Marbrume


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 Tardive rencontre [Luna]

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AlaricGarde de Sombrebois
Alaric



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MessageSujet: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptyDim 27 Mar 2016 - 21:24
Il était tard. Le soleil était tombé depuis belle lurette et son satellite, en un croissant argenté, éclairait la ville de Marbrume. Les commerçants avaient fermé leurs boutiques, mais les rues du Goulot n’étaient pas plus calmes pour autant. Les bars, ouverts jusqu’à pas d’heure, grouillaient de monde, d’ivrognes en tout genre. Des bagarres éclataient çà et là et des éclats de voix montaient depuis les ruelles étroites et sombres du quartier malfamé.

Alaric côtoyait rarement cet endroit en pleine nuit. Il n’était pas un buveur exceptionnel, peu habitué à la boisson. Surtout, il tenait à éviter les problèmes et préférait ne pas se mêler de ce qui ne le regarde pas. Dans ce genre d’endroits, on finissait toujours par se faire harponner et à se retrouver au milieu d’une affaire dont on ne soupçonnait même pas l’existence. Mais ce soir, le milicien avait ressenti le besoin de sortir de la caserne. Depuis l’attaque des Fangeux, il dormait encore plus mal que d’habitude. Boire un ou deux verres d’hydromel ne pourrait pas lui faire de mal, n’est-ce pas ? Et puis Serus ne s’offusquerait pas pour si peu. C’était donc pour se changer purement et simplement les idées qu’il avait franchi le seuil d’un bar bruyant et exigu. Le propriétaire semblait ne plus avoir passé un coup de serpillères depuis des mois : le sol était terriblement collant, tandis que certaines tables brillaient d’un liquide visqueux. Le jeune homme avait dû jouer des coudes pour pouvoir commander un verre et, après l’avoir obtenu, il s’était contenté d’écouter les ragots, d’y participer brièvement de temps en temps, lorsqu’un inconnu déjà bien imbibé lui demandait son avis. Certains le reconnaissaient, l’appelant « Le Miraculé » ; à ces derniers, il se contentait de sourire et finissait par s’en éloigner, afin d’éviter ce sujet.

À la fin du quatrième verre d’hydromel, Alaric jugea plus prudent de quitter l’endroit afin de rentrer à la caserne. Ses tympans bourdonnaient et ses tempes le harcelaient de lancements douloureux. Le bruit et la fatigue ne faisaient jamais bon ménage. L’air frais du dehors lui fit du bien dans un premier temps, puis la tête lui tourna et il dû s’appuyer sur un mur de pierre pour ne pas vaciller.

- Voilà pourquoi je m’étais dit que je ne devais pas rentrer là-dedans… grogna-t-il.

Une main collée contre les murs des maisons, il avançait lentement et chancelant. Les ruelles tanguaient autour de lui et lorsqu’il fermait les yeux, le phénomène s’intensifiait d’autant plus. Il se laissa glisser quelques minutes sur le sol, reprenant une gorgée d’air frais. C’est à ce moment-là qu’il l’aperçu : un enfant. Il ne pouvait voir son visage, mais sa taille n’était pas bien grande. Une cape épaisse aux allures luxueuses le protégeait du froid. Un noble ? Que faisait un gamin de bonne famille dans le Goulot ? C’est bien trop dangereux. Ça l’est d’ailleurs pour moi aussi.

Alaric se releva péniblement et l’approcha discrètement.

- Hé, que fais-tu ici ? C’est bien trop dangereux comme coin. Tu devrais rentrer chez toi, en vitesse.

Il était peut-être légèrement sous l’influence de l’alcool, mais il n’en restait pas moins un milicien. Et les habitants de Marbrume les craignaient en général – ou les méprisaient, c'était au choix.
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Luna MontoyaChâtelaine
Luna Montoya



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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptyMer 30 Mar 2016 - 21:05
Les miliciens. Cette bande de guerriers capable de défendre la cité, ces héros qui veillaient à ce que tout se passe bien pour chacun, ces êtres maniant les armes comme d'autres le faisaient avec les mots : avec ardeur... Luna n'avait pour eux que des compliments à la bouche, tant qu'ils ne l'empêchaient pas de sortir de l'Esplanade. Elle les voyait comme des géants forts, mais lointains, des protecteurs fabuleux à distance raisonnable. Eux avaient le courage de tuer pour faire survivre autrui ; ce qu'elle ne ferait jamais comme elle l'avait expliqué au Capitaine.
Au début elle les avait craint, n'osant trop forcer le passage des portes qui menaient à l'extérieur de son quartier. Et puis, à force du temps, de prévenances et de sourires amicaux, c'était devenu une habitude que de s'arrêter le temps de dévoiler ses fossettes sans une palabre.
Riaient-ils entre eux de l'imprudent petit chaperon qui filoutait comme le vent en boitillant porter son panier à des mères-grands ? Quelle importance, tant qu'ils ne lui barraient pas la route ?
Ce soir comme les précédents ils n'avaient fait aucune difficulté pour la laisser sortir - mais en faisaient-ils à qui que ce soit ? - et elle appréciait cela. Elle se sentait libre, quand elle posait un pied en dehors des limites imposées par son rang.
Enfin, pas vraiment. A présent dans une rue chargée de fange dégueulasse, à l'arrêt pour récupérer un peu son souffle, elle se sentait plus crevée qu'autre chose. La nuit était loin d'être finie, mais malgré tout elle hésitait à écourter ses visites. Il allait vraiment falloir qu'elle trouve un moment pour dormir un jour. Juste pour se rappeler ce que cela faisait.

Tandis qu'elle y réfléchissait, Luna s'entendit être interpellée. Enfin elle ou un fantôme, vu qu'il n'y avait pas grand monde à part l'air devant elle.
Elle se retourna vivement vers l'inconnu, prête à répondre doucement comme chaque fois qu'on lui faisait ce genre de remarques paternalistes qu'elle ne craignait que peu. Du moins si ces mots étaient bien pour elle. Qu'elle n'allait pas bien loin.
L'homme était seul. Alors, sauf si il avait le pouvoir de percevoir de chimériques engeances des dieux quelque part dans le coin, son conseil était bien pour sa personne.

En percevant ses atours cependant, elle haussa un sourcil étonné et se tut. Un milicien ? Ici ? Dans le pire endroit de la ville, si on excluait ces tripots dont on parlait à mi-voix ? C'était une vision inespérée pour bien du monde. Un garde, là. Était-ce une illusion que ses yeux éreintés avaient crée ?
Elle n'était jamais entrée dans les maisons de jeux, bien entendu, mais imaginait fort bien à sa manière la décadence qui régnait en maitresse en ces lieux, au milieu de la crasse et de la boue non identifiable.

" Je vous remercie de... De vous inquiéter pour moi, messire. Tout va bien. "


Finit-elle par dire tout de même à l'apparition impromptue, pour ne guère paraitre trop malpolie. Enfin, si il s'adressait bien à elle une fois encore. L'enfant attendit quelques secondes, le temps de vérifier qu'il ne l'enguirlandait pas à propos du fait qu'elle répondait à la place d'une autre et lui adressa un sourire timide.
Un geste ou un autre parut cependant rapidement l'inquiéter, puisqu'elle fronça les sourcils et offrit ensuite une petite moue inquiète à son interlocuteur.

" Eh... Êtes-vous blessé ? "

Les doigts fins se crispèrent sur le balluchon qu'ils serraient depuis longtemps. Il n'était pas un fantôme de son imagination si il était mal en point. Et puis il n'avait pas l'air bien méchant, comme tous les soldats de la ville qu'elle avait perçu ou presque au final.
Le cabinet du guérisseur Abel était peut-être toujours ouvert si il en avait besoin. Mais sans doute refuserait-il d'y aller seul, par fierté. Zut. Elle se sentit coupable de ses pensées égoïstes, lorsqu'elle songea que cela allait lui rallonger encore son trajet. Tout ce qu'elle n'espérait pas de tous ses cris.


Dernière édition par Luna Montoya le Mar 5 Avr 2016 - 1:21, édité 1 fois (Raison : (hrp : juste la correction d'une énorme faute.))
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AlaricGarde de Sombrebois
Alaric



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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptySam 2 Avr 2016 - 22:38
L’enfant se retourna vers Alaric avant de le détailler quelques instants. Sa cape l’enveloppait et le milicien ne distinguait pas les traits de son visage, sans compter que l’obscurité de la nuit n’arrangeait rien. C’est pourtant une voix douce et féminine qui lui répondit, un petit manque d’assurance vibrant au fond de sa gorge. Une gamine qui errait seule dans le Goulot ? Cela ne pouvait rien présager de bon. Elle ne pouvait pas rester là. Tandis qu’il s’efforçait de remettre ses idées en place, sa tête se mit à tourner quelque peu et il dut fermer les yeux un court instant. Passant une main dans ses cheveux de jais, il se laissa aller contre le mur en soupirant. Cette gamine avait peut-être besoin de lui, la seule nuit où il s’était laissé aller à une chope de trop. Le monde n’était-il pas ironique ?

- Eh... Êtes-vous blessé ?

Alaric ouvrit les yeux lentement et reporta ses iris bleutés sur son interlocutrice. Avait-il l’air d’être si mal en point ? À ce rythme-là, c’était lui qui allait avoir besoin d’elle. Pfff, voilà qui était pitoyable. Bizarrement, cet événement lui rappela un autre qu’il avait cru avoir oublié à tout jamais. Comment cela avait-il commencé, déjà ? Ah oui, il était revenu du champ en catastrophe, la main ensanglantée…

***

D’abord, il s’était contenté d’éponger le sang, en pressant les tissus de sa veste contre sa main. Mais il fallait se rendre à l’évidence : le liquide rouge et poisseux n’en finissait plus de dégouliner et la douleur commençait elle aussi à devenir insupportable. Il était temps de rentrer. Son père lui passerait certainement un savon, mais Alaric préféré cette option à celle- éventuelle- de perdre sa main. D’ailleurs, s’il la perdait effectivement, son père en serait fortement attristé, lui aussi. Depuis quand un estropié était-il utile au travail des champs ?

Sa détresse augmenta d’un cran quand il s’aperçu que sa mère n’était pas à la maison. Peut-être était-elle simplement allée chercher de l’eau ou des légumes bons à être récoltés. Il avait pourtant besoin de son aide. Dans ces moments-là, on avait toujours besoin d’une mère pour être rassuré et consolé. Il avait voulu démontrer à son père qu’il était désormais un homme fait et qu’il pouvait s’occuper seul d’un champ. Mais voila qu’il se retrouvait à pleurer, en petit garçon qu’il était encore.

Si sa mère ne se trouvait pas dans leur modeste habitation, ce n’était pas le cas d’Ellaine, sa petite sœur. Alertée par ses cris, elle avait accouru aussi vite que possible. Du haut de ses six ans, elle n’avait pas saisi l’entièreté du problème, mais d’une voix tendre, elle lui avait demandé « Tu es blessé ? » et s’était ensuite acquitté de son rôle de petite sœur avec brio. Lui murmurant des paroles apaisantes, elle avait tenté de compresser avec lui le bout de tissu sur la plaie. Ses petites mimines n’étaient pas bien fortes, mais Ellaine débordait d’une telle gentillesse qu’Alaric ne lui avait rien dit, se contentant de la laisser faire. Heureusement pour lui, sa mère n’avait pas tardé à réapparaitre et sa méchante blessure n’était plus qu’un lointain souvenir.

***

Péniblement, Alaric se releva en s’appuyant contre un mur. En quelques enjambées, il rejoignit son interlocutrice. Debout, bien droit face à elle, il la fixait intensément. Ce qu’il cherchait dans ses yeux ? Il n’en savait trop rien. Peut-être recherchait-il Ellaine elle-même, oubliant qu’elle avait été… Non, cela ne servait à rien d’y repenser.

- Non, je vais bien, souffla-t-il. J’ai juste du mal avec l’hydromel.

Elle était petite, mais pas aussi jeune qu’il l’avait cru aux premiers abords. Néanmoins, il se devait de la raccompagner jusque sa noble demeure, ou du moins, l’escorter dans les bas quartiers. L’Esplanade, pour une jeune fille noble, était normalement un peu plus sûre. Et encore.

- Et toi… Vous… cherchez quelque chose ? Vous devriez savoir que traîner dans le coin n’est pas une bonne idée.

Pensant qu’il s’agissait d’une enfant, il l’avait tutoyée sans réfléchir. Mais après avoir vu son visage de plus près, il n’était plus sûr de comment l’aborder. Dans tous les cas, il s’agissait d’une noble, et il ne voulait en rien froisser la demoiselle.

- Laissez-moi vous raccompagner. Vous serez plus en sécurité.
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Luna MontoyaChâtelaine
Luna Montoya



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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptyMer 6 Avr 2016 - 0:29
Elle était éreintée et lui, lui était un inconnu milicien alcoolisé. Ils faisaient vraiment la paire, elle incapable de tenir une arme, mais sobre et lui capable de se défendre, mais bourré. Sans doute tout comme Père avait-il bien des responsabilités - après tout il était homme -. Aussi buvait-il. Comme papa. Aucun d'eux ne paraissait en tout cas être violent lorsque l'alcool leur montait à la tête, c'était toujours cela de pris. Du moins l'espérait-elle, à propos de cet étranger.
Ah qu'être un monsieur devait être bien rude ! Elle les plaignait presque, parfois. Comme ce soir, par exemple, mais cela n'empêcha pas l'enfant de se demander ce qui se passerait si ils croisaient tous deux des voyous dès à présent. Bien de mauvaises choses, si elle ne se trompait pas.

Le jeune homme était loin d'être aussi squalide que l'endroit où tous deux se trouvaient, mais ne paraissait guère en meilleur état que son ainé lorsqu'elle l'avait ramassé ici ou que les murs délabrés du coin.
Pour preuve déjà il passait du "tu" au "vous", sans lien logique au regard de la jouvencelle. Ensuite, enfin plutôt auparavant, il l'avait mirée comme si elle était un panneau de bois indiquant une direction en lettres floues... Si il avait bu, comme il le sous-entendait, ne risquait-il pas de s'effondrer, comme le seigneur Montoya avant lui ? Alors comment pourrait-il la raccompagner comme il paraissait en avoir le souhait ?

" Souhaitez-vous que nous cherchions un lieu pour nous asseoir ? "

La question fusa, à la place des réponses attendues à ses interrogations, sans balbutiement, poussée par l'inquiétude. Elle avait eu assez d'un évanouissement en ces lieux et ne désirait point en revivre un second, surtout maintenant, aussi sa timidité s'était-elle mise de coté d'elle-même le temps de deux ou trois battements de cœur.
Quitte à perdre du temps, autant que cela fut pour se reposer et non pour soigner un malaise.

Elle avait baissé les yeux assez tôt lorsqu'il l'avait fixée, mais les avait relevés pour exprimer sa crainte. A présent, elle les forçait à parcourir la terre battue, noire et crasseuse qui abimait leurs chausses à tous deux. Mal à l'aise, elle pesta intérieurement contre sa grande bouche et sa pitié mal placée.
Innocemment, elle prit ensuite pour elle quelques secondes pour tenter de se convaincre que si il disait non à son offre, ce n'était pas son affaire et échoua de beaucoup en cette entreprise. Il lui faudrait trouver un rebouteux si il tombait en pâmoison : elle ne pourrait le laisser à demi-mort sur le pavé. Ce serait un crime qu'elle se reprocherait à jamais.

Un silence gêné s'installa donc.
Peut-être devrait-elle lui proposer à manger, quand bien même il pouvait se nourrir seul ? Les gardes ne devaient pas être affamés, pour pouvoir défendre leur belle cité, n'est-ce pas ? Ils étaient après tout, avec les murailles, leur seule défense contre les fangeux. Leurs héros. On ne devait donc les mettre au pain sec et à l'eau, à moins qu'elle ne se trompait. Celui devant elle n'était en tout cas pas bien grand, mais pas non plus maigrelet. Grignoter l'aiderait-il à chasser l'alcool ? Non, sans doute pas, mais au moins un peu la fatigue ? Il était tard et... Oh zut. Il attendait toujours ses informations.
Mais elle tenta de noter dans un coin de sa cervelle qu'il faudrait qu'elle demande à Messire Abel lors d'une future rencontre si la nourriture pouvait guérir l'alcoolémie. Là maintenant tout de suite, elle n'en savait rien et ne pouvait que supputer des choses inutiles. Autant donc ne pas gâcher de quignon de pain, si lui ou son ventre n'en faisait pas la demande.

Elle se mit finalement ensuite à répéter son laïus habituel en tâtonnant cette fois, les mots ne voulant plus sortir correctement les uns après les autres puisqu'elle avait pris le temps de contenir son angoisse.

"Tout va bien. Je... Je vous remercie de vous en inquiéter
Mais mes pas ne me mèneront pas dans... Euh... Des maisonnées dangereuses. "

Expliqua-t-elle avant de rajouter rapidement :

" Je vous le promet. "

Bien consciente que tout cela n'était pas bien convainquant quoi que véridique, elle se mordilla la lèvre inférieure, avant d'oser le regarder dans les yeux à son tour.
Si ses joues rougirent, les ombres de la nuit cachèrent sans doute une bonne partie de son embarras.

" Je suis navrée. Je ne peux rentrer. Pas... Pas tout de suite, messire. "

Relevant son balluchon jusque son ventre, telle une bien maigre et futile protection contre tout ordre qui ne lui plaisait guère, elle s’efforça de sourire timidement pour rassurer son interlocuteur.

Non, vraiment, malgré sa fatigue, elle ne pouvait accepter les propositions du milicien. Il fallait qu'elle termine son tour, même à la va-vite, de peur que ses provisions ne soient plus mangeables demain. Père aurait alors fait des frais de bouche pour rien.

Se rappelant les bonnes manières, soudainement, elle rabaissa ses menottes et lui offrit une petite révérence. Elle inclina donc son buste à l'encontre d'Alaric avant de se relever et de se présenter de son ton bas et doux :


" L'on me nomme Luna. Et euh... Je vous prie de me pardonner. Pour mon impolitesse. "
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AlaricGarde de Sombrebois
Alaric



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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptySam 16 Avr 2016 - 22:10
Restant de marbre et la fixant de ses yeux bleus, il se contentait de repérer les moindres parcelles du visage de l’enfant, dissimulées sous son capuchon luxueux. La pauvre était peut-être intimidée ? En tout cas, lorsqu’elle lui proposa de s’asseoir, Alaric ne put que vivement tourner sa tête de droite à gauche. Tout allait bien. Il n’avait pas bu tant que ça, après tout. C’était juste une question d’habitude, non ?

Puisque l’enfant ne répondait plus rien, un silence légèrement pesant s’installa entre eux deux. En y réfléchissant, le milicien ne l’avait pas vraiment abordée d’une manière très correcte. À cause de l’alcool, il avait oublié ses bonnes manières apprises avec soin plusieurs années plus tôt. Ce n’était pourtant pas son genre de se mêler des affaires d’autrui. Lui, qui pourtant voulait éviter le moindre problème, venait de s’élancer dans une histoire qui ne le regardait en rien. Était-ce réellement son envie de bien faire qui l’avait poussé vers la demoiselle ? Ou bien se cachait-il derrière son rôle de milicien au sein de la cité ? Il avait cessé de réfléchir lorsqu’il avait croisé son regard. Il n’y avait plus qu’elle qui comptait en cet instant. Un élan d’héroïsme s’était emparé de tout son être et sans qu’il ne sache pourquoi, le visage d’Ellaine ne cessait de se superposer sur celui de cette inconnue. Celle-là, il pouvait la sauver. Oui, mais était-elle vraiment en danger ? Ou jouait-il les héros dans cette ruelle nauséabonde ? C’était pourtant dans les champs qu’il courait, dans ses souvenirs. Cachée derrière un arbuste, un arbre ou couchée à plat ventre dans les herbes hautes, sa sœur se tapissait, en rigolant tandis qu’il jouait un vilain brigand. Alors, comme à chaque fois, Roland, en bon chevalier qu’il désirait tant devenir, le tuait et sauvait la belle avant qu’un méchant coup ne soit donné. Mais ce n’était pas l’odeur du blé qui flottait dans l’air. Ni les herbes folles qui lui chatouillaient les mollets. Ce n’était que la cité de Marbrume.

La petite rompit le silence. Ses pas ne la mèneraient pas dans des endroits dangereux, promettait-elle. Mouais, c’était à lui d’en juger.

C’est avec un sourire amusé qu’il la regarda se mordiller la lèvre en croisant brièvement son regard. Ce geste, pourtant si mignon, semblait cacher un mensonge mal dissimulé. Et voila qu’elle l’appelait messire, une gêne certaine sur ses lèvres. Messire ? Jamais on ne l’avait affligé d’un tel titre de noblesse jusqu’à présent. Mais l’enfant voulait bien faire, tout comme lui. Tous deux étaient maladroits, mais cette maladresse partait d’un bon sentiment.

Alaric ne l’avait pas quittée des yeux depuis leur rencontre et c’était sans doute pour cette raison qu’il n’avait pas remarqué le paquet qu’elle tenait dans ses mains. Arquant un sourcil, il la regarda le saluer poliment, tandis qu’elle se présentait. Luna. Voilà qui était joli. Et peu commun.

- Hé bien, ne rentrons pas, dans ce cas… Occupons-nous d’abord de cette affaire, répondit Alaric en désignant du menton le baluchon que Luna tenait fermement.

Sa curiosité le poussait à l’interroger sur le contenu du sac, mais heureusement pour lui, sa politesse prit le dessus. Importuner une noble ne faisait pas partie de ses habitudes, et il avait l’impression d’en avoir déjà trop fait en l’accostant de la sorte.

- Je ne veux pas me montrer impoli… Je fais juste mon travail, vous savez…

Ah, encore cette fameuse excuse. Combien de temps allait-elle fonctionner avant que Luna comprenne qu’il désirait juste l’accompagner ?

- Et puis franchement, se débarrasser de moi serait une perte de temps, ajouta-t-il sur un ton plus déterminé.

Bon, il lui suffirait de lui prouver qu’il était capable de marcher droit, et la demoiselle devrait accepter… Normalement. Fichu hydromel…
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Luna MontoyaChâtelaine
Luna Montoya



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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptyDim 17 Avr 2016 - 1:24
Elle finit par hocher la tête à regret après avoir considéré son interlocuteur en face d'elle un moment. C'était qu'il apparaissait sérieux, le bougre. Même si la nuit cachait ses traits ou du moins une partie, sa voix était loin d'être légère ou pâteuse, plutôt sûre d'elle-même cette fois comme on l'attendait d'un homme portant les sigles de la milice.
De plus, si il se décidait à employer la force pour la ramener chez ses parents une fois lassé par ses refus, elle ne pourrait rien faire contre lui. Il avait peut-être de l'entrainement. Elle pas. Autant alors lui offrir une petite victoire, pour pouvoir continuer ce qu'elle avait commencé. Choisis tes batailles. se chuchota-t-elle mentalement pour calmer la gêne qui l'envahissait davantage.

Silencieuse, Luna reprit enfin sa route à une distance plus que respectable de sa compagnie non voulue, comme si l'idée de promiscuité la gênait. Si elle ne prononça pas un mot, elle jeta quelques coups d’œil plus ou moins inquiets à son compagnon d'infortune durant leurs premiers pas. Son avancée se fit lente. Très lente même, pour permettre malgré ses pensées à Alaric de la suivre dans son état et pour éviter de se fatiguer au point de s'évanouir par manque de sommeil trop vite.
Lui dire qu'elle avait maintenant un peu peur, surtout de lui, n'avancerait à rien. Après tout, il était saoul et son insistance pouvait passer pour étrange et malsaine puisqu'elle n'avait pas demandé d'escorte en ces lieux où elle n'avait eu que peu de bisbilles jusque présent. Et si... Et si en plus il avait volé sa livrée à un véritable milicien ? Ce n'était pas comme si l'on croisait en les méandres de Marbrume des gardes chaque journée ou nuitée. Des charlatans davantage par contre.
Mais l'impossible n'était pas un mot humain, n'est-ce pas ? Et si leur rencontre était improbable, elle avait tout de même eu des chances infimes d'arriver. La preuve était là, sous son nez, en considérant ses premières hypothèses comme fausses et farfelues. Il était potentiellement un homme d'honneur défendant la cité, vaquant pour protéger la veuve et l'orphelin et elle ne craignait rien à ses cotés. Ou presque. Il ne voulait avec de la chance réellement que son bien.

Quoi qu'il en soit, tiendrait-il tout le long du trajet qu'il lui... Leur restait à faire ? N'allait-il pas s'effondrer comme une tomate trop mure qui ne retenait plus son jus sous sa peau si fine ? Et si sa tenue attirait quelques malfrats, les verrait-il en double ?
Elle frissonna, finit par arrêter leur très lent cheminement avec une hésitation. Il ne s'était toujours pas présenté et cela rajoutait à son malaise, mais elle n'osa pas lui demander de précisions pour l'instant.

" Je... Nous allons rendre visite à des gens, messire. "

Expliqua-t-elle simplement et doucement, dans le but unique de lui faire noter par le menu leur plan de route à venir. Il n'y avait nulle menace dans ses propos, même si il y aurait dû en avoir une, ne serait-ce que par prudence. Pour qu'il comprenne que si il faisait quoi que ce soit, l'enfant crierait à s'en décaper la gorge si elle le pourrait.
Trop ingénue cependant, elle ne songea pas à toutes les horreurs qu'il pourrait lui faire si il n'était pas celui que sa parure présentait et continua sur sa lancée.

" Me laisserez-vous monter seule chez eux ? Il... Certains ont peur des inconnus. "

Et vous en êtes un, qui peut-être ne verra pas certaines de leurs magouilles avec bienveillance. songea-t-elle sans oser l'évoquer à voix haute.
Pour tenter de le rassurer cependant, une fois encore, elle répéta l'un des serments qu'elle lui avait fait peu avant :

" Je vous promet ne rien craindre. "

Rien ne fut dit sur sa sécurité à lui. Là encore il ne fallait guère entendre dans son mutisme une rodomontade ou une commination ; c'était seulement un fait non-exprimé candidement. Sa présence à elle était autorisée, celle d'autrui elle n'en savait rien. Elle ne pouvait répondre - ni en bien ni en mal - de l'attitude de ses protégés envers cet être qu'elle n'était point capable de présenter sans mentir comme réellement amical et ne désirait pas de débordements.
Les larmes coulaient bien assez chez bien des ménages du coin pour éviter le plus possible d'y rajouter potentiellement du sang. Et puis peut-être de plus lui en voudrait-on, si elle menait la milice dans des maisons.

" ... Mais cela risque parfois de prendre un peu de temps. "

Rajouta Luna un peu maladroitement, comme si elle avait soudainement besoin de babiller. A moins que ce ne fut pour excuser sans le faire ses propos et non-dits précédents. Ou encore pour l'inciter à se reposer contre un seuil ou une fenêtre, le temps qu'elle pipelette avec les uns et les autres...

Après avoir miré encore son interlocuteur, elle se remit distraitement en route, prêtant l'oreille pour ouïr convenablement ses réponses.
Même sans y voir parfaitement, elle semblait les guider avec aisance en ces lieux malfamés, évitant les gros creux qui jonchaient ici et là la route en terre battue dégueulasse. Elle n'hésita pas une seconde au croisement auquel ils se trouvèrent rapidement pour se diriger dans la direction qu'elle estimait la bonne.
Son balluchon, tenu par des doigts toujours crispés sur le devant de ses jupes, battait au rythme de son avancée boiteuse, mais assurée.

" Me le direz-vous, messire, si... La nécessité de vous arrêter se faisait ressentir ? "

Finit-elle par oser demander, bien après qu'il ait satisfait sa curiosité précédente liée à leur travail du soir.
Elle n'avait toujours pas demandé l’appellation de son chevalier servant si il ne lui avait pas encore donnée. Comme si, finalement, ce n'était qu'un détail pas si important ou qu'elle s'en passait bien.

Qu'il lui était étrange en tout cas de ne pas battre le pavé en solitaire pour une fois.
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AlaricGarde de Sombrebois
Alaric



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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptyMar 19 Avr 2016 - 22:21
La demoiselle considéra pendant quelques minutes sa proposition, avant de se remettre en route d’une démarche lente. Souriant, le milicien la suivit au même rythme, une distance respectable séparant le duo. Il l’effrayait sans doute un peu et lui-même ne désirait pas la brusquer, il ne tenta donc pas de se rapprocher. Du coin de l’œil il la vit frissonner, et il dut se faire violence pour ne pas l’entourer d’un bras chaud et réconfortant.

Peut-être le silence fut-il trop pesant pour ses petites épaules, aussi lui annonça-t-elle qu’ils allaient visiter « des gens », un terme si vague, mais qui pourtant renseignait un minimum le milicien sur les occupations de l’enfant. Alaric en déduit que Luna ne se contentait pas de leur rendre visite, mais elle leur apportait certainement quelque chose, le contenu de son mystérieux baluchon, qu’elle tenait soigneusement depuis tout à l’heure.

Si la jeune fille avait accepté de partager un bout de chemin avec Alaric, elle n’était pas décidée à lui présenter ses « amis ». D’après ses dires, le milicien risquait de les effrayer. Il était vrai qu’entre le peuple et la milice, tout n’était pas toujours rose, et si de nombreux camarades s’acquittaient honorablement de leur tâche, d’autres, malheureusement, profitaient de leur statut et se croyaient permis de commettre des crimes de toute sorte. Tâchant certainement de le rassurer, elle lui promit qu’elle ne risquait rien, mais que cependant, sa visite pouvait durer un petit bout de temps. Alaric fronça les sourcils. Il se demandait réellement ce que cette petite mijotait. Et puis, elle ne lui faisait pas confiance, ce qui le désolait. Après tout, il s’était fait une bonne réputation après l’attaque des Fangeux et certaines personnes le reconnaissaient ou bien racontaient qu’un certain Alaric dit « le Miraculé » avait fait preuve d’une bravoure exemplaire en s’infiltrant dans la maison-brèche après plusieurs combats acharnés et sanguinolents. Des actions qui le gonflaient de fierté, mais qui ne cessaient de lui rappeler de sombres souvenirs.

C’est en se remémorant cette réputation récente qu’il s’en rendit compte : il ne s’était pas présenté. Dans un premier temps, l’alcool avait troublé son esprit, tandis que par la suite, il s’était laissé emporter dans ses souvenirs après avoir plongé ses yeux bleutés dans le regard de Luna. Quel idiot il faisait. C’était en toute légitimité qu’elle le craignait, et c’était même un miracle qu’elle ait accepté qu’il l’accompagne tard dans la nuit.

- Excusez-moi, j’ai été distrait… Je ne me suis pas présenté. Je me nomme Alaric.

Même si son surnom jouerait certainement en sa faveur, il se refusa à le prononcer. Il était juste Alaric. Et puis, il n’y en avait pas trente-six dans la milice de Marbrume.

- Si je puis me permettre, j’aimerais vous accompagner auprès de vos… amis. J’suis milicien, je préfère savoir ce qui se trame par ici, que ce soit bon ou non. J’espère que vous comprendrez. Ne vous en faites pas pour moi, l’air frais m’a fait du bien. Tant qu’on ne doit pas faire face à des Fangeux, je devrais pouvoir m’en sortir, plaisanta-t-il en continuant de suivre Luna à travers les ruelles étroites et sinueuses de la ville.

Puis, marquant une petite pause, il ajouta :

- Alors, que cachez-vous dans vos petits bras ?
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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptyDim 24 Avr 2016 - 23:41
Alaric. Si le nom lui rappelait quelques discussions, elle ne l'avait jamais croisé auparavant. Alaric et son bras fier, Alaric qui a combattu, Alaric contre la fange. Les bouts de phrases qui lui étaient associés jaillirent dans son esprit, lui faisant offrir un sourire au garde. Alaric était un homme bon si tous ne se trompaient pas et bien un milicien si elle se souvenait bien de ce qu'on lui avait chuchoté. Elle pouvait donc avoir confiance, puisqu'il était Alaric.
Nonobstant cela, s'il était aussi loyal à son travail qu'elle le songeait - puisqu'il était du coté de la loi - il n'aimerait donc vraiment pas ce qu'il verrait ou entendrait en la suivant, peut-être. Malgré tout, elle ne pouvait pas lui ordonner de la laisser vaquer, n'est-ce pas ? Il risquait de bien mal le prendre, même si ce serait impoli aussi envers ses protégés de se laisser l'escorter jusque chez eux. Leur imposer la présence d'un inconnu n'était pas toujours bien vu. Alors d'un garde...
Enfin. Elle se demanda s'ils comprendraient qu'elle ne savait comment se débarrasser de lui avec délicatesse pour ne guère le fâcher. Il était Alaric, guerrier défenseur de ces lieux ; elle ne voulait pas se mettre à dos un héros de leur cité. Même s'il était alcoolisé, il méritait sa considération et bien plus encore : qui pouvait se permettre de dire que comme lui il estourbissait bien des fangeux ? Peu ici.
Elle avait bien de la loyauté pour ces gens qu'elle visitait, mais de manière différente. Si Alaric était un seigneur de guerre, eux étaient des figures importantes de la vie de tous les jours. Ils gagnaient plus de combats qu'aucun autre ne le ferait jamais : survivre était leur but le plus important, une quête pour eux épique et de chaque instant ; vivre n'était que secondaire et un bonus parfois bienvenu. Quant à se défendre vis-à-vis des monstres qui hurlaient dans les marais, ils n'y pensaient guère ou bien trop, déjà trop déroutés par leur propre misère.
Il fallait avoir la tête haute pour pouvoir se battre contre d'autres horreurs que les siennes et même si beaucoup possédait un menton fier et levé, peu pouvait prétendre savoir faire face à deux ennemis à la fois. Aux dents pointues et noircies des chimères trop réelles et mortes à la fois qui les empêchaient de cultiver leurs champs, ils préféraient donc affronter d'abord pour la plupart les tracas que l'on dressait devant eux tels des murs trop solides. C'était là tout de même tout à leur honneur, si seulement ils ne le faisaient pas avec une fierté digne d'un noble. Était-ce si mal que de vouloir donner un coup de main à ces valeureux pour les pousser un peu plus vite sur la voie de la réussite ?
Leur faire accepter pour la plupart son aide sans honte avait été laborieux. La présence d'Alaric ce soir pouvait ruiner bien de ses efforts... Mais elle ne pouvait toujours pas lui dire "non". Il s'inquiétait. Elle pas, mais comprenait sa méprise. Combien parlaient des habitants des bas-quartiers comme de vulgaires coupe-jarrets ?

Combien de secrets découvrirait-il en tout cas ? Elle espéra secrètement aucun et que leur seul lot serait des regards en biais. Cependant, il aurait fallu qu'elle soit davantage encore crédule pour penser totalement que tout irait si bien.
Vraiment. Mettre un milicien et des gens qui étaient parfois à bout ensemble risquait de causer de petites apocalypses s'ils n'y faisaient pas attention... Et même potentiellement si ils faisaient tout pour que cela n'arrive jamais à dire vrai.

" Je suis honorée de vous rencontrer, messire Alaric. "

Répondit-elle timidement à sa présentation, une fois qu'il eut fini de parler. C'était là vrai, même si elle aurait souhaité le faire en d'autres circonstances.

" Et votre présence me... Ne... Enfin je viens porter des victuailles. "

Elle souleva à peine son balluchon, comme pour le désigner et répondre à son interrogation.

" A des connaissances. "

Rajouta-t-elle en laissant son paquetage redevenir ballant contre ses jambes. Une fois l'objet retourné à sa place, sa marche s’accéléra légèrement puisqu'il lui avait promis qu'elle n'avait plus à craindre de le voir s'effondrer telle une vulgaire poupée de chiffon.
Elle laissa un énième silence, continuant à les guider dans les rues les plus perdues, se fiant à ses habitudes et la carte qu'elle avait fini par tracer dans sa tête. Puis finalement, alors qu'elle alentissait à nouveau son pas pour s'arrêter devant une porte, elle hésita :

" Je vous en conjure. Me promettez-vous que... Quoi que vous verrez, messire, vous ne leur ferez rien ? "

Elle n'avait pas trop d'espoir, mais ne pouvait non plus le laisser arrêter de pauvres gens qui ne faisaient rien d'autre que subsister pas toujours dans le respect des lois édictées.

" Ils n'ont guère de sang sur les mains. Mais leur... Leur manière de vivre et de parler peut parfois sembler outrageante. "

Ses joues se colorèrent en plus tandis qu'elle se souvenait d'injures et de quolibets balancés par les uns et les autres sur tout et rien. Armée, Duc, nobles et bourgeois, aucun n'avait grâce aux yeux des affamés qui n'en pouvaient plus de leur condition. Elle attendit une réponse, puis quoi qu'elle fut toqua avec une hésitation non feinte au battant crassé qui les séparaient d'une famille dans le besoin.
En attendant que l'on lui réponde, elle chuchota tout bas d'un ton suppliant :

" Je souffrirai, messire s'il leur arrivait quoique ce soit. "

Et bientôt, la porte s'ouvrit sur une femme entre deux âges que l'obscurité vieillissait davantage encore. Ses longs cheveux d'un noir profond étaient teinté d'un gris brillant par endroit ; ses yeux si ils brillaient à cause des lueurs ici et là, n'exprimaient que peu de sympathie, même envers Luna. La robe était de bien mauvaise qualité et cela faisait un choc, à coté de celle de la gracile enfant. Trop de fois retouchée, elle pendouillait tel un sac sur son ossature bien maigre.
Seul un sourire un peu forcé leur souhaita la bienvenue tandis que la vieille entrait à nouveau dans sa demeure, laissant ses deux invités se démerder pour la suivre. Des gémissements - ou des cris étouffés - provenaient du fond du couloir empli de ténèbres qui leur faisait à présent face. Vers là où les deux femmes, accompagnées du milicien se dirigèrent d'un pas normal. Comme si tout allait bien et que les oiseaux chantaient.
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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptyMer 4 Mai 2016 - 22:56
Luna lui avait répondu poliment, après avoir marqué une petite pause, comme si elle pesait le pour et le contre. Le milicien voyait bien qu’elle hésitait à lui dire la vérité, mais son statut poussait sans doute la jeune fille à lui révéler ce qu’elle transportait avec tant d’énergie. De la nourriture. À des connaissances, s’était-elle empressée d’ajouter. Cette histoire était décidément loin d’être nette. Si la petite apportait effectivement de quoi manger à des amis, alors cela ne pouvait être que des nobles, n’est-ce pas ? Dans ce cas, pourquoi donc prendre le risque d’y aller en pleine nuit ? Et de toute manière, dans le quartier du Goulot, on ne trouvait pas des nobles.

Alaric était perdu dans ses pensées, méditant à propos de ce mystérieux secret qui planait entre eux deux. Cependant, la petite recommença à lui imposer des promesses qu’il n’était pas sûr de tenir. Néanmoins, ces réactions éclaircissaient quelque peu la situation. Luna nourrissait des pauvres qui mouraient de faim, comme il y en avait de plus en plus à Marbrume, ces derniers temps. Voilà qui était complexe. Ce n’était certes pas un comportement qui serait approuvé par ses supérieurs, ni par d’autres nobles. Si jamais cette histoire remontait plus haut dans la hiérarchie… Alaric secoua la tête posément.

- Je ne peux rien vous promettre. Il faut d’abord que je vois tout ça.

C’était vrai. Il avait encore du mal à se rendre compte, à imaginer ce qui se trafiquait réellement. Mais il n’allait pas tarder à le savoir : la petite s’était arrêtée devant une vieille bâtisse du quartier lugubre. Après avoir toqué, elle lui fit part de ses sentiments pour « ces connaissances ». Le cœur du milicien se serra. La petite était courageuse… Comment l’en empêcher ? L’action était belle et généreuse, peu d’habitants seraient capables d’une telle œuvre par les temps qui couraient. Et même si les Fangeux n’existaient pas. Les nobles n’ont jamais eu la réputation de partager leurs trésors.

Une vieille dame leur ouvrit la porte. La douleur était marquée à jamais sur ses traits durs et ses yeux ternes. Elle reconnaissait Luna, mais jeta un regard méfiant au milicien, sans souffler mot. Alaric la salua poliment et tenta un sourire timide. Que la dame soit réticente ou non, elle les laissa rentrer tous les deux. Ils traversèrent plusieurs couloirs, la suivant tant bien que mal, jusqu’à ce que des gémissements leur parviennent. D’instinct, Alaric accéléra le pas et dépassa les deux femmes. Les ténèbres envahissaient la pièce, mais le jeune homme distinguait des contours aux formes diverses contre les murs crasseux de la bâtisses. Il fit quelques pas en avant et manqua de peu d’écraser une petite main qui trainait sur le sol de pierre. S’arrêtant net, il fixa l’enfant assis par terre, blotti contre une femme maigrichonne. Sa vue s’habituant peu à peu à l’obscurité, il découvrit là une dizaine de personnes entassées les unes sur les autres, certaines n’avaient que la peau sur les os, d’autres étaient estropiées, d’autres encore pleuraient, leur tête calée sur leurs genoux.

Alaric voulu dégainer par réflexe, mais parvint à se persuader de ne pas agir de la sorte. Il les effraierait et il préférait ne pas créer d’émeutes. Luna en serait fort affectée… Et lui aussi. Tournant sa tête vers la demoiselle, il murmura :

- Je doute que vous ayez assez avec ça pour nourrir toute cette marmaille.

Le baluchon de la jeune noble n’était pas bien gros et tous ces gens devaient mourir de faim.

- Je comprends vos paroles maintenant…

La situation était pire qu’il ne l’avait imaginée, à dire vrai. Mais au final, c’était bien ce qu’elle lui avait fait comprendre. La vie n’était pas si jolie dans les bas quartiers. Alaric soupira. Que devait-il faire ? S’il ne rapportait pas cette histoire aux sergents et que l’histoire se répandait… Il risquait bien de perdre son boulot… Ou pire, d’être banni. Certains miliciens étaient du genre à bannir pour un oui ou pour un non ces derniers temps. D’un côté… Luna ne faisait rien de mal. On avait encore le droit de nourrir des amis, non ? Et puis, si les pauvres recevaient de la nourriture, ils seraient sans doute moins motivés à voler et piller le moindre étalage… Lui qui n’aimait pas être mêlé à ce genre d’intrigue, le voila qui se retrouvait dans une position plus que délicate.

- Bon, donnez-leur ça et on s’en va…

Il se mordit la lèvre. Et après ?
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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptySam 7 Mai 2016 - 17:29
Un timide et plein d'espoirs sourire aux lèvres, elle suivit la femme en silence. Toute personne qui la regardait, même furtivement, pouvait noter que son air enjoué était toutefois quelque peu crispé. Par crainte peut-être de ce qu'elle et Alaric allaient découvrir au bout de leur périple. A moins que ce ne fut à cause de la présence du dit milicien.
Il faisait encore plus sombre qu'à l'extérieur là où ils se rendirent, tant qu'il lui fallut un temps pour s'adapter au noir et retrouver ses habituels repères. Le nom de tous les présents lui revint en mémoire dès lors qu'elle repéra leurs silhouettes, là, debout sur le seuil.
L'odeur de crasse et d'autres fluides qui flottait dans l'air ambiant ne parut guère la remuer plus que cela puisque après donc une courte pause, elle entra dans ce simili de porcherie fermée fort décidée.

Elle hocha la tête à chaque nouveau visage qui se tournait vers son compagnon d'infortune ou elle, les saluant avec son habituelle tendresse, sans mépris ou pitié. Si des palabres naquirent inquiètes sur ses lèvres, elle se retint cependant cette fois de les prononcer ; la donzelle n'était pas seule.
Quand le premier regard affamé fut porté sur son sac, elle commença aussi à fouiller dedans et ses doigts cherchèrent avidement les miches qu'elle avait prévu pour ces protégés-là.

Les remarques murmurées du garde ne lui arrachèrent qu'un regard morne. Si tôt ensuite, même si il ne devait pas plus percevoir qu'elle ce qui les entouraient, elle s'excusa en étirant son sourire de son peu de réaction. A moitié absente elle ne lui répondit pas davantage tout de suite, songant qu'il faudrait sans doute qu'elle se débrouille pour contacter un rebouteux pour la plus petite. Sa toux l'inquiétait. L'état du moignon de Marek avait-il aussi empiré ?
Messire Abel accepterait-il de passer, si elle trouvait de quoi le payer et le faire escorter ? De jour ? Revenir de nuit avec un practicien était sans doute inutile. En ne percevant rien, comment soigner ? Et puis jamais aucun, là, n'accepterait de la suivre de son plein gré vers la demeure du vieil homme. Ils formeraient une telle procession insolite, si cela arrivait, que sans doute en auraient-ils honte en moins de quelques pas. Bien entendu uniquement si seulement ils parvenaient à se mouvoir, ce qui n'était guère assuré. Bref.

Elle déposa son balluchon entre ses pieds et rompit plusieurs fois une première miche avant de mettre un morceau de pain dans la main d'une mère avec des gestes efficaces. Un autre bout fut offert à un autre, puis un autre. Enfin, elle reprit son sac et continua sa distribution, parlant sans phrase complète.

" Doucement. "

Finit-elle par chuchoter parfois, tout bas, en tentant d'encourager ses interlocuteurs à ne pas se jeter trop vite sur la nourriture et à en garder pour plus tard. Ils se tenaient déjà dignes à leur manière, pour la plupart, refusant de mettre à leur bouche le pain offert tant que les visiteurs n'auraient pas tourné les talons ; aussi sa mise en garde n'était peut-être pas fort utile. Mais il semblait qu'elle ne savait pas trop que dire d'autre, aussi bien pour qu'ils acceptent la moindre pitance de sa part que pour ne pas les effrayer davantage.

Enfin, lorsqu'elle eut terminé son tour, elle hésita puis mira Alaric, la petite vieille qui n'était pas bien loin et tous les autres. Dans l'obscurité, aucun d'eux ne détonait véritablement par rapport aux autres. La couleur de leur peau, plus ou moins brunie par le soleil était semblable dans la nuit. Leur chevelure n'était plus ni grasse, ni difforme ou trop bien peignée ; on ne la percevait pas davantage que les cals que certains avaient sous les doigts.
Pourquoi ne pas lui montrer ? Comprendrait-il ? Il était étranger, ce milicien. Même si il était un héros, elle ne le connaissait pas assez pour être sûre de réussir à trouver les bons mots pour lui faire comprendre que ce n'était pas parce que le travail à faire était trop grand pour elle qu'elle abandonnerait.

Finalement, elle vint effleurer timidement le bras de son chevalier servant et hocha la tête avant de se diriger vers la daronne à qui elle tendit un plus grand quignon.
Sans un mot, si ce n'est un simple : "Je vous remercie, ma dame." à l'intention de la vieille qui ne lui barrait jamais sa porte, elle ramena son compagnon dehors, guidée à nouveau par la maîtresse des lieux qui referma derrière eux.

Ils marchèrent quelques pas en silence, s'éloignant de cette puanteur et des questions qu'elle n'avait pu poser. Les routes avaient beau ne pas sentir fort bon, l'air ambiant était toujours moins infect que dans les petites pièces où se réfugiaient tant de blessés et malades et leur permit de respirer plus paisiblement.
Luna fit contre mauvaise fortune bon cœur et songea qu'elle reviendrait demain encore. Après demain toujours, si on ne l'empêchait pas ; aussi si elle n'oubliait pas ses interrogations, elle pourrait toujours les énoncer à voix haute à ce moment-là. Quand elle n'aurait pas de chaperon.

Enfin, tandis qu'ils continuait leur route, visiblement dans une direction que Luna connaissait, celle-ci releva à nouveau son regard vers son garde du corps du jour. Elle le fixa un instant, le menton baissé, silencieuse et pensive. Si un sourire absent de convenance était plaqué sur ses joues, ses sourcils s'étaient un peu froncés depuis leur sortie.
Ce qu'elle vit sur le faciès de l'homme ne dut pas lui déplaire, puisqu'elle rougit légèrement avant de s'exprimer de son ton doux :

" Je vous prie de me pardonner, messire Alaric. Les prochaines visites se... Devraient être moins difficiles, bien que plus longues. "

Elle sourit, timide, chercha visiblement encore autre chose sur ses traits puis ajouta en réponse à un de ses anciens dires :

" Je ne cherche pas à vaincre la famine. Il... Ce serait impossible. "

Elle souffla un peu plus fort, ses épaules s'affaissèrent.

" Non pas que... Que ce ne serait pas fantastique. Mais ce... "

...Ce n'était pas possible, malgré toute sa bonne volonté. Il aurait fallu d'autres lois et moins de privilèges pour quelques uns à peine pour que cela arrive potentiellement tôt ou tard en partie.

Mais elle faisait de son mieux. Elle ne pouvait pas faire plus, toute seule, hélas.
Un regard fut dirigé vers son propre balluchon qui rebondissait encore dès qu'elle faisait un pas. Elle releva ensuite vivement la tête et se mordilla la lèvre intérieure en s'interrompant toute seule.
Silence. Elle hésita encore à lui expliquer, mais autre chose la tiraillait. Il n'avait pas promis, elle n'avait pas oublié. Alors, sa voix se ré-éleva, quelque peu tendue par l'angoisse :

" Allez-vous faire quoi que ce soit, contre ces bonnes gens ? "

Elle voulait une réponse. Vraiment.
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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptyDim 15 Mai 2016 - 22:46
À sa grande surprise, la masse d’hommes était restée calme. Aucun d’entre eux n’avait tenté de se servir avec agressivité ou de voler la moindre parcelle de pain à son voisin. Peut-être n’étaient-ils tout simplement plus en état de se comporter de la sorte. Durant toute la distribution, Alaric n’avait pas quitté Luna des yeux. Avec calme et douceur, elle s’adressait à eux de temps à autres, tout en leur donnant de quoi manger. Elle savait y faire avec eux, cela ne faisait aucun doute. Ils savaient qu’elle ne leur ferait aucun mal, elle était une aide bienvenue.

Lorsqu’elle eut terminé, et après avoir remercié la vieille dame, ils sortirent en silence de la bâtisse. Alaric jeta un bref regard dans son dos. Il n’aurait jamais pensé que ce genre de rassemblement se mourait dans cette maison. Le milicien se rendait compte maintenant de sa naïveté. Des maisons comme celle-là, combien y’en avait-il dans Marbrume ? Des dizaines, sans aucun doute. Mais tous les pauvres n’avaient certainement pas la chance d’être nourris par une enfant noble. En y réfléchissant bien, ses supérieurs devaient être au courant. Même s’ils n’avaient pas – encore- vu réellement ce qui se tramait, des doutes devaient planer. Ils connaissaient mieux que quiconque la situation dans les bas quartiers de la ville. Ils avaient cependant mieux à faire que des ratisser toutes ces vieilles bâtisses insalubres. Mais si la scène se déroulait sous leurs yeux, comment réagiraient-ils ?

Alors qu’ils s’éloignaient de la maison, la petite s’excusa. Elle tentait de se justifier pour ses actes, mais en perdait ses mots. Pour être franc, son comportement était mignon, mais Alaric ne tenait pas à lui faire part de cet aveu. Pour toute réponse, il se contenta d’hocher la tête. Certes, éradiquer la famine était impossible. Mais l’attitude de Luna aidait à réduire l’écart. Sans elle, supprimer toute famine serait même impensable.

Il la suivait, ne connaissant absolument pas leur prochaine destination. Avait-elle prévu d’autres visites ? Rentrait-elle chez elle ? Ou bien, lui réservait-elle encore d’autres surprises ? En tout cas, il était bien décidé à la talonner, jusqu’à ce qu’il la ramène en toute sécurité. La vue de cet amas humain lui avait mis une claque suffisamment importante pour que les dernières particules d’hydromel s’évaporent de son sang. C’était dingue, la manière dont l’esprit fonctionnait. Enfin, en un sens, il était bien heureux de retrouver sa stabilité lorsqu’il posait un pied devant l’autre.

Une certaine tension régnait entre eux deux. Alaric patientait. Il savait qu’elle finirait par lui poser la question. Il ne s’était pas encore prononcé sur toute cette histoire. À vrai dire, il en avait une petite idée, mais cette idée n’était sans doute pas la bonne. Que faire ? Écouter les ordres ? Ou agir comme il l’entendait ? Lorsque Luna se mordit la lèvre, il sut que l’heure était arrivée. Allait-il faire quelque chose…

- Et bien… Je suis partagé. La situation ne peut pas durer comme ça.

Il marqua une petite pause, mesurant ses paroles.

- Une jeune fille n’a pas à se promener seule dans ces quartiers de la ville. Vous devez vous trouver un accompagnateur… Et je suis pas trop mauvais pour ça. Et je ne vois pas le mal, vous avez bien le droit de rendre visite à des amis, n’est-ce pas ? fit-il en lui souriant calmement.

Il ne pouvait tout simplement pas lui interdire de les aider, ou pire encore, embarquer ces pauvres gens. De toute façon, les exiler dans les marais ne ferait qu’accroître le nombre de Fangeux dans les parages. Mais il se mettait en danger, de cette manière, il en était pertinemment conscient. D’un geste vif, et certainement un peu trop brusque, il attrapa le poignet de Luna et planta son regard dans le sien.

- J’admire ce que vous faites et je ne peux vous en empêcher. Mais comprenez le risque que je prends. Ne répétez à personne que vous me connaissez.

La petite était prudente, il le savait bien. Mais les précautions n’étaient jamais trop nombreuses.
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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptyLun 23 Mai 2016 - 2:01
La demoiselle retint son souffle tandis que son interlocuteur lui expliquait être partagé puis l'incitait par quelque sermon à ne plus se balader seule. Elle ne relâcha l'air contenu dans ses poumons que lorsque le garde l'invita à considérer ensuite sa présence à lui comme une bénédiction pas trop minime. Il n'était pas si mauvais en gardien, disait-il. Au sourire qu'il lui offrit alors, elle répondit par un second, empli cette fois de candeur. Il ne lui mettrait pas trop de bâton dans les roues. Ses épaules s'en redressèrent de soulagement.
Elle hocha furtivement la tête, jouant de ses doigts sur son balluchon, plus à l'aise déjà depuis qu'il lui avait dit à mi-mots qu'il ne toucherait pas à ses amis. Lui réexpliquer qu'elle ne craignait rien, puisqu'elle l'avait déjà fait à leur rencontre, ne servirait à rien... Cependant cela ne coûtait rien non plus d'accepter son aide. Après tout, elle n'était pas non plus forcée de le faire chaque soir. Il devait bien, d'autres nuits, avoir d'autres chats à fouetter puisqu'elle ne l'avait jamais perçu ici auparavant.

Prête à le remercier, Luna ouvrit la bouche quand le milicien se décida à se saisir de son poignet. Le geste autant que son sujet - une admiration étrange - la firent finalement se tenir encore coite et rougissante à nouveau. L'admirer ? Elle ? Elle referma ses lèvres. Cela n'avait pas vraiment de sens, pas plus que sa demande indirecte suivante. Peut-être les vapeurs de l'alcool n'avaient-elles pas fini de fuir loin de son cerveau ? La fille Montoya demeura muette et troublée en songeant à cela, même lorsqu'il eut terminé d'exprimer ses directives.
A nouveau un peu crispée, n'osant enlever sa chair de l'étau qui ne la comprimait guère, elle attendit qu'il la lâche de lui-même durant quelques secondes. Puis, finalement, n'y tenant plus, elle murmura à son tour quelques palabres, sans bouger.

" Comment souhaitez-vous que je vous contacte alors, messire ? "

Elle hésita, prononça un mot ressemblant à "vous" trop bas pour être suffisamment compréhensible avant de reprendre doucement :

" Si je ne puis vous demander à la garnison... Comment nous retrouverions-nous ? "

[...]

Une fois qu'il lui eut donné ses réponses, ou tout au plus un peu plus tard, ils reprirent leur trajet. Libérée de toute entrave, la petite se tint à un pas ou deux de son chevalier servant, n'osant plus faire de gestes directs en sa direction de peur de l'effleurer. La promiscuité était visiblement loin d'être sa tasse de thé, surtout avec un inconnu.
Leur seconde visite se déroula dans une mansarde comme une autre. Ils y rencontrèrent un simple couple auprès de qui ils ne s'attardèrent que peu. L'enfant avait visiblement à dire, mais des coups d’œil à Alaric l'aidèrent à se retenir de discuter de trop avec la femme des lieux. Plus prolixes cependant que les vivants presque morts vus lors de leur première distribution, leurs hôtes remercièrent à leur départ les deux venus pour le peu de pain qu'ils leur laissèrent.

Luna ne donnait en effet à aucun de grande portion, outre en de rares cas. Il lui fallait partager, hélas, son butin trop maigre avec tous ses protégés. Et si elle aurait pu laisser un soir une miche à l'un pour ne revenir que quelques jours plus tard le saluer encore, il semblait que cette solution ne la satisfaisait pas.
Elle l'avait testée, si Alaric le lui demanda, un bon temps de cela. Mais elle s'était aperçue rapidement que si certains se savaient capables d'économiser, d'autres préféraient se gaver comme si demain n'allait jamais exister. Les voir s'en rendre malades et en vomir l'avait abasourdie. Surtout que le lendemain ils ne se montraient alors que davantage affamés... Aussi, pour éviter d'aller à l'encontre de ses projets - uniquement aider un tout petit peu si l'on le lui permettait et non rendre malade autrui. -, préférait-elle s'évertuer à faire ces trajets chaque nuit lorsqu'elle le pouvait.
Sans rentrer davantage dans les détails, elle chercha à le faire changer de sujet ou amena celui qui lui vint en tête rapidement si il ne la questionna point. Doucement, tandis que leur cheminement les menaient vers d'autres qu'elle ne résumait pas davantage que les précédents à haute voix, elle tenta d'apprendre comment était la vie dans la milice.

" Est-ce dur, messire de savoir maîtriser des armes ? ... Faites-vous partie d'une grande unité ? "

Sa curiosité maladive avait décidé de revenir sur le devant de la scène, et à présent, la jeune fille parvenait à faire des phrases complètes sans bafouiller. Peut-être parce que le sujet l'intriguait réellement ou parce qu'elle commençait à apprécier la compagnie.

Elle allait enchainer sur une troisième interrogation quand, soudainement, une ombre se détacha des autres trop noires de la nuit. Ses contours se mouvèrent, lentement, surement, se dégageant d'une ruelle pour venir vers eux. Ce fut son son - celui de pas - qui fit se tenir d'abord silencieuse l'enfant, puis une surprise teintée de gène, une fois encore. Devant eux deux se dressa la créature qui voulait leur signaler sa présence. La nuit ayant finalement décidé de l'éclairer, l'on put percevoir ses traits lorsqu'elle s'arrêta à quelques pas.
Grande, trop fine pour ne pas être qualifiée de maigre, elle avait un sourire de diablesse fatiguée. Sitry - si Alaric en avait entendu causer - aurait peut-être eu le même si elle avait passé des heures à tapiner, mais là s'arrêtait toute comparaison possible. Il n'y avait plus rien de beau dans la beauté fanée qui mirait le milicien comme si sa chair était assez fondante et intéressante pour son palais.

" Eh toi ! T'vas t'ennuyer avec cette jeune carne ! L'expérience t'irait bien mieux. "

Fit-elle un ton trop haut, peut-être pour prévenir un hypothétique maquereau qu'elle avait flairé une proie potentielle. Les mots résonnèrent dans la rue trop déserte. L'approche trop directe faisait sinon songer qu'il était possible simplement que sa voix était normale et qu'elle reconnaissait Alaric comme un membre de la milice.
Tout le monde ou presque savait que tous les protecteurs de la cité n'étaient pas fermés à la corruption et sans doute estimait-elle que, puisque celui-ci se promenait par là, il y était même très ouvert. Autant que ses cuisses, parfois, alors pourquoi ne pas mêler affaires et travail en baisant un garde pour une faveur ou deux ?
Elle se pencha, offrant à sa victime désignée une vue de ses appâts rendus moins lourds par la famine. De base sa tenue tenant plus des fripes que d'une robe dévoilait bien davantage qu'elle ne suggérait sa silhouette, mais la pose ne camouflait cette fois plus rien des globes de chair qu'elle possédait, moins fringants que des ans auparavant.

Ce n'était pas qu'elle était fort vieille. A dire vrai, Fannie n'avait pas plus de trente-deux printemps, cependant la rue, les problèmes et les fangeux avaient eu raison de tout ce qui un temps faisait la fierté de ses parents. Ses joues poupines s'étaient striées sous les coups de ses clients et de l'inquiétude liée aux emmerdes qu'elle était douée pour rencontrer. Ses lèvres étaient devenues amères, malgré son envie de bien présenter. Bien entendu, le tout avait été camouflé par du maquillage chèrement acquis, mais rien ne pourrait jamais lui rendre son charme d'antan. Il n'y avait que son regard qui avait réellement échappé à l'avancée des années et un reste de fierté mal placée s'y lisait encore à bien y regarder.

" Et puis il n'est même pas dit que j'te fasse payer. "

Roucoula-t-elle avant de se redresser. D'un pas plus alerte et chaloupé, faisant voleter sa chevelure d'un noir trop parfait pour être véritable, elle tenta de se coller contre l'homme. Pour tester la marchandise qu'il avait à offrir sans doute, non loin d'une Luna mal à l'aise qui se demandait si elle avait le droit de détaler.
En tout cas la proposition prouva, si nécessaire, que la coureuse de remparts avait cette fois bien reconnu Alaric soit pour son métier, soit pour son héroïsme passé. A moins qu'elle n'avait, une fois encore, juste pas froid aux yeux et appréciait le tableau qu'il offrait...

" Si ça t'tente hein."
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AlaricGarde de Sombrebois
Alaric



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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptySam 4 Juin 2016 - 22:15
Luna ne lui répondit pas qu’elle acceptait. Mais elle lui demanda des précisions, ce qui réchauffa le cœur d’Alaric. Elle était donc d’accord pour qu’il l’accompagne durant ses périples nocturnes. Cependant, il s’était laissé emporter et n’avait absolument pas réfléchi à ce qu’elle lui demandait. Comment se retrouveraient-ils et quand ? Puisque leurs tournées devaient restées secrètes, il était nécessaire que personne ne soit au courant de leurs balades. Le moindre doute ne pouvait même pas subsister.

- Hm…

Alaric s’arrêta sur leur chemin et s’appuya contre le mur, pensif. Au début, il pensa à laisser un objet caractéristique, dont le sens ne serait connu que d’eux deux. Mais là encore, il y avait un risque pour que quelqu’un finisse par se douter de quelque chose.

- Le mieux est de fixer une nuit par semaine, déclara-t-il après quelques minutes de réflexion. La nuit de mardi à mercredi par exemple. Vous m’attendriez à l’entrée du Goulot, afin de ne pas tomber sur des personnes trop dangereuses. Je vous rejoindrai à la tombée de la nuit. Si vous ne me voyez pas, c’est qu’une autre mission me retient ailleurs. Une nuit par semaine ne vous semble peut-être pas suffisante, mais vous n’aurez qu’à donner un peu plus en une fois. Au final, ça reviendra au même.

Le milicien se doutait que ces nouvelles recommandations ne plairaient pas à la jeune fille, mais il n’avait pas vraiment le choix. Et de toute manière, c’était mieux ainsi. Trop de nuits auraient forcément attiré l’attention. Certains habitants de Marbrume n’avaient rien d’autre à faire que de regarder déambuler les passants dans les rues étroites de la ville. Si jamais des soupçons naissaient si et là, la rumeur serait rapidement répandue dans le quartier du Goulot… Si ce n’est au-delà.

La petite le mena dans une autre maison où une seconde distribution l’attendait. Croisant les bras sur son torse, Alaric la regarda faire sans dire mots. Même si les pauvres étaient un peu plus bavards et semblaient être moins à l’article de la mort, Luna fut rapide et ne s’abandonna pas en paroles inutiles. Le milicien devina que sa présence y était pour quelque chose, ce qui le gêna quelque peu. D’un côté, il ne voulait pas l’empêcher de faire ce qu’elle désirait, mais d’un autre, sa conscience lui ordonnait de terminer cette tournée gastronomique au plus vite.

Une fois qu’ils se remirent en route, Luna le questionna. Par curiosité ou pour briser le silence… voire un peu des deux. Même si Alaric n’était pas un garçon très bavard, il reconnaissait que discuter permettait de détendre l’atmosphère bien trop lourde, presqu’insupportable. D’ailleurs, s’il prenait réellement l’habitude de lui tenir compagnie plusieurs nuits, il fallait qu’il s’adapte aux bavardages superflus.

- Manier une arme n’est pas si difficile… Il faut tout d’abord dénicher celle qui vous convient, ensuite, l’entrainement fait le reste. Moi je suis mince et agile. Ma force n’est pas extraordinaire, mais grâce à mon physique, je mise sur ma vitesse. C’est pour cette raison que la dague me convient le mieux. Je me débrouille pas mal à l’arc aussi, savoir se défendre à distance est utile, surtout dans les marais… Quant à l’unité dont je fais partie, elle compte 6 hommes. Mais vous savez, les camarades de la milice extérieure, ça change souvent… Trop souvent. La tâche est dangereuse.

Alaric en avait connu, des compagnons d’arme. De nouvelles têtes apparaissaient tous les jours à la caserne, la plupart du temps pas formées pour un sous. Mais on récupérait ce qu’on trouvait : paysans, hommes du peuple reconvertis, femmes désireuses de se rendre utiles… La milice de Marbrume comptait plus de personnes haïssant les Fangeux que de véritables soldats confirmés.

Après qu’Alaric lui ait posé la question, Luna lui confirma qu’ils étaient en route pour une troisième maison. Décidément, le milicien n’osait même plus imaginer la nuit de la petite s’il ne l’avait pas rencontrée. Que cela devait être long, lorsqu’on était seul !

Mais bientôt, des pas résonnèrent non loin, marchant dans leur direction. Vu le quartier, ce n’était pas vraiment étonnant de tomber sur des personnes peu fréquentables en pleine nuit noire, mais Alaric porta tout de même sa main sur sa dague acérée. Il se détendit lorsqu’il remarqua qu’il s’agissait seulement d’une prostituée. C’était moins dangereux qu’un forgeron saoul… Normalement. C’est que la dame avait craqué pour ses beaux yeux bleus. Le jeune homme soupira. Voilà. Voilà pourquoi il ne fallait pas trainer dans ce quartier.

Aguicheuse, elle s’avança vers eux deux, se penchant pour leur montrer tout ce qu’elle possédait encore au balcon. Pas grand-chose, mais la famine y était sans doute pour beaucoup. Alaric ne détourna pas le regard, mais le rose lui monta aux joues instantanément. Cette situation ne lui était encore jamais arrivée : comment on se débarrassait d’une prostituée, au juste ? Jamais il n’avait eu recours à leurs torrides services. Margaux avait toujours été la fille qu’il désirait, et maintenant qu’il l’avait perdue – elle aussi- il n’avait jamais pensé à la remplacer d’une manière aussi primitive.

La prostituée, d’une démarche lascive à souhait, se rapprocha d’Alaric et tenta de se coller contre celui-ci. Le pauvre milicien fit un pas en arrière, évitant tout contact. Sa réputation l’avait précédé dans le Goulot, pas auprès des cercles qu’il aurait désiré. Il en connaissait beaucoup, parmi ses collègues, qui aurait accepté la proposition, deux fois plutôt qu’une. Il devait passer pour le « p’tit jeune chançard » qui pouvait s’offrir ce genre de luxes malsains. Mais ce n’était pas son genre. Ce n’était pas pour ces « récompenses » qu’Alaric avait rejoint la milice. Oui, il était milicien. Il se devait de réagir comme tel, et non comme un môme innocent.

De son bras, il repoussa gentiment, mais cependant avec fermeté, la jeune femme.

- Ça ne me dit pas, non, et j’ai autre chose à faire cette nuit. Mais je sûr que vous n’aurez pas de mal à trouver un autre milicien à vous mettre sous la dent…

S’écartant de Fannie, Alaric posa sa main sur l’épaule de Luna.

- Je suis en service, et j’ai mieux à faire cette nuit.

Ainsi que toutes les autres d’ailleurs. Mais il ne valait mieux pas froisser la demoiselle décrépie. Une femme en colère, ce n’était jamais facile à maitriser.

- Excusez-moi, fit-il en passant à côté d’elle, après avoir passé un bras protecteur autour de Luna.

Pour le coup, la petite n’aurait certainement pas eu à vivre cette situation s’il ne l’avait pas accompagnée. Quoique… Plus rien de l’étonnait. Quand on cherchait de l’argent, on prenait un peu tout ce qui vous passait sous le nez… Enfin, il espérait surtout que la petite n’avait pas remarqué la gêne qui s’était marquée sur son visage quelques minutes plus tôt. Voilà qui était plutôt embarrassant. Et dire qu’il avait insisté pour l’accompagner et la protéger, il risquait finalement de lui attirer d’autres types d’ennuis.

- Vous comprenez pourquoi vous ne devez pas vous promener seule, par ici ? lui murmura-t-il, afin que la prostituée ne puisse l’entendre.
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Luna Montoya



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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptyMar 21 Juin 2016 - 0:35
Elle l'écouta avec intérêt parler de ses habitudes de milicien, ou plutôt de l'apprentissage des armes et de son groupe. Curieuse tel un pou, elle s'apprêta à l'interroger d'autant plus lorsque la rencontre survint.
Et Luna laissa son chevalier-servant gérer seul l'arrivée impromptue de cette gazelle des rues aux longues jambes et au visage strié. Intimidée et inquiétée, peut-être, par l’interpellation de la gueuse, ou toute à ses questions qu'elle ne pouvait plus poser, elle ne réagit point tout de suite quand messire Alaric posa tout d'abord sa main sur son épaule avant de passer plus tard un bras protecteur autour d'elle. Il put la sentir se crisper cependant dès lors qu'ils furent éloignés de plus de quelques pas de la coureuse de remparts aux seins lourds.
La petite avait gardé le silence et les yeux baissés tout le long de l'échange étrange entre l'homme et la femme. Elle ne les releva que lorsqu'elle fut assurée de ne plus ouïr les froufrous de la tenue de la putain et, faisant un pas sur le coté pour se libérer de l’accolade à laquelle elle ne goûtait pas, elle murmura à son tour doucement :

“ Elle ne vous a rien volé... N'est-ce pas ? A part un peu de temps. “


Il n'y avait guère d'accusation dans son ton, comme si pour elle tout cela faisait partie du quotidien. Que cette petite scénette qui avait paru fortement l’incommoder se représentait sans cesse, à moins qu'elle ne fut sûre que la femme était honnête à sa manière et souhaitait le prouver. Sans doute songeait-elle aussi que si le garde y avait perdu quoi que ce soit, ce n'était là que le destin. Revenir en arrière recouvrir le trésor nouveau de la chapardeuse ne servirait à rien dans tous les cas. Elle avait dû transformer ses haillons en ailes à peine leur dos tourné et avoir fui dans l'obscurité.
Un petit silence accueillit la réponse du milicien suivi d'un sourire encore troublé par quelques menues choses qu'elle ne désirait pas étaler. Telle que cette chaleur qui restait, là où les doigts d'autrui s'étaient posés. Leurs pas seuls résonnèrent donc un instant.

“ ... Je n'ai guère l'habitude, messire, de craindre ces dames. Outre un peu de bavardages, elles... Elles ne m'importunent guère. Et il en va de même pour bien du monde. Qu'ils soient marchands d'oublies ou vilains. “
Son visage exprima encore de la gène non feinte lorsqu'elle reprit :
“ Pour en revenir à votre proposition de tout à l'heure... Je serais bien aise de pouvoir vous complaire. Mais ce... Les gens qui ont faim ne savent pas toujours comment éviter de... De trop manger lorsqu'ils ont plus qu'ils n'avaient jusque présent sous leur nez. “
Elle inclina la tête sur le coté, porta un de ses doigts sur sa joue droite, réfléchissant sans doute encore.
“ Enfin, je pourrais me faire accompagner si vous y tenez par... Quelques garçons des rues, si j'en trouve, lorsque vous n'êtes disposé à venir. En les payant bien, même si cela réduira mes possibilités... “

Sa main retomba et vint retrouver le contact du balluchon. Il n'y avait nul mensonge dans sa proposition précédente, seulement une condition : qu'elle réussisse à mettre une main sur de petits protecteurs agiles. Que ceux-ci soient d'accord pour ne point la suivre au sein même des habitations, elle en faisait son affaire, même si elle ne précisa pas à messire Alaric que ses potentiels gardiens ne veilleraient sur elle que dans les noires ruelles et de loin. Ils n'allaient pas être durs à convaincre, eux, elle en était sûre, de la laisser mener son affaire comme elle l'entendait.
Expliquer aussi à son interlocuteur combien le sentiment de liberté qui accompagnait chacun de ses pas lui plaisait terriblement n'était pas une mince affaire et elle ne s'en sentit guère capable. Ne serait-ce pas davantage choquant, si elle lui susurrait que sans duègne, ici, elle se sentait revivre chaque soir ? Oh pourtant que cela pourrait étayer son discours...

Tergiversant toujours pour trouver le courage de lui faire part de ce sentiment de vie retrouvée, là, dehors, ou au contraire le faire taire à jamais, elle mira ensuite à nouveau le garde droit dans les yeux un moment et esquissa un nouveau sourire mal à l'aise davantage qu'avenant.

“ Mais je crains de mal vous démontrer mon tracas. Je viens chaque fois que je le puis, messire. Certaines semaines, c'est tous les soirs. Même si la moyenne est inférieure. Une unique nuit me demanderait donc une... Une petite brouette que mes faiblesses de femme ne me permettent pas de tirer plus de deux pas. “

Une petite fossette naquit sur ses joues tandis qu'elle prenait un air plus affable, peut-être un peu taquin vis-à-vis d'elle-même :

“ J'aurais vidé sinon chaque nuitée la cuisine, messire, depuis fort longtemps. “

Songeant soudainement qu'elle avait enchainé boulette sur boulette, elle déforma ses traits en une petite grimace faussement penaude d'excuses. Enfin d'un ton plus sérieux, la damoiselle Montoya recommença à s'expliquer :

“ Je... Je ne dis guère cela pour attirer un quelconque sentiment de pitié. Et ne prenez guère je vous en conjure mes dires pour des menaces... Mais vous ne me voyez guère capable de gérer ce que vous me proposez. Cela créerait d'autant plus de déboires de mon coté si... Si je devais abandonner certaines de mes relations pour vous satisfaire. “
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MessageSujet: Re: Tardive rencontre [Luna]   Tardive rencontre [Luna] EmptyDim 3 Juil 2016 - 15:56
Alaric fut soulagé lorsqu’il remarqua que la putain ne les avait pas suivis. Certaines auraient pu mal interpréter sa réaction et d’autres encore auraient surenchéri, prête à presque tout pour rameuter un nouveau client dans leur lit. Sans doute celle-ci était moins intéressée par les yeux bleus du milicien qu’il n’y paraissait. Quoi qu’il en soit, Alaric n’était pas mécontent d’en être définitivement débarrassé.

Quelques pas plus loin, tous deux s’arrêtèrent et veillèrent à ce que la dame n’ait rien dérobé au jeune homme. Luna n’avait pas tort : que la prostituée n’ait pas insisté était peut-être la preuve qu’elle avait eu ce qu’elle désirait. Mais c’est avec soulagement qu’Alaric dénombra le même nombre de pièces qu’il avait soigneusement rangées dans sa petite bourse de cuir. Il n’avait jamais grand-chose sur lui, mais la moindre pièce en valait une centaine par les temps qui couraient. Néanmoins, cette expérience prouvait que le milicien n’était pas suffisamment prudent lorsqu’il déambulait dans les entrailles de la ville. La prochaine fois, il serait sur ses gardes.

Aux dires de la demoiselle, Alaric hocha la tête, silencieux. Peut-être n’avait-elle jamais croisé de personnes mal intentionnées jusqu’à maintenant, mais cela ne saurait tarder dans une ville telle que Marbrume. Cependant, cette discussion démontrait combien la petite était naïve : elle n’avait pas conscience du monde dans lequel elle évoluait. Et moi ? pensa Alaric en soupirant. Jamais je n’aurais pensé que la putain aurait pu me voler, mais Luna, elle, elle le savait. Je ne suis pas plus doué qu’elle. C’était sans doute aussi pour cette raison qu’Alaric tenait tant à l’accompagner. Ensemble, ils seraient bien plus alertes et pourraient se défendre contre quelques vilains et bandits en tout genre. Son statut de milicien en persuaderait plus d’un de se tenir à carreaux. Aussi, quand Luna lui annonça qu’elle ne pouvait pas accepter sa proposition de toute à l’heure, Alaric fronça les sourcils. La petite pensait éventuellement à engager de pauvres garçons pour accompagner ses différentes tournées gastronomiques. Pourquoi pas ? Mais encore une fois, le jeune homme la trouvait trop naïve. Certains n’auraient aucun scrupule à se servir de sa gentillesse pour voler la nourriture, de l’argent ou pour commettre d’autres crimes bien pires encore. Ou alors, peut-être avait-elle déjà des noms en tête, des têtes qu’elle ne préférait pas lui dévoiler ?

Avant que le milicien puisse formuler une réponse qu’il jugeait satisfaisante, Luna planta son regard dans ses yeux bleus. Une fois de plus, elle lui démontra pourquoi elle ne pouvait accepter sa proposition. Alaric détourna le regard et croisa ses bras sur son torse. Il n’aimait pas ça, mais elle avait raison. Une tournée par semaine, c’était d’un ridicule… Il devait bien l’admettre. Et là voila qui prenait un ton bien plus sérieux qu’à l’accoutumée, histoire de clore le sujet. Le jeune milicien grimaça, grommelant un semblant d’approbation :

- Mouais, je fais pas confiance à vos p’tits gars… Présentez-les-moi avant de les engager, et vous avez mon accord. Vous savez, j’avais pas pensé que cette putain me volerait de l’argent. J’suis naïf, moi aussi. Mais des garçons de la rue tueraient pour avoir votre baluchon. Ainsi que le reste de vos richesses. Moi, en tant que milicien, je peux dissuader pas mal de gens, ce sera le cas de vos petits malheureux ? Je veux voir ça moi-même.

Replongeant son regard dans celui de la petite noble, il ajouta :

- Vous avez déjà des garçons potentiels en tête ? Finissons d’abord ce tour, puis montrez-les-moi au plus vite.

Son ton était plus tranchant et un brin d’agacement complétait ses paroles. Il était énervé contre lui-même, parce qu’il n’était pas parvenu à la faire changer d’avis, mais aussi contre elle, une enfant tout aussi bornée que lui. Enfin, il tenta de reprendre son calme et passa une main dans ses cheveux de jais en fermant les yeux. Il ne voulait pas l’effrayer ou la mettre plus mal à l’aise qu’elle ne l’était déjà.

Un jour, il faudrait qu’il comprenne que le monde ne pouvait pas tourner comme il l’entendait, qu’il ne pouvait pas arranger tous les problèmes à lui tout seul. Cette idée germait au coin de son esprit, mais il la repoussait sans cesse. S’il se laissait envahir par cette malheureuse réalité, son optimisme serait vain et il craignait que tout espoir finisse par le quitter.
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