Politique de coopération | Rosen

29 Février 1167

Cela faisait plusieurs jours que lui et ses hommes la traquaient. Camoufler dans la végétation, ils attendaient encore et encore qu’une opportunité se présente à eux. Plus le temps s’écoulait, plus ils cherchaient de nouvelles idées, de nouvelles solutions sans pour autant en trouver une suffisamment satisfaisante. Bref, certains commençaient à vouloir rebrousser chemin lorsque soudainement leur proie sortit d’elle-même de sa tanière.

Un sourire se dessina sur les lèvres sèches du Renard. La chance l’avait encore souri. Il était temps. Mais il n’était nullement question de précipitation. Non, ce ne fut que lorsqu’ils furent convaincus que la Belle de Sombrebois était seule et vulnérable que le groupe de banni passa à l’action. Le crâne recouvert d’une capuche et le visage d’un foulard pourpre, Rowan sortit des bois afin de faire face et barrer la route à cette dernière et sa monture.

« Halte ! »

Dit-il en lui faisait signe de s’arrêter. À peine eut-elle le temps de l’apercevoir que deux hommes apparurent de chaque côté du chemin, deux autres derrière sa monture. Tous étaient armés, deux possédaient des flèches prêtes à être tirées. Nul doute que la donzelle avait compris qu’elle était tombée dans un guet-apens. Elle n’était clairement pas en bonne posture et avant même qu’elle ne tente quoi que ce soit, le premier reprit la parole.

« Je ne tenterais rien de stupide, si j’étais vous. On ne voudrait pas heurter l’enfant que vous portez par m’égard, n’est-ce pas ? »

Était-ce une nouvelle menace ? Certainement. Malgré sa maigreur, malgré le large manteau de fourrure qu’elle portait, ils savaient. Ils savaient qui elle était et ils savaient qu’elle portait en elle l’héritier de Sombrebois. Tout le processus était un nouveau plan obscur du rouquin. Il n’avait pas oublié ses ambitions concernant le domaine réaménager au sein des Marais, tout comme il n’avait pas oublié l’arrogance de son maître principal.

« Suivez-nous et aucun mal ne vous sera fait. »

Déclara-t-il alors avec autorité. Lui, il ne la menaçait avec aucune arme. Il se tenait là, debout au milieu de la route menant tout droit à Balazuc. Toutefois son regard, ses yeux bleus, ne laissèrent aucun doute : aucune émotion, aucune pitié ne s’y trouvait, en aucun cas, ces hommes hésiteraient à la malmener si venait à ne pas coopérer.

Restait maintenant à savoir comment elle réagirait à tout cela. Évidemment, Rowan et ses camarades restaient à l’affût. À l’affût de ses gestes, de ses paroles, mais aussi des environs. Il ne faudrait pas oublier que des miliciens polluent ces routes tout autant que la fange elle-même.

Politique de coopération

Rosen feat Rowan

J’en ai assez de tout ça, j’en ai assez. Et j’ai besoin de prendre l’air ! Alors je sors du château sans rien dire à personne, juste mon arc sur le dos, ma dague sur ma cuisse et ma besace avec le minimum pour m’alimenter autant que possible malgré mes vomissements. Le temps passe, toujours pas de trace de Hector et son absence me laisse un vide toujours plus abyssal.

Je suis donc le chemin jusqu’à l’écurie et je selle rapidement ma jument afin de partir dans les marais. Desmond ne pas aidée avec ses conneries et j’ai juste envie de m’éloigner de cet endroit maudit qu’est Sombrebois. Oui, un endroit maudit. C’est ça, pour moi.

Je monte alors sur FrouFrou et m’enfonce toujours plus loin dans les marécages. Hector… il faut que je le retrouve. C’est pas normal que personne ne l’ai vu… j’ai promis une récompense, et personne ne l’a vu nul part.

Il ne peut être à Marbrume, ça je le sais puisqu’il en est banni. Mais les gens ont dû aller voir tous les villages… même Alaric, Desmond et d’autres sont chacun de leur côtés partis chercher dans tout le royaume.

Et on ne l’a aperçu nul part, ni dans les villages, ni dans les marais... On aurait dû apercevoir son corps quelque part… je ne veux pas croire qu’il se soit relevé, c’est impossible, ça va me rendre folle.

Alors comme la dernière fois, j’avance en direction de Balazuc, descendant de temps à autre pour fouiller certaines zones pieds. Oui, c’est inconscient que je sois partie seule, mais je crois que plus rien n’a d’importance désormais et que ce qu’il peut bien m’arriver m’est égal.

Et c’est donc ainsi, à mi chemin de Balazuc, que je me fais brusquement arrêter par des malfrats. Ma monture se met à cabrer dangereusement et je me jette en avant par réflexe pour ne pas chuter en arrière.

« Tout doux ma belle, tout doux... »

La priorité reste d’éviter de me rompre le cou lors d’une chute mortelle et donc pour cela de calmer ma jument. Lorsque FrouFrou se calme à peu près - chose assez relative étant donné son trépignement – je peux analyser la situation ;

je suis entourée par cinq hommes aux visages couverts et je n’ai pas le temps de prendre mon arc. Car je vois deux des hommes qui ont déjà une flèche encochées dans le leur, et deux autres sont également armés. Seul celui qui me parle, en face de moi, n’est pas armé.

Visiblement il sait que je suis enceinte et je soupire alors qu’il me promet de rester saine et sauve si je les suis. Bon, s’ils avaient voulu me tuer, ils l’auraient fait directement. C’est déjà une bonne nouvelle !

« Chic, une escorte ! je lance sur un ton provoquant. Voilà qui est bien aimable de votre part... »

Je suis assez énervée en ce moment, c’est vraiment pas le temps de me faire chier.

27 Février 1167

Plus les années passaient, plus Rowan commençait à penser à avoir un certain don. Pourquoi devait-il toujours se retrouver face à des femmes de caractère ? Oh, qu’on ne se méprenne pas, il les préférait en général, mais cela ne facilitait jamais ses affaires. M’enfin bon, la Dame semblait d’humeur provocatrice. Et même si elle semblait coopérative pour l’heure, il n’avait aucun doute qu’elle saisirait toute occasion pour s’enfuir. Restait donc à voir comment l’amadouer.

« La meilleure même, croyez-moi. »

Lança-t-il pour rejoindre son humour sans pour autant émettre le moindre sourire. La situation ne s’y prêtait pas après tout. Enfin, lentement et avec précaution, il s’approcha pas à pas de la jument. Il observa son attitude afin d’essayer de la rassurer avant de relever son regard sur sa propriétaire pour en faire de même.

« Nous avons à vous parler, en privé. »

Ses gants de cuir effleurent la jument, observant toujours ses gestes avant de se saisir, si possible, des rênes. L’objectif était simple, guidez le cheval jusqu’à un abri sécurisé de Bazaduc afin de poursuivre leur petite entrevue. Après tout, ils ne voudraient pas être interrompus par la fange, n’est-ce pas ?

Dans tous les cas, les hommes restèrent particulièrement vigilants. Cela se voyait, ils avaient l’habitude de l’extérieur et des marais. Ils connaissaient par coeur leur environnement et savaient détecter le signe. Ils ne prêtaient pas non plus facilement leur confiance… Ainsi ce fut sans surprise que l’un d’eux se rapprocha également avant de tendre ses mains en sa direction.

« Arc. »

Ils ne comptaient pas prendre le risque de lui laisser la moindre opportunité, bien qu’ils se doutaient qu’elle devait également avoir une lame sous ses jupons. C’était un peu devenu la mode chez les femmes après l’arrivée de la fange, mais un problème à la fois. De toute manière, une lame cachée ne pourrait pas leur faire grand-chose actuellement, contrairement à une flèche bien placée.

« Vous n’en aurez guère besoin. »

Ajouta simplement Rowan sur un ton calme, mais qui lui faisait bien comprendre qu’elle n’avait guère le choix. De là, les hommes attendirent dans un profond silence. Allait-elle continuer de coopérer ou commencer dès à présent à leur poser des soucis ? Dans tous les cas, elle allait devoir se décider rapidement, car chaque seconde passée ici était une seconde plus proche de la mort, autant pour eux que pour elle et son enfant.

Politique de coopération

Rosen feat Rowan

La meilleure, la meilleure… s’il y tient, je veux bien lui accorder l’honneur de le croire, tant qu’il ne m’empêche pas de faire ce pour quoi je voyage. Remarquez, si je suis partie en hâte de Sombrebois avec FrouFrou, c’est plus pour bouger et me changer les idées que dans l’espoir de retrouver Hector.

Depuis tout ce temps et toutes les recherches effectuées, il n’a toujours pas été retrouvé. Cela va faire une lune, bientôt, qu’il a disparu alors qu’il se rendait au Labret et je commence à perdre tout espoir de le retrouver.

« Je vous écoute, je vous écoute... réponds-je à mon interlocuteur aux yeux bleus. Je vous rassure, FrouFrou est une bonne fifille, elle sait tenir sa langue alors vous pouvez parler devant elle… il n’y a pas besoin de me parler en privé, nous nous disons tout de toute façon, pas vrai ma jolie ? Oui c’est une bonne fifille ça, oui ! »

Mon intonation est presque joyeuse, contrastant terriblement avec ce bouillonnement permanent que je ressens au quotidien. Non, je ne n’ai pas peur le moins du monde de ces hommes et après tout, je suis tellement habituée aux emmerdes à présent ! S’ils peuvent donc me changer les idées et m’offrir un peu d’aventure, pourquoi pas ! Mais j’en ai surtout marre de tout ça.

Lorsque mon interlocuteur s’approche de ma monture, je peux même apercevoir qu’il doit être roux à ses sourcils. Je donne mon arc à la personne qui me le demande sans faire d’histoire.

« Si c’est de l’argent ou de la nourriture que vous voulez, je vous arrête tout de suite, c’est la crise et je n’ai rien à vous offrir. »

Au fond de moi, je me demande si Hector n’aurait pas pu tomber sur eux. Je sais bien que les brigands sont nombreux par les temps qui courent, mais ceux-là, ils semblent savoir qui je suis et peut-être que c’est l’éventuelle demande de rançon à laquelle je me prépare depuis sa disparition.

« Je suis assez occupée en ce moment, alors si vous pouviez me faire gagner du temps ça serait vraiment bien. Il se trouve que je suis en pleine recherches et que j’aimerais éviter de perdre du temps ou de l’énergie inutilement... Alors si vous avez une information qui peut grandement m’intéresser, je vous écoute ! »

Pour une fois que je ne suis pas trop chiante… j’espère que ce type va faire un effort pour se montrer un peu conciliant et ne pas me faire perdre trop de temps. Autrement… il risque de bien de trouver le temps insupportablement long en ma présence, je peux vous le garantir.