Marbrume


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 Quelque chose besoin ?

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BramebreuilVieux con
Bramebreuil



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MessageSujet: Quelque chose besoin ?   Quelque chose besoin ? EmptyVen 22 Avr 2022 - 8:04
Alentours de Balazuc - 6 mai 1167



Pourquoi accabler de tourment un esprit déjà si tourmenté ? Voici bonnes questions à ne se poser que dans bon moment, car crois tu facile d’éviter ainsi tout du long de l’existence, les affres et tourment redondant qui nous colle tous à la couenne ? Bien sûr que non, vîl salmigond, je n’en fus point capable, tu ne le seras point plus. Et c’est pourtant questionnement récurent que voici, car chez toutes bonnes âmes venant me voir, toquant à ma porte, tirant sur ma bure et ma bite, elle revint, inlassablement. Comme les vagues sur le rivages, comme le vent dans les cimes, comme la chiasse dans les braies des incontinents. Qu’on t-il tous à penser que moi, simple erre, dispose de la réponse ? Ô si je la possédais, voici bien des années que j’éviterais de hanter les halliers. Seuls les dieux la possèdent, et je ne suis qu’un chercheur de vérité, qui n’en trouve sur son chemin, quelques miettes infimes de celle-ci.

C’est bien ainsi qu’une nouvelle fois, alors que mes pas me mènent prêt de la civilisation et de toutes les choses qu’elles renferment, bonnes et souvent mauvaises, je vais à la rencontre d’un destin que je ne connais pas mais qui m’attend toujours.

Une existence entière à fouiller les sentiers du Grand Cornu, et ce coquin malin est du genre à en tracer une moultitude, dans la fange et la boue, balafrant de ses sabots fourchus les sentes de la vie des hommes. Heureusement pour moi, ce faquin laisse parfois, une infime trace, un tout petit quelque chose qui permet d’entrevoir l’avenir qu’il laisse derrière lui, comme une trace de merde. En réalité, je ne suis qu’un pistard qui remonte perpétuellement la trace d’un cerf divin. Pas de quoi ce vanter, OU PRESQUE. Parce qu’on me paye, parce qu’on requiert mon attention, parce qu’on cherche mon savoir et parce que surtout, on me craint. Les hommes, depuis toujours, on peur de ce qui se cache à la lisière de la lumière, craignent ce qu’ils ne connaissent pas, sont terrifiés par mon monde. Aujourd’hui, plus que jamais.

Car je ne suis plus le seul monstre à hanter les bosquets et les breuils.

«  Soit proche et à proche mon enfant. Tu respires et puir plus fort que la laie en mal de rute qui s’ébroue et boue au beaux jours venus. Dit, dit au vieux Bramebreuil ce qui t’amène ? »

On vient rarement me rendre visite dans les alentours ou règne toujours la Fange ; mais le jour est bien levé et je reste au moins temps d’une journée. Ici ne pousse des herbes qui se doivent se recevoir la main de l’homme pour gagner quelconque utilité, ici l’ergot de seigle et le froment avarié, ici but de ma venue, mais point que. Quelques pièces en échange d’un service ne m’ont jamais fait de mal.





Dernière édition par Bramebreuil le Mar 24 Mai 2022 - 22:28, édité 1 fois
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Laura LucetCouturière
Laura Lucet



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MessageSujet: Re: Quelque chose besoin ?   Quelque chose besoin ? EmptyVen 22 Avr 2022 - 23:27
Le soleil brillait haut dans le ciel de mai, si haut que même les ramures des arbres étaient impuissantes à le cacher. Car l’astre inondait de sa lumière le Morguestanc et que la réserve n’allait pas tarder à tomber à sec, Liliane avait envoyé sa nouvelle collègue récolter du petit bois aux alentours du village de Balazuc, revenu depuis peu d’entre les marais dans le giron de l’humanité et où la vie reprenait lentement mais sûrement.

Laura n’a pas pu s’empêcher de faire montre de son inquiétude à la demande de la veuve, entortillant avec angoisse ses doigts dans sa longue tresse châtain clair tandis qu’elle avait tenté de bégayer quelque excuse pour rester cachée derrière sa marmite. Liliane avait beau l’avoir pris sous son aile et lui avoir trouvé un travail pour lui permettre d’obtenir un minimum de stabilité, la mordue ne pouvait s’empêcher de rechigner à la tâche qu’elle lui imposait : sortir des palissades de Balazuc et retourner à l’extérieur, là où elle vivait encore l’enfer quelques semaines auparavant.

Il lui avait pourtant fallu obéir : Liliane était gentille mais guère disposée à voir son programme être chamboulé. Il lui fallait du bois pour entretenir le feu qui lui permettait de nourrir tous les soldats du camp et elle avait trop de choses à faire de son côté. Il était donc nécessaire que Laura parte en expédition à la lisière des bois pour ramasser de quoi leur permettre de continuer de travailler.
La petite avait déjà fait deux allers-retours entre la tente de la cantine et la lisière des bosquets où elle cassait quelques branches pour récupérer de quoi satisfaire Liliane : la jeune fille avait beau charger au maximum ses maigres bras, il n’y avait pas encore assez de bois d’après la cuisinière en chef. Alors, une nouvelle fois, l’oreille paranoïaque tendue et l’œil inquiet attentif, elle retourna user les buissons, se griffer dans les ronces et entasser les brindilles craquantes dans le creux de son coude.

Alors qu’elle se penchait au pied d’un arbre rachitique pour récolter à son pied quelques rameaux, une voix s’éleva de la pénombre d’un aulne. Laura en fut si surprise qu’elle bondit, resserrant ses bras sur sa poitrine mais perdant une partie de sa récolte qui vint choir à ses pieds dans le sursaut. La bouche encore entrouverte sur l’inspiration brutale qui avait emplie ses poumons, ses yeux bleus rendus plus grand par le léger creusement de ses joues trouvèrent un visage marqué par le temps et la rudesse de la vie, une face parcheminée, pliée et repliée, sur laquelle une barbe blanche éparse et qui semblait n’avoir jamais vu un peigne poussait laborieusement en longs filins disgracieux. Enveloppé dans une bure aussi misérable que la longue robe ample, rapiécée et terreuse de Laura, cette dernière crut pendant un instant qu’il s’agissait d’un fangeux. Pourtant, la présence avait parlé et, jusqu’à preuve du contraire, le fléau n’était pas doué de parole.
Pourtant, face au fait qu’elle avait bel et bien affaire à un être humain, la petite couturière ne se détendit pas ; elle esquissa même un grand pas en arrière, revenant pleinement dans la lumière du jour, le visage tordu en une grimace où se mêlait dégoût et crainte. Ce n’était même pas tant l’aspect repoussant du vieillard qui lui provoquait cette réaction très spontanée, des vieux croûtons collant de sueur, de poussière et de selles, elle en avait vu des centaines lorsqu’elle vivait encore dans le giron parental, entre les murs protecteurs de Marbrume ; non, le fait qu’il s’agissait simplement d’un homme suffisait à l’effrayer et à la hérisser comme un chaton cherchant à intimider un molosse.

« - Ça se voit pas ? Je prends du bois pour le feu. »

Sur ses gardes, Laura resserra son emprise sur ce qu’il lui restait de branches dans les bras, le coin de l’œil épiant les barricades de Balazuc qui étaient à une centaine de pieds d’elle, jaugeant la distance au cas où la fuite se révélerait être nécessaire – ce qui avait de fortes chances de l’être dans tous les cas pour la peureuse jeune fille.

« - Et vous, vous faites quoi caché derrière un arbre ? »

La mordue était soupçonneuse : la dernière fois qu’elle était tombée avec son frère sur des hommes vivant dans les marais et se dissimulant au bénéfice des feuillages, ça s’était très mal fini pour eux et, même s’ils étaient encore en vie, ils n’étaient pas sortis indemnes de leur rencontre avec les bandits… Laura recula encore d’un peu, par sécurité, le sang pulsant dans ses veines avec force.
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BramebreuilVieux con
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MessageSujet: Re: Quelque chose besoin ?   Quelque chose besoin ? EmptyVen 29 Avr 2022 - 8:35



«  Point peur, pas peur, pas besoin, ici pas d’amis mais pas d’ennemis non plus petiote oiselle de moiselle a l’allure frêle. Qui te dis donc que c’est le Vieux Bramebreuil qui se cache derrière l’arbre et non l’inverse ? Crois donc moi, ce jeune frêne à moitié plus peur de toi que toi tu n’as, sans dire mot, il essaye faire oublier ses branchettes à l’habilité des tes phalangettes sachant avec grande clairvoyance que s’il se laisse prendre, elles finiront dans l’âtre. Crois tu qu'il apprécie ? Une éternité à grandir, se battre, vibrer contre une concurrence de tout instant, pour qu'en finalité, une badine venue de la ville lui ôte son mince trésor, celui qu'il est le seul à posséder, celui qui le fait vivre et respirer. Ô oui, le coquin alors se sert de moi comme d'un épouvantail servant à chasser les corbeaux, détournant leurs attentions sur quelques choses de bien plus effrayant. Cela marche, garde et regarde, tu n'as plus d'yeux pour notre jeune amis, tu ne mires que moi, rien que moi.»

Rire rauque et ritournelle sur moi même, pas de danse malhabile sur le coté, évitant belles racines qui faussent ma course, je présente du flanc droit à la jeune donze aux allures de fouines pas maligne. Pas assez d’hivers, pas assez d’été, trop de violence déjà dans ses mires opaques ; elle porte manifestement bien plus de poids que celui de son fardeau d’écorces et de brindilles. Des manières de renard à l’aguet, prêt à mordre et à se jeter dans les fourrés pour ne laisser dans son sillage qu’une trace de pisse pour brouiller les pistes. Des animaux réagissant ainsi, beaucoup sont-ils, des humains, bien moins.
Au moins maintenant me voit-elle, sans armes sans brame, rien que le vieil ère que je suis réellement, quêteur du cerf, grand fouilleur fongique.

«  Comme toi, je cherche. Sans trouver, mais je cherche. Pas de mauvaise rencontres aujourd’hui pour toi la Fouine. Tu es la dans mon bosquet, ici, pas de morts qui marchent, juste…nous. Le bois que tu tiens dans tes paluches, pour sûr qu’il soit sacré, comme tout ce qui se trouve dans le royaume du grand Cerf, oui oui. Approche un peu, donne moi quelques unes de tes branches, et je te montrerais ce qui t’attend. »

Lentement, carcasse se crisse et se plisse pour venir choir sur un gros rocher couvert de mousse. Il est mon trône du moment, celui sur lequel j’office, celui sur lequel je pourrais lire et déchiffrer. Elle me regarde avec toujours autant de peur, mais peut être à t-elle entendu parler du vieil ermite qui rôde autours des bourgs. Celui qui, si on le croise sous la bonne lune, sera vous dire un brin d’avenir.
Cela tombe bien, c’est bien moi même.





Dernière édition par Bramebreuil le Ven 6 Mai 2022 - 8:30, édité 1 fois
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Laura LucetCouturière
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MessageSujet: Re: Quelque chose besoin ?   Quelque chose besoin ? EmptyVen 29 Avr 2022 - 23:32
Le vieillard se lança dans une curieuse logorrhée qui fit froncer les sourcils de Laura. Le passage où il parla de l’arbre auprès duquel elle avait cueilli ses brindilles presque comme d’un être pensant et ressentant des émotions la fit particulier gamberger et spéculer sur la santé mentale du pauvre bougre en haillons. Après que ce dernier lui eut fait remarquer que la ‘stratégie’ du frêne avait fonctionné, il se mit à… danser ? La couturière fronça le nez à cette idée, les poils de la nuque hérissés par ce rire qui sonnait odieux à ses oreilles. Raide comme un piquet au milieu du chemin, elle se contenta de continuer de regarder le barbon, épiant toujours Balazuc du coin de l’œil. C’était normal qu’elle préférait se focaliser sur l’homme plutôt que sur sa cueillette, ne voyait-il pas où pouvait se trouver le danger d’après lui ? Cela n’avait rien à voir avec la supposée ruse d’un arbre…

Le vieux s’adressa de nouveau à l’adolescente, l’assurant que rien de fâcheux ne lui arriverait aujourd’hui, que cela fut de la main d’un homme ou des crocs d’un fangeux. Au surnom ridicule dont il l’affubla et à l’évocation des potentiels problèmes qui auraient – encore – pour lui tomber sur le coin du museau, le petit nez de Laura se pinça, imitant sans même qu’elle ne s’en rende compte la truffe frémissante du mustélidé craintif auquel elle était comparée.
Ses sourcils se haussèrent avec curiosité lorsque l’ancien qui se faisait manifestement appeler Bramebreuil parla du bois qu’elle tenait encore sur son bras gauche comme d’une chose sacrée, évoquant au passage Serus. Lorsqu’il l’enjoignit à s’approcher afin qu’il lui fasse un peu de divination, Laura n’obéit pas tout de suite : elle regarda le vieillard prendre place sur un rocher mousseux, une multitude de pensées s’entrechoquant derrière son front. Après quelques instants d’une réflexion intense, la jeune fille baissa les yeux sur son colis et, de sa main libre, prit au hasard quelques bourgeons pour les déposer dans les mains tendues du prétendu devin. Bien que Laura ne croyait plus vraiment au fait que les Trois en avaient encore quelque chose à faire des hommes, l’évocation du Père avait réveillé des fonds de dévotion que lui avait bien inculqué sa mère et qui étaient encore bien ancrés en elle. Elle ne priait plus guère mais ô grand jamais elle ne renierait l’existence de la Trinité.

Le mystique ancêtre se pencha donc sur le petit bois et, après quelques instants d’un silence que Laura trouvait pesant, elle ne peut s’empêcher de demander :

« - Vous… vous êtes un prêtre de Serus ? »

Elle avait entendu les plus anciens parmi la garde de Balazuc parler une fois au réfectoire d’un vieux fou qui vivait manifestement dans les bois alentours. Un croulant étrange mais qu’ils disaient inoffensif et que, curieusement, les petites brutes du régiment n’avaient jamais osé martyriser comme ils le faisaient d’ordinaire dès qu’ils percevaient une once de faiblesse chez une personne dont ils croisaient la route. Était-ce l’homme qu’elle avait en face d’elle, voûté sur des brindilles étalées devant lui en un schéma complexe, compliqué et sans queue ni tête ? Il fallait dire qu’il ne devait pas y avoir des centaines d’ermites qui peuplaient ces marais et ces bois, surtout depuis l’arrivée de la Fange.
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MessageSujet: Re: Quelque chose besoin ?   Quelque chose besoin ? EmptyLun 9 Mai 2022 - 8:39



Raclement de gorge, bruit de glotte, glissoire humide et grosse glaviote qui s’extirpe d’entre mes vieilles lippes pour voler fissa tout droit en direction de la donze. Un projectile, ou presque, qui aurait put l’assommer si elle s’était tenue dans sa course ; j’en avais déjà tué par le passé, des plus vaillante qu’elle et avec bien moins de salive.
J’ai frappé fort et vite, avec toute la rapidité et la bile possible ; une réaction épidermique, plus forte que moi, plus ancienne que le monde, plus vieille que mon âme et ça, à la simple évocation d’un mot. Prêtre. Quel curieux résumé, quel abjecte description, qu’elle impossible et terrible réalité. Je suis tout, absolument tout, j’ai tout été, mais plus jamais cela je ne serais.

«  Pwouah. Retire donc va ! Me prends tu vraiment pour un picotillon ? Trouves tu toi que le vieux Bramebreuil ressemble à un de ces cureurs de pavés des temples ? Mycoses et champignons, pestes et bubons, pwouah, wouah. »

Recroquevillé comme une araignée d’on la toile est faite de pierre, mes longs membres s’arquent, ma tête se recroqueville entre mes épaules voutées ; je ressemble à un de ces monstres qui ne naissent que dans les imaginaires les plus pervers, et plus aucune bonhomie ne s’affiche sur ma face antique.
Mais comme tout les orages, ils passent, et certain plus rapidement que d’autres. La Fouine qui me fait face ne peut savoir, ne peut connaitre, elle n’arpente ce monde que depuis trop peu de temps, une bourrasque dans les hautes herbes, une pluie de printemps, rien d’on on se souvienne très longtemps. Alors je me déride, décide d’expliquer plutôt que de renfrogner.

«  Ceux là ne connaissent rien, tous ils se fourvoient, pensant que c’est entre leur hauts murs qu’ils vont trouver quelques réponses. Mais le Grand Cerf lui, vie belle est bien dans la forêt, elle est son royaume, ou d’autre se trouver alors pour un de ses serviteurs ? Oui petite femme à fouine de face, c’est bien Serus que je sers. Depuis des temps d’avant les pères de tes pères, depuis avant que le monde ne soit monde.  »

Nerveusement, je trace d’une main tremblante un petit cercle de charbon sur la pierre plate sur laquelle je me trouve. Un geste que j’ai pratiqué tant de fois, que la figure géométrique est quasi parfaite, comme tracé par un brillant faiseur de plans. D’instinct, ma main à touché le nord pour tourner en direction du sud avant de remonter sur son pôle ; j’accueille ainsi les éléments. Mon savoir se pratiquait souvent «  avant ». Quand ceux des temples étaient encore libres de leurs mouvements et qu’ils n’avaient pas encore céder aux péchés de luxures et de paresses. Je ne suis au fond qu’un gardien, celui d’une mémoire plus vieille que la mienne et qui prendra peut être fin avec moi. Mais j’ai encore moult choses à accomplir avant de rejoindre les Dernières futaies.
Une tension dans l’air m’indique que le rituel est prêt, quelque chose à changer entre les arbres, comme si tous avaient décidé de stopper leurs trinitrins habituel. Ils nous regardent, sans nous juger, mais en se questionnant eux aussi, trop conscient de ce qui est sur le point de ce jouer.
Plus aucuns n’oiseaux ne chantent et ma voix de crapaud balafre l’air.

«  Si tu souhaites savoir ce qu’il te réserve, approche la Fouine, approche et je te montrerais ce que raconte ton bois. »




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MessageSujet: Re: Quelque chose besoin ?   Quelque chose besoin ? EmptyJeu 12 Mai 2022 - 23:47
A sa naïve et intimidée question, Laura eut pour toute première réponse un mollard particulièrement vif et lesté. Celui-ci vint s’écraser à seulement quelques centimètres devant ses pieds et déclencha une nouvelle réaction de dégoût chez la jeune fille qui recula vivement tout en adressant un regard torve au vieux croûton. Après avoir libéré sa bouche de son immonde glaviot, le Bramebreuil cracha tout le mépris que le mot prêtre semblait lui inspirer. Ah ça non, il ne ressemblait évidemment pas à tous ces hommes que Laura avait déjà vu officier au temple de Marbrume voire directement dans les rues fourmillantes de la ville. Non, cet amas de membres malingres, fripés et couvert de haillons ne pouvait rien avoir en commun avec ces hommes et ces femmes en humbles robes déclamant avec ferveur leurs prières au pied des grandes statues des Trois.

L’air d’araignée que le vieillard prit comme pour faire fuir encore plus vite l’étiquette de curé que Laura avait malencontreusement tenté de lui attribuer pour retrouver un semblant de marque avec l’étrange personnage ne dura pourtant pas longtemps. Les yeux écarquillés se refermèrent et les mains noueuses commencèrent à jouer avec la terre tandis qu’il lui affirmait qu’il servait Serus mieux que n’importe qui en arpentant directement son royaume. La sœur de Pierrick haussa un sourcil circonspect, guère convaincue, pourtant, elle ne pensait plus à fuir désormais : était-ce parce qu’il était très âgé, manifestement pas bien sûr sur ses pieds et qu’il prêchait la parole du Père ? Quoiqu’il en soit, lorsqu’après de nombreuses secondes, le Bramebreuil l’incita à s’approcher, l’adolescente s’exécuta, non sans certaines précautions. Si ses yeux suivaient l’étrange rituel de l’ermite, ses jambes fléchies, elles, se tenaient prêtes à tout instant à se redresser et à courir en direction de Balazuc. Laura se croyait depuis longtemps abandonnée des dieux mais sa foi vivait toujours au fond de son cœur. Peut-être Serus allait-il pencher son regard bienveillant sur elle là, maintenant ? Un fond d’espoir qui ne savait pas trop quoi attendre brillait dans les grandes prunelles bleues de la jeune fille.
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MessageSujet: Re: Quelque chose besoin ?   Quelque chose besoin ? EmptyJeu 19 Mai 2022 - 8:35



Ferré que voila la Fouine.

Prise dans l’étau incompressible du doute et du questionnement ; comme le sont généralement toutes les âmes pieuses de ce monde, en quête perpétuel de réponse à des questions qu’ils ne se sont pour la plupart, jamais posé. Bien belle chose que cela, sans quoi point de saindoux sur mes miches, point de miches non plus d’ailleurs. Car bien que la sagesse du Grand Cerf soit universel, plutôt bienfaitrice et acquise à tous, rien ne se fait gratuitement et pour chaque part de vérité, j’affirme mon dût. Mais celui la viendra plus tard, quand il sera trop tard pour reculer, trop tard pour penser ne serait ce que fuir face à l’évidence. Jeunotte ne le sait pas encore, mais elle apprendra, comme tout ceux ayant fait l’expérience avant elle.
La peur n’a pas totalement disparut de ses grandes mires écarquillés qui me dévisagent comme si j’étais moi même un non-mort toujours vivant, mais je ne peux point lui en vouloir, qu’à t’elle réellement vu de cette existence ? Qu’a t’elle sut ? Qu’a t’elle chercher à comprendre ? Point ne suis je dans sa caboche et point n’ai je besoin d’y être : la lecture de ses rides à peines existantes me donnent toutes les réponses nécéssaires.

Je garde pourtant mes conclusions pour moi, tout à l’intérieur de mon être fripé, car un autre travail m’attend. Point du genre à vendre du vent, car c’est aux dieux que je m’adresse et il ne fait jamais bon ménage de mentir avec les dieux. Toujours ils réclament eux aussi leurs paiements et rarement s’agit de quelques miettes à se mettre sous la dent. De véritable gageur, toujours prêt à prendre dix fois plus que l’offert. Alors il est bon de s’appliquer quand on en vient à taquiner la question les concernants. Religieusement, car c’est bien le mot, je rassemble, casse, asticote, prépare et béni le bois ; mon oeuvre est simple, je l’ai mainte fois faite, les gestes sont mécaniques et calculés. Choississant vingts cinq morceaux précisément, d’un petit canif, je m’évertue à graver les symboles qui me sont familier dessus.

«  Voici les signes, voici la langue du sabot, voici les vieux récits, les présents et les nouveaux. »

Une annonce rituel à nouveau, mais que l’on se doit de dire quand il le faut. Mon travail est minutieux et précis, j’envois voler quelques copeau sur ma pierre plate qui me sert de trône. Mon travail prend du temps, mais pas assez pour que la Fouine ne s’ennuie. Alors terminé, je jette les morceaux à mes pieds et parle à nouveau.

«  Trois fois pour les Trois, Trois fois pour l’une qui vint dans ces bois. »

Mes paluches tremblent au dessus du petit fagot formé par les branches, j’inspire fort, tel le cerf qui brame, je crache comme la vipère et grogne comme le goret. J’attend et reçois, comme un feu de paille, la force me prend et guide mes bras, retournant le premier, dévoiler son signe.

« Querc. L’Arbuste. Oh sombre passé que voila car le Pommier oriente de malchance les âmes qui y sont confronté. Tu as vécu fort traumatisme, ta vie, si jeune, déjà entaché d’une intense frustration. Pour t’en prévenir, sur qu’il faudra se replier, prendre soin de toi, trouver la caverne et l’abris. Je comprends mieux, bien mieux…

Pourtant, pas le temps de s’arrêter ainsi ; toujours devoir continuer, car tant que point finit, pas de conclusion, c’est ainsi. Je retourne le deuxième et il se dévoile.

...Koad. Le Bosquet. Ainsi tu l’as trouvé. Inutile de te lamenter plus longtemps sur ton sort la Fouine, la sagesse tu apprendras en te détournant de tes peurs et de tes illusions. Ce monde est ton havre, que tu le veuilles ou non. Cherche à savoir, toujours, pour éviter de t’enfoncer dans les limbes…

Excité comme jamais. Le tirage prend fin avec le troisième, car il dévoile l’avenir. C’est la mon instant préféré, ou le temps semble suspendu à la queue du Grand Cerf, ou l’âme attend de savoir ce que le destin lui réserve ; il arrive, je le tire et m’exclame !

...Besan. Le Bouleau. Oh. Oh. Fautes pardonnées, âme purifié. L’Arbre blanc. Le Faisan. Voici ce que te prédis la voie du sabot : un nouveau départ. De la boue et de la lie tu t’extirperas. A la force de l’esprit, libéré des mauvaises envies et de tes chaînes, tu iras droit avant. Qu’a toi il ne tient de faire preuve de discipline et d’emprunter le chemin qui s’ouvre à toi. Affronte et tu survivras. »

Aussi vite que venu, je referme les poings et me met à trembler du haut du crâne à la base des pieds. La force me quitte et avec elle, un peu de ma propre énergie. Cela fait toujours ainsi. Machinalement j’éparpille les brindilles, je sue à grosse goutte, pourtant, il fait froid. Le Grand Cerf à rejoint le hallier et me laisse à nouveau seul, seul avec la jeune femme. Grinçant, je questionne.

«  Voici ce que te réserve le Cornu. Tu ne peux fuir son regard, aucuns de nous ne le peux. Réjouis toi, car l’avenir semble plus radieux que le temps passé. Les temps ou tu cherchais continuellement à cacher ton bras sont bientôt terminé. Oui. Bientôt. »

Un sourire sans joie et sans dents s’affiche sur mes lèvres.
J’ai deviné.






Dernière édition par Bramebreuil le Ven 20 Mai 2022 - 7:39, édité 1 fois
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Laura LucetCouturière
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MessageSujet: Re: Quelque chose besoin ?   Quelque chose besoin ? EmptyVen 20 Mai 2022 - 0:40
Le Bramebreuil sortit un petit couteau émoussé et s’évertua à marquer chaque branchette d’un symbole reconnaissable et mystique aux yeux de la sœur de Pierrick ; minutieusement, tous les petits bois furent marqués et soumis au rituel et aux marmonnements du vieillard qui finit par déclarer après un certain moment que les signes étaient prêts à dévoiler leur vérité. Inconsciemment, les doigts malingres de Laura se resserrèrent autour du petit fagot qu’il lui restait dans les bras : oublieuse de sa mission initiale, elle suivit attentivement des yeux le petit manège de l’ermite, retenant son souffle sans même s’en rendre compte. Soigneusement, le vieil homme étala ses bâtons divinatoires et, après s’être dégagé une nouvelle fois les bronches, il reprit la parole d’un ton changé, moins sujets aux chevrotements et aux exclamations soudaines, presque docte mais toujours aussi guttural.

Au premier rameau retourné, Laura eut le sentiment que le Bramebreuil entendant directement ce que lui rapportait Serus. Un sombre passé malchanceux, ça oui, la définition ne pouvait être plus claire. Les fines lèvres serrées et pincées de Laura se cachèrent derrière la manche rigide de saleté de sa robe : ce passé-là n’était pourtant pas si lointain mais il donnait presque l’impression qu’avant, rien n’avait jamais existé. La petite couturière n’eut toutefois pas le loisir de repenser aux temps heureux de son enfance que l’ermite s’emparait déjà du deuxième bourgeon gravé.

Les sourcils de l’adolescente se froncèrent : était-ce bien de l’abri dont il parlait ? De cela, la jeune fille était soudain beaucoup moins sûre. Balazuc allait-il devenir sa nouvelle maison ? Allait-elle s’installer définitivement dans ce campement perdu au milieu des bois et des marais, entourée majoritairement par ces miliciens qui l’avaient jeté hors de chez elle sans ménagement ? A moins que ce ne soit pas de ça dont parlait le vieux exactement ? Difficile de savoir avec des paroles qui sonnaient de manière tellement sibyllines aux oreilles de Laura.

Au troisième et dernier rameau tiré, le Bramebreuil parut se ranimer et s’écria, dévoilant avec un étrange mais certain plaisir ce qu’il voyait comme étant l’avenir. Le petit nez de Laura réapparut, levé de sa manche par les premiers mots encourageants du mystique. Se relever, repartir de zéro… c’était tout ce à quoi elle aspirait avec Pierrick... était-ce bien là le futur que Serus voyait pour elle et son frère ?

Les grands yeux muets de stupeur et d’espoir de Laura ne quittèrent des yeux les branchages que lorsque l’antique devin les éparpilla d’un geste presque las, la main tremblante de fièvre. La petite couturière envisagea un instant de récupérer le petit bois mais, sans qu’elle ne se l’explique pourquoi, sa main ne décolla pas de la récolte qu’elle avait gardé dans les mains : c'était peut-être l’idée superstitieuse de prendre le risque d’offenser le Père et son curieux et inquiétant interprète en s'emparant de leur médium de communication qui retenait son bras.
Le vieillard avait retrouvé sa voix d’outre-tombe. Doucement, Laura se releva : quelque chose avait de nouveau changé dans l’air et lui disait qu’elle ferait mieux de ne pas s’attarder davantage en compagnie de l’ermite des marais. Au dernier moment, celui-ci la happa avec une remarque qui glaça le sang de la sœur de Pierrick, une remarque dite avec un tranquille mais terrifiant sourire. Un frisson parcourut l’ échine de la jeune fille, son visage poupin se referma de nouveau et sa main droite glissa instinctivement sous son fagot pour serrer son avant-bras gauche.

« - Comment…? »

C’était particulièrement précis comme commentaire… comment savait-il ? Avait-il entendu les miliciens commenter sa présence à la cuisine de Balazuc ? L’avait-il vu dans son exil ? Ou encore était-ce Serus qui lui avait soufflé l’information entre deux gravures sur bois ? Laura n’en savait fichtre rien mais, maintenant, elle était encore plus désireuse de rentrer au campement. Liliane allait finir par se demander si elle s’en sortait avec sa récolte.

« - Je dois rentrer, on m’attend. »

La jeune fille se recula, se rapprochant de la partie illuminée du chemin.

« - Merci… je crois. »
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MessageSujet: Re: Quelque chose besoin ?   Quelque chose besoin ? EmptyMar 24 Mai 2022 - 22:18



«  Ne remercie pas, surtout point quand c’est destin qui te fais croiser la route ; rien de plus naturel, rien de plus nécéssaire. Toi la Fouine, n’a point conscience, mais si tu es la, c’est parce que tu le dois. Comprends tu ? Peut être, peut être pas. Sur de sur que l’on t’attend la Fouine, partout ou tu vas on t’attendre et te tendre prêt à compter sur toi et tes minimes toujours prêtes à prêter de la poigne aux besogneux désireux. Ô j’ai vu, tout vu, revu, tout lu. Ne tarde pas mais point ne prend le bois que tu tenais, celui la est consacré à d’autres fins que de finir dans le brasier. Tu devras t’affaisser à nouveau, retrouver et retourner sur ton sentier, d’ou tu viens pour trouver de quoi nourrir un âtre qui ne t’attend que toi. Fais bien attention, ceux qui sont à l’avant ne sont pas forcément tes amis ; tu trimes dans le vent pour des esprits qui te négligent, des gens qui te dépassent. Attention aux choses qui arrivent : elles sont telles des serpents rampants entre les pierres de l’existence, prête à mordre quand tu trébucheras, prête à t’injecter un venin pernicieux, inodore et au combien meurtrier. Il te faudra affronter maintes épreuves, et tu risques de mourir, certainement. Il te faudra devenir la vipère qui mange d’autres rampant, il te faudra faire tant de chose. Je le sais, mais je ne peux rien dire, niet, pas un mot. Tu devras faire par toi même les expériences qui t’attendent, moi je ne suis qu’un messager, berger d’un sabotier à grande corne toujours prêt à faire quelques carabistouillerie aux vivants. Je te parle de connaissance, car j’en ai vu moult comme toi, égarée sur des routes sans noms dans des pays sans nom ; beaucoup n’ont pas passé l’hiver, d’autres ont en bien trop , mais toutes possédaient la même volonté, celle de vouloir savoir ce qu’il y avait au devant. A ce jeter tête la première dans les pièges qu’elles connaissaient ou à s’en prémunir une existence entière, deux écoles, deux styles, deux méthodes. Elles mangent, prient, aiment, mais meurent toutes à la fin. C’est la l’ultime conclusion de chaque acte, tout dépéri et péri, ne subsiste en réalité que l’éther, l’essence même de l’existence, la sève qui coule, circule et recoule entre les troncs et les racines. Nous ne sommes qu’une toute petite partie d’un grand tout, d’un grand au delà, d’un plan d’on les architectes ont perdus le tracé. Il nous est impossible d’en dévier, et pourtant, parfois nous bavons, dépassons du cadre, rayon la feuille et tâchons le vélin. Voici notre seul marge d’erreur, je l’ai appris à force de vécu et disons, que j’ai souvent tâcher. On aurait peut être dut me surnommer ainsi d’ailleurs la Tâche, un surnom qui m’aurait plu tout autant, ne crois tu pas ? Mais les gens du peuple sont tous si superstitieux
, si craignant, si prévisible. Tout comme toi. A des lieux à la ronde je t’entendais respirer comme un goret fouillant la fange. Toi qui porte sa marque. Toi qui te transformeras un jour en loup pour les loups que tu sers. Belle ironie tu ne penses pas ? Alors ne me dis pas merci, ne me di…
 
»

Je relève du chef, la petite à disparu, me laissant seul, moi et mes langes, moi et mes préceptes, moi et mon unique vérité. Je grogne.

«  Petite peste. »




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