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 [Terminé] Un pas après l'autre.

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Théophile CastaingMilicien
Théophile Castaing



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un pas après l'autre.   [Terminé] Un pas après l'autre. - Page 2 EmptyMar 29 Mar 2022 - 9:27
Les aveux de Laura étaient douloureux. On sentait clairement qu’elle n’était pas à l’aise à chaque fois qu’elle quittait la sécurité de la cuisine. Ca aurait pu être une réminiscence de son séjour chez les bandits, mais les murmures qui s’élevaient autour d’elle laissaient penser que c’était plutôt sa morsure qui causait cet engouement morbide. Pierrick tenta d’alléger l’atmosphère mais l’arrivée du garde y coupa court.

Ca n’annonçait rien de bon...Son attitude aurait donné envie au borgne de l’asticoter si il n’était pas venu sur les ordres du Sergent. C’est d’ailleurs cette mission capitale qui avait du faire gonfler sa tête comme une citrouille alors que du lait coulait encore de son nez...

L’archer n’était pas serein en voyant les Lucet partir ainsi, accroché l’un à l’autre, dans l’antre d’un Sergent qui n’était pas vraiment connu pour sa douceur. Rien ne servait de continuer à observer la tente du gradé une fois que les adolescents eurent disparu dedans. Il se rendit plutôt vers celle de la cuisinière. Du fait de ses horaires particuliers, la veuve avait réussit à obtenir un petit emplacement pour elle seule proche de la cuisine. A cette heure, les alentours étaient déserts et son amie s’était déjà retirée pour la nuit.

En approchant de l’ouverture, il préféra s’annoncer.

« Liliane ? »

« Entres Théo. »

Le milicien ne se fit pas prier plus et trouva la cuisinière déjà prête pour la nuit. Avant de se laisser happer par la passion, il préféra prévenir la protectrice des deux jeunes gens de leur situation.

« Pierrick et Laura ont été appelé par le Sergent. Je ne sais pas ce qu’il leur veut mais venant de ce type, je m’attends à tout. »

« Tu penses qu’il veut les faire partir ? »

La cuisinière semblait attristée par cette pensée.

« Je ne sais pas Lili, je ne sais pas... »


Le milicien soupira et son amie vint se blottir dans ses bras, comme si la perspective de se séparer de ses deux nouveaux enfants lui donnait froid.

Quelques heures plus tard, le couvre-feu n’était pas encore levé mais Liliane s’agita aux côtés de Théophile. La cuisinière devait vouloir se préparer pour se rendre à son poste et que le petit-déjeuner des miliciens soit prêt le plus tôt possible. Le borgne râla avec une mauvaise foi évidente de perdre ainsi sa bouillotte et à force d’arguments...persuasifs, il réussit à prolonger leur nuit d’une bonne demi-heure.

Liliane le fit ensuite rapidement sortir de sa tente, afin de ne pas être en retard plus qu’elle ne l’était déjà. Bien qu’elle était finalement à l’heure, elle s’était habituée à commencer plus tôt pour satisfaire l’estomac de tous ces messieurs. Théophile se retrouva donc démuni et avait donc décidé de réveiller ses camarades. Vu sa tenue débraillée, les gardes qui terminaient leur tournée ne l’arrêtèrent pas pour lui demander ce qu’il faisait en plein milieu du camp alors qu’il était encore interdit de circuler. Et puis ils avaient reconnu le milicien borgne, ayant assisté à la scène de la veille à la cantine.

En arrivant sous l’abri de ses camarades, certains étaient déjà réveillés comme Chef et Papa, mais les autres dormaient encore du sommeil du juste. Terriblement dénué d’une activité quelconque à faire, le borgne se donna pour mission de réveiller ses amis. Le tout était de choisir la bonne victime. Le Rouquin était hors course, Théo n’avait pas envie de se retrouver avec une dague dans le ventre. Barthélémy avait en effet l’habitude de dormir avec au moins une de ses deux armes sous l’oreiller, ou quoi que ce soit qui fasse cet office. Ne restait plus que Puceau et Grincheux. Un choix aussi difficile que délectable, tous deux étaient de très bon clients pour ce genre de farce.

« Simon...réveilles-toi... »


Une voix horriblement aigu avait retenti près de l’oreille de Grincheux, qui grogna et se tourna dans l’autre sens.

« Par la barbe de Serus, Suzanne...laisses-moi cinq minutes... »

Suzanne était la femme qui avait le mérite de supporter leur camarade depuis près d’une vingtaine d’années. C’était une femme au fort caractère, qui ne se laissait pas avoir par les ronchonnements de son mari. Ce premier échange avait fait ouvrir un œil malicieux au Rouquin, qui se relevait pour voir la suite.

« Simon Puech ! Lèves tes fesses de suite ! Et va justifier ta paie ! »


Cette phrase était tirée de la réalité. En leur racontant l’anecdote, Chef avait très bien imité la « douce » voix de Suzanne qui avait du réveiller son époux après une soirée un peu trop arrosée. Théophile s’en était tout à fait inspiré et cela dû d’ailleurs évoquer des souvenirs chez Grincheux qui se réveilla en sursaut.
Un peu de plus et son front aurait percuté celui de l’archer. Heureusement pour le trublion, l’accident fut évité. En réalité, il n’avait pu contenir son hilarité plus longtemps et s’était relevé pour laisser éclater le rire qu’il retenait.

« Je vais te tuer Castaing ! Je te jures qu’au moment où tu quittes cette Coutilerie je vais te tuer ! »

Grincheux s’était levé pour venir secouer son camarade par le col. Clairement, cet homme n’avait pas le réveil facile…Malgré l’hilarité collective, Chef arriva à remettre ses hommes dans le rang et les faire se préparer pour la journée de voyage.

Un peu plus tard, la troupe s’avança enfin pour reprendre sa place dans le convoi. Ils étaient les premiers en place, ceux de la milice extérieure étant encore en train de finir leur repas. Les charretiers vérifiaient leur matériel sous l’oeil vigilant du chef de convoi.

L’apparition de la jeune Laura ne surprit pas tellement Théophile, Liliane lui avait indiqué qu’elle n’avait pas vu les enfants ce matin. Vu la discussion qu’ils avaient eu la veille au soir, elle était inquiète qu’ils aient été sorti du village dès la nuit. A vrai dire, le borgne aurait pu avoir la même crainte si il ne savait pas le Sergent aussi prudent. Le gradé n’aurait pas fait rouvrir les portes la nuit, même pour mettre dehors la pire des crapules.

« C’est le Sergent qui vous a fait partir ? Peu importe...restez là, je vais m’arranger pour que vous puissiez monter dans un chariot ou au pire être intégrés au convoi. Je ne suis pas rassuré de vous savoir en dehors. Puceau, va prévenir Liliane qu’il viennent avec nous.»

Le cadet de la troupe acquiesça et parti au pas de course prévenir la cuisinière que ses protégées n’étaient pas lâchés en pleine nature, mais pris en charge par le convoi. A sa suite, l’archer s’absenta un instant, laissant la fratrie à la surveillance du Rouquin et alla discuter avec le responsable du convoi, Chef sur ses talons. Ce dernier préférait toujours garder un œil et une oreille sur son trouble-fête.

« Coutilier Legrand ? Auriez-vous un instant à m’accorder ? »

L’homme cessa d’observer la roue avant de la première carriole pour reporter son regard sur celui qui venait de l’interrompre. Il l’étudia puis s’adressa à lui d’un ton blasé.

« Castaing ? On m’avais prévenu que vous étiez un casse-pieds...j’pensais passer au travers mais on dirait bien qu’non...Alors c’est quoi votre problème ? »

« Il y a deux jeunes gens qui souhaitent nous suivre à Sombrebois. Peuvent-ils se joindre au convoi ? »

Legrand se pencha pour chercher qui pouvaient être les deux invités indésirables et ses yeux tombèrent sur Pierrick et Laura.

« On fait pas dans la charité Castaing. Je prendrais pas une putain de mordue ni un fainéant dans mon convoi. »

Le regard du Coutilier était devenu dur et mauvais. Il pensait vraiment que les Lucet étaient ce qui se rapprochait le plus de l’engeance d’Etiol.

« Monsieur, sans vouloir vous manquer de respect, nous ne courons aucun risque. »

« Et si on se fait attaquer et que la gamine devient un putain de fangeux ? C’est vous qui vous en chargerez et qui allez expliquer aux hommes mordus pourquoi ils sont exilés ? »

L’explication était bien plus logique que ce qu’il pouvait entendre parfois. Au moins lui ne faisait pas l’offense à Théo des croyances de bas étages, comme les idiots qui pensaient encore que c’était contagieux. Pour autant, l’archer ne comptait pas lâcher le morceaux.

« De toute façon ils nous suivrons. Préférez-vous qu’ils attirent les fangeux parce qu’ils traînent derrière le convoi et font une cible facile ou qu’ils soient silencieux, invisible dans un chariot ? »

De loin, il était clair que les trois hommes eurent un échange vif et qui dura plusieurs minutes avant que le plus gradé n’abandonne d’un signe de main. Il soupira fortement au même moment et Théophile savait que c’était gagné pour lui.

« Vous méritez vraiment votre réputation Castaing. Très bien qu’ils viennent ! Vous n’avez qu’à les fourrer dans un chariot proche de vous. Je vous préviens, si ils ne sont pas les bienvenus à Sombrebois, ne comptez pas qu’ils reviennent avec nous ! »

« Entendu Monsieur ! »

Il ne fallait pas en demander plus pour le moment, ni en rajouter en remerciement inutile. Le responsable s’était déjà tourné et Théophile se doutait qu’il voulait plutôt se débarrasser de lui au plus vite.

« Dégagez de ma vue, y’en a qui bossent ici plutôt que de chercher les ennuis... »

Chef était resté silencieux la plupart su temps, ayant apprit qu’il valait mieux ne pas intervenir tant que son orchidoclaste numéro un avait les choses en main. Ce dernier revint avec un sourire victorieux vers ses camarades et s’adressa à la fratrie.

« Vous allez pouvoir monter à l’arrière de l’un des chariots. Ca à l’air assez bondé mais vous devriez pouvoir trouver une petite place pour vous asseoir. Je sais que vous n’êtes pas bêtes mais on m’a dit de vous prévenir des règles du convoi. Tant qu’on est pas arrivés il faut rester silencieux. Vous devrez attendre les pauses du convoi si vous un besoin pressant. »

Avant que les jeunes gens ne partent s’installer, le milicien les stoppa et abaissa sa voix. Le reste des hommes arrivait, signe qu’ils n’allaient pas tarder à sa mettre en route.

« Le responsable a bien insisté sur le fait que c’est un aller simple avec nous. Pour être honnête, je ne sais pas ce qui vous attends à Sombrebois. Je dois voir Soeur Gudrun en arrivant, je peux voir avec elle si elle peut parler en votre faveur à la Baronne pour que vous puissiez rester. En attendant que j’en ai fini avec elle, restez avec les hommes de ma coutilerie. »

Ils n’auraient pas l’occasion d’échanger sur la route, l’archer devant user de toute sa concentration pour surveiller les alentours, mieux valait donner les consignes avant le départ. Puceau revint assez rapidement et donna à Laura et Pierrick un sac en toile. Les adolescent pourraient y découvrir une petite réserve de nourriture, de quoi tenir quelques jours.

« De la part de Liliane. Elle a dit que vous deviez la tenir au courant dès que possible. »
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Laura LucetCouturière
Laura Lucet



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un pas après l'autre.   [Terminé] Un pas après l'autre. - Page 2 EmptyMer 30 Mar 2022 - 0:14
Laura hocha timidement la tête à la question de Théophile, bien que cela n’était pas tout à fait exact : seul Pierrick se voyait être jeté dehors par l’acariâtre et tout-puissant gradé mais comme il était évident que la jeune fille ne laisserait jamais son frère s’éloigner d’elle et partir tout seul vers un avenir incertain, le fait qu’elle le suive pour s’enfoncer avec lui davantage dans les ténèbres d’un futur plus que trouble était tout naturel. Mais tout cela, l’archer n’avait pas forcément besoin de le savoir.
Les paupières de Laura papillonnèrent au surnom quelque peu particulier du jeune homme que Théophile envoya auprès de Liliane et, sur les conseils du milicien, partit retrouver son frère qui était accompagné de Barthélémy. La jeune fille adressa à ce dernier un sourire mais l’homme aux cheveux roux semblait trop occupé pour le remarquer.

« - Alors ? » murmura Pierrick à sa cadette.

« - Il va se renseigner. »

En se penchant légèrement, la couturière pouvait voir leur protecteur discuter de manière assez animée avec un homme plus vieux et manifestement très occupé. Malgré son ouïe d’ordinaire assez fine, Laura n’entendit rien de ce que les deux hommes se dirent mais le regard noir de l’inconnu à son encontre suffit à lui faire comprendre ce qu’elle et son frère étaient – encore – aux yeux d’un milicien : des intrus. La jeune Lucet inspira fortement et resserra ses bras autour d’elle sous son châle dans lequel était dissimulé le couteau qu’elle avait pris au réfectoire. Ne seraient-ils plus que ça à présent, partout où ils iraient ? Laura n’eut pas le loisir de se pencher davantage sur la question puisque Théophile finit par revenir vers eux et leur annoncer la – relative – bonne nouvelle. Les deux adolescents hochèrent la tête aux instructions de l’archer ; outre leur simplicité, c’était les conditions sine qua none pour qu’ils puissent faire partie du voyage après tout.
Laura fut surprise de voir le jeune milicien mandaté par Théophile revenir avec un paquet. Tandis que le surnommé Puceau leur indiquait que c’était un cadeau de Liliane et qu’elle attendait d’eux des nouvelles, la jeune fille et son frère ouvrirent le sac de toile grossière : ils y trouvèrent une bonne miche de pain entière, quelques petits morceaux de fruits séchés et des herbes. Un grand sourire sincèrement joyeux étira les lèvres de Laura tandis qu’une pointe de culpabilité lui transperçait le cœur. Liliane avait-elle constaté la disparition du coutelas ? Difficile à dire. Quoiqu’il en soit, son geste donnait beaucoup de réconfort au frère et à la sœur qui étaient tout simplement incapables de ne pas exprimer leur soulagement et leur bonheur de savoir qu’ils auront du pain à manger pendant quelques jours.

Les adolescents redescendirent rapidement de leur nuage : les préparatifs allaient bon train et ils allaient devoir rapidement prendre place dans un des chariots à destination de Sombrebois s'ils ne voulaient pas rester sur le carreau. L’une des carrioles était un peu moins remplie que les autres : Pierrick y grimpa et s’installa sur le côté, laissant la place du milieu, en sécurité, à sa cadette. Le sac de provisions de Liliane coincé entre eux deux, Laura regarda le convoi terminer sa mise en place puis se mettre en branle, direction le plus profond de la forêt. La jeune fille regarda les remparts de bois de Balazuc s’éloigner puis rapidement disparaitre derrière les fourrés.
Les voilà partis vers un nouvel horizon fait d’innombrables incertitudes. Tandis que Pierrick observait les alentours, un peu tendu à l’idée de s’enfoncer de nouveau entre les arbres tortueux et les marais stagnants, Laura ramena ses jambes contre son buste, le regard dans le vide. Si cette fameuse Sœur Gudrun qui l’avait soigné et avait sauvé son frère ne pouvait pas les aider, elle ne voyait pas vers qui elle pourrait se tourner alors : Théophile semblait avoir du travail qui l’attendait à Marbrume ou ailleurs et ni elle ni son frère ne connaissaient quelqu’un à Sombrebois. Hélas, le seul chemin que les Dieux daignait leur montrer les menait inexorablement à l’ultime halte de l’humanité dans cette partie du Morguestanc et ils allaient devoir s'en contenter.

Hormis le bruit de pas des bêtes et des hommes ainsi que les couinements des vieux chariots cahotant sur le sentier, aucun bruit n’émanait du convoi. Fidèles à la consigne de l’archer, les enfants Lucet étaient parfaitement muets, presque invisibles entre les tonneaux et les sacs de grains. Laura laissait son regard aller d’un milicien à l’autre : tous étaient particulièrement concentrés et il y avait de quoi : les routes entre les différentes poches de civilisations n’étaient absolument pas sûres et la couturière en savait quelque chose, bien que les Fangeux n’étaient curieusement pas la première menace qui lui venait en tête.

Le soleil grimpait lentement dans le ciel et irradiait au travers du feuillage de la forêt. Pour passer le temps, Laura jouait machinalement et dans un parfait silence avec le tissu de sa robe. Elle remarqua alors qu’un trou s’était formé entre deux morceaux de tissus qu’elle avait cousu pour repriser son vêtement au niveau du genou : elle venait de se trouver une occupation finalement. La cadette Lucet laissa un petit soupir lui échapper et elle sortit un petit étui en tissu épais d’une de ses poches : son nécessaire de couture s’y trouvait, constituant certainement la chose la plus précieuse dont elle disposait encore à ce jour. Tranquillement, elle prépara son fil et son aiguille et, après avoir tendu la jambe pour se mettre plus à l’aise, commença à recoudre sa robe. Absorbée par son ouvrage, même si celui-ci fut rapidement fini, Laura ne compta plus les secondes qui s’égrainaient lentement et put se focaliser sur autre chose que l’angoisse de ce qui pouvait potentiellement leur arriver à Sombrebois.

Une fois son patchwork de tissus reformé et resserré, la couturière poursuivit sur sa lancée et inspecta son frère. Un petit sourire aux lèvres, celui-ci se laissa faire bien volontiers lorsque sa cadette s’affaira à referme la myriade de trous qui constellaient sa chemise. Au moment où elle cassa le fil pour libérer son frère, la jeune fille entendit un juron être grommelé dans son dos. En regardant derrière elle, Laura reconnut le jeune homme qui leur avait rapporté le cadeau de Liliane : apparemment, celui que Théophile avait appelé Puceau venait de casser une des sangles de ses fourreaux et ce dernier ballotait, tout juste retenu à sa ceinture par la boucle. La sœur de Pierrick hésita quelques instants avant de murmurer :

« - Hé… »

L’adolescente fut bien aise de voir que son chuchotement avait suffi à attirer l’attention du garçon aux cheveux bruns ébouriffés. En levant la main droite, Laura montra au milicien son aiguille et son fil tout en tendant sa main gauche vers lui, se proposant de rafistoler son équipement. Le soldat parut indécis et, après quelques secondes de réflexion, il finit par dégainer son épée pour la garder avec lui et posa son fourreau cassé sur les genoux de Laura. Cette dernière lui adressa un sourire certes petit mais franc puis se pencha sur son nouvel ouvrage. Aussitôt, la couturière nota que le cuir était de bonne qualité et que sa petite aiguille n’allait sûrement pas pouvoir le transpercer comme elle l’avait fait avec les tissus fatigués de sa robe et de la chemise de Pierrick. Elle changea alors pour la plus grosse aiguille que son étui contenait et mit tout en place pour procéder à la réparation, de nouveau plongée dans son activité sous le regard un peu ennuyé de son frère.
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Théophile CastaingMilicien
Théophile Castaing



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un pas après l'autre.   [Terminé] Un pas après l'autre. - Page 2 EmptyJeu 31 Mar 2022 - 20:56
Une fois que la fratrie alla s’installer, il ne restait plus qu’à Théo et ses camarades à aider le convoi à se préparer pour cette nouvelle journée de marche. Ils inspectèrent les roues, les ridelles ou les voiles des diverses charrettes. Une fois que tout fut sécurisé, ils purent se déployer. Le Rouquin alla se placer devant Théo et derrière celui-ci ce ne fut pas Puceau mais Papa qui arriva.

Le borgne regarda le cadet avec un air interrogatif et la rougeur qui s'étendait sur son visage en regardant Laura fut la seule réponse dont il avait besoin. Si Puceau s’était placé à sa place habituelle, Laura aurait l’aurait eu dans son champ de vision et cela aurait suffit à le déconcentrer. Après tout, il avait dû être sacrément surprit de la voir debout, après l’état dans lequel il l’avait vue le mois précédent.
Captant l’attention de Puceau, l’archer fit des allers-retours du regard entre lui et la jeune fille, ponctuant le tout d’un haussement de sourcil suggestif. Il récolta un murmure semblant à s’y méprendre à quelque chose du style : « Va mourir. »

Content de lui, et d’avoir une nouvelle botte secrète contre son cadet, Théophile arma son arc avec un sourire. Puis il se concentra sur la route. A son habitude, il était posté sur la droite du convoi afin que son œil aveugle ne le gêne pas outre mesure. Même si il s’entraînait dur pour palier à ce manque, cela ne faisait qu’un mois et demi qu’Aeryn lui avait donné le coffret pour parfaire ses sens. Son ouïe c’était considérablement affinée mais ce n’était pas encore suffisant. Pas assez pour gommer son angle mort.

Tous avaient au moins une arme dégainée et c’est avec surprise, qu’à la pause, l’archer découvrit Puceau avec ses deux lames sorties alors que nul danger n’avait été en vue. En voyant Laura penchée sur le fourreau de son camarade, il comprit de quoi il en retournait.
Le jeune épéiste s’était approché des deux jeunes gens et leur parlait à voix basse depuis le bas du chariot.

« Si vous voulez descendre c’est maintenant. La couture pourra attendre après damoiselle Laura. »


Théophile s’appuya nonchalamment sur l’épaule de son petit camarade et abaissa aussi sa voix pour lui glisser une petite blague, que certains pouvaient juger de mauvais goût.

« Ce ne serait pas le travail de ta Rosie ? »

Puceau rougit comme une écrevisse et balança son poing dans les côtes de l’archer. Ce dernier avait vraiment mal et se massa vivement la zone de l’impact.

« Aïe ! »

« Laisses Rosie en dehors de toute ça...de toute façon elle est déjà fiancée... »

Le cadet de la coutilerie baissa la tête, non sans que Théophile ne capte une pointe de douleur dans ses yeux. L’archer se fit plus sérieux d’un coup. Il savait que cette histoire tenait au jeune homme, mais qu’il était bien trop timide pour déclarer sa flamme. Etait arrivé l’inévitable moment où la fille en avait trouvé un autre.

« Pourquoi tu n’as rien dis ? »


« Parce que ça regardes pas les emmerdeurs comme toi... »

Puceau se tourna et alla vers les fourrés après avoir bougonné cette dernière phrase. L’affaire l’affectait et comme à son habitude il préférait le garder pour lui. Raison pour laquelle il l’asticotait. Malheureusement il n’avait pas réussit à le faire sortir suffisamment de sa coquille. Le borgne soupira et se tourna vers ses protégés.

« Bon...en tous cas Thibaut a raison, si vous voulez descendre pour un besoin urgent ou juste vous dégourdir les jambes c’est maintenant. »

Sans se rendre compte que c’est la première fois qu’il le nommait par son prénom devant les deux jeunes gens, Théophile se décala et attrapa une pomme dans son sac pour la grignoter. Le secret dans les convois, était de manger de petits repas réguliers pour garder de l’énergie tout au long du trajet. De toute façon, aucune halte n’était assez longue pour permettre un repas en bonne et due forme. Un fruit, un morceau de pain, de la viande séché pour ceux qui pouvaient se le permettre, étaient généralement le régime alimentaire de la route. Laura devait se rendre compte à quel point ce qu’elle avait préparé était délicieux en comparaison. En tous cas, c'est ce qu'espérait Théophile.
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Laura LucetCouturière
Laura Lucet



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un pas après l'autre.   [Terminé] Un pas après l'autre. - Page 2 EmptyVen 1 Avr 2022 - 0:21
Contrairement à son frère qui n’avait pas grand-chose d’intéressant à faire pour s’occuper les mains, Laura ne voyait plus le temps passer. C’était d’autant plus vrai que le fourreau du soldat lui donnait du fil à retordre : elle avait déjà travaillé du cuir mais jamais d’aussi bonne qualité. Que les miliciens disposaient des meilleurs artisans pour leur équipement n’était pas une aberration en soi mais cela ne faisait pas les affaires de la petite couturière dont le matériel n’était plus de première jeunesse ni d’excellente facture. La cadette Lucet s’évertua pourtant à trouver une solution, étudiant la sangle pour y trouver les points faibles que son aiguille pourrait percer. Il lui fallait toutefois également réfléchir pour que sa réparation soit la plus pérenne possible : trop abîmer le cuir le ferait de nouveau casser plus tard et il faudrait alors plus qu’une simple couture pour reconstituer la sangle, elle devait faire preuve de minutie et de méthode.

Absorbée par son ouvrage, Laura ne sentit même pas le chariot s’arrêter et ne releva le nez que lorsqu’elle entendit la voix de Puceau s’adresser à elle et Pierrick. Un peu troublée d’être sortie de manière aussi brusque de ses pensées, la jeune fille hocha simplement la tête en guise d’assentiment mais fronça les sourcils d’un air interloqué lorsque le jeune milicien l’appela « damoiselle ». Personne ne l’avait jamais appeler comme ça, ça lui faisait bizarre… tandis qu’elle posait soigneusement le fourreau et son aiguille sur le sac de Liliane, Théophile fit son apparition et lança une pique taquine à son jeune collègue, qui réagit de manière aussi rapide que brutale. Laura et son frère observèrent la scène puis se regardèrent mutuellement ; Pierrick finit par hausser les épaules, peu enclin à l’idée de s’interposer entre les deux soldats qui, de toute façon, semblaient en avoir déjà fini.

Laura remit pied à terre et, avant de s’éclipser dans des buissons, jeta un coup d’œil à leur protecteur qui s’était trouvé une pomme à grignoter dans un des sacs.

« - On a pas pris le temps de vous remercier à Balazuc pour nous avoir permis de venir avec vous. J'ai l'impression de faire ça à longueur de journée sans jamais pouvoir vous rendre la pareille… »

Tout en parlant en murmurant au borgne, Laura adressa un regard en direction du coutilier qui s’était assis sur une pierre et s’essuyait le nez avec sa manche. Le sourire de la jeune fille s’était quelque peu affaissé à cette vision et, avant qu’elle n’ait la malchance de croiser le regard du gradé, elle fit un petit signe à Théophile et s’éloigna pour répondre à quelques besoins naturels.

Après quelques instants à épier les feuillages de peur d’y voir quelque chose bouger, Laura revint auprès du chariot et y retrouva Pierrick. En se mettant sur la pointe des pieds, elle parvint à atteindre leur sac de toile grossière et y plongea la main pour en sortir des morceaux de fruits séchés, des tranches de pommes et des baies pour l’essentiel. Elle en donna un peu à son frère et croqua dans sa part à elle, appréciant ce goût sucré dont elle avait toujours été friande. Cette pointe de douceur ne faisait que renforcer sa culpabilité d’avoir emporté avec elle le coutelas que lui avait prêté Liliane ; en regardant son châle qu’elle avait laissé dans le chariot et dans lequel se trouvait le couteau, Laura se disait intérieurement que, quitte à voler, elle aurait aimé prendre à quelqu’un d’autre qu’à celle qui l’avait pris sous son aile pendant presque un mois.

Rapidement, le temps fut venu de se remettre en route. Laura et Pierrick se réinstallèrent sans attendre à leur place et le convoi reprit sa lente progression sur le sentier forestier. La cadette Lucet se remit à travailler et, tandis que le soleil poursuivait sa course dans le ciel, elle perça le cuir et put y faire passer à plusieurs reprises le fil réparateur. Ce ne fut pas une mince affaire et le résultat n’était pas de toute beauté mais en rudoyant la sangle, la sœur de Pierrick constata que sa réparation était assez robuste et pourrait tenir quelques temps, suffisamment longtemps pour laisser à Thibaut le loisir de se trouver du matériel plus neuf. La jeune couturière attendit patiemment et, lorsqu’elle aperçut le jeune épéiste, attira son attention d’un geste de main. Elle lui tendit son fourreau réparé et murmura à son attention tout en jetant un coup d’œil en direction de Théophile :

« - Dites-lui que s’il continue de vous ennuyer, ça me contrariera. »

Après un petit sourire en coin réconfortant, Laura se remit correctement en place, s’appuyant sur l’épaule de Pierrick pour se reposer. Celui-ci passa un bras protecteur autour des frêles épaules de sa cadette, le regard perdu dans le vague. Ils n’allaient sûrement pas tarder à voir les portes de Sombrebois devant eux et le garçon sentait de nouveau poindre une inquiétude poisseuse. S’ils étaient chassés au pied de ces remparts, rien ne pourrait les protéger lors de la prochaine nuit… l’adolescent regarda sa sœur qui avait fermé les yeux pour les reposer, elle qui s’était tant concentrée sur sa couture : aurait-il pu l’empêcher de se mettre de nouveau dans un tel péril ? Un petit sourire ourla ses lèvres tandis qu’il passa une main tendre et fraternelle dans quelques mèches rebelles qui s’échappait de la tresse châtain clair : non, c’était évident, Laura avait beau avoir été profondément affecté par sa captivité, elle avait encore son petit caractère. Mais tout de même, de là à le suivre… à croire qu’elle lui rendait la pareil pour ce jour où il avait dévalé la Grande Rue des Hytres en courant pour la rejoindre dans l'exil…
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Théophile CastaingMilicien
Théophile Castaing



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un pas après l'autre.   [Terminé] Un pas après l'autre. - Page 2 EmptyDim 3 Avr 2022 - 11:01
Laura avait disparu dans les fourrés et Théophile dut attendre qu’elle réapparaisse pour lui répondre. Avant qu’elle ne remonte dans le chariot, il lui glissa quelques mots.

« Encore une fois Laura, vous ne me devez rien. J’aimerais penser que quelqu’un m’aurait aidé si j’avais été dans votre situation. Quand la fange est arrivée, mon village était l’un des premiers attaqué dans l’actuel duché. Le fait que ces monstres n’étaient pas qu’une rumeur a déclenché la panique et certains voulaient laisser les plus faibles à leur sort pour pouvoir partir de suite. Heureusement, nous avons été plusieurs à nous dresser contre cette décision et à travailler d’arrache-pied pour que nous partions tous ensemble au plus vite. »

Il n’était pas nécessaire de lui avouer que c’est sa Douce qui avait fait les frais de la première incursion. Ce serait devoir lui dire qu’il n’avait aucune idée de ce qui avait pu lui arriver et qu’il avait mis trois ans avant de se sortir la tête du cul. Et qu’en plus il n’en avait pas été capable seul, que c’était une prêtresse qui avait dû lui montrer la voie. Non, tout cela ne concernait que lui. Ce que Laura avait besoin de savoir, c’est qu’elle devait reprendre foi en ses semblables, même si tous ne le méritaient pas.

« Qu’est-ce qui nous différencie des monstres si nous oublions notre humanité ? »

C’est avec cette question et un sourire qu’il laissa la fratrie s’asseoir et retourna se placer. C’est la même chose qu’il avait certifié pour venir à leur aide la première fois. Et ce n’était pas la seule fois qu’il s'était servi de cet argument. La plupart des gens ne souhaitaient pas y répondre, car ils se rendaient compte qu’agir égoïstement les rapprochaient de ces monstres terrifiants. Mais cette fois, il voulait obtenir l’effet inverse, et que la fratrie puisse se servir de cela pour surmonter les épreuves à venir. Car le borgne n’était pas naïf, il savait bien que les choses resteraient difficile pour les deux jeunes gens.

La surveillance reprit et le temps s’égraina à nouveau. A la fois long et court, le trajet n’était qu’une succession de moments présents où la survigilance était l’actrice principale. Le convoi avançait à bonne allure et les bonnes conditions climatiques lui avait permis de prendre de l’avance sur le trajet habituel. D’un commun accord, signifié par un coup de tête de chaque charretier, la pause suivante fut annulée.

Les rempart de Sombrebois se dressèrent et l’agitation commençait à se faire sentir. Pourtant, conscient qu’ils n’étaient pas encore à l’abri, les convoyés restèrent silencieux. La procession avança lentement, bien plus lentement qu’il n’était de coutume dans les autres villages. Un fait étrange, alors que tout le reste du convoi était en danger, à l’extérieur des murailles. Qu’y avait-il de plus pressant que de mettre les denrées, les convoyés et les miliciens à l’abri derrière la pierre ?

Théophile se pencha et compris en un instant, lorsqu’un de ses camarades du montrer ses bras au soldat en faction. Ils vérifiaient si il y avait des mordus parmi eux ! Merde ! Personne ne lui en avait parlé. A la capitale, les rumeurs circulaient bien assez sur la manière dont le Labret et la milice extérieure les accueillaient, faute de volontaires « sains » pour faire le travail. Cela soulageait peut-être la conscience des autorités de leur donner un but plutôt que de les lâcher dans la nature, à la porte de la ville, comme ça avait été le cas pour Laura et Pierrick. Pour autant, une fois jeté dehors, les mordus devaient toujours se débrouiller seuls pour trouver un nouveau chez-eux, après avoir tout perdu…

Il semblait qu’ici, on ne considère pas les choses de la même manière. L’amertume glissa un instant le long de la gorge du borgne, mais il l’effaça bien vite pour prendre les devants. Il ne pouvait pas accepter de voir encore la fêlure qu’il avait aperçu dans les yeux des deux enfants le matin même à Balazuc.

Sortant de son rang, Théo chercha parmi les gardes à la porte celui qui semblait être le plus gradé et s’approcha de lui. Il le salua en baissant la tête un instant, reconnaissant ainsi la supériorité de son rang, puis le regarda dans les yeux. L’homme était plus petit que lui, et il était parfois difficile au trublion de montrer sa docilité, surtout avec la malice et la nonchalance qu’il adoptait naturellement. Les iris clairs de son vis-à-vis l’étudiaient, se demandant certainement ce qu’un simple milicien voulait à la plus haute autorité militaire du village, bien que ledit milicien n’avait pas conscience que face à lui se trouvait le Capitaine de la garde. Il tenta d’être solennel, usant d’un ton bas pour n’être entendu que de lui.

« Monsieur, nous avons une jeune fille mordue avec nous accompagnée de son frère, dans un chariot. Pourriez-vous regardez vous-même discrètement et ne rien dire pour le moment ? »

Bien sûr, Théophile s’y était pris comme un crétin pour présenter la chose. Un criminel n’aurait pas fait mieux que si il avait énoncé la célèbre phrase de tous les innocents auto-proclamés « Je vous jure que c’était pas moi ! ». Il devait faire mieux, s’expliquer calmement avant que l’homme ne perde patience et fasse au contraire déploiement de force pour voir ces fameux jeunes gens.

« Je ne vous demande pas de le cacher, juste de le garder quelques heures pour vous. Peut-être même moins. Je…je dois aller voir Soeur Gudrun pour une affaire personnelle. Elle connaît les gamins, elle a sauvé la vie du frère, je vais en parler avec elle, pour qu’elle m’aide à trouver une solution. Pour être honnête, je ne pensais pas qu’en venant ici vous faisiez des fouilles. Au Labret, je ne l’ai pas vu faire…»

C’est bien pour cela qu’il était autant pris au dépourvu. Mais ce n’était pas son genre de se laisser longtemps décontenancé. Bien qu’il était toujours plus difficile de réfléchir sérieusement à de réels arguments, plutôt que de noyer le poisson et soûler son auditoire pour avoir le dernier mot. Pour Laura, pour Pierrick, il se devait de faire un effort et convaincre le gradé de lui laisser un peu de temps devant lui et d’aviser.

« Si ils doivent à nouveau être montré du doigt à chaque fois qu’ils sortent, qu’est-ce que ça changera d’être partis ? »

Bien qu’ils aient été mis à la porte, mais ça, il n’était pas question de l’avouer pour le moment. Pas tant qu’il n’avait pas un début de résolution à ce problème. Ce n’était pas la peine d’ajouter un boulet au bout de la chaîne que les Lucet trainaient déjà.

« Ecoutez, ce sont des bons gamins, ils cherchent juste un endroit où ils pourront vivre sans qu’on les regarde comme si ils étaient Etiol personnifiés. Ils ont vécu des choses difficiles, qu’ils n’auraient jamais dû avoir à affronter. Tout ce que je vous demande, c’est de leur donner une chance de pouvoir être traités comme tout le monde. S’il vous plait ? »

Il ne voyait pas quoi ajouter d’autre pour plaider sa cause. Ce qu’il proposait n’était peut-être même pas la meilleure solution. Après tout, quoi de plus suspect que de parler au gradé et qu’il ne vérifie que deux enfants dans tout le convoi ? L’archer n’avait pas de recul dans cette situation, il était dedans jusqu’au cou, et ce n’était pas quelque chose dont il avait l’habitude. Pour celui qui s’éloignait normalement pour y voir plus clair, il était bien loin de sa zone de confort. Tout ce qu’il fallait espérer, c’était que les Dieux aient pitié d’eux et que l’homme face à lui soit compréhensif.
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AlaricGarde de Sombrebois
Alaric



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un pas après l'autre.   [Terminé] Un pas après l'autre. - Page 2 EmptyDim 3 Avr 2022 - 17:50
Posté à la porte de Sombrebois, Alaric balayait les alentours d'un regard teinté d'inquiétude. Il était rare qu'il s'occupât lui-même de la surveillance des murailles, mais à quelques jours de la visite royale, il avait décidé qu'il serait bon de renforcer quelque peu l'inspection des nouvelles têtes qui pénétraient dans le bourg. Depuis que la couronne aidait la baronne, les convois ne cessaient d'affluer avec son lot de marchandises et de victuailles, d'hommes curieux et de femmes désireuses de débuter une nouvelle vie loin de la capitale. C'est que maintenant que les travaux étaient majoritairement terminés, le bourg était devenu un lieu accueillant et bien gardé où – presque – quiconque était le bienvenu. Toute personne marquée et bannie de Marbrume subissait le même exil de la part de Sombrebois : Rosen, à juste titre, ne désirait pas héberger des mordus dont l'état demeurait instable. On n'avait pas repoussé les fangeux dehors pour en abriter dedans. Et puis, il n'y avait pas que ces malheureux qu'Alaric avait ordre de filtrer. Il n'était pas question de laisser rentrer de loqueteux inquiétants, ni de sombres silhouettes encapuchonnées. Surtout quelques jours avant la visite.

Aussi s'occupait-il lui-même d'accueillir les convois en compagnie des miliciens chargés habituellement de cette fonction. La plupart du temps, il se contentait de vérifier les avants-bras, de jeter un œil à une possible arme dissimulée sous une veste ample, ou cachée dans l'ombre d'une lourde pelisse, avant de s'écarter, un sourire hospitalier sur le visage.

Il s'apprêtait à contrôler la prochaine caravane, lorsqu'un milicien se détacha de son poste. Éborgné, brun de cheveux, l'air affable, Alaric ne le connaissait guère, mais il avait cette carrure des soldats de l'externe, élancé et fin qu'avait adopté le capitaine de Sombrebois, bien que sa taille ne rivalisât pas avec celle de son mystérieux interlocuteur. Il le salua par politesse, arqua un sourcil interrogateur afin de l'encourager à poursuivre. Surpris par la demande, il le dévisagea un instant, avant de risquer un œil dans la direction indiquée. Ce milicien n'avait pas froid aux yeux – un comble pour un borgne ! S'il était tombé sur un autre qu'Alaric, ses prétendus gamins étaient bons pour faire demi-tour, et lui avec, une note écrite pour son coutilier dans la poche. Néanmoins, le capitaine l'écouta jusqu'au bout, avant de reporter son attention sur les deux jeunes victimes. Des gamins mordus : à se demander à quoi avaient encore pensé les Trois. Il n'osait imaginer la peur d'abord, la douleur ensuite qu'ils avaient dû ressentir, lorsque les crocs acérés des monstres s'étaient refermés sur leur chaire tendre. Il réprima une grimace : et il était censé les laisser dehors ? N'avaient-ils déjà pas suffisamment subi de souffrance ? Alaric passa une main dans ses cheveux et, tâchant d'être le plus naturel du monde, passa un bras amical autour des épaules du milicien.

Quel est votre nom ? chuchota-t-il.

Et, une fois celui-ci obtenu, il s'exclama, comme – il supposait – un milicien s'adressait à un autre après une longue absence :

Ah, mais c'est toi ! Castaing, qu'est-ce que tu deviens ?

Il fit un bref signe à ses hommes, leur indiquant qu'il s'occupait de son « ancien ami » et du convoi qu'il accompagnait.

Demain matin, vous êtes partis, vu ? l'informa-t-il à vois basse, tandis qu'il se rapprochait des deux enfants.

Il les salua d'un doux sourire, fit semblant d'inspecter leurs bras, ébouriffa les cheveux du garçonnet et désigna l'entrée du bourg d'un geste ample de la main, signifiant à tous – miliciens et voyageurs – qu'ils avaient la permission de rentrer.

Avant de les abandonner et de les laisser passer pour de bon, il attira Théophile vers lui, afin qu'aucune oreille indiscrète ne puisse les entendre :

Fais gaffe à toi. Je suis de ton avis, mais c'est pas le cas de tout le monde.

Pour être honnête, le plaidoyer du milicien avait été inutile : même sans ses arguments, Alaric aurait pris la décision de leur ouvrir les portes. Même avant l'apparition des mordus, il n'avait jamais aimé expulser d'autres hommes de la cité, ni se battre contre ces derniers. Ce n'était pas maintenant qu'il allait commencer. Et puis, qui serait au courant ? Quand bien même, il en assumerait les conséquences. Au départ, Alaric avait été un bon soldat. Son père lui avait toujours appris à respecter ses aînés, à obéir à ses supérieurs. Dans une certaine mesure, il était encore ce garçon désireux de bien faire. La seule différence étant qu'il avait pris du grade... Et que, bon, il pouvait bien un peu en profiter, non ?

Salue Soeur Gudrun de ma part.

Et il s'écarta définitivement du convoi après un dernier signe de tête.
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Laura LucetCouturière
Laura Lucet



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un pas après l'autre.   [Terminé] Un pas après l'autre. - Page 2 EmptyDim 3 Avr 2022 - 19:03
Les mots rassurants de Théophile et, surtout, la question qu’il posa trouvèrent un écho en Laura dont l’esprit moulina pendant tout le restant du trajet. L’archer avait beau lui assurer qu’il n’attendait rien des deux Lucet, la jeune fille savait qu’elle ne se départirait jamais de ce sentiment de lui être redevable : il lui avait juste sauvé la vie après tout, comme ne pas ressentir le besoin d’éponger une telle dette par la suite ? De plus, la petite couturière savait que ce sentiment était au moins tout aussi, si ce n’était même plus vivace chez son aîné qui était reconnaissant envers le milicien pour cette flèche qui lui avait permis de sonner l’alerte. Les yeux mi-clos, elle fixa un temps ses petites mains malingres dont les longs doigts étaient abimés par le travail domestique, piqués en de nombreux endroits par les aiguilles : comment pouvait-elle espérer rendre la pareille à quelqu’un qui avait tant fait pour elle, elle qui ne savait que coudre, cuisiner et s’occuper des bambins ?

Pour ce qui était de retrouver foi en l’humanité, ça, c’était un chemin encore bien trop long et tortueux à parcourir avant de savoir si c’était seulement possible. Théophile, Liliane, Thibaut… par leurs petites et leurs grandes actions, par leurs sourires et leurs mains tendues, ils aidaient Laura à croire que la Milice et le reste des survivants de la Fange n’étaient pas qu’un ensemble de personnes égoïstes, superstitieuses et odieuses dont le seul objectif était de la pousser à bout et de la faire devenir ce qu’ils attendaient d’elle : un monstre, une demi-fangeuse, une intruse. Mais en comparaison avec la discipline bête des soldats de Marbrume, le sadisme des brigands et la toute-puissance mauvaise du chefaillon de Balazuc, il était souvent difficile de se focaliser sur le positif. En fermant les yeux, apaisée par les caresses légères de son frère dans ses cheveux, la cadette Lucet espéra intérieurement que les choses allaient se tasser pour eux à Sombrebois.

Le domaine forestier finit par apparaître au milieu des bois : Laura le comprit au ralentissement du convoi. Elle et Pierrick se tinrent prêts à sortir, attendant un signal de Théophile ou de l’un de ses collègues. Pourtant, ce signe de main, ce mouvement de tête, ce mot ne vint pas et les deux adolescents, par instinct, ne bougèrent pas de leur place mais commencèrent à s’inquiéter. L’aîné Lucet se tortilla un peu pour essayer de voir ce qui empêchait les chariots d’avancer : il finit par apercevoir très brièvement les gardes de Sombrebois en train de demander aux miliciens du convoi de relever leurs manches et ces derniers de s’exécuter.
Lorsque Laura vit le visage pâle et fermé de son frère revenir de son observation et qu’elle croisa son regard désabusé, elle comprit presque aussitôt. Par réflexe, elle tira au maximum la manche de sa robe sur son avant-bras gauche mais ses dents serrées et son regard hargneux ne laissaient pas de place au doute : elle savait que c’était fichu, si les soldats avaient pour ordre de vérifier s’il n’y avait pas de mordus, jamais elle ne pourrait entrer dans la ville. Par les Trois, ne pourraient-ils donc jamais être tranquilles ?! Fallait-il qu’à chaque nouvelle halte dans leur périlleux périple, l’un des Lucet soit chassé comme un pestiféré, obligeant l’autre à lui emboiter le pas et alimentant leur culpabilité mutuelle ?! Laura sentit les bras de Pierrick l’envelopper à nouveau et elle accepta l’étreinte, le dos raide.

« - Ça va aller, on va trouver une solution, on en trouve toujours. »

Le jeune homme essayait d’apaiser les angoisses de sa sœur – et les siennes par la même occasion – mais la petite couturière sentait bien le trémolo dans sa voix qui indiquait qu’il ne voyait pas du tout quelle solution pouvait bien les sortir de cet énième pétrin. De nouveau silencieux, ils attendirent ensemble la sentence qui n’allaient pas tarder à tomber.

Au milieu du discret brouhaha de la tant redoutée fouille, Laura entendit soudain quelqu’un s’écrier, clamant le nom de famille de Théophile. L’archer connaissait quelqu’un parmi la garde de Sombrebois ? Lorsque leur protecteur apparut, accompagné d’un homme plus petit mais aussi brun de cheveux que lui, la jeune fille contint au mieux tout son stress et descendit du chariot avec Pierrick, toutes leurs maigres affaires sur les bras. Au bénéfice de la cariole qui les dissimulaient un peu de la vue des autres miliciens du bourg, l’homme que Théophile avait guidé jusqu’à eux les fouilla de manière particulièrement sommaire, relevant tout juste leurs manches : les premières traces de crocs que Laura arboraient sur son bras gauche apparurent nettement à ses yeux clairs mais, sans se départir de son sourire bienveillant, le milicien laissa la manche retomber et ébouriffa affectueusement les cheveux de Pierrick qui se força à sourire, tendu comme un arc. Finalement, le soldat leur indiqua le passage entre les deux grandes portes, leur signifiant qu’ils pouvaient entrer.

Toute la scène n’avait duré qu’une dizaine de secondes, tout au plus une minute, mais Laura et son frère eurent l’impression qu’une éternité s’était écoulée. Alors que Théophile était brièvement retenu par leur bienfaiteur inconnu, les Lucet traversèrent le passage sans être arrêtés par un autre militaire. La couturière avait l’impression que son cœur bondissant pouvait jaillir de sa poitrine à tout moment mais elle s’efforça de rester calme, les yeux un peu baissés vers le sol, emmitouflée dans son châle. Pierrick faisait de même, le sac de Liliane dans ses mains un peu crispées. Ensemble, les deux adolescents se décalèrent pour ne pas gêner en restant au milieu du chemin et attendirent patiemment Théophile non loin d’un auvent sous lequel quelques chevaux étaient parqués. Encore un peu sous le choc d’être parvenus à tromper la vigilance de la garde grâce à un allié inattendu, Laura et Pierrick ne prirent même pas le temps de parler ou même de se regarder, redoutant de paraître soudain suspects alors qu’ils venaient tout juste de trouver refuge au sein des murs de Sombrebois.

Lorsque Théophile entra à son tour, les Lucet attendirent sagement qu’il puisse les rejoindre et, une fois réunis, Laura lui murmura :

« - C’est risqué de rester ici s’ils veulent pas de mordus… je commence à croire qu’on sera acceptés nul part… »

Si même les villages extérieurs ne toléraient pas les personnes mordues mais encore bien humaines, trouverait-elle avec son frère un endroit sûr où vivre ?

« - Vous croyez que Sœur Gudrun peut nous aider ? On veut pas que vous ayez des soucis à cause de nous… » chuchota à son tour Pierrick, la main sur son ventre qui commençait à le faire souffrir.
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Théophile CastaingMilicien
Théophile Castaing



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un pas après l'autre.   [Terminé] Un pas après l'autre. - Page 2 EmptyLun 4 Avr 2022 - 18:58
Le gradé sembla réfléchir à ce qui venait de lui être exposé, puis il s’enquit simplement du nom de celui qui était venu lui apporter un problème supplémentaire.

« Théophile Castaing Monsieur. »

Nulle utilité à un quelconque mensonge ici, et puis Théophile assumait. Si il devait y avoir des conséquences, il ferait face. Tout en espérant que les Dieux veillent encore sur lui.

A peine son nom fut-il sorti de sa bouche, que le gradé changea de comportement et le traita comme un vieil ami. Malgré ses traits juvéniles, celui que les autres gardes venaient d’appeler « Capitaine », prouvait en cet instant qu’il n’avait pas démérité sa place. Rien n’indiquait qu’il s’agissait purement d’une comédie montée de toutes pièces en quelques secondes.

Tout ceux concernés avaient comprit le stratagème de ce fameux Capitaine et jouèrent le jeu. Bien qu’un œil averti aurait vu qu’ils étaient tous tendus, personne ne semblait avoir remarqué quoi que ce soit d’étrange. Le borgne se laissa retenir en arrière. Non seulement il ne voulait rien faire de plus qui pouvait attirer l’attention sur lui, mais en plus il devait bien ça à l’homme qui venait clairement de leur rendre un service que peu lui auraient consentis.
Savoir qu’il ne leur laissait qu’une nuit de répit n’aurait pas dû être un choc, tellement il paraissait logique que n'importe que veuille se débarrasser d’un problème aussi vite que possible. Pourtant, ce fut une preuve de plus que les choses étaient bien différentes de ce à quoi il se serait attendu.

« Compris Monsieur. »


Il acquiesça pour indiquer qu’il avait bien pris en compte sa recommandation et la salutation qu’il devait passer. En observant autour de lui, l’archer voyait que la suspicion était présente partout autour d’eux. Que ce soit certains gardes, ou certains habitants, leur méfiance pouvait presque se sentir physiquement. Des coups d’œils frénétiques, des tics nerveux, des paroles sèches, autant de preuves que l’accueil d’un convoi ne se faisait pas à la légère. Ce qui devait être une source de joie et de partage, était ici une source de d’inquiétude. Ce n’était pas une bonne nouvelle pour ses protégés.

Il écouta les peurs que ces derniers exprimaient, et tout coïncidait avec son ressenti à l’entrée du village. Pour autant, son rôle en tant qu’adulte, protecteur et trublion notoire était de les rassurer autant que possible.

« Je n’ai jamais vu autant de problèmes au Labret, encore moins de village qui réfutait l’ordonnance du Roi ainsi. Les mordus sont regardés avec méfiance par certaines personnes mais j’ai l’impression qu’ils y sont mieux acceptés. Le mieux est peut-être que vous puissiez vous installer là-bas après tout. De toute façon, je crois que ce sera la seule option étant donné que Sombrebois ne vous accueillera pas. Tant pis pour eux, ils n'auront pas le joie de goûter à ta succulente cuisine Laura. »

Oui, le Labret semblait être la seule échappatoire pour eux. Si il pouvait les amener jusqu’à Usson, ils auraient une chance de s’y installer et commencer un nouveau départ. En jouant bien leurs cartes, en trouvant les bon alliés, Laura pourrait presque vivre normalement, cachant sa morsure au plus grand nombre.

« Si Soeur Gudrun ne peut pas vous aider, je chercherais une autre solution, je ne vous laisserais pas d’accord ? Et même si nous venons à être séparés, sachez que je ferais le nécessaire pour vous sortir de là et vous aider au mieux. Ce que je vous ai dis à Balazuc hier, ce ne sont pas des paroles en l’air. »


Le milicien avait une responsabilité envers eux. Il n’avait pas de lien de sang avec la fratrie, et rien ne l’obligeait à tout ceci. Nombreux auraient été ceux qui les auraient laissés sans se retourner. Mais Théophile n’avait pas été élevé ainsi, et contrairement à ce que pouvait lui rétorquer une certaine rouquine au caractère piquant, il ne s’intéressait pas aux autres uniquement pour passer le temps. Tromper son ennui et sa solitude était bien une des raisons pour laquelle il aimait se mêler des affaires des autres. Mais c’était dans les épreuves que les liens les plus forts se créaient. Ce qui se tissait entre lui et les Lucet, personne ne lui enlèverait. Tout comme la confiance aveugle et le sixième sens qui le reliait à ses camarades de Coutilerie.

D’ailleurs, en cet instant, le regard de l’archer croisa celui de ses deux compères les plus proches. Un seul échange visuel et quelques signes de la tête leur avait suffit pour se comprendre.

« En attendant, restez avec Bart et Thibaut, je ne devrais pas en avoir pour longtemps. »


C’est ainsi que le milicien laissa ses protégés aller avec eux, alors qu’ils aidaient à décharger les chariots, et il alla s’enquérir sur la position du temple. Il avait fort à discuter avec Soeur Colère et il pria pour qu’elle se trouve bien sur place.
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Laura LucetCouturière
Laura Lucet



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un pas après l'autre.   [Terminé] Un pas après l'autre. - Page 2 EmptyJeu 7 Avr 2022 - 19:46
Aussitôt, Théophile parla du Labret aux deux adolescents. Acceptaient-ils vraiment les mordus quand ces derniers étaient déclarés ? Il y avait au moins une toute petite chance qui subsistait là où, clairement, Sombrebois ne voulait pas les tolérer entre ses murs. La petite boutade de l'archer sur sa cuisine fit un peu sourire Laura mais nul amusement n'était visible sur sa risette : l'inquiétude était toujours bien vive, le soulagement tant attendu encore repoussé par la méfiance des hommes. A Balazuc, elle aurait été tolérée, autorisée à rester à la condition d'une surveillance accrue ; ici, si elle était découverte, elle ne donnait pas cher de sa peau…

En évoquant la possibilité que Sœur Gudrun ne puisse pas leur apporter l'hospitalité tant espérée, Laura sentit ses épaules frissonner. Elle resserra l'étreinte de ses bras autour d'elle, sentant son couteau au travers du tissu de son châle, ses grands yeux bleus levés vers le milicien : ses mots rassurants lui faisaient chaud au cœur. La couturière avait du mal à croire que la veille encore, elle lui en voulait presque à mort d'avoir blessé Pierrick : à présent, elle croyait en lui plus qu'en quiconque d'autre – si l'ont exceptait son frère bien sûr – et il était bien le seul à laisser entrevoir à la jeune fille la possibilité qu’il y ait encore des personnes au grand cœur parmi les soldats du Roi, des individus qui n’exécutaient pas bêtement les ordres sans lever les yeux de leurs épées pour regarder en face les personnes atteintes par leurs actions guidées.

Avant de partir pour le temple de Sombrebois où Sœur Gudrun devait vraisemblablement se trouver, Théophile confia les Lucet à ses camarades. Les deux adolescents hochèrent la tête et se rapprochèrent de Barthélémy et de Thibaut mais sans se coller à eux non plus, préférant rester dans leur champ de vision sans interférer avec le rangement du convoi.

« - Si on arrive pas à rentrer au Labret… on ira où ? »

Pierrick regarda sa sœur, peiné. Il inspira profondément, grimaçant à cause d’une douleur piquante qui tira sur son ventre. Il tenta de faire preuve de plus d’optimisme que sa cadette.

« - Ils cherchent toujours du monde au Labret. SI on leur dit qu’on vient travailler, ils nous laisseront passer. »

« - Sans nous fouiller ? » chuchota Laura, abattue.

Pierrick resta muet quelques secondes.

« - On trouvera un moyen. »

Laura soupira : cette phrase commençait à l’agacer tant elle ne semblait fait que pour lui donner de faux espoirs. Ils avaient bientôt épuisé toutes leurs options et Théophile n’allait pas pouvoir veiller sur eux à longueur de journée. Les solutions s’amaigrissaient de jour en jour et la cuisinière commençait à se demander si les Dieux ne se satisfaisaient pas de la voir mourir à petit feu de désespoir.
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Théophile CastaingMilicien
Théophile Castaing



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MessageSujet: Re: [Terminé] Un pas après l'autre.   [Terminé] Un pas après l'autre. - Page 2 EmptySam 9 Avr 2022 - 20:04
Sur le chemin entre la petite pièce du temple où il venait de discuter avec Soeur Gudrun et l’entrée, le borgne avait eu le temps de réfléchir et faire le point après cette folle arrivée. L’adrénaline coulait encore dans ses veines mais il se força à se calmer. Autant le combat franc, face à un ennemi connu et qui représentait aux yeux de tous un danger, était quelque chose qu’il maîtrisait sans mal. Il savait garder ses émotions sous contrôle, tant qu’il savait quel était l’objectif. D’ailleurs, surtout depuis l’arrivée de la fange, il était rarement aussi serein que lorsque sa vision s’ajustait au-dessus de sa flèche pour viser. C’était même libérateur, de concentrer tout son être dans cet unique instant. Aucune pensée parasite ne s’invitait...

Aujourd’hui, l’adversaire c’était lui. Il était, car il s’incluait avec ses protégés, celui que l’on devait éliminer du village. Et c’était un sentiment des plus désagréables. Les souvenirs de l’exil et l’arrivée à Marbrume étaient assez semblables. La méfiance à l’égard du danger potentiel, la peur que ces nouveaux arrivants avaient suscité, était la même que celle qui était réservée aux mordus. Les questionnements autour du sort d’Eric et d’Alice se mélangeaient, et l’estomac de Théophile se tordit. Surtout quand il savait qu’il allait devoir laisser Pierrick et Laura seuls quelques jours, le temps de trouver un moyen de les faire partir. Pourtant, c’était au mieux. Les peu d’autres options qu’il avait étaient pire.

En sortant du Temple, Théo n’allait pas beaucoup mieux. Pourtant il affichait une expression beaucoup plus sereine que ce qu’il ressentait. C’était nécessaire, les enfants devaient déjà être suffisamment stressé sans qu’il n’ajoute ses propres inquiétudes. Le borgne les chercha du regard et les trouva un peu plus loin. Peu de temps avait passé depuis que le milicien avait laissé les Lucet à la surveillance de ses amis, mais le convoi avait eu le temps d’être entièrement rangé et ils attendaient désormais tous les quatre sur le côté.

« Merci les gars. »

Le Rouquin et Puceau acquiescèrent avant de partir. Ils avaient certainement envie de manger un repas bien chaud, ou tout du moins envie d’une bonne bière. Ce qui était tout à fait compréhensible après une journée dans le marais.
Vérifiant que personne n’était aux alentours, l’archer s’adressa tout de même à la fratrie à chuchotant.

« Soeur Gudrun va vous garder avec elle quelques jours, le temps que je trouve une solution pour vous faire partir d’ici. Venez, je vais vous présenter à elle. »

Il revint sur ses pas, s’assurant par des coups de têtes réguliers qu’ils le suivait jusque dans le bâtiment.

La suite:
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