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 ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜

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MessageSujet: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyVen 11 Mar 2022 - 12:56
Un Royaume à ma merci ft. @Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166


⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ Y0FyAY6

À la lueur d’une bougie, le Baron de Tourbière épluchait les innombrables lettres qui lui avaient été laissées en son absence : propositions d’alliances, requêtes diverses et variées… Le seigneur ne savait où donner de la tête. Il passait régulièrement le bout des doigts dans sa crinière, laissant échapper un soupir profond, plein de lassitude et d’agacement. Les mots, les phrases se mélangeaient dans son esprit, les paupières s’alourdissaient au fil des minutes. Au-dehors, hormis le fait que la nuit tombait peu à peu, de violentes bourrasques venaient frapper contre les murs de la bâtisse dans laquelle il logeait depuis quelques jours seulement, menaçant de les pourfendre à tout moment. Le signe de devanture de l’auberge quant à lui tournoyait infiniment, produisant un son irritant, rivalisant presque avec les crissements de la chaise rongée par l’humidité qu’il utilisait en ce moment même. Ayant finalement perdu toute concentration, il mit de côté cette tâche barbante, se leva pour venir s’approcher de l’unique fenêtre de sa chambre. Celle-ci donnait sur la rue des Hytres, et l’on pouvait constater le peu de présence humaine à cette heure-ci, seulement quelques silhouettes floues et dansantes qu’Aloys pouvait percevoir à travers les vitres maculées par la pluie.

Alors que ce dernier s’apprêtait à ôter ses vêtements pour ainsi s’installer confortablement dans ses draps, l’on frappa à sa porte à plusieurs reprises. Le Baron de Tourbière crut d’abord qu’il s’agissait de Brunehaut, sa fidèle domestique, mais les frappes lui semblaient bien trop disgracieuses à l’oreille. Il sortit par conséquent son épée de son fourreau, et tirant prestement le battant, il pointa sa lame vers l’ouverture, maintenant une certaine distance entre lui-même et l’individu.

« Monseigneur, il ne s’agit que de moi, Paulin. ».

Le prêtre de la famille Tourbière, trempé de la tête au pied, referma la porte derrière lui avant de retirer son capuchon. Aloys avait rangé les armes, étonné de la présence du garçon à une heure aussi tardive.

« Je ne voulais guère attirer l’attention, d’autant plus dans cet établissement public. ».

Le seigneur proposa au prêtre de s’asseoir, mais celui-ci refusa poliment.

« Je n’en ai pas pour longtemps, je dois retourner au temple. ».

« Un navire s’est écrasé non loin de la cité. Peut-être courrons-nous un très grave danger. », poursuivit Paulin, ce qui eut pour effet de piquer la curiosité du noble. « Les hommes du Roi sont venus au temple nous demander de l’aide. Un convoi partira dès les premières lueurs du jour au port de la cité. »

Sur ces dernières paroles, Aloys remercia le jouvanceau, et celui-ci se retira, prêt à affronter de nouveau les intempéries, du moins jusqu’au temple. Quant au seigneur, il prit la sage décision de s’en remettre aux bras de Morphée.
Le matin vint, et le noble de Tourbière quitta le lit pour rejoindre le groupe de miliciens et de prêtres qui s’étaient amassés au port marbrumien. Le ciel était désormais dégagé, laissant abattre les premières lueurs du soleil sur les quais encore humides. Paulin était déjà sur place, et les deux attendaient maintenant la permission d’embarquer sur le vaisseau qui les mèneraient à la plage, là où avait été vu pour la dernière fois le mystérieux navire.


PNJ d'Aloys:


Dernière édition par Aloys de Tourbière le Dim 4 Déc 2022 - 15:35, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyLun 14 Mar 2022 - 21:46
Gudrun ouvrit les yeux. On y voyait comme dans un four, le crépuscule était passé depuis bien longtemps. Les nuages cachaient le ciel étoilé, la préservant de la froideur de la nuit, mais pas de l'humidité qui imprégnait ses vêtements et s'infiltrait dans ses os, la laissant glacée et tremblante.

Elle sentait qu'elle était sur le sable froid et humide, sans aucun doute possible, le sel lui brûlait la gorge, et de grosses gouttes de pluie lui tombaient dans les yeux. Elle ne comprenait que trop bien pourquoi elle était là. La tempête. Le navire qui craque, qui penche, et surtout l'eau, de l'eau, et encore de l'eau. La miséricordieuse Anür l'avait ramenée sur le sable, mais pour combien de temps ? Ses membres raides et douloureux refusèrent de la soulever, et elle entama alors une lente et pénible reptation pour se hisser plus haut sur la plage, loin de la marée traître et des vagues mugissantes. Les vêtements froids collaient à sa peau. Et pourtant... La mer avait été leur refuge depuis la chute d'Allange en avril 1164. Toutes les choses avaient une fin, peut-être la sienne aurait-elle lieu ici ? Quel gâchis ce serait. Elle rampa à nouveau sur quelques toises, mais la fatigue finit par l'emporter, et le bruit du ressac, entêtant et hypnotique, la berça à nouveau dans un sommeil sans rêves.

Quand elle ouvrit à nouveau les yeux, la pluie avait presque cessé et les premières lueurs du jour apparaissaient. Elle avait toujours froid, avec ces vêtements humides. Elle avait de la chance d'avoir eu son manteau de laine par dessus, qui l'isolait quelque peu des éléments malgré son humidité. Les dieux avaient été cléments, et peut-être le seraient-ils encore si elle continuait à avancer. Alors elle tenta de se relever, seulement pour découvrir que sa jambe droite ne répondait plus. Elle roula sur le dos et bascula en position assise, s'inspecta, luttant contre une panique sourde. Rien de grave... A part cette maudite jambe, qui commençait à lui faire un mal de chien depuis qu'elle avait remué. Et ces vêtements humides...

Elle releva les yeux pour observer son environnement, et surtout, chercher quelque chose auquel s'accrocher pour se relever. Il y avait des corps partout. Vivants, ou morts ? Cela importait peu si elle n'arrivait à se relever. On apercevait la carcasse du navire, ou du moins ce qu'il en restait, éventré sur les rochers qui sortaient de la falaise, des lambeaux de voile battant encore au vent. Se relever, oui, pour aider, mais pour aller où ? La plage semblait difficile d'accès, et s'il leur fallait escalader cette paroi déchiquetée... Plusieurs de ses compagnons étaient debout, tous occupés à d'autres choses, près des corps, près de la falaise. Elle préférait ne pas y penser, et se mit donc en quête de matériaux pour se fabriquer une attelle de fortune. Quand ils auraient trouvé un chemin, elle serait prête à les suivre.
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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptySam 26 Mar 2022 - 22:12
Aloys et son compagnon de prières embarquèrent sur l'un des navires encore amarrés au port. Le plancher du vaisseau craquait sous les pas des hommes se précipitant à bord, comme si celui-ci menaçait de s'effondrer sous le poids de la masse humaine. L'on pouvait se demander par quel miracle le bateau parvenait-il encore à flotter.

Quoi qu'il en fût, ce constat n'était guère rassurant pour le seigneur, dont l'éducation omit la natation. À vrai dire, les marécages du Duché s'avérant peu profonds, il avait été jugé que le jeune héritier n‘avait aucunement besoin de cette discipline durant son enfance. Il fut raconté que certaines âmes malheureuses avaient trouvé la mort dans les marécages, piégés par la vase. Toutefois, l’on préconisa la prudence à l’apprentissage de la nage.

Les deux garçons se frayèrent un chemin au travers des miliciens, en direction la proue, de manière à être les premiers spectateurs du rivage lorsqu’ils arriveraient sur le littoral. Au loin, l’on pouvait d’ores-et-déjà apercevoir l’épave du navire étranger, planté sur un rocher saillant à flanc de falaise.

Les miliciens bavardaient, spéculaient entre eux sur la découverte imminente. D’autres parlaient de pirates, mais cette théorie ne faisait l’unanimité, car certains affirmaient ne pas reconnaître ce modèle de navire. Aloys évita de tirer des conclusions hâtives, car il n’avait jamais vu de pirates auparavant, et ne connaissait rien à l’architecture navale.

Plus le navire marbrumien se rapprocha de la zone d’incident, se frayant un chemin parmi les cadavres flottant, plus l’équipage se tut, laissant place au suspens le plus total. Aloys crut distinguer parmi les corps des femmes et des enfants, mais il lui était impossible de savoir avec certitude. L’eau salée avait gonflé les macchabées et à la vue de ces horreurs, les trippes du jeune Paulin dégobillèrent par-dessus bord, sous le silence des hommes tendus.

De nouveau les pieds sur la terre ferme, le seigneur de Tourbière poussa un soupir de soulagement. Le groupe se dispersa sur la plage, chassant les goélands qui festoyaient sur les malheureuses dépouilles. À quelques pas de là, l’un des miliciens vint porter secours à un jeune homme qui secouait le corps inanimé de l’un de ses semblables. Il dit s’appeler Douze, s’adressant à son sauveteur par le titre de Maître. Tous furent surpris par cet échange, et l’on sollicita une prêtresse pour s’occuper du garçon.

- « Un esclave ? », laissa échapper Aloys, préoccupé par la scène qui venait de se dérouler devant ses yeux.

Les lois Royales avaient interdit l'esclavage depuis fort bien longtemps dans le Duché, laissant plutôt place au servage. Le Baron se doutait bien que cette pratique illégale s’exerçait de manière dissimulée, mais il n’y avait jamais été confronté, du moins pas depuis que l’épidémie foula cette terre.

- « Depuis quand les pirates ont-ils des esclaves ? », s’interrogea Paulin.

Le prêtre examinait les carcasses, les retournant sur leurs dos du bout d’un bâton de bois, sous l’œil attentif de son seigneur. Ce dernier ne put s’empêcher de constater une certaine diversité parmi les naufragés. Il y avait non seulement des hommes, mais aussi des enfants, des femmes et des vieux. Certains semblaient plus fortunés, au vu de leurs accoutrements et de leurs parures, malgré leur lamentable état de santé.

- « Ce ne sont pas des pirates. », déduisit Aloys. « Ou alors, ils ne sont pas comme je l’avais imaginé. »

Peut-être avaient-ils affaire à des marchands d’esclaves ? Mais d’où venaient-ils ? Le Baron de Tourbière scrutait l’horizon. D’autres navires venaient d’être dépêchés sur place depuis la cité et arriveraient dans quelques minutes. Le Bailli Henri d’Orsay et le Capitaine de la milice extérieure devaient certainement se trouver à bord de l’un d’entre eux. Il se demandait quelle posture allait être adoptée face à ces naufragés qui ne semblaient pas représenter une réelle menace.

Aloys désirait en apprendre plus sur les inconnus, mais redoutait manquer l’arrivée du Bailli. Il demanda alors à Paulin de rester près de la zone de débarquement pour lui rapporter les directives lorsque celles-ci seraient données. Puis, il se mit donc à descendre le long de la plage, à la recherche d’autres survivants, espérant tirer la situation au clair le plus rapidement possible.
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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyVen 1 Avr 2022 - 20:48
Oui, en vérité, chacun se débrouillait comme il pouvait. Sa recherche d'un morceau de bois commencée quelques instants plus tôt était douloureusement infructueuse : traîner une jambe inutile derrière soi alors qu'elle était si fatiguée... Elle aurait voulu se coucher au sol, et tout doucement, sombrer à nouveau dans une douce béatitude. S'il n'y avait eu que la douleur physique : mais il fallait aussi contourner les corps de ceux qu'hier elle appelait encore ses compatriotes ; dont elle avait entendu les confessions plusieurs fois pendant ces deux années, leurs peurs, leurs espoirs. Et puis, ils étaient là maintenant, étendus sur le sol, le corps parfois gonflés, les traits livides, les vêtements déchiquetés. Elle se raccrochait désespérément à l'idée que tout ça faisait partie du plan des dieux, qu'il s'agissait de sacrifices douloureux, mais utiles, d'une stratégie qui déboucherait sur un avenir heureux, d'une tactique qui la dépassait trop pour qu'elle puisse la comprendre.

Elle s'arrêta un instant, assise, se tournant vers la mer pour essayer d'éviter la vue de tous ces corps. Et là.. Là, à l'autre bout de la plage, en train de jeter l'ancre, elle vit un navire, qui avait contourné la falaise. Un navire ! Et donc... Des hommes en vie ! Une ville habitée ! Les dieux avaient entendu leurs prières. Une larme solitaire coula rapidement sur sa joue droite, picotant à peine une plaie déjà asséchée par l'eau de mer. Ce cauchemar allait prendre fin, au bout du compte. De petites embarcations se dirigeaient déjà vers la plage, vers eux. Un soulagement indicible l'envahit. Le navire était d'une forme inhabituelle, mais pas inconnue. Il en passait tellement dans le port d'Allange, à l'époque... Déjà, elle apercevait de petites silhouettes s'agiter sur la plage, aller accueillir les arrivants. Ils ne semblaient pas hostiles, mais elle s'y attendait : les dieux ne les auraient pas fait survivre à un naufrage pour les envoyer dans les bras de pirates ou de gens malhonnêtes, n'est-ce pas ?
Fiévreuse d'enthousiasme, toute idée d'attelle oubliée, oubliant son aspect misérable qui l'aurait tant dérangée autrefois, elle entreprit de se diriger, cahin, caha, rampant plutôt que marchant, vers ces étrangers, leur seule planche de salut.

L'un d'entre eux s'était détaché du groupe d'arrivants et semblait explorer la plage plus avant, tandis que les autres semblaient s'entretenir avec quelqu'un. Elle avait bien du mal à voir qui cela pouvait être à cette distance. Elle aurait aimé savoir qui était vivant, et qui était mort dans cette catastrophe, mais là, tout de suite, il lui semblait plus important de convaincre ces gens de les aider, alors elle continua à avancer, essayant de faire un geste de la main à l'inconnu qui descendait la plage.
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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyLun 18 Avr 2022 - 15:14
Les corps étaient tout aussi nombreux là où le Baron de Tourbière avait décidé de s'aventurer. Ce dernier était à l'affût du moindre mouvement, d'un quelconque signe de vie de la part des naufragés. Malheureusement, la mer avait fauché les âmes de la majorité d'entre eux, ne laissant que des enveloppes vides couchées sur le sable ou bercées par les vagues. Les défunts, évidemment moins vaseux et verdâtre, ressemblaient à ceux retrouvés dans les marécages.

Aloys se souvint du jour où il vit un noyé pour la première fois. Il n'était encore qu'un mioche à l'époque, un insignifiant bâtard inconnu au bataillon, qui avait encore la liberté de jouer avec les autres enfants du village. Un jour, lors d'une anodine partie de cache-cache, le fils du boucher se volatilisa. Les lodnésiens partirent à sa recherche le jour-même, en vain, revenant bredouilles à la tombée de la nuit.

Ce ne fut qu'au bout d'une semaine que l'on appris le sort du garçon, lorsque des cueilleurs ramenèrent la dépouille à Lods. Quand il fut annoncé que leur camarade de jeu eut été retrouvé, la bande ne s'attendait pas à être témoin d'une scène aussi glauque. Le méconnaissable malheureux n'était plus que l'ombre de lui-même et jamais Aloys n'aurait deviné qu'il s'agissait de son ami si l'on ne lui avait pas annoncé. Ce visage rongé par les eaux hanta une bonne partie des nuits de sa jeune enfance.

Le jeune noble progressait dans son exploration, la main sur le pommeau de son épée par précaution. Il prenait ses distances avec les cadavres gisant au sol, craignant se faire agripper à tout moment. Il se contentait de zyeuter les naufragés sans même regarder plus loin. Plus il s'éloignait du groupe initial, plus remettait en question sa décision. Que faire, si les macchabés venaient soudainement à se relever pour se ruer sur lui ? Il ne savait guère nager, et le sable le ralentirait dans sa fuite. Il était certain que ces créatures à l'endurance sans faille ne ferait qu'une bouchée de lui.

Faisant plutôt attention à ses pas, ce n'est que très tardivement qu'Aloys remarqua la présence d'un individu en activité à quelques mètres de sa position. C'était une femme, à même le sol, lui faisant un geste de la main, réclamant visiblement de l'aide. Pour le Baron, il était bien trop tard pour rebrousser le chemin. Rien n'indiquait qu'il s'agissait d'un piège, mais il préféra rester sur ses gardes, prêt à se fier à son intuition dans le pire des scénarios. Et si ce n'était guère une ruse, il n'avait pas l'intention de prendre ses jambes à son cou, et de se faire passer pour un lâche.

Quand il fut à une distance raisonnable, le Tourbien dégaina son arc, ainsi qu'une flèche de son carquois, démontrant explicitement sa défiance à l'égard de l'inconnue qui rampait en sa direction. Il ne pointa pas son arme vers la naufragée, mais cela suffisait amplement pour lui faire comprendre la gravité de sa situation.

- « Halte. », ordonna t-il, ignorant si son interlocutrice comprendrait son langage. « Qui êtes-vous ? Pourquoi Anür vous a-t-elle envoyé sur ces Terres ? ».


Dernière édition par Aloys de Tourbière le Jeu 30 Juin 2022 - 20:21, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyMer 27 Avr 2022 - 17:52
L'homme qu'elle avait hélé la vit, mais contrairement à ce qu'elle attendait, ou aurait souhaité, celui-ci ne s'avança que prudemment, sortant son arme. Maintenant qu'il était plus proche, elle pouvait voir qu'il était bien habillé et, si son élocution souffrait d'un léger accent, il y avait quelque chose de distingué dans sa voix, ainsi que le ton de quelqu'un qui n'avait pas l'habitude qu'on lui désobéisse.

Gudrun arrêta d'avancer, indécise sur la réponse à faire. Elle voulut entamer une phrase, mais elle ne laissa échapper qu'un croassement rauque. Elle s'éclaircit la gorge et répondit d'une voix aussi forte et claire que possible :

- Il serait bien présomptueux de ma part de prétendre savoir si Anür nous a envoyés ici, si elle nous a punis ou sauvés, et encore moins pourquoi. Nous...

Elle eut un moment d'hésitation, se demandant à qui elle faisait encore référence par un « nous ». Depuis trois ans, trois longues années, elle avait eu le temps de connaître chaque visage et chaque nom. Elle s'entendait bien avec certains, moins avec d'autres, mais tous les visages bleuis et boursouflés qu'elle avait croisés pour le moment, elle avait eu beau essayer de les ignorer, les images d'eux en vie lui revenaient inlassablement, untel souriant, l'autre grimpant aux cordages, cet autre encore qui sortait à peine de l'enfance, et cette femme qui avait survécu à une fausse couche la première année...

Une chape de plomb s'abattit à nouveau sur ses épaules, et le froid la saisit à nouveau plus brutalement, sans compter cette humidité omniprésente, encore, toujours, partout, charriée par les embruns marins, remontant du sable humide, traversant les vêtements détrempés. Elle grelotta, et répondit d'une voix désormais plus morne et plus plate.

- Nous venons du royaume de Langres, Messire. Duché d'Hendoire. Nous avons fui les abominations, les morts devenus fous et qui se relèvent pour emporter les vivants dans la tombe. Allange est tombée...

Elle se tut un instant, se demandant si son interlocuteur connaissait ce duché et cette ville, dont les noms étaient si familiers à ses oreilles.

- Mais où sommes-nous ? La tempête a été rude, et je ne sais sur quelle côté nous avons atterri. Quoi qu'il en soit, je suis heureuse de voir qu'il reste des êtres vivants sur cette terre.

Joie fugace, sans doute, petite lueur d'espoir assombrie par cette catastrophe qu'était le naufrage, bonheur animal d'être encore en vie quand tant d'autres avaient péri : dans cette situation, n'importe quelle main secourable était digne de s'y accrocher.
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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyJeu 30 Juin 2022 - 20:23
La chose ― l'individu qui lui faisait face était bel et bien humain et non animal. Doté d'assez d'intelligence pour s'exprimer et comprendre le sens de la question qui lui fut adressée, la femelle à l'apparence inoffensive répondit vraisemblablement avec aisance. Elle semblait connaître Anür, la grande déesse des passages. Était-il possible qu'elle fût familière avec les Trois ? Ses propos prirent sens quand elle affirma être originaire du Royaume des Langres, plus précisément du duché d'Hendoire dont Aloys ne connaissait l'existence. Allange non plus, ne lui disait rien. Était-ce leur capitale ? Ses connaissances en géographie étaient limitées, n'ayant jamais quitté les terres du Morguestanc. Toute sa vie se trouvait ici, son héritage - sa destinée. Les aïeux Tourbière avaient contribué à la prospérité de l'ex-duché et s'étaient vu attribuer une forteresse à la frontière sud. Cette reconnaissance incombait de grandes responsabilités à la lignée, l'ancrant dans les profondeurs des marécages de l'Obliance à jamais.

- "Hendoire... ?", souffla t-il d'un ton interrogateur.

Comme le Tourbien n'eut jamais entendu le nom d'une telle ville, il ne put s'empêcher d'exprimer spontanément sa curiosité face à cette nouveauté. Il eut pourtant à l'origine l'intention de cacher sa méconnaissance du monde extérieur, ou tout autre signe de faiblesse. Les instructions du Bailli d'Orsay, vis-à-vis du destin qui serait réservé à ces individus, ne lui avaient pas encore été rapportées, ce qui limitait son champ d'action à l'instant présent. Il décida donc d'agir instinctivement, décidant de coopérer avec la misérable qui s'était échouée sur cette plage. Elle semblait lui dire la vérité, et dans la situation désespérée dans laquelle les siens se trouvaient, Aloys ne voyait l'intérêt de recourir à quelconque ruse. Il ne percevait d'ailleurs point de malice chez son interlocutrice.

Rangeant l'arc et la flèche pour laisser place à une courte épée, il fouillait, retournait les corps jonchant autour de la vulnérable femme pour s'assurer qu'il ne tournerait pas le dos à un potentiel ennemi.

- "Sur les côtes du Morguestanc, un duché faisant anciennement partie du Royaume des Langres.", dit-il, préoccupé à examiner les épaves humaines.

Une fois la zone jugée sûre, il rangea son arme, puis s'approcha de la blessée, s'agenouillant auprès d'elle.

- "Vous êtes en sécurité, pour le moment." assura t-il, voulant se montrer rassurant auprès de la naufragée, sans doute toujours sous le choc. Il détacha la cape sombre sur ses épaules. Celle-ci arborait une forteresse et des quenouilles. "Nous pensions le reste du Royaume perdu.", poursuivit-il, couvrant les épaules de son interlocutrice. "Je suis le Baron Aloys de Tourbière, au service du Roi auto-proclamé Sigfroi de Sylvrur."

Au loin, le Bailli d'Orsay et ses hommes venaient d'accoster depuis un bon moment. Une figure au loin, Paulin, reconnaissable par sa petite taille, se frayait un passage à travers les corps pour rejoindre son seigneur. Il n'était plus très loin. Aloys se demandait quels seraient les ordres, mais de là où il se tenait, il ne perçut aucune effusion de sang et n'avait entendu aucun cri de guerre.

- "Gente dame, quel est votre nom ? Qui êtes-vous ?", prononça t-il. "Pouvez-vous marcher ? Non, attendez... Laissez-moi vous aider." Le noble tendit les bras, dans l'intention de porter la ténébreuse dans ses bras.


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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptySam 23 Juil 2022 - 17:24
Bientôt, il troquait son arc contre une épée, semblant plus préoccupé par les corps autour d'eux que par elle. Elle garda le silence, car elle avait déjà trop parlé, observant cet inconnu en attendant sa décision. Malgré son jeune âge, il dissimulait bien ses pensées. Et pourtant, ses actions et sa langue le trahissaient. Il était inquiet, mais pourquoi ? Que pouvaient bien lui faire des naufragés mal en point et des cadavres gonflés ? Sa jambe ne la portait plus, elle finit par s'asseoir. S'il fallait attendre, ainsi soit-il.

- Hendoire, oui. Nous sommes donc sujets du même royaume... Ou du moins ce qu'il en reste. Du même roi, peut-être. Je ne sais plus rien de ce monde.

Elle avait noté qu'il n'avait pas démenti au sujet des morts. Le Royaume perdu... Ainsi donc, le cauchemar continuait. Elle retint une grimace amère : la sécurité n'était plus qu'une douce illusion désormais.

- Le Morguestanc... Je connais ce nom. C'est un duché qui nous approvisionnait en bons vins. Plutôt bons. Mais c'était avant. Je ne sais si le reste du Royaume est perdu, mais pour ce qui est d'Allange et du duché d'Hendoire, je n'ai pas de bonnes nouvelles à en apporter... Je... serais heureuse de vous apporter plus d'informations, mais pas ici et maintenant Messire.

Le temps ne guérissait pas toutes les blessures, et ce n'était certes pas sur une plage en grelottant qu'elle lui conterait cette odyssée.
Il arrêta enfin son examen macabre, et s'approcha d'elle, glissant sa cape avec galanterie sur ses épaules. Après tout, même s'il était un étranger comme le dénotaient son accent et son teint hâlé, il restait d'une politesse fort plaisante.

- Sœur Gudrun Mercier, Messire. Les dieux vous bénissent.

Oui, vraiment. Elle saisit le bras tendu pour s'y accrocher, se redressant. Elle remarqua à peine le deuxième bras tendu lui aussi, n'en comprenant pas l'intérêt : elle n'avait pas besoin qu'on lui caresse le dos pour se relever.

Un autre homme arrivait déjà, se dirigeant vers eux. Celui-ci avait un teint moins exotique, presque maladif. Il portait une robe. Un prêtre peut-être. Elle voyait là une chance de salut supplémentaire qui se présentait à elle, comme si le Temple l'avait enfin retrouvée ; elle se voyait déjà réintégrer son foyer de cœur, cette grande effervescence pieuse et ordonnée au milieu du chaos du monde, comme une récompense après ces deux années de sacrifices et de malheur. Reconnaissante au jeune baron de lui fournir un appui, elle n'en détourna pas moins son attention vers le nouvel arrivant et inclina légèrement la tête pour le saluer.

- Bonjour mon Frère. Vous êtes donc venus nous porter secours ?

Si le ton n'était pas suppliant l'intention y était bien. L'espérance l'envahissait sournoisement sans qu'elle ne puisse rien y faire. Les espoirs déçus de chacune des escales qu'ils avaient faites auraient pourtant dû décourager son esprit, mais à chaque fois, le désir d'y croire l'emportait sur la lucidité qui aurait dû être nécessaire. Elle se tourna à nouveau vers le baron.

- Nous sommes-nous échoués sur vos terres, baron ? Comment... Enfin... Je vous vois nombreux et vaillants, vous avez donc trouvé un moyen de combattre les morts qui marchent ?

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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyDim 4 Déc 2022 - 15:27
Par le passé, il était fort probable que les deux individus eurent été au service du même Roi. À ce jour, ce ne fut plus le cas puisque l’épidémie avait redistribué les cartes en faveur de l’ex-duc. Ce n’était pas là, une critique, car Aloys n’imaginait nulle autre personne à la tête du nouveau Royaume que le légitime Sigfroi de Sylvrur. Les choses eurent été difficile pour tous, notamment pour les plus modestes et les misérables, mais ce fut le prix à payer pour la survie de l’humanité. Marbrume tenait encore, et l’on se battait pour reconquérir l’ensemble du duché. Le labret était par ailleurs symbole d’espoir, la preuve que le peuple du Morguestanc n’avait abdiqué face à ces abominations. Alors, quoi que l’on puisse en dire, la stratégie du récent Roi avait porté ses fruits. Si ce dernier le permettait, ces nouveaux arrivants plieraient le genou et le serviraient à leur tour.

Aloys acquiesça à l’écoute des propos de la jeune femme. Les siens avaient peut-être perdu la guerre, mais à son insu pour le moment, la bataille continuait jusque dans ces terres. Le père du baron, le seigneur Herbert de Tourbière, de son vivant, lui avait enseigné que l’on pouvait toujours tirer des leçons de ses échecs. Ce conseil s’appliquait à tout domaine, tout art, dont celui de la lutte armée. Aloys se demandait alors quels renseignements les vaincus allaient-ils pouvoir leur apporter. Toutefois, la femme grelottante marqua un point, ce n’était ni le moment ni l’endroit pour discuter de ces choses-là

La dame au drôle de nom absolument étranger, Gudrun Mercier, semblait pouvoir tenir debout sans devoir être portée au grand soulagement du Baron. Quant à Paulin, celui-ci venait à peine de les rejoindre, haletant, penché en avant comme pour reprendre sa respiration. Il espérait ne plus jamais devoir courir sur le sable à l’avenir. Il releva le visage, répondant d’une voix saccadée à l’inconnue qui venait de lui adresser la parole.

- « Non... Bien sûr que non… J’ai fait tout ce chemin pour vous laisser moisir dans le sable. ».

Aloys fronça les sourcils face au sarcasme de son jeune compagnon. « Assez, Paulin. Frère Paulin, sœur Gudrun. Sœur Gudrun, frère Paulin… », dit-il d’un ton sec. Il n’était pas particulièrement choqué par l’attitude parfois inconsidérée, à laquelle il s’était habitué au fil des années, mais il se doutait bien que son insolence pouvait porter préjudice à lui et au Temple. Peu importe le nombre de fois que le Tourbien reprenait l’adolescent, ce dernier n’en faisait qu’à sa tête, comme si ce culot était profondément ancré dans sa nature. Heureusement pour le garçon, il avait la protection de son ami, sans compter de celle du Temple, car sans cela, il serait déjà six pieds sous terre, une hache enfoncée dans l’os frontal. « Ah. », lâcha-t-il, à la découverte qu’il venait de s’adresser à une homologue.

- « Ahem… J’aurais aimé que cela soit le cas… », enchaîna le Tourbien concernant la dernière question de Gudrun, et comme pour faire passer l’embarras, face baissée. S’ils avaient été nombreux et vaillants, il n’aurait pas perdu ses terres. « Nous sommes sur celles de sa majesté le Roi Sigfroi de Sylvrur, non loin de Marbrume, le dernier bastion de l’humanité. ». Son visage s’illumina de nouveau. « Toutefois, nous avons trouvé un moyen de combattre ces choses… comme le sel. Et nous avons réussi à sécuriser, plus ou moins, certaines terres du duch-- Royaume, comme le labret. Je serai ravi d’en discuter avec vous, mais peut-être devrions-nous mettre à l’abri. ». Le Baron jeta un regard sévère à Paulin et celui-ci s’exécuta.

- « Le Bailli Henri d’Orsay a ordonné de conduire les survivants au Temple pour y être soignés… Ils rencontreront ensuite sa Majesté Sigfroi, qui semble bien vouloir les accueillir. ». Le prêtre haussa les épaules, « comme si nous n’avions déjà pas assez de… ».

- « Ce sera tout. », coupa Aloys. « Viens donc m’aider. ». Le Baron laissa le petit Paulin servir d’appui à Gudrun, en espérant que l’effort le fasse taire. Ils se mirent donc tout doucement à rebrousser le chemin vers les chariots.

- « Par les trois… Vous pesez une tonne ! Pourtant, vous n’avez pas de chaînes… », se plaignit Paulin. « Le Bailli a annoncé que les serviteurs seraient affranchis avant d’entrer en ville. Un certain Ullfric Sombardier n’avait pas l’air ravi. Vous le connaissez ? ».

Aloys écoutait d'une oreille, toujours attentif à son environnement. Néanmoins la remarque faite par son compagnon sur l'existence de serviteurs captura si bien son attention qu'il se mit à contempler Gudrun.
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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptySam 11 Fév 2023 - 22:18
- Le Roi Sigfroi de Sylvrur... ? Voilà un nom qu'elle n'avait jamais entendu auparavant.

Elle acquiesça sagement à l'injonction du baron et se mit en marche.

Le jeune prêtre faisait preuve d'une impertinence marquée. Soeur Gudrun grimaça devant un tel manque de savoir-vivre : il semblait que le duché sur les côtes duquel ils avaient fait naufrage n'était pas des plus civilisés.

- Affranchis, oui, oui, pourquoi pas, après tout..., commenta-t-elle, distraite, en se concentrant sur ses pas. Ulfric... C'est un notable comme un autre. Après un tel périple, vous savez... Les titres et la hiérarchie ne veulent plus dire grand'chose.

La fatigue, la douleur, le froid : autant de vagues qui érodaient les grains de sa patience. Elle finit par foudroyer du regard le-dit Paulin et poursuivit sèchement :

- Voulez-vous réellement deviser de la place de chacun d'entre nous dans la hiérarchie ? Voulez-vous son pedigree ? Le mien peut-être ? Combien chacun d'entre nous possède-t-il d'esclaves ? D'or ? D'influ...

Elle s'interrompit brusquement. Là, derrière Paulin qu'elle fixait depuis un instant, au pied des rochers qui bordaient la falaise, on pouvait apercevoir une petite forme drapée d'un drap de laine rouge. De longues mèches dorées qu'elle connaissait bien s'échappaient du tissu. Un soldat agenouillé à côté tendait la main, comme pour la réveiller. Rapidement, il se remit debout, saisit la hache qui pendait à sa ceinture, et, la souleva à deux mains. Le cœur de Gudrun faillit chavirer lorsqu'elle comprit qu'il s'apprêtait à décapiter ce petit corps sans vie, quand soudain, la forme sembla frémir. L'homme se figea dans son mouvement, fit un pas en arrière, les bras toujours levés au dessus de la tête, les yeux écarquillés.

- Non, non, non... La mer! fit Gudrun en essayant d'entraîner le jeune Paulin vers les vagues qui grondaient toujours derrière eux.
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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyLun 13 Fév 2023 - 0:56
- « Exact. Notre précédent Roi a perdu la vie en tentant le tout pour le tout pour arrêter cette menace. », expliqua le Baron, toujours aussi distrait par les environs. Au loin, les hommes s’étaient dispersés sur la plage, lames à portée de main, à la recherche de survivants ou de cervicales à trancher. « Il y a quelques mois de cela, l’ancien Duc a été sacré Roi. ».

- « Vous n’saviez pas pour l’ancien Roi ? Vous êtes vraiment à la ramasse… Stricto et lato sensu. », se permit de commenter Paulin, déjà à bout de souffle. « On peut dire qu’son plan est tombé à l’eau. ». Ses côtes menaçaient de céder, suite à cette blague de mauvais goût. « Comme vous. », rajouta-t-il avec lourdeur, fier et par crainte d’être incompris.

Le tourbien, à l’avant du groupe, profita de son avance pour palper quelques pouls et de trancher les têtes si besoin. Il fallait dire que sa courte épée de rendait pas la tâche aisée. Cous, gorges… le jeune noble s’acharnait en agitant les bras de haut en bas avec vigueur. Diverses substances, pourpres et bleuâtres éclaboussaient son fin visage marqué par l’effort. Il clignait de temps en temps les yeux, gêné par les corps étrangers. Il fit une brève pause, se servant de sa manche pour essuyer sa figure. Il n’avait point entendu la conversion entre les deux individus, pleinement absorbé par sa mission, mais le petit prêtre ne semblait guère plaisanter à présent. Ce dernier marchait en silence, tout aussi concentré sur ses pas que la prénommée Sœur Gudrun.

- « Allons, allons, ma Sœur, pardonnez-moi. Je n’cherchais qu’à vous remonter le moral… », bredouilla-t-il. « Whoa ! ».

Aloys fut interpellé par les criaillements de la paire, la survivante semblait vouloir précipiter son homologue vers la mer.

- « Paulin ! », cria Aloys. Quelque chose avait fait fuir Gudrun, tel un animal effrayé. De quoi pouvait-il bien s’agir ? Il jeta un coup d’œil dans la direction opposée. Ce fut ainsi qu’il remarqua de l’activité au pied des rochers qui bordaient la falaise. Le guerrier, épée en main, se mit à accourir en direction de la scène, malgré les bottes s’enfonçant dans le sable à chacun de ses pas. « Retiens-la ! », ordonna-t-il, en lançant un dernier regard vers l’arrière.

L’adolescent se pencha en arrière, prenant appui sur le sable mouillé. Il tentait si bien que mal d’utiliser tout son poids pour retenir la prêtresse.

- « Gudrun ! Arrêtez voyons ! J’blaguais, j’blaguais ! Je suis trop jeune pour mourir ! Vous j’sais pas ! », s’exclama-t-il dans la panique.

Aloys quant à lui réalisa la gravité de la situation devant ses yeux. Un milicien balançait sa hache de tout côté pour tenter d’assener un coup à une créature plus petite que la moyenne. Un enfant ? L’homme brun et au teint terne ne semblait avoir aucune chance, car en raison de la lenteur de son arme lourde, il ne parvenait aucunement à toucher sa cible. Enfin, fâcheusement, la tête de son instrument vint tout à coup se bloquer dans le sable. Son adversaire en profita pour riposter, bondissant sur lui pour mordre de toutes ses forces au travers de sa jacque. Le milicien émit un grondement de douleur, alors que le Baron de Tourbière arriva sur les lieux bien que trop tardivement.

Ce dernier agrippa la créature par l’arrière du col et le dégagea de l’être humain à terre. « Lève-toi, et bats-toi ! », ordonna-t-il au blessé encore sonné. La petite bestiole, interrompue dans son festin, se mit à charger son nouvel agresseur. Adultes, enfants, ils n’étaient plus que l’ombre d’eux-mêmes… D’un pas habile sur le côté, Aloys esquiva de justesse la charge. Il en profita contre-attaquer d’un coup d’épée bien placé. Le sang gicla sur la roche, malgré tout, le monstre au flanc droit tailladé refusa de fléchir le genou. Cette dernière, impassible comme tous les autres, surprit le guerrier en revenant aussitôt à la charge. Sa mobilité, tant réduite par le terrain, il ne parvint cette fois-ci à éviter le coup. En position de défense, sa courte lame vola en éclat, et il fut projeté en arrière.

Alors que l’immondice se jeta finalement sur lui dans l’espoir de le dévorer au sol, le tourbien puisait dans ses dernières forces pour la repousser. Son regard était plongé dans celui de la bête, vide d’émotion. Il crut voir dans le reflet, lui-même pour la dernière fois, ses derniers instants dans ce monde cruel. Ce fut alors que le visage du monstre se scinda en deux, déversant un liquide nauséabond sur celui du noble. La hache du milicien rétablit, venait de fendre le crâne de la chose. Il poussa ensuite de sa botte le corps s’écrasant sur Aloys, pour retirer son arme.

- « Ce… Ce n’est pas trop tard. », dit le Baron de Tourbière, poussant de côté la carcasse. « Cela dit, merci pour le coup de main. ». Son regard se portait à présent sur la légère blessure abdominale du milicien. Celle-ci paraissait à peine visible. « Vous avez été mordu ? », l’interrogea-t-il ensuite, se redressant, toujours assit à terre. « Il faudra le signaler. ».

L’homme passa la main sur le trou de son gambison, les yeux grandement écarquillés.

- « Non, c’est impossible… Votre Honneur ! Ayez pitié, ne dites rien ! », supplia-t-il, les larmes aux yeux. « Vous ne savez pas comment les mordus sont traités, je ne pourrai espérer une vie normale après cela ! ».

- « La loi est la loi », répondit impassiblement Aloys, qui s’apprêtait à se relever. Du coin de l’œil, il vit le milicien soulever sa hache. Bon sang ! Le noble, dans un réflexe éclair, empoigna le sable pour l’envoyer avec force au visage de son interlocuteur. Aveuglé, ce dernier lâcha son arme et fut projeté au sol par le Baron. Ses mains gantées trouvèrent leur chemin vers le cou de l’individu, qu’il pressa désormais de toutes ses forces. Quand les gémissements de celui-ci cessèrent, les yeux du tourbien rencontrèrent la hache à proximité. Il réussit à aller chercher assez d’énergie en lui pour récupérer l’arme et décapiter d'un coup puissant le défunt sans tarder davantage, avant de retomber sur ses genoux, le souffle coupé.


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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyDim 19 Fév 2023 - 21:21
L'ancien Duc sacré Roi... Le duché du Morguestanc était donc bien isolé des autres, pour qu'une telle nouvelle n'ait pu se répandre. Ils avaient donc fui, traversé les mers, enduré toutes ces pertes, pour arriver... ici ?

Tandis que le jeune impertinent qui lui servait d'appui continuait à déblatérer, le baron devant eux s'acquittait d'une tâche des plus déplaisantes, apparemment sans sourciller. Il fallait un sens du devoir fort développé pour charcuter ainsi ceux qui avaient été ses semblables quelques heures auparavant. Un sentiment de sécurité commençait à envahir lentement la prêtresse, quand l'incident se produisit.

- Bougre d'âne ! Ne voyez-vous pas ce qui se passe ? Le domaine d'Anür est la seule chance des gens comme vous et moi, ne sachant pas manier les armes...

Le jeune prêtre la retenait fermement, et il fallait dire que dans son état, même cet être malingre suffisait à la retenir. Après quelques efforts vains, elle cessa ses tentatives de fuite pour focaliser son attention sur l'action qui se déroulait non loin, et se préparer au pire. Spectacle difficilement soutenable au demeurant. La créature, qui avait toujours les traits du petit garçon qu'il avait été, était désormais sur le baron, qui résistait allongé au sol. Gudrun se força à garder les yeux ouverts lorsque l'homme d'arme mit un terme au combat. D'un coup, la plage redevenait ce lieu calme et paisible, où les morts reposaient en paix. Voyant que le baron se redressait, elle fit quelques pas vers lui avec Paulin.

« Vous ne savez pas comment les mordus sont traités, je ne pourrai espérer une vie normale après cela ! »

Interdite, la prêtresse observa ensuite une succession d'actions trop rapide pour qu'elle ait le temps de l'analyser correctement. Bien vite, le soldat gisait au sol, la tête tranchée, et le baron retombait sur ses genoux.

- Votre Honneur ! Avez-vous été blessé ?

Impossible de le savoir, car le jeune homme était couvert de sang et d'immondices.

- Je suis... navrée. Je ne savais pas que ce garçon avait été contaminé. Quel sort est-il donc réservé à ces personnes mordues, pour que ce soldat ait préféré se retourner contre vous ?

Le cadavre décapité était tout proche. Mordu, ayant terminé sa vie dans le déshonneur, il faisait peu de doute que les marais du dieu corbeau l'attendaient davantage que le royaume d'Anür. Ainsi soit-il. Elle quitta cette contemplation morbide pour reposer le regard sur le baron. Il lui semblait que si elle ne pouvait quitter cette plage sans aide pour marcher, elle pouvait en revanche accorder son aide spirituelle. Elle posa la main sur l'épaule du baron.

- La loi est la loi. Vous avez bien agi. Peu importe à quel point tout cela est difficile, les dieux sauront récompenser ces efforts.
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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyDim 19 Fév 2023 - 23:23
L’odeur du sang encore frais remplissait l’air et s’insinuait dans les narines du Baron à genoux. Métallique, elle contrastait avec celle du cadavre enfantin déjà en décomposition et dont les tissus mous se désintégraient, lâchant des gaz nauséabonds. Putride, écœurante et marquée dans son esprit depuis son plus jeune âge, l’écœurante substance lui avait laissé une impression durable et difficile à oublier. Le jeune noble porta sa main souillée devant ses lèvres en guise de réflexe nauséeux. Jusqu’à présent, il eut fait de son mieux pour son concentrer sur son environnement, et non sur le mélange de gaz toxiques, de déchets organiques et de pourriture planant dans l’air. Ajouté à cela, le récent effort physique avait durement sollicité son système nerveux sympathique. Hors d’haleine, la voix de Gudrun fit arrêter les battements de son cœur pendant une brève seconde. Il fut surpris de voir surgir la prêtresse et Paulin à ses côtés. Il semblait que la femme, retenue par ce dernier, eut désormais récupéré son sang-froid.

- « Je… Je ne crois pas. », hésita-t-il, contemplant ses mains et son torse tous deux couverts d’une palette de rouge odorante.

Le jeune noble regardait les environs, encore troublé par ce qu’il venait de vivre. Plus que jamais à présent, il pouvait sentir cette odeur s’étant propagée si rapidement. Elle eut envahi les lieux, transformant le doux air de la mer en un souffle nauséabond.

- « Marquées au fer… », répondit-il, marquant de longues pauses entre ses fragiles mots. « Forcées à vivre en dehors de la cité, misérable ou milicien… ». Il empoigna le sable, filant entre ses doigts, « … Comme des sous-citoyens ».

La main de la prêtresse vint se poser sur son épaule, accompagnée de paroles rassurantes, qui eurent pour effet de faire sourire fébrilement le Baron de Tourbière. Les jambes, poignardées de crampes, incitèrent maintenant ce dernier à se relever. Aux nausées, s’ajoutèrent les vertiges, et l’homme s’aida ainsi de la main de son interlocutrice pour garder l’équilibre.

Hélas, une boule nauséabonde fit surface dans sa gorge et ne put être retenue plus longtemps. Aloys sentit ses muscles abdominaux se contracter et son diaphragme se soulever. Sa bouche s’ouvrit alors en grand, sous la grimace de Paulin, avant de libérer un flot bruyant et odorant en direction des pieds de la prêtresse. Contre son plein gré, le contenu de son estomac se déversa alors dans un vacarme assourdissant, créant ainsi un spectacle répugnant pour les sens. Le son de ses haut-le-cœur fut accompagné d’un écoulement liquide qui jaillit de sa bouche, révélant les morceaux d’aliments non digérés, en autres, le petit-déjeuner du Baron.

L’odeur atroce de ce qui eut été vomi sur Gudrun, rivalisait presque avec celle des cadavres décomposés et pourris. Les yeux du jeune noble larmoyaient, le visage crispé dans une grimace de douleur. Enfin, il eut terminé, lâchant un long soupir de soulagement.

Suite à cette expérience éprouvante et désagréable, le corps d’Aloys finit par se détendre, malgré l’odeur et le goût répugnant demeurant dans sa bouche, dans laquelle une sensation désagréable fut laissée.

- « … Pardon », s’excusa-t-il, s’essuyant la bouche de sa main gantée. « Je ne peux rester plus longtemps en ces lieux… Rejoignons les chariottes… ».

Au loin, le vent portait les bruits sourds et lugubres, comme des chuintements, cris ou gémissements. Ce lieu, déjà hanté par les esprits tourmentés et cherchant à attirer à tout prix l’attention des vivants, venait de puiser entièrement l’énergie du jeune homme.


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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyDim 5 Mar 2023 - 20:31
«  Marquées au fer… »

Ils devenaient ainsi du jour au lendemain semblables à des esclaves. Peut-être pire que l'esclavagisme, une condamnation à mort ? Elle n'avait pas assez d'informations pour tirer des conclusions. Nul doute que ces personnes n'étaient pas prêtes à assumer ce statut pour avoir perdu contre une de ces créatures maléfiques. Et pourtant, il en allait de l'intérêt général semblait-il. Elle troquait donc un enfer contre un autre en arrivant ici. Mais... Ce qui lui importait pour l'instant était surtout de quitter cette plage maudite.

Le jeune homme devait être secoué par l'incident, car il se mit à tanguer une fois relevé. Il tenta de s'accrocher à sa main, et elle s'accrocha à Paulin au cas où il perdrait franchement l'équilibre... Un spasme plus tard, le problème n'était plus la chute, mais surtout la mare immonde et écoeurante qui maculait le bas de sa robe.

Son air soulagé et vaguement gêné, et cette odeur, pourtant issue d'un être vivant, qui rivalisait avec celle des morts... Toute cette absurdité finit par la submerger d'un coup, et la prêtresse se mit à rire, un grand éclat de rire qui s'éleva, clair et haut, pour redescendre aussitôt en un unique sanglot. Les larmes aux yeux et les lèvres pincées, elle hocha simplement la tête.

Elle reprit appui sur le bras de Paulin pour la fin du trajet. S'il fit la grimace au sujet de l'odeur, elle n'en tint nullement compte. Une fois que l'agitation due à l'attaque se fut diluée dans ses veines, une léthargie l'envahit. Le froid s'infiltrait toujours jusqu'à ses os, sa jambe droite ne la portait plus. Dès qu'elle fut assise dans une de ces charettes où régnait un semblant de sécurité, la fatigue l'emporte au pays des songes.
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MessageSujet: Re: ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜   ⚜ Un Royaume à ma merci ft. Gudrun Mercier - 14-15 Septembre 1166 ⚜ EmptyDim 12 Mar 2023 - 17:49
Comme un coup de tonnerre dans un ciel bleu, l’absurdité frappa avec surprise et sans alternative, la prêtresse d’Hendoire qui se mit à éclater de rire. La réalité avait basculé et le monde avait perdu tout son sens depuis fort longtemps. Tout cela dépassait la raison, l’essence même de l’existence. Ce rire de Gudrun, était-il une libération, une échappatoire à la folie de l’absurdité ? Venait-elle finalement d’accepter l’inacceptable ? Embrassait-elle le chaos et la confusion ? Ce fut comme si la réaction physiologique du Baron de Tourbière, lui eut apporté ce bref sentiment de normalité, depuis longtemps perdu. Puis enfin, le rire contagieux se transforma en un unique sanglot, tel une fissure dans le silence, un écho solitaire résonnant dans l’obscurité. Le fébrile sourire sur les lèvres d’Aloys mourut avec, à l’approche de la douleur, la tristesse, la solitude et le désespoir. Elle, qui espérait le réconfort et la rassurance sur ces terres, était possiblement à la recherche d’un sentiment de contrôle et de stabilité dans ce monde qui n’avait cessé d’être si chaotique depuis le Fléau.

Les trois individus marchaient en silence vers les charrettes, l’âme enveloppée dans un voile d’obscurité. Le sable ne faisait aucun bruit sous leurs pas, seuls les hommes criaient sur la plage, leurs voix étouffées par le bruit des vagues. L’on fit monter Gudrun en premier, puis le Seigneur adressa quelques mots à son acolyte, une main posée sur son épaule.

- « Paulin, tu as ma profonde gratitude. Ces pauvres âmes ont besoin de personnes comme toi en ces temps tumultueux, continue donc à leur venir en aide. »

L’adolescent voulut protester, sans aucun doute pour s’extraire de l’endroit et des tâches qui lui furent incombées, mais le Baron de Tourbière lui coupa l’herbe sous le pied d’une tape à l’épaule.

- « Va, à présent. Je compte sur toi. »

Assit dans le véhicule de bois, Aloys regardait Gudrun succomber au sommeil à ses côtés. Elle semblait désormais perdue dans un monde de rêves, le corps affaissé et les paupières lourdes. Ses mains reposaient mollement sur ses genoux, et sous le regard inquiet du jeune homme, sa tête s’inclinait doucement vers l’avant, cherchant le confort de l’oreiller qui lui faisait défaut. Soudainement, sa tête glissa sur le côté, pour venir se poser sur son épaule masculine. Cette dernière s’affaissa légèrement sous l’impact du visage endormi. Le Baron de Tourbière demeura immobile, décidant de laisser la femme profiter de son sommeil réparateur, plus pressant que tout le reste.

Les minutes s’écoulèrent dans le silence, seulement rompu par la respiration douce et régulière de Gudrun. Lorsqu’ils furent arrivés à destination, le Seigneur parvint à s’extraire avec délicatesse et minutie, de manière à ne point réveiller la prêtresse. Il déposa ainsi sa joue contre le banc en bois. Debout, au-dessus d'elle, ses yeux se portèrent un instant sur la cape qu’il eut cédé précédemment, désireux de la reprendre. Toutefois, après s’être remémoré le son poignant et déchirant provenant des profondeurs de l’âme féminine, il s’y résigna. Le Baron de Tourbière quitta alors la charrette, laissant donc derrière lui le destin de Gudrun entre les mains du Roi.


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