Serena ne lui en voulait pas par rapport à son manque d’implication dans sa vie. Cela l’avait d’ailleurs certainement arrangé à un moment donné, essayant elle aussi de se cacher, de ne pas dévoiler ses actions au grand jour, rester dans l’ombre concernant la milice et ses missions. Sûrement qu’elle avait bien fait, car depuis peu Roland l’acceptait. Mais il était resté bien longtemps sous l’avis tranché de leurs parents, se rangeant de leur côté regardant d’un très mauvais œil les choix de leur à présent unique fille.
Maintenant, ils s’étaient promis mutuellement de s’appliquer à rendre les choses plus transparentes entre eux, un nouveau départ en somme.
- « Je le comprends, je ne te rendais pas les choses faciles. Fermé comme j’étais, comment, toi aurais-tu pu t’ouvrir ? »
C’était plus un simple constat, plutôt qu’une réelle question.
Les deux êtres unis par le sang, s’étaient donc ensuite assis en tailleur, face à face, se livrant ainsi à d’autres secrets, rattrapant le temps perdu. La position était sans doute plus aisée pour l’une que pour l’autre, mais Roland ne le montra pas plus que cela. Il écoutait attentivement les confidences de sa cadette, essayant de se montrer compréhensif et patient.
S’en vient la question du mariage, certes le visage de Serena s’assombrit légèrement suite aux remarques de son frère, mais ce ne fut qu’une brève passade, vu que l’héritier en avait profité pur l’attaquer très sérieusement et sauvagement, l’aide d’un… oreiller. La sœur rétorqua qu’il allait vite regretter cet affront, ayant dans la tête à cet instant sûrement l’idée d’une éventuelle contre-attaque, idée qui ne tarda point à se mettre en exécution. En effet, le noble fut asséné de violents coups de cette même arme au niveau de la tête et du torse. Il se laissa gentiment faire, après tout il l’avait bien cherché.
Serena vint alors se jeter sur son matelas, s’allongeant et soufflant à la suite de leur enfantine bataille. Roland était décoiffé, mais accompagnait sa sœur dans ce rire. La question du mariage fut de ce fait beaucoup plus atténuée, elle lui répondit même qu’elle était prête à faire des efforts. Roland n’en fut que plus agréablement surpris. Mais il ne lui forcerait pas la main avec acharnement. Ils verraient, pour l’instant, la question ne se posait pas encore.
Le comte se laissa ensuite entraîné par sa sœur, s’allongeant également près d’elle. Elle l’enlaça, se blottissant contre lui. Leur étreinte fraternelle se voulait protectrice et rassurante. Ils gardèrent quelque temps le silence, profitant simplement de l’instant, de ce retour au calme, pour se remettre de toutes leurs émotions passées. Et là, alors que le sang-bleu ne s’y attendait pas, elle lui apprit que l’homme en question était un banni. Il fut légèrement décontenancé par cette remarque, il écarquilla donc les yeux, relâcha peut être un peu sa pression. Il du faire un effort considéré pour ne pas réagir avec virulence. Elle ne méritait pas qu’il s’énerve une nouvelle fois sur elle. Il avait promis d’écouter, suggéré qu’il pouvait tout entendre, tout encaisser. Alors non, alors qu’elle se livrait avec confiance, conscient du fait que cela ne devait pas être aussi facile pour elle, il ne pouvait pas la trahir, certainement pas. Il se contenta donc de soupirer.
Elle lui fit ensuite le récit de cette aventure hors du commun, elle avait vécu quelque chose de choquant, qui la marquerait sans doute à vie.
- « Ce banni finalement t’a aidé, t’a sauvé, sans chercher à profiter de la situation, de tes faiblesses. S’il n’avait pas été présent pour toi ce soir là, peut être que tu ne le serais pas à ton tour, ici, avec moi. Alors je ne peux te blâmer. Je peux simplement espéré que cela ne se reproduise plus jamais. »
Il était sincère, avait tenté de dire le fond de sa pensée, en l’enjolivant quelque peu, peut être. Mais cette histoire était passée, elle était en vie, et là était bien le principal. Il la serra donc un peu plus contre lui, profitant de sa présence, prolongeant encore un peu cet instant.
- « Je suis vraiment content que tu me fasses confiance, que tu oses me parler de tout ça. Nous avons fait un réel grand pas en avant, je ferais en sorte que cela continue. Je te comprends mieux à présent.
Pourtant, je ne cesse d’avoir peur pour toi. Je ressens quelque chose de plus profond, comme un mal qui te ronge et te pousse à te surpasser. J’en ai peur, parce qu’au fond, je crois savoir ce que tu traverses, parce que je l’éprouve aussi. »
Ce sentiment de devoir braver le danger, de se défier, d’avoir envie de toujours plus. Ce sentiment d’étouffer, oui tour cela, il le ressentait aussi. C’était très compliqué à gérer, et cela impliquait des situations dangereuses. Inconsciemment, il se laissait aller aux risques en tout genre. Que faire pour limiter la casse, il l’ignorait. Mais cela l’attristait de voir que sa cadette vivait plus ou moins la même chose. Néanmoins, il serait là pour la soutenir. Il vint ensuite déposer un baiser sur son front, signe qu’il l’acceptait telle qu’elle était, sans aucun jugement. Il ferma les yeux, attendant si sa sœur avait d’autres confidences à lui faire, ou s’ils allaient simplement restés là, profitant du calme et de l’apaisement, s’endormiraient-ils peut-être alors.