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 [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:

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Merrick LorrenCoutilier
Merrick Lorren



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MessageSujet: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptyVen 25 Jan 2019 - 22:47
Merrick Lorren venait littéralement de toucher le fond...

Sa chute dans le précipice de son malheur ne fut pas violente ni rapide. Enfaite, il serait plus adéquat de dire que cette dégringolade fut quelque chose qui couva pendant fort longtemps, alors qu'il s'enfonçait encore et toujours plus dans les abysses du désespoir. Cette perdition pouvait tout simplement être imagée comme une lente descente aux enfers. Ponctué d'étape plus ou moins difficile, Merrick réussissait parfois à maintenir le cap et rester à flot au lieu de sombrer. Pour cela, il s'accrochait désespérément à quelques impératifs, ou bien à un brusque acquis de conscience, tel un marin se retenant aux morceaux épars de son embarcation disloquée. Or, ces brefs interludes n'étaient que des intermittences dans la tempête qui faisaient rage... Et jusqu'à présent, le milicien n'avait jamais vraiment réussi à arrêter complètement son naufrage, alors que son échec le rongeait, tandis que sa lâcheté incurable le faisait chavirer encore et encore dans le vice.

Oh, il avait bel et bien essayé de se reprendre, de se ressaisir. Peut-être pas avec assez de force, me direz-vous... Enfin. Que ce soit au travers de la religion, en tentant de s'en sortir par la prière, ou bien en essayant de se donner corps et âme à la tâche de milicien, ses efforts avaient été vains. Et pour tout vous dire, ce n'était pas par un manque de bonne volonté. En réalité, la problématique de Merrick Lorren résidait dans l'attrait, dans l'appât d'un poison qui le minait encore et toujours plus; l'alcool.

Alors que l'alcool avait été une béquille salvatrice pour traverser les premières étapes de ses tourments, l'ingurgitation des spiritueux en tout genre était devenue une dépendance. Telle une amante jalouse, il n'était plus question qu'elle le laisse s'en aller. Il avait pourtant essayé de tirer une croix sur cette surconsommation. Mais, tant et aussi longtemps que sa honte, sa colère contre lui-même et la frayeur d'à nouveau tourner les talons dans les moments importants et charnières seraient présentes, il ne pourrait se départir de son ivrognerie. Il en avait besoin pour survivre au chaos de son cœur et de son esprit. À la fois bourreau et ange gardien, les liqueurs qui l'assommaient représentaient son échappatoire et sa prison, sa salvation, mais aussi sa damnation...
---


C'est ainsi qu'embourbé dans ses problèmes, Merrick Lorren errait comme une âme en peine dans les ruelles et venelles s'étirant et s'étalant autour de lui. La nuit venait d'atteindre son heure la plus sombre, tandis que la pluie s'abattait avec assiduité sur lui. L'esprit embrumé et englué par les essences de l'alcool, Lorren avançait d'une démarche chaloupée, laissant ses habitudes le porter, alors que son esprit s'éparpillait dans mille directions, sans pour autant qu'il n'aille ou ne réfléchisse à quelque chose en particulier. Pour accompagner ses pérégrinations, Merrick fredonnait une chanson paillarde qui était bien souvent braillée -et non chanté- dans le débit de boisson qui lui tenait généralement lieu de repère. Les mains enfouies dans les poches, le sourire aux lèvres, le milicien serraient avec satisfaction les pistoles qui s'entrechoquaient joyeusement dans ses paumes; gain et profit qu'il avait récupérés en jouant avec des miliciens de sa caserne. Évidemment, Lorren avait triché pour ramasser le pactole qui trainait sur la table. Par chance, mais aussi grâce à l'alcool dont ses partenaires de jeu s’étaient imbibés, il avait réussi à rafler le très petit pactole qui avait été source de toutes les convoitises. Ainsi, fier et victorieux, le parieur du dimanche; Merrick Lorren s'en allait retrouver son antre, la taverne qu'il côtoyait tout le temps, là où il pourrait s'enivrer jusqu'à satiété grâce à ses gains ; le berceau.

-''Mmmmh... C'est à l'auberge qu'elle lui offrit son p'tit écu...Mmmmh''

Il fallait l'avouer; Merrick était déjà à un stade avancé. Après tout, la lutte avait été âpre pour triompher, ce qui l'avait logiquement ''forcé'' à boire en conséquence. Mais enfin victorieux, il se devait d'aller célébrer son triomphe. Alors, au lieu de reculer, de se résigner et de s'abandonner au cauchemar de la nuit, il était parti en direction de la taverne. ''Il rentra par la 'p'tite porte arrièreee. Mmmh...'' Enchaîna-t-il d'une voix éraillée.

C'est sur ces paroles très...mélodieuses que Merrick arriva à destination en s'arrêtant directement en face de la porte de l'auberge. Sortant les mains de son manteau, les déposants sur ses hanches alors que son sourire s'agrandissait, il suspendit soudain son geste, tandis que son expression faciale fanait. La cause de cette déception, de cette incertitude ? La clameur de la salle venait enfin résonner à ses oreilles. Les veilleurs nocturnes semblaient excessivement calmes ce soir comparativement au climat habituel qui régnait généralement à l'intérieur du miteux débit de boisson qu'était le berceau... Non pas que l'antre semblait vide, mais celui-ci paraissait plutôt occupé par une clientèle dite civilisée. Aucun bruit de casse, de braillement outrancier, ou de fracas d'une bagarre, ne venait s'épanouir dans le silence nocturne. C’était un climat bien trop calme pour le sous-sol miteux et les ivrognes occupant généralement le lieu...Qu'importe ! Après tout, le jeune homme n'était pas là pour réfléchir, mais plutôt pour éviter que son gosier ne s'assèche ou que la douleur du passé ne créer une brèche dans ses défenses. C'est ainsi qu'en haussant les épaules et en ne cherchant plus à comprendre, le milicien laissa son sourire retrouver de sa superbe. Fin prêt à faire son entrée en scène, Merrick Lorren poussa finalement la porte du lieu qu'il prenait pour la taverne du berceau.
---


Il ne lui fallut guère longtemps pour comprendre qu'il n'était pas au bon endroit. Après tout, Merrick n'était pas stupide, mais tout simplement saoul. Quand bien même qu'il ne soit pas un abruti; il avait tout de même réussi à se tromper d'adresse et à se perdre... Gardant pour autant son sourire dressé, tel un bouclier qui le protégeait de sa propre bêtise et de son erreur, le jeune homme laissa tout d'abord son regard se perdre sur la clientèle. Rapidement il casa ceux à ''éviter'', les potentiels ''camarades de beuverie'' et les femmes méritant ses faveurs. Une fois que cette liste de priorité fut plus ou moins ordonnée dans son esprit embrumé, Lorren s'intéressa plus particulièrement au lieu en lui-même. Au premier coup d'œil, il pouvait dire que l'établissement était bien tenu. Propre et conviviale, l'auberge était accueillante et l'ambiance était cordiale. Ici, il ne semblait pas avoir le besoin de garder un œil sur ses omoplates pour se prévenir d'un coup de dague vengeur -se trompait-il ?-. De ce simple regard circulaire, Merrick se surprit à apprécier la grande pièce et l'ambiance qui y régnait. Bien que les bouquets de fleurs et les peintures soient un peu trop ''féminin'' et ''tape-à-l'œil'' pour lui, puriste des bons vieux débits de boisson pourri et chambranlant, il ne pouvait que concevoir que le tout s'agençait avec harmonie.

C'est ainsi qu'après avoir évalué les lieux et sa clientèle, les yeux de Merrick Lorren furent happés par une crinière rousse qui se déplaçait rapidement et avec habitude entre les tables des convives. Détaillant la propriétaire de cette tignasse, le jeune milicien compris que celle-ci était la tenancière de l'établissement. Sa gestuelle aguerrie, son badinage avec les clients qui semblaient des habitués, et sa façon de se mouvoir ne le trompaient guère. Bien qu'il se trouvait encore loin de la personne qui était devenue le centre de son attention, Merrick Loren chamboula à nouveau la liste de ses priorités; la tenancière, puis les clients et enfin le lieu en lui-même. N'ayez pas l'esprit mal placé, je vous prie ! Merrick Lorren n'était pas intéressé par la jeune femme rousse. Enfin, pas plus que par une autre... Bref, là n'est pas l'important. L'intérêt qu'il lui vouait était, en partie, dû au fait que c'est la propriétaire qui lui servirait ce pour quoi il était venu; l'alcool dans lequel il pourrait s'imbiber et inhiber ses sens. Avant de se mouvoir, le milicien se passa une main dans ses cheveux écrasés et mouillés pour leur redonner du volume. Mouvement d'un être profondément narcissique qui voulait paraître à son meilleur ? Fortement probable. Toujours est-il que le jeune homme ne prenait pas le temps de se recoiffer lorsqu'il était à l'auberge du berceau...

Fendant la foule et traversant la salle la tête haute, le regard fier, Merrick Lorren se dirigea directement vers le coin de la pièce où se situait le bar et justement, la probable propriétaire rouquine. Une fois rendu-là, le jeune homme s'accouda sur la planche qui faisait office de comptoir. ''Et bien, le vieux Rupert a gagné en charme féminin sans l'ombre d'un doute !'' L'homme en question était le gras et insipide propriétaire du berceau, la taverne de très basse qualité qu'il côtoyait généralement. Peut-être que celle-ci connaîtrait le tenancier du débit de boisson ''compétiteur''. Si tel n'était pas le cas, qu'importe. Il ne fallait pas oublier que Lorren n'était pas complètement sobre...

''Et de charme, parlons-en ! Il est bien rare qu'une auberge soit aussi resplendissante, conviviale et charmante que sa tenancière...'' Enchaîna-t-il comme un discours bien ficelé et en jetant un regard par dessus son épaule sur la salle. En attente d'une quelconque réponse, rebuffade ou d'un silence voulant en dire long, Merrick Lorren ne perdit en aucun cas contenance. Quand bien même, il n'oubliait pas pourquoi il était là...

Rivant à nouveau son attention sur la rouquine, le milicien enchaîna : '' une bière, je vous prie, patronne.'' En livrant sa commande, Merrick sorti la monnaie nécessaire à sa boisson en offrant une moue satisfaite aussi bien à sa vendeuse qu'à lui-même, tandis qu'il rappelait à sa mémoire sa victoire aux cartes. Alors qu'il regardait l'aubergiste aller et venir derrière le comptoir, et probablement lui servir la bière qu'il attendait tant, Merrick Lorren ne put s'empêcher de la lorgner et de la détailler.

Elle était rousse. Oui, bon, cela il l'avait déjà perçue... De petite taille, la jeune femme était plaisante au regard, doté d'un certain charme n'ayant rien d'extravagant ou d'outrancier. Son visage était parsemé de tache de rousseur, et celle-ci possédait une paire d'yeux bleus-gris bien intéressant. Voilà le portrait que Merrick dressa lentement mais surement dans son esprit. Le problème de cela ? Probablement la lenteur de son esprit à l'heure actuelle... Son inspection de la tenancière avait été longue et ardue, tandis que l'analyse de son être avait été faite avec difficulté à cause du poison dans lequel il baignait. Probablement que la rouquine avait aperçu ou sentit cette véritable inspection en règle, et guère subtile, dont le milicien aviné venait d'accomplir. Si jamais celle-ci s’était détournée du comptoir, les yeux bleus du fieffé ivrogne seraient probablement allés se perdre sur le fessier de la femme. Pourquoi me demandez-vous...? Et bien, pourquoi ne l'aurait-il pas fait ?

Qu'il aille enfin entre ses mains sa consommation, ou non, l'homme d'armes, qui n'était en cette heure guère armée pour une conversation civilisée, eut tout de même ''l'obligeance'' de se présenter : ''Merrick Lorren, pour vous servir, madame...? '' Cette tirade venait d'être ponctuée d'un hochement de tête très respectueux et bien prononcé. Salutation polie qui se trouvait bien loin de sa démarche précédente qui était sans l'ombre d'un doute, quelque peu intrusive. Pour autant, son petit sourire en coin resta solidement fixé à son faciès.

Par ailleurs, à la fin de sa prise de parole, Lorren avait laissé planer pendant quelques instants un silence interrogatif avec l'espoir que la jeune femme lui donne à son tour le prénom et nom qui lui appartenait. '' Et puis, pourrais-je aussi connaître le nom de cet endroit ? J'imagine qu'il doit se nommer le Paradis au vu des créatures y résidant !'' Dis Merrick en souriant encore plus franchement à l'aubergiste inconnue, haussant même un sourcil pour la peine.
Peut-être -probablement?- que son attitude et son sourire qu'il croyait charmant dérangeaient. Après tout, il devait l'exaspérer alors qu'elle était occupée à travailler. Lui, Merrick Lorren était satisfait. Il allait mettre la main sur la boisson qu'il avait commandée. De plus, il fallait aussi reconnaître que la tenancière s'annonçait beaucoup plus intéressante que l'habituel vieil obèse quadragénaire qu'il côtoyait...
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Estelle LorrenAubergiste
Estelle Lorren



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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptySam 26 Jan 2019 - 1:16


Il y a des soirs comme ça, des soirs comme les autres et ceux qui changent de l’ordinaire sans qu’on puisse réellement comprendre pourquoi. Ce soir-là avait échappé à toutes les règles qu’Estelle s’imposait généralement. Premièrement son frère avait été retenu, les gosses étaient malades, il n’avait pas pu venir l’aider, deuxièmement la petite serveuse s’était tordu la cheville ne pouvant pas la rejoindre. Résultat, Estelle avait fait l’ouverture toute seule comme la totalité du service d’ailleurs, gérer la cuisine ET la salle c’était digne des plus grands. Il fallait bien le souligner Estelle était toute petite et si elle n’avait pas eu son dynamisme, la soirée aurait été un véritable fiasco, une catastrophe pour son établissement et pour sa réputation. Il suffisait d’une fois, une petite fois et tout pouvait s’écrouler, elle l’avait suffisamment vécu pour en retenir la leçon. Vadrouillant dans sa salle, plateau en main, la tenancière restait armée de son plus grand et large sourire, sautillant ici et là pour accélérer la cadence tout en s’autorisant quelque brin de conversations sans jamais réaliser le drame d’un incendie dans la cuisine qui restait de nombreuses fois sans surveillance.

- « Attention, attention » faisait-elle de sa voix chantante en passant entre les clients qui décortiquait les résultats du lancer de dé « Bah alors Thomas, encore perdu ? Va pas jusqu’à perdre tes brais, ta femme m’en voudrait. »

Elle avait déposé trois chopes, récupérant au passage dans un geste habile les quelques sous qui se trouvaient sur la table en bois. Là, un poing violent s’était abattu sur la table, alors que l’homme semblait encore avoir perdu dans une hilarité générale. On lui disait que les trois lui tournaient le dos, que sa femme ne devait pas coucher suffisamment ailleurs. L’homme n’avait pas ri, du moins pas au début, jusqu’à ce que la main réconfortante de la tenancière tapote son épaule offrant pour le plus grand des perdants son p’tit remontant, spécialité de la maison, évidemment. Comme bien souvent, de Chantauvent portait ce masque si parfait : de larges sourires, des yeux pétillants, un visage un peu fatigué, mais toujours agréable à l’œil.

- « Allez Thomas, à la tienne, tu devrais rentrer » fit-elle toujours dans cette voix féminine, légèrement chantante.

L’homme avait bu le petit verre sans demander son reste, il avait laissé sur place l’argent qu’il devait, y compris les brais qu’il avait visiblement réellement perdus. Ainsi Thomas était reparti, presque cul nu pour retrouver sa femme, qui sans aucun doute n’apprécierait guère ce retour quelque peu original de son cher et tendre époux. Une fois la porte refermée, Estelle avait dû lancer ce regard quelque peu réprobateur aux participants qui avaient levé les mains d’un air innocent.

- « Vous exagérez quand même les gars, vous savez très bien qu’il perd tout le temps. » souffla-t-elle en secouant doucement sa chevelure.
- « Bien m’dame on f’ra attention »

La tenancière avait simplement roulé des yeux, signe de son amusement, mais aussi du fait qu’elle n’en croyait pas un mot. Chaque soir c’était la même chose et que chaque matin elle voyait débarquer Madame Thomas qui s’offusquait qu’elle laissait se faire ce genre de pratique dans son établissement si réputé. Que pouvait-elle y faire, elle n’était que gérante de la chope sucrée, pas donatrice de cerveau. Roulant des épaules, elle avait attrapé un tissu déchiré d’une vieille chemise pour astiquer les tables qui s’étaient libérées, débarrassant par la même occasion l’ensemble des chopes vides ou semi-vides. Ce soir encore il y avait du monde, fort heureusement personne ne commandait des plats, la rouquine pouvait donc prendre du temps pour ses clients, sans faire trop attendre les plus grands des impatients. De nouveau derrière son comptoir, elle n’en fut pas néanmoins surprise d’entendre une nouvelle fois la petite clochette de la porte, il était déjà tard, généralement les premiers clients partaient, mais n’arrivaient pas. Affichant un large sourire vers le nouvel arrivant, la gérante avait dû le détailler avec un semblant de curiosité dans le fond des yeux.

Continuant à astiquer les chopes vides, elle survola du regard sa démarche, sa manière de passer la main dans ses cheveux, de se déplacer. Face à elle, c’est ses yeux qui la frappa un premier, la rougeur la fatigue, il ressemblait à un homme ayant passé plusieurs jours sans dormir ou à boire sans s’arrêter. Puis ce fut sa voix et la phrase qu’il formula qui avait fini par tirer un sourire à celle qui ne savait pas réellement comment prendre celui qui venait de s’installer à son comptoir. Elle n’avait pas eu le temps de répondre à la comparaison que l’homme poursuivait dans ses compliments, d’abord l’établissement, puis la tenancière, tout semblait y passer et avoir droit à son lot de caresses verbales.


- « Un peu de maquillage, une robe de femme et me voilà déguiser en une sacrée gonzesse, devrais-tu me reconnaître voyons » tenta-t-elle de plaisanter.

Estelle n’était pas de celle qui s’offusquait de tout et de rien, avait-elle pour habitude de régler chaque situation avec de l’humour ou avec Brigitte, sa poêle. Avant de passer à l’étape de la violence, elle avait préféré utiliser sa première option. Ne cherchant pas à obtenir une quelconque réaction, elle avait sorti une bière le déposant devant l’homme, non pas sans évidemment parfaitement ressentir l’ombre de son regard effleurer la moindre parcelle de sa silhouette. Celle à la chevelure de feu avait fini par pivoter, avisant l’homme qui ne semblait pas gêner le moins du monde par son comportement. Attrapant un verre, elle s’était versé un peu de vin dans le récipient, avant de relever ses deux prunelles dans ceux vitreux de son interlocuteur. Merrick Lorren donc.

- « Vous imaginez bien Merrick, mais dites-moi, votre père n’était pas voleur ? Parce qu’à mon humble avis il a dû voler toutes les étoiles du ciel pour les mettre dans vos yeux…. »

Elle avait affiché ce même sourire en coin, alors qu’elle portait à ses lèvres son verre pour avaler une gorgée du liquide. S’appuyant sur le rebord de son comptoir, elle n’en gardait pas moins un œil attentif sur le restant de sa salle. Là, elle sembla hésiter quelque seconde, avant d’ajouter.

- « Alors pour avoir mon prénom et mon nom, il ne vous manquait que la phrase de tentative d’arrestation » elle fit une pause, cherchant à voir la curiosité dans ses yeux avant de répondre « Bah oui, pour crime de beauté dans un établissement libre d’accès, non, vous ne pensez pas ? »

Estelle ne se jetait jamais de fleur et d’ailleurs, malgré la maladresse de la phrase ce n’était pas le cas. La tenancière avait juste voulu souligner la médiocrité des phrases d’approchent, toujours avec ce brin d’humour, ce brin de malice et certainement cette pointe de jeu également. Celle à la chevelure de feu avait laissé un petit silence, alors qu’elle offrait un nouveau sourire en coin, avalant une nouvelle gorgée du liquide pourpre. On lui avait fait signe et elle s’était excusée avant de s’éclipser pour répondre à une demande. Après deux, trois, aller-retour pour effectuer des nouvelles commandes, elle était revenue derrière son comptoir, reprenant le nettoyage de ses chopes.

- « Vous êtes à la chope sucrée, sur la place des pendus… Je suis Estelle Chantauvent, la gérante. Si vous avez des nausées, c’est dehors… Même si vous me paraissez fort sympathique, je n’ai pas très envie d’avoir un souvenir de votre petit passage… Vous êtes quoi au juste ? Enfin vous faites quoi dans la vie ? Vous avez loupé la porte de la caserne ou vous vivez dans le coin ? »

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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptySam 26 Jan 2019 - 8:34
Merrick Lorren n'était pas un homme qui acceptait de perdre aussi facilement, encore moins lorsque l'adversaire du soir était une ravissante demoiselle qui osait s'aventurer sur son terrain de prédilection, se risquant à l'affronter dans le domaine qu'il croyait maîtriser parfaitement; la joute verbale. Peureux de nature, mais fier de naissance, Lorren était prêt à continuer la bataille jusqu'au triomphe. Déjà, il se demandait quelle serait la ''saveur'' de la victoire, certain de ne pouvoir perdre cette guerre sur le temps long... Ainsi, tandis qu'il se tenait devant la jeune femme rousse qui venait de lui faire parvenir sa bière, il n'était pas encore sur le point de rendre les armes, de ne pas répondre à cette dernière qui avait enchaîné à leur début de conversation avec énormément de justesse. Bien que loin de s'avouer vaincu, le milicien devait pourtant bien l'admettre; la tenancière de la chope sucrée était une adversaire redoutable. Usant des mots avec une acuité frisant la perfection, Merrick Lorren avait été plus que surpris de cette vive repartie qu'il ne trouvait généralement pas chez ses compagnons nocturnes.

Dans les faits, le jeune ivrogne avait plus que sous-estimé la rouquine, s'attendant à ce que celle-ci réagisse comme toutes les femmes qu'il croisait lors de ses déambulations nocturnes. Généralement, lorsqu'il palabrait de la sorte, tentant de faire du charme à l'aide des ''meilleures'' -et pires- phrases qui traversaient son esprit alourdi par le venin perfide du houblon, les jeunes femmes réagissaient de deux façons différentes. La première et la plus commune étaient souvent négatives. Que ce soit par une rebuffade sur un ton outré, par un profond et lourd silence, ou par une main s'envolant à la rencontre de sa joue de façon violente, toutes menaient Merrick Lorren sur le chemin de l'échec. La seconde option, beaucoup plus rare, était souvent ponctuée de timide sourire, et d'un brin de rougeur. C'est lors de ses moments que le milicien se savait en bonne posture pour continuer, pour concrétiser ou pour tout simplement savourer et s'amuser...

Or, comme il fut mentionné, cette fois-ci, la réaction de la rouquine le déstabilisa complètement, alors qu'elle ne ''respectait'' pas les habitudes de la majorité des femmes de la nuit que Lorren connaissait. Décontenancé et vacillant dans ses convictions, il ne put que saluer la réussite et la repartie de son homologue en soulevant son verre à sa santé lorsqu'elle lui offrit réponse. Par la suite, l'ivrogne c'était désaltéré d'une grande lampé du breuvage, autant pour retrouver contenance que pour savourer le contenu de ça choppe qu'il avait attendu avec tant d'impatience.

-''Vous avez raison sur ce point. Vous êtes une sacrée gonzesse ! Je crois que je pourrais tomber amoureux, ''vieillard''. Par chance pour le moment, j'arrive tant bien que mal à contenir les battements furieux de mon cœur, sachant que derrière ce charme se cache votre vieille trogne, ''Rupert''...'' Enchaina-t-il en jouant le jeu.

Ensuite, le jeune homme avait été pris la main dans la sac, contemplant les formes et le corps de celle qui c'était retourné pendant d'infimes instants. Pas le moins du monde gêné ou attristé de s'être fait apercevoir, Merrick prit même le temps de terminer complètement son inspection avant de remonter son regard au niveau des yeux de son interlocutrice qui se faisait passer avec malice et humour pour le tenancier de l'auberge du berceau. Sachant que son exploration visuelle sur la rouquine avait été découverte par celle-ci, Lorren ne put empêcher son sourire en coin de s'élargir. ''Mes excuses, madame. Mes yeux s'égarèrent bien malencontreusement, happés par votre beauté...''

Cette fois-ci, celle qui était encore une inconnue lui tira un petit rire. Par la trinité qu'elle était redoutable ! En moins de temps qu'il n'avait fallu pour le dire, la tenancière venait de retourner les propres armes du milicien contre lui, usant elle aussi de phrases d'accroches aussi lourdes qu'inefficaces. Lâchant sa chope qu'il tenait des deux mains, le milicien déclama son appréciation de la répartie de la rouquine en applaudissant légèrement et doucement.

-''Je vous l'accorde, mon père était un voleur... Toujours est-il que vous deviez le savoir à l'avance, alors que votre profession est identique à la sienne ! Vous n'avez pas besoin d'essayer de le nier, j'ai la preuve et le témoin de votre larcin, mademoiselle. Car après tout, sans l'ombre d'un doute, je peux affirmer que vous venez de dérober mon cœur à jamais !''

Ponctuant sa tirade d'un clin d'œil, Merrick plongea à nouveau son nez dans sa chope. Après tout, son babillage asséchait naturellement sa gorge. Ainsi, il devait bien l'hydrater pour pouvoir continuer à échanger verbalement... Car il en avait le sentiment; l'inconnue n'avait pas encore fini de le surprendre. Sans même s'en rendre compte, le milicien se pencha un peu plus vers l'avant, avide d'entendre la répartie qui n'allait pas tarder à tomber.

-''La tentative d'arrestation ?'' Demanda-t-il intrigué ? En entendant la fin de la tirade, Merrick resta quelques instants silencieux, prenant le temps de méditer les paroles qu'elle venait de lui offrir. ''Un crime de beauté dans un établissement libre d'accès...'' répéta-t-il avec satisfaction . ''Pas mal. Vraiment, pas mal... Je vais la garder, celle-ci. Avec la permission de l'artiste, bien évidemment !'' Ajouta Lorren en souriant.

La regardant dans les yeux, voyant le petit sourire joueur de la tenancière revenir siéger en dessous de ses taches de rousseur, Merrick ne put s'empêcher de lui renvoyer un sourire à l'identique. Bien évidemment, le jeune homme ne manqua pas d'observer du coin de l'œil la parfaite dentition de la jeune femme, si ce n'est un léger écart entre ses dents qui rendait sa moue amusée encore plus malicieuse. Perdu dans les derniers mots de la jeune femme, dans l'inspection de son visage, et dans sa chope, Merrick Lorren ne sut que répondre, alors qu'elle ne voulait lui offrir son nom. Ce bref interlude de silence, qui sonnait comme une victoire de l'aubergiste, fut entrecoupé lorsque celle-ci s'excusa pour s'éclipser et aller répondre à des clients. Se retournant, et s'adossant dos au bar, Merrick tenait d'une main sa bière, qui faisait rapidement et bien souvent, le voyage en direction de son gosier. Face à la salle principale de la chope sucrée, le milicien ne perdit pas une miette des déplacements du tourbillon roux, observant encore et toujours celle-ci avec satisfaction, le sourire sur la bouche. La voyant aller et venir ici et là, apporter et récupérer commande, discuter et échanger avec les clients, il ne put que saluer son efficacité et espérer avidement qu'elle reprenne la place qu'elle venait de quitter.


-''Mon père, un voleur...les étoiles du ciel dans mes yeux...''
Murmura-t-il tout bas, pouffant à nouveau. Cette dernière sentence faisait aussi partie de son répertoire, et le jeune homme avait escompté l'utiliser, ne s'attendant aucunement d'être la victime de cette attaque.


-''Tu t'amuses, petit merdeux...?''


Ce souvenir fut la douche froide... L'avait-il réellement entendu, ce murmure aussi infime et minime qu'un souffle de vent, ou était-ce son esprit englué qui venait de livrer ces mots à son cerveau, tandis qu'il repensait à la tirade présentant son père comme un voleur ? Toujours est-il que cette pensée qui venait d'embraser son esprit n'était pas anodine en soi. C'était la voix de son père, de celui qu'il avait lâchement abandonné avec sa famille à une mort certaine. Perdant contenance, voyant son masque se fendiller, Merrick Lorren se retourna rapidement, faisant à nouveau face au comptoir et à l'ouverture qui devait mener aux cuisines. Pliant l'échine par-dessus sa chope, le jeune homme plongea rapidement dans celle-ci, avalant goulument ce qui restait de son verre. Tout sauf ressasser le passer, tout pour oublier et penser à autre chose, tout pour éviter le retour de la peur du passé. C'est sur ses entrefaites bien malheureuses, alors que Lorren était chambranlant et vacillant, que celle qu'il attendait revint. Bien qu'en proie au doute, le jeune homme écouta tout de même les mots de la tenancière.

Celle-ci présenta enfin les lieux, ainsi que son être. Alors qu'il aurait été satisfait de cette mince victoire quelques instants plus tôt, Merrick n'en avait guère l'opportunité à l'heure actuelle. Le regard plongé dans le fond de son verre, il termina ce dernier en redressant la chope bien au-dessus de son visage et la reposant brusquement. Par la suite, triturant nerveusement et rapidement dans ses poches à la recherche d'argent, le milicien déposa son pécule sur le comptoir, échappant même quelques pièces au sol à cause d'une fébrilité qu'il n'avait aucunement présentée un peu plus tôt.

-''Ce que vous avez de plus fort pour le moins cher, je vous prie, mademoiselle Chantauvent...'' Relevant ses yeux habités par la frayeur vers ceux de sa partenaire, il attendit que sa commande soit en route. Peu importe ce qu'il cuverait, tant et aussi longtemps que cela pouvait l'assommer...''Je ne suis jamais malade. Enfin non... Je suis malade parfois, moi aussi. Comme les gens normaux, vous voyez ? Un rhume ici et là, un coup de froid... Mais, pas à cause de l'alcool, ça non.''

Son baratinage et badinage s'embrouillait et s'emmêlait alors que son esprit était happé ailleurs, dans un passé qui le tenait en otage. Estelle devait avoir réalisé le changement qui avait atteint le milicien. Après tout, il était passé de confiant et entreprenant à outrecuidance, à enchevêtrer et frappé par le doute. ''Je suis milicien, mademoiselle.'' Répondit-il tout de même. ''J'étais en direction du berceau quand j'ai vu votre établissement, décidant sur un coup de tête de m'y arrêter. J'ai bien fait, sinon je serais passé à côté de l'amour de ma vie...'' termina-t-il en tentant vaille que vaille de retrouver son sourire taquin.

Merrick Lorren essayait à tout prix de retrouver le contrôle sur lui-même, sur ses émotions, de redevenir celui qu'Estelle venait de quitter il y avait quelques instants. Or, bien qu'il n'avait pas eu besoin de beaucoup de réflexion pour trouver une phrase à même de le renvoyer vers cet état, le cœur et l'ardeur n'y étaient guère. Et il ne se trompait pas lui-même, alors comment pourrait-il tromper la rouquine...?

-''Je...je crois que je devrais peut-être vous laisser travailler.'' Commença-t-il en se raclant la gorge. '' Vous semblez seule ce soir, et je ne voudrais pas vous déranger plus que nécessaire, alors que l'ouvrage semble conséquent. Je vais aller prendre une table. Merci encore, mademoiselle Chantauvent. Maintenant, si vous voulez bien m'excuser...''


Récupérant la boisson qu'il avait eue, le milicien traversa la salle d'une démarche assurée, prouvant qu'il n'était pas sur le bord du coma éthylique, mais tout de même trop rapidement et les épaules voûtées. Cela contrastait avec son arrivée de tout à l'heure. Prenant place en retrait, le milicien n'était pas prêt à partir, mais plutôt à s'engouffrer vaille que vaille jusqu'au fin fond de son nouveau contenant et contenu...Levant le récipient jusqu'à ses lèvres, tandis qu'il était prêt à s'assommer, Merrick Lorren suspendit son geste durant d'infimes secondes. ''Estelle Chantauvent...'' murmura-t-il pour lui-même. Secouant la tête, la nouvelle chope termina finalement sa course jusqu'à ses lèvres. Comme si celle-ci ne s’était jamais arrêtée, comme s’il n'y avait eu aucun interlude, aucun murmure.
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Estelle LorrenAubergiste
Estelle Lorren



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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptySam 26 Jan 2019 - 14:17


- « Cela serait fort déplaisant pour vous de succomber aux charmes d’un homme, la trinité elle-même ne pourrait vous pardonner » souffla-t-elle de cette voix amusée.

Rupert, voilà bien un drôle de prénom, elle ne l’avait jamais entendu ce qui lui laissait deux petites suppositions. La première, qu’elle était parvenue à passer à côté d’un gérant de taverne, visiblement ancien et très certainement peu scrupuleux pour ainsi alimenter l’état d’ivresse d’un homme. La seconde, était que justement l’état de son interlocuteur ne lui permette pas d’avoir les idées claires, ce qui l’entraînait dans des divagations alimentées par son imagination visiblement débordante. Elle n’en resta pas moins accueillante, tout du moins agréable, comme à chaque fois, le masque était parfaitement rodé.

L’analyse de sa silhouette ne l’avait pas dérangé, non pas qu’elle ne s’en offusquait pas intérieurement, simplement que depuis que son époux était mort, elle avait dû apprendre à gérer toute seule la taverne, avec tout ce qui va avec. Les conflits, les bagarres, la drague lourde et intensive. Si au début, elle en était déstabilisée, Estelle avait appris avec le temps à s’en amuser, à faire preuve d’humour s’imprégnant du caractère parfois plutôt original de ses clients. La dame de Chantauvent avait appris à aimer ce métier, à apprécier chacun de ses clients de celui qui termine sous la table à celui danse tout nu sur la chaise avant de s’effondrer, de celle qui reste au fond de la salle à détailler les groupes d’homme sans oser faire le moindre pas vers eux, à la catin dévergondée qui vient quémander une chambre pour satisfaire un client.
Quand le regard de la tenancière s’était perdu dans les yeux clairs du presque ivrogne, il n’avait pas semblé en être gêné, pire, il lui avait bien semblé voir s’élargir le sourire taquin sur ses lèvres, dévoilant un semblant de dentition visiblement convenable. Roulant doucement des yeux à sa réflexion sur la beauté, elle se contenta de sourire un brin amusé. Elle avait affaire à un téméraire, un qui ne renonce jamais et si elle en restait particulièrement attentive et sans qu’aucune crainte ne s’insère dans son autre, c’est bien parce que ses mains se trouvaient non loin de Brigitte, sa poêle. La géante de l’établissement avait donc joué agilement de sa répartie que l’expérience lui avait fait gagner –et surtout les nombreuses phrases qu’elle avait elle-même entendues-. La technique du voleur en était une d’ailleurs, elle l’avait entendu plusieurs fois et cela avait fini par rester dans sa mémoire, Estelle n’était pas particulièrement fière de parvenir à la ressortir avec autant de facilité, mais il fallait bien avouer que le petit jeu n’en restait pas moins amusant.


- « Attention, je n’en reste pas moins une commerçante avant même d’être une voleuse… » avait-elle répondu dans un sourire plus large « Ne me tentez pas à vouloir revendre ce que je viens de dérober… Peut-être pourrais-je en tirer un bon prix. »

La suite ? Elle avait été si spontanée, si naturelle pour celle qui esquivait une réponse dans une nouvelle phrase d’accroche qui suscita tout l’intérêt de son interlocuteur. Cette fois-ci, la fierté et l’étincelle dans ses deux prunelles grises ne pouvaient laisser aucun doute quant au plaisir qu’elle avait trouvé à remettre ainsi les points à égalité. Il lui avait demandé si il pouvait récupérer la phrase et elle c’était mise à rire, mis flattée, mis gênée d’avoir eu l’idée de sortir une phrase si….

- « Faite donc, mais n’oubliez pas de citer vos sources, un peu de publicité ne peut jamais faire de mal, n’est-ce pas ? » elle lui avait rendu son clin d’œil avant de tremper ses lèvres dans le liquide pourpre.

La rousse avait dû néanmoins s’éclipser, le travail avant tout, surtout lorsqu’elle se retrouve seule aux commandes de son établissement, sans la moindre main pouvant lui venir en aide. Comme souvent, celle à la chevelure de feu semblait dynamique, elle avait le sourire et le rire tout aussi facile. Estelle aimait ce contact direct, cette sensation d’avoir un peu d’importance, la satisfaction de recevoir des compliments ou d’apporter un brin de plaisir à ceux qu’elle servait avec une certaine passion. La petite femme avait dû faire plusieurs allers et retours entre la cuisine et les tables, tenant d’une main experte le plateau qui lui permettait de déplacer bon nombre de commandes en même temps. Quand enfin, son service fut terminé, elle avait rejoint avec un certain engouement celui qui avait rendu sa soirée un brin plus agréable. La surprise sembla néanmoins se lire presque immédiatement sur les traits de son visage alors qu’elle constatait une différence flagrante de comportements. Estelle avait tenté de l’appâter avec un nom, prénom et une explication des lieux. Ce fut un échec lamentable pour la rousse qui en perdit presque son sourire alors qu’elle reprenait le nettoyage de son comptoir avec un morceau de tissu légèrement humide. La conversation lui avait semblé s’éteindre, revenir au basique échange d’un client à la tenancière, qui lui réclamait un alcool fort, le moins cher. La rousse avait simplement opiné, ne trouver rien à redire sur cette commande.

Attrapant les quelques sous, allant jusqu’à aller ramasser pour rendre les pièces sur le sol de celui qui lui faisait par la passé la conversation. Lasse et un peu dépitée par ce changement de comportement un peu trop brusque pour elle, elle avait sorti une chope puis son fameux alcool maison, peu cher, mais dont tout le monde ignorait la recette. Il fallait bien avouer que le goût était infect et que les petits débris de plantes et d’autres choses indéterminées n’étaient pas pour rassurer le client. Peu regardante sur les quantités, Estelle avait rempli le tout à son maximum, avant de ranger sa fameuse bouteille surprise. Poussant du bout des doigts l’ensemble, elle releva néanmoins la tête vers le semblant de taquinerie qu’elle crut percevoir, le genre de phrase forcée qui n’avait plus de grand sens maintenant que l’homme ni mettait plus de la bonne volonté.


- « L’amour de votre vie ?» elle c’était retourné, essayant elle aussi de sauver les quelques apparences teintées de cette déception profonde. « Vous voulez parler de cette délicieuse bière qui se trouve juste là » elle avait démontré un alcool derrière elle « Je comprends, moi aussi c’est l’amour de ma vie. »

Cela n’avait visiblement pas été concluant, plus que l’homme avait pris la poudre d’escampette. Disparaissant du comptoir pour s’installer à une table isolée. Estelle resta un instant là, immobile, à détailler celui dont le comportement était devenu presque incompréhensible. Il était milicien, milicien ET ivre. Le mélange n’était pas bon, et il était que très peu probable qu’il puisse rentrer dans la caserne dans cet état, sans se faire rabrouer par son supérieur. Astiquant avec plus de rapidité la chope vide qu’elle tenait entre ses mains, elle semblait prise dans ses pensées. Si bien qu’elle ne voyait même pas les grands gestes qu’étaient en train de lui faire un client du fond de la salle. Secouant doucement la tête, elle avait fini par rejoindre celui qui devait s’être complètement asséché tant elle avait mis du temps à réagir.

- « Excusez, j’étais bien loin, je crois » souffla-t-elle à son nouvel interlocuteur dans un large sourire.

L’homme ne lui avait pas semblé tenir rigueur plaisantant avec force, pour s’excuser elle lui avait offert quelques marrons chauds qu’elle venait de faire chauffer. Là elle attrapa une clé d’une de ses chambres de l’étage une petite écuelle avec des marrons chauds, avant de revenir d’un pas déterminé vers Merrick. Là elle avait dû s’arrêter juste devant lui déposant la petite écuelle ainsi que la clé juste à côté de sa chope d’alcool.

- « Première chambre à droite à l’étage, je doute que votre coutilier apprécie très fortement vos yeux actuellement et le tremblement de vos mains. » elle poussa d’un doigt l’écuelle « Ça c’est pour éponger, et lorsque vous allez monter, repasser par le comptoir, je vais faire infuser quelques plantes, à boire entièrement avant de dormir ou de sombrer, ça vous évitera les maux de tête demain matin » le regard qu’elle lui avait porté finalement avait dû se faire plus sévère « Ne vous avisez même pas de refuser ou je vous oblige de force et vous traîne les pieds et mains liées jusqu’à l’étage… Au risque de vous offrir quelques petites marques de douleurs sur votre corps à cause des marches. »

Son regard d’un gris bleuté le scruta sans la moindre pudeur, Estelle avait toujours été comme ça : maternante. Quelque chose l’avait intrigué, quelque chose avait suscité cet intérêt inexplicable et elle était tout simplement incapable de laisser cet homme dans son désarroi sans rien lui proposer pour l’aider. Une main tendue, c’était ça, juste ça, sans que cela ne prenne la forme quelconque de pitié. La rouquine lui avait offert un large sourire, laissant ses doigts rouler jusqu’à ses épaules ou une fois au plus haut elle avait émis cette légère pression réconfortante. Rien d’outrageant, aucun manque de respect ou de sous-entendu, simplement un geste, une nouvelle main tendue, une ouverture à la conversation. Une nouvelle fois, elle avait disparu pour s’occuper de ses clients, une nouvelle fois l’ambiance s’était faite festive, drôle jusqu’à ce que deux hommes bien trop ivres ne commencent à se chauffer mutuellement. La réaction de la rouquine ne s’était pas fait attendre, attrapant la poêle sous son comptoir elle était venue escalader une chaise pour offert deux énormes coups sur la tête des deux individus qui c’étaient presque immédiatement écroulés. Déposant son arme sur la table, elle fronça les sourcils, en avisant le petit groupe.

- « Brigitte et moi, on est très contente. » fit-elle « Alors vous lever vos p’tits culs et me ramener les deux bougres jusqu’aux jupons de leurs femmes ET je ne veux rien entendre, pas la moindre bougonnerie. Vous connaissez les règles si vous n’êtes pas contents, j’fais intervenir la milice. Ça rentre dans vos p’tits têtes ou j’dois répéter ?»

Avec Estelle ce qui était évident, c’est qu’elle avait un sacré caractère, tout du moins en apparence, parce qu’en y regardant bien, on pouvait aisément constater des petits signes d’hésitation. Le plus important étant évidemment que le plus grand nombre de s’en aperçoive pas, il fallait paraître avoir le dessus sans quoi tout serait catastrophique et ce soir elle ne pouvait compter ni sur son frère ni sur sa petite serveuse pour l’aider. Heureusement pour elle, les hommes semblaient avoir parfaitement compris le message, ils avaient ramassé les deux amis, avant de sortir sans bruit et sans la moindre esclandre, certains s’excusant aussi plus que de raison auprès de la tenancière. Estelle récupéra « Brigitte » pour venir la ranger, non pas sans un regard désolé à son arme qui commençait avec les années à tirer un peu la tête. Le silence s’était fait plus présent quelques minutes, avant que l’ambiance ne retrouve son entrain habituel, il fallait dire que cela arrivait souvent à Estelle d’agir ainsi, à force, cela ne surprenait même plus les habitués. Naturellement, elle était venue récupérer les chopes vides, passer un coup sur les tables.

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Merrick LorrenCoutilier
Merrick Lorren



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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptyLun 28 Jan 2019 - 6:39
-‘’Mon cœur vous est tout acquis. Dès lors, comment pourrais-je vous le reprendre ?'' Dit-il en haussant les épaules, lui offrant une moue fataliste. ‘’Je vais donc espérer que vous le conserviez comme le trophée de votre plus grand larcin, plutôt que vous le vendiez pour une bouchée de pain. Car je dois vous le dire; il ne vaut presque rien.’’ Laissant un bref silence s’installer pendant quelques infimes secondes, Merrick Lorren enchaîna avec la fin de sa tirade, de sa bravade : ‘’Il ne vaut rien ou peu, mais peut-être qu’à vos yeux, et proche de vous, celui-ci trouverait une certaine valeur…?’’

Par la suite, bon joueur, Merrick avait humblement reconnu la qualité du sens de la répartie de la jeune femme. Esquivant avec habileté la lourde phrase d’accroche tentée par le milicien, la tenancière avait répondu par une autre question du même acabit, reprenant l’initiative de la discussion, mais aussi et surtout, l’ascendant sur son partenaire et adversaire du soir. Ne feignant aucunement son appréciation de la sagacité de la répartie qu’elle venait de faire pleuvoir, Lorren put apercevoir la fierté venir habiter les yeux de la rouquine. Ce plaisir déchiffrable au travers de ce regard bleu et charmant lui fut presque aussi satisfaisant que si la victoire avait été sienne. Presque… Lui demandant enfin s’il pouvait garder dans son répertoire la phrase qui venait de lui faire mordre la poussière pour un temps, Merrick fut surpris d’entendre celle qui était encore une inconnue rire. C’était la première fois qu’il entendait le son cristallin de son amusement. Cette exclamation lui faisait relativiser les choses; peut-être qu’il n’avait pas réellement perdu l’avantage de l’affrontement. Bien qu’il lui concédât un point, l’entendre rire ne voulait-il pas dire que lui aussi était sur la bonne voie ? Du moins, voulait-il le croire… Mais attendez une minute; sur la bonne voie pour quoi ? Que cherchait-il au juste, que visait-il ? ...Enfin. Ce n’est guère un questionnement qui trouverait réponse dans un esprit embrumé des effluves de l’alcool !

-‘’Je ne l’utiliserais donc pas…’’Dit-il, peiné. ‘’J’aurais beaucoup trop peur de voir rappliquer des hommes â même de me faire compétition dans la lutte pour conquérir votre amour, si je vous fais de la publicité !’’ Termina-t-il, répondant à son clin d’œil par un sourire.

Puis, elle s’était éclipsée. Le laissant à lui-même, le laissant en proie à un ardent désir de la voir revenir. Or, comme il a déjà été mentionné, le passé de Merrick rattrapa la réalité, le faisant chavirer dans un état de panique inconsidérée. En proie à la douleur du passé, les souhaits de l’homme avaient été exaucés; Estelle de Chantauvent venait de le rejoindre pour astiquer quelques contenants méritant un coup de chiffon. Elle reprit la place qu’elle venait de quitter, alors que Merrick Lorren était au plus mal. Sachant qu'il n'était plus d’une agréable compagnie, et de n’être plus capable de continuer à discuter avec autant de malice et de saveur qu’ils faisaient précédemment, le milicien avait préféré s’éclipser et battre en retraite. Merrick était saoul, mais pas aveugle. Il voyait bien que la situation, le changement drastique de comportement qui s'opérait sur son être, mettait Estelle un brin mal à l'aise. Or, il ne pouvait guère contrôler son amertume pour le moment, et il n'était pas homme capable de dresser un masque de faux semblant aussi efficacement que rapidement. Le tenta-t-il tout du moins, voulant continuer cette discussion qui le satisfaisait au plus haut point. Cependant, sa tirade ne fut pas à la hauteur de la situation, tandis que cette dernière semblait manquer de cœur et d'envie. À ses propres oreilles, cela sonnait faux, alors qu'il n'arrivait même pas à se reconnaître, à ressentir cette pointe d'excitation qui le frappait précédemment. Il avait tenté de ramener cela sur le terrain de ''l'amour'', mais cela avait été qu'un échec lamentable. La réponse qu'il reçut en fut la preuve, tandis que la rousse présenta l'alcool derrière elle comme le réel amour de la vie du milicien.

Aussi étonnant que cela puisse être, les paroles de la tenancière blessèrent d'un brin sa fierté. Relevant résolument son regard rouge et hagard dans les prunelles de la dame de Chantauvent, il fronça les sourcils et tenta de ramener son amour de la boisson à sa juste place. '' La bière, l'amour de ma vie...?'' commença-t-il en pointant d'un doigt tremblant la bière derrière la jeune femme. ''Non, en aucun cas. ''Ça'', comme vous dite, ce n'est que le poison qui me permet de survivre à moi-même...'' Il en avait trop dit.

Prenant une grande gorgée de l'alcool fort qui lui avait été servi précédemment, il ne put s'empêcher de grimacer lorsque le tord-boyaux se fraya un passage dans sa trachée. ''Horrible à souhait, merci...'' Dit-il sans la moindre ironie. ''[...]Maintenant, si vous voulez bien m'excuser...'' Sans attendre une réponse, Merrick Lorren venait de tirer sa révérence, croyant que cela signerait la fin de son histoire avec Estelle de Chantauvent. Parfois, cependant, les choses peuvent prendre une tout autre tournure...
---




Reculé, proscrit au fond de la taverne, le jeune homme faisait partie du tissu disparate des ivrognes et fêtard de la soirée, sans pour autant participer aux réjouissances. Là, un homme éructa à grand bruit et fracas, alors qu'il venait de rafler la mise autour de la table. Par là-bas, une femme adressait un regard ne voulant signifier qu'une seule et unique chose à l'homme sur lequel elle avait jeté son dévolu. Juste ici, deux hommes, véritable briscard de la bouteille, commençaient à se jeter des regards sombres... Bref, la soirée battait son plein, les esprits baignaient dans la torpeur enivrée de tout ce qui se buvait et presque tous étaient joyeux. Presque, car Merrick ne l'était pas. Le retour des souvenirs du passé, alors qu'il buvait généralement pour oublier, et le fait d'avoir coupé court à une discussion des plus intéressantes venait le miner, le faire sombrer dans une mélancolie et dans une remise en question qui n'en finissait plus. Aurait-il pu mieux faire ? Est-ce qu'il méritait réellement de faire partie de la milice ? Allait-il encore abandonner des personnes qui étaient chères à ses yeux dans les moments importants ? Réussirait-il à se dresser face au chaos de la situation, ou devrait-il se laisser couler et oublier ? C'est ainsi engoncé dans le marasme de ses idées noires, que le temps défila peu à peu. C'est la tête appuyée dans la main gauche, la main droite enserrant sa choppe, et son regard prostré vers le centre de la table, que le milicien ne cherchait plus à comprendre ou relativiser, alors qu'il voulait simplement et seulement oublier... Or, ce ne fut pas ce qui lui fut permis.

Ne la voyant jamais arrivée, Lorren sursauta lorsqu'il vit Estelle se dresser devant lui et déposer une assiette, ainsi qu'une clé. ''Que...?'' Levant son regard hagard et rougi vers les yeux bleus de l'aubergiste, il écouta d'une oreille attentive les dires de la patronne. C'est tel un marin en plein naufrage qu'il s'accrocha comme un forcené à ses mots qu'elle lui adressait. Peu à peu, les dires de la demoiselle firent leur chemin dans son esprit. Les marrons c'était pour lui permettre d'éponger l'alcool. La clé, c'était pour qu'il puisse dormir en haut, sans se faire sermonner par son coutilier pour son fort taux d'alcoolémie. Elle lui promit aussi qu'en repassant par le comptoir, il pourrait récupérer une infusion pour éviter les maux de tête du lendemain matin. ''Tout ça, gratuitement, pour rien ?'' Demanda-t-il, estomaqué. Le ton de sa réponse n'avait aucunement été suspicieux. Le problème n'était pas de payer, mais plus tôt qu'il ne comprenait pas son geste. Comment une personne pouvait-elle se montrer aussi juste, bonne et charitable ? Qu'avait-il fait, lui le soulard de première, pour mériter tout cela ? Impossible, non impossible que ce geste soit fait pour Merrick Lorren. Peut-être était-ce simplement parce qu' Estelle de Chantauvent était une personne charitable et exemplaire ? Oui, cela devait être cela...''Merci, m...''

La rouquine enchaîna en lui promettant de l'attacher s'il contestait. Cette force de caractère, couplé à sa charité, laissa Lorren la bouche entre-ouverte. Bien vite, il préféra détourner les yeux des prunelles de sa bienfaitrice, esquivant ce regard inquisiteur et scrutateur qui n'escomptait aucun refus. Alors qu'il ne regardait plus, qu'il évitait tout contact visuel avec elle, Estelle vint lui déposer une main sur son épaule. Ce simple geste réconfortant mit fin à sa contemplation du sol, tandis qu'il partit se perdre à nouveau dans les prunelles de son homologue. Là, il put voir ce sourire qu'elle lui adressa et qui lui réchauffa le cœur. Loin d'avoir un quelconque lien avec le jeu qu'ils jouaient avant, cette véritables attention et soutien qu'elle lui offrait, sans rien attendre en échange, lui fit le plus grand bien. Sans qu'il puisse répondre -de toute façon, aurait-il trouvé les mots justes?-, la dame de Chantauvent était repartie vaquer à ses occupations. En proie à des émotions contradictoires, Merrick ne savait plus que faire. Le ressentiment du passé était bien évidemment toujours présent, mais dorénavant, un certain baume venait recouvrir sa blessure, alors que la générosité et le geste de la jeune fille étaient tels à une douce caresse sur ses maux. Et pourtant, bien que cela lui fit le plus grand bien, il allait refuser tout cela. Oui, l'action qu'elle avait prise était digne des plus grands remerciements. Mais, il ne voulait pas être la source d'une quelconque compassion, encore moins de la tavernière qui l'avait vu et connu si différemment que la loque humaine qu'il était présentement. Et puis, Merrick Lorren ne méritait aucune aide extérieure, alors que lui-même n'en avait apporté aucune à sa famille, à son père et à tous les autres...

-''Je vais rentrer...'' Murmura-t-il pour lui-même. C'est ainsi, que résolu, le milicien venait de décider de retourner à sa caserne, d'affronter son coutilier, de ne plus déranger Estelle et d'affronter ses cauchemars nocturnes. Pour autant, l'ivrogne allait partir avec le cœur un peu moins alourdi, alléger par les mots de celle qui lui avait prêté assistance. Lorren était donc sur le point de se lever pour partir, lorsqu'un brouhaha de violence vint suspendre son geste.

Les deux hommes qui se regardaient méchamment quelques minutes plus tôt explosèrent dans une confrontation verbale qui déboucherait bien rapidement sur une violence physique. Interdit, Merrick n'eut même pas le temps de réagir, alors qu'Estelle se jetait déjà vers les lieux de la dispute. Se hissant sur une chaise, tenant fermement une poêle dans la main, la tenancière vint frapper le dessus du crâne des deux belligérants à l'aide de son arme usée par les combats. Quasiment immédiatement, les deux ennemis défaits par une tierce opposante allèrent s'échouer sur le sol, vaincu et assommé. Le silence vint conquérir la pièce principale de l'auberge, suite à la scène incongrue. Perçant le silence, Estelle exposa à nouveau les règles de la maison, forçant les collègues de deux antagonistes à ramener leurs corps jusqu'à leurs femmes, sans le moindre grommellement. Ils avaient enfreint la loi de la chope dorée qui stipulait aucun combat; ils devaient donc partir. Sans qu'un être n'ose répondre, le mouvement de fuite fut enclenché par les deux groupes, suivant les ordres de la chef des lieux. Une fois que la voix de la rouquine se fut éteinte, le silence revint conquérir l'ensemble des clients...

-''Bravo, bravo, bravo !'' Se levant en riant, Merrick Lorren déclama son appréciation de la scène en applaudissant en direction d'Estelle qui se trouvait encore installée au sommet de sa chaise. Trônant au-dessus de l'assemblée, la petite femme, qui était le centre de l'attention quelques instants plutôt, perdit de l'intérêt lorsque le rire et les exclamations du milicien vinrent répondre au mutisme de la taverne, attirant les regards interloqués des membres de l'assemblée. Merrick avait cru percevoir un léger doute habiter les pupilles de la jeune femme lorsqu'elle c'était imposé devant tous. Il avait du rêver, lui qui était déjà bien avancé dans son ivresse, mais il n'avait pu la laisser comme cela devant les feux de la scène. Son rire et ses applaudissements continuèrent quelque temps, avant qu'il ne retrouve sa chaise. Le jeune homme ne mentait aucunement, alors que l'action qui venait de se dérouler devant ses yeux l'avait arraché à son marasme. Estelle avait été apte à résister à ses ''charmes'', enchaînant et attaquant avec ingéniosité. Puis, elle avait envoyé deux hommes au sol et enfin, elle s’était adressée à une foule imbibée d'alcool et de spiritueux. Pour ce faire, son ton et sa façon de parler avaient changé, tandis que sa diction exemplaire venait s'échanger pour un langage commun, où les élisions venaient couper les mots en deux. Les ''p'tits'', ''j'fais'' et ''j'dois'' était venu prendre la place des mots généralement bien prononcés pour se faire comprendre de tous. Et pour ça, elle était une artiste méritant une ovation. Et pour ça, Merrick Lorren lui avait offert ses applaudissements, son rire et sa joie de vivre retrouvée.

S’assoyant à nouveau sur sa chaise, le milicien dévora les marrons, récupéra la clé et sa chope vide sur la table. Se passant -enfin- à nouveau une main dans les cheveux, Merrick finit pas prendre l'assiette vide et se diriger vers le comptoir qu'il avait abandonné. Fendant la foule d'un pas mal assuré par l'alcool, mais fier, le regard fiévreux, mais pétillant et le sourire aux lèvres, le jeune ivrogne déposa l'ensemble de ce qu'il transportait sur le bar devant Estelle.

-''Mademoiselle de Chantauvent, seriez-vous une divinité quelconque ?'' Dit-il avec le ton qui l'avait quitté quelques instants plus tôt, le sourire retrouvé. '' Vous résistez à mes attaques et vous m'affrontez à armes égales dans la lourdeur de mes phrases d'accroches, vous combattez à l'aide d'une poêle deux alcooliques de la pire espèce, et vous parler le langage de l'ivrogne aussi clairement qu'un prêtre devant ses ouailles...'' Poursuivit-il en levant un doigt à chaque fois qu'il énuméra une qualité de la femme. S'appuyant à nouveau sur le bar, il déposa son menton dans sa paume et fixa la rouquine dans un sourire. Entre l'alcool qu'elle lui avait servi, la compassion dont elle avait fait preuve et sa mésaventure qui l'avait hautement intrigué, Merrick avait réussi à repousser au loin ses sombres pensées pour un temps.

-''Merci, pour votre offre de logement mademoiselle, mais je crois que je vais refuser.'' Commença-t-il doucement. '' Voyez-vous, j'aimerais réellement vous voir m'attacher pour la nuit...'' Termina-t-il en lui offrant un clin d'œil lubrique.

La joie retrouvée, l'amusement reprenant le dessus et le plaisir d'échanger déterré, Merrick n'oublia cependant point un détail vital, un détail hautement important. Se redressant bien droit, passant encore une main dans ses cheveux et se raclant la gorge, le milicien laissa son sourire disparaître pour qu'un air sérieux -et si rare- vienne marquer son faciès. Respirant par le nez et soufflant par la bouche, Lorren vrilla son regard dans celui de la tenancière avec de se prononcer : '' Je te remercie, Estelle. Pour tout. Sincèrement.'' Cela avait été dit d'un ton honnête et sérieux, bien différent de tout ce qu'il avait démontré depuis qu'il était apparu à la chope sucré.

Mal à l'aise, peu habitué à s'ouvrir ainsi, notamment pour des remerciements, Merrick retrouva sa position d'avant, la tête dans la main. Récupérant son sourire en coin qui l'attendait au tournant, le milicien enchaîna rapidement pour ne pas laisser un froid s'installer : '' Ainsi, je serais votre invité pour ce soir, mademoiselle de Chantauvent !'' Puis, repoussant ça choppe vide un peu plus vers l'avant, il continua : '' Terminé l'immondice que vous m'avez servie ! N'aviez-vous pas présenté une délicieuse bière comme ''l'amour de votre vie''? Permettez-moi de goûter à la compétition qui me fait face pour la conquête de votre cœur, je vous pris ! Il doit bien me rester le temps de finir un breuvage avant que vous ne renvoyiez les ivrognes chez eux, non ?''
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Estelle Lorren



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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptyMar 29 Jan 2019 - 18:51


- « Ce qui est gratuit à l’œil n’est pas forcement gratuit dans le cœur » répondit simplement Estelle dans un sourire.

On aurait pu croire qu’elle était ivre elle aussi, que sa phrase n’avait pas le moindre sens et que son geste n’était que le fruit d’un manque de compréhension de la situation. Il n’en était rien, la tenancière semblait être en pleine possession de ses moyens et certainement pas dans un état d’ivresse important, loin de là. Ses lèvres s’étiraient dans un nouveau sourire bienveillant, alors qu’elle constatait sans trop de doute une réelle incompréhension sur le visage de son nouveau client. La gérant n’avait pas pris l’habitude de justifier son geste, sa proposition, c’était une habitude et certain client avait le droit à sa sympathie, alors que d’autre la suppliant n’obtenait jamais la moindre assistance. C’était une question de perception, de visualisation, il avait attiré sa curiosité, sa réaction ses paroles, elle s’était suffisamment questionnée pour ne pas avoir envie d’être en face de l’homme presque froid et sans humour. Afin de réamorcer une ambiance plus légère, plus douce, elle l’avait menacé de l’attacher, de le séquestrer s’il refusait, bien trop consciente des risques qu’un milicien encourait en rentrant dans un tel état. Abandonnant ensuite les marrons, la petite clé et Merrick, Estelle était retournée à ses nombreuses occupations.

C’est qu’il y avait bon nombre de choses à faire ce soir, cela faisait bien longtemps que la tenancière ne s’était pas retrouvée toute seule à devoir gérer l’établissement et pour la première fois elle se sentit légèrement dépassée par les événements. Récupérer les chopes vides, remplir, ramener, passer en cuisine pour préparer les commandes, maîtrises la cuisson des aliments tout en étant dans l’obligation de retourner vérifier que tout se passe bien en salle et le pire, oui, le pire du pire qui pouvait arriver avait fini par se dérouler alors qu’elle repassait le nez dans l’ouverture entre la salle et la cuisine. Un différend, un semblant de bagarre, ce petit quelque chose qu’elle ne supportait absolument pas. D’un bon, celle à la chevelure de feu avait récupéré sous son comptoir Brigitte. La brave Brigitte dont l’utilité et la capacité à résoudre les conflits n’étaient plus à prouver. La jeune femme avait ignoré les voix qui montaient dans les graves, les gestes qui se faisaient plus vifs entre les deux hommes qui s’attrapaient mutuelle par des morceaux de chemises et là, oui là elle tira une chaise grimpa dessus dans une rapidité déconcertante avant d’infliger un sacré coup sur la tête des deux hommes. BIM BIM.

Les deux bagarreurs s’étaient presque immédiatement relâchés détaillant avec curiosité la raison du mal qui commençait à les ronger, après un regard plutôt flou et vitreux vers la rousse, les deux hommes avaient fini par s’effondrer dans un raffut et un tremblement du sol impressionnant. Ce fut le silence, le vrai silence, celui qui s’installe soudainement, brusquement, et qui perdure sans que chacun ne trouve réellement quoi dire ou quoi faire. Estelle était encore sur son perchoir, sentant les visages se relever légèrement vers elle, les sourcils se froncer devant l’incompréhension générale. Le groupe n’avait encore jamais dû voir Estelle en colère et celle-ci se sentit dans l’obligation de refaire un petit point, de faire un rappel sur les règles de l’établissement et ce n’était pas parce que son frère, sa serveuse ou les mercenaires qu’elle embauchait régulièrement n’étaient pas là que les choses changeaient. Sa voix s’était faite plus sévère, tout comme sa posture et si dans le fond, elle était toujours mal à l’aise dans ce genre de situation, elle ne faisait que son travail.

Le silence fut néanmoins brisé par la réaction d’un homme, ou plutôt du nouveau : Merrick. Le milicien s’était mis à rire en tapant dans ses mains, en applaudissant alors qu’il détaillait celle qui se trouvait encore sur sa chaise. Le centre d’attention s’était naturellement déplacé d’Estelle à l’homme en état d’ivresse qui avait un comportement un peu incompréhensible aux yeux de tous. Le silence avait fini par reprendre ses droits, lentement mais sûrement, et celui alcoolisé c’était installé de nouveau sur sa chaise. Un peu hésitante la rousse avait fini par descendre et avec elle le brouhaha avait semblé reprendre, le groupe avait ramassé les deux hommes pour prendre la direction de la porte, non pas sans abandonner les quelques sous en guide de paiement pour les consommations.

Dans un soupir imperceptible, celle à la chevelure de feu s’était déplacée vers les tables afin de récupérer les chopes, de passer un coup de tissu humide sur les tables quelque peu collantes. Son sourire avait disparu et si elle tentait de maintenir sa bonne humeur, son masque avait semblé s’atténuer une fraction de seconde. Ce fut la voix désormais presque reconnaissable pour elle du nouveau de la soirée qui la fit se reprendre, réajustant un nouveau sourire ainsi qu’un petit rire maîtrisé. Une divinité, Merrick semblait avoir retrouvé son humour et sa capacité à s’amuser du moindre petit rien. Comment lui en vouloir ? Se redressant un peu, la tenancière le détailla avant de glisser un doigt sur ses lèvres.


- « Schhhhhht il ne faut pas le dire, mais mon deuxième prénom c’est Rikni, la dame aux serpents. »

De nouveau derrière son comptoir, la jeune femme débuta son rangement, un peu honteuse de cette allusion avec la plus intrigante des divinités, ce n’était pas drôle, du moins un peu à ses yeux, quoi qu’elle avouait avoir pris un malin plaisir à la formuler sur l’instant. Passant le tissu sur les chopes vides qu’elle a passé simplement dans la petite bassine d’eau disposée à l’abri des regards, elle avait relevé les yeux soudainement vers lui quand il lui indiquait refuser son offre. Là, elle se contenta de rouler simplement des yeux, prenant la phrase comme une énième proposition indécente. Ses lèvres s’étirent dans un bref et léger sourire, alors qu’elle rajoutait :

- « Ne me tentez pas, vous risqueriez de le regretter, ne vous a-t-on jamais dit que les femmes étaient dangereuses ? »

Elle avait rétorqué presque naturellement, sans en comprendre la raison, si son frère l’avait entendue aucun doute qu’il l’aurait reprise, ou qu’il aurait jeté à la rue celui qui se permettait des phrases un peu trop ambiguës. La rouquine ne s’en offusquait pas elle, c’était un jeu, un simple jeu qui lui occupait l’esprit. C’est certainement prise dans ses pensées qu’elle se perdit dans ce regard qui venait d’happer le sien, il l’avait tutoyé puis remercié, sans qu’elle ne parvienne a en saisir le sens ? Qu’avait-elle bien pu faire pour mériter ça ?

- « Vous savez que vous avez une petite manière avec vos cheveux, invités ? » se moqua-t-elle gentiment « Je vais donc vous chercher l’amour de ma vie de ce pas. » fit-elle tout aussi amusée

Estelle avait fini par se retourner le temps d’attraper le contenant de bière, c’était une de sa propre réalisation, il fallait bien l’admettre, ce n’était pas la meilleure bière du royaume, mais elle avait néanmoins ce petit truc en plus, un peu sucré, un peu piquant, un peu plus fort qu’une bière basique.

- « Cependant, ne vous faites pas d’illusion la compétition est perdue d’avance… La bière remporte toutes mes faveurs… » fit-elle dans un petit clin d’œil « Je vous laisse la bouteille, le temps de ranger et de dire au revoir à mes derniers clients. » elle avait servi un verre « Gare à vous si vous buvez tout et que vous ne pouvez plus monter… Brigitte peut-être encore très efficace. »

La rouquine l’avait simplement taquiné gentiment une manière aussi de s’assurer qu’il serait encore là à son retour. Le temps pour elle de récupérer l’argent des derniers clients, de rire à des blagues qu’elle ne trouvait pas drôles, d’esquiver des mains qui se voulaient un peu baladeuses des gens ivres plus que de raison. Là après une bonne heure, l’établissement se vida enfin, ne restait-il plus qu’une femme qui avait loué une chambre, Merrick et la tenancière qui venait de récupérer les dernières chopes vides. Normalement, c’est le moment ou la jeune femme retrouvait un peu de sa sincérité, le moment où elle abandonnait sagement son masque pour ne rester que cette femme encore en plein deuil. Ce soir, cette nuit, elle ne pouvait pas, non, parce qu’elle n’était pas seule et lorsque son regard se porta sur le milicien, elle lui offrit un nouveau sourire. Déposant les chopes dans la petite bassine, astiquant le tout pour tout ranger, elle finit par lui jeter sur la tête le bout de tissu humide dont elle s’était servi pour essuyer l’ensemble.

- « Dis donc, monsieur le milicien vous êtes en train de baver sur mon comptoir ou je rêve ? Il y a des chambres pour dormir, dont une qui n’est rien que pour vous ce soir » poursuivit-elle « Enfin… Vous voulez partager un potage avec moi ? Je n’ai pas mangé encore… Je ne dis pas non à un peu de compagnies… Mais attention à ne pas baver dans ma gamelle » souffla-t-elle en prenant une voix mi-amusée, mi-sévère.

Qu’il accepte ou non, cela ne changeait pas grand-chose pour elle, hormis le fait de remplir deux petites écuelles et non une seule. Après un bref passage dans la cuisine, Estelle avait fini par revenir avec le nécessaire pour une personne, ou deux, là elle était venue se hisser juste à côté de lui, tirant un sourire. Son visage devait paraître un peu fatigué, le service avait été long et la petite rousse avait un brin mal au dos, dans les cuisses et aux pieds. Elle n’avait donc pas pu retenir ce soupir de soulagement lorsqu’elle s’était installée. La conversation fut alors un peu plus posée, ponctuée par le rythme des gorgées de potage qu’elle avalait ou qu’il avait si il en avait eu droit à une aussi.

- « Si ça ne vous gêne pas et si vous en êtes en état, pourriez-vous m’accompagner dans les bas quartiers avant d’aller vous coucher ? » questionna-t-elle « Vous n’avez cas voir ça comme moyen de paiement pour votre chambre. »

Estelle avait laissé un silence, sans en dire davantage, c’est qu’elle n’était pas certaine de réaliser son habitude ce soir, en tout cas pas toute seule et lorsqu’elle sentit davantage le regard de son interlocuteur la détailler, elle lâcha un soupir avant d’ajouter.

- « Chaque soir, j’offre gratuitement les restes de la soirée… Plutôt que de jeter, je préfère le donner à ceux qui n’ont pas les moyens de venir… Il y a des familles entières qui crèvent de faim là-bas… C’est stupide, je sais… Normalement c’est mon frère qui m’accompagne, mais son épouse est souffrante alors… Enfin, ne vous sentez pas obligé, vraiment pas, et sans vouloir vous offenser, je ne suis pas certaine qu’avec votre tête vous soyez en état de quoi que ce soit… »

Ce soir, il ne restait de toute façon pas grand-chose : des marrons chauds, deux marmites de potages rien d’exceptionnel et d’ailleurs elle pourrait sans aucun doute tout réchauffer demain, mais elle n’aimait pas attendre, jamais, rarement. Son sourire ce fit un peu plus faible, avant elle n’avait pas ce genre de problème, avant il lui suffisait de hurler en bas des marches pour voir débouler son époux, avant elle aurait eu juste à négocier à l’aide d’un arrangement donnant donnant, mais là, elle n’avait plus grand-chose, hormis son frère qui n’avait de cesse à la moindre demande de lui rappeler qu’elle devait céder à un de ses prétendants.

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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptyMar 29 Jan 2019 - 22:28
L'incompréhension peignit le visage de Merrick Lorren. Qu'avait-elle cherché à dire, à expliquer, suite au questionnement du milicien sur la gratuité de ses actes de bontés ? Il semblait évident que tout cela était fait de manière désintéressée. Pour autant, cela ne pouvait que l'estomaquer, lui qui n'avait guère l'habitude de ce genre de geste charitable. Après tout, peu ou point de personne n'était prête à apporter de l'aide à leur prochain depuis que le chaos avait envahit le duché. Du moins, chez les gens que connaissait Merrick... Et puis, il fallait aussi le dire; le jeune homme n'était guère habitué à cela, tandis que lui non plus n'était point un être excessivement charitable ou serviable. Lâche, fainéant, borné et entêté; oui. Altruiste, aidant ou généreux; non. Avant qu'il ne puisse s'expliquer l'offre plus que généreuse d'Estelle de Chantauvent, ou bien approfondir son questionnement envers la tenancière, cette dernière l'avait menacé de l'attacher de force et de le trainer vers les étages. Puis, aussi vite qu'elle était arrivée, la propriétaire de la Chope sucrée était disparue dans un tourbillon roux, retournant courir à gauche et à droite pour essayer d'endiguer les demandes des ivrognes en tout genre.

Pour autant que cette proposition lui remonta quelque peu le moral, il n'escomptait pas l'accepter. Du moins, avant qu'un embryon de bagarre et de violence n'éclate entre deux clients, et que la jeune femme ne vienne y mettre un terme à l'aide de son instrument de cuisine contondant. L'incongruité de la scène l'avait profondément fait rire, le faisant se lever pour rompre le lourd silence qui c'était abattu sur la salle. Ainsi, Merrick avait volé l'attention qui était toute décernée à la rouquine quelques instants plus tôt. Dès lors, c'était lui qui était allé occuper le devant de la scène face une masse interloquée et renfrognée. Aimant se positionner sous le regard de tous, Lorren n'en éprouva aucun problème quelconque. Ce n'était pas une question de courage que de se tenir là, c'était simplement et seulement un amour-propre surdimensionné qui lui apportait une certaine force de caractère dans ces moments. Cependant, cette prise d'attention ne fut pas faite en raison de son narcissisme, alors qu'il ne cherchait aucunement l'attention d'une salle complète, mais plutôt d'une seule personne en particulier. Et puis, n'avait-il pas cru discerner une lueur de doute dans les yeux de celle qui venait de terrasser deux hommes ? Ainsi, avait-il fait d'une pierre deux coups.

Comme pour lui donner raison, tandis qu'il cheminait parallèlement à Estelle en direction du comptoir, le milicien crut entrapercevoir une morosité qu'il ne connaissait pas sur le visage de la rouquine. Aucun sourire, aucune joie de vivre, alors que celle-ci ne l'avait jamais quitté -ou presque- depuis que Merrick était rentré dans la taverne. Cela le déconcerta un peu, mais il ne put approfondir son analyse, tandis qu'il dut se concentrer sur ses pieds qui ne le transportaient plus en ligne droite. Lorsqu'il releva les yeux, quelques instants après, pour s'assurer de n'avoir pas rêvé cette mélancolie, la bonne humeur d'Estelle avait de nouveau fait conquête de ses traits. Merrick Lorren avait-il rêvé ?

Une fois arrivé à son niveau, le milicien demanda à la dame de Chantauvent si elle était une divinité devant les nombreux exploits qu'elle réalisait en cette soirée surchargée en événements. Celle-ci lui répondit par l'affirmative, se présentant comme la déesse Rikni. ''Pourtant, de par votre beauté j'aurais plutôt cru que vous étiez la grande déesse Anür...'' Puis faisant semblant de réfléchir pendant d'infimes secondes il enchaîna : '' mais il est vrai que vous accaparez déjà toutes mes pensées et mes rêves, alors je peux comprendre votre identité !'' Puis Lorren se pencha un peu plus vers l'avant, et se mit à murmurer : '' ne vous inquiétez pas, je ne le répéterais à personne...nous partagerons dès lors notre premier secret ! ''

Puis, Estelle prévint Merrick de la dangerosité des femmes, en essayant de le convaincre qu’être attaché n’était pas ‘’approprié’’ : ‘’ Je pense que je serais prêt à prendre le risque... Après tout, la récompense vaut bien tous les dangers du monde ! Et puis, ne dit-on pas que la fortune sourit aux audacieux ?''

Bien que le sujet de la conversation était parfait aux yeux de Merrick, tandis qu'il nageait comme un poisson dans l'eau et se sentait dans son élément, il ne put continuer sur cette voie, alors qu'un détail d'importance trottait dans son esprit alourdi, mais aussi dans son cœur. Se redressant, le milicien avait lui aussi fait tomber le masque pendant un très bref moment pour remercier sincèrement Estelle pour ce qu'elle avait fait. Pour autant, il ne chercha pas à expliquer le pourquoi ni à rentrer plus en profondeur dans les détails. Qu'elle sache qu'il lui était reconnaissant pour une quelconque raison était amplement suffisant. De toute façon, il n'avait pas voulu la déranger avec ses problèmes quelques secondes avant, alors pourquoi le voudrait-il maintenant ? Bien vite, Lorren était redevenu ''lui-même'', se passant une main dans les cheveux, s'appuyant au comptoir et récupérant son sourire qui ne l'attendait guère loin. Pour changer de sujet, Merrick était rapidement reparti à l'attaque, commandant et quémandant le breuvage qu'elle avait décrit comme ''l'amour de sa vie''. Chose qu'elle lui apporta, après s'être moquée de sa tendance à se repeigner.

Sans chercher à ne pas lui donner raison, le milicien se passa à nouveau une main dans les cheveux lorsqu'elle lui fit la mention de la récurrence de ce geste. Souriant plus largement, il lui répondit tandis qu'elle s'affairait à lui remplir une chope. '' N'avez-vous jamais entendu dire que ce geste est une preuve d'attirance envers une autre personne ?'' Commença-t-il, malicieusement. ''Et puis, devant vous, j'essaie tant bien que mal de me présenter sous mon meilleur jour !''

Enfin, l'alcool vint se retrouver devant le milicien, tandis qu'Estelle présentait la bière maison comme la gagnante de toutes ses faveurs. Puis, celle-ci dit qu’elle lui laissait la garde de la bouteille pour clôturer enfin et finalement la soirée. ''Ne vous inquiétiez point, madame. Je jure de protéger ''l'amour de votre vie'' en votre absence !'' Riant devant la menace qu'elle lui lança s'il finissait la bouteille il surenchérit : '' Avez-vous peur que je conquière ''l'amour de votre vie'' et qu'elle s'offre entièrement à moi ? N'ayez crainte, ce n'est point elle que je vise...'' Finit-il dans un clin d'œil, la laissant aller vaquer à ses occupations.

C'est ainsi que la laissant travailler jusqu'à la fermeture, Merrick Lorren la regarde faire des allers-retours dans son établissement. Sirotant la bière qui était, ma foi très bonne, le milicien attendit patiemment le retour de celle qui l'amusait et l'intriguait au plus haut point. Cette supervision du regard qui dura pendant une petite heure lui permit de cerner quelques détails de la façon d'agir et de travail d'Estelle de Chantauvent. Après tout, il était beaucoup plus simple de tirer des conclusions d'un œil externe et à titre d'observateur, qu'en étant acteur d'une conversation. Ainsi, Merrick put la voir rire et sourire à tous, répondre en plaisantant à des blagues qui ne méritait guère son attention. Dès lors, seul avec la bière, il ne put que se demander une chose : faisait-elle la même chose avec lui ? N'était-il qu'un énième client avec qui elle jouait son rôle de tenancière ? Probablement. Après tout, il faisait partie de cette masse de clients, non ? À quoi s'attendait-il au juste ? Alors oui, Merrick Lorren se sentait supérieur à l'ensemble des autres ivrognes réuni. Mais ça, c'était à cause de son narcissisme outrecuidant. Quand était-il de la part de la dame de Chantauvent ? Et de toute façon, pourquoi s'en faisait-il, pourquoi cela le dérangeait d'être relégué au même niveau que les autres ? Ce devait être une question d'amour propre...

Réfléchissant et se posant toutes ces questions, le jeune homme ne but que très peu à la bouteille, ne finissant même pas sa première chope. Chose particulièrement étonnante pour lui ! Toujours est-il qu'il fut tiré de ses pensées par le retour d'Estelle, par son sourire, mais aussi et surtout par le tissu humide qu'elle lui jeta au visage. ''Je ne bave point, mademoiselle. J'attendais simplement votre retour avec la plus grande des impatiences !'' Puis récupérant le tissu qui trainait sur sa tête, il déposa ce dernier sur son épaule, offrant un sourire à la tenancière, bien que celui-ci soit un peu plus petit qu'à l'accoutumée. '' Une chambre rien que pour moi ?'' Demanda-t-il, feignant d'être estomaqué. Puis continuant avec un faux embarras et en baissant les yeux'' vous savez, je n'ai jamais eu une chambre pour moi tout seul. Entre la vie à la ferme et dans la caserne, j'ai toujours partagé alors...'' Relevant son regard et son sourire il vrilla ses yeux bleus dans ceux de sa partenaire : '' Alors je n'ai vraiment aucun problème pour que nous partagions une chambre !''

Lorsqu'une réponse -ou non- fut faite par la rouquine, Merrick Lorren répondit à son invitation à partager un potage. '' Bien évidemment, je vais rester à vos côtés, si cela ne vous dérange pas. Mais, je ne mangerais pas de votre potage, même si je ne doute pas qu'il est excellent ! Vous avez déjà été assez bonne avec moi... Mais allez-y et ne vous inquiétez pas; je me retiendrais de baver devant votre beauté. Ainsi, votre potage restera au sec !'' Sur ce, elle était partie en direction des cuisines pour se servir. Puis, elle était revenue pour s'installer à côté du milicien. Il avait répondit joyeusement à son sourire par un autre. Et enfin, il avait écouté ce qu'elle disait, l'habitude qu'elle avait d'apporter de la nourriture -les restants- aux plus démunis des bas-quartiers.

-''Je vous accompagnerais avec plaisir dans cette petite promenade nocturne. Après tout, les plus belles histoires d'amour ne commencent-elles pas sous l'astre lunaire et les étoiles ?'' Dit-il en riant franchement, et puis plus sérieusement : '' Et puis, même gratuitement je vous aurais accompagné, mademoiselle de Chantauvent. Vous êtes quelqu'un de très... Charitable. Marbrume gagne à vous avoir derrière ses remparts, il n'y a aucun doute là-dessus" termina-t-il en grimaçant quelque peu, se sentant et sachant bien loin de la bonté d'âme et de cœur qui faisait d'Estelle celle qu'elle était.

S'adossant à la chaise, et fixant la jeune femme à ses côtés, le milicien vit que le sourire de la rouquine fanait. Ainsi, en vint-il à la conclusion qu'il n'avait pas rêvé quelques instants plus tôt, alors qu'il la rejoignait en chavirant. Quelque chose se tramait en dessous de son sourire. Cette marque de joie n'était-elle qu'un masque ? Dur à dire... Indécis, ne sachant où amener la conversation, s'il suffisait de badiner comme avant, le milicien resta quelque temps silencieux, laissant Estelle manger à son rythme. Dans un sens, il voulait retrouver l'amusement qui l'habitait lui lorsqu'ils échangeaient. Mais en était-il de même pour elle ? Valait-il mieux essayer de gagner un peu en ''sérieux'' ? Même si cela pouvait être la meilleure idée, Merrick Lorren savait qu'il n'était pas l'homme nécessaire pour cela... Estelle méritait de s'ouvrir à un prêtre quelconque, apte à l'écouter et l'encourager, s'il y avait réellement un mal-être qui l'habitait, non ? Alors, que devait-il donc faire, lui ? Que pouvait faire Merrick Lorren, l'ivrogne, l'inconnu, le couard et le faible pour Estelle de Chantauvent ?

Et la réponse vint naturellement dans son esprit; un entre-deux de sérieux et d'humour, d'encouragement et d'amusement.

Se relevant, passant derrière le dos de la tenancière, Merrick tenta maladroitement de déposer une main sur l'épaule de la rouquine, comme elle l'avait fait pour lui précédemment. Bien que le geste semblait emprunter et inhabituel pour sa personne, il était hautement perceptible que celui-ci n'était aucunement porteur d'intention lubrique. Ce n'était qu'un encouragement silencieux pour quelque chose de sombre qu'il ne comprenait pas et qu'il pensait avoir perçu chez Estelle. '' Nous partirons lorsque vous le désirerez. Prenez votre temps, réellement...'' Dit-il d'une voix douce, clame et bien sérieuse pour lui.

Puis, quittant son angle mort pour passer devant elle, Merrick Lorren passa derrière le comptoir. Cherchant des yeux une chope, il la prit dans la main et se mit à l'astiquer -bien qu'elle l'aille, déjà été- avec le tissu humide qui trainait encore sur son épaule. Baissant les yeux au sol, respirant et expirant, le milicien releva ses prunelles vers Estelle, prêt à jouer son nouveau rôle, le sourire aux lèvres. Or, cette fois-ci, cette expression de bonheur sur son faciès se voulait chaleureuse, plutôt que ''charmeuse''. ''Bienvenue à la Chope de Lorren, mademoiselle ! J'espère que vous trouvez notre potage convenable...?'' Demanda-t-il en jouant le rôle du tenancier et en essayant de faire endosser à Estelle le rôle de la cliente.

Déposant sa première chope astiquée, Merrick en prit une deuxième et enchaîna son manège. ''Vous semblez avoir eu une dure journée...'' Dit-il dans un sourire désolé pour la ''cliente''. Récupérant la bouteille de bière qui traînait sur le comptoir il lui servit une chope : ''Tenez, c'est offert par la maison.'' Dit-il dans un clin d'œil. ''Vous semblez en avoir besoin...'' enchaîna-t-il un peu plus sérieusement, un faible sourire sur les lèvres et évitant son regard. ''Si vous...'' Commença-t-il, avant de s'interrompre, en voyant du mouvement dans le fond de la pièce.

En effet, la dernière personne de la salle se leva, prête à regagner les étages où se situait la chambre qu'elle avait louée. Le voyant, Merrick passa de l'autre côté de ''son'' comptoir pour aller à sa rencontre. Le milicien l'avait reconnue, elle la femme qui avait jeté son dévolu sur un homme de la pièce quelques heures plus tôt. Il semblerait qu'elle finirait la nuit seule cette fois-ci... ''Bonne nuit, mademoiselle. Avez-vous besoin de quelque chose avant d'aller vous perdre dans les bras du sommeil ?'' Dit-il aussi poliment que Merrick Lorren pouvait l'être.

Interloquée, indécise, éberluée, la femme en question coula un regard interrogateur à la réelle tenancière. En effet, cette dernière ne semblait ne pas savoir que la chope sucrée était devenue la ''chope de Lorren'' pour un temps. ''Heu, oui j'ai tout ce qu'il me faut... Merci ?'' Satisfait de la réponse, le ''tavernier'' lui offrit un salut de la tête et regagna sa ''place'' derrière le comptoir. En partant, la cliente ne put s'empêcher de couler un énième regard à l'étrange duo et à Estelle.

-''Pardonnez-moi ! '' Dit-il à la rouquine pour s'excuser d'être parti. '' c’est la première fois que vous êtes cliente de cette auberge ?'' Lui demanda-t-il bien sérieusement. ''C'est un endroit hautement agréable, je peux vous le dire. Le service ici y est avenant et souriant, plus que nulle part ailleurs. J'aimerais tellement que vous puissiez y goûter en temps normal...'' Commença-t-il en évitant soigneusement son regard, et gardant un sourire de façade. Puis continuant, il se risqua enfin sur-le-champ de bataille : ''...Si vous voulez, je peux vous écouter parler de vos tracas...ou de votre journée !'' Dit-il bien maladroitement. ''Je ne suis pas un très bon conseiller, mais je peux être une oreille attentive pour tout et rien.''

Ne sachant si elle voudrait- ou si elle en avait réellement besoin-, Merrick Lorren préféra finir par une note un peu plus humoristique : ''Et puis vous savez, je peux écoutez tout et rien. Il y en a même certaines qui viennent ici en essayant de me charmer, vous imaginer ?!''

Merrick Lorren termina cela sur un sourire, prêt à partir pour les bas quartiers lorsqu'elle le voudrait. Si elle préférait couper court à la discussion le tenancier redeviendrait le milicien, déposant son chiffon et prenant son manteau, perdant son sourire chaleureux au profit de son sourire en coin. Au final, le choix appartenait à Estelle de Chantauvent.
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Estelle LorrenAubergiste
Estelle Lorren



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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptyMer 30 Jan 2019 - 15:54


Les deux jeunes gens se trouvaient autour du comptoir, presque l’un face à l’autre, la tenancière s’appliquait à terminer les dernières priorités de la soirée, à savoir : astiquer les dernières chopes, ranger, passer un petit coup de tissu autour d’elle. Non pas sans ce servir sa petite faiblesse, son petit verre de vin rouge un peu sucré que normalement elle préfère chaud, mais que par flemmardise, elle boire froid ce soir. Celle à la chevelure de feu ne pouvait s’empêcher de détailler son interlocuteur, écoutant attentivement, souriant parfois, se retenant de rajouter des provocations qui pourraient finir par être mal perçues. La dame de Chantauvent ne semblait pas se lasser de ce petit jeu, elle ne pouvait pas prétendre être surprise par un dialogue aussi dirigé, avait-elle l’habitude de recevoir des propositions, néanmoins fallait-il bien avouer que ce client-ci était quelque peu tenace et particulièrement distrayant. Ses lèvres avaient fini par laisser échapper un petit rire alors qu’il prétendait que son petit geste dans sa chevelure n’était d’autres qu’un signe d’attirance.

- « Vous devez avoir de sacrée douleur dans le bras alors, parce qu’au vu du nombre de charmantes jeunes femmes peuplant la ville… je n’ose imaginer le nombre de fois que vous devez faire ce geste » souffla-t-elle un brin piqueuse, sans se vouloir offense « Laissez-moi vous révéler un petit secret voulez-vous… Ce n’est pas avec les yeux rouges que vous allez être sous votre meilleur jour, votre visage doit être beaucoup plus charmant sans le déguisement que vous infligez pour oublier je ne sais quoi. »

Estelle lui avait offert ce sourire sincère, presque maternant, elle était un peu comme ça avec ses clients, protectrice. Elle-même portant en permanence ce masque de tenancière ne pouvait-elle que comprendre mieux que quiconque ce besoin de se cacher derrière autre chose, que de dévoiler notre véritable personnalité. Cependant, elle n’avait pas voulu se faire offensante, ni même désagréable, ne laissa-t-elle pas le silence s’installer suffisamment longtemps pour lui permettre de se sentir offusqué. La bouteille avait fini par se retrouver sur le comptoir, l’amour de sa vie, comme elle l’avait nommé avait été lâchement abandonné entre les mains d’un adversaire redoutable. Pour autant, la jeune femme avait dû se résoudre à abandonner la plaisante conversation pour terminer son service.

- « Attention à ne pas vous tromper de cible, je doute que votre vision vous permettre de juger juste et bien » se moqua-t-elle une nouvelle fois en s’éloignant définitivement de son client.

Le jeu des faux semblants s’était remis en place, alors qu’elle servait, riait, débarrassait les derniers retardataires. Si la fatigue commençait à imprégner lentement le corps de la rouquine, elle n’en laissait rien paraître, son esprit était quelque parasité par les paroles de Merrick, qui lui rappelait bien maladroite feu son mari. Était-il ainsi lui aussi, charmeur, drôle, quelque peu mauvais garçon, était-ce certainement ça qui avait fini par la séduire le côté tête de mule qui perdure. Cela l’avait rendu nostalgique d’un passé qui commençait à devenir bien trop lointain et d’une réalité que son frère n’avait de cesse de lui rappeler : elle allait devoir se remarier. C’est l’esprit un peu confus que la tenancière avait fini par revenir auprès de Merrick, retrouvant rapidement un large sourire et son entrain habituel. Néanmoins son visage se retrouvait marqué par la journée et aucune comédie ne pourrait faire disparaître cette fatigue. Essuyant les dernières chopes, elle avait fini par jeter le torchon humide vers son client qui lui semblait un peu ailleurs. C’est presque naturellement qu’il était revenu à la charge vis-à-vis de la chambre, proposant de cette manière presque enjôleuse le partage pour le bien de tous évidemment. Encore une fois, la rousse s’était mise à rire, se répétant qu’il n’abandonnait jamais.

- « Allons, allons, vous savez bien ce qu’on dit, les plaisirs les plus intenses sont ceux que l’on ne partage pas. N’oserais-je pas vous priver de ce si charmant couchage solitaire »

La conversation fut ensuite détournée habilement par la proposition du potage et si Estelle n’avait rien dit vis-à-vis du refus, ne ramenant qu’une seule et unique écuelle, elle n’en fut pas moins un peu déçue. Depuis combien de temps mangeait-elle seule ? Depuis combien de temps n’avait-elle pas eu le plaisir de savourer le moment d’un repas à deux ? Là encore, la rousse s’était appliquée à ne rien laisser paraître, se contentant de jouer à ce petit jeu dangereux mis en place depuis l’arrivée de Merrick. La suite fut faite de compliment et la mort charitable sembla la déranger quelque peu. Ce n’était pas réellement ça, du moins le faisait-elle officiellement pour les bonnes raisons, sous officiellement pour des raisons un peu moins bonnes. Ce genre d’acte entraînait toujours des conséquences et si le petit peuple pouvait manger gratuitement, son établissement n’en gagnait qu’en réputation, c’était surtout ça, qui avait provoqué ce choix au départ, ce petit murmure qui s’intensifie et qui dit que la chope sucrée est tenue par une main de maître, que la tenancière est agréable douce et gentille, oui, c’est ce murmure qui amène toujours un peu plus de clients et qui lui permettait de vivre convenablement, tout en faisant vivre son employée et parfois aider financièrement son frère.

- « Vous êtes bien trop aimable ou aveuglé par votre breuvage messire le milicien, car ici je ne vois ni acte charitable, ni une quelconque merveilleuse soirée… Il fait froid dehors et n’allait pas me dire que celui-ci permet les rapprochements pour se réchauffer je vous vois déjà venir… » plaisanta-t-elle en avalant une énième gorgée.

Ce fut ensuite le silence, comme si la tempête venait de se faner pour retrouver un peu de calme, ce n’était pas désagréable, tout du moins, pas si désagréable, pouvait-elle en profiter pour reposer un peu son esprit, pour reposer ses oreilles qui n’avaient eu de cesse de bourdonner, pour se préparer mentalement à affronter la fraîcheur de l’extérieur pour y distribuer les potages, pour y distribuer des sourires et pour se montrer sous son soir le plus charitable. Lui aussi avait fini par rester calme, c’était presque étrange, comme si les deux prenaient le temps de s’observer réellement, sans jeu, sans tentation, juste deux regards qui s’analysent mutuellement. Merrick avait fini par se déplacer, murmurant qu’on pourrait se mettre en route lorsque je le désirerais. Sur le coup, je ne lui avais pas répondu, hormis un sourire pincé. Estelle avait attrapé son verre de vin avant d’en boire une gorgée, détaillant curieusement le comportement de son interlocuteur du soir. Encore une fois, la rouquine s’était mise à rire, c’était bien la première fois qu’on lui faisait le coup de prendre sa place.

- « Mh, je ne sais pas trop, je le trouve un peu fade, vous devriez renvoyer votre cuisinier, il n’est pas terrible. » souffla-t-elle un brin moqueuse « D’ailleurs, je trouve aussi que la rapidité du service est plutôt lent, et puis votre petite serveuse là, vous devriez en prendre une plus jolie, quand même c’est le minimum »

C’était le genre de remarque qu’elle avait entendu plus d’une fois, quand ce n’était pas sur le physique c’était sur le fait de faire travailler des femmes, d’être soit même une femme, d’avoir de l’argent sans mari, oui, tout le monde avait toujours quelques choses à dire, un petit avis sur la question. Là il s’était mis à l’imiter, faire la conversation, lui offrir une chope de bière sans faire réellement attention au verre de vin qu’elle avait encore entre les doigts, de ce fait la rousse avait repoussé l’ensemble dans un sourire, il aurait au moins une raison de trinquer avec elle.

- « Une journée épuisante en effet, vous devriez peut-être… » sa phrase c’était suspendu.

Ses lèvres s’étaient étirées dans un sourire en détaillant la jeune femme qui montait à l’étage se reposer, un brin déstabilisé. La véritable gérante n’avait pas pu s’empêcher de lui souhaiter une bonne nuit et c’est certainement rassuré que la cliente avait rejoint sa chambre, visiblement épuisée. Puis la tournure de la situation avait encore évolué, la conversation se dirigeant plus vers l’intime et moins sur le jeu… La tenancière avait légèrement froncé les sourcils avant de reprendre la parole, se redressant et déposer un doigt sur les lèvres du faux tenancier.

- « Pschhhht, vous savez ce qui fait un bon gérant ? Celui qui parvient à ne pas dépasser certaines limites de l’intime…. MAIS, je suis très curieuse que vous me révéliez les astuces pour arriver à vous charmer, il doit bien avoir des méthodes plus efficaces que d’autres, n’est-ce pas ? Vous me raconterez tout ça cher tenancier, on a deux grosses marmites à déplacer. »

La tenancière s’était éclipsée pour se relever pour retourner dans sa cuisine transvider les marmites pour qu’il n’en reste plus que deux. Elle avait lâché deux grosses louches dedans avant d’en porter une à bout de bras pour la confier à Merrick.

- « Allons-y, j’arrive ! »

Avait de prendre l’autre petite marmite, Estelle avait enfilé un gros manteau et là elle avait récupéré la sienne pour la porter et sortir avec Merrick. Une fois dehors, elle verrouilla la porte avant de prendre la petite route. La fraîcheur piqua presque immédiatement la peau, mordant le bout des doigts, et s’infiltrant sous les vêtements. La rousse avait frissonné avant d’avancer un peu plus rapidement, elle était silencieuse et connaissait sur le bout des doigts les petits raccourcis de la ville. Après plusieurs petites ruelles, le duo avait fini par arriver là où déjà le peuple s’était regroupé, visiblement habitué à la démarche. Était-ce sans doute un peu pour ça aussi qu’elle ne voulait pas reporter, malgré sa fatigue, malgré sa solitude.

- « Vous savez Merrick, vous pouvez dire ce que vous voulez, mais ce n’est pas tout le monde qui aurait accepté de m’accompagner, se retrouver face à la misère, la souffrance… Ce n’est jamais quelque chose d’anodin ou d’évident, il faut un certain courage pour affronter tout ça plutôt que ne pas préférer enfoncer sa tête dans le sable pour ne rien voir. »

Pour la première fois, Estelle avait semblé véritable sincère, pour elle il fallait avoir une certaine forme de courage pour agir de la sorte, sans quoi, il n’aurait pas été capable d’agir et de venir ainsi. À peine le duo était arrivé que déjà la foule se bousculait devant eux, chacun apportant une petite écuelle, un morceau de quelques choses de creux pour obtenir le potage froid. À chacun Estelle offrait un sourire, à chacun elle remplissait un maximum de potage, mais il n’y en aurait pas pour tout le monde c’était évident, faudrait-il sur la fin avoir le courage de partir en laissant encore des personnes avec le ventre vide. Merrick devait faire la même chose, mais sa présence nouvelle intriguait ceux qui n’avait pas grand-chose, une vieille dame déposa sa main sur la sienne au moment de récupérer le récipient rempli :

- « Merci mon bon monsieur, vous êtes bien bon, prenez bien soin de votre dame… Vous savez, beaucoup la prenne pour une sorcière à cause de ses cheveux, moi je crois qu’elle ne peut être qu’une divinité pour venir nous aider ainsi chaque soir au lieu de dormir dans son lit. »


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Merrick Lorren



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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptyMer 30 Jan 2019 - 20:53
-''Mon bras se porte à merveille, sachant que je ne fais que très peu ce geste de manière générale. Et puis, vous parlez d'une tonne de charmantes jeunes femmes peuplant la ville ? Peu m'importe alors que je n'ai d’yeux que pour une seule et unique rouquine... Je crois qu'on appelle cela le coup de foudre, non ?''

Relevant la main au-dessus de son front, prêt à se passer à nouveau la main dans la chevelure pour donner corps à son radotage, Merrick Lorren suspendit soudainement son geste. Ses doigts restèrent figés entre ciel et terre, interdits et soudain paralysés par les mots d'Estelle de Chantauvent. Oh, les dires qu'elle avait dit n'étaient guère méchants. Après tout ce n'était que la stricte vérité; le milicien serait plus charmant s'il n'avait pas toujours cette mine fatiguée et hagarde que lui apportait l'attrait de la bouteille. Il fallait aussi se faire une évidence; malheureusement pour lui, ses yeux clairs cachaient bien mal ivresse. Toujours est-il que bien que la jeune femme avait raison, il n'était guère dans les habitudes du milicien de parler de cette ''faiblesse''. Le terrain sur lequel se dirigeait la conversation ne lui était plus très favorable. Se sentant sur des appuis instable, proche des souvenirs et des vérités qu'il ne voulait n’y ressasser ni dire, Merrick était paralysé et dos au mur. Que faire ?

Or, il ne fallait guère sous-estimer Merrick Lorren. Couard de naissance, mais beau-parleur de profession, le milicien ne se laisserait pas happé par ce questionnement qui aurait pu déboucher sur de réels aveux. Dans un combat où les armes étaient les mots, Lorren pouvait se risquer à la rixe avec quiconque et ne pas craindre de perdre. Esquive, parade et contre-attaque n'étaient jamais bien loin pour lui permettre de reprendre l'ascendant. Millimétré au quart de tour, ses armes étaient affutés et prêtes à son usage. Après tout, comment pourrait-il s'ouvrir à autrui alors que son cœur était fermé ? Impossible de découvrir l'un sans débarrer l'autre...

Pour autant, la situation ne se prêtait guère à une quelconque répartie. Cette fois-ci. ''Aaah, l'attrait, l'appât de l'ivresse...'' Commença-t-il très tranquillement, sans sourire et en réamorçant le mouvement de sa main dans ses cheveux. ''Vous savez, je ne suis pas un homme très courageux. J'avais besoin de me mettre dans cet état pour venir à votre rencontre, pour oser braver le premier contact, pour espérer être capable de me tenir là, devant vous, face a une femme aux allures de divinité.''

Sa réjouissance habituelle était revenue prendre le contrôle de ses traits faciaux, la commissure gauche de ses lèvres s'était à nouveau retroussée dans cette moue qui le caractérisait si bien. La tête haute, comme toujours, Merrick Lorren répondit à ce sourire chaleureux et quelque peu protecteur qu'Estelle lui offrit. Comment ? Oh, son air se voulait séducteur et son sourire envoûtant. Était-ce une réussite ou un échec ? Difficile à dire, il n'était point le juge de cela. Pour autant, le jeune homme n'aurait pas parié sur lui-même. S'il avait fait partie du jury, il aurait même avoué qu'il ne croyait guère en la réussite de ses avances. Cet aveu inconscient lui faisait-il lâcher le morceau ? Aucunement. Les causes perdues étaient peut-être les combats les plus affriolants et aguichants à gagner. Et puis, cette lutte méritait le déploiement de ses forces, l'usure de ses efforts.

-''Ne vous inquiétez pas, ma cible est déjà toute trouvée et elle le sait. Aucun risque d'erreur, non ?''

Ainsi la tenancière était partie, pour finalement revenir à la fin de la soirée. Bien évidemment et logiquement, Estelle semblait fatiguée après une veillée aussi animée. Un questionnement était venu étreindre l'esprit de Lorren tandis que ce dernier regardait la jeune femme affronter les différents besoin et problème de sa clientèle; faisait-elle semblant, portait-elle un masque pour tous et chacun ? Chaque chose en son temps. Pour le moment, il n'avait pas abandonné l'idée de la charmer. Et puis, elle ne lui avait pas dit d'arrêter alors... Enchaînant sur le partage d'une chambre, sachant bien évidemment le refus qui allait s'en suivre, Merrick fut tout de même amusé par la repartie et la sagacité de l'aubergiste.

-''Les plaisirs les plus intenses sont ceux qu'on ne partage pas ?'' Demanda-t-il estomaqué ''Allons, vous ne croyez pas vraiment vos paroles ! Il est toujours plus satisfaisant de le faire à deux que seul...'' Dit-il avec un franc sourire, sachant qu'il se risquait toujours plus loin. à se rythme, il lui promettrait enfant, ferme et mariage pour vaincre ! ''Privez-moi de ma liberté si cela vous chante. Je suis certain que la prison de vos bras valent une peine à perpétuité !''

Puis, vantant la bonté de la tenancière, celle-ci réfuta ses dires, dénigrant l'idée de charité ou de ''merveilleuse soirée'' qu'il avait décrite. Elle revint aussi à la charge au niveau de sa consommation d'alcool. Le sourire de Merrick ne vacilla pas d'un millimètre, restant scotché sur sa figure. Pour autant, c'est peut-être cet immobilisme qui pouvait le trahir, faire comprendre à autrui qu'il sentait que la situation lui échappait. Sa tête était donc positionnée sur le billot. Le bourreau n'avait qu'à abaisser son arme et tout serait terminé. La soirée n'était pas ''merveilleuse''. Ce devait n'être qu'une énième fastidieuse et normale nuit de travail pour la tenancière. Logique. ''Voyons, je n'aurais jamais fait une proposition aussi indécente à une femme comme vous. Pour qui me prenez-vous mademoiselle de Chantauvent ? Un coureur de jupons ? '' Enchaîna-t-il tout de même à propos de ce qu'il ne pourrait prononcer sur la fraîcheur de la nuit et un rapprochement quelconque.

Merrick laissa un silence s'installer durant quelques instants : ''Appelez cela comme vous voulez. Charité, bonté, intérêt ou profit...qu'importe. Vous donnez à manger aux nécessiteux, vous le faites après une dure journée de labeur et lorsque la nuit est a son heure la plus avancée. Pour moi, ça s'appelle de la charité''.

Puis, le silence les avait trouvés, tandis que tous deux analysaient leur partenaire de la soirée. Les fanfaronnades et le jeu avaient pris une pause, alors que des questions s'accaparaient les pensées de milicien, et alors que la tenancière semblait aux prises avec la fatigue. Que ce silence semblait inhabituel ! Était-ce à cause que leur rencontre s’était faite sous les auspices d'une conversation joueuse ? Ce premier contact agissait comme une source de rapprochement, alors que le milicien pouvait se permettre une pléthore de commentaire, mais aussi comme un frein, tandis qu'un changement vers une discussion sérieuse ferait emprunter. L'entre-deux était l'unique solution pour lui d'essayer d'aider celle qui l'avait apporté un support pour sortir de son marasme. Lorsqu'il tenta de lui déposer une main sur l'épaule, le milicien prit le sourire pincé de l'aubergiste comme la preuve que ce registre dit ''sérieux'' et ''attentionné'' n'était pas le bon. Frivolité et légèreté; oui. Gravité et sincérité; non. Le rire d'Estelle lorsqu'il devint le tenancier vint le convaincre de cette conclusion.

Ainsi la chope sucré était devenue la chope de Lorren. De fait, le comptoir s’était transformé pour être ''son'' comptoir, et tous ceux qui siégeaient là étaient ''ses'' clients. ''Renvoyez mon cuisinier ?!'' Dit-il d'une voix faussement outrée. Lui volant son couvert des mains, Merrick en profita pour goûter le plat et lui offrir un clin d'œil. ''Allons, ce potage est tout simplement fabuleux !'' enchaîna-t-il en lui redonnant son ustensile et souriant à pleine dent. Puis, ce fut le tour de la rapidité du service : '' Je ne vois pas de quoi vous parlez ! Notre service est admirable et exemplaire, rapide et intransigeant. Si vous avez un problème, nous pouvons en discuter...'' Dit-il en prenant Brigitte qui se trouvait non loin, et la déposant sur le comptoir, sans se départir de son sourire.

Puis celui-ci s'éteignit. ''Madame, si vous continuez je vais devoir vous demander de partir. Il n'y a qu'une et unique règle à la Chope de Lorren; ne jamais critiquer MA petite serveuse.'' Merrick avait mis l'accent sur le ''ma'' de sa phrase. Après tout, c'était elle qui avait décrit la ''serveuse'' comme la sienne en disant ''la votre'', non ?'' Dans tout Marbrume, je n'ai jamais trouvé une femme plus belle et plus charmante que cette dernière. Alors, vous pouvez garder vos propos outranciers pour vous !'' N'y tenant plus, l'amusement était revenu peindre ses traits. Satisfait de ses paroles, le regard pétillant de malice, Merrick était prêt à continuer, lorsqu'il vit l'autre femme de la pièce qui était sur le point de se retirer.

Il était revenu, bien évidemment, tentant vaille que vaille de comprendre, de savoir si un tracas quelconque berçait la rouquine. Forcément, il se fit couper par le doigt d'Estelle qui vint garder fermées ses lèvres. Tout d'abord, le geste l'amusa, puis lui fit comprendre la limite. ''Pardon'' dit-il tant bien que mal avec un doigt sur les lèvres. '' Je suis toujours en apprentissage de mon nouveau travail.'' Tenta-t-il de s'excuser. ''Je vous raconterais mes points faibles en échange des vôtres ! Je dois vous dire qu'à l'heure actuelle, vous semblez sans faille...''

C'est sur ces mots qu'Estelle était allé transvider les restants à l'intérieur de deux marmites pour pouvoir effectuer convenablement le transport de la nourriture. Revenant dans la pièce, celle-ci avait donné l'un deux contenant à Merrick, qui l'avait poser sur le comptoir le temps de mettre son manteau sur ses épaules. Toujours mal assuré, le jeune homme avait tout de même dégrisé quelque peu. Du moins, assez pour être capable de porter le récipient sans en renverser le contenu. Ni une ni deux, le duo se retrouva dehors, à la merci de la fraîcheur nocturne. Le milicien suivit le rythme de marche de sa partenaire. ''Brrrh... Il fait froid ce soir ! Nous pourrions peut-être nous rapprocher pour nous réchauffer...?'' Dit-il amuser, sachant qu'elle l'avait prévenu de ne pas utiliser cette ''arme''...

Se laissant guider, Merrick Lorren jetait pour autant des regards à droite et à gauche, vigilant. Était-ce sa profession de milicien qui le forçait à toujours rester en alerte, telle une habitude ? Pas forcément. Lorren voulait simplement éviter une mauvaise rencontre. Après tout, le courage n'était pas l'une de ses plus fidèles alliées, et il ne voulait guère faire la démonstration de sa dévouée couardise ! Par un étrange concours de circonstances, les mots de la jeune femme vinrent s'articuler autour de la question de courage. Celle-ci mettait en évidence qu'il fallait une certaine forme de caractère pour faire face à la misère. Le plus sérieusement du monde, le milicien haussa les épaules :

-''Du courage ? Pas forcément. Il suffit peut-être simplement d'être détaché de leur réalité ? Je ne suis pas nécessairement mauvais, Estelle, mais je ne peux dire que j'ai un grand souci de mon prochain...'' C'était très honnête de sa part. Mais à quoi bon réfuter l'évidence ? Après tout, Merrick Lorren était Merrick Lorren. Sur une autre note, pour la première fois, la dame de Chantauvent venait d'utiliser son prénom. Était-ce un bon signe pour lui ?

C'est sur ces mots qu'ils étaient arrivés à l'endroit où les nécessiteux attendaient la livraison des denrées. Tels des dévots devant un prêtre, ils se regroupèrent et s'agglutinèrent rapidement, tendant des mains implorées en direction des marmites, du duo et de la nourriture. Lorren souffla devant la tâche à accomplir. Au final, peut-être avait-elle raison. Même pour lui, ce n'était pas nécessairement facile de voir cela, de voir la misère humaine. Toujours est-il que ses émotions ne se firent point larmoyantes à souhait. Agissant comme Estelle, Merrick se positionna et se mit à servir du potage. Souriant à chacun et se méfiant de tous, les mouvements du milicien étaient savamment réfléchis, alertes. De la frayeur de la peur découlait une certaine nervosité, mais aussi une grande observation, tandis qu'il gardait tout les sens en alerte. Des sens abrutis par l'ivresse, mais tout de même !

-''Voilà, pour vous ''jeune fille'' !'' Dit-il en souriant et en offrant un clin d'œil à une vieille dame.

Celle-ci, probablement amusée par le fait que le milicien la caractérisait comme une jeune fille, était en plus de cela, émue par le don de nourriture. Déposant une main sur celle du milicien, celui-ci lui offrit un sourire encore plus grand, aucunement gauche dans ce genre de situation. ''Tout cela c'est grâce à la bonté d'âme de MA dame, tenancière de la chope sucrée.'' Dit-il un peu plus fort, appréciant le fait que la vieille prenne Estelle pour ''sa'' dame. Autant en profiter, non ? Puis, se penchant un peu plus près de la personne âgée, mais s'assurant que la rouquine qui se trouvait non loin entende, il enchaîna : '' Elle n'est aucunement une sorcière. Par contre, je suis d'accord avec vous; elle est comme une déesse à mes yeux aussi. D'un simple regard, elle emprisonna mon cœur à jamais !'' Puis retrouvant un ton qui se voulait plus naturel et moins conspirateur il poursuivit: ''Mais pour ce qui est du manque de sommeil, ne vous inquiétez guère pour nous. Vous savez, nous ne dormons pas beaucoup, la jeunesse a bien besoin de se dépenser lorsque la nuit est tombée... si vous voyez où je veux en venir !''

Le rouge monta au visage ridé de la femme. Répondant au franc sourire du milicien par un visage quelque peu hésitant, celle-ci le remercia une dernière fois rapidement d'un simple mouvement de tête, avant de prendre la fuite. Peut-être que dorénavant, à ses yeux, Merrick Lorren n'était plus ''bien bon'' ? Du moins devait-il dorénavant aussi être caractérisé comme lubrique... C'est ainsi que le service continua, enchaînant badinage, gentille parole et sourire bienveillant avec les nécessiteux. Rien de bien particulier n'arriva, si ce n'est une brève conversation d'Estelle avec un homme, qui semblait un habitué de cette rencontre nocturne, qui lui fit tendre l'oreille.

-''Merci madame. Vous n'êtes pas v'nus avec l'autre homme, ce soir ?''

Estelle de Chantauvent lui avait pourtant bien dit un peu plus tôt qu'elle venait ici avec son frère. Pourtant, l'esprit embrumé du jeune homme avait oublié cette information, alors que cette dernière semblait bien anodine au milieu du jeu de charme qu'il tentait de déployer. Or, à ce moment, Merrick Lorren se mit à douter. Bien qu'il s’était assuré qu'aucun autre homme n'avait un avantage sur lui avec la tenancière durant la soirée, il n'avait pas réfléchi au fait que la rouquine pouvait avoir quelqu'un. Elle était peut-être aussi une ''dame'' plutôt qu'une ''demoiselle'' ! C'est embrigadé dans ce nouveau questionnement, que le service s'acheva, tandis que les marmites étaient vides. Merrick prit la parole le premier, préférant se mettre sur le devant de la scène plutôt que laisser cette tâche à Estelle.

-''Malheureusement, il n'y en a plus pour cette nuit, nous sommes navrés !'' Des grognements de déception s'intensifièrent dans la masse qui n'avait pas eu sa pitance. Levant les mains en signe d'apaisement, le milicien enchaîna : '' Nous reviendrons demain. Désolé pour ceux qui vont devoir se coucher le ventre vide, mais ne perdez pas espoir !'' Dévisageant tour à tour tout le monde, il survola des regards déçus, quelques visages amers, et un ou deux faciès en colère. C'était de ceux-ci que le milicien craignait une réaction agressive.

Pour autant, il avait imaginé le pire alors que rien ne pouvait arriver. Après tout, la masse satisfaite s'assurerait que rien de fâcheux n'arrive, pour être certain que la rouquine repasse le lendemain. Au besoin, ceux-ci se dresseraient au final comme les défenseurs du duo. Comprenant cela, Lorren ne fut plus inquiété le moins du monde. Laissant le temps à Estelle d'être prête à partir, ils finirent par reprendre la direction de la chope sucrée.

-''Je n'aurais pas cru qu'il y aurait autant de monde.'' Commença-t-il, repensant à la quantité de gens qui attendait sur les lieux à leur arrivée. ''Est-ce toujours comme cela ?''

Attendant une réponse, il garda un silence respectueux pour l'écouter, puis une fois que son interrogation trouva une réponse -ou non-, il se permit d'enchaîner : '' Si j'ai bonne mémoire, vous m'aviez demandé les astuces pour me charmer ? Et bien, rien n'est plus simple ! Sur le plan physique, il suffit d'être belle, rousse, petite et d'avoir les yeux bleus. Au niveau du caractère, une rapidité d'esprit à toute épreuve et un savant mélange entre humour et gentillesse sont plus que suffisants ! Et pour vous...?''

Encore une fois, toute ouïe, il attendit une réponse ou un trait d'esprit d'Estelle de Chantauvent. Avait-elle eu le temps de répondre ou non ? Toujours est-il qu'alors qu'il marchait dans une ruelle, un bruit de chute d'un objet quelconque vint briser le silence des lieux. S'arrêtant et attrapant de sa main le bras de sa partenaire, Merrick Lorren se retourna : ''Qui va là ?'' Était-ce une simple brise, un animal ayant fait chuter quelque chose, ou bien quelqu'un ou quelque chose ayant des envies et désirs plus violent et sombre ? Après tout, il était tout à fait possible que la nervosité du milicien lui ait fait réagir avec excès... Si tel était le cas, la jeune femme pourrait bien se moquer de lui. Or, si la situation était réellement à risque, il faudrait agir d'une façon ou d'une autre.
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Estelle LorrenAubergiste
Estelle Lorren



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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptyJeu 31 Jan 2019 - 0:06


- « Dis donc monsieur le faux tenancier, j’avais dit pas la carte du froid. »

Elle avait formulé cette phrase d’une voix légèrement chantante, avant de secouer la tête de droit à gauche et de faire ce petit ‘mh’ significatif avant de camoufler son visage derrière sa marmite. Estelle ne savait jamais réellement quoi dire, quoi faire dans ce genre de situation et à chaque fois qu’elle prenait les petites ruelles menant au bas quartier, elle angoissait légèrement. Néanmoins, elle restait attentive à son interlocuteur, sa phrase vis-à-vis de son manque d’intérêt vers les autres lui avait fait ralentir sa marche, doucement, lentement, jusqu’à ce qu’elle le dévisage un instant. Avait-il conscience de se mentir à lui-même, ou pensait-il réellement ne pas porter le moindre intérêt à ceux qui l’entouraient ? Elle n’en avait rien dit se contentant de reprendre son rythme de marche habituel. Le duo allait de toute façon très rapidement arriver à destination. Comme souvent il y avait du monde, beaucoup trop, comme souvent il n’y aurait pas suffisamment de potage pour l’ensemble des personnes présentes, comme souvent Estelle le supporterait difficilement.

Occupée, Estelle avait fini par se concentrer essentiellement sur ceux qu’elle servait, non pas sans afficher un sourire moqueur devant le petit jeu de son interlocuteur, qu’est-ce qu’elle aurait pu lui dire ? Devant tout ce monde, pas grand-chose, aussi se contenta-t-elle de lui porter son regard plein de malice, ils en converseraient plus tard, quand la foule aurait fini par se disperser. Estelle servait calmement les écuelles, discutait de temps en temps, se trouvait attentive aux douleurs et aux faiblesses que les pauvres pouvaient exprimer. Ce fut sa marmite qui se vida la première, peut-être qu’elle allait vite, parce qu’elle voulait éviter de rester trop longtemps ou parce que finalement elle tentait réellement de faire abstraction à tout le reste.


- « Non mon frère s’occupe de son bébé et de sa femme, elles sont malades » souffla-t-elle dans une réponse « Mais ne vous inquiétez pas, rien de grave »
- « Vous aussi un jour, vous aurez une famille ma bonne dame, vous aussi. »

La rouquine avait dû vider sa cuillère un peu plus brusquement dans le récipient, ce qui avait provoqué la fuite de celui qui était venu simplement la questionner poliment. Estelle était restée un long moment sans réaction, ses pensées étaient loin très loin et la rousse ne semblait pas parvenir à camoufler la souffrance qui l’a consumé en cet instant présent. C’est la voix de Merrick qui avait fini par la faire réagir alors qu’il annonçait qu’il n’y avait plus rien, elle s’était excusée elle aussi, promettant de revenir demain sans être certaine de le faire, comme à chaque fois qu’elle partait, elle doutait. Pour l’heure le duo avait commencé à rebrousser chemin, les marmites vides entre les mains. Toujours dans ses pensées, celle à la chevelure de feu ne perçut que la fin de la phrase de son interlocuteur, ce qui lui avait permis néanmoins de comprendre le sens de l’ensemble.

- « Oui, souvent… Tout le temps même pour être honnête… La reprise du labret aide évidemment, mais beaucoup souffre encore de la faim. » fit-elle simplement « Désolée de t’avoir infligé ça, je sais bien que ce n’est pas toujours évident, mon frère devrait pouvoir être disponible demain… Première et dernière fois pour vous, petit chanceux. » poursuivit-elle en tentant de réinstaurer un brin d’humour

Comme souvent entre eux, la conversation avait évolué, sans trop s’attarder, sans trop poursuivre sur les petits sujets sensibles de l’un ou de l’autre. L’homme avait fini par lui tirer encore un petit rire, c’est qu’il devait avoir des années d’expérience dans la séduction pour ainsi toujours parvenir à retomber sur ses pattes. Joueuse, elle était rentrée dans son jeu, sans trop réfléchir, sans trop essayer de se cacher qu’elle ne faisait que l’imiter.

- « Je dirais brun, avec une longue chevelure ou mi-longue, une barbe importante, mais pas de première jeunesse, parce que je n’aime pas quand ça pique.. Une taille plus grande que la mienne, une silhouette ni trop large ni trop épaisse et un caractère joueur. Si en plus il parvient à me tenir attentive, c’est un plus. »

Elle avait fait une pause, s’arrêtant net, pour l’obliger à faire de même, Estelle avait envie d’aller plus loin, de pousser la provocation, de déterminer si c’était le genre d’homme qui n’avait qu’un don pour l’usage des mots, mais qui se retrouvait vite dominé si l’autre jouait une carte en avance.

- « Si vous voulez, on peut se glisser dans cette petite ruelle juste là, faire nos petites affaires et repartir au bout d’un temps très court parce que vous aurez tiré plus vite que votre ombre. Vous retrouverez votre chambre, moi la mienne et potentiellement si ça nous plaît on pourra remettra ça de temps en temps. Ou pas. »

Ce fut très difficile pour la rousse, vraiment très difficile pour la tenancière de ne pas éclater de rire, c’était tellement loin du genre de proposition qu’elle était en mesure de faire, tellement loin de la réalité, n’en croyait elle-même aucun mot, n’en avait elle-même pas envie. Mais rien ne valait le trouble qu’elle crut voir dans le fond de ses prunelles avant d’éclater d’un rire sincère.

- « Pardon, pardon Merrick, je ne voulais pas vous offenser. C’était bien trop… Je suis désolée !»

C’était le genre de taquinerie qu’elle faisait par le passé à son époux au tout début, lui aussi il était lourd comme ça, lui aussi il ne faisait que des bêtises et sans le vouloir Merrick lui rappelait ce doux sourire. Estelle n’eut cependant pas l’occasion de le lui dire, puisqu’un bruit étrange avait son apparition et l’homme s’était complètement stoppé. Un milicien qui paniquait, ce n’était pas courant. Aucune réponse n’était venue ponctuer sa question et seul un chat noir avait fini par descendre des toitures. La jeune femme ne c’était pour autant pas moqué, pas le moins du monde, les bas quartiers n’étaient pas des lieux particulièrement sécurisés. C’est le moment qu’elle avait choisi d’ailleurs, pour lui donner une petite information sur elle.

- « Vous me rappelez mon mari vous savez, il était un peu comme vous, mauvais garçon, technique de séduction un peu légère. Rassurez-vous cela n’a rien de malsain, c’est juste que je crois que ça me fait du bien de voir que notre royaume n’est pas uniquement peuplé de preux chevalier à la mèche parfaite, à la croyance sans doute et identique aux voisins des quartiers. » elle fit une pause le temps de faire quelques pas, le temps de prendre une respiration pour ponctuer ses paroles « C’est fatigant de voir toujours tout le monde courir après quelque chose qui n’existe pas, la perfection. C’est fatigant de toujours devoir porter un masque ou de regarder celui des autres en faisant semblant de croire ce que nos yeux nous montrent. »

Un autre bruit avait son apparition et la rouquine n’avait pas pu s’empêcher de sursauter, resserrant sa prise sur sa marmite. Le même chat que précédemment était repassé devant eux a toutes pattes, miaulant avec une force sans limites en regardant le couple, il avait l’air de courir après quelques choses, sans que la jeune femme ne parvienne à identifier quoi. Elle avait fini par se rendre compte des quelques révélations qu’elle avait faites naturellement et c’est sans vouloir se reprendre qu’elle avait ajouté avec douceur.

- « Le vôtre est particulièrement bien rodé, je dois bien l’admettre, il doit être le fruit d'années d’expériences et de mise en pratique. »

Encore une fois, ce fut un nouveau bruit particulièrement étrange et le chat ne fit aucunement son apparition. Une silhouette recourbée sortit d’une petite ruelle, s’approchant doucement du couple d’un soir, il ouvrit sa longue cape qui l’entourait pour dévoiler une multitude de petites fioles tout aussi étranges que colorées.

- « J’ai tout ce qu’il vous faut, petit remède ancien, potion diverse, même une potion d’amour et de performance monsieur, si madame vous résiste, avec ça elle ne pourra plus dire non » souffla-t-il sagement
- « Je suis là, madame est là et n’est absolument pas intéressée. »
- « j’ai aussi pour les hommes ma bonne dame, intensité garantie ! »

Estelle s’était contentée de rouler des yeux justes une seconde, une toute petite seconde avant de presser le pas. Si ce genre de sorcellerie pouvait bien intéresser Merrick, grand bien lui fasse, mais elle, elle avait une chambre à retrouver pour dormir, elle. Quelques pas plus loin, le visage de la rouquine s’horrifia, ses lèvres s’étaient entrouvertes pour laisser percevoir un petit cri, la marmite était tombée sur le sol et la rouquine semblait piétiner sur place. Un peu plus loin se trouvait le petit chat, une patte sur la queue d’un rat dont les boyaux de l’animal sortaient allégrement de son petit ventre. C’était écœurant pour la jeune femme qui ne supportait pas les rats, une véritable phobie.

- « MERRICK !! » hurla-t-elle en destination du milicien « J’ai changé d’avis, je veux bien un preux chevalier pour retirer cette horreur de ma vision, je vais vomir je crois ! »

Plaçant les mains devant ses yeux, la tenancière ne semblait pas capable de passer outre cette angoisse grandissante.

- « Je ne regarde pas, je ne peux pas brbrbrbr c’est h.o.r.r.i.b.l.e »

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Merrick Lorren



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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptyJeu 31 Jan 2019 - 4:51
Un homme. Y avait-il un homme dans sa vie ? Non pas du genre à la Merrick Lorren, ça non. Après tout, il était évident, quant au regard de sa répartie, qu'elle avait déjà côtoyé des hommes lui ressemblant. Probablement pour les éconduire et pour leur faire abandonner toute envie de la charmer. Oui, il était clair et net qu'elle avait de l'expérience contre ce genre d'engeance. Or, bien que certains énergumènes puissent se comparer à votre serviteur, Merrick Lorren était convaincu que personne n'était réellement du même acabit que lui. Fierté et narcissisme sévère, ou triste réalité ? Ce n'était pas à lui de juger. Toujours est-il, que si la compétition se résumait seulement à un ou des charmeurs de bas-étage, le milicien était sur qu'il ne pouvait pas perdre contre la compétition. Encore là, cette vision de la chose était discutable, car après tout, tout se résumait à une seule et unique chose; les désirs d'Estelle de Chantauvent. Mais là n'était pas la question. Lorren n'avait pas à se soucier d'un autre client de la Chope sucrée. Il avait bien évidemment sondé les autres ''compétiteurs'' durant la soirée. Certains semblaient intéressés. Ceux-ci étaient facilement et hautement perceptibles. Mais, aucun n'avait le bagout et l'assurance nécessaire pour ''s'attaquer'' à la tenancière. Après tout, son caractère et sa répartie étaient aussi ardents et flamboyants que sa crinière.

Non, le réel ''problème'' était la possible présence d'un individu respectable, ou même d'un mari. Et là, il avait douté pendant un instant, tandis qu'il avait oublié que la jeune femme lui avait dit qu'elle venait généralement aider les nécessiteux avec son frère. Devant le questionnement d'une armoire à glace, s'étonnant de ne pas voir ''l'autre homme''. Le milicien avait sursauté, se demandant réellement s'il n'avait pas oublié ce très léger et infime détail qui coulerait toutes ses espérances; un mariage, un prétendant. La réaction et les courtes réponses qui s'enchainèrent durant le bref échange entre Estelle et le nécessiteux le rassurèrent quelque peu. Mais surtout, un autre détail vint le tirer de ses propres questionnements; Estelle souffrait.

Ne sachant que faire ou que dire, se sentant enfermé dans l'amusement et la tournure joueuse de leur rencontre, Merrick était indécis quand à la marche à suivre. Continuant à servir les demandeurs de denrées qui se présentaient devant lui, le cœur n'y était plus. Son attention se portait plutôt sur sa partenaire, sur celle qui était si proche de lui et si loin à la fois, perdue dans ses songes et pensées. Devant cet état de fait, et préférant aussi prendre les devants de la scène pour une pléthore de raison, c'est Merrick qui annonça la fin des dons de nourriture face à la pénurie qui venait de frapper leur chaudron respectif. Estelle sembla retrouver contact avec la réalité, accordant ses dires à ceux du jeune homme, s'excusant et promettant à son tour de revenir le lendemain. C'est sur ces dernières paroles offertes à leur auditoire qu'ils s'éclipsèrent, ensemble.

Pour autant, il semblerait que la rousse n'en avait pas terminé avec ses pensées. Et pour autant, Merrick ne s'enfonça pas dans un silence respectueux et distant. Manque de tact ? Il ne le savait guère, mais que pouvait-il faire ? Ne rien dire et se distancer de celui qu'il était ? Ou tenter de lui offrir une oreille attentive et se faire rabrouer pour être allé trop loin, comme précédemment ? Dès lors, ne pouvait-il que continuer son plaidoyer en parlant et déblatérant comme avant, jouant la carte du charmeur forcené. Au moins, maitrisait-il cette science à la perfection... Ainsi, apprit-il que la masse de gens dans le besoin était toujours aussi volumineuse. Puis ce fut la première secousse de la soirée; elle le tutoya. Erreur ou volonté ? Tous les actions et agissements qui s'insinuaient entre eux apportaient plus d'interrogations que de réponse au milicien...

-''Cela ne me dérange pas que tu m'aies demandé mon aide, Estelle.'' Dit-il platoniquement, le regard vers l'avant. ''La chance de ne plus revenir ?'' Dit-il éberlué. ''Je donnerais n'importe quoi pour passer, ne serait-ce qu'une heure en votre compagnie !'' Puis un peu plus honnêtement et sérieusement : '' Si votre frère s'occupe de sa femme et d'un enfance en bas âge pour cause de maladie, cela ne me dérangerait point de revenir vous prêter un coup de main.'' Puis, quelque peu gêné de cela -étonnant, non ?-, Merrick tenta de s'expliquer : '' Vous savez, je suis un veilleur nocturne. Et puis, je risque de revenir à votre auberge pour vous voir, cela va de soi. Alors...'' Soufflant, il termina cela simplement, bien que ce ne le soit guère : '' Alors, je peux aider au besoin.''


Et puis il avait enchaîné, déclamant son appréciation d'Estelle en la présentant trait pour trait comme son idéal féminin. Pour tout vous dire, le milicien la trouvait particulièrement charmante. Son physique n'était pas sans promesse, et son faciès était des plus acceptable. La véritable particularité qui l'attirait comme un insecte auprès d'une flamme était sa crinière rousse, certes, mais enfin et surtout son caractère, sa répartie et sa façon d'agir. Mais comme elle avait déjà fait précédemment, la tenancière de la Chope sucrée lui servit la même réplique. Décrivant Merrick pour expliquer à Lorren son idéal chez un homme.

-''Saviez-vous que je connais quelqu'un collant parfaitement à votre description ? Je peux vous assurer qu'il serait sur un petit nuage d'apprendre que vous pourriez être charmé par un énergumène de son genre...'' Puis se penchant un peu sur la gauche, pour se rapprocher de son oreille il enchaîna : '' Et pour tout vous dire, sa barbe ne pique aucunement. Promis !'' Se redressant, tenant toujours son chaudron, mais passant les mains et le récipient dans son dos, le milicien continua a avancer avec le sourire aux lèvres.

Puis, ce fut l'heure de rencontrer la seconde secousse de la soirée. La première avait été à cause du tutoiement. Cette fois-ci, ce fut à cause d'une proposition charnelle dans une ruelle. Si la première secousse fut un léger tremblement, le second se présenta comme un séisme.
Et donc, c'est à ce moment que la jeune femme l'invita dans une impasse. Littéralement parlant dans une ruelle, et métaphoriquement parlant en le mettant au pied du mur. Car de par cette invitation, Merrick Lorren ne pouvait qu'être indécis, hésitant et en proie au plus grand doute. Comment agir, ou bien réagir ? Que dire ou que faire ? Tant de possibilités lui venaient à son esprit. Or, elles étaient toutes plus mauvaises les unes aux autres. Était-ce à cause de l'alcool que sa répartie légendaire ne prenait pas le pas sur sa longue réflexion, le sauvant de cet interlude qu'il n'arrivait pas à rompre ? Oui, c'était à cause de cela, se força-t-il à penser. Car après tout, un homme aussi fier que le milicien n'était aucunement prêt à avouer que pour une fois, Estelle de Chantauvent venait de lui clouer le bec. Et ça, c'était chose rare pour lui.

Non pas qu'il avait un doute sur ce qu'il voulait, loin de là. Or, il était évident que cette dernière ne croyait pas un mot de son invitation. Ainsi, si Merrick acceptait, il savait qu'Estelle refuserait. Cela aurait pour conséquence de dévoiler son jeu. Bien que ses actions ne pouvaient être mal comprises, il y avait un monde entre l'avouer et le sous-entendre. Le dire, ''accepter'' cette proposition qui essuierait un refus revenait à se condamner pour le même coup. Et puis, si Lorren refusait, il n'aurait plus aucune chance. Il suffirait à Estelle de lui dire qu'il avait manqué sa chance, qu'il était trop tard et il ne gagnerait pas. Ainsi, Merrick Lorren était dos au mur, sans esquive possible. Et pourtant, il devait réagir...

Se passant une main dans les cheveux il allait tenter quelque chose, tout valait mieux que ce silence : ''Je suis d'a...''

Le milicien fut coupé dans sa tirade par le rire sincère de la tenancière, qui n'en pouvant plus, finit par exploser et s'excuser. Sans le savoir, elle venait de tirer Lorren d'un mauvais pas, lui permettant enfin de reprendre le contrôle de lui-même et de réagir avec convenance et sous-entendu comme avant. Le danger était écarté, le jeu pouvait continuer et le résultat pouvait encore être gagné... ''Vous ne m'avez aucunement offensé par vos mots, Estelle. Je dirais que je suis plus offensé que votre proposition ne soit pas réelle...'' Commença-t-il en se passant une main dans les cheveux. '' Et puis, nous serons plus confortables dans votre lit, non ?'' Lui aussi pouvant jouer plus franc jeu, prendre le risque. ''Nous pourrons le faire dans la ruelle une prochaine fois, j'imagine !''


Un bruit fit sursauter le jeune homme, le faisant se retourner et demander si une présence humaine se trouvait par là. Or, ce ne fut que le silence qui lui répondit, suivi d'un bref ''miaou''. Signe révélateur que ce n'était aucunement un malotru, ou bien un fangeux. Après tout, ces derniers n'avaient que très peu de chance de se trouver dans la cité, non ? C'est alors que ses yeux bleus et hagards continuaient à fixer le vide obscur, qu'Estelle de Chantauvent lui offrit le troisième choc de la nuit, tandis qu'elle s'ouvrait d'elle-même. Ainsi Merrick Lorren ressemblait à un autre, à feu son mari ?

-''Je suis désolé...'' Commença-t-il d'une voix et d'un regard réellement adouci pour sa perte, avant de se reprendre après un petit moment de silence. Et puis non. Elle devait déjà avoir entendu ces excuses platoniques des millions de fois. Non, Merrick Lorren pouvait faire mieux, Estelle de Chantauvent méritait mieux que des paroles creuses. Que pouvait-il offrir ? Son humour, évidemment. '' Je suis désolé, mais j'ai pourtant la mèche de cheveux parfaite. Mais je suis d'accord avec vous, je ne suis pas un preux chevalier, moi non plus... Par ailleurs, je suis certain que j'aurais apprécié votre mari. Peut-être que lui ne m'aurait guère porté dans son cœur pour essayer de conquérir sa femme, mais je crois qu'il aurait compris mon attraction envers vous, logiquement...'' Le ton avait été amical, plutôt qu'amusé. Merrick ne cherchait point à porter une quelconque atteinte au défunt, ou bien à pousser ses chances dans cette brèche qui avait fissuré son masque. Mieux valait qu'il accepte ce qu'elle lui offrait, plutôt que chercher à en savoir plus que ce qu'elle voulait dire.

Après un court silence, Estelle de Chantauvent avait continué, dénigrant la course des gens vers quelque chose qui n'existait pas; la ''perfection''. La répartie tomba très rapidement dans l'esprit de Lorren; il pourrait dire sur le ton de la blague que lui aussi courrait après la perfection; elle. Or, cette fois-ci, il se retint, car la suite était véritablement intéressante et importante. Le reste des paroles s'adressaient aussi bien à lui qu'à elle...

-''Je...je comprends. Ces masques sont lourds à porter et durs à voir, n'est-ce pas ? Il est facile de le dire, que ceux-ci nous fatigue, lorsqu'on en porte un, non ?''


Le chat était revenu, tirant le couple du silence de la ruelle, et les vouant tous deux au sursaut de la surprise. Puis, tout naturellement, après s'être ouverte à lui quelque peu, Estelle attaqua sa propre protection qu'il hissait face aux autres. ''Le mien serait mieux rôdé que le vôtre ?'' Il était temps de jouer cartes sur table, il semblerait. ''Je m'abrutis dans l'alcool pour oublier mes échecs et ma couardise passés, alors que vous êtes capable de dresser tout simplement un sourire entre vous et la réalité. Je crois dès lors que le vôtre tient mieux en place que le mien, Estelle...''

Et à nouveau ce satané chat. Bon sang ! Était-il envoyé par feu son mari pour les couper encore et toujours ? Attendez, non, ce n'était plus le félin... Alors quoi ? Un monstre, un fangeux ou un brigand ? La nervosité reprit le dessus sur Merrick; qu'allait-il arriver ? Finalement, ce ne fut qu'une étrange et vieille silhouette promettant mont et merveille dans ses fioles. Soulagé, Merrick lui sourit gentiment, prêt à refuser, lorsqu'Estelle prit la parole, se présentant comme ''la'' madame.

Se retournant vers elle interloqué, la bouche entre-ouverte la tête penchée sur le côté Merrick Lorren répéta mot pour mot ce qu'elle avait dit, doucement, mais tout de même assez fort pour qu'elle entende : ''...elle est ''la'' madame...'' Puis un grand sourire s'élargit sur son visage, il pointa Estelle, puis lui-même et regarda enfin l'étrange personnage qui les avait rejoints : ''Elle est LA, madame. Donc MA madame ! Oui, elle l'a dit elle-même, après tout non ? Vous êtes d'accord, vous l'avez entendu vous aussi, non ?... NON ? ''


Un peu surprise, la silhouette qui était plus habituée à un oui ou un non après ses palabres hésita quelques secondes: ''Heu, oui j'ai entendu...''

-''Ah ! Je n'ai pas rêvé ! Merci, merci merci !'' Enchaîna le milicien, satisfait au plus haut point.

Sur le bord de continuer, il ne put le faire alors qu'Estelle c'était mise a crier. Inquiet, le milicien se retourna pour voir la cause de cette frayeur. Devant cet étrange, et drôle, de duo, le revendeur de camelote disparut dans la ruelle, sachant pertinemment qu'il ne vendrait rien à ces deux énergumènes. Bien qu'inquiet par ce cri, le fait que la rouquine cri son nom ne lui déplut guère. Se rapprochant d'elle avec précaution, et les sens en éveil, le milicien écouta ses dires, ne comprenant rient et ne voyant guère plus. Puis enfin, le chat et le rat furent perceptibles. Retenant un fou rire qui aurait probablement été déplacé, Merrick se plaça entre Estelle et la ''vision d'horreur''.


-''Je veux bien être votre preux chevalier, Estelle. Mais je ne le ferais pas gratuitement !''


La jeune femme cacha ses yeux derrière ses mains pour ne pas voir. Décidément, c'était une réelle phobie ! Frappant le cadavre du rat du pied pour le faire disparaître, le chat feula, mais suivit le mouvement du résultat de sa chasse. Se retournant, Lorren put aviser que la dame de Chantauvent n'avait pas bougé et que ses yeux étaient encore obstrués par ses mains... Autant en profiter non ? Se rapprochant tout doucement, Merrick Lorren se pencha au plus proche de son oreille en la frôlant et en gardant un instant le silence... Puis il murmura tranquillement : '' Le danger est écarté... Princesse.'' Il aurait pu tenter plus. Mais profiter des peurs des gens n'étaient guère de son répertoire, lui le peureux de nature. Resta-t-il tout de même plus longtemps que nécessaire à quelques millimètres de son visage...

S'éloignant -trop- doucement de celle qui était effrayée par les rats en affichant un petit sourire, Merrick alla récupérer le chaudron qu'elle avait fait choir, sans le rendre à sa propriétaire. Dès lors, il prit sur lui-même de transporter les deux. ''Nous rentrons, MA princesse Estelle ? '' Dit-il en mettant bien évidemment l'accent sur le ''ma'', et en lui offrant avec un sourire son bras, bien qu'il ne croyait aucunement qu'elle le prendrait, mais voulant jouer le rôle du ''chevalier'' et de la ''princesse''.

-'' À cause de votre cri, ''l'honnête marchand'' a disparu ! Comment pourrais-je vous charmer, maintenant que cet ''honnête'' individu est parti avec la potion d'amour que je voulais lui acheter ?'' Dit-il, faussement déçut. '' Mes chances viennent de partir en fumée...'' Déplora-t-il en secouant la tête.

Cette drôle de situation pour l'un, et effrayante pour l'autre, c'était produit, le duo n'était plus très loin de l'auberge. Ce fut à ce moment, qu'un éclair tonna dans la voûte céleste, et que des trombes d'eau s'abattirent sur les deux êtres. Pressant le pas, courant pratiquement pour échapper aux mauvais temps, Estelle et Merrick arrivèrent enfin devant l'ouverture de la Chope Sucrée. Au final, rejoindre l'intérieur de la bâtisse ne leur avait pris que quelques minutes supplémentaires. Pour autant, ils étaient trempés. Ouvrant la porte pour les deux, Merrick s'engouffra dans la pièce principale, attendant bien sagement qu'Estelle en face de même. Sans lui demander, le milicien alla directement déposer les chaudrons dans la cuisine. Revenant sur ses pas, Lorren enleva enfin son manteau alourdi par la pluie, le laissant tomber sur une chaise et s'appuyant à une table qui trônait non loin d'Estelle. Croisant les bras, le milicien sourit à la rouquine.

- '' Alors, est-il l'heure d'aller dormir, ou préférez-vous vous tenir occupé pour cette nuit ?'' Dit-il avec amusement. Puis avec un visage crispé, il enchaîna : '' Je n'aime pas vraiment dormir, avec les cauchemars... Bref. Je ne vous retiendrais pas. Mais avant, mieux vaut ne pas attraper froid !''

Se redressant et se retournant, Merrick Lorren s'approcha de la cheminée de la pièce principale. Ajoutant une ou deux bûches sur les cendres encore rougie et chaude. Il travailla quelques instants avant qu'une flambée ne vienne allumer et illuminer la pièce. Tirant deux chaises vers le feu, le jeune homme retourna la sienne, le dossier vers les flammes et les bras appuyés contre ce dernier. '' Je vous aurais bien invité à vous réchauffer d'une autre façon, mais vous m'avez répété par deux fois de ne pas jouer la carte du froid, alors je vais me retenir et attendre une geste de votre part.''

Un sourire en coin, une main dans la barbe, le milicien laissa son regard se perdre dans les flammes, hypnotisé par leur danse qui suivait un rythme qui leur était propre. La soirée semblait être sur ça finalité.

Vraiment ? Qu'en était-il réellement ?
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Estelle LorrenAubergiste
Estelle Lorren



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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptyJeu 31 Jan 2019 - 18:36


- « Me prêter un coup de main, cela ne signifie pas obtenir quoi que ce soit… Vous en avez bien conscience, milicien ? » fit-elle malicieuse « Je sais que la bouteille de ma vie vous a conquis, mais tout de même en revenant ainsi butiner chaque fois, vous risquez de vous alléger bien trop de souvent de quelques sous» l’avait-elle mis en garde avec justesse.

Estelle n’avait jamais été une profiteuse, au grand dam de feu son époux qui n’appréciait guère la voir faire preuve d’une quelconque empathie envers les clients. À peine avait-elle eu terminé sa phrase, qu’elle l’entendait déjà rouspéter mentalement, lui répétant cette phrase qu’elle connaissait sur le bout des doigts « Mon petit chat, je t’aime pour ta gentillesse, mais tu ne peux l’être qu’avec moi, le commerce ne tournera pas si tu offres et protèges tout le monde » cette pensée avait fini par lui tirer un sourire, elle lui mettrait bien sous le nez que même en offrant beaucoup, elle gagnait beaucoup et toc. Oui, la dame aurait bien apprécié pouvoir échanger avec son mari encore une fois au moins, juste une fois, mais il n’était plus là, ne le serait sans doute plus jamais. Merrick lui restait bien dans l’instant présent, bien loin de se douter des pensées nostalgiques de son interlocutrice, il n’avait pas perdu son sens de l’orientation ni son objectif et s’amusait de cette manière flatteur à souligner les qualités physiques qu’il appréciait chez une femme –n’en fut-elle pas étonné d’être le portrait identique de ce soi-disant fantasme visuel- La rouquine lui avait accordé ce regard suspicieux, joueur, provocateur, un mélange explosif pour celle qui avait bien l’intention de reprendre point par point son petit jeu.

Ainsi, la gérante s’était laissé prendre à ce petit exercice, laissant son regard vadrouiller sur la silhouette masculine qu’elle décrivait avec attention, tout y passait, la barbe, la couleur des cheveux, la corpulence. Retenu-t-elle son envie d’aller jusqu’à parler de la couleur de ses yeux, de la forme de son nez, ou des petites rougeurs dues froid et du non-entretien de sa peau. La réaction ne pouvait guère la surprendre et elle ne fut pas le moins étonnée de sa réponse. Quelqu’un qui serait sur un petit nuage de l’apprendre, donc la barbe ne piquait nullement ? Voilà bien quelque chose d’étrange. Merrick avait récupéré les deux grosses marmites et Estelle lui avait offert un sourire en guise de remerciement. Même si elle n’en avait rien dit ses petits bras étaient un peu douloureux, un peu fatigués par le froid et l’incessant bal qu’il avait dû jouer pour porter et servir toutes les chopes des clients.


- « Vraiment ? Je serais très honorée de faire sa rencontre, peut-être pourriez-vous arranger une pette entrevue un jour ? Qui sait, peut-être que les deux seraient consumés par un coup de foudre qui se consumerait tout aussi vite qu’il est arrivé. » Plaisanta-t-elle avec néanmoins un soupçon de vérité.

La gérante de la chope sucrée avait toujours été ce type de femme, croyante, loyale, plutôt influençable en fonction de ses affinités. Croyait-elle sincèrement en l’amour et notamment à ce qu’elle voulait évoquer, les coups de foudre, néanmoins avait-elle lié son âme à un désormais mort et c’est bien ce qui coinçait désormais. Jamais, elle ne pourrait l’oublier, jamais elle ne pourrait se pardonner de voir un autre à sa place. Par toutes les divinités pourquoi ne pourrait-elle pas rester veuve tout le restant de sa vie ? Bien décidée à ne pas briser ce petit amusement d’un soir –qui à ses yeux se terminerait dès que Merrick se lasserait-, elle avait fini par ralentir ses pas, d’abord pour mieux affiner ses pensées, puis ensuite jusqu’à s’arrêter pour le détailler. Là elle fit ce qu’elle n’aurait jamais cru pouvoir faire, elle fut directe, et manqua même de se mettre à rire et de briser ce mauvais humour qu’elle m’était en place. Silencieuse, son regard venant se glisser dans celui du milicien, elle avait bien constaté son trouble, son hésitation, la réflexion de la tentation. L’homme qui faisait habilement du rentre-dedans venait de se faire prendre à son propre jeu et pour Estelle cela avait quelque chose de particulièrement plaisant. La jeune femme avait fini par se mettre à rire sincèrement, ne pouvant plus retenir son amusement devant la situation, devant son baragouinage un peu confus. Il n’avait pas marché, il avait couru.

Merrick avait néanmoins rapidement retrouvé son équilibre, retrouvant son débit de parole habituelle, était-il à ce point convaincu de conserver toutes les cartes en main ? Le milicien prétendait être déçu de la non-réalité de la proposition, avant de proposer lui-même un moment d’égarement entre les draps de la couche d’Estelle. Comme bien souvent, lorsqu’elle hésitait entre dire ce qu’elle pensait, ou autre chose, la rouquine avait roulé des yeux, insistant plus que de raison sur cette petite action pour marquer parfaitement son geste.


- « Vous seriez bien déçu de la réalité après tout ce que vous venez de vous imaginer en un très court instant » ronronna-t-elle dans une douceur nouvelle. « Une prochaine fois, oui, qui sait à force de m’accompagner comme vous me l’avez si gentiment proposé, cela finira par arriver, peut-être »

Dans un an ou deux, ou quarante-cinq, seule la Trinité pouvait bien le savoir. Tout ceci l’avait néanmoins rendu définitivement nostalgique de son passé qui devenait de plus en plus éloigné, bien loin de sa réalité. Estelle en arrivait à oublier certains moments, pour ne pas souffrir, ou simplement parce que le temps faisait son œuvre, mais la tête de mule ne parvenait toujours pas à tourner une page qui avait autant compté pour elle. C’est dans cet état d’esprit qu’elle avait fini à faire son premier aveu, à faire tomber le premier mur infranchissable de sa carapace, oh, elle n’était pas rentrée dans les détails, n’avait pas évoqué un nom, un prénom, une classe sociale, juste un caractère, un simple caractère et état de fait qui lui manquait chaque jour davantage. Celle à la chevelure de feu avait eu la présence d’esprit de percevoir l’humour de Merrick venir jusqu’à elle, malheureusement, ses premiers mots lui arrachèrent une grimace de déception. Désolé. Combien de fois avait-elle entendu ça ? Au début bien trop, maintenant, c’était plus « il faut avancer » « tu dois te remarier », entre désolé et bouge ton cul, il n’y avait visiblement qu’un minuscule petit pas. Puis elle s’était mise à rire aux propos de son interlocuteur de milicienne, il n’avait pas faux. Son mari lui aurait déjà certainement collé une bonne raclé, lui aurait couru derrière avec Brigitte ou bien aurait joué plus fin en mettant les pires aliments et alcool que l’établissement possède à sa disposition. Ça aussi, cela lui manquait, même les disputes, oui même ça.

- « Si vous le souhaitez je peux vous servir notre breuvage le plus ignoble en rentrant, je suis certaine qu’il aurait commencé par ça » elle avait encore ri « Rendre malade son adversaire, c’est vraiment bas, mais très efficace. »

Se vider du haut et du bas pour faire la cour ce n’était pas franchement ce qu’il y avait de plus adapté, alors niveau efficacité, c’était le top du top comme stratégie. Néanmoins Estelle se garda bien de l’évoquer, il y avait bien des choses qu’une dame ne pouvait guère formuler. La conversation n’avait pas dérivé de son sérieux, de sa profondeur, et bien que la marche fût reprise, la tenancière avait poursuivi dans un discours honnête. Elle n’avait jamais aimé les faux semblants, elle qui en usé à outrance, qui faisait croire à tous ceux-là côtoyant qu’elle était une femme rayonnante de joie de vivre et particulièrement épanouie, ainsi osa-t-elle expliquer que cette course à la perfection, à la jeunesse avait toujours eu le don de l’épuiser. Était-ce très certainement pour ça qu’elle avait été attirée par son époux, était-ce tout aussi juste de supposer que c’était pour ça aussi que l’entente entre Merrick et elle semblait être plutôt bonne enfant. N’avait-elle pour autant pas imaginé qu’il aurait osé, là, dans cette ruelle, dans cette fraîcheur venant mordre la peau, venant frigorifier le bout des doigts, n’avait-elle pas entraperçu ce qu’il risquait. Et le ballon fut renvoyé à l’envoyeur.

Même si la rouquine en avait conscience, elle n’était pas encore prête à ce qu’on lui pointe du doigt sa principale faiblesse et protection, c’était comme tapé à grand coup de marteau dans les remparts de la ville. On ne fait pas tomber l’unique moyen de survivre si rapidement. Une nouvelle fois, les pas de la gérante avaient fini par se stopper, alors que ses deux prunelles désormais particulièrement grises avec le reflet lunaire observaient l’homme qui venait d’être sincère –pour la première fois de la soirée-. Il était difficile de prétendre qu’elle était plus douée que lui, avaient-ils deux façons différentes de suivre la réalité, l’instant présent. Il serait mentir que de dire qu’elle n’avait jamais pensé à fuir d’une autre façon, il serait bien indélicat de l’admettre également. Ses lèvres avaient fini par se pincer et lorsqu’elle avait semblé avoir eu cette envie de répondre, aucun son ne s’était échappé de ses lèvres. Le plus beau des aveux n’était-il pas le silence ? Ou n’était-ce qu’une énième façon de fuir la réalité, de l’éviter sagement et intelligemment.

Fort heureusement pour elle, la tenancière avait vu toute l’attention de Merrick s’évaporer pour se concentrer devant la silhouette encapuchonnée qui venait de se placer devant eux. Le chat n’avait donc pas été le responsable de cette nouvelle surprise, ce qu’elle aurait sans doute préféré. Ce fut une multitude de promesses miraculeuses, amour, passion, performance, soin pour les douleurs, aurait-il proposé un remède pour réveiller mes morts que cela ne l’aurait même pas surprise. Bougonne et certainement tourmentée par le restant de la conversation, la rousse avait de nouveau fait ce qu’elle savait faire le mieux : fuir. Pressant le pas, elle avait néanmoins glissé que la madame était présente et qu’elle n’avait rien besoin de tout ça, maladresse, phrase réfléchi ou simplement non consciente du double sens de ce mot, ce n’était pas simple à dire, mais Chantauvent c’était rapidement pressé d’abandonner le sorcier des bas quartiers.

L’espoir que l’ambiance retrouve un peu de sa légèreté lui avait effleuré l’esprit, mais s’envola très rapidement en éclat alors qu’une vision horrible se glissa juste sous son nez. Le chat, heureux de son festin avait fini par s’enfuir, délaissant un rat, dont la queue encore droite était entièrement nue, dont le corps semblait pencher légèrement sur le côté et dont les boyaux s’amusaient à narguer les pavés de la ruelle. Un véritable hurlement de terreur avait fini par s’échapper de ses lèvres et qui de plus adapté avait-elle pu appeler à l’aide, que Merrick le milicien. Main sur les yeux, doigts légèrement écartés quand même pour continuer à s’horrifier, jambes qui grelotte de peur et nom de froid, elle aurait pu pâmer, oui, elle aurait pu juste à cause de cette atroce phobie inexplicable tomber sur les pavés.

- « Comment ça pas gratuitement, c’est une plaisanterie ?! » s’offusqua la tête de mule en fermant complètement un œil et en cherchant de l’autre main le contact du torse de l’homme qui ne devait pas être bien loin « Ne soyez pas stupide, si cette bête ne disparaît pas de ma vision, je ne rentre pas avec vous à la chope, je ne bouge pas » grommela-t-elle comme une enfant boudeuse.

Elle ignorait si son argumentation tenait la route, mais il fut néanmoins efficace puisque sa main avait quitté le torse de l’homme pour revenir sur ses yeux. Là elle perçut sans aucun doute bon nombre de bruit qu’elle ne parvenait pas à déchiffrer avant de percevoir une proximité qui pour la première fois la mise mal à l’aise, ce n’était réellement ça non plus. Mais avoir cette voix si proche, ce physique si proche, ce souffle si… Alors qu’elle-même ne voyait absolument rien et était incapable de retirer ses mains, ce n’était pas… Enfin, elle avait fini par retrouver la vue, lançant ce regard plein de défi à Merrick. Elle n’allait tout de même pas lui dire merci pour une action somme toute simple pour un peureux. Estelle n’avait pas semblé réagir au « ma » princesse, bien que le petit regard et le petit froissement de nez imperceptible avait bien dû lui signifier qu’elle n’était pas grande fan, néanmoins, elle l’avait rapidement rattrapé de quelques pas, les mains désormais libre de son encombrante marmite.

- « Si vous voulez mon avis, c’est une très bonne chose, car en plus de perdre de l’argent, vous auriez dû dormir seul dans des draps si froid… Pouvez-vous toujours le rattraper, mais à votre place je le testerai sur une charmante jeune femme testeuse du produit, je ne voudrais pas que vous vous retrouviez le nez avec d’horrible pustule je ne sais où…. » fit elle retrouvant sa voix chantante visiblement amusée

La surprise étant visiblement maître de la soirée, s’installa de nouveau entre eux. Un éclair traversa le ciel, puis un autre, jusqu’à ce qu’une fine pluie de viennent s’abatte sur les deux silhouettes, naturellement, un couinement de surprises avait fui les lèvres de la tenancière qui tout comme Merrick avait pressé le pas pour retrouver le confort de son établissement, c’est néanmoins particulièrement trempée et les cheveux d’un roux plus intensif et les mèches ondulants qu’elle passa le seuil de sa porte. Instinctivement elle était venue détacher sa chevelure, secouant sa tignasse en passant les doigts à l’intérieur afin de retirer un maximum de goutte d’eau. Elle avait retiré son manteau, avant de se frotter les bras pour chercher à se réchauffer un tant soit peu. Comme si il était chez lui, Merrick avait ravivé le feu de la cheminée, déposé l’ensemble des marmites dans la cuisine avant de s’installer devant le feu.

- « J’ai une dernière proposition à vous faire. Faites chauffer un peu d’eau, trouvez deux tasses, remplissez le tout et rajoutez ça dedans » elle s’était déplacé pour sortir une petite boite « Ce sont des plantes, elles facilitent la nuit… Cela détend. Une fois les deux tasses en main, vous n’avez cas me rejoindre en haut.. Vous continuez tout droit en prenant la première porte juste en face vous, d’accord ? Vous avez réussi à tout retenir ? »

Estelle avait laissé trainer son regard un long moment sur la silhouette masculine, esquissant un petit sourire presque indéchiffrable. Elle avait attrapé une bougie du comptoir pour venir l’allumer sur la cheminée. Elle était encore dégoulinante et particulièrement humide, mais cela ne semblait pas la déranger, bien que quelques frissons pouvaient s’entrevoir sur ses avant-bras. Bougie allumée en main, elle avait fini par monter les marches silencieusement pour rejoindre la salle en question. Il s’agissait de la salle d’eau, ou trônait une imposante bassine et un coin pour faire chauffer de l’eau, ouvrant la fenêtre elle c’était mis à hisser les seaux d’eau du puit jusqu’à l’étage pour mettre le tout à chauffer, pour ensuite transvaser les litres et les litres d’eau désormais chaude dans l’imposante bassine. Il y avait de la place pour deux, c’était évident, cependant, elle n’avait pas dans l’idée de prendre un bain à deux, non, évidemment. Juste offrir un moyen de détente et de chaleur à celui qui semblait en avoir besoin. Naturellement, elle avait disposé des petites bougies pour éclairer la zone, une serviette propre et sèche ainsi qu’une chemise et un pantalon en lin pour la nuit. Cela serait toujours mieux et plus adapté que sa tenue toute mouillée. Estelle ignorait le temps qu’elle avait mis, comme bien souvent, néanmoins les bruits de pas lui indiquaient que l’homme était en chemin, ouvrant la porte, elle s’était écartée pour le laisser voir la petite mise en scène, qui n’avait pas pour but d’être romantique, simplement pratique.

- « Vous pouvez prendre un bain si vous voulez… L’eau est chaude… C’est ce que je fais pour apaiser mes nuits, le bain, l’infusion, vous m’en direz des nouvelles, d’accord ? » elle avait effleuré sa main pour récupérer la tasse qui lui était destiné « Merci, je vous laisse profiter de tout ça, si besoin je suis juste à côté dans ma chambre, sinon vous allez pouvoir je l’espère passer la plus belle nuit de votre vie, sans exagération évidemment » souffla-t-elle dans un murmure.

Afin de respecter le sommeil de la cliente, Estelle parlait doucement, offrait un grand sourire à son interlocuteur, ses yeux trahissant néanmoins sa fatigue. Alors qu’elle allait se détourner pour retrouver le confort de sa chambre et le plaisir de se débarrasser de sa tenue humide, elle déposa sa main sur son avant-bras.

- « Merrick… Merci pour cette soirée… Et si je ne reste pas, c’est évidemment pour ne pas succomber à la tentation de ce corps de chevalier » plaisanta-t-elle davantage avant de disparaitre potentiellement dans sa chambre.

Dans sa chambre, la rouquine n’avait pas perdu de temps pour dénouer son corset, retirer sa chemise, et ses nombreux jupons pour enfiler une petite robe de nuit. Sa chevelure rousse fut brossée à de nombreuses reprises avant de se retrouver de nouveau attaché, la rouquine restait néanmoins attentive aux bruits de son environnement, elle devait toujours rester à la disposition de ses clients. Après plusieurs minutes, elle avait fini par se glisser dans les draps de son lit. La soirée avait été étrange, vraiment étrange.

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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptyVen 1 Fév 2019 - 7:25
Depuis leur départ du lieux où ils avaient servit le potage, Merrick Lorren et Estelle de Chantauvent avait continué à échangé comme avant, c'est-à-dire à en alternant entre sous-entendus grivois et répartie savamment maitrisé. Or, depuis quelques temps, des confidences venaient aussi parsemer le lent fil de leur discutions. Un bien pour un mal ? Possiblement. Toujours est-il que le milicien en apprenait un peu plus sur la tenancière, et que la tenancière en apprenait un peu plus sur le milicien. Ainsi, il prit connaissance que son maris était mort et qu'il lui ressemblait un peu. Il comprit qu'elle l'aimait encore et qu'elle souffrait toujours. Il sous-entendit qu'elle portait un masque et elle répondit à cette affirmation par un silence... Ainsi, c'est autour de ces révélations qu'une question germa dans l'esprit de Merrick; était-ce simplement lui, ou depuis que le duo c'était aventuré à la rescousse des nécessiteux, quelques choses avaient changé entre eux ? Non pas qu'il pensait que ses chances de ''vaincre'' s'amélioraient drastiquement, ou qu'Estelle de Chantauvent se pâmait ''enfin'' devant son charme...non. Le milicien avait simplement l'impression que la conversation s'écoulait plus facilement. Était-ce la réalité ou son imagination qui lui jouait des tours ? Dur à dire, mais facile à imaginer. Toujours est-il que pour le moment, l'important était ailleurs... Mais où ? Et bien, cette réponse était bien simple; dans la phobie, dans la peur atteignant des sommets chez la jeune femme. Car cette frayeur, se muant en vocifération, fit fuir toute trace de questionnement dans l'esprit de Merrick Lorren.

Le dos tourné, tandis qu'il faisait face à l'étrange silhouette qui lui promettait mont et merveille, Merrick ne put qu'entendre, sans comprendre la cause, la frayeur de celle qu'il accompagnait. Se retournant, le milicien avisa la rouquine, sans pour autant voir ou définir le litige de cet émois. C'est en se rapprochant qu'il avait découvert la source de tout cela, le cadavre de rat qui causait les plus grands tourments à la dame de Chantauvent. Hésitant entre amusement et compréhension, entre en profiter et la ''sauver'', Lorren se décida pour un entre-deux. Éloigner l'ignoble, que dis-je; l'infâme bête de la ''princesse'' et réclamer son dû. Oh, le ''preux chevalier'' n'était pas sot. Commençant à comprendre quelque peu l'effrayée, il savait que quémander une faveur ne serait point suffisant. Ainsi, de lui-même, le héros partis à la conquête de son dû. Comment ? Et bien, en se penchant vers son oreille et lui murmurant bien humblement que le danger était écarté, la frôlant plus proche que nécessaire...

Évidemment, Merrick avait aussi goûté le contact de ses doigts sur son torse. Souriant toujours plus alors qu'elle s'exprimait, tandis qu'elle le menaçait de ne pas rentrer chez elle avec lui. Il n'avait put se résoudre à la laisser face à sa phobie plus longtemps. Après tout, la comprenait-il simplement trop bien pour sa réaction face à la peur. ''Allons, Princesse. Je ne rentrerais pas sans vous et je ne vous laisserais jamais derrière.'' La réaction qu'elle lui offrit, ce petit froncement de nez et ce regard chargé de négation voulait tout dire; cette dernière ne goutait que très peu son nouveau surnom. Remarquant cela, Lorren ne put qu'apprécier encore plus l'idée de la nommé ainsi un peu plus longtemps. Et puis, qui dit princesse dit chevalier. Merrick endossait se rôle à merveille, l'ayant ''sauvé'' bien galamment. Après tout, il aimait bien aussi l'idée de se faire passer pour un héros.

-'' Pour vous plaire, pour vous conquérir, j'étais pourtant prêt à débourser mon maigre salaire et risquer les pustules...'' Dit-il en haussant les épaules. '' Il semblerait que nous ne pourrons jamais savoir si votre amour pour moi aurait put naitre de l'une de ses breloques. Je vais devoir continuer à simplement user de mon charme !''

C'est sur ces paroles, sur cet échange que le ciel c'était illuminé. Des éclairs annonciateur d'orage étaient arrivés et du même coup, la voute céleste c'était assombrit. La pluie se mit de la partie en faisant son appariation et en se faisant ressentir quelques instants plus tard, tandis que l'eaux s'affranchissaient des nuages pour venir s'écraser sur Marbrume. Accélérant le pas, ils arrivèrent en vu de la Chope Sucrée. Rentrant mouillé mais enfin à l'abris du déluge, le jeune homme prit ses aises bien -trop?- naturellement. Allant déposer les chaudrons, puis enlevant son manteau, ce dernier partis allumer un feu et rapprocher deux chaises de ce dernier. Bien évidemment, il avait invité la propriétaire des lieux à se réchauffer, mais celle-ci avait plutôt préférer proposer autre chose, sans que le milicien ne comprenne réellement ce qu'il en était.

-''Êtes-vous entrain de me proposer de vous rejoindre dans votre chambre, histoire de se réchauffer en se rapprochant l'un de l'autre ?'' Demanda-t-il, joueur, bien qu'il doutait que cela soit réellement le cas. Puis, haussant les épaules il acquiesça: ''Vos désirs sont des ordres, princesse ! ''

Sur ces mots, Estelle avait laissé traîné un sourire indéchiffrable, avant de partir vers l'étage. Cette façon de réagir éveilla le doute dans l'esprit de Merrick. Se pouvait-il que... non. Bien vite il se ressaisit. Il ne devait pas sous-estimer la jeune femme. Il était certain qu'elle laissait planer le doute pour le faire marcher. Comme lorsqu'elle lui avait proposer d'épancher ses désirs charnels dans la ruelle. Tout de même, Merrick Lorren ne ferait pas deux fois la même erreur ! Du moins, pas aussi rapidement... Bien que cette interrogation, puis prise de conscience, l'avait laissé en pleine réflexion sur place, l'ivrogne avait aussi remarqué que la dame de Chantauvent ne c'était guère épongé ou quelque peu rapprocher des flammes. Il espérait que ses volontés, qui lui étaient encore inconnu, incorporaient un détail pour lui éviter un rhume. En haussant les épaules pour lui-même, sachant qu'il ne trouverait point le but de la rouquine ici en bas, il s'activa.

Passant derrière le comptoir, Merrick Lorren sélectionna deux tasseshistoire de préparer l'infusion. C'est alors qu'il l'a vit; la bouteille de bière, ''l'amour de sa vie'' qu'il avait eu la chance de goûter, de déguster. Tenté par le breuvage, indécis quand à la marche à suivre, le milicien regarda à droite et à gauche, bien qu'il se savait seul. La récupérant et la débouchant, il la porta à ses lèvres avec avidité avant de suspendre son geste une seconde avant de le commettre. Non, pas ce soir. Redéposant le poison à sa place, il finit de prendre les tasses, s'assurant aussi d'avoir le nécessaire pour faire chauffer l'eau sur le feu. Peut-être avait-il fuit la tentation se trouvant derrière le comptoir un peu trop rapidement. Mais au moins, il n'avait pas succombé, non ? Retournant devant les flammes, il incorpora les plantes de la tenancière au liquide une fois que celui-ci atteignit la température adéquate. C'est-à-dire ni trop chaud, ni trop froid. Après tout, Merrick n'appréciait guère l'idée de devoir attendre avant de boire...

Montant tranquillement l'escalier, concentré à ne rien renversé, le porteur releva la tête au moment ou la porte vers laquelle il se dirigeait s'ouvrit. La rouquine fit irruption sur le pallier, avant de s'effacer pour lui permettre de voir la mise en place qu'elle avait faite. Cette dernière avait préparer un bain, apportant serviette et vêtement sec, et illuminant l'endroit de bougie pour qu'il soit possible de voir quelque chose. Sur le point de faire une énième proposition indécente, il se fit couper par la tenancière.

-'' Merci beaucoup, vraiment.'' Dit-il bien sérieusement. Il ne niait pas, ni ne cherchait à cacher que le geste le touchait. Oh, rien de bien larmoyant, mais qui n'aimerait pas cette petite attention ? Évidemment, il doutait que l'infusion et le bain soit suffisant pour qu'il puisse dormir d'un sommeil particulièrement réparateur. Pour autant, le geste était empreint de gentillesse, et cela était amplement suffisant à ses yeux. Comme pour appuyer cette action, les doigts d'Estelle était venu frôler ceux de Lorren pour récupérer la tasse qu'il lui destinait. Il ne bougea pas le moins du monde pour lui tendre et lui faciliter la tâche, préférant la laisser faire l'action de la prendre. '' Votre chambre est juste à côté, hein ?'' Murmura-t-il en se callant sur la tonalité de voix de la rouquine. ''Je risque probablement d'avoir besoin de vous pour me savonner le dos... Ne préférez-vous pas rester pour profiter d'un bain, vous aussi ? Il me semble assez grand pour deux...''

Oh, il s'attendait à la suite. Merrick savait bien que celle-ci n'accepterait pas, en toute logique. La tirade suivante en fut la preuve, tandis qu'elle était sur le bord de s'en aller, sur le point de le quitter. Le milicien c'était bien évidemment attendue à la répartie joueuse dont elle avait fait usage pour expliquer son départ. Pour autant, il n'avait pas prévu ses remercîments, qui semblait sincères, ni la main qu'elle déposa sur son bras. ''Tout le plaisir fut pour moi, Estelle. Vraiment.'' Honnête et réaliste. Il était rare que même ''vaincu'', le milicien apprécie la ''bataille''. Or, cette fois-ci tel était le cas. Et bien qu'il soit aussi rare qu'il se livre à un siège de longue haleine, Merrick Lorren était prêt pour une longue guerre de conquête. Que voulez-vous, ayant autant été charmé par ''l'affrontement'', il ne pouvait qu'imaginer la saveur et la concupiscence qu'apporterait le ''triomphe'' dans le futur... Car oui, il ne doutait aucunement de sa victoire. Jamais.

-''Vous succomberez une prochaine fois.'' Bien simple comme répartie me direz-vous ? Oui, en effet. Or, peut-être que la simplicité valait mieux que n'importe lequel des discours en ce moment ? Quand bien même ce fut la réflexion que ce fit le jeune homme, il ne put la laisser s'esquiver sans en rajouter une couche. Attrapant sa main qui traînait sur son avant-bras, ce dernier lui fit un baise main, suivit d'une révérence flagorneuse. ''Bonne nuit, MA princesse.'' Et ce fut dans un dernier sourire, qu'il la vit disparaître.

-''Qu'elle belle soirée...!''


---


Refermant la porte, Merrick Lorren ne prit guère de temps pour se dévêtir et pour se laisser tremper dans l'eau chaude qui lui fit le plus grand bien après la froideur nocturne et suites aux vêtements humides. Se laissant aller à rêvasser, tenant d'une main sa tasse, le temps s'égrena sans qu'il n'en aille conscience, confortablement installé et profitant de l'installation dans toute sa mesure. Par ailleurs, Lorren devait tout de même le reconnaître; ils n'avait aucune envies de s'endormir et de risquer de renouer avec ses souvenirs qui prenaient la forme de cauchemars la nuit... Après tout, il était moins abrutis par l'alcool que généralement, alors ses douleurs nocturnes risquaient d'être un peu plus vivace que généralement. Pour autant, le regrettait-il ? Pas le moins du monde. Au lieu de se concentrer sur cela, il préféra simplement se relaxer. Bien que le sommeil ne le tentait guère, le milicien ne pouvait plus résister à son appel qui était des plus insistants. La journée avait été rude, la soirée avait été enivrante, puis aguichante. Dès lors, il était peut-être l'heure pour lui aussi de tirer sa révérence, qu'importe les résultats de cette décision.

Soupirant mais s'extirpant tout de même du bassin, Merrick déposa ses vêtements humides sur une chaise de la pièce, laissant ceux-ci sécher là, sachant qu'il ne dérangerait personne jusqu'à demain matin. Récupérant les vêtements sec qu'Estelle lui avait amené, cela lui fit penser à un détail; cette dernière portait encore ses robes humides lorsqu'elle l'avait quitté. Fronçant les sourcils, il réalisa qu'elle venait de lui faire une fleur en lui offrant la chance de faire trempette, sans pour autant pouvoir en profiter elle-même. Enroulant la serviette autour de sa taille, soufflant toutes les bougies sauf une et déposant le linge sec sur son épaule, le milicien sortit de la pièce. Se dirigeant vers la chambre d'Estelle de Chantauvent, il cogna doucement, autant par peur de la réveiller elle que de réveiller la cliente.

-''..Si jamais vous voulez profiter de l'eau chaude vous aussi, j'ai laissé une chandelle allumé.'' Murmura-t-il doucement. ''Et puis, n'hésitez pas à cause de moi... J'ai après tout cru remarqué qu'il y avait un verrou après la porte...''

Avait-elle entendu ? Dormait-elle ou avait-elle répondu ? La porte c'était telle ouverte ou était-elle resté close ? Toujours est-il que Merrick Lorren avait délivré son message, et qu'il était parti vers sa chambre, sans plus de cérémonie. Parfois, même lui devait savoir lâcher le morceau et tirer sa révérence.

Pour un temps.


---


Lendemain matin,

La nuit n'avait pas été de tout repos, alors que les cauchemars ne l'avaient pas épargné. Dormant peu et dormant mal, Merrick Lorren c'était levé bien avant l'aube, récupérant son linge -sec- de la veille, avant de descendre dans la salle principale. Là, rien n'avait bougé et aussi étonnant que cela puisse paraître, il était le premier debout. Le teint pâle et maladif probablement plus qu'hier-, ses yeux avait tout de même retrouvé un certain éclat, une certaine sagacité. Pour autant, les cernes qui trônaient en-dessous de ceux si c'était quelques peu renforcée. Pour le reste, rien n'avait réellement bougé. Ses cheveux avait déjà connus maint fois le passage de sa main depuis qu'il était descendu au rez-de-chaussée. Se hissant sur une chaise, Merrick déposa son front sur le comptoir, encadrant son visage de ses coudes et posant ses mains à l'arrière de sa tête. Bougonnant, il ferma les yeux. Bien qu'il aille moins bu qu'habituellement, il avait tout de même le droit à la gueule de bois. Génial...

C'est dans cette position avachit qu'il entendit du bruit proche de lui. Laissant sa tête rouler sur la gauche, offrant dès lors sa joue au contact du bar plutôt que son front, Merrick Lorren ouvrit un œil pour voir qui venait de le rejoindre. ''...'matin, 'Stelle...'' Grommela-t-il, affichant quand même le sourire en coin qu'il présentait tout le temps. Ainsi, c'était la propriétaire des lieux qui venaient le retrouver aux aurores. Probablement qu'ayant l'habitude de devoir gérer son établissement des petits heures du matins au petites heures de la nuit, celle-ci ne dormait guère non plus...Redéposant son front sur le bois, refermant l'œil qui c'était ouvert, Merrick fit un geste évasif de la main en direction de la jeune femme.

-''Faite comme si je n'était pas là pendant encore quelques secondes...''


Profitant de cet interlude pour se faire une raison sur son mal de crâne, l'ivrogne - qui regrettait de l'être à ce moment- se redressa d'un coup, passant ses deux mains dans sa crinière et prenant une profonde respiration. ''Bonjour à vous, Estelle !'' Se reprit-il avec amusement. ''Je suis bien heureux de vous voir ce matin. Pour tout vous dire, j'avais peur d'avoir rêvé votre existence... Si tel avait été le cas, j'aurais eu le cœur brisé... Heureusement, vous êtes bien là !''

Qu'elle était la différence entre un Merrick Lorren sous l'emprise de l'alcool et un Merrick Lorren ne l'étant pas ? Très mince. Abrutis par les spiritueux, le milicien perdait en équilibre et en motricité comme tout soudard de ce nom. Or, il gagnait une amélioration de son baratin qui était généralement conséquente. Pour autant, son caractère joueur et charmeur n'était en aucun cas un don -ou une malédiction?- qu'il devait à la bouteille. La preuve en était ce matin. Appuyant sa tête dans la paume de sa main, il la regarda avec un regard appréciateur :

- '' Bien heureux de voir que je n'étais pas trop impacté par l'alcool. J'avais un peu peur de me retrouver face à une femme bien différente que celle qui a habité mes songes toutes la nuit... Par chance, vous me semblez encore plus sublime qu'hier !''


Qu'elle lui offre une réponse, un roulements des yeux ou bien une petite secousse de la tête, Estelle de Chantauvent avait finit par s'éclipser pour un temps, allant vaquer à quelques occupations la maintenant ailleurs. Suite à sa disparition, le jeune homme avait retrouvé sa position prostré et ses globes oculaires c'étaient à nouveau fermés. C'est ainsi qu'il entendit la porte d'entrée de la Chope Sucrée s'ouvrir. Ne voyant guère le besoin de se redresser pour un inconnu, il ne fit qu'ouvrir une paupière pour apercevoir le nouvel arrivant. Se dernier, bien habillé et propre de sa personne, se dirigea vers le bar -et donc vers votre serviteur- le sourire au lèvre. Les yeux bleus et paraissant honnête, trop au goût de Merrick, l'homme en question vint prendre place à côté de lui.

-''Dur soirée, monsieur ?'' Demanda-t-il poliment.

Se redressant à nouveau, le milicien vrilla son regard sur l'honnête homme qui avait prit la parole : '' Une dur soirée et une longue nuit bien chargé...''

Sur le point de lui répondre, intrigué, le nouvel arrivant fut interrompu, retournant son visage en direction d'Estelle de Chantauvent qui venait de revenir : '' Ah, Estelle ! Bien le bonjour à toi. En t'attendant, j'ai fait la rencontre de....? '' Finit-il en ramenant ses yeux bleus vers le milicien, et en tendant sa main.

-'' Merrick Lorren''.

Fronçant les sourcils devant la familiarité de l'énergumène envers la propriétaire des lieux -un habitué peut-être?- l'ivrogne n'avait répondu à ce dernier qu'en offrant son nom, sans demander le sien et en ne tendant aucunement sa main pour serrer la poigne de celui qui s'attendait à des présentations en bonne et du forme. La différence entre les deux hommes étaient saisissantes; l'un en forme et bien réveillé, et l'autre au prise avec sa gueule de bois. Et cette disparité avait le don de tomber, sans de raison apparente, sur les nerfs de Merrick Lorren.
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Estelle LorrenAubergiste
Estelle Lorren



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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptySam 2 Fév 2019 - 1:56


Debout dans la salle d’eau, Estelle détaillait l’homme qui lui faisait face. Ce n’était pas le regard amoureux ni séducteur, simplement un œil attentif qui cherche à passer outre les apparences. Qui cherche à mémoriser les premières rides, la forme d’un visage, l’expression des yeux, la manière dont la chevelure se répartissait, dont il remettait en place ses mèches humides et parfois indomptables. Merrick avait passé une bonne partie de la soirée à amuser la galerie et par galerie fallait-il comprendre Estelle de Chantauvent. Là encore, le milicien ne semblait pas déroger à sa fameuse règle de séduction et s’il l’avait remercié dans un premier temps, il n’avait pas tardé à reprendre son habitude, jouant sur l’emplacement de la chambre de la tenancière. Un instant, ses lèvres s’étaient étirées en un fin sourire, un instant elle avait roulé des yeux en laissant un petit rire amusé. Même si elle ne le connaissait pas suffisamment, elle avait fini par avoir la certitude qu’il ne changerait jamais à ce niveau. Un léger frisson avait remonté le long de son bras, puis de son dos, remontant sagement jusqu’à l’arrière de sa nuque. Passant ses mains sur ses avant-bras afin de frotter un peu, la rouquine s’était contentée de secouer doucement la tête, négativement, dans un nouveau petit roulement d’œil et dans ce petit pincement de nez significatif.

- « Je ne vais pas vous priver de votre uniquement entraînement sportif de la soirée » murmura-t-elle « Bon courage, pour frotter votre dos. » Conclut-elle définitivement.

Les deux jeunes gens avaient continué à échanger quelque peu, jusqu’à ce que l’évidence s’inscrive lentement dans les esprits. Estelle avait froid, lui allait prendre son bain, la fin de la soirée arrivait définitivement, sans possibilité de la repousser un peu. Dans un nouveau sourire, elle avait fini par se détourner, non pas sans le retenir une dernière fois pour le remercier. C’était sincère, cela faisait bien longtemps qu’elle n’avait pas passé un peu de temps avec quelqu’un, bien longtemps qu’elle n’avait pas ruminé toute une histoire la disparition de son époux. Ne pouvait-elle que lui être redevable. Refermant finalement la porte de la salle d’eau, elle avait murmuré un « peut-être la prochaine fois » qu’il ne percevrait certainement pas, pour autant, il lui avait semblé important de clôturer le jeu, par le jeu.

Dans sa chambre, à peine avait-elle fermé la porte qu’elle avait abandonné le moindre tissu humide collant à sa peau. Le corset fut défait, la chemise et les jupons retirés. Elle avait soigneusement refermé ses volets, passé un tissu sec dans sa chevelure avant de se glisser dans ses draps tout aussi froids que le reste de sa chambre. Si elle n’était pas malade demain, serait-elle très certainement chanceuse. Allongée, elle n’avait pas osé souffler directement sur la petite bougie de sa table de nuit, attentive, elle écoutait les bruits d’eau qu’elle percevait à travers le mur en commun de la salle d’eau. Ce n’était qu’une question de sécurité évidemment et non une quelconque curiosité un peu trop poussée, du moins, c’est ce qu’elle n’avait de cesse de se répéter. Heureusement ou malheureusement le sommeil avait fini par l’emporter, les yeux lourds avaient fini par se fermer et ce fut un murmure qu’elle crut même avoir rêvé qui l’avait sorti de ce presque sommeil. S’enroulant dans son drap, elle avait ouvert la porte, du moins entrouvert, pour détailler la silhouette masculine qui rentrait dans sa propre chambre. La chevelure encore humide, elle n’avait pas tardé à sortir pour retrouver la salle d’eau, il n’avait pas tort un peu bain, ne pourrait pas être une si mauvaise chose. Poussant la porte, elle l’avait rapidement refermé derrière elle pour laisser choir son drap sur le sol. Estelle avait encore froid et ne pouvait s’empêcher de grelotter.

Lentement, elle avait laissé glisser une jambe dans l’imposante bassine, puis la seconde avant de se glisser définitivement dans l’eau, tout en laissant échapper un petit soupir de bien-être. Elle aurait pu s’endormir là, réellement, d’ailleurs avait-elle dû le faire puisqu’à son réveil l’odeur était entièrement froide et la peau de ses mains particulières fripées. Après être sorti, elle avait pris évidemment le temps de vider l’ensemble de l’eau, de passer un coup dans la salle, de souffler la bougie, d’étendre convenable les vêtements et d’enfin s’enrouler dans une serviette, ramasser son drap avant de retrouver sa couche. La dernière flamme fut éteinte et le sommeil l’avait rapidement emporté sans demander son reste.

Le matin, avant les premiers rayons du soleil

La nuit fut courte, plus que d’habitude et c’est avec le même type de réveil désagréable que la tenancière avait fini par ouvrir les yeux. Le front perlant de sueur, les yeux humides et rougis par les larmes qu’elle avait déversés durant son sommeil. C’était devenu une routine, un élément inévitable. Comme à chaque fois, son premier réflexe était d’allumer sa bougie pour réduire l’obscurité encore présente, d’ouvrir les volets en bois, pour détailler l’extérieur de la ville encore parfaitement endormie, profitant de ce geste pour prendre une bonne bouffé d’air frai. Lasse, elle avait fini par se placer devant son miroir, pour détailler l’étendue des dégâts et quels dégâts. Ses yeux étaient légèrement bouffis et son réflexe de frotter n’arrangea rien, des poches bleutés étaient parfaitement visibles sous ses yeux tout comme les marques des perles salées qui avaient dévalé ses joues. Sa chevelure rousse était davantage frisée du fait qu’elle c’était couché les cheveux humides, ce qui n’arrangeait en rien à son aspect général, d’après elle tout du moins. Elle avait attrapé sa brosse, faisant la grave erreur d’essayer de dompter cette catastrophe couleur de feu, ce fut un échec lamentable et après dix bonnes minutes de déceptions elle abandonna lâchement, remontant le tout en une queue de cheval haute, qui devait paraître très volumineuse. La Chantauvent avait ensuite réalisé un maquillage léger qui n’avait que pour unique objectif de réduire son teint fatigué en aggravant la couleur pâle de son visage.

Ceci fait, elle avait fini par enfiler une petite robe verte, non pas sans glisser un corset et une chemise en dessous, s’appliquant à ficeler l’ensemble de manière à pouvoir respirer encore un peu. Ses petites chaussures furent tout aussi simplement enfilées et la porte ouverte avant de laisser entendre le bruit de ses petits pas sur le plancher qui s’était mis à grincer. Une légère luminosité à l’étage inférieur la fit grimacé, heureusement qu’elle n’était pas descendue en robe de nuit comme à son habitude. En bas, elle avait détaillé la carrure avachie de Merrick sur le comptoir, sans dire un mot, affichant un petit sourire lorsqu’il la salua sans se retourner. Le réveil semblait difficile, en effet. Le petit geste de la main évasif lui avait fait roulé des yeux et allait juste lâché un petit « mh,mh » lorsqu’il lui avait demandé de faire comme si il n’était pas là. Peu habituée à partager ce petit moment de calme, elle n’avait pas semblé s’en offusquer, loin de là. Débutant par relancer doucement le feu dans la cheminée, puis par passé un coup sur les multiples tables, elle avait fini par déverrouiller la porte principale avant d’aviser celui qui venait de briser le silence.


- « Peut-être êtes-vous encore en train de rêver ? » répondit-elle naturellement en astiquant la poignée de la porte « Bon matin, Merrick. » Poursuivit-elle avant de retourner derrière son comptoir.

La rouquine avait repris son engouement d’apparence, un sourire, un dynamisme important visiblement dès le matin. Face à lui, séparer uniquement par le comptoir en bois en le détaillant, avisant longuement cette mine fatiguée, ce teint plutôt pâle et l’expression du fond de ses yeux. L’homme avait réinstauré le jeu et pour la première fois, la tenancière sembla hésitante, pour autant, elle ne put que recommencer presque naturellement.

- « Ou alors est-ce seulement les restants de l’alcool qui vous permette encore de voir ce qui n’existe pas ? Je pencherais plutôt pour cette option à votre place. » Murmura-t-elle « Vous manquez d’originalité ce matin, j’ai l’impression d’entendre les mêmes choses qu’hier soir » provoqua-t-elle gentiment avant de disparaître dans sa cuisine.

Chaque matin, le même rituel ce mettait en place, faire chauffer de l’eau pour réaliser des infusions, réaliser une pâte pour faire du pain et le proposer ensuite à ses clients. Tout fut rapidement mis en place, y compris le rinçage des deux marmites de la veille. La rousse avait même poussé jusqu’à sortir un petit plat, de quoi préparer l’infusion pour sa cliente de l’étage, ainsi que deux autres tasses pour Merrick et elle-même, rien de tel pour se réveiller en douceur. Passant le plateau en main, elle avait abandonné la tasse devant le jeune homme avant de disparaître à l’étage, là, elle avait fait ce qu’elle faisait toujours : toquer, déposer le plateau sur le sol, entrer dans la chambre désormais vide de Merrick pour défaire les draps, ouvrir la fenêtre en grand avant de redescendre les bras chargés.

- « Bonjour Lissandre » fit Estelle en détaillant l’habitué « Comme d’habitude je suppose ? » questionna-t-elle
- « Attend, laisse-moi t’aider » il s’était approché pour récupérer les draps « J’irais laver le tout ne t’inquiète pas. Oui comme d’habitude s’il te plaît. »
- « Merci, je vais te préparer ça, tu n’as cas discuter avec Merrick, c’est un homme plein de ressources et de discussion intéressante. »

Le regard gris/bleu de la gérante s’était déposé sur l’homme en question avec une légère insistance, elle avait retenu d’un bref geste une main qui s’était voulue baladeuse devant une moue contrariée de l’habitué. Lissandre avait été déposé les draps dans un coin, déçu que sa technique de la gentillesse ne fonctionne pas comme il l’aurait souhaité. Las, il avait regardé la jeune femme disparaître dans sa cuisine, ou plutôt fuir dans sa cuisine. Là il avait tiré une chaise à côté de Merrick, pour s’installer lourdement dessus avant de lâcher un soupir particulièrement expressif.

- « Vous êtes un nouveau venu des lieux ? Je suis un fidèle depuis l’ouverture, je ne vous avais jamais vu et votre soirée avez l’air en effet… difficile. L’alcool, des femmes ? Vous avez l’air d’avoir… durement profité. » Tenta-t-il de faire la conversation en regardant d’un mauvais œil l’aspect général du milicien.

Estelle avait fini par revenir avec deux nouvelles tasses, la sienne et celle de la commande qu’elle déposa sans attendre devant Lissandre.

- « Merci ma belle. »
- « Estelle Lissandre, Estelle. Dois-je te rappeler la règle première de la chope sucrée ? »
- « Pas de tentative de drague sur la tenancière, je sais. » maugréa-t-il vexé.
- « Merrick est milicien, il m’a aidé hier soir pour la distribution dans les bas quartiers. »
- « Il n’a pas l’air d’avoir fait que ça, vu sa tête » continua-t-il de grommeler sous le regard sévère de la rousse.

Pour une fois, l’homme ne resta guère longtemps. Chose plutôt rare, habituellement il lui tenait la jambe durant plusieurs heures, mais pas cette fois. Était-ce dû aux réponses de Merrick, ou simplement au fait qu’il n’était pas seul comme généralement avec la tenancière ? Avait-il néanmoins rapidement filé en laissant quelques sous sur le comptoir, embarquant les draps et en ronchonnant un bonne journée à destination du client et de la gérante. Le regard d’Estelle dut paraître légèrement surpris par le comportement de l’habitué, sans qu’elle n’en dise rien. La jeune femme avait simplement roulé des yeux, avant de rajouter discrètement une plante dans la tasse de Merrick.

- « Ça devrait vous aider pour le mal de tête… Votre nuit n’était pas très agréable n’est-ce pas ? Je suis désolée de l’apprendre, j’avais bon espoir que le bain et l’infusion suffiraient. » elle s’était mordu la lèvre avant de poursuivre plus joyeusement « Qu’est-ce que le vil séducteur que vous êtes va réaliser comme action aujourd’hui ? Hormis vous acoquiner avec vos multiples conquêtes évidemment ? »


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MessageSujet: Re: [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]:   [Terminé] Une rencontre houblonnée [Estelle De Chantauvent]: EmptySam 2 Fév 2019 - 8:38
Pour Merrick Lorren, la nuit avait été sombre et difficile. Les souvenirs avaient harcelé les fortifications de son esprit, assiégeant son sommeil et le vouant aux tourments de la peur. Retranché derrière des murailles perforées et affaiblies par le temps, le milicien n'avait pus empêché le passé de se frayer un passage à l'intérieur, tandis que les murs qui semblait inébranlables et inexpugnables dans le jour, s'effritaient pour n'être que ruine la nuit. Dès lors, conquis par l'opposant, il n'avait plus été possible de contre-attaquer, de ne pas ressasser ce qui le tourmentait. Oh, le défenseur avait tout tenté, multipliant les stratégies pour ne pas être vaincu, pour repousser la conquête. Or, l'alcool et l'ivresse, ou l'infusion et le bain n'y avaient rien fait. Comme d'habitude, les remords étaient trop nombreux et trop coriaces pour qu'il puisse résister, débordant les retranchements de son esprit par leur nombre. Ainsi, ceux-ci profitèrent de l'accès de faiblesse qu'apportait le sommeil pour s'immiscer chez le défenseur, le vouant au supplice de leur triomphe.

C'est en proie à l'ivresse des vainqueurs que Lorren subit la tristesse du vaincu. Sa couardise au moment charnière de son existence, l'échec d'une vie et le regard désabusé de son père à l'heure de sa mort, fut les principaux fléaux qui s'exprimèrent. Parfois, le damné revoyait sa jeune sœur mourir sous les attaques des fangeux, ou bien sa mère qui se noyait dans une marre de sang. D'autres nuits, il ne voyait que sa course, sa fuite en abandonnant à leur triste sort sa famille tout entière. Merrick n'avait jamais été bon pour eux, pourtant le milicien donnerait tout pour revivre cet instant, pour prendre la bonne décision cette fois-ci. Tout de même, il avait peur que cette opportunité lui soit offerte. Peur d'à nouveau récidiver sa fuite, terrifié de ne pas être encore capable de se dresser entre la mort et ses proches. Cet effroi venait aussi le miner ailleurs, dans d'autres situations, tandis que le jeune homme se croyait incapable de surmonter sa couardise.

Mais enfin, l'opposant finit par être repoussé. Oh, cela ne fut pas grâce à la résistance du milicien que les souvenirs douloureux furent enfin refoulés au loin. Dans cette ''victoire'', dans cette reconquête de son esprit, il n'y eut rien de glorieux ou d'héroïque de sa part. La seule chose que Merrick avait peut-être réussit à forcer, ce fut le réveil. Et avec ce retour dans la réalité, le mal de crâne qui lui vrilla l'esprit, à cause de l'ivresse du soir, suffit à repousser au loin la douleur et éviter tout ressassement de sa nuit. Car après tout, pour le protéger et l'empêcher de penser, l'alcool et l'ivrognerie étaient peut-être aussi puissants le soir même que le matin suivant...

---


Les yeux ouverts sur le plafond de sa chambre, Merrick Lorren ne bougea pas d'un poil. Écoutant d'une oreille attentive les bruits provenant de la rue, mais aussi de la Chope Sucrée, il en fut convaincu; encore une fois, il s’était réveillé avant l'aurore. Soupirant, sachant pertinemment qu'il avait besoin de dormir, sans pour autant pouvoir se le permettre, le jeune homme s'assit dans son lit, puis s'habilla et descendit enfin dans la salle principale de l'auberge. S'installant derrière le comptoir, il s'écroula sur ladite surface en s'enfermant entre ses bras, tentant de protéger sa tête des maux qui l'assommaient. Tentative bien vaine, évidemment, sachant que la douleur n'avait rien de physique.

Puis le milicien l'entendit plus qu'il la vit, celle avec qui il avait partagé la soirée. Lui demandant encore quelque temps pour se ressaisir, Merrick resta dans sa position prostré. Pour toute réponse, il n'eut droit qu'à quelques onomatopées qui pouvaient bien tout signifier. Et pour tout vous dire, à l'heure actuelle, c'était le cadet des soucis du milicien... Mais au final, étant celui qu'il était, Lorren c'était ressaisi et redressé au bout de quelque temps. Détaillant Estelle de Chantauvent qui venait de faire son apparition, il prit soin de la regarder et de dresser un portrait de cette dernière. Habillée de soie verte, la tenancière était maquillée légèrement et coiffée ''difficilement''. Avec une chevelure aussi frisée, ne le comprenait-il que trop bien... Or, ce qui retint son attention furent beaucoup plus les traces de fatigues qui étaient bien difficiles à cacher. Toujours est-il que la saluant convenablement, lui souriant comme avant, et se permettant une petite ''attaque de charme'', le jeune homme relança les hostilités. Après tout, il n'était jamais trop tôt pour tenter une conquête...

-''Je peux vous affirmer que je ne rêve pas, sachant que vous êtes la raison de mon réveil aux aurores !''


Puis, elle l'avait salué, regagnant l'arrière de son comptoir et se positionnant face à lui. Enchaînant d'une énième répartie, le milicien cru voir, l'espace d'un instant, le doute s'immiscer dans le regard d'Estelle. Rêve ou réalité ? Signe d'un problème ou d'un avantage ? Difficile à dire, impossible à déchiffrer avec si peu d'information... Puis, celle-ci l'avait attaqué sur le manque de nouveauté de ses tentatives. Par la Sainte-Trinité, Estelle de Chantauvent était une adversaire coriace...

-''Parlez des relents d'alcool si vous le voulez, mais moi je parlerais plutôt des élans amoureux de mon cœur ! Après tout, je sens que nous sommes faits l'un pour l'autre.'' Commença-t-il en prenant le ton d'un prédicateur. '' Et puis, si vous remettez en doute le fait que je vous trouve belle, vous n'avez qu'à regarder dans mes yeux pour voir que je ne suis pas un menteur. J'ai plusieurs défauts, mais celui-là ne figure pas sur la liste, madame de Chantauvent !'' Bon, il fallait dire que parfois il y était inscrit en lettre de noblesse. Or cette fois-ci, il n'avait pas besoin d'en faire l'usage, croyant réellement ce qu'il disait sur les charmes de la rouquine.

C'est sur ces paroles -ou sur une réponse- que la femme à la chevelure rousse était partie s'assurer que tout serait prêt lorsque les premiers clients pointeraient le bout de leur nez. Avant de disparaître à l'étage, Estelle lui avait laissé une tasse de l'infusion de la veille. Reconnaissant, le jeune homme avait soupiré d'aise, la remerciant d'un grand sourire, avant de s'en saisir. De nouveau seul, Merrick se concentra sur son mal de crâne, avant d'être dérangé par l'arrivée d'un étranger. Ce dernier, aux petits oignons de sa personne, n'inspirait guère confiance au milicien. Oh, il ne semblait pas être un mauvais bougre. Seulement, un ''chasseur'' était à même d'en détecter un autre. Ainsi, il était évident que celui qui se faisait appeler Lissandre tentait de courtiser Estelle de Chantauvent. Il allait vite comprendre que cette ''position'' n’était occupée par nul autre que Merrick Lorren...

Tout d'abord, si la stratégie du milicien ne manquait pas d'allant, et ne s'embarrassait pas d'une quelconque finesse, il serait mal avisé de comparer les deux énergumènes qui s'attaquaient à la même personne. Le premier, faisant l'usage d'un langage délié et enthousiaste, ne lésinant aucunement sur les sous-entendus et les réparties en tout genre, sans pour autant rentrer dans ce qu'il appelait l'espace physique de la tenancière. Le second, au contraire, tentait de créer une promiscuité physique qui n'allait aucunement avec la relation le liant à la rouquine. Du moins, aux yeux de Merrick. En parlant de ses yeux, ceux-ci n'avaient aucunement manqué la tentative de Lissandre avec les draps...

Humblement, Merrick sourit à Estelle qui disparaissait dans la cuisine, après qu'elle aille parlé de ses ''nombreuses'' ressources et de sa discutions ''intéressante''. Bien qu'il ne le démontrait guère, il ne pouvait s'empêcher de se demander de quelles ressources elle parlait... Appuyant sa tête dans sa main, perdant ses yeux vers l'ouverture dans laquelle la jeune femme était partie, Lorren poussa un soupir qu'il caractériserait comme amoureux et rêveur. Attentif au dire du nouvel arrivant, il fit plutôt semblant d'avoir l'esprit ailleurs, forçant ce dernier à répéter.

-''Oh, oui c'était ma première visite à la Chope Sucrée, mais probablement pas la dernière...'' Termina-t-il dans un soupir du même acabit que précédemment. '' La nuit fut fan-ta-sti-que ! ''

Lissandre faillit s'étrangler devant les dires du milicien : ''Que voulez-vous dire par là, voyons ? Vous avez...avec'' Dit-il en pointant des yeux et de la tête le lieu où se situait Estelle. Sur son visage, un petit sourire moqueur et un air inquiet se partageait le devant de la scène. Lissandre ne semblait aucunement croire que Merrick avait concrétisé avec la jeune femme qui lui résistait à lui. Or, bien qu'il s'entêtait à le cacher, il doutait, hésitant... Et bien évidemment, Lorren le vit tout de suite, cette hésitation se cachant derrière le masque que le nouvel arrivant tentait de dresser. Après tout, le jeune homme était l'un des maîtres en la matière de faux-semblant.

-''Quelle curiosité mal placée, je vous prenais pour un honnête homme !''
''L’honnête homme'' en question rougit. Pointant à son tour la cuisine du menton, Merrick le questionna : '' Croyez-vous au coup de foudre, Lissandre ?''

Cette question sembla enflammer l'homme. Se redressant, celui-ci vrilla son regard dans celui du milicien fatigué, décidant de jouer cartes sur table. Lamentable... ''Je fais plus que croire au coup de foudre. Je le vis, j'en suis la preuve.'' Puis crânement : '' Vous savez, je suis ici depuis l'ouverture, Lorren. Vous, depuis hier seulement. Apprenez où est votre place et respectez mes prérogatives.''

-''Vos prérogatives...?'' Dit-il sans le regarder, laissant trainer son index sur le pourtour de sa tasse. Puis continuant très calmement : '' Vous savez, elle n'est pas une ''chose'' ou un morceau de viande, mais...'' Dit-il avant de s'arrêter, se délectant de la pause et de l'attente qu'il lisait dans le regard de son homologue. ''...Mais elle semble être rentré dans mes ''prérogatives'' à moi, hier soir Lissandre... Je vous prierais donc de ne pas empiéter, ni d'empirer votre cas, l'ami.''

-''Jamais je n'abandonnerais ! '' Dit-il, embarquant à pleins pieds dans l'histoire racontée par le milicien.

-''Lissandre, Lissandre, Lissandre...Occupez-vous de laver les draps, je m'assurerais de les salir.''

Bien souvent, les hommes en manque de répartie, perdant leur lutte verbale, cherchaient la confrontation physique pour tenter d'assoir leur domination sur le milicien. Généralement, celui-ci esquivait cet affrontement, ou fleuretait avec ce dernier en ne dépassant jamais la limite de l'indécent pour éviter le combat. Couardise oblige, après tout. Or, cette fois-ici, il se le permit. Ne croyez pas qu'il avait gagné en courage. Mais, qui aurait eu peur d'un individu comme celui auquel il parlait ? Et puis, ce dernier l'enrageait profondément.

Ainsi, en entendant ses mots, et ne sachant que dire, Lissandre se leva d'un bond, prêt à confronter celui qui l'avait tancé vertement et verbalement. ''Comm...Malotru !''

Souriant toujours crânement, Merrick Lorren le corrigea tel un professeur, un doigt levé:'' Je crois sincèrement que ''salopard'' sonnerait mieux, Lissandre.''


Tandis qu'il était rouge et sur le point d'exploser, celui-ci du retrouver sa place assise et calmer ses ardeurs lorsqu'Estelle de Chantauvent, la femme qui se trouvait être la cause de leur ''affrontement'' revint. Avait-elle entendu ou vu quelque chose ? était-elle intervenue ? Si celle-ci n'avait rien dit ou rien entendu, l'homme lésé avait retrouvé sa chaise aussi rapidement que l'éclair, histoire de ne pas se faire prendre avec un début de confrontation sur le dos. Après tout, habitué qu'il était, il connaissait très bien les ravages que pouvait faire Brigitte... Au retour de la tenancière, celui-ci tenta de marquer son territoire, appelant celle-ci ''ma belle''. Bien que gentiment, cette dernière le reprit. Merrick ne put s'empêcher de pouffer malicieusement. En récompense, il reçut bien évidemment un regard noir.

-''Si ma mémoire est bonne, il y a aussi une règle dénonçant la violence physique, non Lissandre ?''

Rougissant devant cette répartie et les actes de violence répréhensibles que son esprit avait imaginé, il se perdit dans sa tasse. ''Merci, Estelle.'' Dit Merrick, en mettant l'accent sur le prénom de la jeune femme pour faire contrepoids au ''ma belle'' que l'incongru avait énoncée. Or, Lissandre devait véritablement avoir été frappé par la foudre et être éperdument amoureux de la jeune femme, car il n'abandonna pas sur-le-champ. Préférant, revenir à l'attaque et tenter de déstabiliser le milicien sur les tenants et aboutissants de sa soirée. Tentait-il d'avoir des aveux de la femme qu'il courtisait, ou que Lorren se mouille devant celle-ci ? Probablement.

-''Vous n'avez qu'à savoir qu'elle fut chargée.''

Au final, la conversation n'alla pas plus loin, alors que le prétendant faussement éconduit se leva prêt à partir. Merrick Lorren s’était fait la promesse de ne pas enfoncer le clou dans le cercueil du défait. Pourtant, il ne put résister à la tentation. Après tout, il n'aimait aucunement ce bougre... ''Oh, avant que j'oublis !'' Dit-il en se retournant sur sa chaise : ''Faites attention à bien laver les draps. Ma nuit fut mouvementée. Vous savez ce que c'est, j'imagine, non ? '' Puis, sans attendre la réaction, mais l'imaginant, Merrick tourna une bonne fois pour toutes le dos à Lissandre.

Lorsque la clochette de la porte d'entrée sonna, annonçant le départ de celui-ci, le jeune homme regarda l'expression surprise d'Estelle. Tenant sa tasse à deux mains, l'ivrogne offrit un mouvement des épaules ''étonnées'', ainsi qu'un visage calme et serein, tentant de démontrer qu'il n'était aucunement coupable de ce départ précipité. Évidemment, cet air angélique l'incriminait cent fois plus que n'importe lequel de ses sourires habituels...

-''Merci, Estelle.'' Dit-il en réponse. ''Non, elle ne le fut guère... Comme la vôtre, j'imagine ?'' Continua-t-il dans une grimace. Merrick Lorren ne pouvait pas cacher les stigmates de ses cauchemars sur son visage fatigué, et bien qu'Estelle de Chantauvent pouvait estomper sa mauvaise nuit avec son maquillage, elle ne pouvait complètement en effacer les traces. ''Merci encore pour le bain et l'infusion. Cela n'a peut-être pas suffi, mais je ne peux pas dire que je n'ai pas aimé l'attention...'' Poursuivit-il en hochant de la tête.

Prenant le temps d'épancher sa gorge sèche avec l'infusion, il enchaîna avec humour:
-''nous devrions dormir ensemble pour combattre nos mésaventures nocturnes, vous ne croyez pas ?...Alors, quand commencions-nous, ce soir ? Si vous préférez, nous pourrions même aller faire une sieste maintenant...'' Dit-il en riant.

Puis, s'appuyant sur le dossier de sa chaise, Merrick soupira en réfléchissant à ce qu'il aurait à faire. ''Je pense que ma coutileries est en patrouille dans les rues aujourd'hui.'' Dit-il en tentant tant bien que mal de se rappeler ce que son coutilier avait dit hier. Puis regardant dehors, il ne put s'empêcher de pousser un énième soupir. ''Je vais devoir bientôt y aller, je crois...'' poursuivit-il réellement déçut, les yeux perdus à l'extérieur. Puis, au bout de quelques secondes, il retrouva son allant : ''Était, un vil séducteur, Estelle. Était. N'arrivez-vous pas à croire que vous m'avez réellement charmé et transformé ?!'' Puis, souriant encore plus franchement : '' Je ne m'acoquinerais qu'avez-vous, mademoiselle de Chantauvent !''

Déposant ses mains derrière son crâne, le milicien perdit un peu de son sourire : ''J'imagine que vous allez vous occuper de l'auberge toute la journée, sans une once de repos, c'est ça ?'' Indécis, il prit quelques secondes avant d'enchaîner : ''Peut-être devriez-vous permettre un congé, histoire de récupérer, non ?''

Il fallait l'admettre, Merrick Lorren était impressionné par le rythme de vie d'Estelle de Chantauvent. Levé aux aurores pour ouvrir la Chope Sucrée, couchée au milieu de la nuit après avoir donné de la nourriture aux nécessiteux. Couplé à cela, il savait que celle-ci n'avait aucunement des nuits réparatrices... Alors, comment ne pas s'inquiéter ?

-''Sincèrement, je crois que vous le mériteriez. Et puis, je pourrais toujours vous tenir compagnie...''

C'est sur ses paroles, que des bruits de pas se firent entendre à l'étage. La cliente venait de se lever, commençant tranquillement à s'activer pour se préparer à descendre. Devant cette réalité, qui forcerait Estelle de Chantauvent à retourner travailler, Merrick Lorren la regarda droit dans les yeux, sans sourire. Au fur et à mesure que la nuit avait avancé, il avait oublié la charge de travail dantesque qui incombait à la rouquine. Ce matin, elle serait obligée d'y faire face, et lui serait obligé de retourner ''jouer'' au milicien. Est-ce que cela signifiait la fin de leur courte période passée ensemble ? Est-ce qu'il était temps de se dire au revoir, à bientôt ?

Peut-être. Et pourtant, Merrick Lorren n'en avait aucune envie.
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