[QG COMPAGNIE] Apprentissage dans la douleur (Capitaine-Finn)

"Rends moi fier."

Durant les quatre jours qui suivirent et durant lesquels Finn s'employa à se reposer et à guérir partiellement de ses blessures, ces mots tournèrent dans son esprit autant que l'échange qui avait eu lieu entre lui et son mentor. Jamais auparavant le Capitaine n'avait agit de la sorte avec lui et bien que cela lui paru étrange, le Second mettait cela sur le compte d'une volonté de le faire progresser, refusant d'y voir une quelconque forme de manipulation malgré ce que son instinct lui soufflait à l'oreille depuis plusieurs jours. Pour aller remonter les bretelles d'un jaloux, le Mercenaire estima qu'il lui suffirait d'attendre que ses plaies soient en cours de cicatrisation pour quitter la Compagnie et aller s’acquitter de sa mission, c'est pourquoi il attendit de pouvoir enfiler son armure sans douleur pour s’arnacher convenablement. Son épée Claymore dans son dos, à l'image de Terminus Est dans le dos du Capitaine, sa dague dissimulée aux regards, quelques pièces de tissu pour amortir les frottements de l'armure là où les blessures demeuraient et il parti de bon matin en quête du fameux chevalier qui avait osé insulter la Compagnie. Il ignorait où il pouvait le trouver, se doutant que l'Esplanade ne devait guère être adapté à ce genre de personnage, il délaissa également le Temple pour demeurer dans les quartiers populaires, hésitant sur l'endroit exact avant de se rapprocher des tavernes et des auberges. Depuis l'été précédent et les jeux d'Anür, son visage n'était plus inconnu de tous, en plus de l'époque où il fréquentait une belle chasseuse pour qui son cœur avait battu plus fort que jamais. C'est ainsi qu'il s'en alla voir quelques vieilles dames dont il connaissait la propension à jacasser et lancer des rumeurs plus ou moins fondées, leur disant simplement vouloir rencontrer le fameux chevalier sans pour autant donner plus de détails. On lui indiqua plusieurs fois la direction, le Mercenaire s'étonnant plus ou moins en entendant dire que l'homme qu'il cherchait était aussi amusant qu'imposant, un peu étrange quoique coureur sur les bords, avec la choppe facile et le don pour s'attirer des ennuis. Repérant finalement un homme en armure, songeant d'abord à un autre chevalier qui peut-être connaissait celui qu'il tentait de trouver, Finn s'approcha avec un sourire aimable, le saluant poliment d'un signe de tête.

- Bonjour sir Chevalier. Je cherche l'un de vos semblables, un certain Scarocci, sauriez-vous me dire où il se trouve ?

Ils n'étaient qu'à quelques mètres l'un de l'autre et pourtant le Mercenaire s'était arrêté en constatant la différence de taille et de gabarit entre eux. Si Finn dépassait l'homme de plusieurs centimètres, presque une demi tête en vérité, les épaules du chevalier étaient proportionnellement aussi larges que celles du Capitaine et avaient de quoi impressionner n'importe quel combattant. Vu la stature de l'homme, quand bien même il était moins grand que le Second, il devait être redoutable avec une épée entre les mains. Pour autant ayant été courtois, le Second ne voyait nulle raison de s'inquiéter de quoi que ce soit et écouta donc tranquillement la réponse qu'on lui donna.

- Oh ?

Scarocci se retourna. Il se trouva nez à nez avec le cou d'un homme, et leva la tête pour visualiser le visage -jeune- du costaud qui, apparemment, le cherchait. Grand et fort, assurément ! Scarocci recula un petit peu afin de mieux se rendre compte du gabarit qu'il avait en face de lui. Assurément, ce jeunot était bien taillé. Probablement un bûcheron, un ouvrier... ou, à en juger par l'imposante épée qu'il trainait derrière lui, et dont le manche seul faisait la taille d'un avant-bras, un combattant !

Mais il était trop pauvre, trop mal sapé pour être un chevalier, et Scarocci ne reconnut pas l'uniforme de la milice sur lui. C'était donc probablement...

Un écuyer ?

La réflexion, qui n'était guère le fort de Scarocci, fut vite remplacée par un tonitruant salut.

- MUHAHAHA ! Oui, c'est moi ! Scarocci Corbera ! Et vous, brave homme il lui asséna une tape virile dans le dos qui aurait sûrement explosé l'omoplate d'un homme moins solide comment vous appelez vous ?! Qu'est ce que ce chevalier peut faire pour vous ?

Il s'éloigna un peu. Le jeune homme pouvait distinguer que le chevalier casqué laissait traîner sa jambe gauche sur le sol, boitant de manière un peu pitoyable.

- Mon cheval m'attend aux écuries ! Faisons un bout de trotte ensemble si vous voulez !

S'il se savait proche du but, Finn n'avait pas pensé une seule seconde tomber par hasard sur celui qu'il recherchait en demandant pour la énième fois son chemin, quand bien même les chevaliers en armure ne courraient-ils pas les rues. Aussi lorsque Scarocci s'exclama avec force et amusement, en fut-il prit au dépourvu et demeura comme deux ronds de flanc, recevant la tape virile et amicale dans le dos en étouffant un début de toux. Ses côtes encore douloureuses n'avaient guère apprécié, pour autant l'homme ne semblait nullement vindicatif et, bien au contraire, lui parla avec bonhommie avant de commencer à s'éloigner, s'attendant visiblement à ce qu'il le suive. Allons bon, se jouait-on de lui ? Qu'est-ce que c'était donc que cet homme-là ? Ses yeux clairs accrochèrent pourtant la patte folle qui traînait quelque peu à chaque pas du chevalier et le doute se dissipa aussitôt dans l'esprit du Mercenaire. C'était bien lui, aucun doute là-dessus. Loin d'être un rustre pour autant, le Second prit une profonde inspiration pour s'intimer le calme et emboîta le pas à son futur adversaire.

- Je suis Finn Gallagher, le bras droit du Capitaine de la Compagnie des Lames.

Il laissa passer quelques brèves secondes, demeurant à deux bons mètres en arrière, guettant les réactions de son interlocuteur qui lui tournait le dos sans la moindre inquiétude.

- L'on m'a dit que vous nous insultiez et traîniez notre Compagnie dans la boue. Vous rendez notre travail plus compliqué par vos paroles et découragez nos commanditaires. C'est indigne d'un chevalier.

Cela avait été lâché sur un ton passablement sombre et chargé de mécontentement, mais il faut dire aussi que bien qu'issu du bas peuple, Finn possédait un sens de l'honneur assez poussé, ou tout du moins la vision qu'il en avait, et le comportement de Scarocci qu'on lui avait rapporté le poussait à vouloir défendre les siens. S'arrêtant au milieu de la petite rue dans laquelle ils se trouvaient, il laissa le temps à l'armure sur pattes de se retourner, de prendre la mesure de la situation.

- Je suis venu exiger vos excuses, sir Corbera, et je ne partirais pas tant que vous n'aurez pas fait amende honorable.

Campé sur ses jambes, les sens aux aguets et la main déjà prête à dégainer sa Claymore au cas où l'homme deviendrait agressif, le Mercenaire semblait capable de patienter indéfiniment.

- Ohoh !

Scarocci se retourna lentement vers son interlocuteur. Sans emettre une quelconque réaction, aussi immobile qu'une statue.

*Ce n'était donc pas pour un autographe...* pensa t-il lorsque le jeune homme révéla son identité. Il resta silencieux alors qu'il déclamait ses accusations. Sur ce point là, les deux hommes n'étaient guère différents l'un de l'autre.

Son heaume bougea lentement, fixant la main prête à dégainer la claymore. Et il éclata de rire. Un rire tonitruant, puissant et plein d'assurance.

- MUHAHAHAHAHAHAHAAAAAAA !

Il reporta son attention sur Finn.

- Qu'est ce qu'un mercenaire connait de la dignité ? Le monde sombre dans le chaos, et au lieu de rejoindre la milice, vous jouez les chiens de guerre, à tirer de l'argent de la détresse des gens et à servir de pantins aux puissants. Je connais les individus de votre espèce Finn. Il n'y a ni courage, ni honneur en eux. Juste la survie et la loi du plus fort. Les jeunes comme vous espèrent la gloire que leur apportera le nom de leur compagnie, et finissent tués, ou cyniques.

Quelques personnes dans la rue s'étaient arrêtées, chuchotant en regardant les deux hommes se disputer. Mais Scarocci ne semblait pas prêt à dégainer. Il regardait Finn avec ses poings sur les hanches, comme s'il grondait un enfant.

- Alors, non, je ne vais pas m'excuser...

Un ricanement guilleret sorti du casque.

- Je ne respecte pas les mercenaires et les jeunes chiots. Je respecte les guerriers !

Il lui tourna le dos et continua sa marche vers les écuries.

- Prouve moi que tu en es un, Finn, et je m'excuserais...

Arrivé près des écuries, il émit un sifflement, immédiatement suivi du fracas d'une porte ouverte à la volée et d'un hennissement terrifiant. L'impact de sabots sur le sol de pierre en faisait presque trembler le sol, de plus en plus au fur et à mesure que quelque chose approchait.

Ce quelque chose, c'était un destrier colossal. Dépassant aisément le Capitaine au garrot, un énorme cheval noir comme la nuit, plus large qu'un taureau, à la peau épaisse et pleine de cicatrices, venait d'apparaître. Il se cabra, si haut qu'il en masquait le soleil. Une terrifiante vision infernale venait de surgir devant Finn, une abomination surnaturelle, un cheval issu d'une longue lignée de croisements et dressé, tout comme son maître, dès sa naissance, pour être une machine à tuer.

Scarocci posa sa main sur l'encolure de la bête agitée, qui se calma immédiatement. Et, d'une impulsion, il grimpa dessus, se retrouvant sur la selle. Il n'y avait pas de mord, ni de rênes pour diriger le cheval. Ni même d'étriers.

- Si vous voulez régler ca, d'homme à homme, de guerrier à guerrier, alors allons à l'extérieur de Marbrume. Je connais une petite colline parfaite pour ca... il y a un dispensaire pas loin...

Sans qu'il ne fasse le moindre geste, ni ne prononce le moindre mort, Bidigon se retourna, et commenca à marcher vers la porte extérieure de la ville.

Finn à ce moment-là de sa vie était encore à mi-chemin entre le guerrier et le jeune chiot, à ceci près qu'il savait que le Chevalier se trompait à son sujet, probablement justement parce qu'il n'avait pas encore terminé son apprentissage et qu'il n'avait pas connu suffisamment de combats et de guerres, de morts et de pertes. Il était encore "frais émoulu" dans l'art du combat et n'avait pas fini d'être façonné, si bien qu'il possédait encore cette droiture dont son futur adversaire affirmait ne pas voir chez les hommes dans son genre. Le Mercenaire sentit la colère s'insinuer immédiatement en lui, mais il ne dégaina pas pour autant, n'étant pas du genre à foncer tête baissée malgré les insultes renouvelées. A la place il préférait tenter de parlementer, au moins un peu, que tout ne soit pas perdu et ne doive forcément se résoudre par le sang versé.

- Nous au moins nous choisissons qui servir plutôt qu'un lâche qui laisse crever des femmes et des enfants devant les portes de sa Cité !

Cracha-t-il avec un profond ressentiment, se rappelant parfaitement de l'affaire Sarosse. Il n'avait pas été aux premières loges comme ceux qui se trouvaient sur les remparts, il avait été parmi la foule présente à quelques dizaines de mètres de la porte, écoutant les cris et les supplications, puis après un trop long moment, l'attaque des fangeux et les hurlements d'agonie des victimes massacrées alors qu'ils auraient pu être sauvés. Bien sûr ce n'était pas spécifiquement pour cette raison qu'il avait choisi la Compagnie des Lames, mais force était de reconnaître qu'il préférait s'occuper d'un contrat où ils devaient distribuer de la nourriture pour les pauvres, protéger les convois vers et au retour du Labret, que de n'être qu'un vulgaire bras armé au service d'un pouvoir qu'il n'avait pas choisi. Pour autant le Chevalier affirmait qu'il ne s'excuserait pas. Des écuries non loin surgit un cheval si grand et fougueux que le jeune homme en fut presque effrayé, se retenant de justesse de reculer en voyant la bête cabrer avant de redevenir calme au contact de la main gantée de son Maître. Que voilà un animal majestueux et impressionnant ! Il ne pouvait que se sentir respectueux en voyant cela, puis son futur adversaire monta en selle et... attendez, pas d'étrier, pas de rênes ?! Mais quel genre d'homme était-ce ?! Le genre qui lui proposa d'aller régler ça hors de la Cité, non loin d'un dispensaire, de toute évidence. Un regard autour d'eux suffit à convaincre Finn qui expira fortement avant d'acquiescer, acceptant les conditions du combat, conscience qu'ici ils ne feraient que causer des dégâts et mettre autrui en danger.

- Fort bien, je vous suis donc impoli Chevalier !

Il lui emboîta le pas en direction de la porte de la Cité, adressant un signe de tête aux Miliciens en faction, reconnaissant quelques visages parmi le groupe présent, avant de quitter l'abri des murs pour s'éloigner, toujours en suivant Scarocci plusieurs pas en arrière par mesure de précaution. Il ne chercha nullement à l'attaquer, ce n'était pas son genre, pas quand il s'agissait d'un duel car, que le Noble le croit ou non, il avait pour lui sa fierté et son honneur encore intacts, au moins pour ce genre de choses. La colline n'était guère éloignée, ils y furent en quelques longues minutes de silence pesant, alors que le Mercenaire rongeait son mécontentement quand aux mots prononcés un peu plus tôt. Ce ne fut qu'une fois sur place qu'il reprit la parole.

- Montrez-moi la direction du dispensaire, que je sache où vous mener le moment venu. Je ne suis pas sans honneur, même si vous n'y croyez guère, je ne vous abandonnerait pas blessé à la merci des Fangeux. Je veux laver l'affront et rien d'autre.

C'était certainement trop téméraire et digne d'un doux rêveur que de croire avoir une chance contre une montagne pareille, d'autant plus en étant encore blessé de son précédent combat avec le Capitaine, mais le jeune homme refusait de reporter l'affrontement. Dégainant lentement sa Claymore plus large et plus longue que le modèle ordinaire, il inspira profondément, se forçant au calme, à l'apaisement, clarifiant ainsi ses idées en préparation du combat.

- Avez-vous des règles à énoncer ?

En ce qui le concernait, il ne désirait nullement tenter d'estropier son adversaire ou de le priver de toute possibilité d'avoir une descendance, cela dit il ne comptait pas pour autant retenir ses coups et, même s'il ignorait de quelles forces il disposait encore, il ne reculerait pas, pas maintenant, pas alors qu'ils étaient allés si loin.

Au moment où le chevalier descendit de cheval, ce dernier s'éloigna d'eux, allant brouter avec bonheur l'herbe verte de la colline. Au sommet de cette dernière se trouvait un grand pommier, qui semblait surveiller silencieusement les deux hommes.

Scarocci se saisit d'une pomme, encore verte et dure, la faisant tourner entre ses doigts.

- Des règles, hm...

Il regarda Finn des pieds à la tête.

- Je possède une armure complète et pas vous. C'est un peu de la triche, n'est-ce pas ?

Alors, silencieusement, il commença à se désarmurer. Dans un grand fracas, le métal froid tomba au sol alors qu'il enlevait petit à petit chaque pièce de son armure, s’enfonçant dans la terre. Sous cette dernière, l'homme portait une cotte de maille recouvrant un ensemble en cuir. S'il était toujours protégé, le chevalier n'était plus immunisé aux attaques de son adversaire, n'ayant gardé que son casque, ses gantelets, ses jambières et son casque.

Sans son armure, Scarocci Corbera semblait... plus épais. Plus large. Un coup d'oeil expert à Finn suffisait pour comprendre que l'armure du chevalier n'était guère à sa taille, mais compressait en réalité ses muscles. Les composants gardaient de nombreuses traces de coups. Pendant combien d'années ou de décennies cette armure avait-elle servie ? Prisonnière d'un cycle sans fin de violence, enfoncée, brisée, maltraitée, réparée, renforcée pour être enfoncée encore, elle semblait presque vétuste, comme toute droit sortie d'un âge ancien et mystique, où les chevaliers se comptaient sur les doigts d'une main et sauvaient encore la veuve et l'orphelin.

Mais sous cette armure dont l'esthétique précédait de plus d'un siècle les armures modernes, Scarocci joua de ses muscles et fit quelques étirements.

- Merci pour l'attente Finn ! Vous êtes bien brave ! Il se baissa pour ramasser la pomme qu'il avait déposé par terre avant d'enlever son armure. Pour les règles... allant jusqu'à l'abandon d'un de nous deux ou l'inconscience. Je frapperais avec le plat de mes épées. Je ne suis pas là pour vous démembrer après tout.

Une craquement. D'une simple pression des doigts, la pomme se trouvant dans la main du chevalier explosa, pulvérisée par la poigne du chevalier, qui se saisit ensuite de ses deux armes, avant d'adopter une pose de combat étrange, penché vers l'avant, la posture déséquilibrée par des jambes au placement suspect, son épée bien en évidence, l'autre reposant contre la selle du destrier.

Il ressemblait à un fangeux. La respiration de Scarocci était lourde et puissante, son corps gonflant et dégonflant à un rythme à la régularité digne d'une horloge.

scarocci:

L'armure du chevalier n'était pas de toute première jeunesse, elle était lourde, imposante et visiblement encombrante, cependant elle devait visiblement bien le protéger car, à mesure que l'homme s'en dépouillait, il semblait se déployer, comme si l'ensemble l'avait jusqu'à présent contraint dans ses mouvements et qu'il en était désormais libéré. La carrure était impressionnante, tout autant si ce n'est plus encore que celle du Capitaine, non pas par la hauteur, mais par la largeur des bras, des épaules et du buste, lesquels semblaient toujours aussi imposants malgré qu'il ne resta plus qu'une cote de maille, des gantelets, des jambières et un casque en guise de protection. Finn de son côté patienta tranquillement, en profitant pour s'étirer et s'assouplir un peu la nuque et les bras, avant d'acquiescer au remerciement de son adversaire. N'était-ce pas la moindre des choses ? L'évocation des règles lui convenait également et il acquiesça de nouveau, jusque-là encore relativement calme.

- Moi non plus je ne suis pas là pour ça.

Affirma-t-il de nouveau avant que la pomme n'explose entre les doigts du chevalier, surprenant le jeune homme qui regarda les morceaux s'égrener jusqu'au sol alors qu'un frémissement courait soudain le long de sa nuque jusque dans son dos. La peur, voilà bien un élément auquel il n'avait pas songé en allant défier cette montagne, pourtant le Capitaine aurait pu le prévenir que son adversaire serait aussi dangereux.

- ...

A moins que cela n'ai été son plan depuis le début... Non, non quand même pas, il n'aurait pas prit le risque de l'envoyer se faire tuer, non pas ? A moins que là encore il n'ai deviné que son Second se comporterait avec honneur et qu'ainsi le Chevalier ferait de même ? Là, à cet instant précis, alors même que Scarocci se mettait en position d'attaque, une bien étrange position d'ailleurs, terrifiante tant elle était anormale, le Mercenaire eut clairement l'impression de s'être fait piéger comme un débutant. Et il allait devoir l'assumer jusqu'au bout. Prenant une première inspiration difficile, Finn s'imposa le calme, se forçant à un souffle plus lent et régulier afin de calmer les battements de son cœur qu'il sentait jusque dans ses tempes, menaçant de troubler sa vision sous l'afflux de peur qu'il chassait désormais à force de raison. Il devait laver l'honneur de la Compagnie, hors de question de reculer désormais et tant pis pour les conséquences. Se mettant en garde à son tour, sa lourde épée levée de biais au-dessus de son épaules, ses jambes solidement campées sur le sol, il prit une dernière profonde inspiration avant de fixer sur son adversaire un regard désormais froid et déterminé.

- A vous l'honneur, Chevalier.

Lâcha-t-il d'une voix calme qui ne trahissait nullement son appréhension, se préparant à affronter non pas un homme, mais un Fangeux, car il lui semblait bien que celui qui lui faisait face n'allait pas attaquer comme le ferait le Capitaine ou bien des ennemis ordinaires. Être prêt à tout était sa seule chance d'espérer esquiver les attaques, car il ne comptait pas les parer, la différence de force était trop flagrante, il ne pourrait compter que sur son agilité pour dévier les coups et ainsi observer la façon de faire de son adversaire. Plus il garderait ses distances, plus il aurait l'avantage avec sa Claymore améliorée.

- L'honneur est mien, en effet ! répondit le chevalier d'une voix de tonnerre.

Puis, il avança. Lentement. Presque tranquillement. Avec une sorte de lourde nonchalance de laquelle n'exultait aucun danger. Comme un serpent se tortillant lentement sur le sol. Ou une lave en fusion dégoulinant presque tendrement de la pente du volcan. Le cerveau hurle au danger, mais qu'y a t-il à redouter de quelque chose, ou quelqu'un, allant avec une telle lenteur ?

Un pas, puis un deuxième. Il était encore hors de portée du mercenaire. Il le voyait, le sentait, se tendre au fur et à mesure de son avancée.

Puis, le chevalier sembla tomber. Brusquement, comme si son pied ne le soutenait plus. Mais au milieu de ce déséquilibre volontaire, son corps épais mais petit sembla devenir flou, alors qu'il frappait avec la vitesse d'un serpent.

Le mercenaire fut plus rapide qu'il ne le cru au premier abord. Il parvint à bloquer la lame de Scarocci, qui avait frappé de haut en bas, visant son épaule. Sous l'impact, Finn s'était enfoncé d'un demi-centimètre dans la terre ferme;

- Muhahaha !

D'une puissante impulsion du pied, le chevalier se propulsa en avant et percuta le jeune homme, son coude et son épaule s’enfonçant dans son ventre. Bien qu'il était plus petit que Le Capitaine, contre lequel Finn était l'égal, Corbera l'envoya valser sans aucune difficulté, avant de frapper, encore. Tranchant l'air d'un grand geste du bras, son épée rata son adversaire, qui avait bien repris ses distances. L'air dégagé était tel qu'il décoiffa Finn, qui pouvait sentir un air plein d'acier et à l'odeur de sang s'écraser contre son visage.

Une fente suivi l'enchaînement, ratant de peu le flanc du mercenaire, avant que le chevalier ne s'arrête en plein mouvement et ne change brusquement la direction de son attaque. La plat de la lame fouetta le corps du solide ex-menuisier, qui pouvait sentir une vive douleur exploser dans tout son corps. Blessure tout à fait superficielle, mais extrêmement douloureuse. Le chevalier s'était saisi de l'initiative et ne comptait plus l'attaquer, profitant du momentum de ses propres attaques. Sans répit et sans remord, tel un ouragant, un incendie ou un tremblement de terre. Une force de la nature qui déversait toute sa violence contre un humain qui ne l'avait pas méritée.

Scarocci Corbera attaquait, encore et encore, le tintement de l'acier étant rythmé par le bruit sourd de la danse brutale et énergique de ses pieds contre le sol, laissant son empreinte de pas sur l'herbe à chaque changement d'équilibre et de posture, par le rire puissant qui résonnait en écho dans l'air et surtout par l'inspiration et l'expiration violente de l'homme.

- Phhhhh.... Rmrrrrh.... Phhhhhh.... Rmrrrrrh...

Chaque fois que Gae Bolg clashait contre la lame de Finn, le choc se répercutait dans le corps de ce dernier, avant d'emplir le ciel.

Les coups pleuvent à verse sur lui. Chaque attaque plus rapide que la précédente, bien qu'elles ne durent qu'un bref instant. Le temps semble ralentir, alors que Finn se retrouve engourdi et isolé, comme piégé dans un abîme d'eau sans fond.

Aucun échappatoire. Juste la pression, toujours plus forte, sur ses poumons haletants.

Il s'était attendu à ce que le premier coup soit comme celui d'une masse sur une enclume, à ce que son ennemi posséda au moins la même force que le Capitaine, mais si il avait deviné qu'il lui préparait une attaque éclair en le voyant commencer par avancer lentement, Finn n'avait eu qu'à peine le temps de réagir quand la silhouette de son adversaire était devenue floue, seuls ses réflexes et son instinct lui permettant alors de parer le coup qui s'abattit lourdement sur son arme, arme qu'il dû retenir de sa seconde main pour éviter qu'elle ne heurte son épaule en-dessous. La vibration du choc se répercuta dans tous son corps alors même que ses yeux s'étaient écarquillés et que le Chevalier laissait échapper un rire amusé et inquiétant. Ne lui laissant pas le temps de répondre, Scarocci lui décocha un coup d'épaule et de coude dans l'estomac, l'éjectant en arrière en même temps qu'il lui coupait le souffle dans un cri rauque étouffé faute d'air. Le Second eut pour lui le réflexe de bondir en arrière une fois redressé, mettant de la distance entre lui et son adversaire, reprenant juste à temps son souffle pour pouvoir parer la série d'attaques que lui porta le Chevalier, visiblement déterminé à ne pas lui laisser une seule seconde de répit. Esquiver et parer ne suffirent pas, le Mercenaire sentait son corps encore meurtri protester contre les efforts qu'il lui demandait et, fatalement, le plat de la lame finit par le percuter dans le flanc, lui arrachant une grimace et un cri de douleur alors qu'il se courbait en deux. Il sentit très nettement sa blessure se rouvrir et le sang chaud imbiber les bandages sous son armure, mais ne se laissa pas faire pour autant. La colère chassa la peur et Finn se redressa, dents serrées sur un rictus d'énervement trahissant son envie de ne pas se laisser malmener si aisément.

Les coups continuaient de pleuvoir et sa lame continuaient de parer les attaques qui pouvaient, chacune d'entre elles, le déchiqueter à chaque instant. Le Second sentait son corps devenir de plus en plus lourd, ses bras se raidir à force d'encaisser une telle force, ses jambes trembler par la faute des vibrations qui se répercutaient à chaque tintement de l'acier heurtant son opposé. La sueur maculait son front, le sang dont l'odeur se répandait doucement dans l'air imbibait désormais ses bandages et son souffle se faisait plus lourd à mesure que les minutes s'égrenaient. Il tenait bon pourtant, le jeune Mercenaire, il ne lâchait rien et, finalement, à force de parade et d'observation, finit par apercevoir ce qui ressemblait à une ouverture. Quand le Chevalier frappait, il avait besoin de tout l'appui possible sur ses jambes et, même s'il était impossible de le faucher, Finn profita de contrer une nouvelle attaque directe d'en haut, laissant le plat de sa lame frapper sa propre épaule pour dégager l'une de ses mains. Tirant le couteau dissimulé à sa ceinture, il poignarda le bras de Scarocci avant de reculer vivement, rangeant la petite lame à l'abri pour mieux reprendre sa propre épée à deux mains. Passablement haletant, mais heureux de l'avoir touché, le jeune homme eut un sombre sourire teinté d'un rictus de satisfaction.

- Là ! Maintenant nous serons deux à saigner Chevalier !

Parce que même si la lame du Noble ne l'avait pas transpercée, de dessous son armure avait coulé un mince filet de sang qui tâchait à présent l'extérieur du cuir et des plates qui le protégeaient normalement des attaques extérieures, ou tout du moins celles censées le transpercer. Essuyant d'une main rapide son front en sueur, Finn profita de ces quelques secondes de répit pour reprendre son souffle.

- Les Trois m'en soient témoins, vous êtes l'homme le plus redoutable que j'ai jamais rencontré Sir Corbera... et pourtant je n'aurais jamais cru qu'un autre que le Capitaine puisse avoir droit à ce titre.

Respirant profondément, le teint ayant pâli depuis le début du combat, le Second se redressa davantage en prenant une énième et profonde inspiration, se forçant au calme, à ne surtout pas laisser la colère emprisonner sa raison.

- Me laisserez-vous l'initiative cette fois ?

Puisqu'ils étaient partit pour un combat qui risquait de durer, autant demander à avoir droit au second round le premier, puisque des deux il était clairement le plus désavantagé. Le jeune homme sentait qu'il allait perdre et, bien qu'il ignora dans quelle mesure, il espérait bien laver malgré tout l'honneur de la Compagnie, fut-ce dans son propre sang.

Le chevalier resta entièrement muet, comme choqué ou songeur. Il regarda son bras, d'où coulait un peu de sang, qui devint rapidement une belle tâche. Son casque regarda le bras, puis la lame de Finn, puis son bras, puis son adversaire, afin de revenir sur son propre bras.

Avait-il mal ? Si c'était le cas, le chevalier n'en laissa rien paraître. Il se redressa. Il pointa son arme vers le ciel. La lame était encore en excellent état. Il la fit osciller, avant de l'envoyer en l'air et de la rattraper avec son autre main.

- Je n'ai point besoin d'arme cachée pour vous saigner MOI !

Il fit quelques gestes, fendant l'air et l'herbe dans un bruissement métallique inquiétant, continuant de fixer Finn. Si son casque ne pouvait évidemment pas changer d'expression, il semblait pourtant plus... menaçant. Sa respiration était toujours au même rythme, lourde et puissante.

- Phhhhh.... Rmrrrrh.... Phhhhhh.... Rmrrrrrh..

Il recommença son manège, avant de se décider de changer de main. L'homme faisait tourner son épée comme s'il s'agissait d'un simple pinceau. Il se mit en garde, changeant de jambe d'appui et de jambe d'avant, puis leva son épée au dessus de lui, la tenant avec une seule main.

- Finissons en vite, jeune chiot ! Et une fois que je me serais occupé de vous, j'irais faire la leçon au vieillard qui vous apprend ces tours de lâche !

Finn ne doutait pas un seul instant qu'un homme comme Corbera n'avait pas besoin d'user de ruse ni de technique spécifique pour vaincre un adversaire, il était évident qu'avec sa seule puissance il pouvait défaire presque n'importe quel ennemi... Presque. Si le jeune homme avait voulu les mettre sur un pied un peu plus égal, cela semblait avoir irrité davantage le Chevalier qui commença à s'échauder visiblement, avant de menacer d'aller s'occuper du Capitaine une fois qu'il en aurait fini avec lui. Le sang du Second se glaça dans ses veines avant de devenir lave en fusion, un battement de cour résonna dans ses tempes et sa gorge, sa vision s'obscurcissant soudain malgré ses efforts pour garder le contrôle. Non, il n'était pas question de s'évanouir, mais d'abandonner toute maîtrise pour se jeter à corps perdu dans le combat, ce qui équivaudrait à se suicider dans le cas présent. La leçon avait été apprise, pourtant elle semblait vouloir s'effacer au profit de la sauvegarde d'un mentor aussi aimé qu'un père.

- Vous ne le toucherez pas.

Lâcha le Mercenaire entre ses dents serrées, ses mains raffermissant leur prise sur la garde de son épée, alors que ses jambes prenaient appui sur le sol avec une énergie nouvelle. Ce fut son tour d'attaque, se projetant avec une vitesse jusque-là insoupçonnée, et ce fut comme si les rôles étaient inversés. La lame de Finn s'abattit sourdement sur celle de Scarocci, l'obligeant à parer, son adversaire s'acharnant sur lui à divers endroits sans lui laisser la moindre seconde de répit. Une rage nouvelle s'emparait du jeune homme qui parvint à son tour à toucher du plat de la lame le géant qui lui faisait face, la pression augmentant davantage à chaque seconde, à chaque coup martelé des lames l'une contre l'autre. La blessure du Second devenait secondaire malgré le sang qui s'en écoulait beaucoup plus vite désormais, sa vision se faisant trouble alors qu'il ne voyait plus que son adversaire et rien d'autre. Et puis soudain, était-ce la blessure infligée au bras ou bien un début de fatigue, mais l'épée du Chevalier bougea durant une parade et une estafilade apparue sur le dessus de son épaule. Pas de quoi l'incommoder outre mesure, ni le gêner grandement dans ses mouvements, mais ce fut là un signal pour le Mercenaire qui recula vivement de plusieurs pas, essoufflé, comme désireux de vouloir instaurer des tours comme s'il s'agissait d'une joute et non d'un combat pour l'honneur de leur nom respectif.

- Si je parvient à vous toucher de nouveau sans user d'un couteau...

Lâcha soudain le Second entre deux respirations difficiles.

- ... jurez-moi que vous considérerez que ma Compagnie est digne d'honneur. Si je vous blesse encore à la loyale, fut-ce en versant mon sang, jurez-le !

Réclama Finn qui sentait la balance des forces pencher atrocement en faveur de Scarocci et non de son côté. Il avait réussi à ne pas céder à la tentation, à ne pas s'abandonner à l'oubli dans le sang et la violence, mais il savait aussi qu'il ne parviendrait pas à tenir le coup encore bien longtemps, et que le moment où il perdrait pied signerait très certainement sa perte. Ah, Capitaine, vous aviez tort, je n'étais pas prêt... Mais je ne rentrerais pas sans avoir lavé notre nom, peu importe de quelle façon je rentrerais.

- Vous ne le toucherez pas.

Scarocci aurait aimé répondre, mais il n'en eut pas le temps. En un instant, le colossal second avait foncé sur lui, masse de muscles et d'énergie.

Si rapide !

Les deux lames se percutèrent encore une fois. L'onde de choc se répercuta dans tout le corps du chevalier qui, bien qu'il fut solidement en garde, recula de plusieurs centimètres sur la terre ferme.

Si fort !

Le brun maugréa et ré-attaqua, respirant avec force, grognant comme un animal, assaillant le chevalier plus petit de tous les côtés. Sa lame trop grande ne semblait pas le gêner, malgré leur proximité. La vivacité et la force des attaque étaient telles que les branches de l'arbre près d'eux remuaient comme si un vent violent se levait.

Si versatile !

Le bruit de l'acier résonnait en haut de la colline. Le chevalier était pour la première fois forcé d'être sur la défensive, chose qui ne lui était jamais arrivé depuis... depuis...

Identifiant pendant un bref instant une faille dans la garde de son adversaire, Scarocci réagit promptement, et la lame de son épée se gorgea de sang. Le jeune homme recula promptement.

Il faiblissait. Le chevalier le sentait, comme un loup sent qu'un mouton panique. Le fait qu'il semble vouloir négocier l'honneur de sa compagnie le prouvait.

Un rire franc, aussi contagieux qu'impitoyablement dur, fut la seule réponse du chevalier. Il devait en finir. Même s'il ne le montrait pas, ces passes d'armes avait entamées son endurance. Son bras lui faisait mal.

- MUHAHAHAHA !

Il attaque immédiatement, suffisamment vite pour forcer Finn à se défendre, mais suffisamment lentement pour lui en donner le temps. Scarocci avait frappé en force, et vit son adversaire chanceler. Le jeune mercenaire était puissant, rapide et doué. Plein de potentiel. Et pourtant... il était clair qu'il n'était pas à la hauteur.

- Tu devrais FUIR, chien de guerre !

Provocation évidente, mais qui fit mouche. Le jeune, touché dans son orgueil -mal placé, selon Scarocci- riposta par une puissante taillade circulaire, en force lui aussi, trop lentement pour effrayer le chevalier, qui riposta encore plus fortement.

Et Finn fit de même, surprenant le chevalier. Que lui arrivait-il ? Il para le coup sans difficulté, et riposta encore, avant que la riposte tout en force de son adversaire, ne vienne confirmer sa théorie. Au lieu de jouer sur ses points forts qu'étaient sa plus grande taille et sa vitesse, le mercenaire tentait de passer en force. Il voulait mesurer sa force à celle du chevalier.

- Sérieusement ?

Scarocci ré-attaqua, si fort que le mercenaire recula un peu, les bras tremblants.

- C'est TOUT ? gronda t-il de défi, avant que le mercenaire, rugissant et avec les yeux injectés de sang, ne lève l'épée bien haut. Il était beau ainsi, les jambes solidement campées sur le sol, ses deux mains puissantes tenant le manche de son arme de tueur, la lame brillant dans le ciel pâle, avant de trancher l'air à toute vitesse. Bas en haut.

Simple et magnifique.

La lame s'immobilisa soudainement. Enfoncée d'un demi-pouce dans l'épaule du chevalier. Le mercenaire essaya de la dégager.

Il échoua.

Scarocci tenait fermement la lame dans sa main droite, qui saignait légèrement, son épée Gae Bolg reposant sur le sol. Son bras tremblait fortement et saignait lui aussi. Premier signe de blessure et de souffrance réelle de la part de l'homme masque. Ils se retrouvaient ainsi, immobilisés, Finn n'arrivant pas, même malgré tous les efforts du monde, à retirer son épée du corps de son ennemi, qui la retrnait par la seule force de son bras blessé.

Il vit les yeux du second bouger légèrement. Se fixant sur ce qui allait être sa fin.

Lentement, les doigts de la main gauche de Scarocci se replièrent. Un par un, avant de former un poing. Le temps semblait ralentir, alors que le corps large et puissant du chevalier pivotait, et se tordait, toujours face à un Finn tétanisé par une terreur primale et instinctive qui savait ce qui allait se passer, alors que le poing du chevalier disparaissait derrière son propre dos, le bras tordu de manière inhumaine.

Puis, comme la corde d'un arc qui se détend d'un coup, le poing gauche du chevalier s'écrasa contre le flanc de Finn, le frappant au foie, sur cette partie du corps que des décennies d'entraînement et de musculation ne pouvaient pas protéger.

Le poing pulvérisa l'armure, tordit les muscles, s’enfonça dans la peau, défonça l'organe interne du brun, qui se mit instantanément à vomir, alors que son corps s'éteignait littéralement sous une douleur cataclysmique. Il lâcha son épée et commença à tomber à genoux.

Sa dernière vision fut celle du poing droit de Scarocci, de plus en plus gros, percutant de plein fouet sur visage, écrasant son nez, sa bouche, ses arcades sourcilières.

Finn vola. Pour la première fois de sa vie. Ni sol, ni ciel. Plus rien. Un bref instant de liberté avant de retomber au sol. Le visage plein de sang, de vomi, de sueur, de larmes et... de boue ?

Il commençait à pleuvoir.

Scarocci poussa une grande inspiration avant de frapper sa cage thoracique pour se motiver. Il n'avait jamais frappé quelqu'un de toute ses forces depuis...

Bien trop longtemps.

Et pourtant... ce jeune homme était encore conscient. La douleur, peut-être ? Quoi qu'il en soit, il bougeait. Il rampait même. Loin de lui.

Fuyait-il ? Non. Scarocci distingua la grande épée du jeune homme, étendue sur le sol. Il cherchait à la récupérer.

Se battre jusqu'au bout... dans une arène, c'était une bonne mentalité. Dans un combat potentiellement à mort...

- Non, non, non jeune homme.

Scarocci marcha lentement vers lui, ses pas lourds résonnant sur le sol.

Finn, face contre terre, put sentir la main puissante du chevalier se saisir de sa cheville avec la force d'une presse hydraulique. Et puis...

Voir le sol s'éloigner, et être remplacé par le ciel.

Scarocci l'avait soulevé, le tenant par la cheville. Le sang afflua au visage de Finn, qui se retrouva tête à l'envers alors que Scarocci tendait son bras vers le ciel et l'arrière, comme s'il allait frapper avec une épée.

Ce qu'il fit. Le monde défila à toute vitesse, et Finn s'écrasa contre le sol humide, laissant une traînée de fluides divers dans l'air.

SPLOCH.

Hahannant comme un boeuf, Scarocci recommença, utilisant son adversaire comme un bâton. Une fois. Deux fois, il frappa le sol avec Finn. Avant, dans un dernier effort, de pivoter sur lui même, et de faire percuter l'homme massif contre le pommier, puis de le lâcher.

- Ha.... ha... ha...

Scarocci tourna le dos au mercenaire, avant de partir. Peu importe ce qui lui arrivait maintenant. Sa survie ne tenait plus qu'à lui. Ce n'était plus son...

Il s’immobilisa, et se retourna.

Le mercenaire bougeait encore. Il ne convulsa pas. Il bougea. Les yeux grands ouverts sous la surprise, Scarocci vit son adversaire remuer un bras, une jambe, la tête, avant de se relever, tout tremblant, respirant comme une bête, la bave aux lèvres.

- Sérieusement ?

Il était soufflé. Il n'avait jamais vu ça. En quel acier cet homme était-il fait ? Mais il connaissait les légendes. Celles des berzerks, les hommes devenant possédés par les esprits de la nature et des animaux, se battant en ignorant la douleur.

Quel genre de monstre es-tu ?

Il regarda le jeune homme tituber vers lui, grondant comme un fangeux. Il ignorait sa propre lame, les poings serrés, avançant vers le chevalier.

- Tu devrais rester au sol, petit conseilla le chevalier avant de se mettre en garde, souriant en coin.

Si ce berzerk pensait gagner avec son seul instinct comme arme...

Il était prêt à lui rappeler les réalités de la guerre.