Le terrible voleur

✵ 02 février 1167 ✵

La nuit tombait sur Marbrume, emportant avec elle la lumière qui éloignait les cauchemars. Cela faisait plusieurs mois maintenant, que Théanna se trouvait dans le Labourg et elle avait rapidement compris qu'à la nuit tombée, il valait mieux être chez elle. Non seulement les fangeux rôdaient dans les coins sombres et humides du chaudron, mais d'autres créatures tout aussi cruelles régnaient également la nuit. Des créatures masculines aux idées bien arrêtées sur l'utilisation qu'ils feraient d'elle. Sortir lorsque la lune était reine, mettrait inutilement sa vie en danger et l'apothicaire estimait avoir déjà bien assez tenté le sort ainsi. Alors, dès que le soleil quittait les cieux, elle regagnait sa petite demeure. Sa maison n'était pas parfaitement sécurisée, mais elle pouvait au moins ressentir un semblant d'illusion lorsqu'elle se laissait aller dans les songes. Théanna possédait un rituel bien particulier, qu'elle répétait chaque soir, lorsqu'elle fermait son échoppe.

Elle vérifiait chaque recoin, observant si tout était à sa place. Ensuite, elle faisait un brin de toilette avant de manger, quand il lui restait encore quelque chose à se mettre sous la dent. Elle poussait alors son bureau devant la porte et vérifiait qu'il était bien calé avant d'enfin pouvoir monter dans son lit et profiter d'un sommeil mérité. Mais ce soir, elle ignorait pourquoi, elle était bien plus fatiguée que les autres jours. Il fallait bien avouer qu'elle n'avait pas arrêté un seul instant depuis qu'elle s'était levée et l'épuisement physique se faisait ressentir. Ajouté à cela le fait qu'elle n'avait pas mangé un véritable repas depuis trois jours et l'épuisement moral s'ajoutait au premier.

Théanna bailla, avant d'étirer ses membres douloureux. La faim lui tenaillait l'estomac, nouant un nœud désagréable dans le ventre. Elle s'approcha de son bureau pour récupérer le petit morceau de pain qu'elle était parvenue à négocier en paiement d'un de ses soins. Il n'était pas frais, mais cela lui importait peu, elle n'avait aucunement le droit de se montrer difficile quand il s'agissait de nourriture. Et puis... Elle avait déjà consommé bien pire pour survivre. Elle dégusta lentement son bout de pain, désireuse de faire durer cet instant le plus longtemps possible, mais hélas, cela ne durait jamais assez longtemps. Son ventre gargouilla à nouveau, signe qu'elle n'était pas du tout rassasiée, ce qu'elle savait déjà. Poussant un long soupir, elle secoua la tête et entreprit de réaliser son rituel du soir. Une fois chaque recoin de sa maison analysé, elle poussa son bureau contre la porte.

Cette dernière épreuve l'avait vidée de ses forces et elle en oublia de vérifier si le bureau était correctement positionné. Quelle erreur elle venait de commettre. Montant l'échelle qui lui permettait d'accéder à son lit, elle s'écroula dessus et ferma immédiatement les yeux, se laissant aller dans un tout autre monde.

✵ Quelques heures plus tard ✵

Théanna ignorait depuis combien de temps elle s'était assoupie, mais l'état vaseux dans lequel elle se trouvait, lui indiquait que cela devait faire un moment qu'elle dormait. Habituellement, son sommeil était léger, de peur que quelqu'un pénètre dans sa demeure et lui vole quelque chose ou ne fasse pire encore. Elle ignorait ce qui avait bien pu la réveiller cette fois et elle écouta donc les bruits. Lorsqu'un cliquetis de verre résonna dans le silence ombré de sa maison, le corps tout entier de l'apothicaire se raidit d'angoisse. Elle était persuadée d'avoir entendu quelque chose juste en dessous d'elle, ce qui signifiait que quelqu'un ou quelque chose s'était introduit chez elle. Une poussée d'adrénaline lui parcourut le corps, faisant trembler ses jambes. Les dernières traces du sommeil disparurent à la vitesse de l'éclair et son cerveau se mit à réfléchir à toute allure. Qui était-ce ? Pourquoi venait-il ? Pour voler ? Pour lui faire du mal ? Que devait-elle faire ?

Quelle journée de merde.

Endormi la veille au soir dans une grange déserte, il c'était fait réveiller à l'aube par un seau d'eau glacé sur la tête et avait failli se faire embrocher par le propriétaire plutôt mécontent de découvrir un crasseux dans sa paille fraiche. Plongé dans les rues glacés du petit matin, Rémi avait passé une journée sur les toits, essayant de trouver de quoi s'occuper, et qui sait grignoter un bout.

Une bruine c'était installé vers midi, rendant ses vêtements moites et son humeur en berne. En fin d'après-midi, le ventre gargouillant, le jeune homme avait tout bonnement décidé d'oublier cette journée "senteur fangeux" de sa mémoire en allant noyer son désarroi dans un alcool bas de gamme mais pour le moins efficace. Il connaissait une petite taverne pas loin du port géré par une femme ...Attrayante. En plus, elle lui permettait régulièrement de consommer gratuitement contre quelques... avantages en nature. Rémi évitait d'y aller trop souvent. Non pas que le mode de paiement lui déplaisait, mais il préférait offrir de sa personne au plus grand nombre. Quel homme généreux !

Une fois là-bas, les heures étaient passées au même rythme que les pintes qu'il descendait; à toute vitesse. L'homme avait finit rapidement saoul et alors qu'il se sentait d'humeur à rendre honneur à son marché avec Dame Taverne (Même si nous sommes tous conscient ici qu'il aurait juste réussi à s'affaler sur le lit et à ronfler la bouche grande ouverte toute la nuit), un paysan lui chercha des noises. A vrai dire, il ne comprit pas grand chose sur le sujet même de l'altercation, seulement quelques mots comme "Femme", "cochon" et "puit sans fond". Hein ? Rond comme un potiron, Rémi n'hésita pas vraiment et sauta sur la malotru pour lui rendre la monnaie de sa pièce. Très rapidement, c'est une bagarre générale qui se déclencha dans toute la taverne. Après quelques coups bien mérité et quelques esquives maladroites, Rémi s'enfuit dans les rue de Marbrume. Encore une nuit on il devra dormir avec des cochons plutôt qu'avec des c....charmantes jeunes dames ?

Quelle journée de merde.

Bien que l'échauffourée l'avait réveillé quelques peu, le voleur étant encore bien plein. Il décida donc de déambuler dans les rues sombres de la ville. Peut-être trouvera t'il enfin quelque chose qui aura le mérite d'avoir été vécu aujourd'hui. Au bout d'une petite demi-heure, son regard fut attiré par une petite bicoque. En soi, elle n'avait pas grand chose pour elle; petite, un peu difforme avec une couleur qui ne la mettait pas en valeur. Il gloussa en imaginant la propriétaire possédant les mêmes caractéristiques. Malgré tout ça, ce qui l'avait attiré était la porte entrouverte. Un écart infime et quasi invisible pour un œil non averti.

Rémi se frotta les mains et pénétra dans la demeure sans trop de bruit. Sans trop de bruit pour lui, car n'oublions par que l'homme avait passé presque un quart de sa journée à boire une boisson qui n'aide pas particulièrement à être furtif.

L'antre se révéla être une boutique, à son plus grand bonheur. Peut-être trouvera t'il de quoi se faire un peu d'argent. Le jeune homme s'approcha des étagères qui semblaient accueillir les marchandises. Il y trouva des herbes séchés et des fioles en verres avec des noms compliqués marqués dessus.

Un bruit derrière lui.

Rémi sursauta et leva les mains en l'air, comme si il allait se trouver en face de la milice. Evidemment, sous ce mouvement brusque et surprenant, sa main n'eut pas le temps de comprendre ce qui lui arrivait et lâcha la fiole qu'elle tenait. Celle-ci alla s'écraser de toute ses forces dans le mur derrière lui dans un bruit épouvantable de verre brisé. Rémi se raidi et sans même regarder la personne en face de lui, débita de manière brusque;

"C'est pas moi ! J'vous jure, c'était ouvert et...et..."

Il regarda enfin la personne en face de lui et y trouva une jeune femme à la peau d'albatre, les cheveux noirs tombant souplement sur ses hanches. Le voleur leva un sourcil, surpris de croiser une telle beauté dans ces circonstances. Vu ses yeux crottés et ses épis visibles un peu partout, il était clair qu'il venait de la réveiller. Il n'avait surement pas été aussi discret qu'il le pensait (Bah tiens...). L'homme se détendit soudain et son attitude changea du tout au tout; Un sourire charmeur (Mais alcoolisé, devons nous encore le rappeler ?) s'épanouit sur son visage et il s'accouda sur l'étagère sur laquelle il avait volé une viole il y a quelques minutes.

"Ehhh salut toi ! Désolée si je t'ai fait peur, ce n'était pas mon but. Tu sais, si tu viens de sortir de ton lit, je peux t'y raccompagner..."

Malheureusement pour Rémi, l'étagère contre laquelle il s'était appuyé décida qu'il était trop lourd, dans tout les sens du terme, et elle s'effondra, l'emportant avec lui. Dans un petit cri, il se retrouva submergé par une multitude d'herbes séchées et de fioles, heureusement intactes. Il secoua la tête et sorti à quatre pattes du tas qu'il venait de créer jusqu'à se retrouver aux pieds de l'inconnu. Il leva alors les yeux vers elle et tira sur le bout de sa robe de nuit avec des yeux de fangeux battus.

"Pardon... Oh dis donc c'est doux comme tissu, c'est quoi ?"

L'homme, avec la concentration d'un crustacé, toujours à quatre pattes, était en train de se frotter le visage avec le vêtement sans même se soucier de la réaction de la magnifique femme au dessus de lui. L'avantage d'être bourré dirons-nous...

Alors qu'elle songeait toujours à ce qu'elle allait faire, Théanna se décida enfin à se redresser afin de pouvoir observer la chose qui se trouvait en dessous d'elle. Quelle ne fut pas sa surprise de se retrouver face à un homme qui ne semblait pas avoir l'entièreté de ses esprits. Un voleur donc. Un soupir de soulagement lui échappa, au moins, ne s'agissait-il pas d'un fangeux. Lorsqu'il la vit, perché en hauteur, il déclara rapidement que ce n'était pas lui et que la porte avait été ouverte. Jetant un coup d'œil dans la direction de cette dernière, elle constata effectivement que la porte de sa demeure était bel et bien ouverte. L'avait-elle mal refermée en allant se coucher ? Elle ne parvenait plus à savoir si elle avait correctement positionné le bureau ou non, elle était tellement fatiguée.

Alors qu'il prenait à nouveau la parole, l'apothicaire reporta son attention sur le voleur et demeura bouche bée devant le discours qu'il tint. Par les dieux, quelle était donc cette situation ? Fronçant les sourcils, elle fusilla du regard le jeune homme, il n'était pas sérieux, n'est-ce pas ? La raccompagner au lit ? N'était-il pas venu afin de la voler ? Théanna n'y comprenait plus rien. Elle chercha rapidement une arme, bien décidée à lui faire payer son passage chez elle en pleine nuit et ses prunelles tombèrent sur la poêle en fonte qui se trouvait dans son petit coin cuisine. Oui, cela lui servirait assurément à assommer l'homme intrépide. Et alors qu'elle tendait la main vers ladite poêle, un bruit provenant tout droit du monde d'Etiol retentit. Elle sursauta violemment, manquant de basculer par-dessus la rambarde de bois.

Les yeux écarquillés, elle reporta son regard vers le bas et découvrit, avec horreur, l'entièreté de ses réserves sur le sol. Son hurlement de colère demeura bloqué dans sa gorge. Elle avait mis tant de temps à composer cette réserve, à gagner si durement les composants dont elle avait besoin pour travailler. L'homme sorti difficilement du dessous des décombres et Théanna trembla de rage. Par Etiol, elle allait lui faire payer ce qu'il venait de commettre. Saisissant la poêle d'une main ferme, elle quitta son perchoir et descendit par l'échelle. Et, avant même qu'elle puisse entamer le moindre mouvement, le voleur s'était déjà approché d'elle pour... Frotter son visage sur le bas de sa robe de nuit.

Théanna a écrit:: Pour le rp : Le terrible voleur

Jet de D20 :

1 - 7 — Échec critique : Théanna rate de façon assurément ridicule, la tête de Rémi, avec sa poêle.
8 - 14 — Réussite : Théanna parvient à donner un coup de poêle à la tête de Rémi, mais son coup manque de force. Cela sera-t-il suffisant ?
15 - 20 —Réussite critique : Théanna assure un coup de poêle mémorable dans la tête de Rémi.

Résulta du lancé : 4.

Théanna lève donc sa poêle, dans l'optique certaine de porter un coup à la tête de cet homme inconscient. Hélas, le sort semble en décider autrement, car, en portant son coup, la poêle dévie de sa trajectoire et le manche glisse des mains de l'apothicaire. Un autre fracas retentit, celui de la poêle allant se ficher dans le chambranle de la porte. Avec une exclamation de rage, Théanna repousse brusquement l'homme et se penche au-dessus de lui, encore plus furieuse que précédemment.

— Vous.... ! Vous !

Un doigt pointé sur la poitrine du voleur et un relent d'alcool flotte jusqu'à ses narines. Non seulement, il pénétrait chez elle, détruisait son matériel, mais en plus, il était rond comme une queue de pelle ! Et par-dessus tout, elle ratait la seule vengeance qu'elle aurait pu se permettre.

— Vous n'êtes qu'un scélérat... Un... Un... Une boursemolle ! Que dis-je ! Un chiabrena !

Elle-même ne s'imaginait pas pouvoir dire de pareils mots, mais il fallait bien avouer qu'il s'agissait de la goutte qui avait fait déborder le vase.

— Vous allez me le payer, oh soyez-en certain ! Je vais vous traire jusqu'au dernier sou que vous possédez !

Théanna serra les poings et darda un regard sombre sur le voleur. Peut-être pourrait-elle s'exercer sur lui pour ses nouvelles compositions. Il ferait un merveilleux testeur pour ses poisons également. Pinçant les lèvres, elle pria Anür de lui donner la patience de faire face à cette nuit affreuse.

— Vous allez me nettoyer tout ce bazar ! Et plus vite que cela !

Cette dernière phrase dite d'une voix aussi glaciale que le vent en hiver, elle s'en alla fermer la porte de son habitation. Il n'allait pas s'échapper de si tôt, c'était une certitude.

Au moment ou Rémi décida de détacher sa face du délicieux tissus et qu'il leva la tête pour admirer la charmante propriétaire du vêtement, il ne vit qu'une poêle. Une énorme poêle en fonte. Une poêle prête à lui défoncer le crâne !

Saoul comme un cageot, ses reflexes n'étant pas au meilleur de leurs formes, il poussa un bref cri avant de littéralement rouler par terre pour éviter le coup. A sa grande surprise, il vit la dite poêle voler à presque un mètre de lui dans une direction tout à fait improbable. Il suivit la courbe de l'objet avec un sourcil levé de surprise avant de la regarder s'écraser dans une autre étagère dans un bruit fracassant.

Hébété, il vit une tête rouge de colère se pencher vers lui et commencer à lui crier dessus en bégayant de colère, un doigt accusateur pointé vers lui. Rémi ne put s'empêcher de ravaler son sourire et se mit à glousser devant le ridicule de la scène toute entière. Peut-être l'alcool jouait sur le côté drôle des évènements, surement même, mais le jeune voleur ne pouvait plus s'arrêter de rire, au point de se tordre sur le sol en se tenant les côtés comme un verre de terre agonisant.

Les insultes ne firent que rajouter à son hilarité et l'homme finit par pleurer de rire. Il essaya cependant de se reprendre quand la jolie inconnue ferma la porte derrière elle. Il s'installa sur le coté à même le sol, la tête calé sous un bras et les jambes légèrement écarté. De sa main libre il tapota le sol comme on le fait pour attirer un chaton pour des câlins.

"Oh je suis désolée ma belle dame, je n'ai absolument pas d'argent sur moi. Par contre vous pouvez me traire les bourses autant que vous voulez j'y verrais pas de problème. Vous aurez juste autre chose que des sous"

Il lui fit son sourire le plus éclatant, ignorant superbement le regard froid qu'elle lui lançait ainsi que l'aura meurtrière qui se dégageait d'elle. Rémi était un homme qui ne ressentait que peu le danger, alors quand la boisson venait annihiler le peu d'instinct de survit qu'il possédait, rien n'était impossible. Absolument rien. C'est ainsi qu'il continua à s'enfoncer lourdement dans ses sous entendus et ses propositions douteuse, toujours allongé dans une position équivoque.

"Sinon, je peux vous rembourser de mon corps... Vous savez, des femmes seraient prête à payer pour ça ! Au final je suis sur que c'est avantageux comme marché pour vous. Pour moi...Eh bah j'espère que vous êtes aussi bonne au lit que belle ! Dans ce cas, ce serait un marché honnête pour nous deux, nan ?"

Malheureusement, l'inconnue semblait peu encline à s'approcher de lui pour s'allonger sur le sol comme il l'aurait souhaité. Ca aurait été trop beau. Rémi arrêta donc de tapoter le sol et attrapa une feuille séché qu'il avait précédemment fait tomber et la sniffa d'un air peu convaincue. Il fit une grimace de dégout et balança la feuille derrière lui. Il regarda de nouveau la brune qui semblait bouillir sur place.

"Vous êtes pas très causante, c'est quoi votre petit nom ? Moi c'est Rémi"

Toujours allongé, il lui tendit la main. Oui, comme si il ne venait pas d'essayer de la voler. Comme si il n'avait pas détruit une partie du magasin, et comme si il n'était pas allongé au milieu d'une boutique devant une femme semblant quelque peu énervée, prête à le tuer. Il lui fit un clin d'œil aguicheur.

"Ravi de te rencontrer"

Et alors que la situation ne semblait pas pouvoir empirer, Théanna découvrit qu'elle avait largement sous-estimé le destin. Le voleur se mit à rire, tellement fort qu'il en roulait sur le sol. Béate de stupeur, elle s'en retrouva sur le point de l'attraper par la gorge et de serrer aussi fort qu'elle le pouvait. Il finit par se calmer, adoptant une position tout bonnement grotesque au vu des circonstances. À sa réflexion, quant à le traire, l'apothicaire s'étrangla littéralement de colère. Enfonçant ses ongles dans sa peau et ferma fortement les yeux en priant pour que tout cela ne soit qu'un horrible cauchemar. Elle serra tellement fort ses poings que ses ongles pénétrèrent dans ses paumes, faisant couleur le doux liquide écarlate qui circulait en elle. Qu'avait-elle bien pu faire pour subir une pareille situation ? Prenant une grande inspiration, elle expira tout l'air entrée dans ses poumons avant de regarder à nouveau l'homme couché sur le sol Théanna effectua plusieurs fois cette action, tentant de reprendre le contrôle d'elle-même.

Mais c'était sans compter sur l'homme qui ne semblait pas du tout saisir l'état dans lequel elle se trouvait. Il entreprit donc de lui expliquer combien passer une nuit avec lui serait un marché avantageux. Il saisit l'un de ses ingrédients pour le jeter ensuite derrière lui et tendre la main vers elle en déclarant qu'il était ravi de la connaître. N'y tenant plus, la brune saisit la main du voleur pour le tirer vivement vers elle. Son poing entra alors en contact avec le visage du voleur.

Poussant un cri de douleur lors de l'impact, elle relâcha prestement l'homme et tint sa main contre sa poitrine. Par les dieux que cela faisait mal. Elle se mordit vivement la lèvre inférieure et pesta une nouvelle fois contre tout ce qu'il se passait. Elle vérifia qu'elle pouvait encore bouger ses doigts et jeta un regard impérieux vers l'homme.

— Silence ! Je ne veux plus vous entendre ! Vous et vos propositions indécentes...

Soudain, une idée lui vint et elle monta rapidement les marches donnant sur l'étage. Elle s'en alla dans la salle d'eau, saisit un seau et le rempli d'une eau glaciale. Elle revint auprès du brun qui n'avait, semblait-il, pas avoir bougé d'un poil. Espérant que cela lui éclaircisse les idées, elle lui jeta sans hésitation le seau d'eau. Peut-être que cela l'aiderait à éliminer plus rapidement l'alcool qu'il avait ingéré et lui redonnerai un peu de lucidité. Grimaçante, elle ramena une nouvelle fois sa main contre elle et se demanda ce qui lui avait pris. Ses mains étaient ses outils de travail, sans elles, elle ne pourrait plus exercer.

— Vous en faut-il plus ou cela vous a permis de retrouver vos esprits ?

Elle se demanda subitement si des membres de la milice passaient encore dans le Labourg à cette heure, peut-être qu'elle devrait dénoncer cet homme. S'il ne se montrait pas rapidement plus raisonnable, elle ferait cela. Car elle ne pouvait gérer tout ce qu'il se passait actuellement. Elle observa le désastre dans la pièce et une boule se forma dans sa gorge. Hors de question qu'elle se mette à pleurer devant ce satané voleur. Mais songer à tout le travail gâché, à toutes ces heures passées à réunir les ingrédients dont elle avait désespérément besoin pour survivre. Théanna se mordit l'intérieur de la joue afin d'empêcher les larmes de s'accumuler aux coins de ses yeux. Pour une tout autre personne, cela ne serait qu'un accident bénin, mais pour elle, cela signifiait des semaines de travail acharné. Elle se nourrissait grâce à ses baumes et ses soins. Elle établit déjà la liste de ce qui était récupérable, de ce qui ne l'était plus et elle songea qu'elle devrait retourner auprès de son fournisseur. Mais en regardant autour d'elle, elle sut qu'elle ne pourrait rien offrir qu'il désire. Et elle avait bien trop besoin de certains objets que pour s'en séparer.

Il lui faudrait donc aller à l'extérieur, dans les marécages, trouver elle-même les plantes dont elle avait besoin. Une angoisse familière lui étreignit le cœur et sa peau se couvrit de chair de poule. Elle n'avait plus le choix, soit elle mourrait de faim, soit elle prenait le risque de mourir dévorée par un fangeux. Prenant une inspiration tremblante, elle revint à la situation actuelle. Théanna n'allait tout de même pas se laisser abattre, elle ne pouvait pas baisser ainsi les bras. Après tout ce qu'elle avait traversé, après tout ce qu'elle avait vécu pour en arriver là où elle était. Hors de question de laisser la mort enserrer ses bras autour d'elle.

Revenant au sujet principal, Rémi, comme il s'était lui-même nommé, elle lui adressa à nouveau la parole.

— Vous pouvez d'ores et déjà oublier le paiement de votre corps, ma haine pour vous dépasse largement toutes vos espérances. Je vous maudis Rémi.

"Aiiiiiiiie mais ça fait mal ça va pas non !"

Il ne l'avait pas vu venir. Mais alors pas du tout. Au moment ou la belle inconnue avait attrapé sa main tendue (A défaut d'autre chose) , Rémi avait sincèrement cru avoir réussi à la convaincre de passer un moment un peu plus intime. Il l'avait donc laissé faire en affichant son grand sourire charmeur. La rencontre avec son poing fut aussi douloureuse qu'il le surpris. Pour une femme, c'est qu'elle avait de la force la gueuse ! La frappe l'atteignit en plein dans la machoîre et aurait pu facilement lui casser une dent si la dentition du voleur n'était pas si parfaite (C'est un coup de chance, rien de plus).
L'homme se massa douloureusement la joue tout en la regardant ramasser sa main vers elle. Au moins, elle c'était elle aussi fait mal. Bien fait pour elle si elle n'était pas capable d'apprécier sa formidable personne !

"Vous voyez, si vous aviez accepté ma prop..."

La brune l'invectiva de se taire. Rémi pinça les lèvres, vexé de se faire réprimander de la sorte, mais n'en rajouta pas. Après tout, ce malmenage l'avait refroidit un peu sur ses espoirs de fin de soirée. Quand il l'a vit monter rapidement, il ne dit rien de plus. Déjà parce qu'il était toujours froissé, mais aussi parce qu'il avait une vue splendide sur l'attribut arrière de la demoiselle. Le brun ne put s'empêcher de lever un sourcil appréciateur, silencieux. Il se doutait bien que la propriétaire de ce charmant séant ne serait pas très contente des pensées qui effleuraient son esprit encore embrumé par l'alcool.
Toujours à moitié allongé sur le sol, perdu dans ses rêveries coquines, le seau d'eau glacée que lui assena la belle herboriste le fit crier de surprise. Il se releva prestement, tout penaud, sa chemise blanche collant sur sa peau brunie par le soleil. Un frisson le parcouru.

" Mais j'avais déjà tous mes esprits par les Trois ! Elle est horriblement glacé cette eau ! Vous vouliez me tuer ?"

Il était pourtant vrai que cette claque thermique venait de lui permettre de reprendre ses esprits et de sortir de ce songe alcoolisé. La descente n'était que plus désagréable. Mouillé, frigorifié, il se retrouvait pantois face à une demoiselle tremblotante et acculé dans sa propre boutique. Il soupira tout en se grattant la tête, rependant des gouttes d'eau partout autour de lui. Le brun comprenait la haine de la jeune femme. Il n'avait voulu que s'amuser, en dépit du reste. Comme d'habitude.
Il ne répondit pas tout de suite à la déclaration de haine de l'inconnue et s'accroupi dos à elle, faisant face aux dégâts qu'il venait de causer. La tête lui tournait encore, mais il était maintenant conscient de ce qu'il avait fait. Tel un petit animal battu, il entreprit de ramasser méthodiquement et silencieusement les herbes encore utilisables. Très vite, il remarqua que sa chemise dégoulinante faisant plus de dégât qu'autre chose sur la marchandise et la passa au dessus de sa tête pour la balancer à l'autre bout de la pièce sans aucune gêne. Il dévoila ainsi son dos musclé à l'herboriste tout en continuant sa tâche. Un long silence s'installa.

" Je vous aiderais à tout récupérer, je vous le promet. Je suis peut-être ingrat sur certaine chose, mais je sais ce que c'est dur d'être artisan ici. Ma mère est...était couturière ici, avant l'attaque du couronnement."

Encore ce long silence, ponctué par les bruits de verre brisé que triait Rémi. Il fit un geste incertain pour quelqu'un le voyant de dos. S'était-il gratté la joue ? Avait-il essuyé des larmes aux coins des yeux ? Personne ne le saura jamais. Soudain, L'homme se releva et se tourna vers la brune, plantant son regard maintenant clair et lucide dans ceux de la femme, magnifique. Il dévoilait maintenant un torse fin mais musclé. Des poils étaient présents, surtout présent sous son nombril, traçant une ligne jusqu'à un endroit caché par son pantalon. Rémi ne semblait pas du tout dérangé par sa semi nudité. Il était au contraire devenu ultra sérieux.

" Cela prendra le temps qu'il le faudra mais je vous rembourserait en totalité, ou je vous aiderait à récupérer ce que j'ai détruis. S'il faut se mettre en danger, je le ferais. S'il faut voler, je le ferais. Vous n'aurez rien à faire, vous avez ma promesse"

Il s'approcha d'elle. Elle recula. Il s'approcha encore, jusqu'à ce qu'elle butte contre un mur. Le voleur ne put s'empêcher de lui faire un petit sourire taquin et avec une infini douceur, il attrapa sa main blessé. Il fit une révérence et déposé ses lèvres sur le dessus de sa main.

"Par contre, la haine et l'amour son deux sentiments très proche. Et si vous vouliez me voir nu, vous n'étiez vraiment pas obligé de me renverser un seau d'eau sur la tête. Me feriez vous l'honneur de me donner votre prénom, au moins ? Ne bougez pas, je vais vous chercher une pommade pour votre main"

Et sans attendre de réponse, il relâcha la main de la belle et entreprit de fouiller dans ce qu'il restait des réserves. Au bout de quelques secondes, il en sorti une petite fiole contenant un baume à la couleur écru et revint se placer face à elle, laissant un espace légèrement en déca de la bienséance habituelle.

"Si vous préférez, j'ai encore un peu d'alcool dans ma besace, mais je doute que vous soyez intéressée par ce genre de breuvage."

Heureusement pour elle, il semblait que l'eau glaciale eût fait son effet et l'homme se départit immédiatement de son attitude charmeuse. Fronçant, elle l'observa avec méfiance, se demandant s'il ne préparait pas encore l'une de ses remarques indécentes ou bien un piège afin de lui faire payer l'eau qu'elle venait de lui jeter à la figure. Lorsqu'elle le vit se mettre à ramasser ses herbes, Théanna en resta bouche bée. Était-il réellement en train de l'aider à ranger le bazar qu'il avait mis dans son échoppe ? Où était donc passé l'insolent au regard de braise qui ne cessait de la déshabiller des yeux ? Non pas qu'elle se plaigne de sa disparition, loin de là. Se mordillant la lèvre, elle le regarda s'employer à sauver ce qui lui restait de ses réserves. Soudain, il retira prestement sa chemise trempée et la jeta de l'autre côté de la pièce. Surprise, l'apothicaire demeura le regard fixé, sur ce dos musclé, durant quelques instants. Un dos fort attrayant, il fallait bien l'avouer. Une douce chaleur si diffusa dans son visage, rendant ses joues bien plus rouge qu'auparavant.

Certes, la brune avait eu un fiancé, elle n'était pas complètement innocente de la chose, mais jamais elle ne s'était retrouvée face à un autre homme à demi-nu et jamais elle n'avait été plus que loin que quelques caresses échangées à l'ombre d'un sapin. Détournant rapidement le regard, elle ne sut comment réagir face à toutes ces actions contradictoires. Sa colère semblait d'ailleurs, l'avoir complètement désertée. Il brisa alors le silence qui s'était installé, lui assurant qu'il l'aiderait à tout récupérer, qu'il comprenait la gravité de ses actions, que sa mère avait été couturière. Intriguée malgré elle par cet aspect nouveau de ce voleur, Théanna ouvrit la bouche pour lui répondre, mais aucune parole intelligente ne sembla lui venir. L'homme se redressa et fit enfin face à la jeune femme, lui offrant une vue complètement sur la face avant de sa personne. D'autant plus gênée d'être face à son regard, elle détourna le sien, cherchant une échappatoire à sa gêne.

Il reprit alors la parole, lui promettant de la rembourser en totalité et proposant même de se mettre en danger pour le faire. L'apothicaire n'en demandait assurément pas tant, mais elle réfléchit sérieusement à sa proposition. Peut-être pourrait-il l'aider à se rendre dans les faubourgs afin qu'elle puisse refaire ses stocks. Il semblait fort et débrouillard, il pourrait assurément la défendre si les choses tournaient mal là-bas. Mais alors qu'elle allait lui faire la proposition, elle vit sa silhouette s'approcher d'elle. Replongeant ses prunelles dans les siennes, elle recula par réflexe. Et plus elle reculait, plus il avançait, jusqu'à ce qu'elle se retrouve acculée contre le mur. Un sourire étira ses lèvres, un sourire taquin qui augmentèrent la rougeur sur les joues de la brune. Par tous les dieux, qu'allait-il faire à présent ? Et par Etiol, pourquoi diable rougissait-elle ainsi ?! Il saisit sa main, l'amenant délicatement aux lèvres malicieuses, avant d'y déposer un baiser. Les paroles prononcées ensuite, la laissèrent muette de stupeur avant qu'un petit rire ne lui échappe.

Elle n'en revenait pas qu'il ose ainsi continuer de la provoquer après ce qu'il venait de se produire. Mais elle devait bien admettre qu'il était bien plus charmant lorsqu'il était sobre, que lorsqu'il était saoul. Il semblait sincèrement regretter ce qu'il s'était passé et elle trouvait attendrissante la manière qu'il avait d'agir comme un enfant ayant fait une grosse bêtise. Enfin... Un enfant dans un corps d'adulte et à l'attitude immanquablement charmeuse. Cela semblait faire partie de lui, comme s'il ne pouvait s'empêcher de séduire. Laissant son regard vagabonder sur son torse, elle dut bien admettre qu'elle ne doutait pas de son pouvoir de séduction. Mais, même s'il parvenait à sensiblement la déconcentrer, elle ne s'y laisserait pas prendre. Il devait être un formidable amant, mais elle doutait qu'il veuille s'engager sérieusement auprès d'une femme. Et Théanna ne serait jamais une femme d'une nuit pour qui que ce soit.

Secouant la tête, elle retrouva enfin la parole tandis qu'il s'éloignait afin de trouver une pommade pour sa main blessée.

— Certes, mais avouez que cela vous a rendu bien plus aimable et charmant qu'auparavant. Je songerais à toujours me munir d'un seau d'eau glacée lorsque je vous croiserai à l'avenir.

Un sourire mutin étira ses propres lèvres, tandis qu'elle s'appuyait plus confortablement contre le mur et qu'elle examinait sa main douloureuse. Rien ne lui semblait casser, mais elle aurait mal pendant quelques jours.

— Théanna. C'est ainsi que je m'appelle.

Il revint rapidement vers elle et l'apothicaire fut assez surprise de le voir revenir avec l'une de ses pommades pour les inflammations. Elle secoua ensuite la tête à sa proposition concernant l'alcool dans sa besace.

— N'ayez crainte, je suis habituée à devoir supporter la douleur.

Elle se souvenait encore de la douleur cuisante que lui avait causé le poing de l'un de ses agresseurs en janvier et sa blessure à la main n'était rien en comparaison.

— Vous vous y connaissez en remèdes ?

L'homme ne pu s'empêcher de rire face à la remarque de la jeune femme. Son attitude c'était nettement adoucie depuis l'épreuve du seau d'eau et elle allait même jusqu'à blaguer avec lui. Avec cette petite couleur rouge pivoine sur les joues, Rémi ne put s'empêcher de trouver cette inconnue au caractère prononcé vraiment trop mignonne.

« Il faut croire que l'eau me donne meilleur effet que le vin de mauvaise qualité. Mais selon vos dires, je peux encore espérer une prochaine fois en votre compagnie ? »

Son regard glissa dans ceux de la brune et il lui offrir un sourire, mi- charmeur, mi- contrit.

« Enchanté Théanna... Je suis désolée pour mon arrivée... Mouvementé. Même si je sais que mon activité n'est pas la plus noble, je ne veux détruire la vie de personne. A vrai dire je veux juste m'amuser et survivre... »

Avec une douceur infinie, il attrapa la main de l'apothicaire et la déplia avec bienveillance pour observer plus facilement sa blessure. Son pouce commença à lui masser doucement la paume de la main d'un geste presque distrait et pourtant si rassurant. Il ne répondit pas tout de suite à la question de la brune et ouvrit le bouchon de la pommade avec sa bouche. Il souffla le bouchon d'un coup sec à l'autre bout de la pièce et renversa avec sa main libre la lotion sur le dessus de la main blessée. Alors qu'il commençait à l'appliquer en massant d'un mouvement circulaire, il soupira et brisa le silence qui régnait entre eux.

« M'y connaitre est un grand mot, mais j'ai quelques bases sur les remèdes, surtout les premiers soins. On va dire qu'on apprend à se soigner quand on se prend des coups de couteau aussi facilement qu'on dit bonjour. C'est important d'avoir quelques connaissances pour éviter de mourir trop bêtement. Ce serait dommage, je raterais de superbes rencontres avec de superbes inconnues que je traumatise directement chez elle... »

Une fois le remède bien pénétré, il lâcha la douce main de Théanna et la regarda de nouveau. Un regard intense, dans un silence lourd. Que pensait Rémi à ce moment ? Personne ne le savait. Son air sérieux n'était pas habituel, pourtant, il agissait de manière presque normale. Comme si, cinq minutes plus tôt il n'était pas complètement saoul en train de faire des propositions indécentes après avoir détruit sa boutique, Le voleur finit par pencher sa tête sur le côté, tel un animal essayant d'appréhender quelques chose de nouveau.

« Vous n'êtes pas d'ici ? Enfin je veux dire... Vous faites parti des naufragés non ? Il leva les mains comme pour montrer qu'il ne lui voulait aucun mal Pas que ca me dérange hein ! Ca m'intrigue c'est tout ! Je n'ai jamais eu l'occasion de parler avec quelqu'un de là-bas et je sais que c'est difficile pour vous de vous intégrer... »

Le voleur fit un pas en arrière et se gratta la tête, gêné par sa propre curiosité.

« Désolée je voulais pas vous mettre en position délicate avec mes questions, c'était vraiment pas le but. Ahhhh... Je suis vraiment nul ce soir, pardon... »

Alors qu'il allait continuer à s'empêtrer dans sa bêtise, on frappa à la porte. Les deux compères sursautèrent violemment sous la force des coups qui venait presque de faire bouger l'entièreté de la modeste boutique. Vu l'heure, il était étrange d'avoir de la visite. Encore plus quelqu'un qui ne semblait pas vouloir se faire discret.

« C'est la milice, ouvrez ! »

Le corps du voleur se tendit brusquement face à cette grosse voix qui venait de crier. Il regarda Théanna, lui posant une question muette; Allait-elle le dénoncer ?

« Il y a quelqu'un ?! Ouvrez s'il vous plait ! »

Voyant que Théa ne réagissait pas, il posa son index sur sa bouche en signe de silence et sans un bruit, tel un chat et fixant toujours la jeune femme, il grimpa l'échelle juste à côté de lui. A vrai dire, il n'y avait pas vraiment d'autre cachette dans cet lieu exiguë et si la milice ne le cherchait pas particulièrement, et si l'apothicaire ne décidait pas de le trahir, il avait surement une chance de s'en sortir. Beaucoup de « et si », mais Rémi y croyait.

Le brigand atterrit sur un étage plutôt petit, ou se tenait un lit et quelques meubles disparates. Sans vraiment réfléchir, il se glissa derrière la couche, contre le mur à même le sol. Il y trouva quelques toiles d'araignées et autre joyeuseté dont ils se serait passé et sans rien pouvoir dire sans risquer de dévoiler sa présence.

On cogna de nouveau avec force dans la porte et la grosse voix s'énerva une fois de plus.

« Nous recherchons un homme qui a déclenché une bagarre dans une taverne et qui c'est enfui sans payer ! Nous voyons la lumière allumé chez vous, ouvrez !"

Oh ! Les rustres ! Rémi pesta intérieurement. Il n'avait pas déclenché cet accrochage, et en plus il avait bien prévu de payer ses consommations comme il se doit ! Ou du moins à sa manière... Quoi qu'il en soit, la tenancière venait de la lui mettre littéralement à l'envers. C'était-elle vengé à sa manière de devoir dormir seule dans sa couche cette nuit ? Ou était-ce sa façon de lui faire comprendre qu'elle ne voulait plus voir le brun ? En tout cas, cette gueuse venait de le mettre dans un sacré pétrin !

Théanna haussa les épaules, un petit sourire étirant le coin de sa bouche.

— Eh bien... Vous deviez m'aider à refaire ma réserve n'est-ce pas ? Sauf si vous manquez à votre parole, il semble certain que nos chemins se croiseront à nouveau.

Et enfin, des excuses en bonne et due forme arrivèrent. L'homme s'excusa platement pour son entrée rocambolesque et la destruction partielle de ses possessions. Poussant un long soupir, elle décrocha son regard du sien et songea qu'au moins, lui n'avait aucune envie de la trucider. Ce ne serait pas la première fois qu'on tente de rayer son existence de la carte. Il mentionna le fait de désirer s'amuser et survivre et elle se demanda subitement quel âge il pourrait avoir. Tenir un tel discours... Il semblait ne pas avoir réellement conscience de la situation dans laquelle toute la cité se trouvait, comme s'il avait conservé une part d'enfance juvénile en lui. Il lui rappelait les jeunes garçons qui ne cessaient de courir partout et faire diverses farces à Hendoire. Elle-même avait perdu son goût de l'amusement depuis bien longtemps, elle ne se rappelait plus la dernière fois où elle s'était réellement sentie détendue, heureuse, choyée et protégée. À vrai dire, elle n'imaginait pas pouvoir retrouver un jour cette paix intérieure.

Plongée dans ses pensées, elle retint un tressaillement lorsqu'il saisit sa main et se mit à en prendre soin. Perturbée par sa douceur et les gestes tendres qu'il lui offrait, l'apothicaire fronça les sourcils. C'était étrange d'être à nouveau touchée de cette façon par un homme, pas désagréable, mais déroutant. Observant ses faits et gestes, elle ne fit aucune remarque sur le bouchon lancé au loin, même si elle se dit qu'elle devrait le récupérer plus tard lorsqu'elle rangerait sa demeure. Rémi répondit alors enfin à sa question et lui expliqua qu'un homme menant sa vie, devait bien apprendre à se soigner seul. À sa dernière phrase, elle secoua la tête, une lueur amusée brillant dans ses prunelles, il ne perdait aucune occasion pour charmer. Alors qu'elle récupérait sa main, elle observa attentivement les soins qu'il venait de lui prodiguer, pliant et dépliant les doigts, ne faisant pas attention à son regard intense qu'elle sentait pourtant sur elle. Elle n'était pas encore assez à l'aise avec lui que pour faire face à toute cette intensité masculine.

Et alors qu'elle s'attendait à un compliment ou une autre remarque charmeuse, il la questionna sur ses origines. Elle n'aurait pas dû être étonnée d'être encore questionnée là-dessus, ses particularités culturelles suscitaient généralement la curiosité des gens. Mais rapidement, il voulut faire amende honorable en se confondant en excuses, comme s'il pensait l'avoir vexée ou contrariée avec ses questions. Théanna s'apprêtait à le rassurer avant que des coups ne retentissent sur la porte. Figée, la brune tourna vivement la tête vers le bruit et retint son souffle. Rapidement, la provenance des coups fut établie et la jeune femme s'en retrouva d'autant plus surprise de constater qu'il s'agissait de la milice. Son regard revint sur Rémi, qui semblait la supplier de garder le silence. La voix se fit plus pressante à l'extérieur et elle su qu'elle ne pourrait pas éviter cette confrontation. Elle l'observa lui demander de conserver le silence quant à sa présence et le vit monter rejoindre la mezzanine. Il se dissimula si bien que les seules traces de son passage demeurèrent le désordre présent sur le sol de sa maison.

De nouveaux coups la poussèrent à avancer vers la porte d'entrée et la voix du milicien explicita la raison de leur venue. Un homme avait déclenché une bagarre et s'était enfui sans payer. Entendant cette explication, elle poussa inconsciemment un soupir de soulagement, au moins, ne venaient-ils pas pour l'homme caché près de son lit. Repoussant le bureau, elle ouvrit sa porte d'entrée sur quelques centimètres, juste assez que pour que les miliciens puissent voir son visage et qu'elle puisse voir le leur.

— Bonsoir... Veuillez pardonnez mon hésitation, mais je n'ai pas pour habitude de recevoir de la visite aussi tard chez moi. Il n'est pas très prudent d'ouvrir à n'importe qui pour une femme telle que moi.

Elle détailla le petit groupe devant elle et observa un moment la rue sombre avant de répondre.

— Je n'ai rien entendu cette nuit et je n'ai pas non plus vu passer d'homme portant des coups. Personne n'est venu se faire soigner chez moi non plus, j'ignore tout de votre affaire. Si vous le désirez, vous pouvez entrer et vérifier, j'étais en train de préparer quelques décoctions, je dois vous avouer que c'est un peu le désordre, je suis quelque peu maladroite quand je prépare mes commandes.

Expliqua-t-elle en affichant un sourire contrit. Elle ouvrit un peu plus grand sa porte, comme si elle invitait les miliciens à pénétrer dans sa demeure, tout en priant pour qu'ils abandonnent là leurs recherches auprès d'elle. S'ils se mettaient à fouiller sa demeure, ils ne mettraient pas bien longtemps à trouver Rémi. Que pourrait-elle alors leur dire ? Réfléchissant rapidement à une excuse, elle se mordilla la lèvre avant de se dire que la chose la plus logique serait de dire qu'il s'agissait de son amant. Mais comme il était marié, il se serait caché dans la peur que sa femme soit venue accompagnée de la milice pour le récupérer. Oui, cela pourrait expliquer la présence de l'homme chez lui et comme il était toujours torse-nu, il ne serait pas difficile de créer le quiproquo.

Théanna senti à nouveau cette douce chaleur se répandre dans ses joues à l'idée de jouer l'amante dissimulant un secret. Jamais elle ne s'était retrouvée dans ce rôle et cela lui semblait plutôt grotesque qu'elle se prête au jeu, mais elle ne désirait pas non plus que le voleur maladroit se retrouve dans les cachots. Au final, il n'était pas bien méchant et en plus, il s'était proposé à l'aider à réparer les dégâts causés. Il ne devait donc pas avoir un mauvais fond.

Rémi ne put s'empêcher de lâcher un soupire de soulagement quand Théanna ne fit pas vent de sa présence dans sa demeure. Il avait de la chance sur ce coup là, car quelques minutes plus tôt, la jeune femme aurait surement eu une réaction tout autre et l'aurait livré sans vergogne à la milice. Cette femme la surprenait de plus en plus et ce n'était pas pour le déplaire.

Toujours dans son coin poussiéreux, il esquissa un sourire niais face à cette situation improbable mais qui semblait bien finir. Après tout, quels intérêts auraient les miliciens à entrer dans la boutique de cette femme qui semblait tout ce qu'il y a de plus innocent.

« Merci, nous allons entrer vérifier en effet. »

Merde ! Le voleur étouffa un juron en entendant trois grosses paires de bottes pénétrer lourdement dans l'habitacle. Son cerveau de réactiva, cherchant une solution à toute allure. Bien que le seau d'eau l'avait aidé à décuver, les brumes de l'alcool était encore présente et ne l'aidait absolument pas à réfléchir sereinement. Il ne voyait rien mais il entendit les pas se presser dans la petite pièce et un silence s'installer. Surement étaient-ils en train de regarder le massacre qu'il avait lui-même accidentellement fait. Et il faut bien l'avouer, la scène devait paraitre bien étrange.

« M'dame, c'est quoi ce bordel ? Vous seriez pas en train de nous mentir quand même ?
- Euh ...
- Ce serait gênant qu'une jolie jeune femme seule comme vous nous mente, qui sait comment on pourrait réagir. »

Trois rire gras et obscènes se répercutèrent et le sang de Rémi ne fit qu'un tour. Les insinuations de ces soit disant miliciens ne lui plaisait pas du tout. Qui sait pourquoi ils étaient entrés dans la maison de la jeune femme? Tant pis, l'improvisation, c'était son truc. Et il était hors de question que ses frasques ne mettent en danger une innocente comme Théanna. Aussi silencieusement qu'il pu, il glissa dans le lit de l'apothicaire ou il retira discrètement...l'entièreté de ses vêtements. Oui, il se retrouva ni plus ni moins nu comme un vers dans un lit qui lui était parfaitement inconnu (Mais néanmoins très agréable). Il se racla soudain la gorge en faisant mine de sortir bruyamment de la couchette. Le bruit d'une épée sorti précipitamment d'un fourreau se fit entendre et il entreprit de désamorcer la situation.

« Qui est la ?
- Veillez m'excusez... J'étais un peu gêné par la situation... J'arrive ! »

Et sans respect aucun, il entama sa descente de la petite plateforme en hauteur, montrant à la vue de tousse son magnifique séant rebondis, rose comme celui d'un nouveau née. Les rires gras recommencèrent de nouveau pendant que Rémi sifflotait comme si de rien n'était. En tout cas ces miliciens ne semblait pas être le haut du panier en matière de classe. Une fois sur la dernière marche de l'échelle, le jeune homme sauta souplement à pied joins sur le sol et rejoignis l'apothicaire devenu rouge comme une pintade. Si elle ne tombait pas dans les pommes, c'était un miracle. Tout en se rapprochant de Théanna le premier milicien, un homme qui ne se distinguait en rien, l'agressa verbalement. C'était lui qui semblait avoir dégainée son épée, ses deux autres compères étant la seulement pour rire de la situation.

« Qui êtes-vous ? Pourquoi ne vous êtes vous pas présenté tout de suite ?
- Eh bien, Rémi hésita. Comme vous pouvez le voir, je ne suis pas dans la tenue la plus approprié pour recevoir du monde.
- Et pourquoi cette boutique est dans cet état ? S'acharna l'homme, ne semblant démordre de rien. Après tout, qui sait à quel point la milice était renseigné sur le physique de l'homme qu'ils recherchaient.
- Hum... Nous étions en train de nous amuser un peu... J'ai peut-être été un peu agressif avec ma Dame, mais je peux vous assurez qu'elle ne s'en plaignait pas sur l'instant. N'est ce pas ma chéri ? Cette fois-ci, Rémi c'était approché d'une Théanna cramoisie et figé. A deux doigt d'une apoplexie. Il passa une de ses mains derrière son dos et la posa avec douceur sur sa hanche. Avec toute la douceur du monde, il lui fit un baiser sur la joue. Désolée, je crois qu'elle n'est pas aussi à l'aise que moi sur le sujet. Il essaya d'omettre les gloussements incessant des deux acolytes derrière le petit teigneux.
- Vous êtes marié ? Insista l'insupportable milicien.
- Nous sommes fian...
- Eh, ca serait pas une pute d'Hendoire ? Coupa un des deux complices d'une grosse voix emplie d'intelligence. La prise de Rémi sur la hanche de l'apothicaire se resserra.
- Vous insultez ma fiancée, vous êtes chez nous en plein milieu de la nuit alors que je suis dans mon plus simple objet et vous nous interrogez comme des malfrats. Je vous invite à partir messieurs, sinon je n'hésiterais pas à contacter votre coutellerie dès l'aube. »

La menace fit taire les trois gardes qui le regardèrent avec surprise sous cette menace. Ils semblèrent hésiter encore avant de partir. Intérieurement, Rémi n'espérait qu'une chose, qu'ils déguerpissent. Il n'avait aucune envie de se battre le service trois pièces à l'air !

À son plus grand étonnement, les miliciens ne semblaient pas désirer laisser les choses en l'état et semblaient prêts à tout fouiller. Pour une simple bagarre, elle trouvait cela bien étrange, d'autant plus que nous nous trouvions au sein du Labourg. Ici, la majorité des crimes n'étaient pas punis et les miliciens ne se donnaient presque jamais la peine d'agir, ils se concentraient bien plus sur les quartiers plus aisés de Marbrume. Pourquoi diable Rémi avait-il une telle importance à leurs yeux ? N'ayant pas vraiment le choix, elle s'effaça de l'entrée et ouvrit sa porte, laissant les hommes entrer. Sa demeure n'étant pas bien grande, elle était certaine que son petit voleur serait bien rapidement découvert. Se torturant la lèvre de ses dents, elle tentait de trouver une solution, mais rien ne semblait lui venir à l'esprit. Fronçant les sourcils, elle observa les trois hommes détailler son intérieur avant de s'adresser à nouveau à elle. Et sous couvert de cette supposée enquête, voilà qu'ils se mettaient à la menacer pour dessus le marché. Ses joues rougirent de colère et elle fusilla tout ce beau petit monde des yeux. Leurs rires résonnèrent dans la nuit et Théanna songea qu'elle n'oublierait pas de si tôt leurs visages. Ils paieraient pour ce qu'ils venaient d'insinuer ce soir.

Elle connaissait bien des tours pour faire de la vie d'un homme un enfer. Une infusion de faux nénuphar et leur petit oiseau ne se lèverait plus de si tôt, peut-être pourrait-elle également leur conseiller de manger de l'iris aquatique, elle adorerait les voir rendre leurs tripes et passer des heures dans les latrines. Cela pourrait bien leur faire passer l'envie d'ennuyer une apothicaire et personne ne pourrait rien lui reprocher dans la mesure où ces deux plantes possédaient bien d'autres qualités, il n'était question que de dosages et de connaissances. Alors qu'elle s'apprêtait à réagir, exprimant le fond de sa pensée, un raclement de gorge se fit entendre. Théanna se figea brusquement, se demandant à quoi pouvait bien jouer Rémi, n'était-il pas censé demeurer cacher ? Évidemment, les miliciens ne manquèrent rien de ce bruit et l'un d'eux réagit. Rémi prit alors la parole, se révélant à la vue de tous... Et qu'elle vue !

Mortifiée, la jeune femme ne put détacher ses prunelles du fessier du voleur. Par Anür, qu'était-il donc en train de se produire ? Rendue muette, elle se contenta de suivre la discussion de loin, ignorant la manière de réagir dans ce cas de figure. Elle s'attendait peut-être à la voir en sous-vêtements, ou simplement torse-nu comme précédemment, mais jamais nu comme un ver. Détournant brusquement le regard, elle sentit son visage chauffer et elle ne donna pas cher de sa peau dans l'état actuel des choses. Rémi sembla gérer la situation d'une main de maître, jouant l'amant un peu trop passionné. L'homme s'approcha d'elle, l'enlaça, déposant une main sur sa hanche. S'ils voulaient tout deux se débarrasser rapidement des miliciens, elle devait bien jouer le jeu. Se forçant à prendre une attitude plus détendue, elle posa une main sur le torse-nu du voleur et afficha un sourire quelque peu crispé.

— Effectivement, navrée de ne pas l'avoir annoncé tout de suite, je n'ai pas pour habitude d'étaler ainsi ma vie privée. Vous comprendrez bien ma gêne de vous montrer un tel tableau.

Les rires des miliciens titillèrent la colère toujours présente et qui suffit à la remettre d'aplomb. Par Etiol, étaient-ils simplets ? Ne pouvaient-ils cesser de rire comme des gorets et quitter sa demeure ? La mention du mariage, une réponse coupée par une insulte. Et quelle insulte. Théanna se figea brusquement, ce n'était pas la première fois qu'on lui donnait un tel surnom, elle y était habituée à présent, mais cela ne la révoltait pas moins pour autant. Hélas, si elle ne voulait pas s'attirer les foudres des miliciens, elle devait s'empêcher de réagir au vu et su de tous, elle devait se montrer bien plus fine et sournoise. Quelle erreur ils venaient de commettre, sa vengeance serait terrible. Du rumex, elle leur donnerait également du rumex avec les iris aquatique, cela leur donnerait de tels maux de ventre qu'ils regretteront d'être encore en vie. Mais alors qu'elle s'attendait à ce que le silence s'impose en maître dans la pièce, la voix de Rémi retenti. Surprise, elle tourna son visage vers lui, le voyant prendre sa défense. Perplexe, elle se demanda ce qui lui prenait, il ne la connaissait pas et il risquait de se mettre les miliciens à dos, pourquoi faire une telle chose pour elle ? Après tout, elle avait tenté de le tuer à l'aide de sa poêle.

C'était bien la première fois que quelqu'un prenait ainsi sa défense face à des insultes. Il y avait bien eu ce chevalier, quelques semaines plus tôt, qui avait fait fuir deux clients inquiétants, mais on prenait rarement sa défense lorsque les insultes fusaient. Elle ignorait ce que pouvait bien être une coutellerie, ignorant encore beaucoup de choses à propos de la milice, mais cela suffit à faire taire les trois idiots. Ils semblaient pourtant hésiter à partir et Théanna se souvint du nom du chevalier qui l'avait protégée. Tentant sa chance, elle prit à son tour la parole, d'une voix glaciale, le regard sévère.

— Je suis l'apothicaire du chevalier Desmond de Rochemont, soyez certains qu'il entendra parler de vos propos et de votre manière d'agir messieurs.

Comme elle l'avait espéré, le nom à lui seul suffit pour faire pâlir le plus intelligent des trois. Théanna s'avançait peut-être un peu en affirmant qu'elle était l'apothicaire du chevalier, mais elle l'avait soigné et il avait suggéré qu'il reviendrait auprès d'elle. Pourtant, la méfiance brillait dans le regard du premier milicien et la brune ne pouvait l'en blâmer. Messire Rochemont était un noble influent pour la maison Rougelac, pourquoi se rendrait-il auprès d'une apothicaire du Labourg.

— Oh vraiment ?

Un petit sourire narquois étira les lèvres du milicien, mais elle ne broncha pas, sûre d'elle. Voyant qu'elle ne vascillait pas, les trois comparses se mirent à se dandiner, mal à l'aise.

— Oui vraiment. Désirez-vous prendre le risque d'empirer vos situations, messieurs ? Vous pourriez découvrir un sort bien pire que celui de la mort.

La réflexion se fit, longue et douloureuse, dans leurs cerveaux bien trop étriqués. Ils finirent cependant à la conclusion qu'ils ne semblaient pas vouloir prendre le risque. En réalité, le premier milicien semblait toujours aussi sceptique, mais ses deux compagnons eux, semblaient la croire sur parole. La majorité l'emportant, ils finirent par hocher de la tête.

— Bien... Nous allons donc quitter les lieux et vous laisser... À vos affaires.

Dit-il, une lueur concupiscente dans le regard, déshabillant le couple qu'ils formaient. Une vague nausée la traversa et elle lui lança le regard le plus noir dont elle était capable. Un rire suivit sa réaction, avant que les miliciens ne quittent sa maison. Cependant, avant qu'elle ne puisse fermer la porte, une main se posa sur le battant.

— Profitez bien de votre fiancé... Nous serons certainement amenés à nous revoir et pensez bien que j'effectuerai quelques vérifications quant à vos dires ma dame...

Sa menace proférée, il lâcha enfin le montant de sa porte et Théanna pu la fermer prestement. Un long soupir quitta sa bouche, avant qu'elle ne pose le front contre le bois. Il faudrait peut-être qu'elle quitte la ville et se rende autre part, cela faisait beaucoup en l'espace de peu de temps. Prendre des vacances lui ferait un bien fou, dommage qu'elle ne puisse pas se le permettre.