Marbrume


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 Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge

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Darine de Crèvecoeur
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MessageSujet: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyVen 11 Mar 2022 - 20:13
Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge
Icare de Sabran et Darine de Crèvecoeur




HRP - Suite à une maladresse technique, post en cours de réécriture


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Dernière édition par Darine de Crèvecoeur le Mar 22 Mar 2022 - 8:24, édité 2 fois
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Icare de Sabran



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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyDim 20 Mar 2022 - 9:21
La nouvelle de son retour à Marbrume n'a pas tardé à faire le tour de l'Esplanade. Rien de surprenant à cela, rien de transcendant non plus. Le Comte de Sabran reste un pair du royaume malgré son exil volontaire. Au Labret il s'est pourtant tenu loin des mondanités et de ses commérages. En deuil après la mort de son épouse et de ses deux fils, il s'est ancré dans le paysage agricole du plateau. Cette version, officiellement adoptée, n'a jamais eu à souffrir de la suspicion d'une population agreste et déjà dépassée par un quotidien frustre. À Marbrume, la donne serait différente. Imaginer son retour sur une possible alliance matrimoniale apparaît donc comme une solution.

Il ne connaît que peu de choses au sujet des Crèvecoeur, mais n'a pas jugé utile de se renseigner plus avant. Ils sont non natifs et donc au bord de la ruine si ce n'est pas déjà sans le sou. Quant à la missive réceptionnée quelques jours auparavant, elle ne laisse que peu de doute sur ce que la Duchesse espère. Sa fille a l'âge d'Esmée, chose qui ne lui parait pas engageante. Pour autant, il en convient, tenir une jeune pucelle à son bras a quelques avantages, dont celui d'éloigner les veuves et les marieuses. Aussi, si la jeune fille - Darine s'il a bien retenu son prénom - ne s'attend pas à vivre une romance tout juste bonne à lui faire perdre son temps, il veut bien la rencontrer. L'effort qu'il consent à ce labeur reste moindre. Une toilette sommaire, une tenue sombre à l'apparat presque inexistant et un repas frugale qui seulement de pain, de fromages et d'un peu de vin. Il ne s'attend pas à recevoir une précieuse, mais une prêtresse qui, s'il a parfaitement saisi les allusions de sa mère la Duchesse, se contente de peu. Chose qu'il s'emploie à vérifier dès son arrivée.

Contrairement à ce qu'impose l'Etiquette, le Sabran fait patienter la jeune femme dans le hall. Il ne prend pas même la peine de se montrer ponctuel. Si elle doit devenir son épouse, autant qu'elle comprenne à qui elle a affaire. Il ne la fera pas passer avant ses affaires et ses obligations. Finalement, après avoir terminé la rédaction d'un courrier qu'il estime d'importance, il prend la direction du vestibule dans lequel il sait trouver la demoiselle. Elle se tient bien là, au milieu de cette entrée dans laquelle elle dénote. Sa robe est trop pâle, sa coiffure trop stricte. Les pendants et le rutilant collier qu'elle porte s'affichent comme des reliques alors que cette beauté n'a besoin d'aucun d'artefact pour briller. Elle est belle et... Seule. Le constat l'amène à arquer un sourcil tandis qu'il reste dans l'ombre du couloir. Croisant les bras sur son torse, il cale son épaule contre le mur et finit par l'interpeler.

"Où se trouve votre chaperon, Madame ?" La réponse lui apparaît d'ores et déjà évidente, mais elle fait également naître un amer constat dans son esprit. Certaines mères offrent leur progéniture sur un plateau. "Je vous ai fait patienter plus que de raison. J'espère que le temps ne vous a pas paru trop long."

Sortant enfin de l'ombre, il s'approche et tout en restant à une distance estimée convenable, relève son menton pour l'observer sans plus s'en cacher. Ses yeux noirs détaillent ainsi le visage puis la silhouette de la prêtresse. Il garde le silence un instant encore, avant d'enfin se présente.

"Je suis Icare de Sabran et nous avons rendez-vous. S'il vous plaît." Conclut-il en offrant son bras à son invitée.


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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyMar 22 Mar 2022 - 8:23

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Icare de Sabran et Darine de Crèvecoeur




Le comte épousait si bien les ténèbres que sa parure de saphir perdit de son éclat dès qu’il s’était dévoilé. Darine avait l’impression qu’il l’avait rendu plus minuscule encore, plus ridicule, mais elle n’éprouva rien d’autre qu’un écho fasciné. Elle avait à peine eu le temps de s’émouvoir de sa beauté, ou de sa sombre prestance qu’il engageait déjà les hostilités ce qui la tira de sa contemplation qu’on aurait pu juger déplacée si elle s’était éternisée.

- Je suis chaperonnée par les dieux, Votre Excellence, répondit-elle avec un naturel plein d’aplomb.

Le destin l’avait amputé d’un père et de deux grands frères. Le seul survivant n’avait que douze ans et était estropié si bien qu’Inès de Crèvecoeur ne s’amuserait sûrement pas à le faire parader au bras de sa sœur dans les plus belles demeures de l’Esplanade. Elle cachait son cadet comme on enterrait un odieux et honteux secret. Les dieux invisibles avaient comblé le vide, et elle s’était réfugiée dans une foi qui ne lui avait ramené ni père, ni frères. Visiblement, le comte ne s’était pas encombré de curiosité concernant les Crèvecoeur et elle considéra que c’était de bonne guerre. Elle n’avait pas la prétention d’attiser à ce point son intérêt. Elle en avait vu des regards las se poser sur elle lors de rendez-vous, capturer sa beauté d’une œillade satisfaite, mais s’en défaire aussitôt que l’on annonçait la ruine de sa famille, son infertilité. Un chaperon n’aurait pas su changer la donne.

Quand sa main glissa contre le bras proposé, elle prit garde à ne pas exercer une pression inadéquate. Avant d’être guidée vers une autre pièce, elle jeta une dernière fois un regard à cette antichambre qui l’avait accueillie de trop longues minutes. La lumière qui filtrait depuis de jolis vitraux se diffusait sur le marbre et la pierre précieuse qui façonnait le manoir. Elle avait oublié l’éclat des riches demeures depuis la Fange, se souvenait à peine du château de Crèvecoeur et du soleil qui perçait au travers de ses fenêtres. Elle se surprit à scruter de nouveau son hôte, au travers de ses longs cils sombres. L’étonnement passé, elle analysait avec davantage de rationalité, de manière la plus discrète qu’il soit afin qu’il ne se sentît pas scruté. On ne dévisageait pas un comte. Ces choses-là ne se faisaient pas et si sa mère l’avait surpris à malmener les convenances, elle l’aurait rappelé à l’ordre. Darine tentait simplement de lire au-delà des traits ciselés du noble dont l’air imperturbable l’intriguait.

- L’attente m’a paru raisonnable. Vous devez être fort occupé avec vos affaires. Je ferai mon possible pour ne pas vous faire perdre votre temps. Ne vous sentez pas dans l’obligation de me ménager. Ma mère, la duchesse, saura se contenter d’une missive polie justifiant votre manque d’intérêt et de temps.

Elles avaient l’habitude ce ballet incessant. Lorsque la rencontre aboutissait à un échec, Inès mettait des mois avant d’adresser la parole à sa fille. Des mois de répit durant lesquels Darine ne craignait plus le spectre d’un énième rendez-vous catastrophique. Un dernier regard par-dessus son épaule alors que la sortie s'éloignait et qu'ils changeaient de pièce. Peut-être que les choses seraient différentes, cette fois-ci.



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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyMar 5 Avr 2022 - 23:01
Chaperonnée par les dieux... En d'autres temps, peut-être aurait-il souri, mais l'expression le laisse aujourd'hui dubitatif. Les événements qui ont entouré le couronnement ont mis sa foi à rude épreuve. Il se garde cependant d'esquisser son opinion quant à cette affirmation qu'il juge arbitraire. Il aura le temps d'y revenir plus tard, ou une autre fois peut-être. En attendant, il avance dans la riche demeure sans plus s'émouvoir de son faste. Les Sabran n'ont jamais manqué de rien. Les tentures précieusement brodées de fils d'or en attestent. Tout comme le font les meubles, les bibelots, les tableaux et autres décorations qui s'étalent impudiquement sur leur trajet.

"Votre discours est rôdé." Lâche t-il d'un ton laconique alors qu'ils arrivent visiblement à destination. "Dois-je m'en sentir vexé ?"

Il est assez évident que la Duchesse de Crèvecoeur a écumé les registre nobiliaires pour trouver un époux à sa fille. Lui n'a pas dû être son premier choix. Tout jeune veuf, exilé au Labret, Icare de Sabran ne pouvait figurer en tête de liste. Un fait dont il avait conscience, mais que Darine a confirmé sans même tenter de s'en cacher. La maladresse naturellement évidente, l'intrigue quant à son objectif.
Une nouvelle fois Icare pose ses yeux noirs sur la jeune femme. Elle l'a observé, il le sait quand bien même elle a cherché à rester discrète. Lui se montre moins délicat. Il la toise de toute sa hauteur et redresse même le menton pour mieux afficher un air sévère.

"Vous ne semblez pas démériter. Vous êtes belle, cultivée, bien éduquée. Alors dites-moi, pourquoi les autres ont-ils adressé une telle missive à votre mère et pourquoi devrais-je le faire moi aussi ?"

La porte s'ouvre finalement sur un vaste séjour où une table a été dressée pour recevoir un opulent dîner. Toutefois et alors qu'un domestique s'incline cérémonieusement devant eux pour les saluer, Icare le fait taire d'un geste impérieux de la main. Le serviteur, visiblement habitué d'être ainsi traité, se détourne sans un autre mot. Il s'éloigne et se contente d'agiter les mains pour chasser les autres domestiques qui déjà s'affairaient dans la pièce.

"Je vous écoute, Madame." Reprend Icare. "Maintenant que nous sommes bien seuls." Ses yeux toujours rivés sur la prêtresse il attend qu'elle se prononce pour visiblement décider de la suite à donner à leur rencontre.

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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyMer 6 Avr 2022 - 20:53
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- Parce que...

Elle marqua une pause, fauchant sa phrase en plein élan pour la suspendre dans l’air silencieux. Le faste de la demeure ne lui avait pas échappé. Elle s’en était émerveillée, comme un amateur de poésie prenait plaisir à écouter des vers récités ou comme un profane appréciait déchiffrer les mystères d’une peinture. Nulle vénalité dans son regard pour le décor somptueux du manoir ; simplement de l’enchantement. Elle était soulagée de découvrir que la beauté existait encore après tant d’années de souffrance et de misère. Même si elle n’y goûtait pas personnellement, l’idée que des belles choses eussent survécu lui rendait l’impression d’être humaine.

Mais le silence s’éternisait et les mots devaient venir. Elle ne savait simplement pas par où débuter son discours travaillé puisqu’elle avait en face d’elle un homme pour lequel ses années d’éducation avaient compté. Depuis sa naissance, Darine n’avait qu’un seul destin à rencontrer, celui du mariage, jusqu’à ses quinze années, on l’avait élevée pour être l’épouse d’un duc ou d’un comte. On lui avait tout enseigné, sauf les détails charnels, de son devoir conjugal. Elle avait appris à broder, à paraître agréable, mais également à entretenir des correspondances, à compter. Inès n’avait pas préparé sa fille à se soumettre, elle l’avait façonnée pour devenir une compagne loyale, sur qui l’on pouvait compter. Finalement, elle n’avait jamais saigné. Les lettres, les livres de comptes, la broderie n’avaient plu eu de sens. Quel aristocrate digne accepterait une épouse qui ne pouvait sauvegarder sa lignée : quand bien même possédait-elle toutes les autres qualités ? Le Temple ne réclamait pas d’enfants ; les dieux n’avaient pas de lit dans lequel s’allonger lascivement pour concevoir. Elle avait cultivé auprès du clergé ses connaissances parce qu’elle n’avait pas eu le choix que d’être indépendante.

Alors, par où commencer ?

- La plupart ne sont pas intéressés par ma dot insignifiante.

Par le moins fâcheux.

- S’ils sont assez riches pour ignorer ce détail, mon incapacité actuelle à porter un enfant les obligent à me déconsidérer. Je ne souhaite pas abuser de votre temps, vous avez déjà accompli énormément en me recevant, Votre Excellence et en me faisant l’honneur d’un accueil que je ne mérite sûrement pas.

Son souffle s’emballait et elle faisait de son mieux pour conserver le contrôle sur les rênes. Elle captait son reflet dans le miroir de l’un des magnifiques meubles qui ornaient la pièce et se trouva plus pâle qu’à l’accoutumée. Elle se sentait légèrement nerveuse et plaqua une main contre un ventre qui la tiraillait brusquement. Elle tâcha d’apporter tout le naturel possible à son geste afin de ne pas alarmer son hôte. Accrocher les prunelles anthracite du comte ne faisait qu’accentuer son malaise et elle se rassura. Elle devait être sensible à son charme, peut-être. Il avait un air austère qui troublait autant qu’une plastique qui ravissait. Elle ne s’était jamais retrouvé face à un homme comme lui. La plupart étaient bien vieux, ou bien trop jeunes. Elle n’avait encore jamais rencontré de prétendant dans la fleur de l’âge.

- Je suis navrée si je vous ai vexé., ce n’était aucunement dans mes intentions. Vous me semblez être un homme tout à fait…exceptionnel, reprit-elle avec une autorité tempérée. Madame de Crèvecoeur, ma mère, n’a pas dû avoir conscience que vous étiez si…

Elle dut reprendre sa phrase, car beaucoup de mots se bousculaient à ses lèvres, mais aucun ne semblait approprié.

- Juste. Vos compliments me touchent et je vous remercie, conclut-elle le plus sobrement possible. Je vous enjoins, avec mon plus grand respect, à faire ce que bon vous semble, Monsieur. Je souhaitais simplement être honnête. Je ne suis pas naïve. Une union ne peut faire son lit sur le mensonge. Elle peut tolérer le secret s’il ne nuit à aucun des deux partis et celui-ci vous aurait nui, dans l’éventualité où…vous m’auriez envisagée.

Ses derniers mots n’avaient formé qu’un souffle relâché avec prudence et déjà, elle fuyait son regard. Ses prunelles ambrées considérèrent la table prête à accueillir un repas et elle sentit son estomac se retourner. Elle n’était pas sûre d’arriver à avaler quoique ce fût. Elle avait l’impression qu’une pierre tranchante était tombée au fond de son ventre. Bien des choses étaient demeurées entre ses lèvres. Les confesser aurait été s’humilier. Il y avait les prétendants qui écrivaient à sa mère parce que, séduits par sa grande beauté, ils l’envisageaient comme concubine. Elle serait bien traitée, assuraient-ils, et entretenues ce qui signifiait que les Crèveoceur n’auraient plus eu à se soucier des revers de la fortune. Cependant Inès n’était pas dupe, le concubinage et les liaisons extra-conjugales ne garantissaient rien. Parfois, elle avait considéré sa fille et s’était demandé si elle ne faisait pas tout simplement peur.



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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyMar 12 Avr 2022 - 14:02
Le silence s'éternise, mais Icare n'entend pas presser un aveu qu'il espère sincère. Le regard qu'il garde posé sur la jeune femme ne cille pas. Pourtant, il ne cherche pas à l'impressionner. Il veut comprendre et attend en l'observant d'un oeil de juge. Elle n'a pas paru réellement intéressée par ce que la richesse de la demeure laisse supposer de son statut. Alors il arque un sourcil quand elle lui livre un secret qui n'en est pas un. Les Crèvecoeur sont ruinés comme bon nombre de familles non natives du Morguestanc.

Sa dot ? Il n'en a cure. L'argent n'est pas ce qui compte aujourd'hui et ses possessions sont assez nombreuses pour assurer un avenir confortable à sa famille. Il reste donc impassible, mais lui accorde dans un subtil clignement d'yeux que le reste de ses confidences est plus problématique.
L'infertilité est à l'origine de bien des unions malheureuses et parfois invalidées par le Clergé, surtout au sein de la noblesse. Pourtant, il ne réagit toujours pas. Alors elle se perd dans les explications et se confonds en excuses. C'est là que l'observer devient intéressant.

La prêtresse hésite, cherche ses mots et choisit celui qui ne convient pas. Il la laisse cependant continuer et argumenter jusqu'à entendre sa voix se tarir. Elle détourne les yeux cherche visiblement une échappatoire à leur discussion. En d'autres temps, il aurait veillé à se montrer courtois. Il l'aurait rassurée par quelques paroles réconfortantes. Mais aujourd'hui, la Fange se tient à leurs portes.

"Je ne suis pas juste." Finit-il par répondre d'un ton toujours égal, avant d'attraper son menton pour la forcer à relever les yeux vers lui. "Gardez votre tête haute Madame." Ce qui doit être un conseil sonne plutôt comme un ordre. "Notre fierté tient aussi à ce que les dieux nous offrent d'apprendre de leurs épreuves."

Fugace, l'ébauche d'un presque sourire veut naître sur ses lèvres, mais rapidement l'homme retrouve son air impassible et froid. Pour autant, ses doigts s'attardent un instant à maintenir le visage de la jeune femme relevé vers lui. Une fois encore, il semble la jauger. En proie à la réflexion, il n'en reste pas moins stoïque. Alors, quand il la relâche rien ne laisse présager de sa décision. Mais il se détourne et fait quelques pas pour se détacher d'elle en s'éloignant du salon qui devait les accueillir.

Finalement il s'arrête, le dos tourné. "Venez." Dit-il simplement en tendant le bras.
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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyJeu 14 Avr 2022 - 10:32
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Elle avait sincèrement cru qu’il avait décidé, comme tous les autres, de mettre fin à l’entrevue sitôt la vérité annoncée. La jeune prêtresse n’avait plus dérobé son regard et elle avait l’impression qu’une force invisible la forçait à maintenir ce port altier qu’on lui avait enseigné. La houle qui agitait ses entrailles s’était tempérée bien qu’elle se sentît toujours nauséeuse. Se dressant dans la lumière diurne, elle songeait déjà aux excuses qu’elle présenterait à sa mère désespérée. Quoiqu’il en fût, Darine conservait toujours sa dignité. A Marbrume, bien souvent, tout avait un prix et elle ne braderait pas celui de son honneur, ni de ses ambitions.

L’empreinte des doigts du comte est vivide le long de sa mâchoire, invisible et pourtant tenace dans son esprit. Elle l’aurait emporté avec elle et tous les bains du monde n’auraient pu effacer son existence. Elle aurait dû reculer pour se soustraire à ce contact. Désormais, elle en initiait un autre alors que sa main glissait sur ce bras tendu. La surprise avait envahi ses pensées. Venir. Elle obéissait, par politesse ou parce qu’elle ne s’imaginait pas lui opposer un refus. Pourtant une partie d’elle – celle façonnée par le clergé, redoutait cette docilité. L’obéissance allait aux dieux et non aux hommes si l’on pouvait considérer Icare de Sabran comme un homme. Il ne se dégageait de lui aucune émotion, aucun sentiment palpable et à l’image d’un livre scellé, il ne montrait qu’une couverture sombre. Elle avait tenté d’affronter ses prunelles onyx, d’y déchiffrer quelque chose, de sonder son humanité et ses tentatives échouèrent. Elle ne s’était heurtée qu’à cette enveloppe charnelle placide et magnétisante.

- Comment aurais-je dû vous qualifier, Votre Excellence, si le mot juste ne vous convient pas ? osa-t-elle demander du bout des lèvres, le ton déférent, mais le regard exigeant.

Il était laconique et trop silencieux. Interroger son silence, c’était prendre le risque de manquer à son éducation. La curiosité avait pris le dessus sur le paraître. D’autres interrogations se succédèrent : venir. Il avait pris la décision de ne pas la congédier, malgré ses aveux. Darine analysait. Derrière ses allures de poupée, ses réflexions s’alignaient, voraces et dangereuses. Il n’était pas homme à perdre son temps. Envisageait-il sérieusement ce que Madame de Crèvecoeur lui proposait ? Approcher une éventuelle réponse lui donna le vertige. Pour une fois, elle conserva un silence sage. Son discours n’allait pas au-delà des fâcheuses vérités. Elle n’avait jamais étiré les rendez-vous au-delà de ce point et elle préféra donc se montrer prudente pour éviter de commettre des impairs fâcheux. Elle se savait jeune. Le manque d’expérience pouvait la rendre maladroite et c’était un défaut qu’elle ne supportait pas chez elle. Elle aurait aimé avoir vécu mille vies pour tirer les meilleures leçons de chacune d’entre elles. Cependant, l’intelligence tenait aussi à apprendre des erreurs des autres. A défaut d’expérimenter, elle observait et ce qu’elle admirait ne fit que prolonger son silence.

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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyJeu 14 Avr 2022 - 11:41
"Ne cherchez pas à me qualifier. Apprenez à me connaître avant de vous lancer dans une analyse qui sera forcément décevante, puisque vous n'êtes pas encore en mesure de la mener à bien."

Sa main libre se pose sur celle qu'elle a glissé à son bras. Icare se veut rassurant alors que son ton a été tranchant. Il n'y a pas d'offense et il ne se sent pas offensé. S'il n'a pas vécu les affres et déceptions de sa jeune invitée, il peut les imaginer. Sa fille a connu et connaît encore les mêmes tourments quant à ce qu'elle doit dire et paraître.
Alors qu'ils arrivent au bout du couloir, il s'immobilise devant une porte qu'il ouvre d'un geste sec de la main. Tout en lui est rude, austère et presque martial. À côté de lui Darine a l'air d'une fleur trop fragile. Pourtant, il la devine suffisamment épineuse pour ne pas se laisser impressionner.

"Après vous."

Lui ouvrant passage vers un salon bien plus modeste, il la laisse quitter son bras afin qu'elle puisse pénétrer dans la pièce. Ici les meubles sont plus rustiques, moins clinquants, mais plus confortables. Les toiles et bibelots qui décorent le reste de la demeure n'ont pas trouvé de place où s'afficher sur les murs ou les comptoirs marquetés. Seule oeuvre d'art présente dans ce presque boudoir, un piano trône devant deux larges fenêtres ouvertes sur un jardin renaissant. Quelques feuillets sont éparpillés sur le sol parqueté, devant son siège. Recouverts de notes, il figurent les partitions d'un esprit torturé, sinon malade.

"Installez-vous et mettez-vous à votre aise. Vous n'avez rien à craindre ici. Vous n'aurez rien non plus à craindre ailleurs si nous nous entendons." Il reste dans l'encadrement de la porte pour l'observer tandis qu'elle évolue dans ce qui doit être son environnement. "J'apprécie votre honnêteté. C'est une qualité rare. Bien trop exceptionnelle pour ne pas être estimée. Alors soyez honnête jusqu'au bout, Darine. Qu'attendez-vous de cette rencontre ? Vous... Ni la prêtresse, ni la jeune fille de bonne famille. Vous et seulement vous."
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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyJeu 14 Avr 2022 - 14:24
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- Tout.

La réponse avait fusé de ses lèvres pâles sans qu’elle n’eût à réfléchir. Il avait sollicité Darine et Darine lui répondait. Aucun homme n’avait prononcé ce prénom en sa présence depuis le trépas de ses frères aînés. Au milieu de la pièce, elle s’était avancée avec précaution. L’ourlet de sa robe flottant sur le parquet laqué. Un froissement de tissu plus tard et la voilà agenouillée près des feuilles éparses. L’anomalie avait attisé son intérêt. Elle n’avait pas les connaissances suffisantes pour lire l’intégralité des partitions, mais elle se sentait attirée par cette mêlée de notes.

- J’attends tout, précisa-t-elle d’une voix claire qui – à sa grande surprise, ne tremblait pas. J’attends de cette rencontre qu’elle puisse m’apprendre à vous connaître, qu’elle puisse m’apporter un allié précieux alors que le monde s’écroule, car il s’écroule avec ou sans l’aide des dieux.

Ce n’était pas tant un blasphème qu’une angoisse. Le mouvement souple, elle amassa tous les feuillets pour les rassembler entre ses paumes délicates et se lever, faisant le tour du piano. L’émerveillement et la tentation de toucher se partageaient l’éclat de ses prunelles qu’elle darda finalement sur son hôte.

- J’attends qu’elle me rende assez forte pour survivre à la chute.

Puissante aurait été le mot juste bien qu’elle le trouvât trop violent dans la bouche d’une femme de sa condition. Le Temple lui intimait l’humilité, son sang lui ordonnait de cultiver sa fierté. C’était un combat permanent et usant. Elle passait de l’un à l’autre selon les humeurs de celles et ceux qui la dirigeaient. Maintenant que la Fange s’était immiscée dans chaque partie de leur vie, le choix d’enfermer sa fille au couvent ne convenait plus à Madame de Crèvecoeur.

- Le souhaitez-vous, Monsieur ? Que nous nous entendons.

Elle lui tourna le dos, non pas par impolitesse, mais pour lui cacher un sourire qu’elle jugeait bien trop intime. Le rire et le sourire n’avaient pas leur place dans l'humeur d'une femme honorable. Ses yeux se perdirent au-delà de la vitre et elle se promena dans les jardins, imaginant la douceur de l’air ou l’arôme des végétaux qui renaissaient timidement. Contre son corsage, elle pressait les feuillets récoltés, prenant garde à ne pas les froisser. Au travers, elle tentait de maintenir une pression constante sur son ventre légèrement douloureux. Quand elle détacha les partitions d’elle pour les consulter à nouveau, elle revint vers lui et s’assit sur le premier siège venu. La jeune fille semblait dans son élément. Si elle était impressionnée, elle avait le bon goût de ne pas le montrer. Un pli concerné était apparu sur son front alors qu’elle concentrait son esprit sur les notes.




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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyVen 24 Juin 2022 - 16:41
Observer les gens et les comprendre. C'est une chose qu'il s'efforce de faire depuis toujours. Icare est un animal à sang froid. Un monstre dont le bouillonnant tempérament se cache dans l'absolu du silence. Ses pensées, ses désirs demeurent emmurés dans la froide logique qui anime chacun de ses desseins. Une épouse n'est rien d'autre qu'un accessoire indispensable à son ascension. Cependant, la femme qui se tient dans son intimité a quelque chose de fascinant. Une force qu'il devine derrière un masque trop épuré. Une aura qui achève de l'envoûter.

Le mot qu'elle choisit de lui livrer comme une ultime réponse résonne jusque dans ses entrailles. Lui aussi aspire à ce "tout". Il le veut et l'exige depuis toujours. Depuis qu'il a échoué à une marche de la consécration - il en est persuadé. Depuis qu'il a choisi de revenir s'exhiber au sein de la Cour marbrumienne.

Le pas qu'il arme finalement pour la rejoindre alors qu'elle s'installe se veut décidé. Pourtant il s'arrête à sa hauteur et patiente. Il a entendu sa requête et comprend qu'elle attend sa réponse. Quand elle lève ses yeux d'ambre vers lui, il redresse le menton. Trop fier ? Non... Trop méfiant. Les plus belles plantes se révèlent généralement venimeuses.

C'est alors avec précaution qu'il tend sa main pour effleurer la joue pâle. Il hésite et son geste se suspend au dessus de la peau visiblement satinée. Il a perdu l'habitude de se montrer tendre. L'a t'il déjà été un jour ? Hermance affirmait son coeur trop sec. Il la revoit, lors de leur première rencontre, effrayée et incapable de soutenir son regard.

Elle - Darine - est différente.

Entre ses doigts fins, les partitions prennent un autre sens et la musique revient le hanter. Comme un besoin irrépressible de s'élever, elle le pousse à s'affirmer.

"S'entendre avec moi peut s'avérer dangereux."

Le souvenir des corps sans vie de son épouse et de ses deux fils lui revient en mémoire. Instinctivement, sa main glisse depuis le visage de la jeune femme vers son cou. Ses phalanges en entourent le dessin gracile pour en apprécier la finesse. Fragile ? Non... Bien moins qu'elle ne laisse à croire.

Il étend son emprise sur la peau vraisemblablement intacte, puis laisse ses doigts conquérir le velouté d'un derme qui n'a jamais connu la violence. D'une pression sur sa nuque il la force à se redresser pour l'amener à se mettre debout. Sa main libre arrache les feuillets devenus inutiles dans le creux de ses paumes avant qu'il ne la presse contre lui. Au creux de ses reins, sa dextre trouve le tissu d'une robe au pli désuet. Il en pince le revers alors que son ton se charge d'un peu de morgue pour la mettre au défi.

"Repoussez-moi."


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Darine de Crèvecoeur
Darine de Crèvecoeur



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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyVen 24 Juin 2022 - 19:21
Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge
Icare de Sabran et Darine de Crèvecoeur





Un hoquet de surprise, muet, l’avait secouée lorsqu’il s’était saisi d’elle. La prêtresse avait anticipé cette rencontre vertigineuse dès qu’il avait approché ses phalanges. Elle avait souhaité, dans l’intimité de ses propres pensées, qu’il agît, mais elle n’aurait jamais prédit la sensation que ce contact provoquerait en elle. Dans l’ombre ardente du noble, elle se sentit minuscule et pourtant, Darine mourait d’envie de grandir et de s’élever. Certaines plantes s’épanouissaient dans l’obscurité, lisait-on dans les ouvrages de botanique. Leur splendeur ne supportait pas la chaleur et la lumière trop vive et elles développaient leur parfum envoûtant dans le secret.



- Vous repoussez.

Entre ses lèvres, un souffle fébrile peinait à s’échapper. Elle n’aurait eu ni la force physique, ni la volonté mentale de le repousser. Le défi l’appelait ailleurs que dans l’obéissance à un ordre. Elle demeura digne contre son corps masculin et les couches de tissus qui défendaient encore un dernier bastion de pudeur ne l’empêchèrent pas de frémir.

- Je vous l’ai dit. Je veux tout.

Il suffit d’une impulsion qui la hissa sur la pointe des pieds pour que sa respiration s’écrasât sur la bouche si bien dessinée du comte. Elle accrocha son regard froid au bout du sien, ardent. L’instinct l’emporta sur la raison. L’ambition vainquit l’éducation. Darine s’était dévêtue avant même que sa robe ne lui fût retirée. Elle avait mis son âme à nue avant ses courbes encore préservées. Icare avait entrevu le vrai visage derrière le masque. Ce dernier tomba en miettes quand elle eut l’audace de réunir leurs lèvres Il n’y avait guère plus qu’une brise légère pour réussir à s’insérer entre leurs silhouettes. Quelque part au fond d’elle, la terreur grattait dans l’obscurité et elle s’efforçait de la réduire au silence. Le geste était trop familier, peut-être maladroit, mais elle mobilisa assez de témérité et refusa de battre en retraite.

Aucun Crèvecoeur ne pouvait se targuer d’être encore en vie après le choix de l’assaut. Et leur héritière avait été façonnée au cœur du même bois. L’attaque surpassait la défense, en termes de vertu et de stratégie. La puissance, le pouvoir, le monde. Tout cela, elle le cueillait au creux d’un baiser licencieux. L’heure n’était plus aux paroles malgré la centaine de mots qui se bousculaient à son esprit. Tout, elle souhaitait tout. Les lèvres du comte faisaient partie de ce tout, ses prunelles perçantes, sa carrure, ses vêtements, ce qui palpitait en dessous.




© Laueee




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Icare de SabranComte
Icare de Sabran



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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyMar 28 Juin 2022 - 18:31
La main que le Comte a refermé autour du cou de la jeune femme se resserre brièvement. Comme un ultime avertissement, elle presse, malmène la peau trop délicate et menace. Pour autant et alors même qu'il s'essaye à la garder à distance, la prêtresse choisit l'affrontement. Cette décision - inattendue mais espérée - amène un très bref sourire au coin de ses lèvres. Pourtant il s'oblige à rester de marbre. Froid et stoïque, alors que son regard noir plonge dans les yeux d'ambre. Intéressant...

Quand elle se hisse un peu plus contre lui, il la soutient et l'enferme dans l'étreinte de ce bras qu'il a glissé autour de sa taille. Aucun mot, aucun autre geste qui doit trahir ses pensées. Pourtant ces dernières s'ordonnent pour lui permettre d'apprécier les choix qui s'offrent à lui. Il n'est pas tendre. Il ne l'a jamais été. Il n'est pas non plus cet homme qui s'efforcera de la courtiser niaisement. Elle l'a compris, il n'en doute pas et le pacte s'en trouve ainsi scellé.

Tout. Si c'est là ce qu'elle désire, il n'en veut pas moins.

La soulever dans ses bras est alors chose aisée. L'emporter avec lui jusqu'à ce piano qui trône dans la pièce ne lui coûte rien. Quant à entendre les notes résonner avec discordance dans le vacarme d'une respiration devenue sourde ? Cette mélodie le fascine. Il a avalé son souffle et s'est emparé de sa bouche sans prévenir. Comme si après des instants d'hésitation, il avait pris une évidente décision. Une résolution qu'il se fait fort de conquérir sans modération.

Tout. Si elle le lui offre.


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Darine de Crèvecoeur
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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyMar 28 Juin 2022 - 20:01
Un jour, elle avait entendu une voix lui murmurer en songe : Si tu veux quelque chose dans la vie, prends-le.
Que cette voix appartînt à Rikni ou à une conscience supérieure n’avait guère eu d’importance.

Si tu veux quelque chose dans la vie, prends-le. Et tu auras tout.

Darine n’attendait rien de moins de l’existence qu’elle mût ses désirs en réalité. La chevalerie et ses idéaux romanesques avaient péri avec ses frères. Les murs du Temple s’étaient dressés, infranchissables, et avaient repoussé les soupirs mièvres et les cœurs trop tendres. Si la déesse funèbre exigeait, sa serviteuse exigeait aussi. Et si la divinité offrait, sa prêtresse offrait aussi. Que ce fut une bénédiction ou une malédiction ne comptait pas.

Le comte avait repris le contrôle de l’assaut et elle ployait sous l’autorité de ses lèvres. On pourrait la croire naïve de ne pas le repousser, mais la Fange avait balayé ce qui avait demeuré de naïveté en elle. Non, Icare ne la condamnait pas, il la délivrerait des maux de ce siècle et elle survivrait à la chute. Maladroitement, ses mains délicates saisirent un appui sur le clavier du piano et les mediums raisonnèrent avec discordance. Bientôt, l’inconfort qui tiraillait son ventre céda le pas à une envie inavouable dont l’ardeur creusa ses reins. Son corps jeune était chaste, sa peau vierge de toute violence et de tout contact. Elle n’avait jamais éprouvé une telle chaleur, n’avait jamais respiré avec autant d’intensité. D’ailleurs, elle n’avait jamais su – avant ce jour, quelle texture pouvait avoir les lèvres d’un homme. Peut-être qu’elle ne goûterait plus à d’autres lippes que celles-ci, qu’elle ne se gaverait plus d’un autre parfum que celui du Comte. Qu’il la prît tout entière, s’il le voulait, car elle offrait tout. Pas seulement son enveloppe charnelle.

Et que résonnât une musique sans partition et sans amour, portée par deux chants sourds. Elle aurait mal, la mettait en garde sa propre terreur. Elle voulait tout. Ce serait comme un déchirement, survenu de l’intérieur, grondait sa crainte. Elle voulait tout. Elle n’enfanterait jamais, hurla son désespoir. Elle. Voulait. Tout. Sa paume quitta les octaves pour agripper la nuque du noble ténébreux. Un tressaillement traversa son être lorsque ses propres phalanges rencontrèrent la chevelure anthracite. Elle voulait plus.






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MessageSujet: Re: Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge   Mieux vaut une affreuse vérité qu'un gentil mensonge EmptyMer 17 Aoû 2022 - 16:09
Le monde et ses règles ont changé. Il pourrait indubitablement se laisser aller à cet élan enfiévré. Il le pourrait d'autant plus aisément que la jeune femme exige. Ses reins se sont creusés et son souffle est devenu plus court. Il a senti chacun de ses muscles se tendre à l'appel d'un désir qu'elle ne maîtrise pas. En effet, il serait bien simple de satisfaire à l'enthousiasme téméraire d'une prétendue pucelle.

Ce que la bienséance impose, ce que le protocole exige n'a plus guère de valeur. Qui se soucie encore des ronds de jambe et des salamalecs ? Lui ? Certainement pas. Les mondanités et autres politesses superflues n'ont jamais trouvé en lui terrain fertile sur lequel s'épanouir. En revanche, le Sabran s'est toujours fait devoir d'honorer sa parole donnée. Et il lui a assuré qu'elle n'avait rien à craindre ici, en sa compagnie.

Alors et même s'il a un instant cru pouvoir céder à l'assaut grisant, le Comte ne tient pas du jeune puceau impatient. Bien sûr, il a eu le temps d'apprécier les atouts d'un corps aux courbes gracieuses et délicieusement féminines. Mais l'ensorcelant n'a que peu de prise sur son esprit cartésien. Ses mains finalement libèrent leur emprise sur le tissu d'une robe d'allure passée. La couleur ne va pas à son teint, mais ce n'est pas une raison suffisante pour l'en délester.

Et tandis que ses doigts trouvent ceux que la jeune femme a noués autour de son cou, il se redresse. Sa respiration demeure chaotique et ses gestes sont fébriles. Le regard qu'il ancre à celui de la prêtresse se veut néanmoins indiscutable. Sa décision est sans appel.

- Mettez de l'ordre dans votre tenue, Madame. Il souffle ses mots contre ses lèvres et tout en défaisant l'attache des doigts graciles.

Une nouvelle fois, les notes de musique s'élèvent, discordantes et désordonnées. Il en grimace, mais s'entête.

- Restez ici, le temps de reprendre vos esprits. Mangez, si vous avez faim. J'écrirai à votre mère.

Le ton est péremptoire, sec. Il la relâche et sans attendre de réponse, tourne les talons pour quitter la pièce.


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