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 [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]

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Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



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MessageSujet: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptySam 16 Mai 2020 - 23:06
25 octobre 1166
Crépuscule
Manoir de Valis



Le retour du port avait été difficile. Compliqué. J’ai traîné dans les rues toute la journée, le cœur lourd, l’esprit traversé de mille pensées contradictoires et de millions de suppositions dont aucune ne m’apportait la moindre satisfaction ou le moindre début de réponse. Impossible de rentrer de suite, j’étais dans l’incapacité de parler, de manger ou de faire quoi que ce d’autre si ce n’est marcher, encore et encore, jusqu’à ce que la douleur de cette marche sans but se fasse sentir en mes pieds. C’est donc le visage fermé que je réintègre le manoir, passant par les cuisines.

Le panier. Le panier et les poissons. Tout est resté là-bas. Fermant un instant les yeux de dépit, j’inspire profondément, avant de me servir rapidement un verre d’eau, le cœur au bord des lèvres, comme souvent ces derniers temps. Sûrement cette succession d’événements. Les Dieux ont donc décidé que je serai à jamais incapable de gérer correctement mes sentiments et mes émotions. Je dépose le verre sur la table et sors de l’office pour rejoindre ma chambre. Notre chambre là haut. Et malgré mon désir de m’enfermer pour réfléchir, mon corps lui préfère m’annoncer que je n’irai pas plus loin à ce rythme. Un point de côtés, consécutif à toute une journée de marche erratique, se manifeste m’empêchant de continuer. Contrite, je prends donc tout mon temps, m’arrêtant de temps à autre afin d’inspirer et d’expirer, jusqu’à ce que je parvienne à atteindre ma chambre.

Il y a de la lumière.

Il y a une silhouette assise sur une des chaises, assoupie.

Il y a Jehan.

Je souris en fermant la porte avec d’infinies précautions et m’approche de lui en silence. Il est fatigué. Très fatigué. Je le vois à ses traits, je le vois à ses cernes, et le fait de s’endormir sur un support aussi peu confortable alors que notre lit est juste à côté ne fait que corroborer ce que je vois. Debout à côté de lui, je ne peux m’empêcher de poser mes doigts sur ses cheveux, passant mes doigts dans ses boucles, tout en savourant avec un plaisir sans cesse renouvelé sa présence à mes côtés. Une présence qui s’officialisera bientôt. Me penchant vers lui, je dépose alors sur ses lèvres un délicat baiser afin de lui signaler ma présence.

- Je suis rentrée, mon amour…, dis à son oreille, attendant qu’il ouvre les yeux.

Dehors, le soleil a presque disparu, laissant une fine traînée rouge orangé sur l’horizon. Il est plus tard que je ne le pensais. Caressant la joue de mon fiancé avec une ébauche de sourire peu convaincant, je dis alors :

- Excuse-moi de ne pas être rentrée plus vite. J’ai fait une rencontre tellement improbable que j’ai eu besoin de me dégourdir les jambes et l’esprit afin de m’en remettre.

Je prends sa main et la porte à ma joue, inspirant profondément avant de déposer un baiser sur ses doigts, comme j’en ai l’habitude de le faire.

- Est-ce que tu crois que les Trois peuvent se jouer de nous ? Est-ce que tu penses que nous devons souffrir encore et encore, pour mériter une vie meilleure…après ? Parce que c’est ce que je ressens, au fond de moi. Comme si cette vie n’était qu’une succession d’épreuves pour éprouver notre foi, tous les jours. Ou alors, peut-être est-ce moi qui deviens folle. J’ai du mal à rester concentrée ces derniers jours, j’ai tout le temps envie de pleurer. Peut-être que je vois trop de noir partout, alors que tu es là. Qu’Irène est là. J’ai pensé à cela toute la journée et je ne suis pas plus avancée…je suis terriblement brouillonne, excuse-moi…
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Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyLun 25 Mai 2020 - 17:43
Comme chaque fois, le trajet est exténuant. Pas tant pour sa longueur qui ma foi est des plus raisonnable. Non, c’est la tension, la peur et le danger omniprésent qui font de chaque mètre parcouru une épreuve. Pourtant il s’arrange toujours pour accompagner la milice ou un convoi avec assez de garde pour une relative sécurité, mais rien n’y fait. Quand c’est la fange qu’on affronte, une armée ne change rien à ce sentiment d’impuissance qui les habite tous. Il n’a pas encore eu le malheur de tomber sur l’un de ses représentants. Sans doute ne serait-il plus là pour le raconter. Mais tout à l’extérieur rappelle que c’est maintenant leur territoire et plus celui des hommes.
Au début la sensation disparaissait presque complètement lorsqu’il arrivait au labret, à leur maison. Il s’y sentait en sécurité alors même que les murs demandaient d’être renforcé et le toit réparé. C’était chez eux, une place forte de bonheur dans un monde de tristesse.

Mais à présent, même cet endroit semblait empli de ses doutes, car il n’y ressentait plus que le manque de sa moitié. Elle n’était pas encore venue, elle cherchait une façon d’apporter sa pierre à un édifice qu’il n’était pas certain de comprendre, et pour cela elle devait rester dans la cité. Alors lui faisait les allers-retours. Il avait installé la porte construite par le père de Flore en suivant au détail près ses indications. Remis en place les lattes, débouché la cheminée, rempailler le toit et la paillasse de leur nouveau lit.
Il avait aménagé l’espace qu’elle pourrait utilisée pour ses potions près de l’âtre, et commencé à déblayer leur terrain pour planter prochainement. Il aurait besoin de l’aide d’un ou d’une professionnelle du métier pour cela. Mais en attendant, la seule chose qui manquait pour que la vie s’épanouisse ici, c’était la propriétaire.

Il essayait de comprendre, et la soutenait en chaque instant, mais un doute s’insinuait en lui parfois. Il voyait son regard triste et sentait la peine qui l’animait toujours. La libération qu’il avait ressentie quand Irène leur avait trouvé un endroit où vivre, ici, ensemble, semblait n’appartenir qu’à lui. Et il ne savait comment aider celle qu’il aimait à abandonner définitivement ses démons. Alors il faisait au mieux, il essayait de lui donner l’envie sans la forcer, la faire sourire aussi souvent qu’il le pouvait. Quand il revenait du labret, il ne se dédiait qu’à elle et à leurs moments privilégiés. Et par-dessus tout il essayait de la comprendre sans la juger.

Pousser la porte du manoir fut une sensation étrange, comme chaque fois depuis qu’il avait quitté les services de la comtesse. Il ne la voyait pour ainsi dire plus. Il aurait pu s’en offusquer sans doute, mais il voyait dans les rares moments où ils échangeaient un regard, toute la peine qu’elle ressentait à les voir partir. Alors il se taisait et la remercier en silence de ne plus lui imposer de sordides devoirs alors même qu’ils profitaient de son hospitalité.
Malgré ses défauts et l’horreur de ses objectifs, elle n’avait pas le sens de la cruauté.

Il grimpa les escaliers et poussa la porte sur une chambre… vide. Il envisagea de gagner la cité pour la trouver, mais il savait que c’était stupide et voué à l’échec. Il allait l’attendre, et la serrer dans ses bras quand elle serait enfin auprès de lui. Il s’assit et ferma les yeux, juste un instant, pour reposer ses paupières.

Ce sont des lèvres douces sur les siennes qui le tirèrent de son sommeil. Il reconnu instinctivement le baiser de sa compagne, et sut dire sans même ouvrir les yeux qu’elle était triste. Comme chaque fois que c’était le cas, ses baisers avait le gout d’amertume malgré leur tendresse infinie. Il ouvre les yeux alors qu’elle caresse sa joue, et découvre son sourire penaud qui le peine grandement avant même d’en connaître la raison. Elle n’a pas beaucoup d’effort à faire pour soulever sa main tant le contact de sa peau lui est impératif, comme chaque fois qu’il la retrouve.

Non je ne crois pas ça, pas depuis que je te connais. Je crois que la vie est faîtes de milliers de choses et que certains y vivent plus d’épreuves que les autres. Mais que la foi n’a rien à y voir. Les trois nous regardent, mais je ne suis pas certains qu’ils éprouvent de l’amour ou de la haine, peut-être même pas de la considération. Je crois qu’ils nous laissent tout ça pour voir ce qu’on en fait. Pour ma part, j’ai choisi l’amour. Ton amour. »

Il se redresse et la serre dans ses bras comme il en a rêvé toute la journée. Elle tremble presque, tout en elle indique l’épuisement. Il la soulève alors de ses bras puissants et s’installe sur le lit avec elle. Pas comme l’amant passionné, mais comme le tendre compagnon. Il délasse ses chaussures doucement et entreprend de lui masser les chevilles et les mollets sans cesser de la détailler.

Raconte-moi. » lui propose-t-il.
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Flore MaisonfortHerboriste
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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyLun 25 Mai 2020 - 22:54
Dans ses bras, je me sens en sécurité. L’impression affreuse qu’a laissée cette journée au fond de mon cœur semble se diluer dans le regard de mon fiancé qui me transporte jusqu’à notre lit. Attentionné et prévenant, il ôte mes chaussures et entreprend même de me détendre. Il sait très précisément ce qu’il doit faire pour y parvenir et je ne peux que remercier, une millième fois au moins, les Trois d’avoir placé un tel homme sur ma route. Soutenue par les oreillers, je le regarde avec un sourire. Il est aussi fatigué que moi, si ce n’est plus, et il s’entête à vouloir prendre soin de moi. Une bouffée d’amour m’enveloppe à nouveau, rien qu’à le regarder. Je l’aime, cet homme. Tellement…

- Je suis allée au Port ce matin. Je voulais préparer le repas pour tout le monde, récréer cette recette à base de poisson de l’autre jour, que j’ai trouvé si merveilleuse…Alors, j’ai pris un panier, les petites pièces de mon petit bas de laine et je suis allée sur les quais. C’était le matin, les bateliers venaient de rentrer au port, il y avait plein de poissons frais…

J’inspire profondément alors qu’il passe ses doigts sur la plante de mon pied droit. C’est douloureux. Pas insupportable, mais douloureux.

- Mère me chantait une berceuse, une berceuse qui parle de marins, de batailles, une chanson qui donne du courage. Je l’ai fredonnée en regardant les beaux grands bateaux qui se trouvaient à quai un peu plus loin. Et c’est là que ça a totalement dérapé. Comme si je vivais quelque chose de totalement surréaliste…

Le souvenir de Molaire me revint en mémoire. Je ne pus m’empêcher de grimacer.

- Je n’ai pas vu de suite d’où venait le coup. Un homme m’a jetée au sol, rejoint par un autre, et encore un autre…Ils étaient nombreux, je ne saurais te dire le nombre exact mais ils étaient nombreux et se sont tous mis à cracher à mes pieds, comme si j’étais la dernière des putains de cette ville…C’était ignoble. M’entendre chanter cela, ça les a mis en rogne. Apparemment, les femmes n’ont pas le droit de la chanter, de ce que j’ai compris, mais comment pouvais-je le savoir ? Ma mère me chantait cela parfois pour m’endormir…

Je finis par m’écrouler totalement sur les oreillers, le ventre malmené par un malaise soudain. N’y prêtant aucune attention, du moins pas plus d’attention que les autres fois, je m’allonge sur le côté et continue, pensive :

- Un homme est intervenu. Leur meneur. Jehan…

Consciente de l’énormité de ce que je vais dire, je prends un instant afin de mesurer mes mots et n’en trouvent pas de plus adéquats que :

- Jehan, c’était Henri. C’était mon frère.

Le souvenir de ce visage si dur, si fermé, semblable trait pour trait à celui de mon grand frère adoré, me revient. Le regard qu’il m’a jeté était en tous points pareil à celui d’Henri. Même sa voix est semblable et pourtant…pourtant ! Il y avait en cet homme rencontré sur les quais une violence à peine contrôlée, quelque chose qui semble être sur le point d’exploser à chaque instant. Comme si la colère couvait dans ces yeux-là. Une colère inassouvie.

- Je sais ce que tu vas me dire. Mais Jehan, je t’assure que c’est lui. Il avait le visage, la voix, le regard, même des intonations de mon frère. Il a juste…changé. Il est agressif, violent, grossier, il n’a pas réagi quand je lui ai dit que notre mère est morte. Il n’a pas réagi non plus quand je lui ai demandé si notre père était avec lui. Il a agi comme s’il ne me connaissait pas. Jehan, ça m’a brisé le cœur en deux.

Le souvenir est frais et vivace. J’inspire longuement pour calmer ce tumulte en mon estomac et ajoute :

- Mon amour, je t’assure que c’est la vérité. Crois-tu qu’il soit possible qu’il ait survécu à cette attaque de la fange, d’une manière ou d’une autre, et qu’il aurait ensuite perdu la mémoire ? Ce serait possible selon toi ?
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Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyDim 31 Mai 2020 - 19:45
Il sent son corps se tendre alors que les mots quittent Flore. Une colère sourde, froide, prête briser le monde lui-même. Voilà ce qu’il ressent alors qu’elle lui avoue qu’on lui a fait du mal. Qui ? Comment ? Il pense déjà à la manière de les retrouver. De leur faire du mal au centuple, puis de les tuer ne leur murmurant le nom de sa promise. Le désespoir dans la voix de l’amour de sa vie chasse les ténèbres de sont cœur, le ramène à l’instant présent. Il ne peut plus se permettre d’agir inconsidérément. De frapper brutalement sans se soucier des conséquences. Car aujourd’hui sa vie ne lui appartient plus. Il ne peut plus la gâcher, il ne veut plus la gâcher. Non, il a déjà massacré les gorlois, sans hésitation, et privé à celle qu’il aime d’une vie paisible dans les faubourgs. Non, une vie à deux se fait à deux.
Et à cet instant, ce n’est pas la vengeance que cherche Flore. Uniquement le soutient et la compréhension de son partenaire. Les mains posées sur ses mollets, il caresse doucement la peau en songeant à ses paroles. Tentant d’imaginer comment celui qu’elle croit être son frère pouvait à présent se comporter comme un rustre et un inconnu dans le port.

Tu n’as pas besoin de me convaincre Flore. Si tu me dis que tu l’as vu, je te crois. Tu n’irais pas inventer ce genre d’histoire. »

Il gratta machinalement sa barbe de trois jours en réfléchissant à sa demande.

J’ai vu par ma vie des choses plus surprenante que cela. Alors oui, sans affirmer que c’est lui. Je crois possible qu’il s’agisse de ton frère disparu, car tout est possible. Mais tu admettras que c’est improbable. Peut-être ce qu’on appelle un jumeau ? Ce n’est peut-être pas Henri, mais… »

Il baissa les yeux pour regarder Flore dans les yeux. Conscient que sa théorie à lui n’était pas beaucoup plus réjouissante que celle de sa compagne. En éliminant la perte de mémoire, il créait le mensonge dans la famille.

… Un frère inconnu, élevait séparément. Mais quand tu me parles de tes parents, j’ai du mal à les imaginer priver de leur affection et de leur présence un enfant. Il aurait fallu un cas de force majeure à l’époque. Ou amnésique… j’ai connu quelques soldats ayant vécu ce genre de chose après un choc physique ou mental. Certain ne se souvenait ni de leurs femmes ni de leurs enfants. Mais généralement, ça revenait. Il est tout sauf stupide d’imaginer qu’il est pu subir un tel choc ce jour-là mais… »

Son esprit efficace étudiait déjà ce qu’elle lui donnait comme élément, incertain de trouver le bon cheminement, mais dans son esprit des morceaux s’assemblaient pour former un tableau. Qui ne réjouirait peut-être pas Flore lorsqu’il lui décrirait. Mais il avait fait la promesse ne plus jamais avoir de nouveaux secrets pour elle. Alors il reprit la parole, avec douceur.

Tu dis qu’ils t’ont agressé uniquement pour la chanson ? Et qu’ils se sont arrêtés sous ses ordres ? Aucun marin n’apprécie de voir une femme reprendre leurs chants. Mais peu seraient-ceux qui s’en prendraient à toi pour cela. Encore moins en groupe… sauf… les plus radicaux. Ceux qui passent des mois en mer, du moins le passaient. »

Il s’avança quelque peu et pris la main de sa compagne, les jambes de celles-ci posées sur ses genoux. Il sentit ses doigts frais sur sa peau et entrepris de les réchauffer. Son corps semblait toujours agir naturellement avec elle. Prendre soin d’elle semblait être un réflexe au même titre que de cligner des yeux.

Mon amour… Ton père passait beaucoup de temps en mer dans ta jeunesse ? Je parle de tes plus vieux souvenir. Te souviens-tu vivre ailleurs qu’à Marbrume ? Peut-être que tu te souviens de longues périodes où il n’était pas présent ? »
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Flore MaisonfortHerboriste
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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyMar 2 Juin 2020 - 0:18
Je ne sais pas ce que je préfère : rester dans l’ignorance ou entendre des suppositions qui me terrifient. Parce que je suis littéralement terrifiée par ce que dit Jehan. Si ce n’est pas lui, ce serait donc un frère jumeau ? Mais…

- Un jumeau ? C’est impossible, Mère…

Je me tais. Je le regarde et me redresse sur un coude, tout en plissant les yeux. Que mon frère ait pris un coup sur la tête et qu’il ait survécu grâce à une chance insolente et presque divine tout en oubliant tout ce qui a fait sa vie m’est tout à fait envisageable mais pas cette autre possibilité. Pourquoi ? Parce que cela voudrait dire que mes parents, ces êtres aimants et attentionnés, auraient délibérément abandonné un enfant. Cette perspective me broie le cœur encore plus que mon estomac, que je sens d’ailleurs se rebeller.

- …Mère n’aurait jamais fait ça.

Cela étant, je suis ébranlée dans mes certitudes tandis que Jehan apporte son éclairage à cette situation étrange. Ma mère était la douceur et la bonté même. En supposant même que cette théorie soit exacte, cela voudrait donc dire qu’elle a laissé derrière elle un petit enfant, sa propre chair, pour venir s’installer dans les Faubourgs. C’est tellement atroce d’imaginer une telle séparation que des larmes me montent aux yeux sans que je ne puisse les empêcher de couler. Mère adorait Henri, au-delà de toute raison, elle le chérissait de tout son cœur. Et me regardait souvent d’un air résigné. Je pensais que c’était à cause de mon sexe et de tout ce que j’aurais à subir dans les Faubourgs pour me faire ma place. Et si, derrière cette tristesse affichée en ma présence, il y avait autre chose ? Un autre petit gars laissé les Trois seuls savent où et pour je ne sais quelle raison ? Un petit gars laissé là à son propre sort ? Un petit gars que les Trois auraient placé sur ma route ? J’essuie mes yeux d’un revers de la main et dit enfin :

- Je ne savais pas pour les chansons de marin…C’était une berceuse que me chantait maman quand j’étais malade, pour me donner du courage. Une berceuse, Jehan, je n’ai jamais vraiment pris conscience des paroles jusqu’à ce que ce vieux marin aux dents pourries me crache dessus.

J’ôte mes jambes de dessus Jehan et me recroqueville dans notre lit, les yeux fermés, tout en gardant la main de mon fiancé dans la mienne.

- Les marins les plus radicaux…Tu veux dire…les pirates ?

Je sens ma gorge s’assécher en me remémorant ce que j’ai vécu ce matin même. Serait-il possible qu’il ait raison ? Que cet homme serait un membre abandonné de ma famille ? Un membre qui a perdu son chemin au point de se lancer dans une vie condamnable ? Je ne peux y croire et pourtant il y a des détails qui laissent à penser que Jehan pourrait tenir une piste. L’attitude du batelier, ses regards fuyants, ses conseils me demandant de quitter les lieux au plus vite, ces marins crasseux, aux dents moisies…Et lui. Lui qui commande tout cela.

- Mon frère était beau. Cet homme que j’ai rencontré ce matin, lui, le serait tout autant s’il n’avait cette marque toute rouge en travers de la figure…mais il parle comme Henri. Il a le même regard qu’Henri. La même voix, la même façon de bouger. Je ne sais plus quoi penser, cela me rend folle.

J’attire alors Jehan à moi afin que je puisse me blottir contre lui et me réfugier dans ses bras, le seul endroit sur cette terre où je puisse me ressourcer sans craindre le reste du monde.

- Je suis née dans les Faubourgs. Mais…pas Henri. Je me rappelle qu’un soir il avait posé la question à Père et qu’il s’est fâché en disant que non. Je sais que père partait parfois longtemps mais je n’ai jamais su ce qu’il faisait, ni où il allait. Je sais aussi que mes parents viennent d’ailleurs, ils ne proviennent pas de la cité, ni des faubourgs mais je ne sais rien de plus…Peut-être qu’à tête reposée, d’autres choses me reviendront…mais là…

Je le serre au plus près, bouleversée.

- Et si c’est vraiment mon frère, Jehan…Que faire ? Est-ce que je dois faire comme s’il n’existait pas ? Le nier ? Je ne pourrai jamais…J’aimais mon frère et sa disparition est toujours douloureuse. Imagine ce que j’ai ressenti en vivant tout cela tout à l’heure…Je voulais le prendre dans mes bras et tout ce qu’il a fait, c’est me cracher dessus et me repousser…
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Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyMar 2 Juin 2020 - 18:07
Il inspire profondément avant de répondre.

Oui, des pirates. Pour eux, les chants sont presque des rituels, alors il serait aisé de déclencher leur courroux pour avoir profaner ce qu’ils considèrent comme à eux. Note bien qu’il ne s’agît que d’une supposition. Je cherche à comprendre, et à t’offrir mes connaissances en la matière. Mais je ne suis pas marin, je n’ai eu l’occasion de les fréquenter que pour les affaires d’Irène. Ne concluons pas sans savoir, mais ne nous fermons pas à cette possibilité. »

Il y a cette idée de balafre rouge qui semble selon lui correspondre à la possibilité d’une blessure ou d’un choc pouvant justifier une quelconque amnésie. Mais un pirate a tout autant l’occasion de se retrouver meurtri d’une blessure pendant un pillage en réalité. La vérité est simple. Ils ont trop peu d’éléments pour espérer mettre a jour le secret de cette rencontre. Si Flore souhaite connaître la vérité, ils devront cherchez plus avant, enquêter, étudier, puis en fin de compte, approcher ce frère sans souvenir.

Il se laissa attirer contre sa bienaimée, prenant place à ses côtés, et l’attira contre lui. Une main sur sa hanche, l’autre glissée sous sa tête caressant avec tendresse et patiente ses cheveux. Il lui permit de se blottir dans tout l’océan d’amour qu’il ressentait pour elle. Un bouclier face au monde. Ensemble, ils étaient plus fort que tout. Il ne répond pas trop vite, il songe, chaque mot est important. Car la vie de Flore est importante.

Tu as besoin de temps. Tu viens de vivre une épreuve des plus particulière et ton esprit va avoir besoin de temps pour assimiler cela. Peut-être ta famille a-t-elle un passé plus complexe que tu ne le croyais. Peut-être ton frère est-il vivant mais plus maître de son propre corps. Mais cela ne change rien à la personne que tu es toi. »

Ses doigts quittèrent ses cheveux pour effleurer tendrement sa joue avant qu’il ne dépose un doux baiser sur ses lèvres fébriles pleines d’émotion contenu.

Ce qu’il convient de faire, ce sera à toi de le décider, après du repos et de la réflexion. Si ton frère est encore en vie, et que tu souhaites le revoir, alors nous le trouverons. S’il s’agit de quelqu’un d’autres, nous le découvrirons aussi si c’est ce que tu souhaites. Mais il faudra agir prudemment, il n’est visiblement plus la même personne que tu as connu et aimé. Tu ne peux pas espérer que sauter dans ses bras et le couvrir de ta tendresse suffira à le ramener. Il faudra lui prouver, et comprendre ce qu’il a vécu.
Il te repoussera sans doute encore avant que nous ayons pu comprendre la vérité.
C’est une tâche de longue haleine, et qui te fera certainement souffrir. Il te revient de décider si tu veux t’y engouffrer. Une vie nous attend ailleurs, elle nous attendra encore si tu as besoin de temps. Je serais à tes cotés dans tous les cas.
»

Il lui sourit avec tendresse, conscient qu’il ne parviendrait pas à chasser tout ses démons par de simple paroles, mais bien décidé à essayer dans tous les cas. Il l’embrassa encore, avec chaleur, heureux malgré lui de la retrouver dans ses bras après ces longs jours loin d’elle.

Tu ne résoudras rien ce soir, alors prends le temps de la réflexion et du repos. Nous aviserons quand tu auras la conviction ou le besoin de savoir. »

Il songea à nouveau à l’idée qu’on ait souillé sa bien aimé, crachat et humiliation, et du refouler une nouvelle vague de colère. Même amnésique il s’imaginait mal pardonner à ce frère un tel comportement. Doucement, avec une infinie douceur et complicité, il entreprit de déboutonner la robe de Flore afin d’éloigner le vêtement souillé de sa femme. Elle ne méritait aucun traitement de ce genre. Uniquement tendresse, passion et amour. Trois choses dont il débordait pour elle.

Veux-tu prendre un bain ? Ou boire une boisson chaude ? Laisse-moi t’aider à te détendre, même si je sais que ton bel esprit va y réfléchir sans cesse, je veux pouvoir t’offrir un peu de confort et d’attention. » Dit-il alors qu’il la libérait doucement de la prison de tissu sans jamais cesser de la serrer contre lui.

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Flore MaisonfortHerboriste
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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyMar 2 Juin 2020 - 22:20
- Irène est en affaires avec des pirates ??

Si cela est avéré, Irène pourrait peut-être en savoir plus, me donner un nom, quelque chose, n’importe quoi ! Une petite lueur d’espoir s’allume en mon esprit confus avant que de sombres pensées ne m’envahissent à nouveau. Irène…En affaires avec des pirates ? Je secoue la tête. Non, évidemment que non. Ma tendre Irène au cœur dévoré par des démons ne ferait probablement pas cette erreur, compte tenu de son statut.

- Je ne chanterai plus alors…Je ne sais pas ce qui m’a pris…les bateaux étaient à quai, magnifiques et magiques. J’ai pensé à cette chanson, sans penser à mal. Je ne la chanterai plus.

Le sourire de cet affreux Molaire me revint alors en mémoire. Quel horrible monsieur. Le vilain homme. Dans un moment de panique à l’évocation de ce visage odieux, je me cache contre Jehan, heureuse que mon bien-aimé soit présent et à l’écoute, sans poser de jugement. Il me laisse du temps tout en me donnant son avis et des conseils judicieux. Et c’est réellement tout ce dont j’ai besoin en cet instant précis.

- Je ne peux pas te l’expliquer, je le sens dans mon cœur, c’est mon frère. Qu’il ne m’ait pas reconnue est une sensation terrible, un peu comme si je n’étais rien du tout. A peine le petit caillou qu’on repousse du bout de sa chaussure.

Cela étant, cette désagréable sensation s’efface, comme par magie, sous un baiser de mon fiancé. J’ai la chance exceptionnelle de partager la vie d’un homme qui m’aime et que j’aime de tout mon cœur. Je préfère donc laisser ce sujet de côté pour le moment même s’il a raison sur un point : je ne pourrai probablement pas cesser d’y songer à moins d’obtenir une ou deux réponses, un indice, n’importe quoi qui me permettrait d’en savoir plus au sujet de cet homme au regard intense, semblable au mien, rencontré le matin même sur les quais du port.

Je sens la main de Jehan qui cherche à me débarrasser de ma robe. Il a raison…La journée a été difficile et enlever ma robe sera un peu comme enlever le poids de ces heures perdues en réflexions totalement inutiles. Il n’y a rien de plus que de la tendresse et un sincère désir de prendre soin de moi, je le sais. Pourtant, l’idée même de la tisane me répugne. Je n’ai pas très faim.

- Peut-être qu’un bain…Oui…Mais il est tard déjà et peut-être qu’Irène occupe déjà la salle d’eau. Sans parler d’Alice qui va pester parce qu’on la dérange pour de petits caprices…

Je ne peux m’empêcher de rire en songeant à cette dame si furtive, si rapide, qui sait tout, voit tout et entend tout. C’est une femme extraordinaire, comme à peu près tout ce qui se trouve sous ce toit, d’ailleurs. Même si je sais que la comtesse d’argent ne serait pas du tout de mon avis, cet endroit est pour moi une source inépuisable de magie, un endroit où tout est possible, un endroit où il est possible d’obtenir ce que l’on veut, en tout temps. J’aime cet endroit. Me serrant un peu plus près de Jehan, en chemise, je dis alors, pensive :

- Il faut que je te parle d’autre chose, mon amour. Même si je sais que tu vas probablement totalement désapprouver…J’ai trouvé un petit travail. Pour avoir de quoi apporter ma petite part à la construction de notre vie.

Je joue avec sa chemise, pensive.

- Je ne veux pas partir d’ici sans rien avoir à offrir. Alors je suis allée voir une dame qu’on m’a renseignée, afin de voir si une place était toujours disponible. Il s’agit de faire la cuisine, dans un établissement qui s’appelle la Bonne Fortune. Tu le connais ?

Honnêtement, je préfèrerais qu’il ignore tout de la Bonne Fortune, à cause de sa mauvaise réputation, mais je ne fais guère d’illusions. Mon fiancé connait cette ville sur le bout des doigts. Posant calmement mon regard dans le sien, je dis, avec un sourire :

- Tu es tout seul là bas afin de construire quelque chose pour nous. Je voudrais juste…être utile et ne pas dépendre de tout le monde, tu comprends ? Apporter ma petite pierre à l’édifice. J’ai pensé que je pourrais faire cela, pendant que tu es loin. Comme ça, je ne reste pas inactive et je peux nous apporter un petit plus…tout est bon à prendre de nos jours, tu ne crois pas ?
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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyJeu 4 Juin 2020 - 14:07
Il la contredit avec douceur, conscient que le monde avait parfois bien plus tord que les gens qui le parcouraient.

C’est une chanson qui compte pour toi Flore, tu ne devrais pas avoir à te priver d’un souvenir pour ne pas heurter les autres. Elle fait partie de toi et tu devrais continuer à la chérir. Il faudra simplement à l’avenir éviter d’y penser sur les docks. »

Elle semblait si certaine qu’il s’agissait de son frère qu’il était difficile d’argumenter pour la contredire, plus encore sans avoir connu l’homme qu’il avait été. Peut-être pourrait-il demander à Irène un contact sur les quais, car s’il n’avait pas répondu à la question soulevait rapidement par sa promise, afin de ne pas confier sur des affaires qui ne le concernait plus, il savait pertinemment que la dame de Valis avait ses entrées dans presque toutes les filières de la cité, même les plus sordides. Retrouver un pirate devrait être envisageable. A certaine condition.

Si tu le sens au fond de toi, alors tu dois avoir raison. Ne prend pas ombrage de sa réaction, s’il a en effet perdu la mémoire, il ne peut reconnaître sa sœur, même alors qu’elle se trouve face à lui. Cela ne dit rien sur toi, et peut-être rien sur lui. Tu es une chose qu’il ne comprend pas, mais son rejet ne doit pas te faire sentir coupable ou mal.
A-t-il mentionné un nom ? Un titre ? Un lieu ou un navire en particulier ?
»

Avec un balafre rouge sur le visage, il y aurait moyen à force de recherche de trouver des candidats possible, mais sans un point de repère plus précis, les recherches pourraient durer des mois… Il se demanda si durant cette période ils ne devraient pas s’installer sur les quais. Ils profitaient gracieusement de l’accueil de la comtesse depuis plusieurs semaines déjà, et d’une certaine façon restaient dépendant de sa bonne volonté.
Il n’aimait pas être dépendant d’un autre. De plus, à sa façon, il avait conscience que la maîtresse des lieux souffrait de leur présence, car elle la savait temporaire. Comme la douleur que de voir dépérir un proche sans savoir quand la mort viendrait le faucher, tout en sachant pertinemment que cela était inévitable.
Il avait un peu de côté, ils pourraient se louer un endroit à eux près des docks, afin d’effectuer leurs recherches tout en s’accordant leur propre indépendance. Il pourrait travailler là-bas, comme garde marchand, histoire de continuer à mettre de coté un tant soit peu. Surtout si comme lui annonçait Flore elle allait travailler un certain temps dans la cité.
Il était mitigé sur le sujet, mais heureusement, l’apparition improbable de se frère disparu lui permettait de vivre avec un peu plus de sérénité un retard dans ce départ qu’il appelait de tous ces vœux. Cependant, il n’en cacha pas son existence à Flore.

La seule pierre que cet édifice attends à présent, c’est ton arrivée à mes côtés Flore. Nous aurons des heures et des heures de travail pour ne serait-ce que passer le premier hiver, et bien plus encore pour y construire une vie durable. L’occasion de faire ta part ne manque pas. »

Il caressa son visage doucement. Et sourit.

Je crois que tu as encore des choses à régler avec cette cité, et que tant que tu ne penseras pas avoir mis les compte à plat, tu te sentiras obligée d’en faire encore un peu plus. Si tu sens le besoin de travailler ici, de faire tes preuves. Alors reste encore. Je ne veux pas que tu partes avec des regrets et te voir regarder au loin dans les murs de notre maison, pas certaine d’avoir accompli tout ce que tu crois devoir accomplir. Tout ce que je te demande, c’est de me laisser être à tes côtés, et de faire attention à la bonne fortune, les lieux sont mal vus, et par les temps qui courent, les amalgames sont monnaies courantes. »

Il glissa ses bras sous elle et la souleva comme si elle ne pesait rien avec un grand sourire tendre.
Irène se baigne le matin, et Alice ne me fait pas peur ! » Il se pencha à son oreille et lui confia d’un ton complice. « Mais ne lui dit surtout pas que j’ai dit ça. »

Il prit son petit sourire le plus taquin et dit d’une voix plaintive dont la crédibilité était tout sauf assurée.

En plus ma petite femme a passée la journée au port, elle sent le poisson ! Je vais devoir la briquer ! » Dit-il en riant alors qu’ils passaient la porte, enlacés.
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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyJeu 4 Juin 2020 - 22:04
J’essaye de me remémorer ce qu’il a dit ce matin même et à part cracher au sol et dire des horreurs, il n’a rien dit de bien constructif. Sauf…

- Celui qui m’a traitée de puterelle…Il s’appelle Molaire. Je le sais parce qu’Henri l’a grondé pour avoir fait du bruit. Jehan, de toute ma vie, jamais je n’ai un homme aussi vilain que celui-là. Même les Gorlois étaient de vrais modèles de beauté à côté de cet homme là…Sinon, je n’ai rien de plus. Le nom d’un de ses compagnons et cette cicatrice toute rouge qui lui barre le visage. On dirait une énorme brûlure.

Il a du souffrir le martyre. Imaginer la peau fine de son visage subir un tel traitement me fait énormément de peine, d’autant qu’Henri était beau, d’une beauté insolente qu’il entretenait comme il le pouvait grâce aux soins délicats de notre mère.

- Nous verrons bien. Peut-être qu’un jour, je tomberai sur lui sans ces affreuses canailles qui le suivent sans discuter. Peut-être que là je pourrai lui parler et qu’il se sentira dans de meilleures conditions pour me répondre sans devoir me cracher dessus…

Serrant mon fiancé contre moi, je l’écoute alors parler de notre maison au Labret, notre petit nid chaleureux dans lequel il y a tant de travail à fournir. Je souris évidemment à l’entendre parler de notre chez-nous et ne manque pas d’apporter quelques nécessaires précisions, afin qu’il comprenne mieux ce que j’essaye de lui dire.

- Je suis pauvre Jehan. Une paysanne qui doit ce qu’elle mange et ce qu’elle porte à la charité des gens. Je n’ai rien à moi, à part une jolie porte pleine de secrets et des connaissances dont personne ne semble vouloir. Alors voilà…Y a personne pour me faire une dote, y aura personne à notre mariage, je n’ai même pas un ami. Plus de famille. Mais je ne veux pas me marier sans rien apporter, au moins un peu, à notre chez-nous. Ce ne sera certainement pas grand-chose, sans doute presque rien, mais ce sera ma part. On peut être pauvre et orgueilleux, tu sais…Quant à la Bonne Fortune…

J’esquisse un sourire en coin, avant de répondre :

- …je sais que cet endroit n’a pas bonne réputation. Mais c’est le seul endroit où on a bien voulu de mes services. Puis…celle qui dirige cet endroit est une vieille connaissance. On ne s’entend pas très bien, elle a un caractère de cochon et l’entêtement d’une mule, mais dans le fond, c’est pas une méchante fille. Puis bon…vu son état, à mon avis, je ne suis pas prête de la revoir avant un long moment.

Je le regarde et songe alors à Rosen alors même que mon fiancé m’entraîne vers la salle d’eau, en me portant dans ses grands bras.

- Je n’ai plus de compte à régler avec cet endroit, Jehan. Je veux juste…Je veux juste apporter ma part à notre vie, mon amour, c’est tout. Quant à mon odeur…

J’inspire un grand coup dans sa nuque avant de faire semblant de tousser, faussement horrifiée :

- …je te conseille de parler, tu sens la poussière et le cheval. Cela te fera du bien à toi aussi, n’en doute pas une seconde.

Amusée, je le serre dans mes bras, tout sourire, me laissant porter sans plus rien ajouter jusqu’à ce que nous finissions tous les deux dans la salle d’eau de la comtesse.

- Parle moi de notre maison, Jehan. Il y a des fenêtres ?? Il n’y avait pas de fenêtres dans ma maison des faubourgs, sauf à l’étage…J’aimerais bien avoir une fenêtre, pour laisser passer la lumière. Est-ce qu’il y a un âtre ? Avons-nous un peu de terre pour y faire pousser des plantes et des légumes ?? Est-ce que Braise et Fûtée vont nous accompagner ?

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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyLun 15 Juin 2020 - 17:07
Cette fois-ci il ne prit pas la peine de la contredire, même si au fond de lui il restait persuadé que sa compagne avait une chose qui la rattachait encore à cette vie, et que cette chose n’avait rien avoir avec une quelconque somme d’argent. Leur nouvelle vie n’avait pas besoin de richesse, uniquement de leur amour et de leurs efforts. Le labret n’avait que faire de l’argent sonnant et trébuchant. Une poignée de blé valait plus qu’une bourse pleine. Une jambe soignée plus qu’un trésor. Ils seraient, tout les deux, bien plus riche là-bas qu’ici. Pas riche d’or, mais riche d’utilité. Une chose qui dans le contexte actuel s’avérait bien plus important que n’importe quelle monnaie.
La milice sur place lui avait d’ailleurs amplement précisé qu’ils devraient s’avérer être un atout sur place s’ils comptaient s’y établir durablement, les inutiles étaient chassés, même les nobles. L’idée lui plaisait. Oublier les faux-semblants, les titres, le statut. Uniquement compter sur les efforts fournis par chacun.
Il avait hâte de rejoindre une communauté qui accordait plus de crédit à l’effort personnel au bénéfice du groupe qu’à la noblesse de la naissance.
Mais Flore n’avait pas besoin qu’il lui mette la pression, elle serait prête un jour, il le savait, et il n’avait qu’à faire preuve de patience. Que représentait quelques semaines d’attente après des années à ne plus rien attendre de la vie ? Un grain de sable sur une plage. Si elle avait besoin d’accomplir cela, il la soutiendrait.

Il rit à sa remarque sur son odeur propre et s’empressa de frotter sa barbe mal rasée dans son cou tandis qu’il embrassait sa peau si douce. Même si elle avait senti le purin il l’aurait aimé plus que sa propre vie. Mais l’idée de l’aider à se savonner était bien assez attrayant pour lui donner un ample regain d’énergie et la porter avec empressement vers la salle d’eau. Par chance ils trouvèrent le grand bac d’eau encore plein, et presque tiède alors que de rare braises réchauffaient encore son socle noirci.
Tels deux brigands, ils se faufilèrent en pouffant dans la réserve de bois pour dérober quelques buches afin de raviver la flamme vacillante. Avec une efficacité de complices ils se répartirent les tâches. Jehan entreprit de disposer le bois le plus efficacement possible sous la large surface tandis que Flore munie d’un soufflet et d’une sorte de petite pelle s’occupa de réunir les braises et les aider à embraser le nouveau combustible. Ils n’avaient pas eu besoin d’échanger un mot, comme si travailler ensemble à un problème commun était déjà une chose aussi naturelle que respirer.
Ce constat provoqua dans le dos du capitaine un frisson des plus agréable.
Sa compagne brisa tout de même le silence tandis qu’ils s’activaient. Pour aborder un sujet qui le ravi d’autant plus. Il sourit en évoquant les images de leur bâtisse.

C’est une magnifique petite maison. Elle est perchée au sommet d’une colline à la pente très douce. Et ça lui permet d’être bien réchauffée par le soleil durant la journée tout en nous offrant une magnifique vue sur les alentours. »

Il n’eut pas envie d’aborder le fait que cela leur permettrait de voir approcher le danger de loin. Ils étaient tout les deux parfaitement conscient de la réalité de leur vie. Il ne voulait penser qu’aux joies.

Il y a deux fenêtre en bas ! Avec de belles vitres solides mais pas trouble comme du mauvais verre. On voit au travers comme je te vois. Une de chaque coté de la porte, coté sud. On aura de la lumière presque jusqu’à la nuit, même en hiver. La pièce principale est grande, presque comme la chambre d’Irène. Elle se divise en une petite partie cuisine et la pièce de vie. L’âtre est large et solide, avec de grosses pierres presque noires, on pourrait y faire griller un cochon. L’ancien propriétaire a laissé une belle table, assez grande pour une famille avec un ou deux enfants. »

Il lui jeta un coup d’œil intéressé par-dessus le rebord de bois et reprit son œuvre ainsi que sa description.

J’ai réussi à nous dégoter deux chaises en aidant à la forge de Usson, mais j’en trouverais d’autres, ou j’en fabriquerais. Il y a deux petites pièces à l’arrière de la maison. L’une est garnie d’étagères, j’ai dû en changer quelques-unes qui étaient moisies, mais maintenant tout est solide, j’ai déjà commencé à y entreposer les pots que tu m’as confié. Je pense que ça pourrait être un très bon endroit pour exercer ton art. L’autre est encore vide, pour le moment j’y ai installée un bac pour les ablutions. Peut-être que quand les temps seront plus cléments on pourrait y faire une autre chambre.»

Nouveau coup d’œil.

« En parlant de chambre, j’ai installé la nôtre à l’étage, on y accède par une échelle. C’est une sorte de grande mezzanine mais haute de plafond, tu devrais presque pouvoir t’y tenir debout. Nous avons un vrai lit en bois. Le matelas est de paille, mais j’espère qu’à terme on pourra récolter suffisamment de plume pour le changer. Il y a une commode en bon état, assez grande pour y déposer nos affaires. Du moins en partie vu nos possessions actuelle. On aura surement besoin de meubles et de vaisselle. Mais dans l’ensemble il y a de quoi s’installer. »

Il se releva après avoir déposer la dernière bûche pour se retrouver face à une jolie demoiselle aux joues noircies de suie. Il ne put s’empêcher de rire fort, libre. Il parcouru la distance les séparant et l’embrassa gaiement, la serrant contre lui au point de presque la soulever du sol. Déjà la chaleur de la pièce augmenter et la moiteur se faisait plus présente alors que l’eau reprenait une température plus agréable.
De ses doigts larges mais agiles, il entreprit de défaire doucement le lacet au col de sa robe tandis que son regard chaud la couvrait. Il reprit la parole plus basse, plus tendre.

En réparant une poutre j’ai mis à jour un cadre de bois sous les tuiles et la paille. Je pense qu’il y a moyen d’y installer une fenêtre. J’ai pris contact avec un souffleur en ville. Il doit encore me donner son prix. Mais j’espère bien pouvoir repartir avec une vitre et une trappe dans un ou deux voyages. »

Il s’était attaqué aux boutons de sa chemise ensuite. Dévoilant petit à petit la peau halée entre ses seins, et rien que cette vue suffit à faire bouillir son sang. Sans doute qu’un œil objectif aurait pu lui dire qu’il avait déjà payé pour plus belle femme pendant ses longes années de célibat. Mais Flore, que ce soit par son corps ou sa personnalité, semblait être la seule à pouvoir ainsi enflammer ses sens.
Il glissa un doigt dans l’ouverture et effleura la peau offerte.

On nous a attribué deux hectares de terrain, j’en ai déjà défriché une bonne moitié. Mais j’ai aussi commencé à installe des pierres autour de la maison pour créer un petit parterre où tu pourras faire pousser les plantes qui demandent le plus d’attention. La grange est en plus mauvais état, mais j’y travaille, la stalle pour braise est déjà prête, mais concernant futée, ce n’est pas à moi qu’il faudra demander. »

Il écarta les pans de la chemise et ne put retenir un sifflement admiratif. En quelques semaines de repas et de soin plus régulier chez la comtesse, sa compagne s’était remplumée. Loin de s’épaissir encore, mais les côtes saillantes avaient laissé place à un ventre plat. Ses épaules étroites avaient gagné en rondeur, et ses seins avaient repris la fermeté de son jeune âge et pointé orgueilleusement sous ses yeux.
S’il l’avait trouvé belle la première fois, aujourd’hui il se serait damné pour sa magnificence. Il dégrafa la jupe de sa robe qui glissa le long de ses jambes, dont la longueur qui autrefois semblait maladive de par leur maigreur était aujourd’hui un ensemble de courbe et de creux des plus appétissant. Il l’attira à nouveau à lui pour le baiser passionné de l’amant qui s’aperçoit de sa chance. Quand leurs lèvres se séparèrent, leur souffle rapide. Il lui sourit… Puis la souleva d’un coup pour la jeter à l’eau dans de grandes gerbes.
Son sourire était encore plus grand quand elle émergea dans toute sa beauté, ses longs cheveux noirs tombant sur ses épaules. La chemise trempée épousant chaque détail de son anatomie.

Elle est bonne ? » Demanda-t-il sans cacher une seconde la promenade de son regard.

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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyMar 16 Juin 2020 - 11:30
J’ai l’impression d’être une de ces gamines des ruelles sordides, là tout en bas. Le genre de gamine qui se faufile entre les jambes des passants et qui les déleste de leurs bourses ou de leur bien, en riant, avant de s’enfuir en courant. C’est tout à fait l’impression que j’ai en entrant dans la salle d’eau. Les braises se meurent sous le bassin, l’eau est à peine tiède, il faut ranimer tout cela si nous ne voulons pas périr de froid. Tandis que je m’attèle à la salissante tâche qui consiste à ramener toutes les braises en un point afin de concentrer les sources de chaleur, Jehan rapporte quelques bûches qu’il dispose sur les cendres chaudes. A l’aide d’un soufflet, il ne faut guère longtemps avant que les flammes ne viennent à nouveau étreindre les morceaux de bois. Je me redresse donc, de la suie sur le visage, le bout du nez noirci, tout en écoutant Jehan décrire notre maison, avisant mon fiancé d’un œil attendri.

Notre maison, notre nid, celui pour lequel nous avons traversé, lui comme moi, bien des épreuves. Je l’écoute sans l’interrompre, imaginant avec un sourire une modeste demeure sur une douce colline, une demeure pourvue de fenêtres, par les Trois…Des fenêtres !

- Des fenêtres, mais…N’est-ce pas dangereux ? Père avait fait condamner les fenêtres du rez-de-chaussée de notre maison pour éviter de donner aux Fangeux un moyen d’entrer chez nous…Il n’y avait de fenêtres qu’à l’étage, tu t’en souviens ? Si notre maison est en haut d’une colline, on verra arriver les Fangeux s’il y en a, c’est certain mais…Est-ce qu’il y a des moyens de défense, des pièges, quelque chose ?

Jehan n’aimait pas cet étage qu’il considérait comme un mausolée à la mémoire de mes parents, je m’en souviens fort bien. Cela étant, je le lui avais montré, il doit donc s’en souvenir, je présume. Il sait aussi que mon ancienne demeure des faubourgs est entourée de trappes mortelles.

- Un Fangeux a tenté de s’en prendre à moi. Si le baron de Sombrebois n’avait pas agi et précipité la bête dans un de mes pièges hérissé de piques, je serais morte. Peut-être faudra-t-il y songer, cela me rassurerait beaucoup. Je n’ai pas envie de revivre pareille frayeur, j’ai cru que j’allais mourir…

Rien que d’y songer, un frisson particulièrement désagréable me parcourt le dos, malgré la douce chaleur qui commence à se faire sentir dans la pièce. Là où Jehan s’échine à mon montrer tous les points positifs, je cherche les points faibles, pour consolider très justement ces points positifs. La sécurité absolue n’existe pas, nulle part, mais on peut au moins faire en sorte de s’arranger pour qu’elle existe un minimum.

- En ce qui concerne le mobilier, il y a les petits tabourets que je possédais, les quelques écuelles et cuillères qui me servaient de temps à autre à faire de plantureux repas…Peut-être devrais-tu les emporter à ton prochain voyage. Je m’occuperai de gagner ce qu’il nous manque ici, en travaillant.

Jehan a souri en évoquant une chambre supplémentaire et une table familiale. Une rougeur s’affiche sur mon visage, je le sais. Avoir des enfants fait partie de mon projet de vie, c’est quelque chose dont j’ai toujours rêvé et c’est pourtant un sujet dont nous n’avons jamais vraiment parlé. Je fais le rêve, toujours le même, de voir grandir des petits êtres chéris entre tous dans un grand jardin plein de fleurs. Passant une main sur mon ventre, j’ai un regard pour cette partie de moi-même qui reste désespérément plate et ferme. Peut-être…Avec le temps…Qui sait ?

- Peut-être…Une famille…J’aimerais cela…Des enfants de toi. De petits mélanges de nous…

Mon fiancé revient vers moi à ce moment-là, pour m’embrasser et me soulever avant de s’attaquer en douceur à mes vêtements tout en continuant sa présentation de notre maison. Je ne peux m’empêcher de le dévorer des yeux, savourant ma chance d’avoir un homme tel que lui à mes côtés. Jehan est la meilleure chose qui me soit jamais arrivé et l’homme que j’ai choisi. Imitant ses gestes, je m’affaire, de mon côté, à défaire le petit lien qui ferme le haut de sa chemise, tout sourire, tout en répondant pensivement à ses propos, occupée désormais à admirer une fois de plus ce torse barré de cicatrices nombreuses.

- Il y a des plantes qu’il me faudra emporter avant notre départ. Derrière la maison, il y a un parterre qui ressemble à un fouillis de plantes diverses…Je souhaite les emporter et les replanter là bas. Elles sont essentielles pour plein de soins et potions et je ne sais si je pourrai en trouver à nouveau. J’irai moi-même. Elles sont…dangereuses.

Je lève un regard entendu vers lui. Un peu à la manière d’un éleveur, j’ai, au fil du temps, confectionné un parterre tout à fait toxique de plantes pourtant indispensables à la préparation de certaines potions. Le souvenir du Comte de Rougelac surgit dans mon esprit avant que je ne le chasse d’un froncement de sourcil.

- Et je ne veux pas que tu souffres à cause d’elles donc je m’en occuperai.

Si mon fiancé s’amusait à me déshabiller, je ne suis pas en reste, soulevant sa chemise de manière à ce qu’il élève les bras de son plein gré. Envoyant le vêtement dans un coin, je reporte mon attention, toute mon attention sur lui, passant mes doigts sur toutes les coutures qui ornent son corps, avec un sourire. Jehan est brave. L’absence de cicatrices dans son dos en est la preuve la plus flagrante. Il fait face au danger et ne recule pas. C’est un comportement que je juge avec réserve, étant moi-même la plus grande froussarde de toute la terre.

Mon fiancé, quant à lui, observe avec gourmandise toutes les formes de mon corps, bien plus voluptueuses qu’elles ne l’ont jamais été. Manger de manière plus régulière et prendre du repos m’a permis de prendre du poids et de gagner en rondeur ici et là, des rondeurs dont Jehan semble visiblement heureux. Lui rendant son sourire sous son baiser passionné, je ne vis pas le coup venir. En un geste, je finis dans un « plouf » sonore dans la cuve, privée de respiration et de toute dignité. Me redressant dans la cuve, en riant aux éclats, j’écarte deux mèches de cheveux barrant mon visage pour faussement le fusiller du regard et le gronder en agitant le doigt :

- Tu n’aurais pas du faire ça, mon ami…Ma vengeance sera terrible ! Viens ici si tu l’oses !

Evidemment, ma tenue collée à corps ôte définitivement toute crédibilité à mes paroles. Je dois ressembler à un petit chat mouillé qui feule pour rien.

- Vous êtes un gredin, Monsieur Defroy. Un gredin et un goujat !

Je m’assois dans la cuve et croise les bras sur ma poitrine tout en levant le menton et en regardant ailleurs, même si intérieurement je suis hilare. L’eau est bonne, l’atmosphère est douce, et Jehan…irrésistible. Je ne tiendrai pas deux minutes face à lui mais bon, je veux me donner l’illusion d’au moins essayer…même s’il lui suffira de sourire pour que je le rejoigne. Et il le sait parfaitement.


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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptySam 20 Juin 2020 - 6:53
J’ai vu ces choses défoncer des murs de pierre comme s’il s’agissait de paille ce n’est pas l’absence de fenêtre qui les arrêtera, et elle ne sont de toute façon pas assez grande pour qu’un adulte y passe. Je veux garder cette lumière. Mais tu as raison installer quelques pièges ne serait pas du luxe, du moment qu’on en informe la milice pour ses rondes. Je commencerais à y penser la prochaine fois que je m’y rendrais. » Avait-il dit avant d’hocher la tête à sa proposition d’emmener les rares affaires qu’elle avait encore dans son ancienne demeure. Songeant par devers lui que sa compagne avait décidément rencontrer de bien nombreuses personnes dans sa demeure. Comme si au centre des faubourgs, elle avait été comme une lumière dans la nuit, attirant toutes sortes d’insectes et de curieuse créature.

Ils avaient tous entraperçu ce qu’elle était sans savoir en profité, et l’aider à se transcender. Il ne ferait pas cette stupide erreur lui. Il l’aiderait à rayonner autant qu’il en serait capable, peu importe les efforts que cela lui couterait.
Son sourire s’étira comme elle partageait à demi-mot l’idée qu’une maternité n’était pas vraiment pour lui déplaire. Il espéra juste qu’ils auraient beaucoup d’elle, et le meilleur de lui. Une vie, conçu par leur amour, leur sentiment et leur union. Il avait bien conscience qu’il s’agissait là d’un désir égoïste dans le monde actuel. Mais il voulait que l’espoir qui avait retrouvé place en lui depuis qu’il avait rencontré cette femme se matérialise par une chose concrète. Une preuve vivante que l’amour était capable de sauver la plus perdue des âmes.
Imaginer un enfant lui ressemblant…. C’était effrayant de bonheur.

Il nous faudra passer ensemble dans ton ancienne maison alors, avant de faire un voyage jusqu’à chez nous, que tu puisses t’en charger. Je ne voudrais pas non plus tripoter une chose qui m’enverra voir les trois plus tôt que prévu. Je compte bien te faire subir mon humour quelques années avant cela. » Dit-il, parfaitement conscient, pour avoir connu plusieurs guérisseur ou herboriste pendant sa longue vie de soldat qu’elle ne faisait pas là de l’humour ou de la surenchère. Il avait appris avec les années que ce qui différenciait un soigneur d’un empoisonneur tenait plus à la moralité de la personne qu’aux produits utilisé. Et il trouverait ça tellement stupide de se piquer sur une racine et de mourir couvert de bouton juste parce qu’il se serait permis de toucher à des choses qu’il ne comprenait pas.

La menace de sa compagne trempée sur toute sa délicieuse longueur ne fut pas pour refroidir ses ardeurs bien au contraire. Très impatient de voir comment elle se vengerait de sa roublardise, il s’empressa de retirer ses derniers vêtements, les jetant dans un coin sans se départir de son sourire de garnement très fier de lui et entra nu comme un ver dans l’eau chaude ce qui lui arracha un frisson.
Elle s’était assise contre le rebord opposé, droite et digne, le regard au loin pour marquer une désapprobation à laquelle il ne croyait pas réellement, mais ce petit air farouche la rendait plus belle encore. Il aurait bien sûr pu attendre qu’elle craque et se rapproche d’elle-même histoire de prouver son point de vue. Mais elle était si belle, si attirante, sa personnalité rayonnait et sa beauté subjuguait même avec les traces de suies et de fatigue. Non il se voyait mal attendre qu’elle vienne à lui.
Il s’avança dans l’eau d’une brasse pour la rejoindre. Elle l’observait du coin de l’œil, il le sentait, et cela le fit sourire plus encore.

Pardonnez-moi madame Defroy… » Dit-il en glissant un bras autour de son corps menu pour l’attirer à lui, à califourchon autour de son bassin. Elle ne portait pas encore officiellement son nom. Mais c’était sa femme, et il ne laisserait personne sous-entendre l’inverse. « … des années de célibat on fait de moi un rustre ! Comment pourrais-je bien me faire pardonner ? » Demanda-t-il alors qu’il égarait ses lèvres dans le cou de sa compagne.

Comme toujours en la présence de son corps, le sien réagissait des plus naturellement, et son état ne devait pas le moins du monde échapper à sa compagne vu leur proximité. Etat amplement renforcé par l’idée que leurs prochains rapports puissent finir par donner naissance à la plus belle des créations. Et ce par leur volonté commune.
Mais pour autant il ne précipita rien, juste heureux de leur présence. Il s’empara d’une grosse éponge molle et imbibée tandis qu’il laissait Flore reprendre confortablement appui sur le rebord. Il écarta avec une douceur presque sensuelle le tissu qui couvrait les derniers centimètres de peau, et entreprit de nettoyer le corps de sa compagne avec des gestes sans doute trop proches de la caresse.

Tu es belle ma fleur. » Dit-il comme s’il avait nécessité de confirmer ce fait à voix haute. « Alors, parle moi un peu plus de ce poste. Tu t’y t’es déjà rendue ? On te traite bien ? Je veux tout savoir. »

Ses mains continuaient de parcourir ça compagne comme le plus beau des paysages. Un paysage qu’il était si chanceux d’avoir le droit de contempler.

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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyLun 22 Juin 2020 - 9:30
- J’ai vu une de ces choses mourir tout près de moi, Jehan. Je ne veux pas revivre cette expérience qui m’a hantée pendant des semaines. Nous garderons les fenêtres mais je veux que cette maison soit un rempart efficace entre elles et nous. Du moins aussi efficace qu’il soit possible de l’être…

Je ne dis rien de plus à ce sujet, je sais qu’il va en développer une certaine forme de culpabilité et il n’y a aucun intérêt à ce que je décrive à quel point j’ai été effrayée. Les nuits qui ont suivi cet incident ont été courtes, je ne parvenais pas à trouver le sommeil parce que dès que je fermais les yeux, je revoyais les crocs, les griffes, le sang boueux se répandre sur ma robe. Il ne saura jamais non plus qu’il a été ce que je songeai être ma dernière pensée, c’est lui que j’ai vu dans mon esprit alors que la bête était en train d’agoniser à mes pieds. Le baron de Sombrebois, d’aussi piteuse réputation qu’il soit, n’a pas manqué de bravoure ce jour-là. Pour le même prix, il pouvait tout aussi bien prendre la fuite et m’abandonner à mon sort. Il n’en a rien été. Il m’a sauvé la vie et je lui en serai toujours redevable.

Quant au sujet de mes plantes, il a totalement raison d’être sur ses gardes. Je ne lui ai jamais parlé de ce qui pousse à l’arrière de ma maison. Pour le profane, il ne s’agit que de mauvaises herbes aux jolies fleurs, pourvues de jolis fruits appétissants. Pour l’œil averti, il n’en est rien du tout. Il y a là de quoi occire en silence le plus retors de mes ennemis en utilisant tout cela à très mauvais escient. Et pourtant, ces plantes, en utilisation raisonnable, sont totalement efficaces quand il s’agit d’apaiser des souffrances ou d’endormir une personne trop agitée par la douleur. Certaines plantes ont été installées là par ma mère, je ne peux partir sans elles. Jamais je ne retrouverai de plant de cette qualité ailleurs, c’est une quasi certitude.

- Je m’en occuperai. Il me faudra une bêche, de larges bandes de tissus et une grande bassine pour le transport. Ce sera la première chose à faire en arrivant. Planter.

Je songe d’ailleurs à cela, alors que je croise les bras sur ma poitrine, le menton haut, soudainement distraite par l’arrivée de Jehan dans le bassin. L’observant du coin de l’œil, je ne peux retenir un sourire follement amusé de jouer ainsi une si petite comédie de rien du tout. Il sait très bien que je ne lui en veux pas le moins du monde…et il sait très bien aussi comment se faire pardonner. Impossible de résister à de telles paroles et je me maudis intérieurement d’être aussi faible qu’un tout petit chiffon entre ses mains impérieusement douces qui me collent à lui en me dotant d’un nom que je ne porte pas encore. Madame Defroy. Flore Defroy. C’est tellement étrange à prononcer, même à imaginer. Jamais je n’aurais cru rencontrer l’amour un jour, un amour sincère et pur qui me porte tous les jours, qui me fait avancer dans la bonne direction.

- Je n’ai absolument aucune volonté, c’est injuste…, dis-je dans un souffle alors qu’il répand des baisers sur mon cou. Quant à te faire pardonner, il semble que tu as à peu près la même idée que moi, mon amour…

Je dissimule un rire contre son torse, tout en devinant son état malgré l’eau qui nous sépare. Cependant, l’instant n’est pas dédié à cela même si lui et moi sommes, une fois de plus, en accord parfait sur ce point. Rompant l’étreinte, je reste toutefois à ses côtés, tandis qu’il passe une douce éponge sur ma peau qu’il dénude patiemment, tout en me murmurant des mots doux. Le souvenir de ce pirate du matin vient de s’envoler pour l’heure. Il n’y a plus d’agressivité, il n’y a plus d’angoisse, il n’y a plus que lui et moi, dans une toute petite pièce douce et chaude. Je profite allègrement de ces instants là, avec un sourire heureux, soupirant d’aise à chaque mouvement.

- Je n’ai pas encore débuté mon service là bas, il a été convenu que je commence en novembre d’ici quelques jours, donc…mais je ne devrai rien faire de bien compliqué. Juste la cuisine et probablement l’un ou l’autre tâche qui s’y rapporte. Quelque chose dans mes cordes, en somme. J’assaisonne les plats comme personne, après tout.

Je finis par relever la tête alors que l’éponge s’aventure sur ma gorge.

- Ils sont un peu rustres, les gens là-bas. Les gens qui viennent y prendre un repas ne sont pas tous des gens biens, je le sais, mais c’est le seul endroit où on a bien voulu de mes petits services. Ça me permettra d’obtenir peut-être ce dont nous manquons encore pour notre maison.

Si je travaille fort, peut-être même pourrai-je lui offrir un cadeau pour nos noces. Quelque chose qui vient de moi, un présent d’une épouse à son époux. Je passe une main sur mon avant-bras, distraite par cette pensée heureuse. Je n’ai jamais pu offrir de cadeau à qui que ce soit, pas même à mes parents ou à Henri. J’aimerais savoir ce que l’on ressent, quand on offre quelque chose à quelqu’un.

- Je sais que cet endroit n’a pas bonne réputation, mais…je tiens à ce petit emploi. Ce n’est pas prestigieux, ce n’est pas reluisant, ni même gratifiant mais cela nous aidera. Alors j’en suis heureuse et je ferai ce qu’il faut pour que l’on soit content de moi.

Jouant distraitement avec la surface de l’eau, le souvenir d’un homme aux tempes poivre et sel et au regard azur vint troubler ma quiétude, l’espace d’une seconde.

- Je ferais n’importe quoi pour toi. Pour nous. Parce que je t’aime.

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Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyDim 28 Juin 2020 - 17:28


Lui-même avait connu sont lot de rencontre et d’horreur avec les fangeux, et rarement cela c’était fini aussi bien que celle finalement chanceuse de sa fiancée. Beaucoup de sang, de mort, de douleur. Il avait vu des armées entières tomber sous leur griffes, et des forteresse dévastée à leur passage. Aucun piège, aussi ingénieux soit-il n’arrêterait un fangeux déterminé. Car il ne s’agissait pas de simple bête sans âme. Elles réfléchissaient, à leur façon tordue et brutale, comme animée par un esprit de ruche. Elles semblaient bien stupides si on avait l’occasion de les observer errer sans but à la manière d’une abeille voletant de ci de là. Mais une fois en chasse, elle était aussi implacable et efficace qu’un trappeur de métier.
Seul la hauteur et la chance les sauveraient sans doute si une attaque devait advenir. Mais bien entendu il se garda de confier cette pensée à sa belle. Elle craignait visiblement déjà bien assez cette menace pour ne pas y ajouter la vacuité de sa propre expérience. Plus de peur ne les aiderait pas à mieux survivre. Et des pièges auraient de toute façon l’utilité d’éloigner d’autres inopportuns moins redoutable mais tout de même dangereux. Il se contenta d’hocher la tête.

Je te fournirais le matériel dont tu as besoin mon cœur. »

Il continua ainsi la toilette de sa promise, fascinée par son corps tout en écoutant patiemment ses paroles. L’eau était délicieusement chaude autour d’eux, et ne faisait qu’exacerber la beauté de sa compagne en faisant luire ses muscles fins. Il finit par la débarrasser totalement de sa chemise imbibée alors qu’elle évoquait son travail prochain à la bonne fortune. Une part de lui-même, celle dont il avait hérité après ses années de services pour la maîtresse des secrets, se demanda s’il devrait la surveiller elle et l’établissement, en faisant appel à certain contact il en saurait bien vite beaucoup plus sur l’endroit et ses fréquentations.
Mais il repoussa cette idée au loin. Il voulait être un homme nouveau, un homme digne d’elle. Et cela commençait par la confiance et l’honnêteté. Il ne voulait pas un jour se rendre compte que par ses actes il avait incité sa compagne à apprendre à lui mentir. Non, il serait honnête et confiant. Si elle avait besoin de son soutien, elle lui ferait savoir.
Il débarrassait doucement son visage des traces de suie lorsqu’elle dit qu’elle chose qui l’interrompit dans son geste. Il reposa l’éponge dans l’eau et pris son beau visage entre ses mains pour que leurs regards se fixent l’un dans l’autre.

Ne dis et ne pense pas cela Flore. C’est une mauvaise chose. J’ai moi aussi pensé longtemps que j’étais prêt à tout pour toi. Tuer, trahir, mentir, voler, subir. J’ai déjà commis l’un de ses actes en pensant te rendre justice. Et te voilà interdite de vivre là où tu as grandi. En voulant agir au mieux, j’ai fait au pire et j’ai fini par te nuire.
On doit toujours payer quelque chose pour ce que l’on fait. Parfois en offrant un thé à une inconnue, on reçoit l’amour de la plus merveilleuse femme du monde. D’autres fois en voulant la venger et rétablir un peu de justice, on ne fait que rendre sa vie plus injuste. Alors je ne ferais pour toi que ce qu’y pourra te rendre heureuse et ou te sauver la vie. Je ne déciderais plus seul de ce qui est bien pour toi et pour nous.
Nous ne devons pas nous sacrifier pour l’autre Flore, pas plus que nous ne devons décider seul de ce qui est bon ou pas. Je sais que les bonnes intentions sans nuance peuvent faire autant de mal que les pires. Alors s’il te plait Flore, ne fait pas “n’importe quoi“ pour moi, car un jour, toi ou moi risquons de le regretter ou pire, d’en payer le prix. C’est ce genre d’amour que je veux te donner, et que j’espère de toi. Celui qui voit le bien au lieu de s’aveugler dans sa volonté de faire le plus.
»

Il l’attira contre lui et la serra fortement sans pour autant que cela ne soit désagréable. Il avait parlé avec son cœur et en toute honnêteté. Conscient de sans doute ne pas s’être exprimé de la meilleure des façons, car lui-même apprenait peu à peu à être une personne meilleure, pour elle.
Il avait longtemps pensé que la fin justifier les moyens, et dans de nombreux cas, cela avait été vrai. Du moins pour ses objectifs. Mais combien de veuves ou d’orphelins devaient maudire son âme sans même connaître son nom ? Combien de personne avait fini à la rue ou mort par ses actes direct ou indirect ? Même sa promise se retrouvait privée du peu de bien qu’elle possédait parce qu’il avait agit dans sa conviction de devoir le faire plutôt que de réfléchir à la possibilité que par la suite ses actes soit néfaste ou pire qu’elle puisse lui en vouloir un jour.
S’il craignait bien une chose pour eux, c’est qu’un jour un acte inconsidéré transforme leur amour en rejet ou en haine.
Il ne croyait pas cela possible. Mais il y a quelques mois il ne croyait pas non plus pouvoir tomber amoureux.

Du moment que tu fais attention à toi, je me fiche que le lieu n’ait pas bonne réputation, je n’ai moi-même pas la prétention d’être de très bonne réputation, et je ne vais pas me plaindre que tu me fréquentes. » Dit-il d’un ton plus léger et amusé, mais pas moins sincère.

Pourrais-je t’y rendre visite ? Je dois bien admettre que cela me rend curieux. Mais si tu veux en faire ton petit espace à toi je comprendrais. »


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Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



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MessageSujet: Re: [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]    [Abandonné]Jours bénis [PV Irène de Valis]  EmptyLun 29 Juin 2020 - 21:10
Les paroles de Jehan résonnent en moi au point de me faire baisser le regard, un bref instant. Il a raison, je ne le sais que trop bien. Il a tué les Gorlois, pour me venger. De ce fait, ma présence dans les Faubourgs est condamnée, parce que je sais que pour tous ces gens je suis la coupable toute désignée même si, compte tenu de ma silhouette, j’aurais été absolument incapable de leur faire le moindre mal.
Ils avaient été ignobles, de longues années durant, pour des raisons qui n’en étaient pas. Ils avaient fait de la vie de ma mère, de ma vie, un véritable chemin de calvaire, parsemé de clous, d’aubépines et de ronces. Ces hommes à l’intelligence limitée et à la méchanceté sans fin ont littéralement détruit ma vie, tout cela parce que j’ai dit non. Parce qu’un homme est venu à mon secours et m’a défendue en leur cassant les doigts. Il les a tués parce qu’il n’y avait rien à faire de plus et que c’était bien tout ce qu’ils méritaient. Je n’ai ressenti aucune compassion, aucun remord, aucun regret. Pire, j’en ai été, et en suis toujours, totalement satisfaite. J’aurais d’ailleurs bien volontiers taillé proprement leurs gorges de porcs moi-même si je n’avais pas été si fragile et si délicate.

Cela étant, si Jehan a des regrets à ce sujet, j’en ai aussi sur un autre, un sujet épineux. Dangereux. A nouveau le souvenir de cette danse dans ce salon chauffé en compagnie d’un homme à l’odeur de bois et d’épices me revient et me fait frémir malgré l’eau chaude. Ce n’est que lorsqu’il me serre dans ses bras pour ponctuer ses propres paroles que je ferme les yeux et murmure :

- J’ai moi aussi agi inconsidérément pour nous. J’ai fait des choses que je regrette et qui auraient pu avoir de très fâcheuses conséquences…Mais j’ai appris de cette erreur et je ne compte pas m’y laisser prendre à nouveau.

J’hésite à lui dire, parce que je sais à quel point le sang de Jehan risque de bouillir. Je sais aussi qu’il pourra garder tout son calme en apparence et fomenter une vengeance en secret, le tout en me souriant et en m’assurant que tout va bien. Et puis…comment dire à mon fiancé que pendant trois jours entiers j’ai été retenue contre mon gré par un homme puissant, enfermée dans une cave ? Un homme qui a posé ses mains sur moi sans la moindre pitié ? Un homme tellement brisé qu’il en a sans doute perdu toute notion de civisme… ? J’hésite, alors je ne dis rien, je me contente de le serrer contre moi très fort, essayant de chasser ce désagréable souvenir en fermant les yeux et en déposant un baiser dans son cou, puis un second et enfin un troisième avant de m’appuyer contre lui, tranquillement.

Non, je ne dirai rien. Irène s’est compromise elle aussi là dedans en me couvrant, inutile d’en rajouter.

- En ce qui concerne la Bonne Fortune, oui, bien sûr que tu peux y venir, je ne crois pas que cela posera un souci, tant que tu me laisses travailler…Si tu me distrais, je ne pourrai sans doute pas garder mon emploi…Bon je ne vais probablement rien faire de bien transcendant, pas de potion, pas de soins, juste préparer des repas, aider un peu en salle…rien d’extraordinaire.

Je me redresse un peu pour lui faire face et passe en silence ma main sur son visage, pensive, observant avec amour tous les traits de ce visage chéri entre tous. Les yeux rieurs. Le sourire immense qui fait écho au mien.

- Et je m’en fiche, de ta réputation. Je me fiche de tout cela. Moi ce que je vois, c’est toi. L’homme que tu es ici et maintenant. Peu importe ce que tu as bien pu faire, je t’aime.

Il a du sang sur les mains, je le sais parce qu’il me l’a dit. Je le sais aussi parce que je le devine, je sais que derrière ce visage que j’aime il y a des montagnes de secrets que je prends bien soin de ne pas soulever ou même seulement évoquer. Parce que c’est son jardin à lui et que j’ai le mien. Si l’honnêteté des sentiments est requise dans un couple, il n’est, à mon sens, pas interdit de garder certaines choses pour soi, ce qui est certainement le cas de Jehan, tout comme le mien. Je n’ai jamais posé de question à ce sujet et je sais qu’il n’en posera jamais lui non plus. De cette manière nous sommes donc parfaitement d’accord sur un certain principe de respect des secrets tant que cela n’influe pas sur notre vie de couple.

- Je t’ai aimé dès cette tasse de thé. J’étais tellement embarrassée, par les Trois, j’avais tellement peur qu’Irène me considère comme une fille légère, une fille qui fait du rentre dedans aux messieurs…Parce qu’elle a compris avant moi, à ce sujet, j’en suis convaincue.

Nouant mes bras autour de son cou, je m’approche en douceur et murmure sur ses lèvres :

- Je suis fière de devenir votre épouse, Monsieur Defroy. Et il me tarde de porter votre nom. Tout comme de porter nos enfants.

Un large sourire étire mes lèvres avant de l’embrasser avec tendresse. Je romps toutefois le baiser pour dire, d’une voix douce :

- Dans un avenir proche, je l’espère…
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