Marbrume


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 Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)

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Anton GunofBoucher
Anton Gunof



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MessageSujet: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyJeu 8 Oct 2015 - 21:21
"Et ça, c'est des panais ?" fit Anton pour alimenter la conversation.
"Tout juste. La poulaille nous a donné du fil à retordre au début, mais c'est réglé maintenant, ça pousse bien." Les deux gardes jetaient un coup d'oeil indifférent sur le potager de fortune qui avait remplacé le terrain central du corps de ferme réquisitionné par la milice. Peigné de sillons tassés et nombreux où se croisaient d'étroites planches, le jardin improvisé était parcouru par des poules affolées. Parfois, l'une d'entre elles s'approchait trop près des écuries où, à travers les stalles, aboyait un molosse ou deux.

"Ils vont bientôt se dévorer les uns les autres," commenta le collègue à Anton comme l'une des bêtes griffait la porte trop haute du chenil bricolé. "Un gars de Porte-Crépu m'a raconté qu'ils avaient donné un fangeux à leurs chiens et que ça les avait pas ensorcelé ni rien. C'est vrai dis, t'en sais un bout sur ça, Anton ?" Silence. Le garde haussa les épaules. "Le vieux voudra jamais de toute manière... Il préférerait qu'ils dépècent un métèque."

Si la faim était un souci pour les petits chouchous du vieux Friedman de la poterne Schönberg, le caïd de cette garnison, cela n'était pas vrai pour ses hommes. A l'étage où se trouvaient nos deux comparses, dans une grande salle commune d'un confort rustique, une odeur âcre enfumait une douzaine de soldats, çà assis et tapant le carton, là huilant leur arme. D'une vaste cheminée se dégageait les exhalaisons puissantes de saucisses et de poissons rôtis de conserve, à la marge d'un jeu de petits chaudrons où glougloutaient du brouet et du vin. Ce mélange des saveurs, ajoutés à la concentration d'individus à l'hygiène lâche, avaient poussé nos protagonistes à ouvrir l'un des volets pesants qui enfermaient les rares fenêtres de la ferme pour y feindre l'observation du jardinet.

Ils n'étaient pas à plaindre cependant.

Ce vaste ensemble de bâtisses, sis en face de la poterne Schönberg, avait été réquisitionné des semaines de cela. Le capitaine Karl, sous le coup de l'état d'urgence de la cité et l'irruption fortuite d'un fangeux dans la ferme, transforma les lieux en un corps de garde, fortifia les bâtiments, y installa ses hommes et y entreposa citernes, chiens, armement, chevaux, bêtes de bât et farines. Pain béni pour la garde dans un Labourg affligé d'un afflux massif de nouveaux arrivants, la maison forte dominait les alentours, autrefois des vignes et des vergers, maintenant un océan d'auvents, de cabanons et de venelles incompréhensibles. Autre avantage, la cave donnait sur un boyau relié aux égouts de la cité.


Dernière édition par Anton Gunof le Jeu 3 Déc 2015 - 10:27, édité 1 fois
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Aymeric de Duègme
Aymeric de Duègme



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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyVen 9 Oct 2015 - 18:21
Comment perdre près de la totalité de sa paie hebdomadaire en une soirée. Ce n’avait pas été en boisson, même si Aymeric avait ingurgité une veille ripopée à la couleur saumâtre. Ce n’avait pas non plus était en putes ou en afféteries nitescentes pour s’en aller séduire de vieille veuves encore potables, même si, dans l’établissement qu’il avait fréquenté, quelques-unes demeuraient présentes pour trouver de la compagnie, au moins pour ces premières. Non, dans ce bouge crasseux à l’air gras et enfumé par cette cheminée noire de suie qui crapotait un feu chétif, il avait perdu sa paie en balançant des cartes de façon hasardeuse, sur une table collante où s’agglutinaient dans les raies naturelles du vieux bois des restants de sauce. Les temps étaient durs, ouais, et les paies n’étaient pas si élevées que cela lorsqu’elles étaient comparées au sacrifice parfois nécessaire que l’on demandait aux gardes. Ou plutôt, que l’on exigeait de leur part. Et ces mêmes paies se révélaient par ailleurs si basses que, de temps à autre, on leur préférait volontiers un autre paiement, en nature, et, surtout en nourriture. Alors, pris par une soudaine foucade, Aymeric avait décidé de prendre et sa paie, et son destin en main, afin de tripler les gains. Si les cartes avaient été alignées les unes après les autres avec cette précision et cette souplesse dans le mouvement tributaire des années de pratique, les planètes, quant à elles, en avaient décidé autrement. Résultat des courses, Aymeric avait perdu tous ses gains, et avait gagné, en échange, une certaine rancœur à l’encontre de cet enfoiré bien astré.

Tapant du poing sur la table, il jura comme un charretier, brocarda la famille de l’ivrogne qu’il avait en face de lui, commençant par ses enfants jusqu’à ses trisaïeuls. Une petite algarade eût été des plus commodes en cet instant précis, une échauffourée, une vulgaire bagarre de taverne qui lui aurait permis de se défouler, de lui péter la tronche, et, pourquoi pas, de récupérer d’une manière plus ou moins douteuse son argent mal placé. Mais rien à faire ; avec la conviction suffisante de l’homme qui se gaudit de son adversaire, un petit sourire condescendant et ravis gravé sur ses lèvres ravagées par la chique, il se contenta de ricaner grassement, empochant la somme avant de tourner les talons. Ce fieffé salaud avait bien gagné de quoi se nourrir pendant quelques jours encore.

L’œil sombre et mauvais, prêt à s’accrocher au moindre sécot qui l’affronterait d’un regard en croix, il quitta à son tour la taverne, n’hésitant pas, dans un sursaut d’orgueil, à claquer la porte branlante, constituée d’un assemblage vertical de planches de bois. L’air froidureux de l’extérieur le revigora quelque peu, le sortant de sa torpeur endêvée et menaçante. Là, dans les ruelles sombres qui s’étranglaient les unes sur les autres, il y avait bien davantage à redouter que de simples bougres aux chicots noirâtres se substituant aux dents. Au sein même de la ville, dans les quartiers intérieurs, la présence de fangeux demeurait rare, mais il suffisait d’une seule fois pour que tout basculât. Mais pour le moment, il n’avait qu’une nouvelle chose en tête, peut-être aussi pire que la perte récente de ses deniers ; il devait reprendre du service. Là encore, il avait rudement bien mis à profit le temps libre qui lui avait été accordé. Il jura une nouvelle fois.

Aymeric se rendit là où on l’attendait, dans cette ancienne ferme dont s’était emparé la milice afin de la fortifier et d’en faire un certain bastion dans le quartier. Des dortoirs, des décharges, des stalles et même une cour intérieure où, au sein de ce lotissement de misère et la pauvreté des terres, l’on avait commencé à faire pousser des plantes rachitiques qui permettaient toutefois de récolter de quoi se nourrir. Aymeric déclina son identité aux soldats qui gardaient l’entrée, passa sous le corps de garde, rentra dans cette cour intérieure, observa cette fenêtre ouverte d’où pointaient quelques têtes qui observaient les environs, et, quittant la fraîcheur de l’extérieur, grimpa dans les étages jusqu’à pénétrer dans cette pièce commune à la touffeur ambiante. Là, l’odeur de l’homme se mêlait à la fragrance de la viande que l’on faisait rôtir à petit feu dans un gros bouillon ; il s’y dégageait quelque chose d’aussi capiteux qu’écœurant.

«Salut, les gens », grogna-t-il avec une platitude évidente à l’ensemble des gars ramassés là, avant d’aller chausser ses solerets d’acier dans un coin.
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Anton GunofBoucher
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyLun 12 Oct 2015 - 18:32
"C'est-y pas le Bucéphale du pauvre qui s'en vient par là..." observa un Gunof incrédule. "Tiens, le Messire vient sans sa haquenée." ricana-t-il méchamment une fois qu'il s'eut recomposé une allure avant de reprendre : "Ca se sait que la poterne Schönberg se coltine les pires furoncles de la garde, mais vous en êtes abaissés à enrôler ces raclures de parvenus ?"

"Ouais." répliqua prudemment le collègue, qui n'avait visiblement pas envie d'en rajouter une couche. Il n'était pas rare que l'histoire de cette étoile filante d'Aymeric de Duègme crée les sympathies parmi la milice : l'homme et son histoire l'avaient doté d'un certain lustre, et sa notoriété n'avait fait qu'accentuer le pathos du drame de sa vie. En un gros mois, il avait perdu père et protecteur, femme et descendance. Beaucoup de Marbrumeux, à la disparition d'un parent, enfant, femme, avaient décidé de rejoindre la milice pour étancher une soif de vengeance absurde ou une plus compréhensible envie de mourir. Beaucoup des gens d'armes de la cité comprenaient ce comportement et y prêtaient un regard apitoyé mêlé de campanilisme.

L'étranger, dans leur caboche, ne vivait pas ce genre de déchirements, et ne voulait pas rejoindre la garde emmené par des idéaux aussi purs que la revanche achabienne ou la pulsion suicidaire. Il n'avait pas perdu d'être cher, n'avait pas subi l'exil. Il était juste là pour se tourner les pouces devant les cheminées du duc et manger sa soupe chaude. Entre ces deux avis des plus manichéen se trouvaient quelques cas d'exception, et Aymeric de Duègme en était un.

Ce n'était pas tant à cause de son existence hybride, son statut social bâtard, où la métaphore du cul coincé entre deux chaises s'appliquerait à la perfection, que de l'incident des Sarosse. Et Anton en savait un bout, de l'incident des Sarosse, il avait été à la porte du Crépuscule, la Porte-Crépu, quand le massacre eut lieu sous les yeux atterrés des hommes du duc et la sourde oreille de ce dernier. Le spectacle en avait remué plus d'un, et avait marqué pour beaucoup la fin d'une ère. Il n'était plus de roi, plus d'aristocrate, plus de dieux ; le monarque avait été emporté il y a bien longtemps, les nobles qui, l'été dernier, battaient le pavé de Marbrume, accompagnés de foules bruyantes, habillés des plus riches brocards, mouraient sous les murs de la ville, les dieux avaient laissé place au fléau de la Fange. L'ordre ancien et ses mille nuances compliquées s'était cassé. A présent, les choses étaient plus simples : il y avait la vie et il y avait la mort, il y avait l'ordre et le chaos, et il y avait le duc et ses ennemis. Et on ne pouvait ménager chèvre et chou à la fois.

Or, pour un homme tel qu'Anton Gunof, Aymeric, c'était du Sarossien par naissance - du moins par adoption. Du genre dangereux avec une épée, terrible à cause de son nom, en bref, un ver dans la belle pomme du duché. "Dreieinigkeit..." conclut-il dans un souffle en regardant ledit ver parcourir les planches de la cour jusqu'au point de rendez-vous. A l'entrée de celui-ci, il se terra dans le mutisme, rejoignant les gars qui briquaient. Une heure se passa ainsi, des nouveaux soldats apparaissaient du dehors comme des autres pièces, qui se mirent à s'occuper en s'enfilant une lampée de potage, une tranche de chèvre, une coupe.

L'homme qui avait parlé botanique avec le garde Gunof, après plusieurs messes basses avec une estafette qui semblait faire navette entre lui et l'autorité supérieure, finit par attirer l'attention de la petite vingtaine d'hommes.
"Silence, silence, les gars, on a assez traînassé. Aujourd'hui, on est une patrouille pas comme les autres. Pour ceux qui savent, le vieux mène rafle sur tout le coin situé d'ici à la rue des potiers et l'avenue des Hytres ; pas du mince oeuvre, vous soupçonnez. Le but est de sortir de leurs pénates le plus de parasites possibles qui vivent aux crochets de notre bon seigneur Sigfroi et de son duché : tous les hommes capables entre 12 et 50 hivers sans occupation se feront donc connaître pour rejoindre les corvées de défenses et d'explorations en tant que bûcherons, maçons, manoeuvres en tout genre afin de protéger les familles marbrumeuses de la Fange. La garde sera là pour ceux qui seraient trop timides pour faire savoir leur existence." Rires dans la pièce. "Nous, on est les chanceux, on aura charge des égouts lors de la rafle. Aujourd'hui, si ça sent doublement plus la crasse ici, c'est parce qu'on a l'insigne honneur d'accueillir des irréguliers dans les rangs. Beaucoup de bleus, alors gaffe à vos culs les gars. On est nombreux, mais on passe pas par l'itinéraire classique ; on va passer la zone au peigne fin et montrer aux jeunes les trous qu'ils auront à surveiller. Je suis premier patrouilleur, le garde Gunof est deuxième patrouilleur, le garde..." Il hésita sur le patronyme d'Aymeric. "On m'a dit que vous connaissez ces recoins-là, on s'est fourvoyé ?"
...
"Questions ?
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyMer 14 Oct 2015 - 20:04
Il y avait de tout, dans cette pièce réchauffée par le feu et les hommes, d’où s’échappait par la fenêtre une brume tiède, humide, et vaporeuse. Des bleus qui n’avaient encore jamais tenu une épée, plus habitués à manier la charrue, la fourche, et la faux, et qui se rassuraient du mieux qu’ils le pouvaient en prenant exemple sur leurs aînés de métier, balançant çà et là d’une voix chevrotante des grivoiseries et des blagues libidineuses. Il y avait des miliciens, déjà plus ou moins équipés, plus calme d’apparence, qui se mêlaient parfois aux bleus pour leur expliquer deux ou trois trucs, si cela leur permettait de tenir une heure de plus. C’était toujours un futur camarade en sus à ses côtés, pour couvrir ses flancs et ses arrières, qu’un fangeux prématuré à affronter en moins l’instant suivant. Puis il y avait des vétérans, bien plus rares, ceux-là. Ceux qui savaient manier l’épée depuis bien des années, ceux qui avaient survécus à plusieurs combats, et qui pouvaient jouer les hâbleurs en crânant chichement, si leur cœur leur disait, racontant cette première poignée de jours où ils avaient vu les fangeux pour la première fois. Des gardes, des soldats de métier, des forgerons, quelque fois, des gentilshommes, et, peut-être même, cela arrivait, un noble tombé en disgrâce, ou ayant tout perdu. Aymeric se considérait en tant que vétéran, uniquement par sa pratique aux armes. Car, de son point de vue, tout le monde était néophyte en la matière, à leur sujet.

Il n’y avait pas eu de silence gêné à son arrivée ; si certains s’étaient bien gardés d’émettre le moindre commentaire, d’autres, en revanche, l’avaient hélé avec une certaine sympathie. Aymeric avait croisé des visages connus, d’autres miliciens, d’autres vétérans, d’autres bleus, même, certains en passe de de pouvoir se gargariser de posséder un semblant d’expérience après quelques échauffourées plus ou moins difficiles. Si son visage demeurait toujours sombre, le plus souvent, quelques rares et faibles sourires venaient éclaircir la pénombre fermée de ses traits pourtant accorts. Une poignée de main par-ci par-là, une plaisanterie de-ci de-là ; qui lui adressait une simple parole, qui ricanait dans son dos, qui, encore, lui témoignait tout son respect en exhibant un certain doigt levé à son attention. Ainsi allait la garde, dans ses amitiés, ses inimitiés, et sa rustauderie aussi machiste que virile.

Voyant que le temps se forlongeait dans l’inactivité, après avoir enfilé ses solerets pour s’apprêter à un départ précipité, une mission soudaine, le nouveau-venu avisa le bouillon et les tranches de chiens, de chats et de rat que l’on avait faits mijoter sur le feu, et décida de s’en prendre une tranche. C’était toujours une petite heure de gagnée sur la perpétuelle avancée, inexorable et dévorante, de la faim qui vous tailladait l’estomac et les boyaux. Là encore, il se mêla à quelques personnes de sa connaissance, visages connus d’une simple expédition qu’il ne reverrait peut-être pas le lendemain, ou bien soldats de longue date, toujours présents.
La salle continua de se remplir à mesure que se vidait la grosse bassine posée sur le feu, et, à chaque nouvelle entrée, les mêmes salutations, accolades et autres sollicitudes s’échangeait. Jusqu’à ce qu’un gus prît la parole, meneur de tout rassemblement de miliciens.

La mission était fort simple ; débusquer les bougres qui se planquaient dans les égouts pour tenter d’échapper à leurs devoirs civiques. Il risquait d’y avoir de tout, là-dedans. Contrebandiers, ruffians, lanterniers, souteneurs, réfugiés, bannis, bêtes pécores, et, possiblement, des fangeux. Et c’était très certainement cette dernière chose que tout le monde craignait vraiment, sans pour autant l’avouer.
L’on interpela Aymeric, afin de savoir s’il connaissait les égouts. Il eut un instant de flottement, se demandant bien là s’il s’agissait d’un brocard à son encontre, une ironie mordante sitôt que l’on connaissait son ancien statut de presque noble, de celui qui se pare des plus bels étoffes, des plus belles vêtures, et qui n’a rien à faire dans ces lieux putrides. Il balaya finalement ces sombres pensées d’un revers de son esprit.

«Je connais vite fait, pour les quelques expéditions que j’y ai faites. Simplement les chemins de patrouilles habituels, de ceux qui effleurent la surface et qui mènent aux points sensibles ; caches, refuges, et contrebandes. Pas les tréfonds. »

Ceux-là, de toute façon, il ne devait pas y avoir de personne pour se targuer de les connaître par cœur, voire même de les connaître tout court, dans l’ensemble de leur vastité. Les égouts s’étalaient sur des lieues et des lieues, s’enfonçant dans les entrailles de la terre, eux-mêmes bâtis sur d’anciennes voiries et autres écoulements séculiers. Quelques cartes existaient possiblement, mais, en la présence fréquente d’inondations, d’éboulements, de déblaiements de la garde, de nouveaux points sensibles et dangereux à éviter, et de contrebandiers et voleurs qui creusaient de nouvelles galeries, elles devenaient rapidement obsolètes. Et c’était pire encore depuis que les fangeux avaient commencé à infester les lieux.
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyDim 25 Oct 2015 - 1:36
"Une page. Blanche avec ça."

La recrue, un jeune poète dans l'âme sans aucun doute, eut un moment de flottement, perdu dans la contemplation du chiffon souillé qu'il serrait dans sa main comme s'il s'agissait de l'âme soeur. Et pendant ce temps, on pataugeait dans un pied de merdes congestionnées.

"Oui ben oui, c'est une page blanche. Personne n'a jamais fait grand-cas d'une page blanche." fit remarquer le très prosaïque Anton Gunof, en tête d'une demi-douzaine d'hommes, et plus dans le ton glébeux que le vert qui marchait à ses côtés. Le deuxième patrouilleur s'était écarté du gros du peloton sur l'ordre du premier, longeant le couloir principal par l'une de ces coursives accidentées qui constituaient la majorité des canalisations de l'ancienne Marbrume. Le but était pédagogique, des six bohommes ramenés, trois n'y connaissaient goutte aux égouts de cette brave cité. Aussi on arpentait le boyau et désignait trapes et échelles de cordes qui serviraient, le lendemain, comme autant d'échappatoires, aux proies de la rafle voulant éviter la poigne de l'autorité marbrumeuse.
"Ca va l'arrière ?" lança d'une demi-voix assez forte Anton, qui n'avait aucune envie de se lancer dans une conversation sur l'enjeu et le symbole de la page blanche, et souhaitait un peu rappeler sa présence à Aymeric, qui gardait la fin de leur escouade.

"Moi j'ai une question." se remémora Anton d'un instant, une heure auparavant. "Pourquoi est-ce que c'est le sire qu'est troisième patrouilleur, Jörn ou Reinhardt y s'y connaissent les souterrains comme si c'était leur queue." avait-il fait comme ça, un regard méchant à l'adresse de cette petite raclure d'Aymeric de Duègme. La réponse n'avait pas été du goût de notre protagoniste. "Gunof, vous êtes deuxième, Aymeric troisième comme moi je suis premier. Ce sont les ordres." Cela n'avait pas rendu le deuxième patrouilleur jouasse, qui souhaitait le faire savoir à son collègue le troisième patrouilleur.

On avançait tranquillement. La bleusaille ne semblait pas prendre conscience de ce qui pouvait se tapir au found de ces souterrains. La lumière du soleil, pour beaucoup, était un élément donné. L'homme vivait grâce à lui, comme toute créature vivante, quoi de plus normale. Difficile pour ces gens-là, souvent fils de paysans ?, de s'imaginer une monstruosité qui se repaissait de la noirceur, comme les créatures des contes de bonnes femmes.

Hélas ici ni conte de bonnes femmes ni gestes épiques. La seule chose qui, dans ce couloir chichement éclairé, se fit entendre, c'est le sifflement d'une dondaine. Le projectile, propulsé après un puissant "KLAK" qui résonna jusqu'au fond de l'escouade, vint rebondir sans grand effet sur le plafond.
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Aymeric de Duègme
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyLun 26 Oct 2015 - 21:27
Ils s’étaient engouffrés dans les profondeurs. Il n’y avait rien de perceptible ou de palpable, mais c’était comme s’il se dégageait de l’air une purée de poids verdâtre qui vous mettait mal à l’aise, comme si le simple fait de respirer, que ce fût par la bouche ou par le nez, vous donnerait toutes les maladies du monde, en faisant peser dans votre estomac comme dans vos poumons un sac de briques qui se désagrégeait. L’odeur était fétide, abjecte, et dans relents de nuages poisseux qui flottaient çà et là dans un brouillard opaque. De petites flaques d’eau croupies barraient le passage, s’étendant parfois à de véritables étangs infects, et il fallait le contourner avec précaution, de peur de disparaître au fond d’un trou puant. Le chauve leur en fit rapidement la démonstration. Aymeric se rappelait de sa première fois dans les égouts, et du premier savoir qu’il avait acquis ici-bas. Il tenait à le faire passer à la bleusaille, quelque fois que.

«Attendez un peu. Regardez donc ça », lança-t-il soudainement en s’emparant d’une grosse pierre. Devant eux, le chemin apparaissait comme étant plat, bien qu’une marre d’eau recouvrait le sol. Tout au plus, et ce n’était là qu’une histoire de semelle trempée, rien de plus, si l’on souhaitait continuer le chemin. Pourtant, lorsqu’il laissa tomber la pierre au sol, les eaux s’ouvrirent en deux sous l’effet de l’impact, et, plutôt que de ricocher sur de la roche, à un pouce en-dessous de l’onde croupie, la pierre creva les flots, disparaissant dans des abîmes verdâtres et oubliées.

«Ça peut surprendre, parfois. Dans les faits, ce n’est pas si grave que cela. Le seul problème résidant dans le fait que, comme c’est plutôt inattendu, tu pousses un petit cri bien viril alors même que tu perds pieds dans ce que tu pensais n’être qu’une petite flaque, et tu bois la tasse. Le lendemain, tu chies du sang, et le surlendemain, tu es mort, vu le bouillon de culture que cela représente. Donc gaffe où vous mettez les pieds. »

Cette partie des égouts n’était qu’un enchevêtrement de boyaux plus ou moins étroits qui s’entrecroisaient à foison, sans rien pour les distinguer. Des fois, de plus grandes salles apparaissaient, et, sous la couche de moisissure et de mousse, l’on pouvait deviner une pierre au grain bien plus pur que dans les tunnels précédents, vestiges de sous-sols d’une vie passée. Des caves, peut-être, des passages souterrains construits pour l’on ne savait plus quelle raison, mais qui demeuraient toujours, transformés depuis en écoulement des eaux usées. A la lueur des torches, des piliers antiques apparaissaient parfois, des statues décapitées, des encorbellements séculaires, et, dans le boyau d’après, tout disparaissait pour ne laisser la place qu’à une vieille roche dégueulasse et de la terre. Et vint le moment où on le chercha.

« Très bonne question. J’ai pas non plus idée de pourquoi un type qui a récemment tiré dans le derch’ d’un de ses camarades sous l’effet de la surprise n’a pas été nommé troisième patrouilleur. Ou, pour Reinhardt, pourquoi on a pas décidé que, soudainement, les morts devraient reprendre le contrôle. »

Il laissa planer le petit silence qui s’en suivit ; user de la mort d’un milicien comme moyen de réponse n’était clairement pas très probant, mais il s’en foutait bien. Aymeric ajouta, comme si cela explicitait tout :

« C’est arrivé ce matin. Mais cela l’agaça plus qu’autre chose, aussi continua-t-il. Pourquoi, ce sont tes potes ? J’espère que tu partages pas leurs qualités, parce que, putain, on est pas dans la merde, sinon. »
Et l’on continua la route. Les bleus avançaient à grand-renfort de précaution, dans ces mouvements de débutant qui laissait supposer que tout pouvait être susceptible de danger. Ils n’avaient peut-être pas tort, les bougres. A côté de ceux-là, les plus aguerris avançaient avec une certaine nonchalance, dans ce simple tour de garde, mais il ne fallait pas s’y tromper ; les regards étaient aux aguets. Une certaine nonchalance, jusqu’à ce qu’il y eût cette sagette décochée d’on ne savait où.

«A couvert ! » brailla-t-on de partout. Ce qui n’avait été qu’un premier avertissement s’amplifia soudainement, et ce ne fut pas un, mais toute une virée de carreaux qui fusa dans leur direction. L’on rampa dans la boue et dans la merde, dans la fange et les eaux croupies, l’on s’abrita derrière des murets défoncés, usa de grilles rouillées comme abri, ou encore des gâts qui menaient aux caniveaux creusés et profonds, au milieu du tunnel, pour se planquer ribon-ribaine. Il y eut également quelques cris étouffés, de ces grognements de douleur qui vous indiquait que votre camarade venait de se faire toucher.

«Bonne nouvelle, ce sont pas des putains de fangeux ! Mauvaise nouvelle, ils peuvent nous pigeonner à distance. »

Les tirs avaient cessé sitôt que les gus de là-bas avaient remarqué que leurs cibles sur pattes avaient trouvé refuge là où ils le pouvaient.

«C’est quoi, ce merder ?
- Probablement de la merdaille, des contrebandiers, ou du pécore qui veut pas s’faire enrôler, si ça se trouve. Enfin, pour nous tirer sur la tronche alors qu’on a des torches, ça doit pas être de la bonne gens, ça. Ça porte pas des torches, les fangueux, hein ? Pas d’erreur sur notre identité ?
»

Aymeric écouta tout ce beau monde parler, avant de lancer, à son tour.

«Alors, m’Sieur le deuxième patrouilleur, que fait-on ? On charge comme des brutes, on tente l’approche diplomatique, ou on rebrousse chemin ? J’espère juste pas terminer en Reinhardt. »
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyJeu 29 Oct 2015 - 19:40
Le dit deuxième patrouilleur eut un regard assassin pour celui qu'il surnommait en son for intérieur "le Sire". Un silence tendu, remué de murmures, de cliquetis et des grognements d'un de leurs gars, s'était installé dans le boyau méséclairé. Une torche, qui mourait sur le sol humide et qu'un vert avait dû lâcher dans la précipitation, projetait sur les murs sales des silhouettes virevoltantes. Le cul déjà trempé par le sol moisi, à l'abri derrière un grand tonneau éventré et plein d'une eau croupie et malodorante ainsi que deux conscrits qui mettaient autant barrières entre lui et une dondaine joueuse, il considéra vite la situation.

"Cht, on écoute, le rang. Troisième patrouilleur, vous repartez à l'arrière avec deux verts, vous me trouvez le moyen de prendre cette racaille par le flanc ou l'arrière..." Le plan, instinctif, plut à Gunof quand il l'analysa plus à fond. Cette coursive, annexe au goulot principal, était déjà dans un état précaire. S'en écarter, c'était se risquer dans un gruyère de trouées et de couloirs instables, contenus par des étais fragiles, parfois rongés par l'humidité ou mordus par l'air iodé des embruns, habité par les dieux savent quoi. Vraiment, aventurer le troisième patrouilleur dans un tel guêpier n'était pas pour dégoûter le garde Gunof, qui trouvait que, pour le coup, impératif tactique et petitesse envers un camarade honni s'articulaient très bien ensemble. "Et pas de repérage ou de reconnaissance. Une fois en mire, vous êtes sur eux : ni quartier ni merci, vous vous signalez en criant, vous perturbez leurs tireurs comme vous voulez, les gars et moi on les arrive de front. D'ici à là, on couvre votre départ en faisant une vraie foire. Question ?"
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Aymeric de Duègme
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyJeu 5 Nov 2015 - 15:36
En fin de compte, un plan fut rapidement établi pout Aymeric. Déguerpir de là dans quelque endroit plus sûr, et tenter de trouver un chemin pour effectuer une percée par l’arrière ou le flanc de ce bastion de fortune, enterré sous les égouts. Un plan qui ne l’enchantait point, dans les grandes lignes. Fallait déjà se tirer de là, aller à reculons, et, donc, se dégager de leur couvert. Les sagettes et les dondaines risquaient de pleuvoir de nouveau, et cette perspective n’était pas pour réjouir Aymeric. Par la suite, errer dans les sombres boyaux du ventre de la terre s’avérait peut-être aussi dangereux que de rester planquer là, surtout à trois. S’ils avaient de la chance, ils ne croiseraient rien ni personne. Sinon… Un autre repère de malfrats, ou, pire encore, des fangeux égarés, en nombre, et c’en était fini d’eux. Mais les ordres étaient les ordres.
Ah, nouvelle chose ; il leur faudrait foncer tout droit sur l’adversaire et leurs arbalètes une fois que ces derniers auront été contournés. De mieux en mieux. Le garde se disait que, tout compte fait, il eût mieux fait de fermer sa gueule ; cela l’aurait empêché d’être envoyé en première ligne pour aller au casse-pipe. Ces barricades de fortune avaient l’air de véritables petits paradis en comparaison de ce qui pouvait possiblement l’attendre dans des tunnels annexes. Quel fis de pute.

«On y va les gars, on y va !
- Sus à l’ennemi !
- Yaaahh !
- Vous deux, venez avec moi.
»

Il y eut des cris en tout genre, des aboiements, des hurlements, et même un bougre pour bander son arc et décocher maladroitement, par-dessus le couvert d’un vieux muret délabré, sa flèche en direction de l’adversité. Mais c’était là bien davantage de mots que d’actions, car, pendant ce temps-là, Aymeric, suivi de deux autres gus, se barraient de là ventre à terre, avec cette moue du visage écarquillé, très attentive et précautionneuse, qu’arboraient souvent les lâches qui abandonnaient leurs camarades. Une nouvelle volée de flèches vint tenter de cueillir les belligérants, mais le trio avait déjà déguerpi de là pour savoir si on avait fait mouche ou non.

Trouver un embranchement qui permettait de contourner les types qui leur tiraient dessus n’était pas chose facile ; cela relevait tout simplement de la chance. Certes, ils avaient emprunté de nombreux carrefours avant de parvenir jusqu’à ce point de rencontre, et tout autant de nouveaux chemins s’offraient donc à eux, mais il fallait être bien astré pour que ceux-ci les menassent pile-poile de l’autre côté, selon une trajectoire bien précise. Sans inondation. Sans éboulement. Sans autre brigands. Sans Fangeux. Aymeric se demanda le bien-fondé de ce plan ; à croire qu’il s’agissait d’une mission suicide, ou comment égarer trois des types de sa troupe. Il aurait dû parler, émettre une objection. Mais il fallait bien l’avouer ; désobéir aux ordres n’était pas véritablement dans ses premières fonctions, et le fait que des enfoirés cherchaient à les plomber de carreaux et d’autres joyeusetés n’invitaient clairement pas à la réflexion. C’était l’action qui primait avant tout, le besoin de se raccrocher à un ordre, un fait, en espérant que celui qui les balançait avait la tête plus claire que vous ne l’aviez. Fallait croire que non.

Là, après qu’ils se fussent esbignés, la tension avait brutalement chuté, et, tout en maintenant une certaine vigilance, le calme trompeur des boyaux obscurs permettait aux bougres que de pourpenser sur leur situation. L’épée au clair, les torches élevées, ils avançaient, le regard alerte, mais le pas rapide. Il fallait faire gaffe, de toute évidence, mais sans trop baguenauder non plus ; le restant de la troupe comptait sur leur diversion pour rendre gorge à ces fumiers qui les avaient canardés.

« Mmmer…. »
Plouf.

Ils se retournèrent tous. Enfin, deux le firent, que pour mieux voir le troisième en train de disparaître sous la surface, dans une de ces grandes flaques trompeuses. Il barbota une seconde, battant des bras et des pieds, avant de se faire entraîner par le poids de son attirail sous le regard incrédule de ses compères. Aymeric tiqua avant de se jeter au bord de l’abysse invisible, rapidement rejoint par l’autre soldat. Ils plongèrent leur main dans l’eau croupie et immobile. Aymeric crut bien sentir quelque chose du bout de ses doigts, mais était-ce une main tendue désespérément, ou une algue visqueuse, ou encore la simple paroi délabrée de cet étrange puits sans fond ? Il ne le sut pas, et ne put récupérer son camarade, à l’instar de son collègue qui fendait l’onde de son bras. Il fallait se rendre à l’évidence ; ils n’étaient plus que deux.

«… Je vous avais bien dit de faire gaffe où vous foutez les pieds. Et merde ! »

C’était toujours différent, passer de la théorie à la pratique. On savait bien que cela pouvait arriver, on savait bien que c’était plausible, et qu’il fallait s’en méfier. Mais l’on n’était jamais assez trop prudent, et lorsque le destin vous rattrapait, lorsqu’un homme disparaissait en quelques secondes, avalé par une crevasse, et qu’il ne restait de son corps plus que quelques bulles éparses à la surface, cela vous plantait un gros coup de poing dans le creux du ventre. Ils demeurèrent là, ne sachant que dire, un peu perdus. Et reprirent la marche, en silence.

A deux, plus que jamais, ils espéraient ne pas tomber sur des fangeux ou des types aux mauvaises intentions.
Ils continuèrent d’avancer, mais rien ne leur indiqua la moindre présence hostile. Il n’y avait que des clapotis d’eau, des gouttes qui tombaient inlassablement sur les vieux pavés d’anciennes voiries, le bruit de leurs pas, et le cliquètement des maillons de leurs cottes. Il y eut des détours, des virages, de grandes lignes droites, d’autres carrefours ; tout ce qu’il fallait pour brouiller le meilleur sens de l’orientation possible. Certes, ils avaient bien pensé à marquer leur passage à l’aide d’un vieux morceau de charbon, mais de là à tomber véritablement de l’autre côté des idiots qui leur avaient tirés dessus pour les prendre à revers… C’était toute une autre histoire. Et puis…

«Et merde ! »

Soudainement s’étala devant eux une immense étendue d’eau qui bloquait le chemin. Les torches ne portaient pas assez loin pour percer les ténèbres du bout du couloir, et la chiche lueur donnait une atmosphère assez irréelle à la scène, au travers de cette purée de pois verdâtre qui tapissait les murs et les arches séculaires.

«Euh… On tente quand même pas de traverser à pied, j’espère ?
- T’as bien vu ce qui arrivé tout à l’heure ? Clairement pas. Pas si tu veux finir noyé dans la merde, emporté par le poids de ton armure. On sait pas à quel niveau est le sol. Ça peut être une petite couche d’eau, et, l’instant d’après, la marche de trop qui te fera chuter dans les tréfonds des égouts. Mieux vaut rebrousser le chemin. Trouver un autre embranchement, ou bien rejoindre les autres, dire qu’on a pas trouvé. On avisera.
- D’accord, d’accord. Ça me va aussi bien.
»
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyJeu 12 Nov 2015 - 16:16
Quand notre larron eut fini de ricaner de cette belle occasion de plonger celui qu'il attifait du quolibet de "Sire" dans la merde, il se concentra sur son devoir de patrouilleur et décida d'honorer sa parole. Une foire, ils en feraient, et une de tous les diables, pardi !

Peu empressé de se relever mais désireux de s'afficher avec un peu de gravitas aux yeux des verts comme des plus mûrs de son escadron, le garde Gunof se sortit le cul de la vase pour se redresser. Partagé entre l'envie d'en imposer et d'éviter autant que faire se pouvait un vireton malicieux, il se portait sur deux jambes bien droites tout en arquant le dos comme un bossu. "YAAAARH!" fit-il pour donner le ton tandis que le Sire et ses jeunes filaient à l'anglaise vers l'arrière et, si la Providence avait le sens de l'humour mais pas celui des probabilités, sus à l'ennemi. Cette avant-garde de suicidés disparut et la rumeur se calma. De l'autre côté du tunnel, dans la pénombre, l'ennemi, qui avait voulu donné le change aux cris virils de babord, fit du tapage à tribord en miroir.

Après ça, on attendit, en silence et gêné. Parcouru par un étrange et très ponctuel sens de la dignité, Anton le deuxième patrouilleur ne se sentit pas de poser le derrière dans la crasse. Comme investi très sérieusement de sa responsabilité envers les gars, et se rappelant soudain que la petite équipée du Sire de Duègme, pour plaisante l'impression qu'elle faisait sur lui, n'allait certainement pas débloquer cette situation, Gunof se redressa un peu plus à découvert. Il pensa un instant aux choix qu'il avait dans l'escarcelle et opta pour le plus simple et le plus inefficace.

"Hardi, les hommes ! On va pas se laisser aller à cause de trois pelés et de quelques bouts de bois." Il avait donc choisi la stratégie de l'intimidation en mode grande gueule, dans l'espoir pourtant ténu de rameuter la patrouille principale ou de faire fuir les malandrins. Il marchait un peu d'une barricade rigolote à une autre, sa voix sonnait car il parlait fort, distinctement. "Allez, hardi, hardi ! Quand c'est que je les entends les tueurs de la garde ? Hein, elles sont ici, mes tueuses, ou c'est rien que des couseuses céans ?" Et comme il essayait d'insuffler un genre de colère bien malgré ses compétences oratoires aux gars, une dondaine vient siffler et ricocher au mur dans un crissement. Un vert de la patrouille, déjà bien abrité, se recroquevilla un peu plus. Anton l'entendit. Il tira le bonhomme de son trou pour le remettre sur ses jambes avant de lui aboyer dessus.

"Allez, c'est fini le temps où qu'tu pouvais te souiller les langes à avoir peur du noir. T'es debout céans, t'es homme et t'es homme de Sigfroi, dernier duc des hommes. Alors main'nant tu gueules comme si t'avais les stahleiern !"

Dans l'assemblée, le discours fit son petit effet, et par pitié ou par exaltation, un vieux de la vieille jeta à l'adresse de l'ennemi quelque chose comme "Venez sucer mon Scwhanz !" Le défilé des insultes recommença, de plus belle, et le vert que secouait toujours le garde Gunof finit par pousser à son tour la chansonnette. "ARSCH ! HURENSOHN !" glapit-il en faisant un pas en avant de l'adversaire et du noir. "RENDEZ-VOUS, AU NOM DU DUC !"
... Et l'autre côté de répondre : "Non c'est vous rendez-vous au nom du duc !"


Il avait fallu dix minutes pour que la tension se dissipa et que le malentendu se dénoua. A force de "Was ?" de "Randolph ?" "Non. Baldur ?" "Hein ? Non. Steffen ?!" et autres échanges entre les deux côtés, on se rassura, bien qu'un peu confondu par ce quiproquo honteux. L'ennemi, c'était des miliciens, et vice versa. Le premier patrouilleur, qui s'apprêtait à offrir la rencontre au sort des armes, ne goûta pas vraiment la plaisanterie et, avant qu'il pût se broncher une contestation, envoya son deuxième patrouilleur, pour lui cause de tout cet imbroglio, à la recherche du troisième. Il avait tâche de retrouver la petite expédition menée par Aymeric de Duègme et de la ramener au groupe, et tout seul par dessus le marché. En somme, il envoyait Anton aller se foutre ailleurs.

Ce dernier en était donc à mâcher l'ironie de son sort, la tête baissée à l'affût des nids de poule. La torche en avant, l'aveuglant plus qu'elle ne l'éclairait, il cherchait une trace de la patrouille disparue. "Hého..." susurra-t-il, perturbé par le bruit de son murmure. Une demi-lieue plus loin, l'agacement avait pris le pas sur la peur. "HE, HEHO, LES CONNARDS ?!" Ayant repéré les glyphes de charbons fichés un peu partout dans les tunnels qu'il savait déserts à présent, il avançait d'une allure rapide, fanfaronnant dans le gruyère ses appels.



[J'ai pas osé tuer machin, parce que la taille de mon texte me faisait peur. Mais un mot, un geste, un regard ambigu, et je le claque !]
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Aymeric de Duègme
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyDim 15 Nov 2015 - 15:04
« Machin, tu reconnais les environs ?
- Bha… Non, justement, pas trop.
- Pas de quoi te remembrer de notre arrivée ?
- Que dalle.
»

Machin, le second garde et dernier demeurant qui accompagnait Aymeric, n’en savait pas plus que celui-ci. En revenant sur leurs pas, ils n’avaient eu aucun mal à rebrousser chemin pour remonter la file d’embranchements qui constituait ce dédale de tunnels et de vieilles voiries. Il leur avait suffi, jusque-là, de suivre les flèches tracées rapidement au charbon de bois ; ce qu’ils avaient fait pour chaque nouveau carrefour. Enfin, à vrai dire, c’était plutôt le dernier gus qui venait de boire la tasse à six coudées sous les eaux qui s’en était occupé. Mais pour ce carrefour-là, où ils stagnaient tous les deux ? Impossible de savoir si le bougre avait bien fait son travail, ou s’il avait simplement oublié de le faire. Plus aucune trace ne subsistait, où qu’ils cherchassent sur les parois humides et visqueuses. Peut-être que le charbon de bois avait mal pris sur une telle surface. Quoi qu’il en fût, ça les faisait bien chier ; ils pouvaient revenir sur leur pas sans souci comme s’enfoncer que plus encore dans les entrailles de Mabrume, et définitivement se perdre. Et, incapables qu’ils étaient tous les deux de prendre la bonne décision, de se remémorer quelque détail que ce fût qui pût leur permettre de choisir la bonne voie, ils se regardaient présentement comme deux couillons.

« Au pire… Sinon, on en prend un au hasard, et on vérifie le prochain embranchement ; s’il y a une flèche tracée au noir, on sera sur le bon chemin. Sinon, on fait demi-tour jusqu’ici, et on prend le boyau de droite.
-…. Mouais, pas con, ça.
»

Ce fut là donc ce qu’ils firent. Mais ils n’eurent pas à attendre de tomber nez-à-nez avec n’importe quelle flèche dessinée à la va-vite, non. Il y eut plutôt un écho lointain qui se répercuta sur les parois, amplifiant légèrement le son tout en le déformant. C’était, à n’en pas douter, la voix d’un type totalement défoncé à l’alcool, celui qui beuglait ribon-ribaine pour prétendre qu’il avait le plus de poumon et de souffle. Quoique.
Les « connards », ça faisait assurément très convivial ; la fraternité grivoise qui pouvait émerger de l’entente passée entre deux soldats de métier, deux frères d’arme ayant passé les mêmes épreuves, les mêmes tribulations. Ce surnom vulgaire qui vous faisait comprendre, en vérité, toute l’affection que l’on vous portait ; plus le surnom était vulgaire, et plus l’on vous portait en haute estime.
Ou alors, ledit surnom voulait simplement dire ce qu’il voulait dire. Mais ça ressemblait tout de même à une voix qui les connaissait, et qui les cherchait.

«Eh ? EH ? QUI EST LE GROKON QUI NOUS APPELLE ? »

Loin de toute précaution qui pouvait découler de la présence des fangeux ou d’autres bandits comme ils venaient d’en rencontrer, c’était à présent un concours de celui qui gueulerait le plus fort qui venait de s’engager dans les boyaux obscurs des égouts. A grand renfort de « CONNARD » et de « GROKON », on s’invectivait tout en se rapprochant, et les murs poisseux vibraient de la corde de la rivale fraternité, ce qui donnait à ces tunnels une atmosphère des plus particulières. C’en devenait presque un concours d’ego, à celui qui la fermerait le premier, tandis que continuaient de plus belles les invectives, jusqu’à ce qu’ils se rencontrassent enfin. Le deuxième patrouilleur, celui qui avait eu l’idée de génie.

«Ah, c’est toi qui fais tout ce boucan ? Eh bien. Aurais-tu toi aussi décidé de mener ce brillant assaut en notre compagnie. Faire une vraie foire, hein. Tu t’échauffais la voix en prévision ? »

Ne manquerait pas de venir la question du troisième bougre qui les avait accompagnés, mais qui n’était plus avec eux, désormais.

«Bha… Il a appris à nager, balança Aymeric en désignant avec une belle grimace une de ces grandes flaques qui ponctuaient parfois le sol. Sinon, on a bien tenté de les prendre à revers, mais pas moyen ; c’est inondé ou éboulé de partout. Avec Machin, on cherchait un autre chemin pour ce faire. »
Citation :

Nickel, merci pour le nom du bougre !
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyVen 20 Nov 2015 - 17:21

Aux appels d'abord il ne reçut que du silence. Se plongeant toujours plus avant dans les boyaux de cette maudite cité, il les multipliait, ces "connards ?" "connards !" et ce avec détermination. Sa voix fut un peu enrouée quand il s'aperçut qu'en plus de l'absence de réponse, c'était aux petites traces de charbon de lui fausser compagnie. L'humidité d'un couloir effaçait lentement mais sûrement certaines traces, que le garde Gunof dut déchiffrer avec patience parfois. Se perdre aurait été bien sot, car rien n'augurait que le reste de la troupe se porterait à sa recherche.

C'était donc anxieux qu'il parcourait son chemin, bien incapable de savoir véritablement s'il les rattrapait ou faisait fausse route. On imagine donc l'état dans lequel il fut mis par le cri, faible mais présent, qui répondit à ses appels. "GROS CON", le son, bringuebalé par les échos, fut comme la venue divine pour le coeur de notre soldat qui, ne se sentant plus d'aise, ne put répondre que par un très émotionnel : "Les connards !" Un fil d'Ariane s'était tissé entre les deux voix, et les voilà bientôt en vue, s'éclairant de leur torche respective. Les voix s'étaient un peu calmées, Anton lâcha un soupir soulagé, bien qu'il fut devant la face du Sire. Il eut même un sourire pour les railleries de son supposé subalterne avant de se souvenir de son arithmétique. N'étaient-ils pas partis trois ? Ils lui revenaient deux. Son sourire aurait pu s'élargir de méchanceté, mais Anton n'en fit rien. Il était trop content pour l'instant, et ne voulait pas penser à la façon dont cette disparition lui incomberait. Quand il eut à expliquer la situation, cela entama encore un peu plus sa gaieté, mais l'ombre d'une moue souriante s'accrochait cependant.

"Ca s'est... résolv... réso... c'est bon c'est réglé, on retourne à la troupe." fit-il et avant qu'on ne voulut en savoir plus, donna les instructions. "Machin, tu ouvres, je ferme ; si on se dépêche, on saura pas ce qu'on a alerté et eux ce qui les a alerté ; peut-être, si on fait silence." commenta-t-il dans l'espoir d'éviter une bordée de questions dont les réponses l'aurait quelque peu mis dans l'embarras. On se mit en marche, faisant marche arrière, et Gunof en profita pour mâcher la meilleure explication qu'il puisse donner sans trop heurter la réalité des faits à propos de l'échauffourée.

"En fait", commença-t-il gêné tandis qu'on arrivait à un carrefour, "les gredins qui nous avaient fait barrage, ils étaient un petit peu..." "Deuxième patrouilleur, troisième patrouilleur, mirez !" l'interrompit le vert qui éclairait la voie en tendant sa torche vers un recoin du plafond. Il y avait un bout de toile de jute boueux, un sac presque indécelable, coincé au coin supérieur d'un mur. Machin avait dû le remarquer en cherchant la flèche noire censée les ramener à bon port, et pris par la curiosité, le voilà qu'il tendit sa torche à Aymeric, se hissa un peu contre le mur et commença à tirer sur sa trouvaille, qui avait l'air bien enfoncée.

Enfoncée, elle l'était, et tassée même. Dans un étrange dispositif conçu à la hâte, la toile de jute était solidarisé à quelque chose en bois, si on en croit le bruit d'un étai qui se déchire sous l'effort de Machin. Celui-ci, avant qu'il ne puisse réagir, est propulsé en arrière, la toile agrippée entre les mains. Le choc finit de faire craquer un morceau de bois qui n'est autre qu'un arc-boutant soutenant un pan du tunnel situé à un pas d'eux. Le "crac" résonne, réveille la terre, qui gronde. Affamée, la mine roule vers eux, prête à les dévorer.
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Aymeric de Duègme
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyDim 22 Nov 2015 - 23:54
En dépit des quelques railleries du troisième patrouilleur, le deuxième afficha un grand sourire que vint difficilement ternir les plus mauvaises nouvelles. C’était qu’il semblait sincèrement content de les retrouver, le bougre, et, en fin de compte, c’était tout à fait mutuel du côté d’Aymeric. Au moins, ils étaient certains, à présent, de pouvoir retourner à bon port, et de ne pas se perdre dans ces boyaux maudits. Mais, au travers de ces brocards sympathiques se cachaient tout de même quelques questions ; pourquoi diable Anton était-il venu les chercher lui-même, plutôt que d’avoir attendu qu’ils trouvassent un autre chemin ? Avaient-ils donc été si longs que cela ? Le parvenu de la noblesse ne réussissait pas à estimer la durée qui s’était écoulée depuis, entre le boucan qui leur avait offert un couvert pour se barrer vers les boyaux annexes, le magistral « plouf » du dernier gus, le moment d’hébétude qui les avait cernés, et, là, ces moments passés à gueuler des insultes pour se diriger à la voix. Il était vrai que, lorsque l’on s’amusait comme des petits fous, le temps avait une fâcheuse tendance à se forlonger.

Mais point de réponse, non pas ; plutôt de vagues hésitations. C’était réglé, point barre. Bha. Aymeric haussa des épaules, pas très difficile, et rentra dans les rangs, au milieu du petit groupe qu’ils composaient à trois. Ils marchèrent un certain temps, repérant ces fameuses flèches tracées au charbon de bois qui, enfin, avait bien été faites sur les parois, et remontèrent la piste. Un semblant d’explication de la part du deuxième patrouilleur, et puis Machin qui vint soudainement l’interrompre, pointant de la torche un morceau de toile qui dépassait curieusement du mur. A lui de passer la torche à Aymeric, lequel éclaira les lieux pendants que l’autre zouave s’y intéressait de plus près.

«De la toile ? On s’en bat les coui… Ah, peut-être pas. Un sac ? »
Effectivement, ça avait tout l’air d’être un sac qui s’était paumé là, ou, plutôt, que l’on avait paumé délibérément. Noirci, plein de terre dégueulasse, et fermement harnaché, l’on ne savait pas comment, à ces quelques piliers de vieux bois rongés qui éventraient çà et là le sol des souterrains.

«Une cache de contrebandier ? Eh bhé, je ne sais pas ce qu’ils ont dû planquer dedans, mais ça a l’air bien lourd, cette saloperie. Allez Machin, tire comme un homme ! »
Machin le prit au mot, et, tout aussi curieux de savoir ce que la toile de jute pouvait bien dissimuler, s’arc-bouta contre le sac, deux pieds de chaque côté d’un pilier, et tira de toutes ses forces. C’était typiquement le genre de truc qui, lorsque le machin lâche, vous fait voler trois mètres en arrière, vous pétant le coxis au passage. Sacré Machin. Il n’y eut pas que son coxis, qui se brisa.

Aymeric vit Machin fuser en arrière, une drôle d’expression surprise flottant sur son visage alors qu’il venait de passer malgré lui la marche arrière, que pour mieux s’effondrer sur un pilier miteux, le flanquant par terre à son tour. Puis une expression de douleur subite, malencontreuse.

«Ben putain, ton coxis, le raffut qu’il fait quand il se fait démonter… »

Non pas ; ce fut comme si la terre s’abîmait elle-même alors que tout le plafond commençait à s’écrouler sur lui-même. Machin ne chercha pas même à comprendre, prit ses cliques et ses claques, et fila à tout allure, droit devant, mais boitant nonobstant. Aymeric et Anton ne tardèrent pas à le dépasser. La déflagration leur tançait les oreilles, comme si elle n’avait pas d’autre intention que de les leur arracher, mais ils n’en avaient cure ; il fallait sauver sa peau alors que des quintaux de roches se déversaient derrière eux, semblant se rapprocher à chaque seconde. La peur de finir écrasé, enseveli, enterré, ce qui n’était plus trop à la mode ces derniers temps, leur donnait des ailes, et ils virevoltaient de couloirs en couloirs, coude-à-coude. Pour mieux amorcer les virages, Aymeric ne réfléchissait pas, et se mangeait les trois quart du temps la paroi rocheuse de ses mains, la repoussant pour reprendre un peu de vitesse, lorsque ce n’était tout simplement pas son bras qui servait de glissière. La sueur coulait sur son front, et le fourreau de son épée lui battait le flanc et la jambe gauche. Trop tard pour le retirer ; il n’y faisait même pas attention comme ses bras faisaient de brusques allées et venues vers l’avant et l’arrière, et que ses pieds les imitaient, totalement à rebours.

Puis il y eut un grand moment de calme, là où vinrent s’échouer des nuées et des nuées de volutes de poussières comme l’eût fait le ressac sur la plage, dans d’infimes crépitements de cailloux roulant les uns sur les autres, mourant en bout de course. Un moment perplexe, hagard, où l’on émerge de ce trop-plein d’adrénaline qui vous a complètement lavé le cerveau. Anton était à ses côtés.

« Machiiiiin ?! »
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyJeu 26 Nov 2015 - 14:42
Le garde Gunof eut un début de ricanement aux commentaires du Sire, pour qui cette histoire d'os brisé ne semblait bonne qu'à une petite raillerie. On n'arrêta cependant bien vite de rigoler aux dépens du vert, la terre grognait, rabattant le caquet des moqueurs, qui passèrent d'un coup dans une disposition mentale tout à fait différente. Effondrement. Le concept accélère le sang d'Anton, fait refluer des souvenirs terrifiants, lui écarquille les yeux. Machin, malgré la dégringolade, est le premier à réagir. Crispé sur le sac qu'il a extrait aux souterrains colère, il se redressa sans attendre et fonça droit devant lui, sans lumière ni repère. D'un seul mouvement, ses deux compagnons lui emboîtèrent le pas sans attendre. Il traçait, l'enfoiré, et l'éclaireur s'en tira dans un premier temps mieux que troisième et deuxième patrouilleurs, lesquels, l'un sur l'autre, avançaient sans l'agilité de leur causeur de malheur.

La lumière, elle, devint plus rare. Anton, sous le coup de la panique et pour ne pas s'embarrasser plus que ça, laissa à Aymeric la charge très honorifique de porte-flambeau, et lâcha sa torche immédiatement. Le Sire quant à lui perdit vite l'une de ses torches, bousculé qu'il était par un Gunof pris d'une violente envie de ne pas finir broyé. Ce dernier, jouant des bras, des pieds, servait de bélier à son compagnon d'armes, qui ne prenait pas de pincettes et encaissait les chocs contre le dos d'Aymeric, couffin vivant, le poussant ensuite avec force pour que la fuite éperdue continua. Il serait facile de jeter la pierre à ce troufion malpoli, mais c'est parce qu'il est difficile de décrire des centaines de livre de terre et de roches ployés sur vous, quand vous venez de briser l'os qui emprisonnait ces poids monumentaux, de libérer une force qui n'aspire qu'à remplir le vide et réduire tout ce qui se trouvait sur le chemin le plus court entre le sol et la gravité. Le déchaînement si subit de ces puissances chtoniennes si longtemps contenues, surtout, provoquait un rugissement qu'il serait impossible à exprimer efficacement. Tout ça pour dire qu'Anton, pris d'une frousse monumentale, s'en battait bien les couilles de faire des bleu-bleu à son copain de souterrain.

Et grand bien lui en fit, car après moult virages tressaillants, ils étaient hors de danger. Derrière eux, ce long ver de terre se fatigua, la pression du choc s'amenuisa, et ils parvinrent enfin à une nouvelle rangée d'étais plus solides, ou moins solidaires des arc-boutants qui s'étaient fissurés puis brisés au dessus d'eux. Un silence tendu s'instaura, perturbé par les gravats, tandis que les gars écoutaient, sur le qui vive, le souterrain se taire peu à peu.
« Machiiiiin ?! »
« CHT ! »
intima Anton, plein d'une révérence craintive envers les forces d'en-bas, d'un coup. « Mire... », ajouta-t-il finalement à mi-voix en désignant, plus loin dans le couloir dans lequel ils s'étaient enfermés, une grande flaque où moiraient à peine les reflets jaunâtres de leur ultime torche. L'eau, normalement dormante, d'un calme trompeur, semblait un peu agitée, et de grosses bulles venaient éclater en surface par à coup. Le dit Machin avait trouvé, semblerait-il, la même mort que son collègue, englouti un peu plus loin dans un trou similaire. Il fallait un sacré coup de chance pour réchapper à un effondrement de galerie. Faut croire que c'était écrit : le grand ennemi de cette patrouille, c'était l'eau.

Anton pourtant en revint bien vite à la pierre. Sans être expert en la matière, il ne la reconnaissait pas, cette galerie. Ils n'étaient plus sur le bon chemin. Ils étaient piégés dans un jeu de tunnels différents, sans repère cette fois-ci. Il voulut dire quelque chose, se reprit, et souffla lourdement pour essayer d'expulser la peur panique qui l'avait occupée ces derniers instants, et que la crainte de mourir, non pas fracassés par la roche, mais enfermé dans celle-ci, continuait à entretenir.
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Aymeric de Duègme
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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyMer 2 Déc 2015 - 13:57
A peine avait-il commencé à gueuler le nom du disparu qu’Anton lui intima immédiatement de se taire, à renfort d’un gros « CHTTT » bien bruyant. Alors même qu’il venait d’aboyer sans précaution aucune, le « CHTTT » d’Anton, pourtant bien plus discret, alluma les braises d’un incendie pourtant bien planqué au fond du cœur du milicien, et celui-ci, soudainement pris de sueur froide, sursauta malgré lui tout en se recroquevillant, se protégeant la tête des mains tout en balançant un coup d’œil des plus inquiets en direction des poutres de bois et du plafond de terre. Il s’immobilisa l’espace d’un instant, étant plus silencieux que jamais, avant de comprendre qu’il n’y avait rien à craindre. Descendant de son piédestal, de son pied –se remettant tout simplement sur deux pattes en adoptant une posture normal, il lâcha un énorme soupire, aussi embarrassé que soulagé, faisant écho au souffle d’Anton.

Mais le répit des émotions fut de courte durée, surtout lorsque son comparse milicien lui désigna du doigt une autre de ces mares d’eau impassibles qui recouvraient parfois le sol. Et celle-ci n’était plus si bonace que cela ; quelques bulles d’air venaient crever la surface, explosant, mourant au contact de l’air. Aymeric fut sceptique qu’une demi-seconde, avant de remarquer une des torches que le groupe portait, là-bas, au-delà de ce puits sans fond. Probablement abandonnée par Machin alors même qu’il sombrait dans ces abysses aussi étroits que profonds.

«Ah non, pas encore… Eh merde. »
Il balança un coup d’œil à Anton, avec une once de désespoir. C’était à croire qu’ils allaient tous terminer ainsi. Quoi de se faire écraser ou noyer demeurait la meilleure mort ?
« … Et va expliquer ça au coutilier, putain. … Au moins, ça ne sera pas à moi de le faire », lâcha-t-il bêtement en se mâchonnant l’intérieur de sa joue, ne sachant même plus quoi dire face à pareille tragédie. Il secoua la tête, comme si celui lui permettait de se remettre du plomb dans le crâne, et regarda devant lui.

«Bon, si l’on veut se tirer d’ici, il n’y a plus qu’à suivre ce boyau-là, et espérer qu’il nous mène quelque part. J’imagine que l’on doit être bien en profondeur, pour que cet éboulement ait eu lieu sans même crever la surface, en haut. Encore que, si ça se trouve, ça aura emporté une ou deux bicoques dans sa chute. »

L’envie de balancer un violent coup de pied dans un de ces piliers de bois lui prit, mais il la refreina bien vite ; c’était aussi stupide que spontané. Mieux valait éviter de recréer l’enfer de tout à l’heure. Mieux valait continuer leur route, tout droit, par cet unique chemin qui se présentait à eux.
Et ils caracolèrent donc de nouveau dans ces souterrains, à une allure plus que réduite ; la peur de faire un pas de travers, de marcher trop sur le côté, et de se faire engloutir avant avoir eu le temps de dire « ouf » leur faisait courir de petits frissons glacés dans l’échine. Et ils restaient assez proches l’un de l’autre dans leur avancée, quelque fois qu’il fallût en rattraper un in extremis.

Il n’y eut pas d’autre embranchement, pas de carrefour, seulement des lignes droites, des virages, et quelques endroits où ce qui avait été un mur, une paroi menant à une impasse, avait été perforé pour atteindre une autre galerie. Là, un éboulement avait partiellement bouché la voierie, mais avait ouvert un autre passage, là-bas, c’était un mur de pierre dont le mortier avait été explosé à coups de burin, et, plus loin encore, l’on avait carrément abandonné une pelle rouillée après avoir creusé un petit trou, haut d’une moitié d’homme et un peu plus, sur plusieurs coudées.

«Louche, ça. Mais je gage que l’on n’a pas le choix. Bon, je passe en premier. »
Aymeric n’était pas claustrophobe, mais il fallait reconnaître que le fait d’avoir failli mourir, écrasé par des centaines de quintaux de roches n’était pas pour lui faciliter ce nouveau périple dans cette bouche rocheuse au travers de laquelle il devait s’accroupir, sinon ramper. Passer ainsi avec une armure n’était en rien aisé, et l’épée lui compliquait la tâche, d’autant plus que, dans son esprit, le fourreau ne cessait de creuser de touts petits sillons sur son flanc gauche, à même la terre, ce qui pouvait qu’affaiblir que plus encore, même de manière infime, la structure de ce souterrain. Mais le trajet en valait la peine.

«Anton, faut que tu viennes voir ça ! »

Parvenu de l’autre côté sans être englouti par les entrailles du monde, le voilà qui pouvait poser son regard sur une étrange scène. Une grande grotte naturelle, très large, assez haute, où s’amoncelaient, dans ses alcôves annexes, des tas et des tas de marchandises en tout genre, réparties dans une pléthore de paniers, caisses, sacs, d’amphores, et d’autres jarres. Des armes rouillées, des armures en lambeaux, des bijoux ternis, de la nourriture avariée, des bouquins déchirés, des chandeliers oubliés, des vêtements éparpillés, des matières premières lapidées, des ustensiles crevés, des céréales moisies, des animaux morts, du tissu gâté, des teintures renversées, des huiles tournées, et tout un tas d’autres objets inclassables et hétéroclites. Au milieu des coqs et des cochons en putréfaction, de ces caisses et paniers éventés, percés et crevés, retentissait le doux ressac de la mer. Les vagues, un peu plus loin, venaient lécher la grève, apportant dans ses embruns comme un parfum de liberté pour qui avait manqué d’être condamné par la roche.

«Mais… Mais… Et il n’y aurait même pas une simple foutue barque ?! »

Que dalle.
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Anton Gunof



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MessageSujet: Re: Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction)   Le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques tout ça (titre en construction) EmptyJeu 3 Déc 2015 - 16:14
« Non. Mais merci ! » furent les premiers mots qui lui vinrent aux lèvres. Il garda cependant le refus polis dans la bouche, et tourna sa langue une ou deux fois. L’invitation d’entrer dans ce goulot fort serré, avec armes et armure et torche, où rien ne semblait parvenir sinon un peu plus d’obscurité, ne tenta pas plus que ça Anton. Et cette invitation, Trinité, cette invitation ! Pouvait-on la faire plus vague ? L’intonation semblait annoncer quelque chose d’heureux, certes, mais, vraiment, fallait-il se résoudre à ramper comme un rat parce qu’on lui avait demandé gentiment, sur un accent jovial ? « Je dégaine ? » avait été la deuxième alternative. Anton la considéra encore moins sérieuse que la première réponse. De toute façon, que pouvait-il bien faire ? Rebrousser chemin, trouver une autre issue ? Et quelle issue ? Ce couloir était aussi hermétique qu’un gros intestin. « Merde. » Ah, peut-être. Le mot avait un certain à propos ici bas. Gunof, au final, l’échangea contre un gros soupir et se sortit les doigts.

Torche et épée en avant, il se plia pour rejoindre son compagnon d’armes, un peu rassuré, au final, qu’il eut reconnu le terrain. Il finit sur le plastron, se démenant, lentement et avec une prudence anxieuse, à ramper, à s’extirper, un membre après l’autre, des arêtes aiguës en excroissance. Et puis son nez renifla quelque chose, et puis, quelques coudées plus loin, l’air salé lui fouetta carrément le visage. Ses yeux s’étrécirent, il accéléra son allure. La lueur de la torche s’affaiblissait peu à peu, concurrencée par une nouvelle source de lumière. Il reprit cœur, qui battit plus fort pour l’occasion. Pas assez fort cependant pour qu’il n’entende pas le bourdonnement sourd d’une nuée d’insectes à ailes, qui parasitait un roulement. Celui du flux et du reflux. « Thalassa ! » aurait-il crié s’il savait un peu plus ses vieilles langues et vivait dans un autre monde, mais l’impression de libération fut la même. Ils étaient sauvés !

Il racla une dernière fois sa demi-armure contre la roche, s’extrayant du boyau, et se remettre droit lui procura une sensation de bonheur indescriptible. Il embrassa d’un regard la grotte bercée d’une douce lumière, ralentit sa course pour contempler les scintillements lointains du soleil sur la mer. Il soupira, de nouveau, profondément aussi, mais cette fois-ci ça lui faisait du bien, vraiment du bien.
« Meeerde, » dit-il finalement, en s’approchant du Sire, jouasse. Celui-ci l’aura connu de fort bonne humeur, c’était une chance que celui-ci avait déjà les yeux ailleurs, à l’examen de leur nouveau refuge, ou, plus précisément : «Mais… Mais… Et il n’y aurait même pas une simple foutue barque ?! » d’une embarcation…

« Bah ! » se contenta de dire le garde, dans de bonnes dispositions. Plus intéressé par l’étrange scène qu’éclairait pour eux, les dieux soient loués, la lumière du jour que préoccupé par leur prochaine étape du voyage, il commença à vagabonder aux alentours, le nez dans le cou et l’expression concentrée. Il touchait, portait à ses narines, inspectait en fronçant les sourcils certaines denrées, goûtait aussi pas mal, faisant son tour de poulaga. Parfois, une impression de dépotoir se laissait soupçonner, fréquemment, on aurait pensé à un dépôt de contrebandiers rongé par l’usure et mangé par le sel marin qui battait la caverne.

A quelques endroits, la marchandise ou son paquetage avait semblé malmené par des mains humaines. Ou des mordeurs ? Il se redressa un peu pour jeter des coups d’œil. Le calme du lieu et la présence de la mer l’avaient un peu trop amolli, mais penser aux fangeux aidaient toujours à rappeler la vigilance à soi.

Les recoins inaccessibles d’un regard étaient rares cependant, et l’apparence de sûreté s’avérait à mesure qu’Anton longeait de l’œil les parois lisses, en arrondi parce que corrodées, de l’antre. Un renfoncement se dissimulait derrière une sorte de colonnade épaisse et resserrée de stalactites et de stalagmites fusionnées et, parce qu’on n’est jamais trop sûr, se mit en tête d'y aller. Epée et torche bien levées, le garde Gunof se fraya un chemin parmi des décombres de jattes, et bondit en direction du trou. Rien, un cul de sac terminé par un mur ou la paroi, il ne saurait dire.

« Gare aux morts, hein. » dit-il en se sentant un peu idiot. Il n’y avait pas âme qui vivent ou revivent ici, se disait-il. Et comme il lui arrivait, dans ces moments, d’être un adepte du « faites ce que je dis, pas ce que je fais, » il enfourailla son épée, place et rejoignit son collègue, curieux de savoir ce qu’il pensait de tout ça, visiblement pas pressé de trouver un chemin.

« Qu’est-ce que c’est que ce bordel, selon ton avis ? »



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