Marbrume


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 Un crime peut être une œuvre d’art

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Théophile CastaingMilicien
Théophile Castaing



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MessageSujet: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptySam 2 Juil 2022 - 16:05
Marbrume, le 20 Novembre 1166

La pluie tombait dru sur la ville-refuge. L’automne avait balayé la chaleur de l’été depuis plusieurs semaines et le froid semblait rendre le crime propice. Il est vrai que la nuit devenant plus longue au fur et à mesure que les jours avançaient, donnait une fenêtre de tranquillité plus longue aux malfrats en tout genre.

Le milicien Simon Puech, démontra encore une fois qu’il avait totalement mérité son surnom de Grincheux pendant qu’il accompagnait le reste de sa coutilerie sur le lieu de leur mission du jour. La rue et cellse qui l’entouraient ne cachait aucunement que ceux qui y habitaient vivaient dans la pauvreté et la misère. Rien de vraiment étonnant depuis l’exil massif vers Marbrume. Rien qui n’était plus normal depuis plusieurs mois…

« Si je reçois encore un jour de plus les même seaux d’eau sur la tête je vais me transformer en une de ces créatures marines d’Anür. »


Un grand borgne l’étudia d’un œil attentif, n’hésitant pas à se pencher sur son visage.

« Mais oui ! Attends je crois que t’as une écaille qui pousse là. »

L’index de Théophile s’approcha de la joue de son camarade alors qu’il prononçait ce constat d’un air très sérieux.

« Oh la ferme crétin ! »

Pendant que Grincheux repoussait vivement ledit crétin, et que celui-ci éclatait de rire, leur coutilier leva les yeux au ciel. Il priait intérieurement pour que les Trois l’aident à supporter avec patience les bras cassés de son équipe une journée de plus. Mais Antoine Cazaux n’était pas un rêveur optimiste, il savait que ça ne tiendrait probablement pas plus d’une heure supplémentaire. En attendant, ils avaient une mission. Et même si ils étaient de parfaits idiots parfois, ses hommes étaient des professionnels. Lorsque les circonstances l’exigeaient, ils oubliaient leurs querelles et se recentraient sur le travail.

« C’est ici. »

Chef s’arrêta devant une maison à l’allure aussi délabrée que ses voisines. La porte s’ouvrit et une femme, d’âge moyen, se présenta face aux six hommes. Ses yeux rouges et gonflés montraient qu’elle avait pleuré. Ils étaient encore brillant, preuve que les larmes pouvaient de nouveau s’écouler à tout moment.

« Merci d’être venus ! »

Elle s’écarta pour que les miliciens puissent entrer. Par habitude, l’archer était l’un des derniers de sa troupe. Il laissa son regard errer dans les alentours avant de s’engouffrer dans l’habitation. Il rencontra une paire de jolis yeux verts et son cœur palpita un instant. Alice avait aussi les yeux de cette couleur, même si la teinte différait. Le visage qui les entouraient avait cette même note de douceur qui réchauffa sa poitrine, même si il différait de celui de sa Douce.

Avant de disparaître dans la petite maison, le milicien fit un clin d’oeil à la jeune femme. Une fois qu’il rentra, il senti un courant d’air dans ses jambes et remarqua un garçon de quelques années s’échapper par la sortie.

« Emile ! »

C’était la maîtresse de maison qui cria le nom du garçonnet, lançant sa main devant elle comme si cela pouvait arrêter sa fuite. Elle finit part soupirer et une nouvelle larme finit par tomber sur sa joue. Elle la sécha dès qu’elle la senti.

« Il a dû aller chez notre voisine... »

« Pourquoi nous avez-vous appelé Madame ? On nous a parlé d’un meurtre. »

Chef parla d’autorité, et la femme acquiesça. Elle se tourna pour atteindre la porte en face d’eux. Par la fenêtre, le borgne rencontra de nouveaux ces pupilles émeraudes et il pencha la tête, comme pour l’interroger sur l’intérêt qu’elle pouvait lui porter mais il dû de nouveau se détourner pour rejoindre ses camarades. La petite pièce qui servait de chambre était trop petite pour tous les accueillir et Théophile regarda par-dessus l’épaule de Puceau pour se rendre compte par lui-même du crime pour lequel on les avait fait venir.

Lorsque sa pupille vive capta l’horreur devant lui, il comprit pourquoi aucun de ses camarades ne pouvait parler. Là sur le lit, gisaient deux autres enfants. Une fillette qui devait avoir quelque chose comme une dizaine d’années, et un adolescent de quelques années de plus. Leurs corps avaient été maltraités d’une façon qui donnait à Théophile la nausée. Pas une seule partie de leur corps n'était épargné de bleus, qui s'étailaient sur leur peau diaphane dans un camaïeu morbide. Même autour de leur cou...Et signe d’une cruauté certaine, leurs yeux avaient été crevés, laissant des orbites sanguinolantes.

« Mes enfants... »


Cette fois-ci elle ne put retenir le cri déchirant qui était resté coincé dans sa gorge jusqu’ici. La mère des pauvres enfants tomba à genoux devant le lit et laissa s’échapper son chagrin. Il fit écho dans la poitrine de tous les hommes présents et ils comprirent que leur mission était d’une importance capitale.
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VioletteFille d'Anür
Violette



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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyLun 4 Juil 2022 - 1:20



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Le Labourg, Marbrume | 20 Novembre 1166.

Cette journée avait commencé comme n’importe quelle autre journée depuis l’entière disparition de sa famille le jour du couronnement. Une journée automnale où le ciel pleurait sans discontinuer, lavant les allées sales du Labourg, débarrassant les ruelles étroites de leur montagne de détritus d’origine diverses et variées, nettoyant la crasse accrochée aux façades des bicoques branlantes.

Violette ne passait que peu de temps au Labourg avant ça, mais avec l’amoindrissement de la clientèle dans les zones malfamées entourant le désormais Chaudron, ancien lieu de son foyer, et la recrudescence des réfugiés suite au naufrage du Firmament il y a deux mois de ça, beaucoup de choses avaient changés, dont ses habitudes. Elle qui vendait son corps pour nourrir une quinzaine de personnes, se retrouvait désormais seule à errer dans les rues en quête d’un pigeon à extorquer contre un peu de chaleur humaine qu’elle ne pensait plus posséder.

Elle en était là. A soupirer à fendre l’âme en regardant par la fenêtre de la minuscule chambre d’auberge qu’elle avait pu trouver, laissant le dernier idiot en date trouvé au détour d’un chemin se rhabiller pour quitter les lieux. C’est de cette lucarne, à peine l’aube commençant à pointer le bout de son nez au travers des épais rideaux aqueux, qu’elle vit une ombre massive prestement se faufiler d’une des maisons voisines. A ce moment, elle ne s’en inquiéta pas. Ce n’est pas comme si ce n’était pas chose désormais courante de voir des hommes se carapater à peine les premiers rayons du soleil levé pour aller on-ne-sait-où. Comme si c’était quelque chose d’honteux de passer une nuit dans des bras chaleureux et aimants, même si ces derniers n’étaient chaleureux et aimants qu’uniquement contre quelques pièces d’or. Tout n’était que factice.

Un claquement de porte. Un dernier soupir. Et Violette retourna à ses occupations matinales.

Il fallut attendre encore quelques heures avant que des hurlements se fassent entendre. Avant que des paroles criées incompréhensibles ne vinrent heurter les oreilles de la douce lionne esseulée. La curiosité, sa si maladive curiosité, la poussant à se jeter aux carreaux, ouvrant d’un mouvement du poignet la fenêtre devant laquelle elle était positionnée quelques tours de clepsydre auparavant. Les clameurs provenaient de la maisonnette qui avait attiré ses grands yeux verts embués de lassitude et de fatigue.

Sans prendre la peine d’y réfléchir ne serait-ce qu’une fois, la jeune femme enfila ses bottillons de cuir brun, s’emmitoufla dans son châle mauve affadie par les années et sorti en trombe de la chambrée, rejoignant d’un pas leste la bicoque semblant sortir d’une flaque boueuse. Et elle se figea. A quelques encablures seulement du drame. Observant d’un œil à la fois inquiet et absent la scène se déroulant sous ses pupilles smaragdines, lorgnant l’arrivée des miliciens qui avait été appelés. Pourquoi est-ce que ses iris vagabonds choisirent de s’accrocher au dernier d’entre eux ? Elle n’en avait aucune idée. Mais elle ne pût empêcher un mince sourire d’étirer ses lèvres lorsque celui-ci lui offrit un clin d'œil, l’ayant visiblement remarqué lui aussi.

Resserrant le carré de laine épais trônant sur ses frêles épaules autour de son corps menu, elle se faufila entre les silhouettes curieuses, profitant du court moment de surprise offert par la garçonnet pour se rapprocher de la lucarne, scrutant l’intérieur de la pièce sans réellement savoir ce qu’elle cherchait. Des réponses peut-être ? Elle savait pertinemment que les miliciens ne se déplaçaient pas pour rien, surtout dans un quartier aussi déconsidéré que pouvait l’être le Labourg. Il ne fallait pas rêver. Ce devait être suffisamment horrible pour les voir pointer le bout de leur museau dans les parages, ou du moins, ne pas concerner quelqu’un comme elle. Des cadavres de prostituées éventrés, défigurés, disloqués… Elle en avait vu plus d’un et personne ne s’était bougé pour ça. Elles étaient négligeables.

Cependant, cela n’empêcha en rien la Lionne à la crinière ébène et ivoire de ressentir un vif pincement au cœur et sentir les larmes monter à ses prunelles malachite en entendant le cri de tristesse mêlé de désespoir surgir de la bâtisse. S’il y avait bien une chose à laquelle l'on ne devait pas toucher, c’était les enfants. Et pourtant…

Elle resta là, sous la pluie torrentielle, les gouttes de pluie se mélangeant aux larmes salées débordant de sous ses paupières entre closes, ne laissant filtrer à travers la fente qu’une mince ligne d’un vert printanier figés sur les vitres la séparant de l’intérieur.
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Théophile CastaingMilicien
Théophile Castaing



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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyMar 5 Juil 2022 - 17:38
La stupeur avait figé le temps dans la petite maison. Même l’archer avait du mal à détacher son regard de la cruauté qu’il avait sous les yeux. Ce n’était pas la première fois qu’il pouvait mesurer à quel point certains humains étaient pourris, mais avec sa nature optimiste il avait parfois tendance à l’oublier. Papa s’approcha de la mère éplorée et, une fois son genou au sol, il posa une main compatissante sur l’épaule. Cette marque de soutient devait être l’une des rares qu’elle recevait car dès que la chaleur du milicien s’était posé sur elle, elle se jeta dans ses bras pour y déverser son chagrin.

Chef soupira. Facile de comprendre qu’il pouvait s’imaginer ses filles à la place des deux petits. Ses pupilles en disaient long sur ses sentiments. Et pourtant, il en fit abstraction pour pousser ses hommes dans la pièce principale, ne laissant que le lancier pour être une oreille attentive. Papa était quelqu’un de calme et ça ne lui déplaisait pas de recevoir les confidences. Il préférait ça à aller secouer les coupables présumés.

« Elle n’est pas en état de parler mais il faut qu’on avance quand même. Tastet, je te laisse faire le tour de la maison pour voir si tu trouves quelque chose. Puech tu va avec lui. Castaing et Dubost vous allez m’interroger le voisinage. Essayez d’en dire le moins possible. Même si ils ont tous du être alerté, je veux pas qu’ils puissent en savoir plus que nécessaire. Je reste avec Barthas, on va essayer de la calmer et apprendre quelques trucs. Et essayez de retrouver le gamin aussi. Elle en a perdu deux, pas la peine que le troisième y passe aussi. »

Tous acquiescèrent. Pour le moment, il n’y avait pas grand-chose de plus à faire. Le Coutilier fit le tour de la pièce pour fermer les rideaux pendant que Le Rouquin commençait à pister des indices dans la pièce. L’archer fit signe au cadet de la coutilerie pour qu’il l’accompagne dehors. Les quelques minutes qu’il leur avait fallut pour prendre connaissance du cas qu’il auraient à traiter n’avait pas suffit pour que le ciel cesse de leur faire tomber un océan sur la tête.

Théophile passa une main dans ses courtes mèches pour les dégager de son front et les plaquer vers l’arrière. Cela lui permit de faire un tour d’horizon et de chercher quelqu’un de suffisamment curieux pour braver les éléments. Si plusieurs zieutaient depuis les fenêtres des bâtiments environnants, peu avaient osé sortir. Il y avait un couple âgé à quelques mètres et la jeune femme dont il avait croisé le regard plus tôt. Connaissant la timidité de son jeune camarade avec les représentantes du beau sexe, Théophile lui montra le couple âgé du doigt et se dirigea lui-même vers la jolie fleur qui était en train de tremper ses habits à rester ainsi sous le déluge.

« Excusez moi Demoiselle, puis-je vous poser quelques questions ? Je pense que vous avez pu vous en douter, mais je suis de la milice. Voulez-vous que l’on s’abrite un peu ? Histoire que vous ne soyez pas totalement mouillée. Je crains que pour moi il ne soit trop tard. »


Positionnant sa main près du bras de la jeune femme, prêt à la guider, et il lui indiqua un pan de bâtiment un peu plus à l’abri, où la terre était encore sèche. Le milicien avait eut un léger rire en même temps qu’il lançait sa plaisanterie, espérant faire disparaître les larmes qu’il savait couler au milieu des gouttes de pluie.
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VioletteFille d'Anür
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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyLun 11 Juil 2022 - 1:12



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Le Labourg, Marbrume | 20 Novembre 1166.

Elle ne sut combien de temps elle demeura plantée là, devant cette fenêtre, à regarder le dos des miliciens qui occultaient sa vue de l’indicible horreur qu’elle devinait se tramer dans la pièce du fond.Quelques minutes ? Des dizaines ? Elle serait incapable de le dire, même si on lui posait la question. Le temps s’était suspendu. Et les trombes d’eau qui continuaient à chuter du ciel, masquant les rayons chaleureux du soleil, ne l'aidaient en rien à savoir combien de grains temporels avaient bien pu filer. Elle ne bougea pas non plus quand ils commencèrent à se mouvoir entre les murs du triste bâtiment, s’attelant aux tâches qui leur incombaient. Elle resta figée devant cette damnée lucarne, les cieux pleurant sur ses frêles épaules à l’en inonder, gorgeant sa sombre crinière léonine de leurs larmes salées, comme celles qui dévalaient en cascade le long de ses joues pâles qu’elle ne prenait même pas la peine d’essuyer. A quoi bon ? Elle était déjà mouillée des pieds à la tête de toute façon.

Elle ne réagissait pas non plus lorsqu’elle aperçut du coin de l'œil deux des hommes appelés pour résoudre ce crime infâme sortir de la bâtisse, l’un se dirigeant un peu plus tandis que l’autre venait au-devant d’elle. Et pourtant, c’est comme s’il n’était pas présent. Seulement un mirage. Un mirage qui l’a fit sacrément sursauter quand il prit la parole à quelques pas d’elle.

« Excusez moi Demoiselle, puis-je vous poser quelques questions ? Je pense que vous avez pu vous en douter, mais je suis de la milice. Voulez-vous que l’on s’abrite un peu ? Histoire que vous ne soyez pas totalement mouillée. Je crains que pour moi il ne soit trop tard. »

Son visage en partie dissimulé par quelques mèches éparses de sa ténébreuse chevelure se tourna, se levant vers lui, se retrouvant presque à devoir se tordre le cou du haut de sa faible taille. Ses paupières se mirent à battre, d’abord lentement, puis frénétiquement, chassant les gouttes d’eau pernicieuses qui s’étaient logés sur ses longs cils noirs, rapidement remplacées par d’autres ; évaporant les traces d’une tristesse brumeuse pour les remplacer par un soupçon d’innocente curiosité alors que ses perles olivâtres balayaient le faciès masculin, ne passant qu’un instant sur son oeil pâle sans s’y attarder outre mesure.

Sa dextre voleta jusqu’à ses traits juvéniles, récupérant de ses doigts fins les lianes rebelles pour tenter vainement de les glisser derrière son oreille. Un mince sourire sans joie mais néanmoins chaleureux affleurant à ses lèvres pleines, s’opposant malgré tout à la lueur malicieuse brillant dans ses prunelles à la saveur printanière.

«Bien sûr. Si je ne voulais pas répondre à quelques questions, j'aurais fui. Comme tous les autres.»

Déviant légèrement les talons de bois de ses bottines de cuir brun souillés par la boue, maculant le bas de sa jupe mauve, sa silhouette menue sortie de sa paralysie s’en alla d’un pas lent vers l’abri précaire indiqué, s’adossant dans un profond et lourd soupir au mur décrépi dans un bruit mat, les mains croisées dans le dos, levant son petit nez retroussé vers l’empyrée qui ne paraissait pas s’arrêter de pleurer.

«Quel temps !»

Faisait-elle référence à la météo ? Ou bien à la drôle d’époque dans laquelle ils vivaient tous ? Difficile de le dire. Seule une petite moue triste, un brin bougonne, trônait sur sa jeune frimousse mutine.
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Théophile CastaingMilicien
Théophile Castaing



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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyLun 18 Juil 2022 - 12:11
Perspicace, la jeune femme avait complètement compris la curiosité morbide qui saisissait les habitants cloîtrés derrière leurs fenêtres. Spectateurs assidus à la souffrance des autres, ces personnes n’avaient pourtant aucun courage de faire face aux conséquences de cette soif insatiable de se mêler de la vie des autres. Cela avait toujours été ainsi, de tout temps. La nature humaine était ainsi faite.

Mais certains, plus téméraires ou plus naïfs, affichaient sans ombrage leur envie d’en savoir plus. A l’image de la jeune femme qui s’éloignait de lui vers l’abri indiqué. Ses longues mèches de jais se balançaient à chaque pas avant que le milicien ne la suive. Lorsqu’il furent de nouveau face à face, il pu observer tour à tour l’innocence, la mélancolie et la tristesse sur les traits de celle qui était à peine sortie de l’adolescence.

D’un rire, Théophile rebondi sur sa remarque.

« Oui. Je ne suis généralement pas frileux mais j’ai l’impression qu’entre l’humidité, l’embrun et le vent, la pluie s’infiltre jusque dans mes os. Je ne me ferais jamais à l’hiver Marbrumien. Enfin, pas avant quelques années je pense. »

L’hiver dans les marais était humide, lui aussi. Pourtant, il y faisait plus chaud lui semblait-il. Il n’avait jamais perçu les lames de froid se glisser sous son épiderme comme c’était le cas dans la cité-refuge. La proximité de la mer y était certainement pour quelque chose. Un élément supplémentaire qui le rendait nostalgique de son village natal.

Malheureusement, Théophile n’avait que peu d’espoirs de pouvoir y retourner avant quelques années. Les quelques victoires sur la Fange n’était pas suffisantes pour leur donner l’assurance de pouvoir d’éradiquer ces créatures. En attendant, le milicien avait une mission. Celle de rendre justice à la femme dont les deux enfants venaient d’être tués. Et en cela, la jeune femme pouvait l’aider.

« Auriez-vous vu ou entendu quelque chose d’étrange cette nuit ? Quoi que ce soit, même si ça ne vous paraît pas relié à ce qu’il s’est passé dans la maison. Vous savez, parfois les choses sont étrangement liés, sans que l’on ne le sache au premier abords. »


Dans ce genre d’affaires, un détails pouvait aider se révéler être une nouvelle piste d’importance. Les voisins se disputaient et se sont arrêtés d’un coup ? Ils ont peut-être été témoins de quelque chose. Deux hommes colériques s’étaient disputés lors du repas ? Peut-être le criminel et son complice qui n’étaient pas d’accords sur comment effectuer leur méfait.

Le milicien arborait un sourire engageant, espérant aider le témoin à se sentir plus à l’aide. Pour autant, son regard était bien plus sérieux, attendant avec attention les réponses qu’elle pourrait lui apporter.
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VioletteFille d'Anür
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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyDim 24 Juil 2022 - 0:27



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Le Labourg, Marbrume | 20 Novembre 1166.

Un fin sourire rieur naquit sur les lèvres pleines de la jeune femme, ses prunelles smaragdines pétillants d’amusement se posèrent sur Théophile, l’obligeant à redresser sa tête couronnée de son abondante et indocile crinière ébène et ivoire dégoulinante d’eau de pluie.

- Ça viendra. Il parait que l’on peut s’habituer à tout. Personnellement, je n’en serais pas si sûre… Pas du coin, donc. émit-elle, suivi d’un soupir nasal sec. J’aurai dû m’en douter. Votre arc parle pour vous. Ce n’est pas vraiment une arme habituelle dans les bas-quartiers.

Ses curieuses perles émeraldines balayèrent les rues quasiment vidées de toute âme en cette matinée pluvieuse ; seuls quelques badauds n’ayant pas d’autre choix que de se retrouver à l’extérieur se retrouver encore dehors, courant se mettre à l’abri à toute vitesse pour certains ; écumant le sol boueux avec les épaules voûtées bien trop lentement pour paraître sobres quant aux autres. Elle détailla chacun d’entre eux comme elle put au travers des larmes salées tombant dru de la voûte céleste en un vacarme assourdissant, rendant la mission quasiment impossible. Mais si la reconnaissance physionomique était illusoire, le fait qu’on puisse entendre leur discussion l’était tout autant. Ses sombres sourcils se froncèrent délicatement, prenant l’apparence des ailes d’un oiseau sur le point de prendre son envol, surplombant la vaste prairie de son regard ; une canine ivoirine martyrisant la pulpe carmine de ses lippes aux accents boudeurs.

- Si ce drame ne s’était pas tenu, j'aurais pu répondre qu’il n’y avait rien eu de plus inhabituel qu'un autre jour à cette heure cependant… L’adolescente s'avança de quelques pas sous la pluie battante, se tournant à demi vers la façade de la bâtisse branlante au bois vermoulu qu’était l’auberge où elle avait passé la nuit, son petit nez rond levé en l’air pour apercevoir la fenêtre de la chambre qu’elle avait occupée la nuit-même ; ses grands yeux à l’éclat acéré dérivant vers la maison où les deux enfants avait été cruellement assassinés. Elle revint se mettre sous l’aplomb du bâtiment dans un lourd soupir, ses doigts graciles et couverts de callosités anciennes tentant vainement de placer une mèche indocile derrière son oreille. Une personne plutôt massive à quitter les lieux aux premières lueurs de l’aube. Comme je disais, rien d’inhabituel à l’origine. C’est assez courant que les hommes se faufilent discrètement à cette heure-ci, surtout par les temps qui courent. Mais avec ce qu’il s’est passé… Ça ne peut pas être une coïncidence. reprit-elle d’une voix basse, comprimée, alors que ses iris malachites luisants d’accablement s’ancraient dans l'œil valide de l’archer. Ceci dit, ça me parait tout de même étrange. Comment ne pas se rendre compte qu’un inconnu se trouve chez soi si on s’avère être présent ?
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Théophile CastaingMilicien
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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyVen 29 Juil 2022 - 19:44
L’archer suivit de sa pupille vive les phalanges de son témoin faire glisser une mèche de cheveux derrière son oreille. Son unique iris ambrée s’attarda sur son geste, jusqu’à ce que les mots le ramènent dans le réel. Le fait qu’elle parle d’habitude indiquait que contrairement à lui, la demoiselle était de la ville. En tous cas depuis bien plus longtemps que lui.

« Ce n’est pas tant de savoir si la présence de l’homme était connue ou non le problème. Vous savez, il n’est pas rare de constater qu’une victime connaissait son bourreau et discutait avec avant que les choses ne dégénèrent. A première vue, je vois au moins trois cas de figures possibles parmi d’autres. La première étant que l’homme pouvait être un voleur particulièrement doué, auquel cas sa présence n’aurait en effet pas dû être connue. Mais il pouvait aussi être un proche de la femme, venu lui porter un message. Une autre hypothèse serait qu’il avait payé pour être ici. Ce ne serait pas la première à cacher ses enfants le temps de recevoir un client. »

Un doux sourire se profila à nouveau sur les lèvres de l’archer, tentant d’apaiser la colère qu’il devinait dans les prunelles sombres face à lui. Combien de personnes auraient pu poser ce genre de question ? Beaucoup. Il était presque naturel de s’indigner face à cette femme, voir de la désigner comme en partie coupable par imprudence. Mais le milicien avait vu suffisamment de souffrance, de destins brisés, pour ne pas s’arrêter à la première explication venue.

« Vous savez, il est facile de juger. Mais les choses sont souvent différentes de ce que l’on imagine. Ce qui nous semble intolérable d’un point de vue extérieur est parfois la moins mauvaise des solutions pour la personne concernée. Si on s’arrête à la première idée reçue qui nous vient, on peut mal juger des innocents. C’est arrivé de nombreuses fois malheureusement. Ca peut vous sembler un discours étrange de la part d’un milicien. C’est vrai que par les temps qui courent, la justice est parfois expéditive mais ma coutilerie et moi avons un certain sens de l’honneur. »

Une fois encore, les cheveux de la jeune femmes avaient refusé de garder la place qu’elle leur avait donné. Sa pupille fut happée par le mouvement des longues mèches et son cœur rata un battement, comme si le temps s’était figé. Comme si seule la pluie continuait sa course ininterrompue, alors que Théophile devint bien plus conscient que quelques secondes auparavant, les lèvres de son témoin avaient été délicieusement torturées par l’une de ses dents.

C’était tout sauf le moment de s’attarder sur le physique de la jeune femme. Surtout quand il parlait d’honneur. La meilleure décision qu’il pouvait prendre était de détourner son attention un instant, sans qu’il ne puisse empêcher ses doigts d’aller glisser cette mèche rebelle derrière l’oreille de la jeune femme. Délicatement, mais assez rapidement, il les récupéra, ayant de nouveau réussit à afficher la face avenante et charmeuse qu’il avait l’habitude d’avoir.

« Je m’interdis de me fermer à des pistes parce que certaines choses indiquent que cette femme a été naïve et imprudente. Les enfants méritent qu’on trouve le bon coupable, celui qui les a tué. Et peut-être pourra t-on éviter que cette ordure fasse du mal à d’autres personnes. »

Le borgne ne voulait pas donner de leçon à la jeune femme. Il souhaitait simplement qu’elle comprenne son point de vue et qu’elle l’aide à arrêter le meurtrier. Peut-être serait-elle plus disposée à se concentrer sur celui-ci.

« Pourriez-vous me décrire un peu plus cet homme ? Il était donc massif. Est-il grand ou seulement trapu ? Avez vous aperçu une caractéristique physique particulière ? Une cicatrice ? Une démarche étrange ? Tout ce qui pourrait vous venir à l’esprit. »
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VioletteFille d'Anür
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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyMar 2 Aoû 2022 - 1:09



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Le Labourg, Marbrume | 20 Novembre 1166.

Ses longs cils noirs battirent la mesure à la sensation des doigts étrangers effleurant ses mèches d’ébène sauvages, chassant les perles d’eau salée accrochées à leur pointe qui s’éparpillèrent farouchement autour de ses yeux en amande pour venir s’écraser sur le haut de ses pommettes blafardes alors que son visage se tournait résolument vers celui du milicien, une certaine surprise se lisant dans les prunelles émeraldines. Brève surprise qui laissa rapidement sa place à l’amusement, faisant naître un sourire enjôleur aux accents facétieux sur ses lèvres purpurines. La jeune femme croisa ses bras frêles sous sa plantureuse poitrine tout en se tournant vers le brun, celle-ci se retrouvant mise en avant ainsi soutenue par les deux ponts de chair et d’os et à peine recouverte par le mince tissu blanc comme neige de sa chemise rendu quasiment transparent de par l’ondée capricieuse dévalant de l’empyrée qui avait gorgée l’étoffe de son eau , auquel les bords étaient seulement retenus par un simple lacet nacré aux aglets d’étain. Elle resserra subtilement les pans de son châle mauve aux couleurs affadies par le temps, dont le lainage était rongé par l’iode de l’air marin et les javelots brûlants de l’astre solaire, ramenant d’autant plus l’attention sur l’une desparties les plus charnues de sa menue silhouette sans que cela ne l’émeuve, son épaule cognant dans un bruit mat contre le mur de bois vermoulu lorsqu’elle s’y laissa choir.

Son petit nez rond se fronça subrepticement sous la concentration, les souvenirs de la nuit encore frais dans sa mémoire remontant par à-coups mesquins à la porte de son esprit, se faisant s’entreclore la peau fine de ses paupières sur les brillantes perles smaragdines. Il ne fallut pas plus de quelques secondes pour que sa tête couronnée de l’abondante crinière obsidienne veinée d’argent ne se secoua de gauche et de droite, une petite moue décontenancée apparaissant alors sur le minois malicieux, les lippes charnues s’ourlant délicatement.

- Les deux. Il était les deux. Bien que pas aussi grand que mes frères mais ça ne va pas vous aider à avancer dans cette enquête. Pour le reste… Un soupir découragé fendit l’air chargé de pluie. Il faisait bien trop sombre à cette heure-ci pour pouvoir discerner quoi que ce soit à cette distance, aussi faible était-elle. Puis il ne s’est jamais tourné vers les fenêtres de l’auberge, mais… Soudainement, ses mires olivâtres s’éclairèrent, leur rendant toute la pétillante juvénile qui les avait déserté jusqu’à présent, dissimulée et enterrée profondément sous la colère et la tristesse ressenties par ce meurtre effroyable survenu quelques heures plus tôt.

- S’il s’avère que je suis incapable de le décrire, je connais néanmoins le chemin qu’il a emprunté pour fuir les lieux. Ce n’est pas grand chose, vous me direz. Mais pour le coup, je n’ai que ça. Peut-être que le reste me reviendra plus tard, que ça me sautera aux yeux quand je verrais quelque chose. Mais pour l’instant… Elle haussa vaguement les épaules sous le coup de l’impuissance, l’index taquin de sa dextre volage venant s’entortiller dans les sombres cordelières dans un signe de réflexion agacée. Comme si une information flottait à la surface de ses pensées troublées sans qu’elle ne puisse l’attraper, esquissant une bouderie toute enfantine sur son visage diaphane sur lequel fleurissait quelques touches carminées au niveau des joues, assombrissant derechef les pupilles verdoyantes.

La pauvresse se décolla de son appui dans une simple impulsion, une main enserrant les revers laineux de son étole délavée pour ne pas qu’elle ne prenne pas son envol tandis qu’elle avançait hardiment de son drôle de pas dansant sous les trombes aqueuses dégringolant du ciel sans ne jamais vouloir s’arrêter. Elle fit un quart de tour sur ses talons de bois souillés par l’envahissante boue, tendant sa gracile senestre vers l’archer, un large sourire aussi avenant que chaleureux habillant sa frimousse de lutin espiègle, parant ses sentinelles d’émeraude d’un vif éclat.

- Venez donc. Les gens du coin s’alarmeront moins de voir un milicien trainer dans les rues au bras d’une prostituée qu’à vagabonder seul avec son arc en scrutant les alentour et en interrogeant tout le monde.
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Théophile CastaingMilicien
Théophile Castaing



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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyLun 8 Aoû 2022 - 18:09
Plusieurs expressions passèrent sur les traits de la jeune femme. La façon dont son nez se courbait était attendrissante et ses lèvres feraient des ravages auprès des hommes qui se presseraient au pas de sa porte pour lui demander sa main. Tout comme les rondeurs qui se voyaient de plus en plus au fur et à mesure que les gouttes s’y échouaient.

Alors que l’archer avait réussi à s’extirper des mèches jais, voilà que les pointes de chair qu’il apercevait plus bas menaçaient de le faire plonger dans une douce folie à laquelle il n’avait pas le droit de songer en ce moment-même. Son esprit savait parfaitement qu’il était tout à fait inconvenable de laisser ses bas instincts prendre le dessus. Son sang commençait à s’échauffer, comme si c'était un réflexe désormais, et il finit par détourner le regard alors qu’elle avait finit de répondre à ses questions concernant le potentiel meurtrier. Un pas en arrière, le ramenant sous la pluie battante, l’aida à faire fuir les derniers fantômes de concupiscence.

L'étoffe de laine couvrit l'objet de la tentation, fermant définitivement les vannes de son imagination, et de sa libido, trop fertile. Puis la main de la jeune femme se tendit vers lui pour le mener sur les traces du tueur. Observer son visage juvénile lui donna quelques remords. Elle était trop jeune pour que Théophile ne pense à quoi que ce soit. Pourtant, elle avait déjà largement mes atouts d'une femme…

Une prostituée ? Ca, il ne s'y attendait pas vraiment. Celles qu'il côtoyaient vivaient dans les bordel et n'arboraient pas cette innocence rayonnante. Mais avec les malheurs qui avaient accompagnés la Fange, tout était désormais possible. C’est pour ça qu’il s’assurer de toujours respecter les femmes avec lesquelles il s’abandonnait.

« J'ai donc l'air si terrifiant qu'il faut que votre joli minois vienne adoucir le mien ? »

L'air faussement outré du grand borgne, bien trop appuyé pour être réaliste, ne l'empêcha pas d'accepter le rôle que la jeune femme lui proposait. Après tout, elle avait bien raison. Ils auraient l'air moins suspects ensemble. Et si le criminel les observait quelque part, il n'aurait pas à s'imaginer que la jeune femme aidait les miliciens. En tous cas, pas pour le problème des meurtres.
Comme si il s'agissait d'un jour de printemps, et non une triste journée pluvieuse d'automne, le milicien s'avança et offrit son coude à la jeune femme pour qu'elle y loge sa main. Leur proximité ne laisserait ainsi que peu de doutes. Il se pencha vers elle et sur ton de fausse confidence, il lui adressa quelques mots supplémentaires.

« Si mon chef vous interroge sur notre balade, vous oui direz que c'est purement professionnel ? Je n'ai pas vraiment envie qu'il me colle des bottes à cirer parce que ma cervelle du bas aura pris l'avantage sur celle du haut. »


Leur position laissait suggérer que c'est l'homme qui faisait avancer le duo. En réalité, il laissait toute latitude à son témoin pour le mener. Les doigts et le poignet sur son avant-bras lui indiquaient assez aisément le trajet à suivre. Ne voulant pas laisser la prostituée prendre peur sur le chemin, il continua a jouer les idiots. Le borgne préférait observer un sourire plutôt que de la peur sur le visage des gens qui l'entouraient.

« Quitte a ce que j'écope d'une punition, me direz-vous au moins votre nom ? Je n'aurais que ça et l'image de vos magnifiques...yeux pour me consoler. Vous savez, mes camarades sentent vraiment des pieds. Avec des bottes humides en prime, je ne vous raconte pas l'horreur. Il me faudra peut-être bien respirer un peu de votre doux parfum pour chasser cette puanteur. »

Malgré toutes ces simagrées, sa pupille ambre observait avec attention tout ce qui se trouvait autour d'eux. Si des indices se cachaient, il les trouverait.
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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyVen 19 Aoû 2022 - 18:23



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Le Labourg, Marbrume | 20 Novembre 1166.

La jeune femme enroula sa petite main gracile et glacée au creux du coude du milicien, la pulpe de ses doigts frêles pianotant une lancinante symphonie sur le muscle qu’elle devinait en dessous, les audacieuses dactyles s’amusant à froisser le tissu humide se trouvant sous eux alors que sa mince silhouette venait se presser, sans la moindre petite once de gêne contre la haute physionomie de l’archer ; sa plantureuse poitrine en partie dissimulée par l’épaisseur laineuse de son châle violet à la teinte affadie s’accolant sans pudeur au bras de ce dernier. Sa senestre, elle, s’éleva dans les airs, cachant brièvement l’ébauche d’un sourire hilare naissant aux paroles proférées par la voix aux intonations masculines ; se transformant rapidement en un doux rire aux accents moqueurs tandis que la fine peau de ses paupières se refermaient brièvement sur les perles émeraldines dans lesquelles luisaient une farouche espièglerie.

- Terrifiant, vous ? Certainement pas. Un tantinet impressionnant, peut-être ? laissa-t-elle couler dans un mélodieux chant aux intonations taquines, l'œillade qu’elle lui réserva en parallèle n’attestant que de la malice de ses propos. Néanmoins, votre présence en ces lieux obligent certaines personnes à ralentir quelque travail peu honnête et il est fort probable que cela ne plaise absolument pas à ces même gens. Vous pourriez parfaitement vous en sortir seul, je suppose. S’ils en venaient à attaquer par dépit. Mais il s’avère que je peux me montrer altruiste parfois. Elle marqua une courte pause, ses prunelles smaragdines balayant la rue passante engorgée d’eau boueuse où ne trainassait que quelques pauvres hères bien mal fortunés. Et très curieuse, je l’admet. offrit finalement l’adolescente, la contrition ornant d’autant la courbure de ses lèvres pleines que faisant apparaître un faible éclat repenti à l’intérieur de ses iris liberons.

Resserrant légèrement la pression de sa dextre sur le bras du soldat, inclinant faiblement son corps sur la droite pour les faire tourner dans une ruelle aussi miséreuse que la précédente, elle déposa subrepticement sa tête couronnée de son affolante crinière obsidienne et ivoirine que la colère des Cieux avait alourdi de ses larmes. Professionnel… Pour vous ? Ou pour moi ? souffla-t-elle suavement sur un ton volontairement bas, l’apparition d’un rictus purement canaille se peignant sur ses lippes charnues, s’accompagnant même d’un clin d'œil joueur alors qu’elle ralentissait sensiblement le pas.

- Violette. L’on m’appelle Violette. Et vous, comment vous appelle-t-on ? Un de ses ténébreux sourcils se haussa sur son front pâle affublé de quelques sombres tortillons belliqueux, ses pupilles olivâtres s’assombrissant lentement mais sûrement du voile enjôleur de la concupiscence. Mes yeux verts… Mon doux parfum floral… Vous ne les aurez qu’à la condition d’avoir bouclé cette enquête, seulement après avoir trouvé et arrêté le coupable. murmurant cette dernière partie d’une haleine chaude venant percuter le pavillon de l’oreille masculine sans la moindre vergogne, la nuque légèrement basculer en arrière, offrant à l'œil mordoré la vue de sa blanche gorge qu’il pouvait lorgner à loisir. Du moins, jusqu’à ce qu’elle baissa derechef sa frimousse friponne d’un brusque mouvement, son abondante chevelure bigarrée se refermant telle une mante protectrice autour d’elle, l’enveloppant dans leur noire étreinte tentaculaire, la protégeant désormais de tout regard extérieur alors qu’elle continuait d’avancer, ses billes verdâtres continuant à écumer chaque mansarde de chaque habitat qu’ils croisaient dans l’espoir de retrouver le damné chemin emprunté par ce meurtrier silencieux.
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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyMar 30 Aoû 2022 - 16:43
Le frisson, que la chaude haleine sur son oreille venait de déclencher, chemina rapidement dans le reste du corps du milicien. Pendant un instant, la misère et la saleté qui l’entourait s’effacèrent pour ne laisser place qu’à la douce promesse d’un tête-à-tête charnel. Les corps qui se mélangeaient ne laissaient place à aucune autre idée. Aucun crime, aucun enfant mort. Cette image des deux petits cadavres fit disparaître progressivement toute lascivité. Il avait un devoir à accomplir, un qui allait au-delà de toute pensée égoïste que le soldat pourrait avoir.

« Soyez rassurée belle Violette. Je suis peut-être un fanfaron mais ma mission passe avant tout. Ces enfants méritent justice et c’est une priorité. Je cherchais seulement à détendre l’atmosphère. Mais si vous me supportez toujours après ces quelques recherches alors... »

Sa pupille vive alla chercher l’une de son accompagnatrice. Il n’y avait pas besoin de mots, car c’était un langage auquel la prostituée devait être habituée. Un engagement non formel à partager ensemble l’oubli salvateur après cette journée éprouvante qui s’annonçait. Si Violette l'acceptait. Car même si c'était son gagne-pain, si l'accablement avait raison d'elle, Théophile saurait rester en retrait.

Aussi vite qu’il était venu rencontrer son homologue, l’oeil de l’archer se détourna pour se concentrer de nouveau sur son environnement. Son expression redevint celle, insouciante, qu’il affichait avant ce bref intermède.

« Pardon je ne vous ai toujours pas donné mon nom. Je suis Théophile Castaing. »


Les pas du couple provisoire étaient masqués par le bruit toujours aussi assourdissant de la pluie. Pour autant, des sons fort reconnaissable de bagarre arrivaient jusqu’aux tympans sensibles du borgne. Il appuya sur l’avant-bras de la jeune femme pour la faire stopper ses pas. Sourcils froncés, ce fut à son tour de venir s’approcher du lobe de son témoin. Sa voix, basse et grave, devint un avertissement.

« Violette, si je vous demande de fuir à un moment donné, je veux que vous me promettiez de le faire sans discuter pour vous diriger vers la maison où a eu lieu le crime. Certains de mes camarades y sont toujours. Avançons prudemment désormais. »

Des gémissements, un homme vraisemblablement, parvinrent jusqu’à eux. Pour autant, le milicien ne s’avança pas. La protection de la belle était une première priorité. Non seulement car elle seule pour le moment pouvait les mener sur une piste du meurtrier, mais aussi car la vie devait avoir été suffisamment injuste avec elle. Le soldat ne voulait pas lui faire prendre un risque supplémentaire. Alors il attendait sa confirmation sincère qu’elle ne mettrait pas sa vie en danger, quoi qui les attende au prochain tournant.
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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyMer 12 Oct 2022 - 15:57



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Le Labourg, Marbrume | 20 Novembre 1166.

Se furent deux pupilles rieuses d’un vert vif en partie dissimulées par le plissement amusé de ses fines paupières bordées d’une rangée de longs cils noirs, accordées à un sourire en coin aux allures friponnes qui répondirent muettement à cette phrase non-aboutie de la part du milicien. Violette le savait depuis longtemps : le langage corporel, les œillades particulières parlaient d’autant plus que les mots eux-mêmes. Si elle n’avait reçu aucune éducation de part sa basse naissance, elle en savait néanmoins un rayon sur tout ce que la vie pouvait apprendre et que l’on ne pouvait trouver dans les livres. Et ceci en faisait partie.

Alors lorsqu’il détourna son iris ambré pour le fixer à nouveau sur le chemin boueux qu’ils empruntaient, elle en fit de-même ; ses perles péridots reprenant leur envol sur les façades décrépies des baraques attenantes, partant à la recherche de la moindre petite ruelle, de la moindre petite allée un tant soit peu escamotée au regard des passants tandis que sa frêle et grelottante silhouette paraissant d’autant plus malingre dans sa vêture détrempée se rencognait dans la chaleur dégagée par le corps élancé de l’archer ; sa petite main libre se resserrant sur les pans lâches et humides de son châle lie-de-vin défraîchi.

- Théophile, donc. Enchantée. Bien que j’aurai préféré que ce soit dans d’autres circonstances que celle-ci… ne put-elle s’empêcher de dire sur un ton enjoué malgré le lourd soupir dévalant d’entre ses lèvres charnues à la pliure boudeuse.

La pluie s’évertuait à couler à flot, inondant le sol terreux de ses larmes épaisses, balayant les objets divers oubliés, abandonnés là ; à défaut de noyer les affreuses pensées et les questionnements dérangeants caracolant sous les lourdes boucles sauvages bigarrées de la prostituée. Si le pire avait déjà été découvert dans cette maisonnette non loin de l’auberge où elle avait séjourné le temps d’une nuit, qu’allait-il venir après ça ? D’autant plus de malheur à appréhender ? Et si le meurtrier, ou les meurtriers, n’en étaient pas à leur premier coup en fin de compte ? Et si… Et si… Tant de questions qui ne trouveraient peut-être pas de réponse.

Un sursaut. Deux grands yeux verts prairie arrondis sous le coup de la surprise. Visiblement, ils s’étaient arrêtés et la jeune femme ne s’en était qu’à peine rendu compte, ne pouvant empêcher un voile carmin d’envahir ses pomettes lorsque la chaude haleine masculine vint à la rencontre du lobe sensible de son oreille. Réaction curieuse s’il en est, au vu du métier de celle-ci. A moins que ce ne soit la chaleur frappant sa peau glacée qui ne la fit réagir ainsi.
Cependant, elle offrit un simple et bref hochement de tête en guise d’accord à ses paroles, son minois se tournant derechef vers les gémissements émis au détour d’une venelle et qu’elle soupçonnait ne rien avoir en commun avec ceux qu’elle entendait habituellement.
La curiosité, l’anticipation, l’excitation et une certaine forme de peur envahirent ses billes smaragdines, les faisant briller d’une étrange lueur.

- Je ne ferai rien qui puisse me mettre en danger, ni vous. Je vous le promet.

Et, sans crier gare, profitant de cette proximité impromptue, l’espiègle demoiselle se haussa sur la pointe de ses pieds menus et déposa brièvement ses lippes plaines sur la joue piquetée de barbe de Théophile.
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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyJeu 27 Oct 2022 - 17:26
Les douces lèvres qui se posèrent sur sa joue rugueuse le surprirent au premier abord. Pourtant, bien vite, et malgré le contexte, elles devinrent la promesse muette de ce qui les attendraient plus tard. Au moment où tout ceci serait réglé, que la justice aurait été rendu, le soldat pourrait laisser leurs chaleurs se rencontrer. Pour l’instant, il devait accepter que la jeune femme s’éloigne, ses formes moelleuses avec.

Se collant contre le mur, le milicien s’aventura prudemment vers le coin de la ruelle. Il ne pouvait oublier que dans ce genre de quartier, leurs vies pouvaient être rapidement mise en danger et qu’il devait être attentif. D’autant plus qu’il n’était pas seul. Violette s’était proposée pour l’aider, elle était sa responsabilité. Les ombres se dressaient déjà, montrant l’une s’abattant frénétiquement sur celle avachie par terre. Un règlement de compte, il ne valait mieux pas s’en mêler. Si il avait été seul, Théophile aurait sans aucun doute tenté de s’interposer, pour au moins faire cesser les poings. Mais avec Violette, il devait laisser les choses se faire naturellement. Enfin, c’est ce qu’il comptait faire jusqu’à ce qu’il entende des murmures qui reliait la baston à son affaire actuelle.

« J’y suis pour rien….j’t’assure...pas moi qu’ai tué tes gosses...pitié... »


Essoufflé, la victime tentait de plaider sa cause. Un grondement venant du tortionnaire indiquait qu’il n’était toujours pas convaincu par ces paroles, malgré le ton pitoyable sur lequel elles avaient été soufflées.

« Je veux savoir c’est qui le fils de pute qu’à touché à ce qui m’appartient ! Et toi, tu sais tout petite merde ! Craches ! Tu dois bien savoir quelque chose ! »

L’avertissement et la colère ne pouvaient passer inaperçu chez l’homme. C’est surtout la manière dominatrice dont il parlait, et dont il désignait ses possessions, qui donnait froid dans le dos. Le borgne aurait voulu jeter un coup d’oeil, malheureusement la scène se situait à gauche, dans son angle mort. Il aurait fallut qu’il se tourne face au mur pour que son œil droit soit au plus proche, mais cela laissait son dos et sa protégée bien trop exposés à une attaque. Surtout que dans l’esprit du milicien, les paroles du forcené commencèrent à impliquer quelque chose de plus grand que le simple crime.

L’archer soupira et revint chuchoter à l’oreille de Violette. Il devaient faire le moins de bruit possible.

« Nous allons échanger de place un instant. Je vous laisse regarder discrètement et me dire si vous reconnaissez l’un de deux hommes. Ou tout du moins si ils pourraient correspondre. Ne les laissez pas vous voir. »


Même si c’était plus facile à dire qu’à faire, et que c’était bien sûr évident, Théophile ne put s’empêcher de donner cet avertissement. Ne serait-ce que pour soulager sa conscience, qui l’invectivait pour cette idée saugrenue. Que se passerait-il si l’homme violent tournait la tête au mauvais moment ? Mieux valait avoir un plan de secours...

« Même si au pire des cas nous pourrons prétendre être occupés... »


Levant un sourcil, le milicien présenta un visage et surtout une pupille remplis de malice. Après tout, ils pouvaient joindre l’utile à l’agréable. Fuir ne servirait à rien, c’était plus une confession de culpabilité qu’autre chose, et leur poursuivant pouvait tout à fait courir plus vite que Violette. Profiter du malheur humain, au détour d’une ruelle sombre et sale n’était pas un spectacle rare. Que la femme soit consentante ou pas n’avait à certains endroits aucune espèce d’importance. Forniquer, ou tout du moins commencer à le faire, à côté d’une baston ne serait pas plus hors contexte...
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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyDim 12 Fév 2023 - 15:23



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Le Labourg, Marbrume | 20 Novembre 1166.

Un fin sourire amusé, presqu’incongru au vu de la situation dans laquelle ils se trouvaient, vint éclairer ses traits juvéniles barbouillés par la pluie torrentielle continuant de s’abattre sur eux comme si le ciel déversait toutes ses larmes trop longtemps contenues. Néanmoins, si le souffle chaud du milicien heurtant la peau sensible de son oreille lui fit ressentir une quelconque émotion, elle ne démontra rien de plus que cet étrange sourire de chat ayant ferré sa proie. Ramenant d’une main blanche et fine son épaisse chevelure corbeau dotée de trois plumes d’argent aux accents léonin imbibée d’eau au-devant d’elle, tentant tant bien que mal de l’aplatir sur sa généreuse poitrine afin que celle-ci ne s’envole pas selon les caprices du vent, pouvant sans le vouloir alerter les deux hommes en pleines bastonnades de leur observation.

Collant son dos étroit contre le mur décrépi, la jeune femme se pencha légèrement en avant, permettant ainsi à son oeil curieux d’englober la plus grande partie de la scène invisible à la perle opaque de l’archer. Ses longs et épais cils noirs battirent lentement, chassant autant les gouttes salines venues s’y accrocher que sous l’ébahissement provoqué par le spectacle se déroulant sous ses pupilles olivâtres. Elle savait que ce genre de choses étaient monnaies courantes dans les bas-fonds, c’était loin d’être la première fois qu’elle y assistait et la majorité du temps, les protagonistes de ce genre de règlement de compte étaient ses propres frères ; tout comme le fait qu’énormément de prostituées travaillaient, non pas à leur compte, mais pour celui de quelqu’un d’autre. Et il semblerait que c’était le cas de cette pauvre femme qui avait perdue deux de ses enfants en l’espace d’une seule nuit.

Ne préférant pas spéculer sur ce qui avait bien pu se passer en cette funeste nuit dans la maisonnée voisine à l’auberge dans laquelle elle avait elle-même passée la soirée, elle concentra ses efforts sur la physionomie des deux hommes, commençant par celui qui se faisait savamment éclater la tête au sol. Bien que le fait que ce dernier gisait dans la boue, arrosé par des litres d’eau, Violette n’avait pas l’impression que c’était celui-ci qui avait pris la fuite sous le manteau de l’obscurité à l’abri des regards excepté du sien. Et encore moins celui qui était en train de le matraquer à coups de poings et de paroles cinglantes. Si lui était debout, il n’en avait ni la taille ni la carrure.

Voyant le tortionnaire se redresser, l’hétaïre en fit de même ; espérant échapper à la vue d’au moins un des deux, si ce n’était pas les deux. Maintenant toujours fermement son indomptable crinière bigarrée contre elle, elle tourna son petit visage mutin face à celui, plus mûr, de Théophile, secouant négativement la tête face à la question muette. Ce n’était aucun de ces deux-là. Bien qu’elle était persuadée que, si l’un des types dans la ruelle n’avait pas déjà la réponse à cette question ; au moins l’un des deux l’aurait potentiellement prochainement.

En attendant, l’étrange lutin dans ses atours détrempés se décala légèrement de l’endroit où elle était postée, ancrant ses grands yeux verts emplis d’innocence feinte dans la bille ambrée du soldat tandis que les bruits en provenance de la venelle clamait que le tortionnaire allait prochainement battre en retraite.
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MessageSujet: Re: Un crime peut être une œuvre d’art   Un crime peut être une œuvre d’art EmptyVen 17 Fév 2023 - 18:30
Alors que les coups pleuvaient tout autant que les gouttes venues du ciel, Violette observait toujours la scène. A chaque seconde où elle se mettait ainsi en danger, les poings de l’agresseur semblaient plus rapides, plus forts. Le palpitant du borgne cognait contre sa poitrine, inquiet que la jeune femme soit aperçue. Heureusement, elle finit par revenir vers lui. La réponse était négative certes, mais rien de malheureux n’était arrivé.

Le soldat lui lança un sourire rassurant et l’incita à faire un pas de plus dans la relative sécurité de la ruelle où ils se trouvaient. La fin de la bagarre s’annonçait un peu plus loin, le rythme des coups diminuant. En tous cas la victime semblait en avoir eut pour son compte car un râle de désespoir s’en éleva. Pour avoir déjà entendu ce son à plusieurs reprises, Théophile savait parfaitement reconnaître un homme ou une femme qui abandonnait l’idée de se battre, que ce soit contre son agresseur ou contre le mauvais sort.

« D’accords !...j’te...dis ! »

La voix était tellement basse que seule l’ouïe fine du borgne avait pu capter ses quelques mots. A nouveau, il s’était collé au plus près du coin du mur.

« Qui ?! Qui a osé ?! »


« Sais pas...exact’ment...un...type...gang des…cafards... »

Un grondement mécontent se réverbéra contre les murs.

« J’finirais d'régler ton compte plus tard. »

Un bruit sourd, suivi de quelques pas qui s’éloignaient dans la direction opposée, furent les deux dernières perturbations dans la ruelle adjacente. Puis, les gouttes qui battaient le pavé et la respiration du duo impromptu restèrent les seuls bruits pendant quelques instants. Comme si aucune violence n’avait eut lieu, la nature continuait son propre dessein de manière imperturbable.

Ce moment de calme fut prolongé par l’archer, qui avait besoin de réfléchir à la suite des choses. Et ce n’était pas sa seule raison.

« Restons là une ou deux minutes voir si quelqu'un surveille ou intervient. »

Il n’était pas improbable, dans ce genre de lieux, qu’une tierce personne assiste à la scène avant de venir achever, ou aider, l’homme à terre. De même, l’agresseur pouvait considérer qu’au final, il n’avait pas suffisamment achevé son travail et qu’il préférait venir s’assurer davantage que la leçon était bien apprise.

Un soupir s’échappa avant que les lèvres du borgne ne s’approchent de nouveau des jolies oreilles de son témoin.

« Connaissez-vous quelque chose à propos d’un gang des cafards ? Ce seraient eux à l’origine de ce qui est arrivé aux enfants. Ils n’auraient été qu’un message dans un règlement de comptes. »

Quelque chose de dur passa dans le regard de Théophile. Ses phalanges se crispèrent. Maintenant qu’il digérait ce qu’il venait de capter, et qu’il en comprenait les implications, il était des plus furieux. Tuer un minot prouvait déjà une certaine insensibilité, mais le faire dans ces conditions, pour ces raisons, dénotait un sadisme et un égoïsme des plus malsains. Comment pouvait-on enlever la vie à des êtres qui avaient encore tout à apprendre ? Même dans un quartier comme celui-ci, certains arrivaient à se sortir de la misère et à vivre heureux. Le tueur avait mis fin à tous leurs rêves et espoirs. Tout ça pour quoi ? Montrer qu’il en avait une plus grosse. Inacceptable. Ces gens méritaient une leçon.

« Lorsque nous les retrouverons, j’espère que nous aurons l’occasion de les écraser un peu. »

En référence au nom du groupuscule de malfrats, le soldat comptait bien les secouer un peu avant de les emmener croupir en cellule. Cette idée lui apporta une certaine joie, qu’il ne pouvait s’empêcher d’afficher. Le comment, il n’en savait rien, mais il avait toujours été assez inventif. Suffisamment pour savoir qu’il trouverait au moment venu.
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