Marbrume


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 Opération Infiltration

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MessageSujet: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyMar 5 Jan 2016 - 23:01
Opération Infiltration


Anton Gunof & Grim Torren


Le soleil commençait lentement à décliner. La journée avait été douce, le vent n'avait pas soufflé, et la fraîcheur hivernal fut presque agréable. Pourtant, Grim avait froid. Il était frigorifié et regrettait de ne pas s'être vêtu plus chaudement. Mais il n'avait pas eu le choix : son manteau et son écharpe n'auraient vraiment pas été pratiques pour grimper et se cacher.

C'était haut, ici. Terriblement haut, même pour quelqu'un qui n'avait pas le vertige.
Le petit homme avait attendu que le ciel se teinte de reflets orangés pour se lancer. Il aurait pu patienter jusqu'à la nuit tombée, mais il pensait que, de toute manière, le temps qu'il arrive et qu'il trouve un endroit où se cacher, le noir serait présent pour assurer sa discretion.

Souple comme un chat, agile comme un singe, le voici qu'il s'élança. De simples mitaines en cuir protégeait ses mains, laissant ses phalanges la liberté de s'agripper où il fallait et empêchant ses doigts de geler complètement. Il ne portait qu'une chemise noir à lacets, un pantalon en coton et de fines chaussures en cuir, plus pratique pour l'escalade.
Il avait du mal à respirer tant il angoissait. S'il avait pu, il ne l'aurait pas fait. Mais les espions de Théodemar le surveillaient. Depuis sa rencontre avec cet homme, il n'avait encore rien fait, et il n'allait sûrement pas tarder à réclamer des informations secrètes. Et alors, si le jongleur n'avait rien à lui fournir …

Il se retrouva au sommet sans encombre, quelques petites frayeur de pieds qui dérapent ou de pierres qui restent dans la main, mais rien de grave. Avant de se hisser sur le sol en pierre, Grim écouta, attentif, le souffle court. Rien, il n'entendait rien. Il déglutit discrètement et après avoir prit une grande inspiration, il se laissa glisser de l'autre côté du mur pour aussitôt s'accroupir, caché dans l'ombre de la muraille. À présent, il ne restait qu'une légère clarté, à peine suffisante pour voir un visage, mais assez conséquente pour apercevoir une silhouette au loin.

Mains tremblantes et jambes flageolantes, le jongleur avança, prudemment, les sens en alerte. Devant lui se trouvait une petite tour, là où devait se trouver des miliciens. Il espérait rejoindre la tour principale et ainsi – peut-être – pouvoir surprendre une conversation et récolter quelques informations. Par chance, il avait bien calculé son coup, et ne se trouvait qu'à quelques pas de son objectif.

Il régnait autour de lui une sorte de tension, bien palpable, angoissante. Si angoissante qu'une fine pellicule de sueur venait coller quelques mèches bouclées sur le front du saltimbanque. Ses yeux clairs luisaient dans le noir, à l’affût du moindre mouvement suspect.

- Il ne se passe jamais rien dans cette zone, de toute manière …

Son cœur manqua un coup tandis que deux ombres se dessinaient à l'entrée de la tour principale. Aussitôt et dans la crainte d'être vu, Grim sauta par-dessus la rempart et se maintint juste à la lisière. Il ferma les yeux, baissa la tête et pria, tout en se déplaçant lentement sur le côté, son but s'approchant de lui.

Arrivé à la tour, Grim choisit de rester derrière les remparts, à peine maintenu sur la pierre, plaqué au mur comme un suicidaire accroché à sa fenêtre. L'entrée se trouvait juste à sa gauche, lui était caché par un simple renfoncement dans la pierre. Mais il suffisait que l'on se penche un peu pour le découvrir et ainsi compromettre toutes ses chances de s'en sortir.

Il tendit l'oreille, assez pour distinguer quelques éclats de voix. Il parvint à identifier, peut-être, trois personnes, dont une voix qui surplombait les autres, et réussit même à saisir quelques bribes de conversation. Très bien. Il était content de constater que son intuition était bonne. Voilà, tout se passait très, très bien. Il n'avait plus qu'à cueillir quelques phrases militaires, à retenir quelques ragots, et de disparaître sans laisser de trace.
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyMer 6 Jan 2016 - 17:12
D10 : Grim Torren sera-t-il d'or douché ou pas ? 1-2 : Il y passe. 3-10 : il n'y passe pas. Résultat : 3. Lanceur : Ambre.

La nuit était bien tombée depuis quelques minutes, et la chaleur du soleil vidait les lieux progressivement. Aussi les rondes de la garde s’étaient drastiquement réduites en termes de fréquence. Et une bonne moitié des occupants de la tour que le saltimbanque s’était mis en tâche d’aller espionner avec un sens du spectacle rare roupillaient à poing fermé. Le reste des soudards se distrayaient à coup de carte et d’un peu de vin chaud, qui bouillonnait sur un brasero plus fumeux que chaleureux. On s’emmerdait ferme dans une atmosphère étouffante. Les pauses pipi étaient donc autant d’occasions de prendre le frais avec un camarade, loin de la fumée et de la promiscuité propres à la garde de la tour.

C’était justement l’une de ces occasions d’évasion qui rapprocha encore un peu plus l’espion en herbe de ‘ses cibles’. En effet, deux voix se firent entendre plus clairement. Elles s’approchaient de la situation précaire de Grim, et rapidement, si bien qu’il ne put rien faire que de s’agripper comme il pouvait au rebord du créneau, de se maintenir autant que possible au dessus du vide, et hors de la ligne de mire des deux gardes qui s’approchaient. Ces deux derniers, sans avoir une mauvaise vue cependant, n’entravèrent aucunement la présence de l’intrus. Personne n’aurait jamais imaginé un individu capable d’une telle manœuvre, de plus la nuit, déjà bien tombée comme sus dit, recouvrait le monde d’un manteau d’obscurité de plus en plus épais.

« Je suiiiis tombééééé paaaarr teeeeeerrrrrrrreuh, »
« … C’est la fôôôôte àààààà Vooooolaaaaataaaaaaairrrrrrreuh. »


A la chansonnette, Grim put confirmer que le duo n’était pas très alerte, voire carrément pas sur ses gardes. Les deux gars constatèrent en des termes très banal que ça commençait à se faire froid, mais que oui, mais que c’était la saison, aussi, qui voulait ça. Et que le Hans, il ronflait comme un âne, le salopard, que c’était pas mal, aussi, de prendre un coup d’air, au calme, comme ça, entre ami. « Et on a des nouvelles du pigeonnier au Volataire, har ? » « Non-p’, y paraît qu’y’a plus un seul piaf à jeter au dehors. Qu’y serait pas qu’un peu mélancolique, le fauconnier Volataire, dans son perchoir tout vide, sans ses oiseaux… » « C’est pas tant à cause qu’il a plus d’oiseau qu’y doit avoir de la tristesse. » « Hein ? Comment que tu veux dire ? » « Beh, trèvepeste, ces cons d’oiscailles, ils allaient bien que’qu’part, n’est-ce pas ? » « Vrai, vrai, et ? » « Et le Volataire, il est mélancolique à cause que si les oiseaux, eh ben, s’y retournent pas au perchoir, c’est que y a eu personne à ce ‘que’qu’part’, personne qu’y s’est occupé d’eux, personne qu’y retourne ce maudit piaf à ce damné perchoir… » « Où que t’en viens avec tout ça, le philosophe ? » « Fi ! Si y a aucun autre que’qu’part, c’est qu’on est le seul que’qu’part. Que c’est Marbrume seule, que les cités royales sont plus, ni les duchés du sud, ni les marches du nord. On est dernier, dernier de dernier à pas avoir été mangé par les mangeurs, t’entends ? » « … » « … ? »

La conversation s’assombrit d’un silence pesant entre les deux hommes. Et finalement, le gars un petit peu lent décida de balayer la gêne en se rappelant ce qu’ils étaient venus faire ici. « Bon je vais pisser mon bol, moi. » Et en disant cela, il monta en haut du créneau, celui-là même où se trouvait accroché Grim l’espion. Le malheureux, sur la trajectoire de l’urine du garde décidé à se vider par-dessus le rempart, allait être démasqué d’une bien humiliante façon ! La fortune cependant en décida autrement, car le camarade du pisseur en puissant, tourné vers la ville qui s’allumait d’un millier d’yeux jaunes, dit « Regarre. Regarre ça c’que c’est beau… C’est peut-être le dernier que’qu’part, mais c’est pas le plus laid. » « Roh hein, tu me laisses me la couler douce, dis ? » « Diable, t’as toujours manqué de poésie, au vrai… Hé dis, viens plutôt par ci. Comme ça tu vas faire pleuvoir sur les cahuttes aux métèques. » « Arf, je savais que t’étais plein d’idées ingénieuses quand tu ratiocinais pas. » fit le pisseur convaincu, qui descendit du créneau pour faire dos à Grim et admirer, avec son camarade, la cité franche, et viser, tout en dessous, la cabane sur laquelle il allait ‘faire pleuvoir’ sa pisse.
Spoiler:


Dernière édition par Anton Gunof le Jeu 7 Jan 2016 - 21:41, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyJeu 7 Jan 2016 - 1:45
Il crut qu'il allait défaillir sur le champs, d'une simple et fulgurante crise cardiaque. Lui, le vit, ce milicien qui avait visiblement abusé de la boisson. Se plaquant plus encore au mur, Grim se surprit à rêver pouvoir passer à travers, ou du moins, ne faire plus qu'un avec lui.
Son corps entier était secoué de tremblements, et il craignait que ses jambes ne se dérobent sous lui d'une seconde à l'autre. En fait, il en venait même à oublier la raison de sa présence ici. Ces hommes étaient trop dans un état second pour avoir une discussion intéressante. On parla d'un certain Volataire, fauconnier de son métier, qui, apparemment, se désolait de ne plus voir ses précieux oiseaux revenir. Le garde raconta alors que ce devait sûrement être car personne n'était présent pour les recevoir. Il raconta alors que, peut-être, Marbrume était le seul lieu où des gens encore vivants habitaient.

Pour un peu, Grim en aurait été touché. Mais, trop concentré pour ne pas tomber ou ne pas se faire repéré, il ne réagit pas. Et puis, ces hommes étaient beaucoup trop bourrés pour que leurs propos soient vrais … non ? Enfin, il aimait se le dire.
Le silence mit fin à la conversation. Un instant, le jongleur crut qu'il était repéré. Pire encore quand il le sentit se rapprocher.

Pars … pars … pars, je t'en pris.

Finalement, son camarade l'incita à le faire se tourner, et ainsi ne plus avoir Grim dans sa trajectoire. Ni une, ni deux, se dernier en profita pour grimper un peu plus, contournant les miliciens en prenant quelques bons mètres de distance et faisant le tour de la tour.
Puis, le rythme cardiaque anormalement élevé, il posa les pieds à terre de nouveau. Aussitôt, il se détendit, juste assez pour reprendre un minimum ses esprits. Quelle frayeur … Il se sentait tellement soulagé qu'il ne prit même pas la peine d'observer autour de lui. Juste en face se trouvait la tour, apparemment vide. Il ne préférait pas se risquer à y entrer. En fait, il ne voulait se risquer à rien faire d'autre que de redescendre. Il n'avait pour l'instant rien appris de vraiment intéressant. Qu'allait en penser Théodemar ? Et d'ailleurs, comment lui dirait-il ? 'Et bien, d'après certains types bourrés, Marbrume serait la seule ville regroupant de vrais humains.' Pas vraiment convaincant, en effet …

- Bien ... Tout va bien... chuchota-t-il pour lui-même.

Sa voix était enrouée, teintée d'une touche de nervosité bien palpable. Que pouvait-il faire, maintenant ? Il n'était pas spécialement sûr de parvenir à récolter d'autres informations. Le mieux, en fait, aurait été de faire du repérage. Ou de parler, discrètement, en cherchant la faille : demander à un milicien si des réunions étaient prévues, ou n'importe quoi. Plutôt que de se jeter directement dans la gueule du loup sans plan.
Maintenant, il allait partir. Sans demander ses restes.

Vivement, il tourna sur lui-même. Et se retrouva nez à nez avec un homme. Effrayé, un cri étouffé lui échappa tandis qu'il reculait d'un pas, prit au piège. Ses pensées se mélangèrent dans sa tête alors qu'il réfléchissait à un quelconque moyen de s'échapper.

- Je … je, balbutia-t-il, totalement désarmé.

'J'étais juste en train de vous espionner gentiment. Je m'en vais maintenant.'
Intimidé et surtout prit au dépourvu, Grim ne faisait rien d'autres que de balbutier quelques paroles incompréhensibles en cherchant des yeux un moyen de s'enfuir.
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyJeu 7 Jan 2016 - 22:37
Alexander Basel avait trop de temps pour y cogiter. Conscrit de la première heure, quand le duc fit publier les bans appelant à la protection de la cité chaque bürger de Marbrume, il devait entamer son quatrième mois sous les bannières. Le devoir était pesant, mais il l’avait accepté naturellement. Sans famille encore, ni établissement, le jeune luthier travaillait avec son père, un maître respecté par la guilde. Le vieil homme avait déjà donné, et Basel avait entendu dans l’appel aux armes proclamé les échos des vieilles histoires paternelles, d’un aïeul qui avait été des cents héros ayant repoussé les ostes des Vauvrur, à la victoire de Tourbière, et autant de racontôtes dans lesquelles il avait grandi. Place à la relève, maintenant. Il avait été des volontaires que la guilde avait mis au service du duché.

Mais le devoir avait été pesant pour Alexander. La réalité du monde s’était altérée à mesure qu’on s’était effondré dans l’hiver. Sans être astreint au cantonnement permanent, le service et diverses expériences avaient changé drastiquement sa perception du monde. Sa première rencontre avec un mort se solda par de dures pertes du côté de ses compagnons, des gens qu’il avait connu dès l’utérus. On l’avait ensuite ballotté de coutellerie en coutellerie avant de le fixer plus définitivement à la muraille. Seul parmi une majorité de vieux de la vieille, il avait accepté sans rechigner brimades et bizutage, qui allaient de toute façon décroissantes ; et le guet lui plaisait bien. C’était un de ces boulots où vous faire chier vous sauvait la vie. Et ça, ça lui avait bien dit, de vivre. Sa famille et ses amis avaient assez pleuré de morts. Ces morts qu’on ne recouvrait pas dans la terre, pour le salut de leur âme, mais brûlait comme de vulgaires objets hors d’état de servir. Et plus que du deuil, sa disparition provoquerait bien des tracas pécuniaires. La lutherie n’allait pas fort, l’informait aux soupers son père sombrement. Etonnant. Au prix du pain, les réserves de la maison semblaient disparaître. Les malheurs n’arrivant jamais seuls, ils avaient subi deux infractions rien que ce mois, et la seconde se conclut sur une sale estafilade pour son père…

C’était des choses qui aidaient à survivre, mine de rien. Les soirs, de retour de son guet, il allait rejoindre le logis paternel, et s’endormait, avec sa grosse jaque brune de milicien et son bâton, et que d’un œil je vous prie. Il protégeait sa cité et sa famille, ça le rendait fier. Mais ce n’était pas la lutherie… La fabrication de violes et cithares, par exemple, sauf grosse, très grosse bourde, ne pouvait pas détruire l’existence de quelqu’un. Servir dans la milice si. Il l’avait découvert personnellement deux jours plus tôt. Une échauffourée au pied de leur tour les avait contraints à intervenir, et Alexander en avait attrapé un. Il l’avait amené lui-même à la prévôté où, en pleine nuit, il avait assisté et participé à une justice expéditive. La décision fut prise une fois que les deux miliciens eurent donné les faits au prévôt : marqué au fer rouge, banni le lendemain à l’aube. L’ancien luthier fut plus estomaqué que le condamné. Une force qu’il ne comprenait pas très bien avait insisté pour qu’il aille à son marquage, sur la place des Pendus, où on rendait les exécutions de justice, ainsi qu’à sa dernière aube, où il passa pour la grand’porte pour la dernière fois.

Et depuis, Alexander Basel avait trop de temps pour y cogiter. Plus taciturne que de coutume, il n’avait pas fait crisser sa viole de tout le tour de la garde, malgré les huées de ses camarades en manque de musique. Son irritabilité était insolite, car il était d’habitude d’une nature égale. Il se dissipait, se grattait, et la société rigolarde de ses frères d’armes lui devenait insupportable à mesure que leur quart approchait de la fin. A présent il faisait les cent pas, impatient que la relève arrive et que les cloches sonnent. Il se plaignit deux trois fois du retard que prenait l’escouade qui viendrait les remplacer puis sortit prendre l’air. Pour tomber sur Grim Torren.

Cette apparition (il n’y avait pas d’autres mots) était irréelle, et il fallut que l’espion à la manque balbutia en jetant des regards nerveux tout autour pour qu’Alexander prenne conscience de la situation. Son regard froncé par l’appréhension s’écarquilla en même temps que sa bouche s’ouvrit dans un béement de surprise. « Aux… AUX ARMES ! » lâcha-t-il finalement avant de se jeter sur l’intrus qui bafouillait encore des velléités d’excuses tout en esquivant la prise du conscrit Alexander Basel. Le manège de cette molle poursuite dura trois mouvement, et Alexander le tint pour de bon. Dans la tour, la conversation bruyante s’était arrêté sur le bruit des bancs qui se renversent. Le tambour d’un troupeau de bottes arriva sur eux, et des grappes de gants enserrèrent le saltimbanque pour le tracter à l’intérieur.

« ‘l’est marqué ? »
« Mais qu’est-ce qu’il fout là pour l’amour du dieu-cornu ? »
« ‘l’est marqué ou pas ? »
« Basel, il était seul ? Quoi que c’est que ce boxon dans ma tour ? »
« Mais est-ce qu’il est marqué ? »
« Regardez, il a un crochet ! Il a grappiné jusqu’ici, ce petit saligaud ! » « Quoi qu’est-ce qui se passe ? » « On a un petit trou du cul de banni, voilà quoi qu’y s’passe ! » « Hein ? Quoi ? On peut plus pisser tranquille sans que… » « Mais il est marqué ou pas ? » « Le petit enculé nous fait ça à dix minutes de la relève. » « Basel il était seul ? D’où qu’il venait ? » « Du plancher des vaches, il a un grappin j’ai dit, ducon. » « Dix minutes quoi… » « Il est marqué putain ou pas putain ? » « Comment, ducon ? COMMENT DUCON ? » « Est-ce que. Quelqu’un. Peut mirer. Son putain de bras. Savoir s’il EST MARQUE. OU. PAS. » « Ah ouais tiens, c’t’un paria ? » « Y fait un peu propre pour un paria, nan ? »


Pendant toutes ces palabres, qui faisaient beaucoup avancer la situation, il y avait trois gars sur le pauvre saltimbanque qui lui compressaient les poumons contre la lourde table qui mangeait la moitié de la petite pièce. Quand le calme revint et qu’on convint de vérifier son bras, Grim put aspirer un bol d’air comme jamais. On le releva et le débarrassa de sa tunique en tirant sur les lacets sans douceur. Ainsi torse-poil, on le plaqua de nouveau le ventre contre la table avant de palper bras et bottes. « Rien au bras… Un gars comme ça j’en ponds un tous les matins. Mais qu'est-ce qu'il peut bien fiche là ? »
Un gant se perdit dans la chevelure du saltimbanque, l’attrapa, et en deux mouvements brutaux, releva sa tête pour la fracasser un coup contre le bois de la table. « Bienvenue à la tour Kaiser, bouclette, t’as quelque chose à dire avant de redevenir mon maillet pour la nuit ? »

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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyVen 8 Jan 2016 - 0:51
Il y eut un échange de regard. Sur le coup, personne n'aurait pu dire qui d'Alexander ou de Grim était le plus effrayé de découvrir l'autre. Et c'était, d'ailleurs, bien dommage que le jongleur soit aussi surpris, car il aurait allégrement pu profiter de l'instant de flottement du garde pour sauter par-dessus le rempart et disparaître comme s'il n'avait jamais été là.
Au lieu de cela, et tétanisé par l'angoisse, Grim perdit ses moyens. Lui qui, à la base, était relativement doué pour esquiver et fuir, il se retrouva vite entre les serres des miliciens, totalement à leur merci. Pour un peu, il se serait pissé dessus.

Il ne cria pas, Grim. De toute manière, cela n'aurait servi à rien. Qui aurait pu venir l'aider, ici ? Cela n'aurait fait qu'attirer d'autres hommes.
Bousculé comme jamais, le petit homme ne savait plus où donner de la tête. Tous ses repères s'effaçaient au fur et à mesure qu'on le secouait. De sa petite taille, il ne voyait que des mains, des visages parfois, dont les traits étaient camouflés par la faible luminosité, et des bustes. Leur voix se mélangeaient autant que leurs paroles, créant un bordel insupportable dans sa tête.
Son visage à lui, trahissait toute la détresse du monde, et s'il n'avait pas été si tendu, il aurait pleuré. D'ailleurs, ses yeux étaient brillants de larmes. Son petit cœur fragile battait fort. En fait, il avait la désagréable impression d'être un animal, un lapin, par exemple, entre les griffes d'animaux sauvages.

Situation inconfortable.

Il se débattit au début, s'agitant dans tous les sens en ayant de plus en plus de mal à garder une respiration normale, avant de finalement capituler. Il se laissa tout simplement traîner, mollement, victime de son destin tragique. Il fallait aussi dire qu'ils n'y allaient pas de mains mortes, les brutasses. Ça ne l'aurait pas surpris de s'être fait déplacé une côte ou une vertèbre. La tête plaquée sur la table, il se dit qu'il ne pouvait pas subir plus grosse humiliation.

Jusqu'à ce qu'on lui retire sa chemise.

- M... messieurs, cette attitude est déplaisante ! Arriva-t-il à articuler, juste avant que sa tête ne rencontre de nouveau la table.

Tout semblait se passer très vite. On le fouilla, ce qui eut pour effet de le plonger plus encore dans l'embarra, et alors qu'il pensait la torture terminée quand ils remarquèrent finalement son absence de marque, la main qui se glissa dans ses cheveux lui fit perdre tout espoir. Outre la douleur que cela occasionna sur son cuir chevelu, ce fut la suite qu'il retint comme étant 'une vraie attaque'.
Le choc fut brutal, violent, déstabilisant. Un hoquet échappa au saltimbanque qui retomba en arrière, complètement sonné, le nez pissant le sang. Il engloba la zone douloureuse de sa main en fronçant les sourcils.

- Bienvenue à la tour Kaiser, bouclette, t'as quelque chose à dire avant de redevenir mon maillet pour la nuit ?

Pourquoi, mais pourquoi bon dieu, avait-il commis l'erreur de croiser le regard de Théodemar quand il était dans la taverne ? Ce simple regard, pourtant neutre et sans arrière-pensée, avait suffi à transformer Grim en marionnette, dont les ficelles étaient simples à manipuler. Les hommes de Théodemar devaient savoir qu'il s'était fait attraper. Ils savaient tout, tout le temps. Et, avec un peu de chance, ils penseront que Grim s'est fait, au mieux, tuer, au pire, bannir. Et ils les laisseront tranquilles, lui et son père.

Avait-il quelque chose à dire, avant d'être transformé en pâté pour Fangueux ? Oh, tellement, tellement de choses! Il aurait aimé pouvoir se poser, là, et raconter sa vie à cet homme qui lui donnait la permission de parler, commençant par sa naissance, relatant ses souvenirs en pleurant un peu, exprimer un peu la sensation affreuse que cela faisait de se faire éclater le nez contre une table en bois, avant de finalement aborder le sujet de sa probable et imminente mort. Ça aurait au moins le mérite de lui faire gagner un peu de temps.

Non, la seule chose qui sortit de ses lèvres à cet instant fut ces mots futiles et stupides qui n'avaient généralement aucune incidence sur la suite des événements.

- Laissez-moi partir, je ne reviendrai plus, je le jure ...

Un puissant mal de tête venait s'ajouter à la douleur qui tapait à l'intérieur de son nez. Il leva un regard implorant vers ces hommes imposants.

- Je … je n'ai pas eu le choix. Je n'ai pas eu le choix … pas eu le choix …

Ses entrailles se tordirent. Il ravala un sanglot et renifla d'un seul coup, ce qui lui arracha une quinte de toux irritée. Le sang … ce n'était pas très bon.
Lentement, il se mit sur ses jambes et se colla au mur, sa main toujours sur son visage pour tenter de calmer l'effusion d'hémoglobine.

- On en fait quoi, du coup ? S'enquit l'un des miliciens.
- Notre service est bientôt terminé. Ce sera à la relève de s'occuper de lui, non ?
- Peut-être bien. Il est pas vraiment méchant, de toute manière.
- Il fait carrément pitié plutôt.


L'homme qui faisait pitié baissa la tête, aussi effrayé que blessé dans sa fierté. Il referma ses bras contre son buste et eut l'idée idiote de grimper l'intérieur de la tour pour leur échapper. Idée qu'il ne mit pas à exécution. À la place, il se contenta de rester dans son coin en priant tous les dieux. Peut-être que la relève sera plus conciliante.
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyLun 11 Jan 2016 - 13:35
Les mots qui sortirent de la bouche ensanglantée de l’espion laissèrent le milicien maillotin tout pantois. La main toujours dans la chevelure bouclée de la crevette, il écoutait sans trop y croire les supplications et les jurements de ce dernier. Il tourna son regard vers l’assistance, qui semblait elle aussi pris, à défaut de miséricorde, d’une certaine gêne. Le gars parlait dans un parfait marbrumeux, et c’est vrai qu’en guise d’assassin, on aurait pu trouver moins insultant pour la garde. Ce serait donc la victime d’une machination ? Un joueur endetté auprès d’un gars à qui il fallait pas avoir d’ardoise ? Leur prisonnier tout chaud avala un sanglot sanguinolent. Le maillotin le remonta sur ses jambes, comme pour mieux le considérer. Que faisait-on d’un truc pareil ? Il retourna son regard vers ses camarades, qui avaient amorcé une bête discussion. Une partie ne se sentait pas de s’engager dans un interrogatoire en bonne et due forme. Pas si près de la relève. Le coutilier cependant ne goûtait pas vraiment ce genre de tiédeur. Son visage était crispé d’indignation : qu’est-ce que c’était que ces vert qui n’observaient pas la procédure ? Il allait prendre la parole, et expliquer aux pieds-tendres qu’un bout de viande comme ça, on l’attendrissait une heure ou deux avant de le passer au grill. On le faisait cracher, pauvre type ou pas. Depuis les Sarosse, quiconque se montrait un peu badin à l’adresse d’un ennemi, d’un espion ou de quiconque, c’était un quiconque suspect. Son monologue sur l’importance de faire souffrir tout fils de chienne s’en prenant, de près ou de loin, aux intérêts du duc, mourut dans l’œuf car on entendit d’en bas un :

« Servus, les connards ! » suivi d’un,
« C’est la bande au coutilier Glemser qui s’en vient. »
« Ah ! La relève ! Eh ben c’est pas dommage ! »
« Arf, ça va faire des histoires tout ce manège… »


Le maillotin, les bouclettes dudit bouclette entre les doigts, restait dans l’expectative, jetant parfois des regards vers son chef qui s’était désintéressé de leur petit souci pour voir la fameuse relève monter le colimaçon. Un type pas très grand, Anton Gunof put reconnaître notre espion, la gueule lacérée par une estafilade allant de la tempe à la commissure de la lèvre, précéda un vieux borgne tout aussi engageant, plus sévère dans l’allure même. C’était Berndt Glemser, probable que Grim ait déjà vu cette face, aussi vieille qu’inoubliable, un jour ou l’autre de son existence, le gars ayant patrouillé dans la gadoue marbrumeuse pendant des décennies entières. Le coutilier Glemser, en un regard, s’immobilisa et fit un geste au reste de sa troupe de rester où elle était, c’est-à-dire dans le colimaçon. Un silence appréhensif s’installa, que Gunof brisa en désignant le maillotin et son apprenti maillet.

« Eh bah garde Krause, on ramène des filles pendant ses quarts ? » Il écarquilla les yeux quand il dévisagea plus attentivement la fille sus citée. Grim Torren, ici ? Was ?
« Quelqu’un m’explique ce que c’est que ça. » reprit un Glemser agacé en hochant de la tête du côté du saltimbanque rouge du nez jusqu’au torse, nu qui plus est. « On vous a pas appris à ranger son boxon quand les copains viennent reprendre le flambeau ? »
« C’est un… espion, de ce qu’on en sait… » fit l’autre coutilier, pris de court par l’arrivée subite de l’escouade XIII. « Basel vient de nous le retrouver sur le rebord du rempart, et on s’apprêtait à le préparer. »
« A le préparer pour qu’on fasse la sale besogne, hum ? » répliqua Glemser, pas excité à l'idée de commencer un tour de garde avec du bordel dans les pattes. Derrière ça remuait. On se plaignait, à être là, comme des connards coincés dans l’escalier. Face à l’agitation, Glemser se décala un peu sur le côté pour laisser monter le reste des gars. Tandis qu’une foule de soudards venaient se serrer avec ceux déjà présents, Anton glissa quelque chose à Glemser, qui opina du chef gravement avant de glisser un mot à l’oreille du balafré. Au milieu des salutations bruyantes, des questions et des réponses confuses qui anima un instant les deux groupes de soldats qui se rassemblaient dans ce clapier à la densité humaine énervante, Gunof se fendit un passage comme il put jusqu’à Krause et son prisonnier.

« Eh ben crévieux, qu’est-ce qu’y fout là, le Torren ? »
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyMar 12 Jan 2016 - 20:54
Sa respiration était forte, saccadée, haletante même. À la limite de la crise d'asthme. Et puis, tous ces regards portés sur lui n'arrangeaient pas les choses … Il se faisait penser à un petit hamster ayant vécu une belle frayeur.
Lorsque les hommes annoncèrent l'arrivée de la relève, Grim essuya rapidement – et inutilement – son nez et chercha des yeux un visage familier. Un milicien qui, peut-être, traînait souvent au cœur de la ville, et qu'il aurait pu croiser, voir même rencontrer un jour. Tout ce qui avait un jour croisé la route du jongleur savait qu'il n'était pas mauvais bougre, et qu'à part chaparder, très rarement, il ne faisait rien de mal.

Et il reconnut finalement un visage. Cette gueule cassée, là, il la connaissait. Plutôt pas mal, même. Le visage de Denea surgit dans sa tête, et malgré la peur qu'il pouvait éprouver, un sentiment de colère vint lui chatouiller l'estomac.
Quand au vieil homme qui l'accompagnait, ce n'était pas non plus de la joie qu'il ressentit en le reconnaissant. Il lui avait couru après, une fois. À travers tout Marbrume. Bien coriace le borgne. Il avait failli le choper, tout de même. Le dernier visage ne lui disait rien.

Il n'était même pas vexé qu'on le confonde avec une fille. Un peu humilié, peut-être, mais vexé … il craignait trop la suite des événements pour ressentir cette émotion.
D'autres hommes rejoignirent le joyeux rassemblement. Grim se ratatina plus encore, la tête baissée et les muscles crispés, se sentait vraiment tout petit parmi ces armoires. Et il en avait beaucoup pour le peu d'espace qui les englobait, s'en était étouffant. Si ce foutu garde pouvait relâcher la pression qu'il exerçait sur son cuir chevelu, le saltimbanque pourrait tenter une fuite … mais il ne semblait pas décider à détendre ses doigts de ses cheveux, à son grand malheur.

Alors qu'il fixait intensément le sol pour ne pas avoir à affronter le regard de l'un de ces types, une voix l'apostropha, le plongeant dans un profond embarra. Et dans une profonde angoisse quand il croisa les deux billes qui servaient d'yeux à Anton Gunof.

- Et ben crévieux, qu'est-ce qu'y fout là, le Torren ?

Une panique aussi brève qu'intense prit le Torren. Comment le connaissait-il ? Était-ce Hugues de Noblecoeur qui lui avait balancé que Grim lui avait parlé de ces actes de barbaries ? Ou Denea, qui aurait pu jouer double-jeu ?

- Je … non vous faites erreur, je … je …
- C'est un espion ! Se crut obligé de dire Krause. Il a contourné les règles et escaladé les remparts, avec ceci.

Du menton, il désigna à Gunof le petit crochet qui avait aidé le jongleur dans son ascension. Balbutiant, Grim sentait peu à peu son visage perdre toutes couleurs. Lui qui s'était dit que s'il se retrouvait devant Anton, il lui dirait ce qu'il pensait de lui, il se trouvait bien pitoyable.

- Je n'ai pas fais ça dans un but destructeur ! Tenta-t-il vainement. Je … J'ai été obligé.
- Oh, arrête un peu tes récits à l'eau de rose !

Krause lui administra une tape derrière la tête. Le petit homme perdait de plus en plus ses moyens.

- Je vous jure ! Vous me connaissez, non ?

La question était adressée à Glemser, qui assistait à la scène sans vraiment être présent.
Il enchaîna :

- Je ne cherche pas les histoires ! Je n'en veux pas ! J'ai … j'ai été menacé, c'est vrai ! On a menacé mon père !

À moins que l'un de ces miliciens ne soient l'un des hommes de Théodemar, comment pourrait-il apprendre que Grim a avoué ?
Il se mordit la lèvre inférieure pour s'empêcher d'éclater en sanglots.

- Vous devez me croire. Vous me croyez ? Hein ? N'est-ce pas ?

Ses yeux, agrandis d'angoisse, passaient d'un visage à un autre, à la recherche d'un peu de pitié.
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyJeu 14 Jan 2016 - 14:48
De la pitié, il n’en trouva pas beaucoup. Il y avait bien Basel qui tirait une tronche pas possible, mais il détournait le regard, comme pas mal d’autres miliciens, plus intéressés par ce qu’allaient décider les deux coutiliers, en pleine conversation. Glemser faisait bien passer l’idée qu’il fallait apporter le captif aux services intéressés. Pour apocalyptique qu’était le monde, et pour expéditive qu’était la justice de ce monde, l’autre coutilier n’avait pas l’air de sauter au plafond en entendant le projet. Il voulait relâche, comme tous ses gars, s’égailler jusqu’à leurs pénates, revoir leurs chiards et leur femme. En plus, la nuit était tombée, les rues n’étaient pas sûr. Ca voulait dire une heure à clampiner jusqu’aux casernements, puis une nouvelle heure à devoir réexpliquer l’affaire. Si tant est qu’un préteur était disponible et d’entrain pour une condamnation au bannissement, ça voulait dire refaire navette pour ce petit espion pris la main dans le sac, jusqu’aux chambres de la cour de justice. C’était, en somme, des soucis et du péril. La contre-proposition ne se fit pas attendre : eux, ils voulaient bien prolonger un peu leur quart, histoire d’aider à cuisiner le cuistre, ou à bien le lier, pour qu’il ne fasse pas plus d’histoire, mais vraiment, de faire la trotte jusqu’aux autorités compétentes, non, ça ne disait à personne. Certains grognèrent à l’idée de rester une heure de plus dans ce clapier, mais la plupart confirmèrent l’avis de leur chef, par automatisme comme par opportunisme. L’espion était comme un grain de sable dans la machine pas très huilée de la milice. Alors ça négociait à qui mieux-mieux.

Il n’y avait bien qu’Anton qui ne détachait pas son regard du captif. Et de la pitié, il n’en trouva pas beaucoup non plus ici. Le garde Gunof en avait pourtant un peu. Ca lui faisait bizarre de retrouver l’artiste en si fâcheuse situation, et plus que les autres, parce qu’il avait connu son père peut-être, ça lui faisait un peu mal au cœur. Sur son visage, ça se voyait mal cependant, cet élan de miséricorde. Au vrai, sa gueule couturée grimaçait une moue gênée, et ses sourcils se fronçaient, plus à cause du malaise que par sévérité. Il jetait parfois des regards du côté de Krause. Lui était occupé à regarder les négociations comme les autres, mais les œillades du camarade attirait parfois son attention. Il n’y répondait rien, sinon un œil un peu bovin, dans l’expectative, tout en maintenant sa prise sur la chevelure du saltimbanque.

« Non mais… on le prend. »
Gunof avait établi le silence, comme ça, pouf, en une phrase. Les regards pivotèrent dans sa direction, avant d’être rameutés par la voix du coutilier Berndt Glemser. « Comment ça, on le prend ?! » aboya-t-il, médusé.
« Faisez confiance, par merci, Messer. Je m’en porte garant, du ladre, juré sur les andouillers. »
« … »
« Hé. Héhohé. Qu’est-ce que vous entourloupez ? »
L’autre coutilier devint plus suspicieux. Plus interrogant, même. Leur prise avait donc une quelconque valeur ? « D’où que tu le connais, l’homme, qu’est-ce qu’il t’est ? »
« Il m’est rien, dame ! Rien de rien. C’est rien qu’un marmouset qui fait spectacle dans mes rues. » s’agaça l’Anton ainsi pris à partie. « Oh hé hein, merde, vous le voulez ? Gardez-le ! »
Et la conversation de reprendre sous un nouvel angle, et au grand dam des miliciens qui étouffaient parmi les leurs, dans cette salle étroite. Ca ne menait à rien, et finalement, le coutilier, sous l’insistance de ses gars, accepta à contre-cœur d’abandonner la charge du prisonnier et de vider les lieux. Pendant que la troupe évacuait placidement, Anton prit le relai du milicien Krause en agrippant le cheveu de son prisonnier. « Toi tu me suis. » dit-il tout en le tractant jusqu’à l’échelle qui montait au sommet de la tour, au frais. Une main, comme une laisse, contraignait un Grim toujours torse-nu et sanguinolent à monter derrière lui. Quand ils furent là haut, le milicien se contenta de le fixer.


Dernière édition par Anton Gunof le Mer 20 Jan 2016 - 12:10, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyMar 19 Jan 2016 - 17:42
Spoiler:

Le regard de Grim se défilait sans cesse à celui, beaucoup plus intimidant, d'Anton. Il se sentait mal, très mal. Autour, ça parlait, ça supposait, ça négociait. Ça conversait sur le jongleur comme s'il n'était pas là. Lui, bien sûr, aurait bien aimé, ne pas être là, et ne pas avoir à s'inquiéter de son sort misérable. Parce que, bon, c'était bien mignon, tout ça, mais ils étaient tous joyeusement en train de débattre sur sa vie. Ce n'était pas spécialement une position confortable pour lui, qui se mit à penser à ses parents, et même à ses frères et sœur. Il se disait que, peut-être s'il le réclamer assez fort, ils allaient sentir sa détresse, et venir à sa rescousse.

Ahah, quel grand naïf.

Gunof trancha finalement, de sa grosse voix aussi imposante que son regard. Et tout le monde obéit plus ou moins. Apparemment, c'était ce qui leur manquait, un homme prêt à réellement prendre une décision.
Si Grim avait été plus provocateur, probablement qu'il aurait pris la parole. Peut-être juste pour lancer un petit 'coucou je suis là' plein de désinvolture, mais au moins pour dire, quoi. Parce que, rester-là à attendre de savoir à quelle sauce il sera mangé, en plus en se faisant rabaisser, ce n'était pas ce qu'il avait vécu de plus folichon dans sa vie.

Enfin, il y eut du mouvement. Le saltimbanque passa d'une main à l'autre en serrant la mâchoire. S'il ne perdait pas une poignée de cheveux à la fin de cette aventure, bien-chanceux il serait. Selon le dénouement de l'aventure, certes.

Et Grim suivit avec peine, évoluant à moiti nu dans le froid mordant de la nuit, presque aveuglé par son nez gonflé et limité dans ses mouvements. La main d'Anton crispé sur son cuir chevelu lui fit penser à un serpent immobilisant sa proie, et cela lui rappela à quel point il n'aimait pas les serpents.

Quand les deux hommes se retrouvèrent face à face et que, de nouveau, les yeux du milicien fixaient le jongleur, ce dernier se renferma plus encore sur lui-même, le cœur battant, la gorge serrée, effrayé à l'idée d'être seul avec lui à cette distance du sol. Il serait simple pour Anton de le jeter par-dessus le muret. Et le pire, c'était que personne ne lui en voudrait de le faire.
Il était encore plus impressionnant de se trouver face à lui que Grim ne pouvait s'empêcher de penser à ce qu'il avait fait endurer à Denea. Elle ne lui avait fourni aucun détail, et cela contribuait à rendre son imagination plus fertile encore. Elle avait dû vivre un véritable cauchemar.

Cette pensée suffit à peindre sur le visage du petit homme une légère mine de dégoût. C'était cela : le dégoût. Il était écœuré de ses hommes qui profitaient de leur force pour rabaisser les autres et pour imposer leur soit-disant toute puissance. Il était écœuré, lui, de ne rien pouvoir faire et d'être aussi soumis que les autres. Il rongeait son frein avec véhémence, même devant l'un de ces hommes qu'il méprisait tant. Sans rien dire, parce que, de toute façon, il ne pouvait rien faire.

Il se rendit compte qu'il tremblait, mais ne sut pas pour quoi exactement. Lentement, il leva la tête pour affronter le regard perçant du dominant, referma les bras sur son buste pour tenter de se réchauffer un minimum. Sur ses bras, les poils se dressaient. De la fumée épaisse et blanche s'échappait de sa bouche à chaque respiration. Le silence, quant à lui, était étouffant, assommant. Si présent que lorsqu'il ouvrit la bouche pour parler, sa propre voix sonna étrangement à ses oreilles.

- Je vous en conjure, messire, ne vous montrez pas injuste avec moi.

Cette phrase était plate, sans vraie émotion, et cela l'étonna même.

- J'ai été contraint, sous menace de mort. Pas que la mienne. On cherche des informations, en bas. Certains sont virulents, avides de pouvoir et d'argent. Ils n'hésitent pas à corrompre et briser des vies.

Il hocha la tête pour appuyer ses propos avant de fuir de nouveau son regard.
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyMer 20 Jan 2016 - 12:44
Il se faisait frisquet, ces derniers jours, et Anton s’était habillé en conséquence. Sous sa cape fourrée, il portait une autre fourrure aux épaules, au dessus du surcot, qui devenait trop léger pour ces gardes nocturnes aussi interminables que glacées. L’artiste ne devait plus en pouvoir de geler… Enfin, il pourrait bien subir ça pour le laps de temps de leur tête-à-tête, surtout quand on songeait à ce qui suivrait pour lui. Car il était promis au grand froid, sous la forme de la mort ou de l’exil, à cause de ce qu’il s’était risqué à faire. C’était à peine si les marchands ne coupaient pas eux-mêmes les doigts des voleurs, ces derniers temps, et on tirait sur un badaud qui marchait trop vite, dans le doute, et avec la bénédiction des prévôtés, trop dépassées et trop rétives à mener des enquêtes qui risqueraient de salir le nom de la garde. Alors ce petit espion à la manque qui s’incrustait, à l’avantage de la nuit, sur la sacro-sainte muraille, dernier rempart face à la Fange, on pouvait parier sans trop risquer qu’il aurait un reste de vie aussi court que désagréable.

Malgré son allure, et malgré cette situation qui ferait pâlir un optimiste invétéré, Grim entama la conversation sur un ton étrangement calme. Ca n’aida pas à démêler le vrai du faux, ce qui fit laissa le garde Gunof quelque peu perplexe. Une histoire de menaces, d’informations, de corruption et de meurtres. Ca semblait juteux, mais ça manquait de noms propres. Il soupira quand Grim retourna à un mutisme fuyant. Réfléchir dès la première heure d’un quart n’avait rien d’agréable. Il n’était même pas soûl. Finalement Anton décrocha son outre de vin et la jeta sur son prisonnier, dont la bouche était encore couverte de sang, malgré les essuyements vite faits de l’artiste. « Rince-toi le gosier tant que c’est encore tiède. » lui commanda-t-il. Et comme il buvait à l’outre, le milicien de reprendre la parole. « Je peux que t’accroire, Grim, je te sais gentil garçon… Je sais aussi que mon père et le tien partageaient le pain, d’antan. » L’amorce était facile, mais pas dénuée de vérité, il semblait à Anton.

Il avait déjà entendu dire qu’Ewart Gunof, cette âme tendre, avait déjà frayé un peu avec ce sorcier de Sven Torren. Une certaine sensibilité, humaniste et artistique, était connue du côté du paternel et, bien qu’adolescent, Gunof ait haï le chef de famille pour cette faiblesse, ces aspirations esthétiques, pour coûteuses qu’elles purent être pour la famille Gunof, résonnaient chez Anton, qui les subissait en silence. S’il lui avait été aisé de mépriser les trouvères et autres crève-la-dalle crapuleux, abusant ou non des élans de son vieux, il était plus difficile d’avoir une dent contre la musique, le chant, la danse en tant que tel. C’aurait été comme essayer de détester la joie, la beauté ou le bien. Et Anton n’en était pas encore à un tel point de déni.

« … Mais faut que tu me donnes plus si tu veux pas finir sur la roue, et ton cadavre au bûcher… Dis-la chose comme elle est, et rien qu’à moi, dis qui c’est qui te fait des affaires, et myssègue te gardera de tous les malheurs qu’il peut, vrai de vrai. »
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyJeu 21 Jan 2016 - 18:58
Il accueillit le vin avec ferveur et n'hésita pas à en vider la totalité, se remplissant le gosier tant qu'il le pouvait. La chaleur du liquide lui procura immédiatement un plaisir sans fin et lui permit de faire remonter, l'espace d'un instant, sa température corporelle.
Une fois rassasié seulement, il se concentra sur les paroles d'Anton Gunof, et se trouva fort dépeuplé quand il annonça que leur deux pères se connaissaient. Sven ne lui en avait jamais parlé. À vrai dire, Sven ne parlait que très peu, et n'était pas du genre à raconter sa vie, surtout ce genre de futilités. Même à son fils.

Le jongleur lui jeta une œillade en coin, un peu curieux, un peu méfiant aussi. Il doutait un peu de ses propos tout de même, même s'il ne voyait pas pourquoi il lui mentirait. Pour obtenir des informations ? De ce qu'il savait, Gunof n'était pas souvent du genre à user de ruses pour arriver à ses fins. Enfin, après tout, il ne savait pas grand chose, le Torren. Il s'était lui-même imaginé la personnalité de cet homme en fonction de ce qu'il avait pu entendre à gauche à droite, et en se basant surtout sur ce que lui avait raconté Denea.

Il déglutit.

Anton voulait en savoir plus. Il voulait des noms, du concret. Il voulait ce qu'on avait interdit à Grim de donner. Car Théodémar le saura peut-être. Et alors, il ne voulait pas savoir ce qu'il était capable de faire pour le punir. Et se dire qu'il pourrait être sous la protection de Gunof, celui-là même qui souilla son amie … C'était inconcevable. Contre ses principes. Mais … Pouvait-il faire autrement ? Pouvait-il agir avec sa fierté mal-placée au risque de faire périr ses proches, et lui aussi, par la même occasion ? Dilemme, tragédie, tristesse !

- Je … si je vous le dis, il nous fera tous tuer ! S'étrangla-t-il.

Le calme qui émanait de lui précédemment était maintenant loin derrière. À présent, Grim était à deux doigts de fondre en larmes. Il réfléchissait, se prenait la tête à chercher seul des solutions, à trouver des failles, à chercher le moindre petit truc qu'il pourrait saisir et utiliser à son avantage. Lui qui n'était pas du genre à utiliser son cervelet, le voici qui tentait par tous les moyens de mettre son peu de capacités à profit. Et c'était pas facile, vraiment. Un exercice compliqué qu'il n'avait jamais vraiment fait. Autant dire qu'il n'avait pas trouvé beaucoup d'idées.

À présent, il levait inconsciemment sur le milicien un regard implorant. Il se haïssait de ne pouvoir rien faire. Il était énervé, désespéré et effrayé de tous ce qui lui arrivaient. Devant lui se dressait le violeur de l'herboriste, et il ne faisait rien d'autre que de se lamenter. C'était affreux, ce sentiment d'impuissance.

Il cligna des yeux, plusieurs fois. Deux grosses larmes salées tracèrent un sillon sur ses joues.

- Il s'appelle Théodémar Ecuviel. Il s'agirait d'un riche marchand, il est toujours accompagné de ses deux armoires et il tue de sang-froid quiconque ose le contredire.

Un frisson le parcourut quand l'image du vieil homme gisant face contre terre lui revint. Il prit une pause pour faire passer la nausée et reprit. Sur son visage, les larmes coulaient toutes seules, inlassablement, offrant un tableau pitoyable au milicien. L'intonation de sa voix était instable, la commissure de ses lèvres tremblaient et ses prunelles bougeaient frénétiquement sans jamais s'accrocher à rien.

- J'étais au mauvais endroit au mauvais moment, j'ai pas pu y échapper. C'est pas possible qu'il existe des gens comme ça …

Pas possible ? Il en côtoyait souvent, pourtant.

- Je me retrouve coincé. Et je risque ma vie pour lui. Pour ne pas mourir de ses mains.

Un hoquet le fit taire une fraction de seconde. Théodémar allait savoir qu'il avait parlé. Et alors ce sera terrible pour lui et sa famille.

- Faut pas le laisser … Faut pas le laisser faire du mal. Faut pas qu'il massacre mon père. Le laissez-pas là-bas.

Ses mains se plaquèrent sur sa face pour cacher ses yeux.

- Jetez-moi au bûcher ou bannissez-moi, mais le laissez pas faire ce qu'il désire, je vous en prie.
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyLun 25 Jan 2016 - 11:15
Le milicien écoutait attentivement ce que l’entrecoupement de sanglots de Grim laissait passer comme renseignements. L’affaire avait l’air plutôt grave, si on se fiait à l’état second dans lequel la confession avait plongé l’artiste. Après, c’était effectivement un artiste, possible qu’il ait la larme de crocodile dans son répertoire, et qu’avec le froid et sa situation compliquée, le saltimbanque se soit décidé à vendre la meilleure scène de sa vie, qui serait écourtée en conséquence si sa performance ne prenait pas du côté de Gunof. Pourtant, malgré la méfiance qui revenait assez habituellement chez l’officier sourire lorsqu’il conversait avec qui que ce soit, le supposé simulateur lâcha un nom auquel Anton ne se serait jamais attendu. Le captif avait préparé la venue de ce nom dans un suspens pathétique, et c’est les larmes sur les joues qu’il livra son employeur, et à peine eut-il rappelé à Anton de quoi il était capable qu’il retomba dans un état de tremblement.

Le ladre ne semblait pas bien rassuré de lâcher le morceau, au contraire, il épiait aux alentours comme s’il croyait son mécène-tortionnaire capable de recueillir ses informations des oiseaux nocturnes. Pendant ce temps, le garde Gunof prenait toute la mesure de l’aveu du trentenaire, distrait par ses calculs tandis que ce dernier enchaînait les supplications et les phrases sur l’horreur que produisait sur lui son patron. Théodemar Ecuviel, Ecu-Rouge, le Rotschild de Marbrume, faisait parler de lui contre son gré. Malgré un sérieux coup pris avec le gel, voire la mort, du gros commerce, il restait un de ces hommes qui pesaient au sein de l’ex Cité-Franche. On lui réputait quelques bons contacts au sein de la milice, et il n’était pas rare d’entendre que ses nervis provoquaient quelques soucis en différents points du bourg.

Pas besoin d’avoir du flair pour renifler une affaire qui suintait le trèfle. Anton avait un agent de l’Ecu rouge, nul doute qu’il pourrait monnayer une telle prise pour un bon prix, voire, sur du plus long terme, se servir du saltimbanque pour se présenter au richissime bonhomme. L’hypothèse d’un partenariat juteux enflamma les yeux noirâtres du milicien, qui s’anima soudainement. Il dégagea les mains du visage de son captif, ses gants agrippant les avant-bras d’un Grim qui, surpris, n’en menait pas large, bousculé qu’il était.

« Ecuviel, tu dis ? Pourquoi tu me mens, hé ? Qui tu caches ? Ecuviel c’est impossible ! Raconte, raconte la vérité, foutu enfant de putain ! » Il avait dit cela dans un grondement rapide tout en le secouant, comme on perturbe un arbre pour en faire tomber des fruits.
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyLun 25 Jan 2016 - 21:35
Il sursauta lorsque les deux grosses mains de Gunof se refermèrent sur ses frêles poignets, le forçant à le regarder. Et, la mâchoire serrée, le milicien se mit à secouer l'artiste en le traitant de menteur. Ce dernier ne pleurait plus, trop effrayé pour oser verser la moindre larme. Les yeux grands ouverts, il fixait avec angoisse le regard fou que le soldat dardait sur lui alors qu'il le confondait avec une poupée de chiffon.

La voix teintée d'une panique difficilement contenue, Grim s'écria, désespéré :

- C'est vrai, c'est vrai, je vous jure que je ne mens pas ! Deux de ses hommes me surveillent jour et nuit, ils sont discrets mais si vous me laissez partir et que vous venez sur le terrain, vous me croirez !

Il doutait qu'Anton prenne le temps d'agir pour si peu. Il doutait qu'en réalité, il se fiche complètement de cette histoire et qu'il cherche seulement une excuse pour l'abattre sur le champs. Comment pouvait-il le convaincre ? Grim n'était qu'un villageois comme les autres, petite tâche dans l'immensité du bas-peuple qui peuplait la ville. Sa parole, à côté de celle d'un homme tel qu'Ecuviel, ne valait pas un sous.

- Il faut me croire ! Qu'aurais-je à gagner si je mentais ? Je ne mens pas, je ne suis pas un menteur !

Sa dernière phrase transmettait un léger accent de colère.

- Je vous en conjure, laissez-moi, vous ne me reverrez plus jamais, vous n'entendrez plus jamais parler de moi.

Les doigts du milicien serrés sur ses poignets lui faisait mal. Le souffle court, il cherchait tous les arguments possibles pour faire tourner la chance de son côté, et peut-être – osait-il rêver -, acquérir un semblant de confiance de cet homme qu'il craignait tant.

- Vous n'avez qu'à vous rendre à l'auberge que tient un certain Tom, près du Port. Juste, demandez, posez des questions. Ecuviel a exécuté un vieil homme qui voulait m'aider. Tout le monde l'a vu. C'est vrai, je vous assure !

Il hochait frénétiquement la tête avant d'avaler sa salive avec difficulté. La mort de ce pêcheur l'avait profondément marqué, tant par la brutalité de l'attaque que par les soubressauts effrayants qui avaient secoué l'homme avant qu'il ne s'éteigne définitivement. Il était impensable qu'une personne saine d'esprit assiste à une telle horreur sans sourciller.

- Que puis-je faire pour que vous me laissiez partir ? Sanglota-t-il.
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MessageSujet: Re: Opération Infiltration   Opération Infiltration EmptyMar 26 Jan 2016 - 14:36
« Uff… Tu peux rien faire que fermer ta gueule jusqu’à ce que je te dise de l’ouvrir. Va falloir m’accroire sur ce coup-ci, klär ? » Et le saltimbanque d’hocher de la tête avec la même frénésie qu’auparavant, signifiant au garde qu’il agréait à sa suggestion. « Bien… » Anton avait un air peiné, le même qu’il avait un étage en dessous, quand il croisa pour la première fois (ou la deuxième) le spectacle pathétique de ce saltimbanque reconverti dans les besognes secrètes. C’est que ça avait l’air abominablement vrai, ce qu’il dégoisait, le petit artiste. Les paroles comme le langage corporel, à moins qu’il ne fût un acteur de haute voltige, disaient la vérité toute nue.

Les deux hommes étaient enchevêtrés, le captif se tenait contre les bras d’Anton qui ne se sentit pas de lui retirer ce maigre contact humain. Il sanglotait maintenant, déversant des larmes qui n’avaient pas voulu sortir plus tôt. Il en avait vu, des contrits, mais ce n’est pas ça qui lui faisait tirer une drôle de triste mine, au garde. C’était ce qui allait suivre. Anton espéra que le vin chaud que ce sagouin avait avalé avec une telle soif faisait déjà son effet sur le corps frigorifié du Torren. Il plaça un gant contre la joue glabre de l’espion à la main, forçant un sourire qui se voulut rassurant.

« Rien de personnel… » Il chassa le gant du visage du saltimbanque. La main du milicien revint sous la forme d’un pain : Grim attrapa le bourre-pif en pleine mâchoire, manquant le faire par-dessus la balustrade. « Mais personne croira que tu l’as fermé si ys te retrouvent la gueule intacte. » Le saltimbanque n’eut pas le temps de répliquer qu’un autre gnon lui percutait le faciès avec violence. Un crochet le heurta à l’abdomen, lui coupa le souffle, le plia en deux. Il n’eut pas eu le temps de songer à cette drôle de posture d’un coup de genou accueillit son nez, qui craqua méchamment.

« MEUTUVAPARLER HURESOHN ?! (Encore navré, mon vieux) » Une pluie de coups lui ouvrait le visage, les gantelets métalliques du milicien choquait ses dents à les faire péter. « QUITUCOUVRE, RACLURE ! (Ca fait plus de mal à moi qu'à toi.) » Un coup de botte, un coup de gant, des étoiles dans la tête, du sang dégoulinant du nez. Ce n’était pas sa nuitée, au Grim.



Un peu plus tard, la trappe qui reliait le sommet de la tour au corps de garde s’ouvrit. Les miliciens tournèrent la tête vers elle comme un seul homme, intrigués par la sourde conversation, puis le méticuleux interrogatoire, qu’ils avaient pu entendre. Rien n’arriva du sommet, puis, quelques secondes après que la trappe se fut ouverte, en tomba, comme un fruit mûr, un Grim en bouillie et inconscient, droit sur Brumel, qui s’était immobilisé au pied de l’échelle. « Merdre, Gunof, tu pourrais prévenir ! » fit ce dernier après s’être pris la carcasse de l’espion en pleine gueule. Gunof, sans un mot, descendait à son tour, en se servant de l’échelle quant à lui. « Il est pas mort, hein ? Merdre… tu l’as claqué ? » La pâtée humaine que constituait le Torren profita de cet instant pour faire savoir qu’il était toujours de ce monde, avec son nez, qui fit une ou deux bulles de sang.

« Il a rien lâché. A la fin de quart, je le mets aux fers et j’y remets un bon coup. » déclara, péremptoire, Anton, dont les yeux brillaient de quelque chose de mauvais.



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