Nom : Pêcheur

Prénom : Morgred

Age : 32 ans

Sexe : Masculin

Situation : Marié, trois enfants

Rang : Marin pêcheur / Passeur

Lieu de vie : Port de Marbrume

Carrière envisagée & tableau de départ avec les 4 PCs :
Carrière du Marin
+1 FOR +1 HAB +2 TIR

Compétences et objets choisis :

Compétences :

- CANOTAGE - Niveau 1
- CARTOGRAPHIE - Niveau 1
- CONNAISSANCE DES ÉLÉMENTS (eau) - Niveau 1
- NATATION - Niveau 1
- PÊCHE - Niveau 1

Objets :

- Un coutelas
- Une tenue en lin
- Une barque, acquise cinq ans plus tôt

À l’orée du bois, le charpentier multipliait d’incessantes allées et venues face à la mer impassible. Au lointain, sa surface plane la faisait paraître immobile quand, à quelques pas, le rythme régulier des clapotis marins trahissait un bercement paresseux.


La voix fluette attira l’attention du père de famille. Le regard lancé à sa benjamine suivit le tracé de son petit doigt pointé sur l’étendue d’eau. Trompé par les derniers reflets éblouissants d’un soleil en déclin, l’homme crut d’abord à une erreur. Il lui fallut plusieurs secondes pour distinguer enfin les contours d’une barque en mouvement.


Un froissement de fourrés abrita femme et enfants tandis que le charpentier se dissimulait derrière un châtaignier, ses yeux anxieux dardés sur la lente approche de l’embarcation. Une éternité parut s’écouler au rythme lent et régulier des rames. Lorsqu’elles cessèrent enfin leur incursion répétée dans l’eau scintillante, ce fut pour mieux céder leur place au nocher lui-même, dans un glissement silencieux.

Courbé en avant, immergé jusqu’aux mollets, l’individu poussa l’embarcation jusqu’à ce que la grève gémisse sous l’assaut de la modeste coque. Haletante, la silhouette sombre reprit son souffle un instant, se redressa dans toute sa hauteur, puis avala les quelques enjambées qui le séparaient de la berge. D’un regard, l’homme embrassa la lisière de la forêt, puis s’assit sur le rebord de sa barque. Avec lenteur, il fouilla les poches de ses vêtements, manipula indistinctement un, ou peut-être plusieurs objets, puis fit apparaître entre ses mains, tout proche de son visage, un éclat aussi vif que bref.

Le signal.

Impatience et inquiétude abusèrent la prudence du père de famille : elles l’incitèrent à quitter sa cachette pour traverser la plage. De chacun de ses pas naissaient d’indiscrets crissements de graviers, qui ne se turent que lorsqu’il s’immobilisa à une coudée de l’embarcation et de son propriétaire. Statique, l’homme semblait imperturbable et fumait paisiblement la pipe – de l’écorce de saule, à en croire l’odeur –, la tête basse.

L’ampleur de sa chemise dissimulait le détail d’une carrure que l'émaciation de son visage trahissait cependant, car si la largeur de ses épaules forçait confiance et respect, ses pommettes saillantes et ses joues creusées ne leurraient personne. Vestiges d’une vie de labeur et de misère, elles renforçaient la dureté d’un regard éteint aux cernes apparentes, accentuaient le dessin d’un nez anguleux, soulignaient les contours d’une mâchoire carrée et laissaient supposer une musculature sèche confinant à la maigreur.
Si proche, le père de famille remarquait ponctuellement d’autres éléments de la physionomie de l’individu. La nuance existant entre la couleur de sa barbe et de sa moustache – tirant vers le roux – et celle de ses cheveux plaqués en arrière – d’un noir de jais –, son froncement de sourcils exacerbé et manifestement constant, ses lèvres fines, fendues, asséchées et brûlées par le sel de mer, les doigts noueux de ses mains rugueuses.

Au terme de son analyse, le charpentier vit un égal en cet individu. Un roturier qui, comme lui, travaillait par tous les temps, sous le soleil harassant qui lui tannait la peau, comme sous les pluies diluviennes qui lui trempaient les os, pour espérer gagner de quoi nourrir sa famille.
Sans le connaître, et bien malgré son air bilieux, il lui accorda sa sympathie.

Il s’en repentit rapidement.


Aussitôt, la silhouette se déplia avec lenteur, indéfiniment, jusqu’à dépasser son interlocuteur d’une tête, au moins. C’est alors qu’il put enfin le discerner : ce regard mort, jusque-là, qui prenait vie sous ses yeux. Ce gris-bleu hypnotique, pareil aux reflets marins précédant la tempête.

Le soin que porta le nocher à vérifier le contenu du sac de toile raviva l’anxiété du charpentier. Il ne tint pas plus d’une poignée de secondes avant d’éprouver l’impérieux besoin de se justifier.


Plus appuyé qu’à l’accoutumée, le froncement de sourcils de son interlocuteur fendit son front d’une fine veine trahissant son mécontentement. Lorsque la femme du charpentier, son fils et sa fille se joignirent au tableau, la colère altéra jusqu’à son teint. Chaque figure survolée parut alors accentuer la tempête de ses iris, que la bouille rondelette de la gamine poussa à son paroxysme.


Si le père de famille eut l’espoir d’apitoyer son interlocuteur, il réalisa bien vite combien il se fourvoyait. La sympathie éprouvée pour cet individu taciturne lui sembla alors dérisoire : jamais le nocher ne l’avait estimé en égal. Il n’avait que faire du devenir d’étrangers aux abois. Seul le profit lui importait, manifestement.


Une grimace tira momentanément les traits de l’individu. Parler lui semblait douloureux. Sans doute n’avait-il pas l’habitude de s’exprimer longtemps.


Rouge de colère, le charpentier toisa l’individu d’un regard réprobateur. Plus vivace encore que la fureur en son cœur, grondait cependant la peur en son ventre. Plus le soleil déclinait, plus l’obscurité menaçait. Or, l’obscurité appelait des monstres que personne ne souhaitait croiser. Résigné, l’homme baissa les yeux sur la demi-miche que son interlocuteur, à présent occupé à remettre la barque à flot, semblait vouloir emporter.


Avec amertume, le père de famille observa le pêcheur grimper dans son embarcation sans un mot de plus, puis s’éloigner avec lenteur et indifférence.


Ainsi abandonné sur la grève, le charpentier regrettait d’avoir prêté oreille aux on-dit lui ayant suggéré l’existence d’un passeur aussi peu amical que regardant. Un homme prétendument honnête et prudent, malin, ou à tout le moins débrouillard, qu’il aurait davantage décrit comme voleur, couard, obstiné et sans cœur.
Même s’il s’y était essayé, jamais le père de famille n’aurait su trouver la moindre excuse au pêcheur. Qui le pourrait, sans le connaître ?

Lorsque la barque fut enfin arrimée au ponton, la nuit était déjà tombée depuis quelque temps. Seul un croissant de lune à la finesse irréelle éclairait la pauvreté du port de Marbrume, presque déserté.
Extirpé de l’embarcation, le nocher ne s’appesantit ni sur le spectacle des ruelles sordides qu’il connaissait par cœur, ni sur la tristesse des habitations en ruines, mal barricadées. Il traversa les venelles accidentées, s’empêtra dans une boue stagnante aux relents de marées basses, puis s’arrêta devant une bâtisse misérable, à la porte de laquelle il frappa discrètement.

Une agitation mesurée ne tarda pas à se faire entendre depuis l’intérieur, et le foyer cracha finalement une trentenaire affolée.


Sans un mot, le pêcheur entra, contraignant sa femme à reculer. Il ferma la porte derrière lui, puis entreprit de barricader soigneusement l’ouverture.


Mutique, Margot suivit des yeux les faits et gestes de son mari : lorsqu’il déposa une demi-miche sur leur table, d’abord, lorsqu’il écarta le rideau dissimulant le coin où dormaient leurs trois filles, ensuite, lorsqu’il se délesta un à un de ses vêtements avant de se glisser dans leur modeste lit conjugal, enfin.

Patiente, la jeune femme avait appris à l’être. Depuis la naissance de leur aînée, dix ans plus tôt, le pêcheur s’était progressivement muré dans le silence et les secrets. Margot espérait toujours des confidences qu’il ne lui livrait pourtant jamais. Ce soir ne ferait pas exception.


Dans un soupir, la trentenaire capitula et gagna la couche. Chaque jour, plus que le précédent, une évidence la frappait : Morgred avait changé. Il n’était plus l’enfant fripon qu’elle avait connu, bien des années auparavant, source d’autant d’exaspération que de distraction pour elle. Il n’était plus davantage le jeune homme resplendissant et heureux qui l’avait épousée il y a onze ans.

Certes, la mort de son père, pêcheur lui aussi, avait précipité l’apprentissage de Morgred et forgé une maturité précoce, dès l’année de ses dix-huit printemps : en sa qualité d’aîné, il lui était alors revenu le soin d’assumer la charge de sa famille. À l’époque, Margot n’avait pas remarqué chez lui de différence notable, en dépit de choix complexes et d’erreurs commises.
La paternité semblait cependant avoir fait resurgir en lui un sens du devoir et des responsabilités exacerbé, que chaque naissance avait accru. Sans certitude aucune – car elle n’avait jamais abordé le sujet avec lui –, la femme associait ce comportement à une hargne viscérale. Une volonté inébranlable de réussir là où son propre père avait peut-être échoué, d’une certaine manière.

Admirable, l’acharnement du pêcheur était néanmoins source d’une inquiétude que l’épouse peinait à dissimuler. Elle savait Morgred prêt à tout pour subvenir aux besoins de sa famille, et redoutait chaque jour cette absence de limites, que ces disparitions ponctuelles et inexpliquées alimentaient copieusement. Depuis quelque temps, en effet, il avait adjoint à son métier diurne de mystérieuses activités semi-nocturnes, dont il taisait le détail. Si Margot avait d’abord envisagé l’impensable adultère, elle avait rapidement reconsidéré la question – sans toutefois trouver de réponse claire – au regard des vivres rapportés de ces escapades, de la foi inconditionnelle de son mari et de la rigueur avec laquelle il respectait les préceptes religieux. Bien qu’assez peu expansif, Morgred ne manquait jamais une occasion de prier les Trois quotidiennement. Très tôt, ses valeurs et son métier avaient cependant fait naître une préférence pour Anür, à qui il tâchait, autant que le lui permettait ses piètres moyens, de multiplier les offrandes. Bafouer un mariage consenti par la déesse devenait alors d’autant plus inimaginable.
Consciente de la pauvreté dans laquelle ils vivaient, la femme comprenait pourtant sans mal l’origine probable de ces cachotteries. Elle ne pouvait alors s’empêcher d’éprouver une certaine culpabilité à lui avoir donné trois filles, quand un fils aurait suffi à alléger un fardeau que le pêcheur assumait seul.


Comme toujours, il s’obstina dans un silence borné, que le contexte actuel entretenait depuis près de trois ans. Elle ne l’avait jamais connu bavard, mais les attaques répétées de la fange l’avaient rendu plus taciturne encore.

Comme beaucoup d’autres, il n’avait pas cru à l’arrivée du fléau, jusqu’à ce que celui-ci s’écrase contre les remparts de la cité et en bouleverse l'entière organisation. Cela étant, l’homme semblait avoir accusé un a-coup particulier au lendemain de l’invasion de La Hanse. Beaucoup avaient conservé de cet évènement une crainte et un traumatisme que les sentiments de Morgred paraissaient pourtant surpasser. Sources de cauchemars quotidiens, ils avaient refoulé le pêcheur dans ses derniers retranchements, à un point tel qu’il s’était exceptionnellement livré, une nuit.
« Tu penses qu’elle y est encore ? », avait-il lancé, un ou deux mois après l’attaque. Margot avait rapidement compris qu’« elle », c’était Ombeline : benjamine de sa fratrie, fille, et presque aveugle de surcroît. Morgred l’avait jadis perçue comme un fardeau et vendue à un bordel de La Hanse, quatorze ans plus tôt, dans l’espoir de mieux subvenir aux besoins de sa mère et de son frère.
À sa connaissance, son mari n’était jamais retourné là-bas. Ni avant, ni après l’offensive de la fange  qui y avait sévi. Margot s’était alors imaginé que l’inquiétude fugace du pêcheur s’était naturellement tarie, en partie grâce à ses paroles réconfortantes et optimistes. Elle ne pouvait toutefois se figurer combien les remords dévoraient à présent l’homme de l’intérieur, et combien chaque jour, les grands yeux bleus de ses filles le renvoyaient à ses erreurs passées.


Margot se laissa aller à un énième soupir. Morgred s’était toujours montré prudent, mais la deuxième attaque intra-muros de la fange, ayant abouti à la perte du Chaudron, avait précipité l'avènement de barricades qu’il imposait de jour comme de nuit. Rares étaient les occasions de s’aérer et il ne les concédait généralement que sous sa surveillance. Alors qu'il se trouvait naturellement peu enclin à prêter attention aux festivités et à l’insouciance, ce deuxième assaut avait achevé de convaincre Morgred de la dangerosité des manifestations publiques. Pis : le port jouxtant les deux quartiers visés par les offensives, l’homme était à présent persuadé que la prochaine fois les toucherait directement, ou les couperait du reste de la ville.

Patiente, Margot l’était, oui. Il lui arrivait pourtant de se sentir dépassée. Morgred était bon avec elle et leurs filles, mais de plus en plus difficile à vivre, tant dans son comportement que dans les règles astreignantes qu’il édictait.
Les jours les plus maussades, il lui semblait que ce déraisonnable instinct protecteur entretenait la misère de leur foyer, alors qu’ils pourraient prétendre au bonheur. Dans ces moments de doutes, la trentenaire ne savait plus guère qui, de l’amour ou de l’adversité, les liait l’un à l’autre.

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Comment avez-vous trouvé le forum ? Par l'Annuaire de Forumactif.

Vos premières impressions ? Coup de cœur pour l'ambiance (contextuelle et visuelle) du forum, sa cohérence et la richesse de son background.
[EDIT] Au fil de ma présentation, j'ai potassé davantage le lore du forum (et n'en suis toujours pas venu à bout ~) et tiens à confirmer mon coup de cœur premier. Je ne peux pas dire que j'ai rarement vu un forum à ce point détaillé, car je n'en ai en fait jamais vu de tel. Plus je lis, plus je découvre un univers riche, réfléchi, assumé, préservé, logique et original. Un grand bravo pour le travail abattu ^^ (profitez-en, je suis, en général, assez avare de compliments, huhu)

Des questions ou des suggestions ? Juste une précision : Morgred est un personnage prédéfini créé par Ombeline. Le cas échéant, il faudra donc actualiser le statut "libre" de la fiche originale :]

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