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 Evrard de Sistre (en cours)

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Evrard de Sistre
Evrard de Sistre



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MessageSujet: Evrard de Sistre (en cours)   Evrard de Sistre (en cours) EmptyJeu 10 Fév 2022 - 13:39





Evrard, le Chevalier-Bougon



Identité



Nom : (de) Sistre

Prénom : Evrard

Age : 37 ans

Sexe : Masculin

Situation : Époux de Méroflède de Palances-Bontort,
Père de Bérard, Basine, Rorgon, Alpaïde et Leudaste,
Frère de Margot Montfort de Brieu (présumée morte)

Rang : Comte de Sistre, fier vassal du duché de Morguestanc

Lieu de vie : L'esplanade, parbleu, avec les vrais !

Carrière envisagée & tableau de départ avec les 4 PCs : (voir topic Système Rp & Xp - Carrières)
(Ne pas recopier le tableau, donner seulement les points à ajouter)

Compétences et objets choisis : (voir topic Système Rp & Xp - Compétences)

Compétences :

- [...] - Niveau 1
- [...] - Niveau 1
- [...] - Niveau 1
- [...] - Niveau 1

Objets :

-

Apparence



(A quoi ressemble votre personnage ? Comment s'habille-t-il, quelles sont ses marques caractéristiques, ce qu'il inspire à autrui, ce qu'il dégage, etc)


Personnalité


Ce qui frappe au premier abord chez Evrard, ce sont ses poings. Le sang bleu hérité de ses ancêtres est chaud, et le comte de Sistre n'est pas le genre d'homme à se laisser chier dans les bottes. On dit de lui, mais plus volontiers dans son dos, qu'il est conciliant comme une mule ; on dit aussi beaucoup d'autres choses à son sujet, que la décence m'interdit de vous livrer de façon littérale.

A la vérité, Evrard de Sistre n'est pas un si mauvais bougre ! Le passage des années, l'expérience et la maturité s'en venant, le tempérament du comte s'adoucit à mesure qu'il prend de l'âge, mais les fantômes de son passé lui collent aux basques, aussi la plupart des gens voient en lui un homme impulsif et malavisé avec qui il est difficile de traiter. Menteries ! Billevesées que tout cela ! Evrard n'est pas plus difficile à aborder qu'un autre, pour peu qu'on s'y prenne de la bonne façon ; il suffit de connaître le mode d'emploi.

En premier lieu, vous saurez que le comte de Sistre n'est pas peu fier de ses origines. Orgueilleux qu'il est, il ne se lassera jamais de recevoir les honneurs dus à son rang. Il aime particulièrement évoquer les heures de gloire de sa maison, narrer avec passion quelque bataille où se serait illustré un ancêtre, avec force détails comme s'il y avait pris part lui-même. S'il se lance dans un tel exposé, écoutez-le d'une oreille attentive, au moins en apparence ! C'est un sujet à ne point prendre à la légère, car Evrard vit la noblesse jusqu'aux tréfonds de son âme, et se pare volontiers des vertus que l'on prête à sa caste : bravoure, abnégation, grandeur d'esprit, loyauté. Qu'importe qu'il ne suive pas ce protocole à la lettre dans sa vie de tous les jours, qu'importe que certains de ses actes passés n'aient rien de chevaleresque ; si vous avez l'outrecuidance de le lui faire remarquer, vous allez passer un sale quart d'heure.

Il aime rire. Il a le rire gras et franc, parce qu'il s'amuse de choses simples et communes, comme du malheur des pauvres et de la laideur des petites gens. Il a le verbe fleuri des camps militaires, lui qui a guerroyé et fréquenté la soldatesque, et bien qu'il méprise le bas peuple, il sait se faire aimer des gens de guerre. Il n'est jamais avare de quelque saillie verbale bien sentie pour amuser la galerie, surtout lorsque c'est aux dépens de quelqu'un.

Habile aux épreuves de force et épéiste accompli, Evrard n'est qu'un piètre lecteur et écrit de manière laborieuse. On l'a formé très jeune à l'art des lettres, sans grand succès ; il laisse volontiers cette tâche aux gratte-papiers qui l'entourent, n'éprouvant qu'un profond ennui pour les tâches administratives.

On dit de lui qu'il ne craint ni les dieux ni la fange, mais qu'il ne craint qu'un seul être humain en ce bas monde. Si la première partie est très exagérée, la seconde se révèle assez juste : sa propre mère, Brunissende d'Arquenay, est l'éminence grise qui le protège de ses propres failles, et il lui voue une obéissance sans faille, mêlée d'une forme étrange d'adoration et de peur.



Histoire


I.

L'herbe sèche lui chatouillait les narines ; même brûlée par la chaleur estivale, même piétinée et retournée sous les sabots des chevaux et les bottes des piétons, elle fleurait bon les jours heureux. Les yeux clos, Evrard demeura un moment dans le silence, face contre terre. Le silence, le silence. Il n'y avait rien de tel que le silence, après la clameur des multitudes ; il n'y avait rien de tel que le repli et l'oubli de soi après la débâcle.

Il fallait, bien sûr, faire abstraction de ce lourdaud de Firmin qui geignait à une dizaine de mètres de là. Entre deux râles d'agonie, le gamin trouvait encore la ressource d'appeler à l'aide. Que ne pouvait-il fermer sa petite gueule ! Evrard eut donné n'importe quoi pour quelques minutes de répit supplémentaire ; était-ce trop demander ? Trop demander, que d'avoir un écuyer qui suit les ordres. Trop demander, que d'avoir une armée loyale qui ne se débande pas au premier signe de doute. Trop demander, que d'avoir un cheval qui n'en fasse pas autant, et qui ne désarçonne pas son cavalier avant de prendre la fuite... Fronçant les sourcils, Evrard se retourna lentement sur le dos. Les paupières toujours closes, il sentit la chaleur du jour lui fouetter le visage. En toute honnêteté, il faisait un temps magnifique. Quelle journée de merde. Il étira ses épaules, ses bras, ses jambes, cala sa nuque dans l'herbe desséchée. Il aurait voulu dormir là, et ne pas se réveiller. Que n'était-il pas mort tout à l'heure, au champ d'honneur, l'épée à la main, livrant chèrement sa peau dans un dernier coup d'éclat ! Mais la bataille avait été si brève et son issue si évidente qu'il n'avait guère entrevu l'occasion d'un coup d'éclat. A l'image de ses hommes, il avait préféré sauver sa peau ; c'était avant que ce foutu canasson ne fasse cette ruade qui l'avait projeté au sol, évidemment. Cheval de merde.

S'il avait espéré piquer un somme, l'espoir ne dura pas. Un grondement sourd se mit à traverser la terre, dans toute la prairie ; il en sentait les vibrations tout le long de son corps. Il lui semblait également entendre, avec une acuité grandissante, les cris des mourants disséminés dans la prairie, comme si leurs plaintes se mouvaient elles aussi dans le sillage des cavaliers en approche. Dans un soupir, Evrard envisagea un bref instant de se lever ; il affronterait une dernière fois les conséquences de tout ce merdier, comme une manière de terminer ce qu'il avait commencé. Il se ravisa très vite ; les épaules toujours clouées à terre, il attendit, allongé là, dans l'indifférence la plus complète. Il entendit, sans les voir, la troupe en approche ; les cavaliers ralentissaient l'allure. Au son des sabots qui martelaient la terre brûlée, il en devina une dizaine, mais sans grande certitude : le détail, désormais, lui en touchait une sans faire bouger l'autre. Le silence se fit, de nouveau, seulement ponctué par le cliquètement des mors des chevaux et le tintement des armures. On le toisait, mais Evrard n'en avait cure ; avec un peu de chance, s'il faisait le mort assez longtemps, on le laisserait faire sa sieste. Las ! Les spectateurs s'éternisaient. Quelque chose dans cette attente prolongée le laissait deviner que son attitude les laissait perplexes ; du moins jusqu'à ce que résonne une voix familière, et honnie entre toutes.

« Regarde-toi. Tu es pitoyable. »

Dans les ténèbres de ses paupières closes, le son de cette voix rauque et autoritaire faisait ressurgir chez Evrard les réminiscences de vieilles peurs infantiles.

« Quel gâchis ! Tant de morts inutiles, tant de sacrifices sur l'autel de ta bêtise. Voilà où mène ta petite rébellion, mon garçon ; une rébellion dictée par l'égoïsme d'un adolescent ingrat. J'ai été trop coulant avec toi ; j'ai eu grand tort de ne pas veiller à te discipliner avec plus de dureté. »

Il y eut un tintement métallique suivi d'un bruit sourd, puis du froissement de l'herbe sous une paire de bottes.

« As-tu l'intention de rester ainsi à m'ignorer ? L'insulte et le déshonneur ne te suffisent pas, il faut que tu sois puéril ? A quoi rime tout ceci ?
- Je crois qu'il boude, seigneur comte, fit la voix de Jérôme de Clairsambre, l'un des lèche-bottes de la coterie du comte, et l'un des hommes les plus stupides qu'Evrard ait jamais connus.
- Bien sûr qu'il boude, répliqua le comte, la voix chargée d'agacement. Il ne fait que cela depuis qu'il est venu au monde.
- Qu'allez-vous faire de lui à présent ?
- Je devrais le faire pendre au gibet des traîtres. Les dieux m'en soient témoins, cela me réjouirait ; mais à mon grand malheur, ce butor est de mon sang.
- Il a pris les armes contre vous. La piété filiale lui est étrangère...
- Et je ne m'abaisserai pas à la même infamie. »

A l'ironie de la situation, Evrard ne put réprimer un ricanement. Il ouvrit les yeux par la même occasion, découvrant, tout autour de lui, une demi-douzaine de chevaliers en armure, au milieu desquels se tenait le comte Gaston de Sistre ; ses cheveux grisonnants, dégarnis au milieu du crâne mais longs sur les côtés, pendaient jusque sur ses épaules, encadrant un visage glabre et plein de gravité.

« Peut-on savoir ce qui t'amuse, mon garçon ? Tu devrais nous en faire profiter.
- Vous parlez de piété filiale, mon cher père. Qu'en est-il de vos devoirs d'époux ?
- Laisse donc ta mère en-dehors de tout cela. Elle n'est qu'un prétexte à ta colère...
- Vous avez brisé un serment fait devant Anür. Ne me parlez pas de piété filiale, de loyauté ni d'honneur ; ces choses ne valent rien pour vous.
- Je n'ai rien brisé. Mon union avec Anseflède a été bénie par Anür.
- Une parodie de noce célébrée par un prêtre corrompu. Quel genre de prêtre unit un homme déjà marié ?
- J'ai répudié Brunissende, elle n'était plus mon épouse.
- C'est absurde ! Vous savez aussi bien que moi qu'un mariage ne se rompt pas.
- Tu vas me faire une leçon de théologie ? Dans ce domaine, je ne te crois pas meilleur que dans celui des armes. Et si ta cause était juste, les dieux t'auraient donné la victoire aujourd'hui ; tu vois bien qu'il n'en est rien. »

Faute de pouvoir se fendre d'une répartie bien sentie, Evrard se contenta de serrer les dents tout en toisant son paternel d'un œil torve. C'était le genre de regard qui semblait dire : « je vous chie dans la bouche, cher père, avec le respect que je vous dois », mais ses lèvres restaient closes ; quelque chose lui disait qu'une telle saillie ne serait pas bonne pour la postérité, et en matière de prestige, il n'était déjà pas à la fête. Il fit le choix de se taire. Et pourtant, il en avait, des choses à lui balancer, à la tronche du paternel ! Des reproches plein les musettes, des chariots entiers de souvenirs de toutes les brimades que lui avait infligées ce vieux crabe. Mais à quoi bon vider son sac maintenant ? Autant pisser dans un violon, quand on endossait le rôle du perdant.

Se désintéressant de son enfant terrible à présent qu'il l'avait réduit au silence, le comte de Sistre distribua ses ordres à la volée ; deux grands gaillards empoignèrent solidement le vaincu, l'arrachant à l'étreinte de l'herbe pour le remettre sur pieds. On lui fit monter un nouveau cheval et prendre la route, flanqué de ses gardiens. A la croisée de deux routes, la troupe se scinda ; le comte victorieux repartait au nord, vers la citadelle de Sistre, tandis qu'on menait Evrard à l'est. On chevaucha longuement, jusqu'à ce que le jour décline et que le crépuscule tombe sur les plaines, pour atteindre une vieille tour à demi effondrée, à laquelle l'obscurité conférait un cachet plutôt sordide. C'était là qu'on l'envoyait se faire oublier, loin des hommes et des intrigues, loin de tout, pour qu'il ne nuise plus à son père. Et comme il prenait conscience de l'ennui mortel qui le guettait, Evrard regretta amèrement d'avoir fait le choix du silence plus tôt dans la journée ; désormais, il aurait beau crier sa haine, nul ne l'entendrait plus.

II.

Le glissement de l'adolescence vers l'âge adulte est souvent marqué par un rite de passage. Souvent, dans l'esprit des jeunes hommes, cette étape est immortalisée par les premiers batifolages avec une jeune fille plus ou moins propre. D'autres, plus portés sur la chose martiale et adeptes de baston, argueraient qu'on devient homme lorsqu'on a tué son premier congénère. Bref ! Il y a tout un panel de possibilités. Dans le cas d'Evrard, sa rébellion avortée et la longue période de réclusion qui s'ensuivit marquaient la fin d'une ère d'insouciance ; l'homme qui quitterait la tour ne ressemblerait guère au jeune effronté qui y était entré. Pour survivre au silence, il faut apprivoiser sa solitude ; au début, il trompait l'ennui en échafaudant des plans, s'imaginant échapper à la vigilance de ses geôliers, reprendre les hostilités et obtenir sa revanche, d'une façon ou d'une autre. Le temps passant, Evrard cessa de guetter ce qui se tramait au-dehors. Les affaires du monde ne le concernaient plus ; comme les vieillards décrépis qui n'ont plus le goût des choses, il passait le plus clair de son temps à dormir. Ce n'était pas qu'il soit résigné ; c'est juste qu'il se faisait chier.

Lorsque son regard vide contemplait les murs entre deux siestes, il lui arrivait parfois, mais brièvement, de repenser au passé. Qu'est-ce qui pousse le fils aîné d'un comte à se soulever contre son paternel ? C'est là prendre bien des risques, quand il suffit d'attendre patiemment que le temps fasse son œuvre ; après tout, le titre lui était destiné en héritage.
Le doux visage d'une femme hantait parfois ses rêves. La vision était semblable à une bouffée de chaleur dans l'obscurité glacée de sa prison ; elle était incontestablement la seule qu'il eut jamais aimée, et aucune aventure ne tenait la comparaison. Toutes des salopes, sauf maman : l'adage aurait pu être inventé par Evrard. Sa mère, Brunissende d'Arquenay, était le phare qui guidait le navire de son existence ; elle l'avait toujours été. Enfant, c'était une femme douce et ferme à la fois, qui savait le gourmander quand il le fallait, sans jamais compromettre son amour. Et elle était belle, si belle, quand il était enfant ! Ca n'avait pas vraiment duré, c'est vrai ; les années n'avaient pas été tendres avec elle, et la grâce de ses traits s'était rapidement gâtée, comme il en avait été de ses dents. Les rides avaient creusé son visage, et une maladie de peau lui avait laissé une tâche disgracieuse sur tout le côté gauche de la figure. Elle était devenue sacrément moche, admettons ! Mais pas pour Evrard. L'amour filial, dans son cœur, n'avait jamais vacillé. Lui commanderait-elle de massacrer tout un royaume pour préserver son honneur, Evrard s'exécuterait sans une once de remord ; aussi avait-il été tout naturel pour lui de tirer l'épée contre son propre père, après que ce goret immonde ait jeté son dévolu sur une autre femme, de vingt ans sa cadette, encore préservée des affres du temps et encore en âge d'enfanter. Que ce vieux crabe sème ses bâtards dans des maisons de passe s'il lui en venait la fantaisie, c'était une chose ; qu'il prétende légitimer un second mariage, c'était insultant ; et qu'il octroie aux rejetons de cette putain les mêmes droits qu'aux enfants du premier lit, la chose était intolérable.

Las ! Evrard avait échoué dans la défense de ses droits comme dans celui de l'honneur de sa mère. Il semblait destiné à finir ses jours dans cette tour maudite, oublié et effacé des mémoires ; on lui substituerait un bâtard de son père, et il n'y aurait personne pour pleurer sur son sort, encore moins sur celui de sa pauvre maman. C'était ce qu'il lui semblait, alors ; et comme il se laissait vivre et perdait peu à peu toute notion du temps, il aurait juré que cette existence morose s'était étendue sur de longues années.

En fait, cela dura six mois.

La délivrance vint, aussi inattendue qu'un pet dans le silence religieux d'un temple, ou qu'une parole sensée dans la bouche de Jérôme de Clairsambre. Elle vint sous la forme d'une missive rédigée des mains habiles et soigneuses de Brunissende d'Arquenay.

Castel de Ponte-La-Mute, le 13 juin 1144,

Evrard, mon fils,

Le temps fait son œuvre, et lui seul sait délier les situations les plus inextricables quand on sait aiguiller la chance dans la bonne direction. Dans un sursaut de lucidité - et peut-être aidé en cela par la visite du haut-prêtre Fistulien, que j'avais convié - ton père s'est finalement détourné de cette garce dont il s'était entiché et m'a rappelée auprès de lui. Il a renié tous ses bâtards ; ta sœur Margot et toi êtes redevenus, de fait, ses seuls enfants légitimes.

J'escomptais de lui qu'il t'accorde son pardon par la même occasion. Il semble, hélas, que cela lui prenne encore du temps. Comme il souhaitait te maintenir encore dans ta captivité, je lui ai présenté un compromis acceptable. Les marches du royaume ont besoin de bras vigoureux pour les défendre, et t'éloigner un temps du duché de Morguestanc ne saurait être une mauvaise chose ; ton père consent à te libérer à cette condition. C'est ta chance de laver ton honneur et de faire oublier que tu as pris les armes contre ton géniteur. J'attends de toi que tu acceptes et que tu agisses ainsi que tu le dois, pour la plus grande gloire de notre maison.

Ta mère

N.B. : un paquet de biscuits doit accompagner cette lettre. S'il n'y en a pas, le messager les a certainement mangés. Ne le tue pas, je te prie ; cela ferait désordre.

III.

Si Evrard avait manifesté très tôt un attrait certain pour la chose martiale, les années passées à batailler aux frontières du royaume de Langres ne firent que renforcer considérablement son appétence. Le garçon s'y endurcit. Aux batailles se succédaient, en tant de paix, les jeux virils de la soldatesque auxquels il s'adonnait gaillardement. Lorsqu'il évoque cette période de sa vie, Evrard l'idéalise immanquablement ; la réalité est sans doute plus nuancée. S'il connut incontestablement certains succès, il vécut aussi à cet âge bon nombre de revers. Il y eut des batailles perdues, des retraites humiliantes, mais les défaites forgent aussi le caractère. C'était, finalement, un autre rite de passage pour le jeune Evrard, une étape de plus qui devait faire de lui l'homme qu'il était appelé à devenir. Il était, à n'en point douter, dans son élément, plus qu'à aucun autre instant dans sa vie ; mais il n'était pas heureux.

La chose tenait sans doute à l'exil qu'on lui avait imposé. Eût-il été là de son plein gré, il l'eut vécu différemment. Mais la terre qui l'avait vu naître lui manquait, et les circonstances dans-lesquelles il l'avait quittée continuaient de le piquer un peu, comme la sensation d'une cicatrice mal refermée dans le fondement. On l'avait envoyé loin parce qu'il était gênant ; aux yeux d'Evrard, la peine qu'il purgeait prenait son origine dans l'inconduite de son père, aussi vivait-il la chose comme une profonde injustice. Au fond de lui, la querelle n'avait jamais vraiment pris fin. Sa mère avait certes repris la place qui était la sienne, et c'était là une bonne chose ; mais Evrard avait la désagréable sensation d'être le seul à faire les frais de ce jeu de dupes. Il n'avait guère eu son mot à dire dans l'affaire. Pire : il n'avait joué aucun rôle dans la restauration de l'honneur de sa mère. Pendant longtemps, il se raccrocha à l'espoir qu'un beau jour, il trouverait le moyen de rééquilibrer la balance ; le destin lui offrirait la chance de prendre, d'une façon ou d'une autre, une petite revanche sur son passé, que toute cette histoire auait un épilogue acceptable.

Mais la vie n'est pas semblable à ce qu'on lit dans les romans. Le temps, seul, faisait son œuvre ; les missives de Brunissende d'Arquenay faisaient état de la santé vacillante du comte Gaston de Sistre. Le vieux comte tenait le lit la plupart du temps, abandonnant le pouvoir aux mains de sa femme. Un jour, il rendrait son dernier soupir, de la plus naturelle des manières, et il quitterait ce monde, laissant à Evrard un amer goût d'inachevé.

Ne pouvant se résigner à cela, Evrard prit son courage à deux mains, avec plume, papier et encre ; tant que son père était de ce monde, il avait encore la possibilité d'atteindre ce vieux con et de remuer son cœur de pierre. Il ne savait pas vraiment ce qu'il attendait au juste ; peut-être voulait-il simplement que son père se souvienne qu'il était là. Peut-être avait-il juste envie de le faire un peu chier avant de le voir mourir. Rien que ça, ça rééquilibrerait un peu la balance. Faute de mieux.

Sans doute aurait-il dû demander l'aide d'un scribe, mais sur le moment, la chose ne lui avait pas parue utile.

Campement de la Perge-Qui-Vend, le 17 janvier 1148,

Chère paire,

Vou saver je ne sui pas trè conten de tou se ki saie passaie entre nou mai je panse quile fau fere abstr attract abstrection contre movaise forretune bon coeure et acceptez le passer pour regardez la venir. Sesson de nous queurelée et feison la pet.

Evrare

Il n'eut jamais de réponse, et en fut terriblement vexé.
Son père mourut deux ans plus tard.

IV.

La mort de son père faisait d'Evrard le nouveau comte de Sistre. Elle levait, par la même occasion, l'interdit qui l'empêchait de regagner son foyer. Il exultait à l'idée de regagner Sistre, s'imaginant y faire un retour triomphal, tel un héros de guerre regagnant son pays sous les acclamations d'une foule en liesse. Il allait, hélas, au devant d'une énième déception.

Le pays qu'il regagnait ne lui était plus si familier. Lui-même, surtout, avait changé. Ses compagnons de jeunesse avaient vieilli ; la plupart étaient devenus sérieux et chiants, tout comme lui. Sa longue absence faisait d'Evrard un étranger en son foyer, et si on lui accordait les honneurs et la déférence dus à son rang, la chose manquait par trop de naturel. Il faut dire que la maisonnée avait déjà un maître à la manœuvre, et il ne s'agissait pas du défunt comte Gaston. Les années pendant lesquelles le vieux comte était resté alité avaient largement laissé les coudées franches à Brunissende d'Arquenay, qui s'était imposée comme une reine incontestable sur le pays de Sistre. A la manière d'un tyran habile, elle gardait la main sur le moindre petit aspect de la vie du château et du domaine, qu'il soit domestique ou politique. Rien ne se passait de son aval, et elle n'avait nullement l'intention d'abandonner une once de ce pouvoir à la chair de sa chair. Evrard ne s'y risqua guère ; d'abord, parce qu'il l'aimait trop pour s'opposer à elle. Ensuite, et avec le temps, il se mit à en avoir franchement peur, parce qu'elle était devenue une femme sèche, autoritaire et acariâtre.

Du reste, Evrard s'accommodait fort bien de laisser régner sa mère ; s'il appréciait le confort de la vie de château, il s'était très vite lassé des responsabilités qu'accompagnait le titre comtal. Il lui arrivait de regretter la vie des camps, lorsqu'il vivait de chevauchées batailleuses ; il y songeait avec nostalgie, oubliant qu'en ces temps bénis il n'était pas plus heureux qu'aujourd'hui.

Ce fut sa mère qui lui choisit une épouse ; une fille de bonne famille, née d'un baron du voisinage, Méroflède de Palances-Bontort était un beau parti qui devait doter Evrard d'une respectable descendance. Pas moins de cinq enfants allaient naître de cette union : Bérard, Basine, Rorgon, Alpaïde et Leudaste ; de quoi perpétuer la lignée et augurer d'un bel avenir pour la maison des Sistre. Les années passaient et se ressemblaient toutes ; Evrard guerroyait parfois, mais de plus en plus rarement, et s'adonnait à la chasse le reste du temps. Ses enfants grandissaient, choyés par leur mère, reproduisant le schéma classique. Evrard trouvait bien le temps, un jour, d'endurcir ses garçons ; les filles épouseraient des hommes bien nés et fortunés qui auraient deux fois leur âge. Tout suivait son cours, dans l'ordre naturel des choses.

C'était du moins ce que l'on pouvait légitimement espérer avant que ne survienne la fin du monde.

V.






Derrière l'écran


Certifiez-vous avoir au moins 18 ans ? Je soussigné et tout le tintouin, blablabla, certifie avoir cessé d'être un petit morveux depuis belle lurette et revendique avec fierté mon statut de vieux boomer réac' votant à droite. Toutes les informations figurant dans cette phrase ne sont pas obligatoirement vraies, saurez-vous deviner lesquelles ?

Comment avez-vous trouvé le forum ? C'est une adresse connue dans le milieu, un peu comme un de ces restaurants gastronomiques que votre entourage vous conseille depuis des années mais que vous n'aviez pas tenté parce que vous aimiez la simplicité de McDo. Et puis, un jour on regarde le menu de plus près, et on se décide à franchir la porte. A condition d'avoir son passe sanitaire, évidemment.

Vos premières impressions ? Je déteste faire des fiches. Le fait que je sois encore là est plutôt bon signe. Blague à part, c'est joli, c'est propre, c'est carré, c'est cosy même, et le lore est bien branlé ! J'aime aussi le côté low fantasy, n'étant pas particulièrement adepte des elfes, des fées, des vampires et de tous ces trucs de gonzesse, dit-il en contractant les muscles et en buvant de la bière, tel un homme viril et solide, un vrai de vrai, enfin, un beauf, quoi.

Des questions ou des suggestions ? On verra sur le tas :)

Souhaitez-vous avoir accès à la zone 18+ ? J'ignorais que Marbrume proposait un abonnement aux chaînes pour adulte, mais qui suis-je pour juger ? (oui, balancez !)



Dernière édition par Evrard de Sistre le Dim 31 Juil 2022 - 12:26, édité 14 fois
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Le GoupilContrebandier
Le Goupil



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MessageSujet: Re: Evrard de Sistre (en cours)   Evrard de Sistre (en cours) EmptyJeu 10 Fév 2022 - 14:31
Officiellement, bienvenue Chevalier Bougon !

Bon courage pour la suite de ta fiche - ma foi, déjà fort agréable Beau goss
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Desmond de Rochemont
Desmond de Rochemont



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MessageSujet: Re: Evrard de Sistre (en cours)   Evrard de Sistre (en cours) EmptyJeu 10 Fév 2022 - 18:35
Salut,

Bienvenu parmi nous et bon courage pour ta fiche.

A bientôt
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https://marbrume.forumactif.com/t5332-desmond-de-rochemont-carri
Mederich de CorburgComte
Mederich de Corburg



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MessageSujet: Re: Evrard de Sistre (en cours)   Evrard de Sistre (en cours) EmptyVen 11 Fév 2022 - 12:53
Il y a possibilité d'un date avec sa mère ?

La bienve ! Wink
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Victor de RougelacGouverneur de Sombrebois
Victor de Rougelac



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MessageSujet: Re: Evrard de Sistre (en cours)   Evrard de Sistre (en cours) EmptyVen 11 Fév 2022 - 14:13
La bienvenue.
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IsoldeQueen
Isolde



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MessageSujet: Re: Evrard de Sistre (en cours)   Evrard de Sistre (en cours) EmptyVen 11 Fév 2022 - 15:00
Bienvenue !

Quand tu veux, tu viens te ...confesser !

Et la bonne rédaction jeune Hurluberlu o7
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Théophile CastaingMilicien
Théophile Castaing



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MessageSujet: Re: Evrard de Sistre (en cours)   Evrard de Sistre (en cours) EmptyVen 11 Fév 2022 - 17:42
Bienvenue Evrard,

J'aime déjà ta plume, même du peu que j'en lis.

Puis-je ne jamais croiser tes poings InRP, mais juste la sagesse acquise au fil du temps (et je rejoins mon camarade, je veux bien rencontre la Mama !)

Bon courage pour la rédaction de ta fiche.
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InvitéInvité
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MessageSujet: Re: Evrard de Sistre (en cours)   Evrard de Sistre (en cours) EmptyMar 22 Fév 2022 - 18:29
Bienvenue ici !

Vivement la suite de cette fiche Wink
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Evrard de Sistre
Evrard de Sistre



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MessageSujet: Re: Evrard de Sistre (en cours)   Evrard de Sistre (en cours) EmptyLun 24 Avr 2023 - 13:41
Bonjour,

Serait-il possible de déplacer cette fiche dans la catégorie des fiches en cours, en vue de la finaliser promptement ? I love you

Grand merci par avance !

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Aliénor Montfort de BrieuComtesse
Aliénor Montfort de Brieu



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MessageSujet: Re: Evrard de Sistre (en cours)   Evrard de Sistre (en cours) EmptyLun 24 Avr 2023 - 13:54
ça fera un twix et 100 balles stp <3
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MessageSujet: Re: Evrard de Sistre (en cours)   Evrard de Sistre (en cours) Empty
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Evrard de Sistre (en cours)
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