simplement pas. Elle regarda la tablée. Bien sûr, les plats manquaient de fignolage. Pas de pousses de radis pour décorer, ni de fleurs ou de salade, pas de sauce riche dégoulinant sur un faisan rôti à point ni de plateau en argent pour présenter le tout. C'était une humble tablée, dans une humble chaumière. Trop humble sans doute pour un baron. Ah tais-toi, papa, il a fait un long voyage, est inquiet pour la dame et ne pense qu'à la soigner. Oui, c'était probablement ça. Elle chassa les pensées que son père semblait lui souffler, depuis l'au-delà, et fit un signe aux gars. Elle ne songea pas que le noble ait pu être gêné de manger seul devant cette étrange assemblée et se contenta d'obéir au drôle de caprice de Sombrebois.

Mathieu fut le premier à avancer, hésitant, mais il eut le mérite d'ouvrir la voie aux autres qui n'attendaient que ça. Tous tendirent une main vers les tranches d'une charcuterie qu'ils goûtaient pour la première et -sans doute- la dernière fois. Seule femme de la maisonnée, par conséquent préposée au service, Mathilde ne broncha pas jusqu'à ce qu'Hector l'interpelle. Elle prit une tranche et la déposa sur sa langue. Le goût était fort, bien plus fort que la viande d'élevage qu'elle avait toujours connue. Elle ferma les yeux un instant, écoutant distraitement la description du noble qui détaillait avec une certaine précision la plante qui faisait l'objet de ses recherches. Le silence se fit alors qu'elle mâchait la viande pour en réveiller le goût qui emplissait maintenant sa bouche. Le sel avait disparu, il ne restait maintenant que les arômes de la chair, teinté de la forêt, des noix et des champignons consommés par la bête. Mathilde souriait, les yeux clos. Il y avait longtemps qu'elle n'avait pas eu une telle expérience gustative.

La voix du noble reprit, tirant la fermière de ses rêveries gastronomiques. Elle tendit une main pour reprendre une rondelle et entreprit de faire le service tandis que le pauvre Marcus, rouge pivoine, essayait de placer des mots dans un ordre cohérent pour former une phrase dénuée d'hésitations. Tout le monde rit devant son manque d'éloquence, et lorsque le baron déposa une main sur son épaule, il se figea.

- Allons Marcus dit Mathilde en se penchant pour déposer deux bols sur la table, toi qui es le premier à essayer de plumer tes adversaires à ce jeu, tu perds ta verve quand on te demande une petite explication?

Gros rires de l'assemblée. Marcus ne dérougissait pas. Habituellement très enclin à parier n'importe quoi sur le jeu, l'homme se faisait désormais silencieux. Il prit une inspiration, et, dès que le calme revint, articula clairement.

- Les Merelles, monseigneur. Ça s'joue avec des pions qu'on bouge sur les lignes. Il désigna les lignes d'un plateau de jeu improvisé avec de vieilles planches mises bout à bout pour former un carré et sur lesquelles on avait tracé des carrés formant l'espace de jeu. Faut aligner trois pions sur une ligne pour pouvoir prendre un pion à l'autre. Le premier qu'est coincé, qui peut plus bouger ses pions ou ben qu'en n'a p'us qu'deux, bah il perd. Il haussa les épaules, annonçant une évidence : et moi j'gagne. Nouveau rire de l'assemblée, alors que Mathilde déposait deux autres bols fumant.

- Il nous bat tous. Tout le temps. Si je ne réussis pas à le battre avant son départ de la ferme, je lui devrai trois jours de corvées sur sa terre. Autant vous dire que je compte bien le détrôner de son statut d'homme invaincu! dit-elle en riant. Moi d'abord, Ma'! s'écria Gauthier en saisissant des cuillères pour tout le monde. J'lui doit une huitaine monseigneur! lança-t-il, candide. Lui aussi avait compris qu'on mangerait ensemble en attendant la fin de la pluie. Une chose complètement impensable, en temps normal, mais le protocole pouvait souffrir de l'une ou l'autres entorses vu les circonstances... et si le noble lui-même les invitait à partager le saucisson, c'est qu'il acceptait qu'on mange avec lui non?

- Soupe opéraaaa!* chantonna-t-elle, alors que tout le monde s'installait. Elle déposa un dernier bol sur la table et en conserva un dans ses mains. Ne traînez pas, ça va refroidir dit-elle à l'attention des hommes qui, tout à coup, ne bronchèrent pas d'un poil. Chacun attendait le signal du Baron, avec un malaise évident, sauf pour Gauthier, qui avait déjà saisi sa cuillère. Allaient-ils vraiment partager la table d'un noble? La Fange avait-elle ce pouvoir de briser les barrières sociales au point de permettre à des ouvriers de ferme de partager le repas d'un sang-bleu? Mathilde patienta également, observant les attitudes. Elle ne plongerait son nez dans son bol que lorsque leur hôte aurait donné un quelconque signe les invitant à manger.

- Des petites roses sans épines, pourpres, hm. Grosses comme ça à peu près? dit-elle en faisant un rond avec son index et son pouce, gros comme une pistole. Mon père m'emmenait piéger des lièvres, avant. Y avait un endroit où on passait parfois, plus au sud, avec un joli petit boisé qui bordait une falaise. Je me souviens avoir cueilli des fleurs sur le retour, et j'étais complètement désemparée en les offrant à maman parce qu'elles avaient fané en une heure à peine. Elles sentaient si bon, elles auraient parfumé la maison mais... on les a jetées. Je ne sais pas si c'est ça, mais peut-être qu'il y en a encore et qu'un herboriste pourra les identifier. N'y allez pas seul, par contre. C'est pas prudent. Le Labret n'est pas vraiment sûr.


*
Soupe opéraaa:
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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyLun 7 Oct 2019 - 10:23
- Une demie lieue... répéta, pensif, le baron, ça n'est pas si grave. Et oui, entre l'obscurité et la pluie, je ne sais pas à quel moment exactement, mais j'ai effectivement dû quitter la route principale.

La route avait été longue également. La fatigue lui avait fait perdre un peu de sa lucidité. Avait-il pensé trouver un raccourci ? Il ne s'en souvenait même plus !

*

- Cassandra Vitalis, je tâcherais de m'en souvenir, merci.

Le baron nota ce nom dans un coin de sa tête avant de rire - sans méchanceté - avec ses hôtes sur les malheurs du champion de Merelles.

- Intéressant ! Fit le baron après l'explication finalement assez claire de ce dernier.

Pour autant, il n'avait pas vraiment l'âme au jeu. Il aurait voulu manger et repartir rapidement chercher de l'aide pour trouver la plante qui sauverait Marie-Ange. Mais le temps ne le lui permettrait pas. L'orage continuait de gronder par intermittence et le ciel était déjà noir... Impossible de quitter la ferme avant le lendemain matin.

- Peut-être, avant de dormir, pourrions nous jouer un peu... Fit-il sans s'adresser à quelqu'un en particulier.

Et pour l'heure, la petite communauté hétéroclite allait passer à table. Le petit temps de malaise avait prit fin lorsque le baron s'était finalement assit à table devant le bol que la maîtresse de maison avait rempli pour lui.

- Allez, remercions les Trois pour la nourriture qui nous est offerte... et Mathilde pour nous l'avoir si gentiment préparée.

Ainsi soit-il. Le baron goûta la soupe et la trouva très bonne, meilleur même que celle de sa chère cuisinière Pénélope.

- La soupe est délicieuse, chère Mathilde. C'est une bonne chose que je me sois perdu, finalement !

Il avait encore le réflexe du compliment mais, vraiment, son cœur était absent. Quel piètre invité il faisait. Comble du malheur, il s'en rendait compte mais n'y pouvait rien ! Sa légendaire joie de vivre semblait envolée. Il y avait pourtant tout, ici, pour que l'ambiance soit bonne : des gens agréables, une bonne nourriture. Ah si, il manquait du vin... mais que voulez-vous ? Tout le monde n'avait pas les moyens de se payer la divine boisson. Non vraiment, le baron avait l'impression de perdre du temps ici, de traîner, de laisser la maladie de Marie-Ange prendre de l'avance sur leur combat à mort. Et c'était terriblement frustrant pour Hector de se sentir coincé ici.

En tant que personnage le plus important autour de la tablée, il se sentit néanmoins obligé de relancer la conversation. Il releva la tête força sa bouche à sourire, ses yeux à s'éclaircir un peu et sa voix à prendre une intonation un tant soit peu entousiaste :

- Que cultivez-vous, Mathilde ? Faîtes-moi rêver... il est si difficile de faire pousser quoi que ce soit dans la tourbe, par chez moi... Heureusement que nous avons quelques forêts, la nourriture y est un peu plus abondante.
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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyLun 21 Oct 2019 - 17:37
Le ciel était sans doute noir de nuages, à en juger par les grondements réguliers du tonnerre qui, lentement, en s’éloignant, finirait par ressembler aux ronronnements d’un chat confortablement installé sur les genoux de sa maîtresse.

- Dormir, Monseigneur?

Mathilde haussa les sourcils. La route avait-elle été si longue que le Baron avait besoin d’une sieste? Peut-être avait-il cette habitude et travaillait-il plus tard une fois la nuit tombée, alors qu'elle dormait paisiblement. Depuis la Fange, les paysans du Labret ne pouvaient plus se permettre ce luxe de dormir en journée, tant ils profitaient de la lumière et du soleil, vaillant gardiens contre les fangeux, pour vaquer à leurs occupations. Ils se couchaient avec le soleil, et se levaient avant lui. Parfois, ils s’octroyaient un moment de repos lorsque le ciel était moins clément, mais rares étaient ceux qui en avaient fait une activité incontournable dans leur quotidien. La Fange avait défait les habitudes pour en créer de nouvelles.

Bien que l’ambiance soit détendue, le Baron semblait inquiet, l’esprit ailleurs. Son humeur variait. Tantôt plein d’entrain et tout préoccupé à ne pas déranger, tantôt absent et plus taiseux. La personne pour laquelle il avait fait ce déplacement, contre toute raison, était sans doute très importante à ses yeux.

- Je vous parle de mes champs si vous me promettez de parler de votre prêtresse, Marie-Ange c’est bien cela?

Mathilde sourit, compatissant à la peine de l’homme qu’elle accueillait.

- Je suis la cinquième génération qui cultive cette terre. Sans doute la dernière de mon sang, mais j’espère au moins avoir parmi mes gars un héritier euh… d’adoption? dit-elle en les regardant tous. Elle n’avait aucune idée de qui pourrait reprendre la ferme, le moment venu, mais, étant convaincue d’être stérile, elle savait qu’il s’agirait nécessairement d’un étranger. Elle espérait au moins avoir le temps de le former, et de le voir travailler de longues années durant cette terre qu’elle aimait plus que tout. Encore fallait-il que la Fange lui donne ce temps.

- Autrefois on cultivait des céréales, comme bien des paysans. Mon père a décidé de convertir une partie de la terre pour y cultiver des légumes, plusieurs variétés. Avec le temps, nous avons observé, testé, échoué parfois, mais finalement nous sommes arrivés à des compagnonnages qui permettent aux plantes de croître et de produire des légumes de qualité. Depuis quelques années maintenant, les légumes abondent, c’est d’ailleurs ce qui m’a permis de survivre à l’été catastrophique de l’an passé. J’ai arrêté les céréales et ne fais plus que du légume. Des carottes, des panais, des pois, des courges, des salades, tout ce qu’il faut pour garnir les tables et les estomacs. Il y a également bon nombre de fleurs aux champs. Certaines sont comestibles, d’autres ne sont là que pour le plaisir des yeux et des abeilles. Vous verrez en sortant, c’est coloré, c’est foisonnant, c’est magnifique! dit-elle, les yeux pétillant. Au fur et à mesure des récoltes, nous semons d’autres variétés qui grandiront avec la chaleur du mois d’août, avant de planifier les semis d’automne, puis de récolter les légumes d’hiver et prendre un repos bien mérité à la fin de novembre. Les poireaux tolèrent bien le froid, comme les oignons mais on les ramasse s’il pleut trop, pour éviter qu’ils ne moisissent.

Elle se retourna pour prendre un pot de grès, dans lequel elle plongea la main pour en sortir une poignée de semences, des pois secs dont la couleur, un vert tendre, ravissait toujours le regard de la fermière. Elle les plaça dans un petit sac de toile qu’elle déposa ensuite sur la table.

- Demandez à vos gens de planter ceci dans la terre de Sombrebois, mélangée pour moitié à la terre du Labret. Ce sont des pois grimpants, ça se cultive dans n’importe quel parterre, même sous une fenêtre. Laissez-les s’agripper à un treillis et produire leurs fruits, que vous ne mangerez pas. Vous les laisserez sécher, pour les planter au début de l’été prochain, dans la même terre. Vous pourrez alors garder quelques pois pour les consommer, et vous remplanterez les nouvelles semences pour une troisième année. Peu à peu, la plante va s’habituer à ce sol qu’elle ne connaissait pas et, avec un peu de chance, elle va continuer de produire. Dans cinq ans, vous pourriez avoir de vrais pois cultivés à Sombrebois, avec un goût probablement différent de ceux que je cultive ici.

Elle était convaincue qu’avec le temps, et beaucoup de travail, la plupart des légumes pourraient s’adapter à une terre a priori hostile. Encore fallait-il la travailler, et permettre aux semences d’apprivoiser leurs nouvelles conditions de croissance, sans doute plus à l’ombre et dans un sol bien plus acide.

- Et maintenant, Monseigneur, à votre tour. Parlez-moi de cette prêtresse pour laquelle vous vous inquiétez tant! Et parlez-moi de Sombrebois. Votre gouverneur est venu à ma rencontre, récemment, mais j’avoue que j’ai beaucoup de difficultés à imaginer la vie que l’on mène là-bas!

Toujours debout, elle se tenait prête à servir quiconque aurait besoin d’un peu d’eau, ou d’une autre ration -que personne ne demanderait, la nourriture restait un bien que l’on économisait.
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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyMer 23 Oct 2019 - 11:39
- Par Serus, où ai-je la tête ? Je crois que la fatigue se joue de moi… Et le temps… Avec cette noirceur et ma fatigue, j’ai cru que c’était déjà le soir !

Les hommes regardèrent le noble d’un drôle d’air, ne sachant pas s’ils pouvaient rire de sa bévue. Si cela avait été Marcus, nul doute que l’on aurait bien ri… mais là, chacun resta maître de ses émotions.

- Je vous parle de mes champs si vous me promettez de parler de votre prêtresse, Marie-Ange c’est bien cela ?

- Si vous voulez…
fit tristement le baron.

Il n’aurait aucun mal à parler de sa prêtresse… mais de l’envisager lui fit revoir son visage malade et cela n’avait rien de réjouissant. Heureusement, la jeune paysanne lui parla de son exploitation, de ses cultures, avec passion. Elle parvint à remplacer, dans l’esprit du baron, le visage de Marie-Ange par les images de céréales, de légumes et de champs verdoyants. Qui plus est, elle lui offrit quelques graines pour ses terres, lui expliquant la marche à suivre pour les voir se développer.

- Grand merci, mademoiselle Mathilde, vous êtes trop aimable !

Et Hector d’aller immédiatement ranger le petit sac de toile dans son baluchon. Ce faisant, il entendit la jeune femme lui réclamer son du : quelques mots sur Marie-Ange et Sombrebois. Elle lui apprit en outre que son gouverneur était passé ici. Cela surprit d’abord Hector… mais comme ils avaient décidé de tenter de conclure des accords avec les exploitants terriens, il fini par se dire que ce n’était pas qu’une folle coïncidence.

- Victor de Rougelac, vous avez vu ce bon vieux Victor. Vous a-t-il fait bonne impression… Il est assez… disons… C’est un noble qui n’aime pas trop se salir les bottes si vous voyez ce que je veux dire. Ca me surprend même qu’il soit venu personnellement jusqu’ici !

Il se gratta la barbe d’un air amusé.

- Mais avant que vous ne répondiez, je vais vous parler de Sombrebois. C’est un pays au sud d’ici, à deux ou trois jours de chevaux… selon la forme de la bête ; à quelques lieux de la mer. On peut d’ailleurs voir la mer depuis les remparts du fort. Oui, nous avons un château fort. Une sorte de gros cube de pierre, dans un bourg en pleine reconstruction. Nous construisons un mur tout autour du bourg. Il sera bientôt terminé. En fait mes terres sont situées sur une légère colline où se trouve une belle forêt de sapins. C’est la principale ressource que nous exploitons ; le bois. Nous avons également un potager pour les gens du château, une basse cour… mais, comme Victor a dû vous le dire, après l’achèvement du mur, nous reconstruirons les maisons et des gens pourront venir y habiter. Autant vous dire que notre petit potager et notre basse cour (et même les produits de la chasse) ne suffiront pas à nourrir la population nouvelle… Voilà pourquoi, j’imagine, il est venu vous trouver ?

Il finit sa soupe et son regard s’assombrit.

[b]- Et pour ce qui concerne Marie-Ange, et bien, c’est une jeune prêtresse qui… officiait avant à Marbrume et qui a accepté de venir prêcher la bonne parole à Sombrebois.
Hector n’allait évidemment pas parler de ses talents de spiritisme, de comment elle avait fuit l’autorité clericale, ni évidemment de la relation ambiguë qu’il entretenait avec elle… C’est quelqu’un de foncièrement gentil. Elle soigne autant le corps que l’esprit. Je me suis autant attaché à elle qu’elle s’est attachée à nos terres. Bien qu’un peu secrète, elle a su, par ses actes, montrer qu’elle était attachée aux habitants de Sombrebois.

Le baron sentit sa gorge se serrer. Il sourit – légèrement tristement – à son hôtesse.

- Je ne peux pas vous dire grand-chose de plus… C’est une jeune femme très douce, jolie, bienveillante. Des cheveux blonds et une taille fine… mais je doute que cela vous intéresse !

Il avait bien besoin d’un peu d’humour, ce cher baron…

- Vous qui connaissez bien, j’imagine, le ciel, ici. Savez-vous combien de temps pourrais durer cet orage ? Il me semble pas qu’il s’éloigne…

Comme pour confirmer ses dires, un coup de tonnerre retentit non loin de la ferme. Hector hocha la tête.

- Ma pauvre Moto ne doit pas être rassurée…

La petite communauté allait peut-être devoir jouer aux Merelles plus longtemps que prévu...
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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyJeu 14 Nov 2019 - 19:49
- Victor de Rougelac, vous avez vu ce bon vieux Victor. Vous a-t-il fait bonne impression…

Mathilde détourna son regard un instant seulement. La vérité, c'était que le gouverneur lui avait laissé un très mauvais souvenir. Il avait incarné à merveille toutes les idées préconçues qu'elle s'était forgées au sujet des nobles, sur les dires de son père. Juché sur son fier destrier, il avait lancé de l'argent pour ne pas avoir à remettre l'aumône dans les mains des gens d'Usson. Il avait envoyé des œillades répugnantes à deux soeurs qu'il aurait sans doute volontiers couchées dans son lit, si leur père n'était pas arrivé à temps. Il avait déposé des propositions contradictoires sur la table, faisant de Mathilde tantôt une fournisseuse de denrées, tantôt une négociante pour le bourg. Un rapport de force s'était installé entre eux, sans que le ton jamais ne monte. Peut-être auraient-ils finis par s'entendre si le pain de Mathilde, qui cuisait alors dans le four d'Usson, n'avait pas menacé de brûler. Elle ne le saurait jamais. Mais déjà, le Baron enchaînait pour parler de Sombrebois, où deux de ses soeurs avaient pris époux. Elle hocha de la tête.

- Deux de mes soeurs y ont vécu, jusqu'à l'arrivée de la Fange. Je crois qu'elles ont aimé cet endroit, si différent du Labret.

Déjà à l’époque, il fallait un certain courage pour quitter le Labret fertile et s’en aller vivre de l’exploitation du bois. Le portrait, fort aimable, qu’Hector dressait de la prêtresse, ne parlait du courage qu’elle devait avoir eu pour choisir un jour de quitter l’apparente sécurité des murs de Marbrume afin de prêcher quelques ouailles au fin fond des marais désormais bien inhospitaliers. Mathilde y voyait un admirable esprit de sacrifice dont tout Sombrebois devait avoir conscience.

Le ciel tonnait encore alors que progressivement, la nourriture disparaissait de la table, et que le silence s’installait. C’est à peine si l’on percevait, à travers le léger jour des volets fermés, la lumière soudaine d’un éclair qui crevait le ciel. Inconsciemment, pendant un moment, chacun se mit à compter le temps qui séparait les éclats lumineux des grondements sourds du ciel. Jusqu’à ce que la voix du Baron résonne à nouveau. L’orage s’éloignait-il? A peine, si l’on se fiait au boucan que chaque coup de tonnerre faisait. Lentement, si elle se fiait au comptage du temps.

- Il finira par s’en aller. Parfois l’orage tourne autour des champs avant de s’en aller. Parfois il ne fait que passer.

- Je peux accompagner la monture à l’abri et rester dans la grange, le temps que ça passe. proposa Gauthier, sans doute un peu trop téméraire au goût des autres. Peut-être voulait-il bien paraître aux yeux du Baron. A moins qu’il n’ait une tendance suicidaire que Mathilde n’avait pas décelée jusqu’ici. Elle fronça les sourcils.

- C’est dangereux Gauthier. Si un fangeux rôde, tu n’auras pas le temps de te sauver de lui. Et nous ne pourrons pas te venir en aide, tu le sais.

- Oui Ma’, mais faudrait que le fangeux soit à notre porte. Le cheval de messire le Baron va couvrir mes pas. Ça prendra pas de temps! dit-il en s’approchant de la porte sans que personne ne le retienne. Il n’oserait certainement pas.

- Gauthier, tu…

Trop tard. Le jeune téméraire avait déverrouillé la porte et était sorti sous les trombes d’eau qui s’abattaient sur la campagne. Il lui fut assez facile de libérer Moto de ses entraves pour emmener la bête vers la grange, non sans scruter avec soin l’horizon. Rien ne bougeait. Derrière lui, Philippe avait refermé la lourde porte et ses deux verrous. Gauthier avait décidé de s’exposer au danger, mais ce n’était pas une raison pour que les autres, plus sages, le soient aussi. Par ce geste, l’homme savait qu’il condamnait peut-être son compagnon d’ouvrage à une mort atroce… et pourtant…

Dehors, alors que les nuages étaient régulièrement déchirés par les éclairs et que le tonnerre couvrait occasionnellement le pas du cheval peu rassuré, Gauthier mena la bête à l’abri sans qu’aucun fangeux ne se manifeste.* Il ouvrit la grande porte pour se faufiler dans le bâtiment, laissa Moto libre de circuler à l’intérieur pour s’abreuver ou planter son nez dans du foin, referma la porte derrière eux et grimpa l’échelle jusqu’au grenier pour se mettre en sécurité. Il attendrait, comme les autres, la fin de l’orage… non sans une certaine impatience. Tout trempé qu’il était, il rêvait maintenant de pouvoir sécher son linge devant les flammes de l’âtre de la cheminée.

A l'intérieur de la chaumière, c'est un silence de mort qui s'était abattu. On guettait le moindre cri de bête, le moindre gémissement humain. On n'entendit que le pas étouffé du cheval, dont les sabots frappaient le sol de terre, s'éloigner vers la grange. On attendit encore un moment. Le roulement du tonnerre avait masqué la fermeture de la porte, mais l'absence de cri de terreur finit par convaincre l'assemblée que Gauthier et Moto avaient trouvé refuge sans encombre. Alors seulement, on souffla de soulagement. On se remit à débarrasser la table, maintenant vidée des victuailles, on remplit quelques gobelets d'eau ou de lait, selon les préférences, et le jeu de Merelles retrouva sa place de choix au coeur des conversations des hommes. Quant à la fermière, elle se contenta enfin de s'asseoir.

- Nous n'avons pas vraiment trouvé d'accord avec votre gouverneur. Ce qu'il demandait dépassait largement mes capacités, je le crains. Et pour être parfaitement honnête, je crains qu'Alexandre de Terresang ne me fasse vivre un enfer s'il apprenait qu'une part de ma production s'en va dans votre bourg. Et les Trois savent que je ne voudrais pas subir le courroux Vicomte.

Elle sourit. Plus qu'un voisin, elle le considérait comme un ami, et appréciait sa compagnie. On aurait pu croire qu'elle se sentait redevable envers lui, mais la vérité était qu'elle aimait beaucoup la personne qu'il était au Labret. Simple, franc, sans chichi, et honnête avec elle. Sanguin et de mauvaise foi par moment, mais il supportait bien le manque total de tact et les écarts protocolaires de la fermière, elle pouvait bien se montrer patiente, elle aussi.

- Si vous souhaitez vous reposer, en attendant la fin de l’orage, vous pouvez monter. La paillasse que vous trouverez à droite est celle des invités, les draps sont propres. Je viendrai vous réveiller quand la pluie aura cessé.



*
La fois où Gauthier a eu le c* bordé de nouilles:



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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyMar 19 Nov 2019 - 12:59

La question sur Victor sembla gêner la propriétaire. Hector eut tout loisir d'imaginer l'impression que le noble mondain avait fait ici bas... Quel choc de deux mondes cela avait dû être !

Mais le sourire en coin du baron disparut aussi vite qu'il venait d'apparaître quand Mathilde lui apprit que deux de ses sœurs avaient vécu à Sombrebois... et, donc, y avait péri. Le baron fut attristé de cette "nouvelle" comme s'il avait oublié la tragédie de Sombrebois.

- Je suis désolé...

Bien sûr il n'était pas responsable de leur triste destin - son père était au pouvoir, à l'époque, et il n'avait pas eu vent du fléau qui arrivait - mais c'était ainsi, il avait hérité, en même temps que de ses terres, de la responsabilité de son peuple et des actions de ses aïeux. C'est pourquoi un certain sentiment de culpabilité l'habitait à présent. Evidemment, la raison de sa quête présente n'était pas pour le rasséréner non plus...

*

Hector tenta bien de rassurer Gauthier - "Elle survivra... ce n'est que de la pluie..." - mais le jeune homme semblait lancé dans une entreprise d'une telle importance - à ses yeux - qu'il ne l'écouta pas (ni sa maîtresse, d'ailleurs). Il partit mettre la jument d'Hector à l'abri tandis que ce dernier était partagé : il ne craignait pas vraiment que pour une minute, il courut un grave danger, mais pourtant, tous les hommes ici, semblaient retenir leur souffle... Hector resta donc silencieux et, bizarrement, par contagion et culpabilité, il finit par ressentir lui aussi la peur puis le soulagement de ses hôtes. Il devrait remercier le jeune homme dès que l'occasion se présenterait, notait-il.

Peu après, l'on débarrassa la table - activité à laquelle le baron prit part de bon cœur... malgré les regards surpris autour de lui - et, lorsqu'on lui demanda ce qu'il préférait boire entre l'eau et le lait, il choisit le lait. Il n'avait guère l'habitude d'en boire, aussi cela changeait-il un peu ! Ce n'est qu'à ce moment là, et pendant que les hommes retournait à la merelle, que Mathilde dit quelques mots au sujet de Rougelac :
- Nous n'avons pas vraiment trouvé d'accord avec votre gouverneur. Ce qu'il demandait dépassait largement mes capacités, je le crains. Et pour être parfaitement honnête, je crains qu'Alexandre de Terresang ne me fasse vivre un enfer s'il apprenait qu'une part de ma production s'en va dans votre bourg. Et les Trois savent que je ne voudrais pas subir le courroux Vicomte.

Hector acquiesça du chef, réfléchit un instant et répondit :
- J'suis pas là pour négocier quoi qu'ce soit et j'comprends votre situation... Ça ne doit pas être facile... avec... Terresang.

Terresang. L'évocation de ce nom avait donné le frisson à Hector. Il hésita un instant à enchaîner sur ce vil sujet ; à expliquer à Mathilde qu'il s'agissait là d'un bien fourbe assassin... mais il ne voulait ni détruire l'ambiance de la journée ni même s'énerver pour rien.

- Si vous souhaitez vous reposer, en attendant la fin de l’orage, vous pouvez monter. La paillasse que vous trouverez à droite est celle des invités, les draps sont propres. Je viendrai vous réveiller quand la pluie aura cessé.

Mmmh, la proposition était intéressante. Ces jours de voyage l'avaient fatigué plus qu'il ne l'aurait avoué et, avec la pluie... il était bloqué ici. Autant en profiter pour reprendre des forces. Seulement trouvait-il cela impoli.
- Vous êtes fort aimable, Mathilde. Je vous mentirais si je disais que je n'étais pas fatigué. Mais, vous savez, je me trouverais fort impoli d'aller me coucher séant... Je ne suis qu'un étranger après tout.

Mais la jeune femme lui fit comprendre qu'il n'avait pas à se sentir gêné.

- Alors j'accepte votre aide... une fois de plus ! Et voilà que je me sens redevable, maintenant !

Il avait le sourire. Son hôtesse avait réussi par sa bienveillance, sa simplicité et sa gentillesse, à mettre le baron en confiance et à lui faire oublier un peu la sombre raison de sa venue sur le plateau. Malheureusement, il n'avait plus rien à offrir à la jeune femme en échange de son aide... que de l'argent et il hésita à lui en donner séant... Il craignait que cela fut mal perçu. Aussi se contenta t-il de remercier une fois encore la jolie Mathilde et de rejoindre la couche indiquée. Il laisserait quelques pièces de monnaie à Mathilde et Gauthier le moment venu... En attendant, il se débarrassa de ses affaires les plus gênantes (bottes et chapeau principalement) et s'allongea sur la paillasse. La fatigue le précipita presque aussitôt dans les bras de Morphée (figure de sommeil d'une vieille religion oubliée). Et comme si les Dieux étaient du côté du baron, l'orage s'éloigna et la pluie se calma.

Dans son rêve, tout commença fort bien : Il cherchait la Rosa Lunae... et trouvait Kira, son ancienne amante aujourd'hui disparu. Ils faisaient l'amour parmi les fleurs rougeoyantes du Labret, à côté d'une falaise, au devant de la mer... et du ventre de la belle rousse naissait un bébé, une petite fille blonde dont le portrait était celui de Marie-Ange. La petite souriait avec bonheur et...
- Terresang ! Non !
Le vil vicomte était arrivé, sortant d'un trou d'arbre comme une chouette effraie, armé de son bras-épée et d'une arbalète qu'il pointait, les yeux rouge sang, vers le bébé. Kira, en mère aimante, se jetait au devant du carreau qui prenait la direction de son enfant et reçut le projectile en plein cœur.
- Kira, mon aimée !
Elle se vidait de son sang, tachant sa robe immaculée d'une longue traînée pourpre qui, bientôt, se rependait à l'ensemble du tissu.
- Tenez bon, je vais vous soigner !
Mais les mains d'Hector ne parvenaient à endiguer le flux rouge qui quittait le corps de sa belle amante dont les yeux verts viraient au gris et dont la peau prenait une teinte de plus en plus blanche. Elle mourrait dans ses bras...
- Terresang ! Assassin ! Je vais te tuer !

Il avait presque crié ces dernières phrases... et s'était redressé d'un coup, les yeux exorbités !
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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyLun 25 Nov 2019 - 16:12
Le noble était monté pour prendre du repos. Mathilde et les autres soupirèrent de soulagement dès que les premiers ronflements se firent entendre. Ils n'avaient pas commis d'impairs, jusqu'ici, et pensaient s'en sortir suffisamment bien que pour ne pas craindre des représailles. C'était un peu ça que l'on craignait, quand on accueillait un noble : si on lui déplaisait, si on commettait un impair, consciemment ou non, on risquait de tout perdre en un claquement de doigts. Si le noble avait l'oreille du roi, la vie s'arrêtait. C'est ce que son père lui avait dit, et ce en quoi Mathilde croyait.

On se détendit réellement dans la chaumière, et pendant quelques instants, la vie reprit dans la pièce principale.

- Vous savez, les gars, j'y ai bien réfléchi et je crois qu'on devrait le faire. On devrait aménager la maison pour vous. Je ne peux pas imaginer vous loger l'hiver prochain dans la grange, si bien aménagée soit-elle. La maison est plus chaude, il ne manque qu'un accès au grenier et une parois pour séparer les chambres, et tout le monde devrait y trouver son compte.

Murmure d’approbation. Jusqu’ici, personne n’avait osé évoquer cette possibilité, hormis Mathilde. La fermière avait toujours farouchement refusé qu’on emménage chez elle, chérissant sa liberté autant que son travail. Pourtant, la présence des gars lui était devenue familière. Ils étaient autant de jeunes frères dont elle s’occupait avec bienveillance. Les premières semaines avaient été difficiles, il avait fallu s’acclimater, mais plus le temps passait, plus leur présence devenait naturelle. Ils avaient pris leurs aises, sur la terre et dans la chaumière, si bien qu’on put croire qu’ils formaient une véritable famille au sein de laquelle chacun avait sa place et son rôle. Mathilde était la grande sœur, la petite mère, la chef de famille, et se plaisait dans ce rôle. Il ne manquait qu’une paroi pour séparer le grenier en deux, et un second accès par le plancher. Deux jours de travail et quelques planches pour garantir la sécurité et le bien-être de tous. C’était une bonne idée. Il suffirait d'y travailler durant les jours de pluie. Avaient-ils encore quelques planches?

La fermière fut tirée de ses réflexions par la voix du Baron. D’abord à peine articulés, les mots prononcés gagnèrent en clarté. Le Baron rêvait-il? On se regarda, un instant seulement, avant d’agir.

***

Lorsque le Baron de Sombrebois ouvrit les yeux, il découvrit d’abord une fourche pointée vers son nez. Le cœur battant, Mathilde se tenait devant lui, prête à frapper. C’était aussi le cas des quatre gars restés dans la chaumière. L’instant d’avant, tous s’étaient munis d’armes de fortune. Poêle en fonte, bûche, bâton… La fermière avait saisi la fourche qui lui avait été remise à Marbrume et qu’elle n’avait jamais utilisée. Ils étaient montés en entendant les cris gagner en intensité. Tous redoutaient la même chose : faire face à une goule en pleine mutation.

- ...

Quelqu’un osa finalement approcher du Baron pour poser une main sur son front. Il était chaud, mais peut-être était-ce dû aux cauchemars. Mathilde, de toute évidence en proie à la panique, desserra les dents.

- Je... désolée. Ça va, les gars. dit-elle en baissant la fourche, rapidement imitée par les autres. La petite famille avait réalisé que leur hôte était peut-être un mordu. Or, on se méfiait des mordus comme de la peste, depuis que le roi les avait envoyés hors des murs de la ville. La prudence, la vraie, eut été de lui demander de montrer son bras, et de lui demande ce qu’il en était des morsures. La bonne humeur cédait maintenant le pas à la méfiance. La fermière reprit.

- La pluie a cessé et le ciel est maintenant dégagé. Nous allons reprendre nos activités au dehors. Gauthier s’occupe déjà de votre cheval, vous pourrez reprendre votre route vers l’Est pour rallier Usson, dès que vous serez prêt, monseigneur. Désolée pour ce réveil quelque peu… incongru?

Timide sourire de la fermière, visiblement mal à l'aise, alors que les gars s’inclinent et descendent, un à un.

- Souhaitez-vous que je vous prépare quelques provisions pour la suite de votre voyage?
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Hector de Sombrebois



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MessageSujet: Re: Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector]   Luna Rosae, épisode 1 [PV Mathilde & Hector] EmptyMer 27 Nov 2019 - 10:51
En sursaut il se réveilla... et les armes de fortune, pointées vers lui, ne l'aidèrent pas à retrouver la sérénité qu'il eut souhaité, après son terrible cauchemar.

- Mais qu'est-ce que... ? Qu'ai-je... ? balbutia-t-il.

L'un des garçons toucha son front et la fermière donna l'ordre à chacun de reculer...
- Je... désolée. Ça va, les gars. La pluie a cessé et le ciel est maintenant dégagé. Nous allons reprendre nos activités au dehors. Gauthier s’occupe déjà de votre cheval, vous pourrez reprendre votre route vers l’Est pour rallier Usson, dès que vous serez prêt, monseigneur. Désolée pour ce réveil quelque peu… incongru ?
- Aussi incongru que mon rêve... Bons Dieux... j'espère que je me suis assez requinqué... mais j'ai pas c't'impression... enfin... Si le temps est de nouveau soleil, je vais en profiter, en effet !


Il se leva et reprit ses affaires.

- Souhaitez-vous que je vous prépare quelques provisions pour la suite de votre voyage ?
- Vous êtes trop bonne, mademoiselle Mathilde... mais vous avez déjà fait beaucoup pour moi... beaucoup plus que ce que j'ai pu vous donner en échange. Et puis je trouverai à Usson de quoi survivre... Mais merci pour la proposition.Vous êtes bien aimable...


Les deux propriétaires terriens descendirent et, là, dans la pièce de vie, Hector se souvint de l'idée qu'il avait eu précédemment. Discrètement, il sortit de sa bourse deux pièces d'or qu'il garda dans sa main.

- Le moment des adieux est arrivé, Mathilde. Je vous souhaite une bonne continuation. Bon courage. Je me doute que ce que je vais vous dire a peu de chance de se réaliser vu la distance qui nous sépare... mais si un jour Sombrebois peut vous être utile, n'hésitez pas à venir me quérir. Alors je vous aiderais. S'il vous plait, donnez cette pièce à Gauthier de ma part. Avec le risque qu'il a pris tantôt, il est normal que je le remercie... et je crains qu'il n'accepte rien de ma part.

Il posa sa main sur l'épaule de la jeune femme et hocha la tête en guise d'adieu. Il lança un au revoir général aux hommes ici présents, puis sortit récupérer sa jument, donnant à Gauthier une pièce d'or pour Mathilde "car elle n'accepterait pas, j'en suis sûr, ce présent !". Il grimpa sur les étriers de la bête, arborant un air fier et décidé.

Il était grand temps de poursuivre l'aventure ! Il tâta la hache de guerre dans son dos et sa hachette à la ceinture. Il avait tout, même son baluchon avec les graines de la fermière. Il sourit aux hôtes présents sur le perron de la ferme avant de lancer Moto au trot, vers l'Est, en direction de la plus importante ville (au moins à ses yeux) du Labret. La route serait encore longue - et sûrement semée d’embûches - jusqu'à la Rosa Lunae, mais cette petite halte chez la gentille fermière l'avait revigoré.

Hourra pour Sombrebois... fit-il à l'oreille de sa chère Moto.
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