Marbrume


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 [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]

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Eurybia PyritForgeronne
Eurybia Pyrit



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MessageSujet: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyVen 7 Juin 2019 - 21:10





Quelques Emplettes


Il pleuvait des trombes d’eau, ce n’était pas un temps qui incitait à sortir de chez soi. On imaginait que les faubourgeois s’étaient barricadés chez eux, peut-être même n’étaient-ils plus sortis depuis que le ciel s’était subitement couvert en début d’après midi. L’humidité flottait lourdement formant des amas brumeux dans les rues de la ville côtière. Marbrume avait rarement été aussi sinistre. Le ciel noir se reflétait sur la surface du sol qui ruisselait en permanence. Les passants qui n’avaient pas le choix d’arpenter les rues se retrouvaient à patauger si bien qu’ils étaient nombreux à avoir renoncé à leurs petits loisirs de fin de journée. Des éclairs illuminaient l’extérieur, suivis du tonnerre toujours plus proche. Malgré tout, elle avait choisi d’affronter les ruelles inondées pour aller jusqu’à l’Albatros, la taverne la plus proche de sa forge. Elle appréciait y passer après sa journée de travail, parfois pour manger, parfois pour prendre une pinte, souvent pour se forcer à rencontrer de nouvelles personnes et de potentiels clients. Avoir un réseau de connaissance était primordial pour un commerçant, aussi la najacienne ne faisait pas exception : le simple fait de se promener en tablier, marteau à la hanche était de la publicité pour l’Enclume de Pyrit. Sa chevelure blonde, tressée comme beaucoup de labrétiennes, était encore humide de sa traversée. Ses bras arboraient d'étranges marques sombres. Si ces tatouages remontaient à une tradition abandonnée par la plus part des artisans, ils avaient persisté dans sa famille. Son père Geralt Pyrit, comme son père et son grand-père avant lui, avait fait inscrire sous sa peau l'emblème Pyrit, celui-là même avec lequel il signait ses créations. Sa fille quant à elle, avait décidé de se couvrir une bonne partie du corps pour arborer ses compétences. Depuis ses seize ans, chaque pas dans son apprentissage de forgeron, elle avait ajouté une marque supplémentaire. Voir leur fille remettre à l'honneur les vieilles traditions avait été un choc puis un honneur pour ses parents tout deux très fière de leur héritage. Telle était l'histoire de la tatouée.

Ce soir-là, elle n’avait que peu de personne à qui se présenter : elle avait rarement vu la taverne aussi vide. Elle aurait pu rester chez elle, il y faisait si sec et si chaud près du haut fourneau, mais à quoi bon ? Passé la rue, il faisait tout aussi chaud ici que chez elle. Elle s’était accoudée au comptoir pour discuter avec Roger, le tenancier. Ce dernier avait donné congé à ses serveuses, les garder lui aurait coûté plus que la soirée ne lui aurait rapporté étant donné qu’il n’avait que deux clientes : la forgeronne, et une certaine Murielle qui parlait pas des masses. Elle avait l’air troublée, en disait pas long sur le pourquoi. Apparemment, Roger la connaissait et il respectait son silence avec un air grave, quelque chose de terrible avait dû lui arriver, Eurybia sentit qu’elle en saurait plus dans quelques verres. Pourtant la pauvre femme n’était pas pressée de finir sa consommation, et à bien y regarder, avait-elle seulement de quoi s’en offrir une autre ? L’artisane glissa une pièce à l’aubergiste pour qu’il les servent tous les trois. Murielle leur adressa alors un demi-sourire emprunt de tristesse et ils trinquèrent avec une liqueur de mûre alors qu’une troisième personne entra les bras bien chargés de légumes, la tête plus ou moins abritée par une épaisseur d'étoffes. Sans encore apercevoir l’identité du nouvel arrivant, l’aubergiste l’invita a se réchauffer près du feu tandis qu’Eurybia se penchait vers sa compagne morose.

« Allons-bon, ça ne peut pas être le temps qui vous chagrine ainsi Murielle! » Roger s’agita soudainement suppliant à Eurybia de se taire, la forgeronne essayait de déchiffrer les mimes incompréhensibles qu’il lui faisait plus ou moins discrètement mais poursuivit sans trop chercher. « Un homme vous ferait-il tourner la tête ? » tenta-t-elle d’un ton compatissant.

Que n’avait-elle pas dit ! La pauvre Murielle éclata de nouveau en sanglots alors que le tenancier lançait un regard noir à la forgeronne, resservant la malheureuse d’une bonne mesure d’alcool sur le compte de la maison cette fois. Il prit alors un air complètement étranger à ce qu’elle venait de dire, cherchant à détourner la conversation

« Eh là, vous êtes trempés ! N’a pas vu d’temps pareil en février ! On dirait un orage d’août, avec les températures d’un mois d’décembre. Pour sûr que les Trois sont en colère. » lâcha l’homme.

« Peut-être le sont-ils. Ou peut-être que Serus abreuve nos champs pour nos semis. » suggéra la grande blonde aux yeux ambrés. Dans son esprit, Rikni avait laissé Serus jouer avec le cycle du soleil et de la lune pour essorer les nuages et apporter à la terre l’eau nécessaire à un printemps bien vert.

« Depuis quand tu t’y connais, toi en récolte ! » fit-il feignant un rire gêné en voyant que son autre cliente geignait de plus belle. L'artisane haussa les épaules, il était vrai qu'elle n'y connaissait rien. Roger porta son regard vers le dernier entré - ou plutôt la dernière entrée - et son visage retrouva un peu de gaieté.

« Mathilde Dumas ! Par les Trois, je ne vous avez pas reconnue sous ces foulards ! J’aurais dû m’douter pourtant, ça faisait un moment qu’on t’avais pas vu ! Sèche-toi un peu tu vas attraper la crève ! Tiens prends-moi du vin chaud, ça va te réchauffer l’gosier !»

Lorsqu’elle entendit un nom familier, Murielle se retourna doucement, ses yeux rougis semblèrent reconnaître la fermière.

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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyMar 11 Juin 2019 - 4:36
Des trombes d'eau s'abattaient sur cette maudite ville de fous dans laquelle Mathilde avait réussi à se perdre à trois reprises. Allant d'auberges en tavernes, de boutiques en abris de fortune, elle avait finalement retrouvé son chemin, celui de l'Albatros, dont le tenancier attendait une livraison de légumes. Bien sûr que je peux vous dépanner, je ne laisse pas les clients en plan, moi avait-elle dit au messager qui était venu lui déposer la requête, quelques jours plus tôt, chez elle, au Labret, dans sa magnifique petite ferme où même les orages semblaient incroyablement doux.

Un dernier effort. Trempée jusqu'aux os, elle quitta le cadre de la porte d'une échoppe fermée, -de toute évidence, le forgeron savait que personne ne viendrait chez lui-, pour traverser jusqu'à la taverne, qu'elle espérait ouverte. Mentalement, elle se promit, en pataugeant dans les flaques d'eau, de ne plus jamais faire de livraison en ville. Elle profiterait des convois ralliant le Labret à Marbrume, et s'éviterait ainsi de mourir d'une pneumonie ou d'une attaque de fangeux qui, d'ailleurs, devaient être ravis de la météo.

Elle poussa la porte non sans difficultés, tentant de son mieux de ne pas perdre les sacs de légumes qu'elle transportait dans chaque main. Carottes, panais, oignons, betterave, elle avait sorti le meilleur de ses légumes d'hiver pour satisfaire son client qui, avec un peu de chance, deviendrait un client régulier, lui assurant une rente et la possibilité d'employer régulièrement un aide maraicher, qui lui permettrait d'abattre plus de travail, et donc de produire plus, et donc de vendre plus. Le début d'une fulgurante croissance. La goutte d'eau qui entra dans son oeil la ramena à la réalité, tandis qu'un homme lui suggérait de s'installer près du feu. Trop occupée à ne rien lâcher, elle obtempéra sans mot dire tandis que dans la taverne presque vide, un sanglot répondait lamentablement à une voix féminine.

Poser les précieux sacs, ôter un foulard, puis un autre, puis le capuchon et enfin la cape, tous trempés, tout comme l'était sa robe de lin. Mathilde fut parcourue d'un frisson incontrôlable. Dans son dos, la voix féminine suggéra que Serus abreuvait les champs.

- C'est justement parce que Serus est un peu trop généreux en eau que les semis ne sont pas encore partis, dans les champs. A la prochaine lune, avec un peu chance... dit-elle à l'inconnue en essorant sa longue chevelure tressée. Son sourire s'étira lorsque Roger sembla la reconnaître. Fièrement, elle mit les mains sur les hanches, et acquiesça.

- Mathilde Dumas ! Par les Trois, je ne vous avez pas reconnue sous ces foulards ! J’aurais dû m’douter pourtant, ça faisait un moment qu’on t’avais pas vu ! Sèche-toi un peu tu vas attraper la crève ! Tiens prends-moi du vin chaud, ça va te réchauffer l’gosier !
- En chair et en os, Roger! Ça fait longtemps pas vrai? Des années! dit-elle en riant. Quatre ans, peut-être plus. Mathilde n'avait accompagné son père qu'à de rares occasions jusqu'à Marbrume. Mais cette fois, elle avait fait le voyage seule et avait décidé qu'elle conclurait des accords commerciaux qui lui permettraient de mieux vivre. - Je dirais pas non au vin, une fois n'est pas coutume. Qu'avez-vous donc fait aux Trois pour les fiche en rogne comme ça?

Elle quitta la table qu'elle s'était choisie, et les précieux sacs de légumes, pour aller à la rencontre de Roger qui, déjà, arrivait avec un gobelet de vin fumant. En le serrant dans ses bras, elle vit, par-dessus l'épaule du tenancier, un visage familier.

- Par les Trois, Murielle! Tu es en vie!

Nouveau sanglot de la pauvre femme qui, de toute évidence, avait beaucoup de mal à gérer ses émotions. Mathilde quitta l'accolade de Roger pour se diriger vers sa vieille amie, gobelet à la main. Elle était assise à côté d'une femme que Mathilde trouva assez impressionnante, de par sa taille, sa carrure et les tatouages qui ornaient sa peau. Il y avait longtemps qu'elle n'en avait pas vu de tels, encore moins sur une femme. Mathilde songea que cela ferait un bon sujet de discussion. Et tandis qu'elle saluait d'un léger hochement de tête la forgeronne, la fermière accueillit la veuve éplorée dans ses bras, tâchant de ne pas renverser le vin auquel elle n'avait pas encore pu goûter.

- Mu, ma Mu, si on m'avait dit qu'une livraison de légumes dans cette ville atroce me permettrait de te retrouver, je l'aurais faite plus tôt! Comment vas-tu? Pourquoi pleures-tu comme ça?

Murielle pouvait-elle seulement parler? Elle ne faisait que pleurer. Et quand elle ne pleurait pas, elle sanglotait. Était-ce l'alcool? Elle interrogea la blonde du regard, cherchant à comprendre ce qu'on avait bien pu infliger à cette bonne vieille Murielle. Était-ce parce qu'elle était arrivée au bout de son chagrin? Était-ce parce qu'elle avait trouvé, dans les bras de son amie, un peu de réconfort? Murielle semblait s'apaiser, tandis que Mathilde lui caressait maternellement les cheveux.
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Eurybia PyritForgeronne
Eurybia Pyrit



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MessageSujet: Re: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyDim 16 Juin 2019 - 0:02


Comme la chagrinée se tournait vers la nouvelle arrivée, Eurybia se tourna pour l’observer à son tour, intriguée. Ce devait être une paysanne ou une marchande de l’extérieur, car qui d’autre braverait le déluge pour venir jusqu’ici avec des victuailles sinon ? La réponse qu’elle eut à sa suggestion l'aiguilla sur l'identité de l'inconnue : c’était sans aucun doute une fermière. Si Murielle semblait connaître la campagnarde, Roger aussi, l'interpellant directement par son prénom et son patronyme. Voilà un bout de temps que les deux ne s’étaient pas revus. Eurybia fit un signe de tête en guise de salutations, mais n’intervint pas encore dans la discussion, c’eut été grossier. La pauvre Mathilde était trempée des pieds à la tête et accepta volontiers le vin chaud avant d’identifié la malheureuse qui ne la quittait pas des yeux. Loin d’être réconfortée par les retrouvailles, Murielle continuait d’éclater en sanglot incontrôlables entrecoupés de halètements, comme si elle essayait de reprendre de la contenance pour s’expliquer. La fermière adressa un regard interrogateur à la forgeronne qui ne put qu’hausser les épaules, indiquant qu’elle aussi était dans l’ignorance. Alors que la triste femme essayait de contrôler sa respiration pour enfin parler, Roger cracha le morceau.

« Il s’est passé beaucoup de chose depuis l’Exode...» fit-il avec hésitation. Ses yeux regardaient Murielle du coin de l’oeil, guettant sa réaction. « Les Marbrumiens n’ont pas tous été épargnés...» Murielle fut secoué d’un tremblement mais se retint de pleurer pour cette fois. Les caresses apaisantes de la part d’un visage familier semblaient la consoler un peu. L’aubergiste bataillait à chercher des mots qui ne relanceraient pas la plainte de la pauvre femme, mais ne semblait pas y parvenir. Il décida de tout dire d’un trait, comme si avec la vitesse la douleur durerait moins longtemps. « Eugène n’a pas survécu, Murielle quitté sa maison dans les faubourgs pour un endroit plus... sécurisé. »

La forgeronne resta silencieuse, essayant d’intégrer les nouvelles informations. Au prénom «Eugène», Murielle avait tressailli, s’agissait-il de feu son mari ? Elle ne semblait pas porter de ruban ou d’alliance indiquant son union, pourquoi ? Animée par une colère soudaine, Murielle se leva de son tabouret et s’écarta de la paysane, adressant un regard furieux à Roger.

« Je n’ai pas quitté ma maison, je n’ai pas choisi de partir, je n’ai rien voulu de tout CA !» s’indigna-t-elle d’une voix tremblante. Elle évoquait un petit chat dont le poil s’hérissait pour paraître plus gros et plus menaçant qu’il ne l’était. A la grande surprise de la blonde, la tentative d’intimidation fonctionna, et le gros tenancier qui avait moult fois jeté des ivrognes hors de sa taverne à la force de ses bras, se ratatina devant ce petit bout de femme énervé. Mu par un élan théâtral, elle se tourna alors vers Mathilde Dumas.

« Les Trois m’ont abandonnée, alors que j’avais besoin d’eux ! J’ai tant prié pour un fils, j’ai tant donné, mais ils n’ont rien voulu entendre, jamais ! Je n’ai pas eu le choix Mathilde !» Elle vacilla vers son interlocutrice et lui attrapa les épaules. « Je me suis tournée vers le Quatrième...» souffla-t-elle dans un murmure macabre et un regard interdit. Son visage avait blêmi, ses yeux étaient totalement éteints, ses lèvres pincées comme si son aveu l’interdisait à jamais de parler. Ses épaules étaient retombées mollement, comme si en avouant sa faute, elle s’était enfin sentie libérée. Quant à Roger, il s’était figé sur place, terrifié. Sur les dernières paroles de Murielle, la gorge d’Eurybia s’était nouée, son estomac s’était tordu. Qui, même dans le pire des désespoirs, qui pour l’amour de la vie se tournerait vers Etiol, ou le Quatrième ? Pire, qui oserait l’avouer ? Un tel crime était puni de mort, et si aucun des Trois présents de ne la dénonçait, ils risquaient de l’accompagner sur le son bûcher. La forgeronne s’était levée sans s’en rendre compte, dans quoi s’était-elle fourrée ? Alors qu’elle ne venait chercher qu’un peu de bon temps, elle se trouvait mêlée à une histoire qui empestait l’hérésie. Elle se redressa de toute sa hauteur et se mit à gronder. Cette fois ce fut à Murielle de se ratatiner sur place, paralysée.

« Comment osez-vous ? Vous rendez-vous seulement compte de ce que vous avez fait ? Pas seulement à vous, mais à nous ? Vous blasphémez en notre présence, vous nous salissez de vos paroles impies et faites de nous vos complices ! Avez-vous seulement idée ? Vous tourner vers...» sa voix s’étrangla. La Quatrième, Etiol, l’Enchaîné des Marais, le Dieu des Perdus et le Vénéré des cannibales, le Défait. Quel désespoir avait poussé cette femme à se tourner vers pareille monstruosité? Un désespoir que la commerçante ne pouvait pas encore comprendre, celui de ne pouvoir engendrer, celui de ne pas pouvoir satisfaire son époux et ses dieux, celui d'être pointé du doigt par l'ensemble de la société pour son ventre stérile et la faiblesse de sa piété. Etait-il si facile de s’égarer ? Etait-il si facile d’offrir son âme au néant pour des tourments éternels ? Eurybia se tourna vers Roger, d’un air menaçant. « Cette conversation ne sort pas d’ici, ou nous sommes tous les quatre destinés à la potence ou au bûcher. Ne vois-tu pas que la folie a frappé cette femme qui souffre de la mort de son époux ? Et tu lui sers à boire ! Elle ne sait même plus ce qu’elle raconte ! » Car la forgeronne espérait oui, espérait au plus profond d’elle-même que seul l’alcool avait pu faire dire pareille énormité à la pauvre femme. Elle n’écouta même pas le baragouinage du tenancier qui se morfondait en excuses, prétendait qu’il n’avait aucune idée que la situation était si grave, qu’il n’en avait rien su, qu’il n’avait rien à dire, qu’il avait une femme et des enfants à nourrir qu’il ne pouvait pas les laisser. Non, elle n’écouta pas, et enchaîna. « Sers-lui une infusion de menthe poivrée chaude, il faut qu’on tire ça au clair. »

Au clair, oui, il fallait que Murielle ait l’esprit clair pour leur raconter tout dans l’ordre. Les deux femmes entraînèrent la mécréante dans le coin le plus sombre et le plus éloigné des fenêtres et des portes pour l’aider à s’attabler en leur compagnie. Les yeux de Murielle s’était à nouveau empli de larmes, mais ayant craché le plus immonde, elle retint ses sanglots. Par où commencer ? Que pouvait-elle dire ? Les avait-elle vraiment sali de ses péchés ces trois personnes qui l’entouraient ce soir pour la consoler en vain. Que devait-elle dire ? Sa conscience lui souffla la réponse : tout. Sa raison, une autre : rien. Elle s’emmura dans un mutisme malgré les questions des deux femmes. Au bout d’un moment, la menthe poivré fut déposée près d'elle, et elle enserra le gobelet entre ses mains tremblantes, toujours silencieuse. Elle prit une gorgée et sa langue se dénoua sans pour autant répondre, elle semblait ailleurs.

« Mes affaires sont encore là-bas... Je ne peux pas y retourner... C’est trop... Dur...» elle sanglota à nouveau, moins fort qu’auparavant. « Mon ruban, mon alliance... Cécile... oh Cécile !» elle se mit à geindre à l’évocation de sa petite fille. A sa plainte, Eurybia devinait que la petite n’avait pas dû survivre. Dans un sursaut de lucidité, Murielle enserra le poignet de la paysanne, comme si cette dernière était la solution à ses problèmes, la réponse à tout. « Mathy, pourrais-tu y aller pour moi ? Il n’y a qu’à toi que je peux demander ça, puisque maintenant tu sais... Je n’ai jamais voulu... je ne croyais pas... j’étais perdue... je n’ai plus rien...»



Dernière édition par Eurybia Pyrit le Dim 23 Juin 2019 - 21:22, édité 1 fois
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Mathilde VortigernFermière
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MessageSujet: Re: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyMer 19 Juin 2019 - 15:48
D'un geste un peu maladroit, Mathilde fit de son mieux pour poser le gobelet, qui lui paraissait maintenant brûlant, sans en renverser le contenu, et sans lâcher la pauvre éplorée. Roger passa à côté d'elles pour récupérer le précieux contenant et le déposer sur le comptoir. Il prit alors la parole, expliquant le veuvage, et le départ de la maison familiale. C'est alors que Murielle explosa et prononça des mots qui firent trembler la fermière.

- Tu as quoi?! Instinctivement elle la repoussa, mettant de l'espace entre elle et l'hérétique qui venait d'avouer son crime.

La forgeronne fut la première à rompre le silence qui avait suivi les déclarations de Murielle. Roger, blème, s'était réfugié derrière son comptoir. La blonde, quant à elle, s'était levée, visiblement outrée. Cette conversation ne sort pas d’ici, ou nous sommes tous les quatre destinés à la potence ou au bûcher. La fermière écarquilla les yeux. Ah ça non alors, elle ne finirait pas pendue à cause de l'hérésie d'une autre, il en était hors de question. Elle avait survécu à l'exil, à la famine, à la peur, aux fangeux, ce n'est pas une femme désespérée qui allait l'entraîner dans sa chute, qu'elle soit son amie ou non.

Aidée de l'inconnue, Mathilde emmena Murielle à l'écart des oreilles du pauvre Roger, qui ne savait plus quoi faire. - Tu avais le choix, Murielle, accepter les épreuves des Trois, continuer de leur prouver ta Foi dans chaque jour que la Trinité nous offre, ou sombrer dans l'hérésie. Ils ne t'ont pas tourné le dos, c'est toi qui l'a fait, toi seule!

La stérilité d'un mariage, Mathilde la connaissait bien. Contrairement à Murielle qui avait enfanté, Mathilde, elle, n'avait jamais porté la vie. Malgré les prières, les offrandes et les cérémonies à Serus, les mois avaient passé sans qu'aucun petit être ne vienne peupler la maison de ses rires. Mathilde en avait conclu que Serus avait d'autres desseins pour elle et que le temps de porter un enfant n'était pas venu. La Fange avait confirmé son idée. La mort de Philibert aussi. On la disait maudite, elle se pensait chanceuse de ne pas avoir à s'inquiéter d'une autre vie que de la sienne.

Murielle gardait le silence. A plusieurs reprises, la fermière regarda la forgeronne avec des yeux qui semblaient dire On ne peut pas la laisser errer dans l'hérésie, on doit l'emmener au Temple. Mais jamais les mots ne franchirent la barrière de ses lèvres. La pauvrette était son amie, et l'amie qu'était Mathilde ne pouvait se résoudre à emmener Murielle à une mort certaine. A moins qu'au Temple, le prêtre qu'elle avait rencontré ne puisse la ramener sur le droit chemin... Mathilde fit une petite moue. C'était sans doute trop tard pour Murielle, elle s'était tournée vers Ethiol et on disait qu'il n'existait nul pardon lors que le quatrième était invoqué.

Mathilde sursauta. Murielle serrait son poignet avec une force qu'elle ne lui connaissait pas, celle du désespoir. « Mathy, pourrais-tu y aller pour moi ? Il n’y a qu’à toi que je peux demander ça, puisque maintenant tu sais... Je n’ai jamais voulu... je ne croyais pas... j’étais perdue... je n’ai plus rien...» Mathilde resta bouchée bée devant la demande particulière. Que répondre? Elle ferma les yeux un instant, envoyant une prière silencieuse à la Trinité. Était-ce l'une de ces épreuves dont eux seuls avaient le secret? Fallait-il accepter d'entrer dans la maison d'une hérétique, pour lui rapporter des objets peut-être demandés par Ethiol pour un rite duquel elle ne voulait rien savoir?

La fermière consulta la forgeronne du regard, avant de prendre la main de Murielle pour la reposer sur la table.

- De quoi as-tu besoin? Quels sont les objets qui pourraient t'apaiser, ou au moins aider ton deuil? Tes deuils aurait-elle pu dire, puisque la petite Cécile semblait être morte.
- Mon ruban de mariage et mon alliance. Dans une petite boite en bois, à côté de mon lit. Il y a le symbole de la Trinité gravé dessus. C'est Eugène qui l'a fabriquée précisa-t-elle en reniflant. La robe de Cécile, aussi. Une petite robe de bébé grise, avec un col blanc. Cécile a souvent joué avec pour habiller sa poupée, elle est surement dans le berceau du bébé que nous espérions tant... Murielle ne put contenir un nouveau sanglot à l'évocation de sa fille, et couvrit son visage de ses mains pour pleurer.

Elle fit un signe de tête à la forgeronne pour l'inviter à la suivre au comptoir où elle pourrait enfin boire son vin chaud, qui devait avoir tiédi depuis. Les deux femmes laissèrent Murielle à sa peine. Roger avait décidé de faire le ménage, malgré l'heure tardive, sans doute pour surmonter ses émotions, et était occupé à briquer le sol qui n'avait jamais été aussi propre. Comme elle le craignait, le gobelet de vin était maintenant tiède. Mathilde fit une petite moue.

- Écoutez je... je crois que je vais aller chercher les objets que Murielle réclame. Sa maison est dans les Faubourgs, ça devrait pas prendre trop de temps. Est-ce que... est-ce que vous accepteriez de m'accompagner? Je vous avoue que l'évocation de... du... enfin ça me fait peur, mais je crois qu'elle pourra retrouver un brin d'apaisement avant que... Avant que je ne livre mon amie aux bourreaux du Temple qui la pendront haut et court pour hérésie. Mathilde but son verre d'une traite. Il ne la réchauffa même pas, sans doute parce que la situation lui glaçait le sang, bien plus que ses vêtements humides. Je m'appelle Mathilde, je suis fermière au Labret. Je sais où vivait Murielle mais il y a longtemps que je n'avais pas vu Marbrume et j'ai bien peur de soit me perdre, soit finir égorgée dans une ruelle malfamée si personne ne m’accompagne.

Son regard se fit implorant. Dans l'esprit de la fermière, il était évident qu'une fois en possession de ses souvenirs, Murielle retrouverait une forme de paix qui la mènerait vers une mort plus paisible que si on l'emmenait à la potence dès ce soir. Car Murielle devait affronter la justice des Trois, c'était, dans l'esprit de Mathilde, la seule façon pour elle d'expier ses fautes, et d'épargner Roger, la forgeronne et elle, d'une malédiction certaine.
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Eurybia PyritForgeronne
Eurybia Pyrit



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MessageSujet: Re: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyDim 30 Juin 2019 - 17:14


Quelque chose la fit frissonner. Un courant d’air glacé. Comme si l’évocation d’un dieu oublié l’avait pourvu d’un nouveau souffle. Son haleine putride oppressait la pièce, ses ténèbres s’étalaient aux quatre coins de la grande salle, coulait le long des murs, croupissaient dans les recoins. Inconscientiemment, les sourcils de la forgeronne restaient froncés d’un air menaçant et déterminé. Lorsqu’elle avait rappelé la sentence appliquée aux hérétiques, les réflexes d’un instinct de survie aiguisé passèrent sur les traits de la fermière. Une distance palpable, un mur de piété, venait de s’ériger entre elle et sa vieille amie, ses propos amères ne firent que confirmer sa position. Par facilité et par impatience, par manque de foi, Murielle s’était détournée des Trois et Mathilde en était révulsée. C’était bien cela et rien d’autre qui l’avait perdue. Réalisait-elle la justesse des mots de la paysanne ? Ou s’emmurait-elle, persuadée qu’elle était incomprise et mal jugée ? Murielle ne répondit pas. Eurybia gardait ses bras tatoués croisés sur sa poitrine, ses imposants biceps trahissaient la tension qui l’animait. Elle essayait de réfléchir à la meilleure chose à faire. L’emmener au temple pour accorder à son âme une purification nécessaire? Même si c’était signer son arrêt de mort ? Les coups d’oeils que la fermière lui adressait étaient graves. Y avait-il des limites à l’amitié ? Cette femme étaient en train d’en tracer une bien nette : peut-on appeler «amie» une personne qui par son comportement met en danger les autres, sa famille, ses amis y compris ? N'est-il pas le devoir de tout ami que d’essayer de sauver l’âme d’un être cher en perdition et de le préserver de sa folie ?

L’hérétique rompit le silence en agrippant désespérément à la fermière la suppliant de l’aider. L’aide qu’elles apporteraient à Murielle ne ferait que les entraîner plus vite vers le fond des sables mouvants dans lesquelles elles étaient entrée lorsqu’elles avaient franchi la porte de cette maudite taverne. Le mieux aurait été de partir d’ici, de laisser Murielle chez le clergé. Elles ne pouvaient plus rien pour elle. L’envie de sortir devenait tout à coup urgente, comme si la fuite était le remède le plus efficace à ses maux. La veuve retenait la prénommée Mathilde par le poignet, et Eurybia eut l’envie incontrôlable d’extirper la montagnarde de l’étreinte. L’impiété était-elle contagieuse ? Mais avant qu’elle ne bougea, la paysanne s’en débarrassa d’elle-même. Les Trois ne protègent que les justes.

De quelle aide parlait-elle ? Apparemment, il s’agissait de récupérer des bricoles dans son ancienne bâtisse. Après qu’elle en eut fait la liste, les deux commerçantes s’éloignèrent d’elle pour se rapprocher du comptoir où le vin chaud-mais-plus-trop attendait encore d’être bu. Ainsi Mathilde comptait rendre un dernier service à son amie. Les risques en valaient-ils la peine ?

«Remet-nous en un Roger. Et tiens pour ta peine - et ta discrétion.» fit-elle en posant deux pièces sur le comptoir. La vue du métal argenté détendit instantanément l’aubergiste qui passa un coup de chiffon devant elles et fit glisser le pourboire dans sa main en acquiescent.

«Eurybia Pirit, maître forgeron près de la grande rue des Hytres. » De nouveaux gobelets de vin chaud apparurent devant elles, tandis que Roger éloignait ses pieuses oreilles pour aller frotter seuls les Trois savaient quoi. Elle le laissa s’éloigner avant de continuer: « Vous êtes certaine de vouloir le faire ? Je sais qu’elle est votre amie, mais il vous faut penser à vous et aux vôtres. Nous ne savons pas dans quoi nous venons de mettre les pieds. » Mathilde avait-elle une famille qui attendait son retour ? Si c’était le cas, pourquoi voyager seule jusqu’à Marbrume ? Elle-même n’avait pas à s’occuper des siens, elle n’avait pas de mari, pas d’enfants, ses parents étaient en sécurité. Elle voulait le croire. Elle devait le croire. Elle le croyait. « Les miens ne sont pas ici. Mes agissements ne les affecteront plus.» Elle voulait le croire. Elle devait le croire. Elle l’espérait. Elle fixait son verre pour éviter le regard implorant de Mathilde. Elles devaient rester en dehors de ça, ramener Murielle au temple.La forgeronne prit son verre et examina le liquide pourpre, le fit rouler contre les parois.

« Si ces babioles peuvent l’apaiser... Je vous accompagnerai.» Sa phrase fut ponctuée par son cul-sec.

Par quelle logique venait-elle d’accepter ? Ne venait-elle pas d’exprimer les dangers de s’en mêler, ne venait-elle pas de dire qu’elles ne savaient pas dans quoi elles mettaient les pieds ? Tout ça pour y sauter à pied joints !

« Le couvre-feu ne nous laissera pas passer cette nuit, et comme vous devez le savoir, les créatures rôdent aisément dans les faubourgs à cette heure, les habitants de l’extérieur sont déjà tous barricadés chez eux. Retrouvons-nous aux portes du crépuscule demain matin à leur ouverture. Et prenez de quoi vous défendre. »

La forgeronne se redressa et tapa du plat de la main sur le comptoir pour signaler à Roger son départ. Mais avant de quitter la pièce la blonde s’approcha de Mathilde, ses yeux ambrés avaient quelque chose d’un félin menaçant.

«Votre amie... Nous devons l’amener devant les Trois... Tôt ou tard... J’espère que vous le comprenez...» fit-elle à mi-voix. Elle se dirigea vers la porte, décidée à affronter le déluge pour s’extirper de la présence gluante de Murielle.
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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyDim 7 Juil 2019 - 2:33
Les miens ne sont pas ici. Mes agissements ne les affecteront plus. Mathilde hocha de la tête. Elle n'avait rien d'autre à perdre que la vie. Et sa ferme. Personne ne serait réellement impacté par un mauvais choix de sa part. Dans le pire des cas, sa ferme pouvait lui être confisquée et être donnée à un autre, même les pauvres gens ne verraient pas la différence dans leur assiette. Je n'ai plus personne à protéger.

Mathilde regarda la forgeronne qui, visiblement, était perdue dans ses pensées. Les mouvements de sourcils trahissaient un combat intérieur, une lutte entre la raison et l'inconscience. C'est cette dernière qui gagna, alors que celle qui serait sa guide cala son vin. Merci murmura-t-elle, soulagée de ne pas s'aventurer seule dans cette folie. Je passe la nuit ici. Ma chambre est déjà payée ajouta-t-elle en indiquant, d'un mouvement de menton, le panier de légumes qu'elle avait déposé à son arrivée. Elle salua la forgeronne d'un hochement de tête, et fut étonnée de la voir s'approcher d'elle, son regard traversé par une menace à peine dissimulée. Votre amie... Nous devons l’amener devant les Trois... Tôt ou tard... J’espère que vous le comprenez... Mathilde jeta un oeil discret à Murielle, qui semblait s'être endormie sur la table, épuisée par les crises, les larmes et le désespoir. Elle murmura Je l'emmènerai au Temple dès notre retour. Pour sauver son âme, pour sauver la leur aussi. Mathilde perçut le hochement de tête approbatif de Roger, un peu plus loin. Eurybia disparut, laissant Mathilde seule au comptoir. Serait-elle là, demain?

La fermière prit le temps de terminer son verre de vin, chaud cette fois. Alors que Roger passait devant elle, elle l'arrêta, visiblement embêtée.

- Dis Roger, c'est où les Portes du crépuscule? Je savais pas que les portes de la ville avaient des noms...


***


Mathilde avait peu dormi, à peine assez que pour ne pas ressentir les effets de la fatigue, mais pas suffisamment que pour se sentir reposée. Elle descendit dans la salle principale une fois habillée de sa vieille robe de toile épaisse, et coiffée d'une simple tresse. Murielle n'y était plus. Sans doute avait-elle repris connaissance et était-elle rentrée chez elle. Ou bien s'était-elle fait mettre dehors par le propriétaire, qui devait crever de trouille. Une hérétique sous son toit, c'était, à coup sûr, la meilleure façon de s'attirer les foudres des Trois.

Roger se tenait derrière son comptoir. De toute évidence, lui non plus n'avait guère dormi, à en juger par les cernes qui soulignaient ses yeux fatigués. Il paraissait mal à l'aise, et avait le regard fuyant. Mathilde évita de revenir sur l'étrange discussion de la veille et déjeuna rapidement avant de quitter l'auberge en silence. Décidément... Murielle avait plombé la soirée, les retrouvailles et certainement le contrat qu'elle allait conclure pour fournir la taverne en légumes frais. La seule chance de récupérer l'affaire était de la livrer au Temple.

Le ciel était dégagé, c'était une journée magnifique qui s'annonçait, à moins que le vent ne se lève pour apporter des nuages venus du nord. Le climat de bord de mer était si capricieux. Suivant les indications que Roger lui avait données la veille, Mathilde se rendit aisément au lieu du rendez-vous. Les rues étaient encore calmes à cette heure, et la fermière savoura le chemin, sans avoir à se préoccuper des charrettes qui auraient pu l'écraser, ni des voleurs qui auraient pu la dépouiller en une seule bousculade.

Elle arriva la première au point de rendez-vous. Eurybia allait sans doute arriver dans quelques minutes, du moins l'espérait-elle. Mathilde regarda les portes, bien gardées, qui leur permettraient de prendre le chemin de l'ancienne maison de Murielle, et se demanda si elle serait capable d'en retrouver le chemin. Ses souvenirs dataient de plusieurs années, et la demeure avait sans doute changé... d'autant plus qu'elle était maintenant abandonnée, et probablement dans un état de délabrement déjà avancé. L'avait-on pillée?

Mathilde rajusta son arc dans son dos. Que faisait donc la forgeronne? Avait-elle changé d'avis au cours de la nuit? Elle fit une petite moue. Peut-être avait-elle simplement accepté de l'aider pour se débarrasser d'elle. Dans les faits, elle n'avait probablement aucunement l'intention de la suivre dans cette folie. Mathilde leva les yeux au ciel. Comment avait-elle pu être aussi bête et croire qu'une inconnue la suivrait pour aller chercher des babioles dans une maison probablement dépouillée du moindre objet abandonné par sa propriétaire.

Elle se mit en route lorsqu'elle entendit, derrière elle, une voix la héler.
- Hey, Dumas, attendez!

La fermière se retourna pour constater qu'une belle blonde approchait à grands pas pressés. Eurybia n'avait pas menti, pas plus qu'elle ne s'était dégonflée. Tout au plus avait-elle pris un peu de retard.
- Pyrit! J'avais cru que... Elle haussa les épaules. Que vous vous étiez dégonflée et que j'allais y aller seule. ... Que vous aviez changé d'avis, ce qui aurait été parfaitement compréhensible. Bonjour! Contente de vous voir!

La fermière lui serra vigoureusement la main, soulagée de constater qu'elle ne ferait pas le trajet seule. Elle remarqua que la forgeronne ne plaisantait pas lorsqu'il s'agissait de se défendre. Dans les faits, si Mathilde ne semblait pas réellement menaçante, Eurybia, elle, était dissuasive, de par sa taille et de par les armes qu'elle portait.

- Si mes souvenirs sont bons, la maison de Murielle et Eugène se trouvait au bout d'une ruelle, à proximité d'une petite taverne dont la seule particularité était d'avoir une lanterne verte sur sa façade. La ruelle était un cul-de-sac. On y accédait par une rue assez animée, et une poissonnerie absolument répugnante faisait le coin. Elle regarda en l'air, comme si le ciel sans nuages pourrait l'inspirer. Ça vous dit quelque chose?

Elles se mirent en route. Eurybia comptait sur leur flair pour les mener à la poissonnerie, si toutefois celle-ci était encore en opération. La ville s'éveillait. Bientôt, les rues grouilleraient de passants et de charrettes, marchant vers des destinations inconnues, cherchant à échapper aux voleurs et aux coupes-gorges.

- Merci d'être venue. J'imagine que la maison, depuis le temps, a été pillée de fond en comble, mais si je peux le constater pour ensuite en témoigner à Murielle, eh bien... au moins sera-t-elle fixée. Je compte réellement l'emmener au Temple, vous savez. C'est mieux, pour elle comme pour nous. Oh regardez! Une femme avec du poisson plein le panier!

Elles étaient sans doute sur le bon chemin. Mathilde ne reconnaissait rien des rues et des bâtiments qui les bordaient. Elle n'était venue que quelques fois dans le quartier, et sa dernière visite à Murielle remontait à plusieurs années, avant la Fange, avant les famines et la pauvreté qui avaient gagné du terrain. Pourtant, elle en était certaine, elles étaient sur la bonne voie.
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Eurybia PyritForgeronne
Eurybia Pyrit



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MessageSujet: Re: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyMer 17 Juil 2019 - 12:53


Dans quoi s’était-elle fourrée. Encore. Plus elle fréquentait ses congénères, plus elle se posait cette question. Qu’est-ce qui la poussait à se mettre en difficulté pour de parfaits inconnus ? Ce n’était pas seulement sa nature généreuse, car il y avait une différence entre améliorer la vie de quelqu’un sans qu’il nous en coûte vraiment, et prendre constamment des risques. Après deux ans à travailler comme une acharnée, s’était-elle rendue compte que la renommée réclamait non seulement du talent mais aussi un certain charisme ? Tout ce temps, elle avait brider ses activités sociales pour se consacrer exclusivement à sa forge, en espérant être remarquée. Oui, elle commençait à se faire connaître pour ça, mais ce n’était pas assez pour son orgueil. Car de quoi pouvait-on parler, sinon d’orgueil ? Pour quelle raison prendrait-elle des risques à part pour qu’on se souvienne d’elle ? Le petit peuple était pauvre, il souffrait de ne pouvoir acheter le pain dont sa survie dépendait pourtant. Et elle était là, à vendre ce qu’aucun des petites gens ne pourrait jamais s’offrir. Cette strate-là de population, elle ne la côtoyait que dans les tavernes ou lorsqu’elle venait leur acheter soit de la nourriture, soit une marchandise qui ne concerne pas sa forge. Elle les fréquentait sans jamais vraiment pouvoir se lier à eux, ils n’avaient pas besoin d’elle, ce qu’ils venaient chercher parfois, c’était des clous, des outils des affixes, ce que n’importe quel autre forgeron ou même métallurgiste aurait pu leur fournir. Fallait-il créer ce besoin d’une manière ou d’une autre ? Ou pouvait-elle trouver un autre moyen d’être présente, d’être reconnue, pas forcément pour son artisanat, peut-être simplement en étant présente lorsqu’on avait besoin de quelqu’un ?

Elle faisait le chemin du retour sans vraiment y penser. Si patauger dans l’eau ne lui était pas habituel, ses pensées n’en furent pas plus affectée. Elle ne cherchait même pas à se protéger du déluge, et c’est complètement trempée qu’elle arriva sur la pas de sa porte. Retrouver l’intérieur chaud et douillet de sa forge était un soulagement qui, ce soir-là en particulier, n’avait pas d’égal. Après s’être débarrassée de ses vêtements mouillés pour enfiler sa tenue de nuit, elle se glissa sous la couverture rêche de sa couche et se laissa sombrer, l’alcool et la petite promenade sous la pluie facilitèrent grandement sont immersion dans un sommeil profond.


Il estimait avoir été suffisamment patient et il fallait poser des limites. D’abord endurer les plaintes de la veuve n’avait pas été l’activité la plus joyeuse de la soirée, il avait fait du mieux qu’il pouvait, lui avait même offert un verre, avait accepté de la servir quand il aurait refusé d’en faire autant pour d’autres clients éméchés. Il pensait faire une bonne action, mais s’était vite rendu compte de l’erreur. Il était dedans et jusqu’au cou. Le simple fait d’avoir été témoin de propos hérétiques le mouillait dans cette sale affaire. Il avait tout intérêt à ce que l’entreprise de la fermière et de la forgeronne fonctionne, sans quoi il risquait lui aussi d’en faire les frais. Cette situation ne plaisait pas au père de famille et au propriétaire respectable qu’il était. La forgeronne, c’était une bonne cliente, elle payait toujours son ardoise et savait remettre les ivrognes à leur place. Elle s’était plus d’une fois trouvé mêlée aux bagarres qui éclataient parfois, mais ne les avait jusqu’alors jamais initiées et elle avait toujours proposé un coup de main pour réparer les dégâts. Quant à Mathilde Dumas, sa visite avait été une bonne surprise, gâchée néanmoins par la tournure des évènements. La cuisinière saurait quoi faire avec les précieuses denrées qu’elle ramenait tout droit du plateau. La labrétienne n’était pas revenue depuis un bon moment et l’évocation des Portes du Crépuscule ne lui disaient rien. Heureusement Roger avait un moyen mnémotechnique pour s’en souvenir.

«Les Portes du Crépuscule, c’est là où-est-ce que le soleil se couche, c’est les grandes portes !» Ah, Roger et son raisonnement impeccable. Merci Roger ! Après avoir fini son dernier verre, l’ussonoise parti rejoindre sa chambrée au grand désespoir du tavernier. Et lui, qu’était-il censé faire avec la mécréante ? La laisser là ? La jeter dehors sous la pluie ? Elle aurait été capable d’y rester toute la nuit pour attraper la crève et en mourir vu son état. Aussi corrompu que fusse sa foi, il ne pouvait se résoudre à jeter dehors cette pauvre femme qu’il connaissait. C’est alors que par la fenêtre il vit un milicien passer. Il se précipita sur le pas de la porte pour le héler.

[Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] Gaston10
« Hey Gaston !» la voix de l’aubergiste parvint à couvrir les battements de l’orage. Deschamps se retourna en entendant son nom. Sa longue cape aux couleurs de la milice était rehaussée d’une grande capuche qui aurait dû le protéger de l’averse. Mais la pluie battante le frappait de côté, parfois une bourrasque de vent l’éclaboussait même par dessous le cuir rabattu sur son visage qu’il tenait bien droit pour s’abriter comme il pouvait. Il se redressa pour analyser la silhouette floue qui se tenait de l’autre côté de la rue et reconnut le gérant de l’Albatros. D’habitude, il l’aidait à dégager les derniers soiffards qui encombraient le plancher en échange de quelques pièces, mais par ce temps qui à part la fange pouvait encore y être ? Il lui fallut deux enjambées seulement pour le rejoindre, une de plus pour franchir le perron de la taverne. Des mèches de ses longs cheveux noirs pendaient devant son visage constellé de gouttelettes. Son regard sombre et suspicieux balaya la salle vide rapidement puis, un rictus s’étira sur son visage.

« Bah alors Roger, t’as besoin de moi pour te débarrasser de ce colosse ?» fit-il en désigna d’un mouvement de tête la frêle et petite Murielle. La veuve semblait être au bout du rouleau et vacillait entre son verre et l’inconscience.

« C’pas ça... Tu pourrais me la ramener au Goulot ? Elle avait pas le moral ce soir, elle avait besoin d’un petit remontant. Avec ce temps j’ai peur qu’elle reste dehors...»

C’était exactement le genre de mission faite pour lui, Gaston Deschamps. Qui d’autre saurait venir au secours de la veuve éplorée, égarée loin de chez elle. D’un rapide coup d’oeil, il évalua la marchandise. Plutôt mignonne, blondinette avec de grands yeux cernés et fatigués, un peu miséreuse. Bah, fallait se contenter de ce qui était à disposition. Il s’était engagé pour ce genre de mission, être le héros qui ramène la veuve chez elle, l’épaule solide tendue à disposition du petit peuple !

« Je suis de service, je peux pas me balader où bon me semble...» mentit-il. En général, il circulait avec d’autres de ses compagnons pour faire des rondes aux alentours de cette heure-là, mais les ordres de cette soirée étaient un peu différente. On craignait que le temps agite les créatures, aussi avait-on pressé les miliciens sur les remparts, lorsqu’il s’était présenté, on lui avait donné six heures de repos pour qu’il puisse assurer la surveillance du deuxième quart. Et s’il pouvait le faire au creux des reins d’une mignonne... Il prit un air affligé, s’approchant à pas prudent de la dernière cliente. « Mais je ne puis laisser une dame seule dans la nuit et sous un tel déluge. Il est de mon devoir de la raccompagner saine et sauve chez elle.» fit-il en décrochant un sourire charmeur. Murielle releva le nez lorsqu’on l’appela «ma dame», voilà bien longtemps qu’on ne l’avait pas appelée ainsi. L’avait-on déjà appelé ainsi ? Maintenant qu’elle habitait au Goulot comme une miséreuse, on se contentait habituellement de l’ignorer tout bonnement. Elle voulait voir le visage de l’homme qui sans la connaître lui accolait automatiquement une marque de respect. Il avait un long nez très droit qui lui donnait du caractère, une chevelure jais, et une barbe très soignée, un regard perçant. Il était beau garçon, Murielle le trouva soudain très proche, et elle rougit mal à l’aise et troublée.

« Si vous le permettez bien sûr, c’est pour votre sécurité...» ajouta-t-il.

« Je... Oui ?... Je n’voudrais pas interrompre vot’ ronde, je... Mais p’t’être que... Ca serait très aimable à vous monsieur... ?»

Son souffle témoignait de l’ivresse qui l’engourdissait, mais loin d’écoeurer le milicien, ça le conforta dans l’idée que l’effort à faire pour parvenir à ses fins serait bien moindre.

« Gaston Deschamps, de la coutillerie Leboucher, milice interne, à votre service. » fit-il avec habitude, accompagnant ses mots d’un bref salut. Le voir lui baiser la main comme à une petite bourgeoise suffit à l’étonner. Qu’elle était naïve et impressionnable, avec son petit visage en coeur.

«Mu... Murielle Lapointe » fit-elle confuse. Lapointe, Lapointe. Gaston décrocha sa cape pour couvrir les épaules de Murielle, il rabattit la capuche sur son visage en ignorant ses protestations. Il pouvait bien se mouiller un peu pour la raccompagner, elle n’aurait qu’à l’inviter à se réchauffer au sec pour le remercier. Alors qu’ils marchaient dans les ruelles inondées il se souvint. Lapointe. Il connaissait ce nom. Eugène Lapointe, milicien de l’extérieur. Il avait été blessé quelques mois auparavant lors d’une mission, mordu par la fange disait-on. La plaie avait bien cicatrisé mais plus tard il était tombé malade, une infection étrange qui avait durée de longues semaines. Puis il s’était transformé alors qu’il gisait dans son lit, fiévreux. Il s’était relever fangeux alors que sa femme et une voisine étaient dans la pièce à côté. La première avait tout juste eu le temps de s’échapper en hurlant dans la rue alors que la deuxième avait été la victime toute désignée. Heureusement pour les habitants des faubourgs, les volets de la maisonnée avaient étaient solidement fermés puisque le mari avait besoin de repos. La femme Lapointe avait eu de la chance qu’une coutillerie avait fini sa garde à Vert Lanterne, la taverne qui avoisinait sa maison. Ils avaient vite réagit, et s’était jeté à sa suite pour barricader le fangeux à l’intérieur en attendant des renforts pour l’éliminer. L’affaire n’avait pas été simple. On avait envisagé de mettre le feu à l’habitation - à la plus grande horreur de Murielle - mais c’était prendre le risque de laisser l’incendie se répandre avec le vent fort qui soufflait ce jour-là. Finalement le coutiller avait fait chercher l’équipement nécessaire pour établir sa stratégie. Les hommes se tiendraient en arc de cercles pour former un mur de bouclier autour de la porte d’entrée, lances et hallebardes tendues. Quelques espaces entre les boucliers fendait le mur par endroit, improvisant des meurtrières pour les archers qui pointaient leurs flèches vers la seule issue. Sentant les corps à portée, là tout près, la créature n’avait de cesse de taper contre la porte dont le bois se fendait par endroits. Alors on ouvrit la porte. Il ressemblait encore à un homme, mais à un fou, le visage, les mains et la chemise couverts du sang de la voisine. Ses yeux aussi témoignaient de la perte de son âme, de sa folie, ils sortaient de leurs orbites, injectés de sang, fous. Dès sont apparition, il fut accueilli par une pluie de flèches alors qu’il se jetait dans les boucliers. Son bras gauche fut empalé par une lance, l’immobilisant partiellement, ce qui permit aux soldats de ce côté-là de se replier derrière lui et tenter de lui asséner une série de perforations. Il était vif, mais ils étaient nombreux et organisés. Il se débattit, ne semblant pas sentir la douleur des coups alors même qu’il se vidait de son sang. Les miliciens derrière lui essayèrent de lui perforer la base du crâne, mais il bougeait trop, une lance vint se planter dans l’épaule d’un autre homme qui s’affaissa et se retrouva sous la créature. Ce n’est qu’à ce moment, alors que le fangeux se penchait frappant le bouclier de l’homme blessé de toutes ses forces qu’on parvint à lui transpercer la tête de part-en-part. Une partie de sa cervelle se déversa sur les boucliers et les hommes qui les tenaient. La créature s’effondra enfin.

Cette scène, Deschamps avait pu la voir partiellement depuis les remparts prétendait-il, mais il n’avait pas manqué de demander un récit complet à la coutillerie en question. C’est comme ça qu’il avait appris la nouvelle. Les compagnons de Lapointe trouvaient très étrange qu’il soit mort subitement, lui qui avait une santé de fer. Le mari de la voisine se rappelait avoir entendu son épouse parler des remèdes que Murielle donnait à son mari, sans qu’on en voit jamais les effets guérisseurs. Le veuf s’était d’ailleurs demandé à voix-haute d’où elle sortait ces remèdes, elle qui n’allait plus au temples depuis quelques semaines.

Une femme qui ne va plus au temple mais continue de donner des remèdes à son mari dont la santé empire, jour après jour, jusqu’à ce qu’il meurt subitement. Pouvait-il s’agir d’un empoisonnement ? L’histoire était bizarre, mais Murielle Lapointe était partie, l’affaire s’était tassée, personne n’avait creusé plus que ça. Peut-être était-ce l’occasion d’en apprendre un peu plus qui sait ?

« J’étais sur les remparts quand c’est arrivé. J’ai presque tout vu. Vous avez eu de la chance d’en ressortir en vie dame Lapointe.»

De la chance, certainement pas. Elle avait provoqué tout ça, c’était évident maintenant.

« J’aurais dû mourir avec lui...» Avec lui, avec Cécile. Leur petite famille serait encore vivante si elle n’avait pas baisser les bras, si elle avait accepté les épreuves des Trois comme l’avait rappelé Mathilde... «C’aurait été juste...»

L’alcool semblait la rendre bavarde, peut-être se laisserait-elle aller à quelques confidences ?

«Vous ne pouvez pas dire cela, vous avez fait ce que vous avez pu, vous avez pris soin de lui jour après jour, lui avez portez des remèdes achetés au Temple...»

«Pas au Temple...» fit-elle distraitement. Elle avait du mal à marcher droit, l’ivresse la poussait contre le milicien l’obligeant à la rediriger en la laissant s’appuyer sur son bras. D’où sortaient ces potions alors ? De chez un herboriste ? Gaston n’était pas au bout de ses surprises. «C’était des remèdes de grand-mère...»

« Il était souffrant et vous ne l’avez pas emmenez au temple ?» Gaston fronça des sourcils, interloqué. Tout le monde savait qu’Eugène avait été blessé par la Fange, il était pourtant impératif qu’il voit un prêtre dans l’éventualité où sa santé déclinait. L’incident des faubourgs aurait pu être évité, si elle avait demandé de l’aide au Clergé.

«Oh il allait bien au début...» son regard était vague, elle ne prêtait même plus attention à ce qui l’entourait et quand elle trébucha, se raccrochant au milicien, elle ne prit même pas la peine de remettre la capuche qui avait glissé. La pluie torrentielle ne mit pas longtemps à tremper sa chevelure blonde toute entière. Elle ne semblait pas se rendre compte de la gravité de ses révélations. Gaston en revanche s’était arrêté et lui faisait face.

«Pensez-vous que ce ‘remède’ ait pu affaiblir votre mari ?» le ton grave et déterminé de Deschamps rendit à la veuve un brin de lucidité. Il allait tout découvrir, comme la grosse tatoué l’en avait averti: elle allait finir pendue si elle parlait plus.

« Non, je... Mais non enfin ! Lâchez-moi, je peux marcher seule.» s’exclama-t-elle soudainement. Elle ne le trouvait plus aussi charmant maintenant qu’il la soupçonnait. Obéissant à ses exigences, il s’écarta et la laissa marcher. Elle manqua de tomber quand il la rattrapa juste à temps.

«Sauf votre respect ma dame, je crois que vous ne pouvez pas marcher seule. Nous sommes dans votre rue je crois.» fit-il d’un ton froid. Il récupéra son manteau et la laissa sur la pas de la porte. Tout se recoupait dans son esprit. Murielle Lapointe avait empoisonné son mari avec des remèdes qui ne provenaient pas du temple. Dès demain, il mènerait l’enquête.

Son quart fut écourté, il rejoignit la caserne pour y dormir. Mais l’affaire lui trottait encore en tête, et quand il s’endormit enfin, c’était pour rêver d’une promotion qu’on lui accordait pour avoir résolu l’affaire Lapointe. En milieu de matinée, c’est les yeux cernés, le teint pâle, il se mit à arpenter le Goulot, une rue en particulier, vous devinerez laquelle. Déjà un mendiant était installé au coin d’une allée, il lui glissa une piécette de cuivre pour une information. La veuve Lapointe, avait-elle l’habitude d’aller au temple ? Ah ça non pardi. Pour une autre piécette, les oreilles qui traînaient dans les rues du Goulot avaient peut-être remarqué sa colère froide envers la Trinité, les Trois l’avaient laissée seule sans mari sans enfant elle avait tout perdu. Une troisième de cuivre. Si au début certains pouvaient comprendre son ressentiment personne ne comprenait qu’il perdurât. Les Trois ne l’avaient-il pas épargné après tout ? Ne l’avaient-ils pas mise en sécurité entre les murs de la ville ? C’était à elle de surmonter ces épreuves par la foi, et non par le désespoir. Mais son aigreur avait persisté, et avait fait d’elle une sorte de paria. Plus grand monde ne voulait lui parler, de peur de s’attirer la foudre des Trois, ou du Clergé. Voilà le genre d’informations qu’il put obtenir. Pas très discrète la païenne, heureusement qu’il ne s’était pas attardé dans ses jupes, quelle honte. Mais où trouver la preuve de son crime ? A l’ancienne bâtisse dans les faubourgs ? En espérant qu’elle n’ait pas caché les éventuelles traces qui l’accuseraient. Le mieux aurait été de retrouver un échantillon du remède en question, et si elle s’avérait être coupable du crime dont il la soupçonnait... Puissent les Trois lui venir en aide.


Rikni avait balayé le ciel d’un revers de main, et le soleil brillait à nouveau sur le duché, annonciateur du grand changement. Les rais de lumière vinrent titiller la forgeronne endormie pour la sortir de son lourd sommeil. Quelle heure était-il ? Elle sauta de sa paillasse pour se préparer. Elle qui d’habitude se réveillait avant l’aube, comme si son corps était programmé pour, s’était laissée empêtrée dans des rêveries, toujours les mêmes.

Elle se tenait devant son haut-fourneau à extraire du minerais d’une roche charbonneuse, mais en vain. Le liquide visqueux qu’elle parvenait à récupérait n’était rien de plus que de la vase de marécage. Elle essayait d’en faire des lingots qu’elle cherchait à battre inlassablement. De tous les alliages qu’elle avait fait, c’était de loin le plus dur à battre et à plier. Pourtant la boue restait inerte, insensible à ses efforts. Rien qu’à y repenser, elle en était fatiguée. Parfois le rêve prenait une autre tournure, mais cette nuit elle avait beau frapper la boue, aucunes mains ne sortirent du foyer pour lui tendre un sceau de sable blanc. Aucune aide, elle était condamnée à battre pour l’éternité sans jamais rien en tirer.

Heureusement, elle fermait la forge pour la matinée se souvenait-elle. Elle avait promis à la fermière d’aller aux faubourgs, et elle tiendrait parole. Armée de son marteau de guerre qu’elle avait harnaché dans son dos, Eurybia se présenta aux Portes du Crépuscules. Sa hauteur lui permit de distinguer sans mal la fermière. Cette dernière s’impatientait et finalement tourna les talons en direction des grandes portes n’attendant plus sa venue. Eurybia fut surprise de voir l’arc dans son dos, mais après réflexion, en vivant au Labret, il était indispensable qu’elle ait de quoi se défendre, sinon comment survivre ? Les routes n’étaient pas sûres, et s’en écarter était plus dangereux encore. Elle l’interpella en enchaînant de grandes enjambées jusqu’à elle et la salua d’une bonne poignée de mains. Des mains de travailleurs.

« Changer d’avis c’est une chose, ne pas tenir parole, c’en est une autre. D’autre part, je préfère m’assurer que cette affaire soit réglée au plus vite, et qu’elle ne s’ébruite pas. Votre amie me met mal à l’aise pour tout vous dire. Oh ne vous en faites pas, je ne l’ai encore jamais utilisé dans les faubourgs, simple précaution. » fit-elle en parlant de l’arme imposante sanglée entre ses omoplates. La tatouée fut soulagée de constater que Mathilde se souvenait parfaitement de la maison qu’elles recherchaient. « Oui, je crois savoir de quelle rue vous parlez.»

Elle allait généralement au port pour se procurer du poisson, mais l’odeur particulière des créatures marines était difficile à ignorer. La fermière semblait soulagée de sa compagnie, elle semblait aussi décidée qu’Eurybia à emmener Lapointe au temple. Tant mieux, de son côté la forgeronne avait craint que par amitié, elle essaie de la protéger les condamnant du même coup. En réalité c’était une des raisons pour lesquelles elle avait accepté de l’accompagner: elle voulait s’assurer que personne n’accole son nom à celui de l’hérétique. Juste cette pensée lui était insupportable.

« Pour elle comme pour nous, vous avez raison...» L’oeil attentif de l’ussionnoise venait de repérer une femme tenant la marchandise qui les intéressait. «Bien vu Dumas !» Eurybia s’avança vers la femme. « Bonjour ma dame, votre poisson à l’air bien frais, il vient du marché ?» demanda-t-elle avec l’air le plus courtois qu’elle avait en stock. Après l’avoir jaugé de haut en bas, la roturière lui répondit enfin.

« Pas du tout mon grand, vient d’la poissonnerie en bas de la rue. C’des poissons d’eau douce, pas comme ceux du port ! »

La forgeronne la remercia, tandis qu’elles accélérèrent le pas le long la grande rue. Au bout de l’avenue effectivement, les passants grouillaient entre les étales pour discuter les prix avec les marchands. La puanteur des poissons et des tripes qu’on faisait frire embaumait l’air et le rendait collant. Malgré l’envie qui la tiraillait, la grande tatouée se retint de plonger son visage dans le tissus de sa manche. Combien de temps fallait-il pour s’habituer à la vie de citadin ? Loin de l’odeur de la poiscaille et du fumier ? Trop peu. Elle était une fille de la campagne et des montagnes, et elle ne supportait pas les manières de bourgeoise qu’elle commençait à adopter sans s’en rendre compte. Arrivées devant la poissonnerie, l’odeur était écoeurante, elle observèrent la ruelle juste devant le grand bâtiment, point de taverne mais une boucherie. L’endroit qu’elles cherchaient devait être juste après le marché au poisson, elles se faufilèrent parmi la foule. Avec sa taille et son allure extravagante, Eurybia comptait sur la fermière pour la repérer et la suivre, l’inverse eut été plus difficile. Elle leur frayait un large passage, couvrant le brouhaha de sa voix puissante pour s’excuser. A l’angle une ruelle s’enfonçait, elles tournèrent là, à la recherche de la taverne. D’après la description de Mathilde, la forgeronne imaginait un énorme établissement, un peu comme l’Albatros, mais avec une devanture sapin et une lanterne verte sur la façade. Plus elles s’éloignait de la rue principale, plus les maisons et boutiques étaient espacées les unes des autres si bien qu’on ne voyait pas tout de suite qu’il s’agissait d’une impasse. Le sol se faisait plus marécageux et la rivière était tout près. Le chemin boueux devint un ponton finalement et alors qu’elles pensaient s’être perdues, elles purent distinguer un vieil écriteau vert annonçant «Vert Lanterne» que ni l’une ni l’autre ne purent lire de toute évidence, d’où pendait une malheureuse lanterne qui avait dû être verte autrefois, mais arborait les couleurs marronnasses de la rouille. Un établissement miteux en somme, mais qui subsistait. Des soldats s’y étaient arrêtés à leur retour de l’extérieur, certains choppe à la main, d’autres se nettoyaient les pieds dans l’eau de la rivière. Au bout de l’impasse, se dressait une maison tortueuse qui si elle avait été abandonnée voilà quelques mois seulement n’avait été entretenu que par la misère et le mauvais temps. Les deux femmes ralentirent peu à peu et stoppèrent leur marche devant la baraque. Dumas ressentait-elle aussi ce sentiment de malaise, comme si quelque chose d’indicible s’était produit ici ? Elles échangèrent un regard qui en disait long, Eurybia comprit qu’il s’agissait de l’ancienne résidence des Lapointe.

«Ne restons pas là, prenons ce qu’il nous faut et fichons le camp, je n’aime pas cette endroit.»

La forgeronne s’avança prudemment et toqua par pur précaution. N’importe qui aurait pu s’installer dans la demeure abandonnée. La porte d’entrée ne tenait sur ses gonds que par le miracle des Trois. On eut dit qu’elle avait été fracassée, rafistolée avec quelques bout de planches et posée sur les attaches rouillée par principe. Pas de réponse, elle poussa la porte qui les accueillit avec un horrible grincement. L’endroit était poussiéreux et sentait la moisissure. La rivière tout près provoquait le pourrissement prématuré des planches, c’était un vrai bazar. Des objets étranges s’empilaient par tas, des cages à oiseau, des aquariums, des bocaux, des piles de livres - Murielle savait-elle lire ? - une poêle couverte de suie, des marmites, des crochets de boucher, une énorme planche à découper tâchée, assez longue pour y découper un porc, et des couteaux de toutes taille.

« Vous êtes sûr qu’on est bien chez elle ?..»

Le capharnaüm était répugnant, mais certain détails laissaient à penser que quelqu’un le visitait régulièrement. Comme ce panier rempli de tubercules qui n’avaient pas encore germés par exemple, ou des traces de mains, ou de mouvement dans la poussière déposée sur certains objets.

«Qu’est-ce qu’on cherche déjà ?»
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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyLun 29 Juil 2019 - 18:07
- "Mon grand"? Voyons donc, elle n'a jamais vu de femme bien bâtie cette dame? Mathilde avait levé les yeux au ciel. Les gens de la ville avait cette fâcheuse tendance à confirmer les idées préconçues qu'elle avait d'eux, à chacune de ses visites. Là encore, une femme se devait d'être frêle et fragile, comme toutes celles qui passaient leur vie à assumer les corvées de la maison sans jamais travailler comme on le faisait, dans une ferme ou dans une forge. Les corvées quotidiennes n'avaient pas le don de bâtir une femme comme les champs ou le métal pouvaient le faire. Or, à choisir, Mathilde préférait être un peu plus robuste, un peu moins frêle, que les femmes qui ne s'employaient qu'à faire tourner la maisonnée en attendant leur premier enfant.

Suivant les indications de la charmante citadine, les deux femmes continuèrent leur marche jusqu’à arriver à la source des émanations pestilentielles : la poissonnerie, dont les étales grouillaient de poissons exhalant un fumet qui indiquait que déjà, la décomposition s’était amorcée et qu’il faudrait l’arrêter net en salant les prises ou en les faisant frire, sous peine de devoir les livrer au nuage de mouches qui s’agglutinaient sur les écailles luisantes. Mathilde ne put s’empêcher de grimacer et, contrairement à sa compagne, se couvrit la bouche et le nez pour ne pas avoir à réprimer un vomissement soudain. Tudieu! Que faisait-elle là? Pourquoi n’était-elle pas restée au Labret, là où les maisons ne sont pas collées les unes aux autres, là où le passant se promène en admirant l’horizon lointain, là où les odeurs ne restent pas captives de ruelles tortueuses? Sois maudite, Murielle!

Fuyant toutes deux l’odeur insupportable, elles s’engagèrent dans une ruelle pour tenter d’y repérer la taverne à la lanterne verte, qui avait certainement changé de couleur depuis le temps. Eurybia passa la première, obligeant la foule, par sa seule allure, à s’écarter sur son passage. Mathilde était sur ses talons, jetant un œil aux alentours pour retrouver ses repères. Elle finit par avancer sur la pointe des pieds pour tendre le bras en direction d’une taverne à l’allure minable. La devanture était usée par le temps et la pauvreté de ses propriétaires, mais elle ne dénotait pas de celle des autres bâtiments aux alentours. En s’éloignant de l’artère principales, les deux compagnes s’étaient également éloignées de la pauvreté pour arriver dans la misère du monde.

Mathilde ne reconnaissait pas ce quartier qui, autrefois, était une joyeuse petite bourgade à l’intérieur de l’immense Marbrume. Les tavernes résonnaient des rires gras des clients et des musiques des artistes qui colportaient rumeurs et épopées aux oreilles du peuple. Les enfants jouaient dans les rues tandis que leurs mères se rassemblaient tantôt pour filer la laine, tantôt pour partager une corvée et terminer ainsi plus rapidement leur ouvrage. Le soir, les pères de famille rentraient, fourbus, pour profiter d’une soirée dans la chaleur de leur foyer. Souvent, on les voyait occuper une journée de congé en réparant les maisons qui, bien que modestes, reflétaient la fierté de ceux qui les occupaient. Mais la fierté n’était plus. La joyeuse petite bourgade ne résonnait plus des rires des enfants. Les mères partageaient leur veuvage et leur misère, tandis que les rares hommes encore présents s’agglutinaient dans la taverne pour y noyer leur désarroi et leur maigre revenu. La rivière avait grossi, au point de faire grimper le taux d’humidité ambiant, ce qui avait fini par affecter les maisons bâties en bois et en torchis. Mal entretenues, certaines menaçaient de s’effondrer tandis que d’autres avaient été renforcées pour abriter les derniers résistants, ceux qui n’attendaient pas la mort mais qui n’avaient les moyens de vivre ailleurs, à l’intérieur des murs protecteurs de la ville.

Mathilde s’arrêta au bout de l’impasse, devant cette maison qu’elle avait connue paisible et vivante. Le toit menaçait maintenant de s’effondrer par endroits. Certains volets ne tenaient plus aux fenêtres qu’ils protégeaient autrefois. Le joli massif de fleurs qui ornait la façade, jadis, avait cédé la place à un buisson d’épines menaçantes. La porte ne tenait que par la peur. L’espace d’un instant, Mathilde eut envie de renoncer à sa mission et de tourner les talons. Son amie était tombée dans l’hérésie, elle ne méritait pas qu’on lui rende un autre service que celui de la livrer au Temple. Et pourtant… La fermière continuait de croire que ces quelques biens feraient revenir le bon qui résidait dans le cœur de celle qui ne serait plus jamais son amie, et lui permettrait de se repentir et d’affronter, avec courage, le jugement des Trois.

- C’est ici. Quelle misère… se contenta-t-elle de dire. La fermière saisit le malaise de sa compagne, qui la regarda en espérant, peut-être, qu’elle lui dise qu’il s’agissait d’une blague et qu’elles avaient dépassé depuis longtemps la maison des Lapointe. Son regard, silencieux, ne mentait pas.

Je n’aime pas cet endroit. Qui l’aimerait, qui aimerait entrer dans ce taudis pour y retrouver ce qui devait avoir été emporté depuis longtemps. La porte avait été défoncée, sans doute par des miséreux cherchant un abri pour une ou deux nuits, le temps de trouver mieux. S’étaient-ils servis dans les affaires de Murielle? Probablement. Mathilde ne comprenait toujours pas comment elle avait pu partir sans emmener ce qui lui était essentiel. La fermière entra à la suite d’Eurybia, et ne ferma pas la porte derrière elles, comme si elle voulait se ménager la possibilité d’une sortie en catastrophe.

Le regard de Mathilde mit un temps à s’habituer à la pénombre de la chaumière, où la lumière ne pénétrait que par la porte laissée ouverte et les rares fenêtres abandonnées par leurs volets protecteurs. L’odeur qui planait dans l’air était clairement celle des endroits abandonnés au temps qui passe. Elle distingua l'amoncellement d’objets divers dont les formes se précisaient à mesure que ses yeux s’habituèrent au manque de lumière. Des cages, des bocaux, des livres… Mathilde fronça les sourcils. Ni Murielle ni Eugène ne savaient lire, à son souvenir. Lentement, elle fit le tour de la pièce, détaillant les couteaux, la planche encore tachée, les crochets suspendus et les marmites qui, contrairement à ce à quoi elle s’attendait, n’étaient pas couvertes de poussière.

- On est chez elle, mais… quelqu’un s’est approprié l’endroit. Murielle ne sait pas lire. Et elle n’a jamais eu de cages, pas plus qu’elle n’a découpé le moindre animal dans sa vie. Trop sensible, elle ne supporte pas vraiment la vue du sang.

Mathilde déglutit. La maison était silencieuse. L’occupant avait dû sortir pour un moment. Elle regarda le manteau de la cheminée, sur lequel avaient été gravés des signes étranges. Elle ne les reverrait que bien plus tard, en plein milieu d’un bain de sang quelque part autour de la place des Pendus et, dans la panique, ne ferait même pas le lien. L’ambiance lui paraissent malsaine. Que faisaient-elles là? Il fallait partir au plus vite.

- On cherche son alliance, son ruban, la boite en bois et la robe de sa fille. Je… j’aime pas du tout cet endroit. On cherche par principe, on trouve ce qu’on peut mais il est hors de question qu’on s’attarde. C’est pas net. Cet endroit n’est pas net. Elle souffla pour chasser la sensation d’angoisse qui montait en elle. Je monte voir si la chambre existe encore et si je peux trouver quelque chose. Y a une pièce en arrière qui faisait office de chambre secondaire, pour l’enfant et parfois pour moi. N’y allez pas sans lumière.

Se séparer la tâche pour aller plus vite semblait être une bonne idée. Pourtant, tandis qu’elle montait l’échelle, Mathilde se prit à espérer que l’intrus ne se soit pas simplement endormi à l’étage où elle le surprendrait. Elle dégaina lentement sa dague pour être parée à cette éventualité. Comme bien des maisons modestes, l’étage était séparé en deux pièces par une cloison improvisée par un drap, sali par le temps et couvert de taches de moisissure. Les paillasses étaient vides et paraissaient ne pas avoir été occupées dernièrement, pour le plus grand soulagement de la fermière qui se redressa complètement pour fouiller du côté du lit des Lapointe. Qu’avait-elle dit? A côté du lit… Mathilde ouvrit le coffre où avaient du être stockées les robes de la femme. Il était vide. Peut-être l’avait-elle vidé avant de partir précipitamment. Si la boite s’y trouvait, elle avait peut-être glissé de la pile de vêtements pour tomber sur le sol… Mathilde l’inspecta rapidement, mais rien, hormis de la poussière et ses propres traces de pas. Elle soupira… et finit par tirer le coffre vers elle. C’est là qu’elle la repéra. La boite avait glissé entre le coffre et le mur. Couverte d’une épaisse couche de poussière, elle était restée cachée à l’abri des voleurs. Mathilde la saisit et souffla dessus avant de l’ouvrir.

- J’ai la boite! cria-t-elle à Eurybia, restée en bas. Elle se figea. Elle avait crié dans une maison qui cachait peut-être quelqu’un prêt à leur sauter dessus. Confirmant ses craintes, c’est une voix d’homme qui lui répondit, juste dans son dos.

- Et qu’allez-vous faire de cette boite?


***

De piécette en réponses, Gaston Deschamps avait poursuivi sa quête de promotion en remontant la piste de la veuve Lapointe, jusqu’à croiser l’une de ses anciennes voisines. Jouant de ses charmes, il avait flatté la vieille fille, dont le fiancé était mort deux jours avant leurs épousailles. Guenièvre n’avait pas pu résister à ce beau brun ténébreux, nimbé d’une aura de mystère.

C’est que Guenièvre n’avait pas été gâtée par la nature. Très jeune, elle avait miraculeusement survécu à la vérole, qui avait laissé des traces sur son visage, la défigurant au point que pas un homme ne se retourne sur elle hormis pour se moquer ouvertement. Puis, arrivée à l’âge de vingt ans, la bosse familiale que ses ancêtres arboraient avait commencé à prendre forme dans le haut de son dos, modifiant sa posture pour la voûter légèrement. Elle avait tenté de compenser son allure en s’instruisant sur les choses de la vie. Elle avait réussi à se faire engager comme domestique dans une petite maison bourgeoise, dont elle ne quittait pas les cuisines afin que sa laideur ne dérangeât pas les maîtres de la maisonnée. Néanmoins, elle avait appris à mettre en valeur la finesse de son esprit, ce qui avait fait d’elle une femme dont on s’arrachait la compagnie… jusqu’à ce que le valet de monsieur fasse sa demande, et qu’elle ne lui réservât ses meilleurs mots. Très amoureuse, elle avait pleuré la mort de son fiancé, emporté par un banal rhume de poitrine, pendant des semaines.

Quand Gaston l’avait croisée, dans la rue, elle avait cru voir son fiancé revenu d’entre les morts… jusqu’à ce qu’il approche, et qu’elle se rende compte qu’il était bien plus beau. Deschamps avait naturellement saisi la lueur particulière qui avait animé le regard de Guenièvre dès qu’il avait ouvert la bouche, et en avait joué pour lui subtiliser des renseignements sans avoir à débourser la moindre pièce. Lui proposant son bras, il l’avait emmenée en promenade jusqu’à son quartier d’autrefois, où elle avait côtoyé la pauvre veuve Lapointe. Arrivé devant la maison, il avait feint d’entendre des bruits anormaux pour justifier une intervention du milicien qu’il était. Il avait alors suggéré à Guenièvre de l’attendre dans la charmante taverne à la lanterne qu’ils venaient de dépasser, lui glissant quelques pièces pour qu’elle leur commande un rafraîchissement qu’il ne prendrait jamais… car il ne comptait pas l’y rejoindre.

Passant la porte, laissée ouverte, il s’était laissé guider par les craquements du plancher de l’étage pour grimper à l’échelle et surprendre la femme qui semblait avoir emménagé dans la bâtisse abandonnée depuis longtemps. Probablement une sorcière, compte tenu des livres, des cages à oiseau et des marmites qu’il avait vu, en bas. Une fabricante de potions de mort, une lanceuse de malédictions, une menace pour les honnêtes gens… et une magnifique prise qui le conduirait tout droit vers une promotion.

***

Surprise, Mathilde se retourna pour faire face à l’inconnu, pointant sa dague vers lui, le cœur battant.

- N’approchez pas de moi! Qu’est-ce que vous faites ici?

Merde! Le nouvel occupant, ou bien un milicien qui tire des conclusions hâtives? Par chance, Mathilde n'était pas seule. Eurybia pourrait corroborer ses déclarations, au besoin, et témoigner de sa bonne foi.
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Eurybia PyritForgeronne
Eurybia Pyrit



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MessageSujet: Re: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyDim 18 Aoû 2019 - 0:15


Se séparer. Dans une autre dimension, les amateurs de film d’horreur le savent : il ne faut jamais se séparer. Mais à cet instant, les deux labrétiennes le savent : se séparer c’est fouiller plus vite, et gagner du temps. Si les lieux semblent avoir été investi par un amateur de vieilles reliques, aucun bruit ne dévoila une autre présence que celle des deux femmes. Mathilde Dumas choisit de fouiller les chambres d’abord, une décision stratégique étant donné qu’elles cherchaient de petits objets et souvenirs. Où met-on nos secrets, nos souvenirs ? A l’abri de la curiosité des autres. Dans quelles pièces reçoit-on rarement les invités ? Les chambres. La décision tombait sous le sens, et la grande blonde se contenta d’acquiescer, laissant l’inspection de l’étage aux bons soins de la fermière tandis qu’elle se chargerait de la chambre du rez-de-chaussée. Il fallait trouver de quoi s’éclairer avant de s’aventurer dans la pièce du fond. Les yeux de la forgeronne coururent dans le capharnaüm, le long des bibelots, des piles de toutes sortes de choses qui s’entassaient depuis trop longtemps. L’odeur du cuivre était forte, poisseuse, dominante. Elle provenait sans doute du plan de travail couvert de sang coagulé. Son nez se retroussa de dégoût. Qui voudrait cuisiner de la viande dans un pareil endroit ? Le manque d’hygiène était flagrant, consommer une viande passée par ici, c’était un coup à se vider par tous les orifices avant de crever, n’importe quel crasseux s’y refuserait. La machette avec laquelle on faisait le sale boulot était là, bien présente, gisant sur son flanc. Qui a osé te laisser dans cet état... Sale elle-aussi, et rouillée. Si les objets avaient une âme, s’ils avaient une voix, la lame lui aurait crié de partir, de partir tout de suite, qu’ils étaient là, sous du plancher, à la cave qu’ils étaient trop nombreux pour elle, et que le sang qu’ils lui faisaient boire n’était celui d’aucun animal.

Dommage que les objets ne parlent pas. A ce stade, le clandestin s’affublait d’une étrange panoplie de qualificatifs : un boucher de caniveaux alphabétisé. Ici ? Dans les faubourgs ? Dans une maison abandonnée. Elle fit un effort pour s’éloigner de l’arme à l’agonie, il fallait rester concentrer. De quoi s’éclairer. C’est naturellement près du petit four de la cuisine qu’elle trouva un briquet d’amadou. Restait à trouver de quoi tenir la flamme. Son regard se posa sur la table. Elle avait été détruite en son milieu, comme si quelqu’un s’était jeté dessus de tout son poids, mu par une faim inhumaine et avide. Combien de temps les restes de la voisine avaient-ils attendu avant qu’on les cueille comme des fruits murs ? Suffisamment pour que le bois noircissent en absorbant le sang. Le plancher aussi avait noirci. Bien sûr, la najacienne n’avait aucune idée de la scène qui avait pu se jouer ici. Ni de l’histoire d’Eugène devenu fangeux, ni de la voisine que Murielle avait laissé à son sort pour s’enfuir. Pour Eurybia il ne s’agissait là que d’une table rafistolée et d’un plancher en mauvais état. En observant l’endroit, de petits éléments faisaient tâche, comme s’ils avaient été rajoutés récemment. Le mobilier pourrissait lentement, sauf ces trois planches fixées au mur. La poussière qui les couvrait n’était pas aussi dense qu’ailleurs. Derrière plusieurs bouteilles et flacons, un amas plus grisâtre que blanc attira l’attention d’Eurybia. Des bouts de bougies semblaient avoir été fondues ensemble. Elle passa la main pour s’en saisir habilement, mais la cire avait coulé jusque sur la planche, et la forgeronne fut surprise lorsqu’elle dut tirer sur la bougie pour la détacher de son support. Il lui sembla entendre du bruit à l’étage, quelqu’un qui déplaçait quelque chose, elle interrompit son geste un instant. Plus rien, elle tira avec force. C’est alors qu’elle constata avec horreur que la planche n’avait jamais été fixée au mur. On s’était contenté la poser sur les affixes. En s’emparant de sa torche de fortune, Eurybia avait fait soulevé l’étagère quelques secondes. Lorsque la cire céda, la planche retomba, se débarrassant de tous les objets qui l’encombrait jusqu’ici. Les bocaux, les bouteilles, et autres contenants virevoltèrent dans les airs avant de s’écraser au sol dans un grand fracas.

Suivi d’un silence de mort.

Puis de murmures étranges.

Eurybia fronça des sourcils. Mathilde avait-elle découvert quelque chose ? Elle finirait bien par redescendre lui montrer ses trouvailles. Si elle avait été confrontée à un problème sérieux, elle aurait donné plus de voix. La blonde alluma la mèche de ce qui allait devenir sa source de lumière et s’avança vers la pièce sombre du fond. La faible lueur projetait des ombres angoissantes sur les murs, car dans cette pièce aussi, s’entassait un foutoir qu’on aurait jamais soupçonné. Contre un mur, des piles d’objets avaient été entassées et recouvertes d’un draps. Aux quatre coins de la pièce, la moisissure avait entamé les murs, respirer ici était une épreuve. Cette pièce avait-elle était une chambre d’enfant ? C’était sinistre. L’alliance, le ruban, la boite et la robe. Comment s’y retrouver dans un tel foutoir ? Elle entreprit de traverser la pièces à grandes enjambées prudentes. A la première, quelques chose détala entre ses pieds. A la deuxième, plusieurs tâches sombres s’écartèrent fuyant la lumière irritante. Et l’odeur. Ca puait, ça empestait la charogne. La forgeronne serra les dents en grognant de dégoût. Doux Serus. Même la vermine crèvent dans ce foutoir. De toute évidence, le clandestin n’était pas arrivé seul. Cafards, et rats grouillaient dans cette pièce. N’eut-elle pas porté de bottes, elle aurait renoncé à son projet par crainte d’une morsure de rongeur. Elle continua donc ses enjambées en ignorant la vie qui grouillait sous ses pas, priant les Trois que rien ne lui grimpe dessus. Arrivée à la fenêtre, elle ouvrit les volets probablement scellés depuis la mort du mari Lapointe. La lumière qui tomba alors sur la pièce n’était pas pour rassurer la blonde.

Là. C’était là qu’il était mort, dans le noir, seul. Là c’était là qu’il s’était relevé, dans le noir, seul pour l’éternité. Quelque chose avait griffé l’encadrement de la porte, avant de l’arracher sans doute. Ne restait plus que les gonds rouillés. Un frisson parcourut son échine. Le tissus qui recouvrait la pile contre le mur était tâché de parte et d’autres de sombres auréoles. Il y avait eu une paillasse, elle avait été relevée et poussée le long du mur. Des crochets pendaient du plafond avec des attaches. Le sol était constellé d’éclaboussures foncées. Quelques seaux traînaient à même le sol. L’intérieur semblait avoir été nettoyé, mais pas l’extérieur. Le liquide avait dégouliné en débordant. Alors qu’elle prenait conscience de ce qu’elle voyait, une violente douleur la plia en deux avant que son repas du matin ne s’étale sur le sol. Et c’est là à hauteur de genou, alors qu’elle s’essuyait les lèvres d’un revers de manche qu’elle la vit.

Une petite main potelée. Inerte. Dépassant du draps. Comment un enfant pouvait s’endormir dans un endroit pareil ? Elle ne comprenait pas, elle refusait de comprendre. C’était souvent comme ça qu’elle faisait face à l’horreur, par le dénie pur et simple. Ses yeux lui mentait, son imagination débordait, ce n’était qu’un enfant endormi. Caché sous un draps. Elle s’approcha doucement.

«Sors de là mon petit, tu n’as rien à craindre je...»

En relevant le tissus, son sang ne fit qu’un tour, et elle sentit la bile remonter à nouveau dans sa gorge serrée. A chaque fois qu’elle sortait des remparts protecteurs, elle voyait des horreurs sans nom, mais le cadavre d’un enfant, y avait-il pire ? Bien sûr qu’il y avait pire. Il y a toujours pire. Elle fit un pas en arrière manqua de trébucher sur quelque chose, sa mâchoire se crispa étouffant un cri, à la vue des autres. Oui, les autres. Plusieurs corps, exsangues, aux artères sectionnées. Comme vidés de leur sang. Cauchemar. Elle devait être en plein cauchemar. Son souffle et son rythme cardiaque s’étaient accélérés, une sueur froide coulait le long de son dos.

« Alliance... Ruban.. Boîte... Robe...» répéta-t-elle, comme une incantation magique qui occuperait son esprit loin de cet réalité écœurante. Elle pivota sur elle-même, le regard dans le vague. Dans un coin de la chambre, un petit berceau au voile moisi était couvert de toiles d’araignées. « Par la grâce des Trois...» supplia-t-elle. Pas à un bébé. Pas à un bébé. Lorsqu’elle fut suffisamment proche, elle constata qu’il ne contenait aucun corps à son plus grand soulagement, seulement une poupée munie d’une petite robe. Etait-ce la robe dont la veuve Lapointe avait parlé ? Il n’y en avait pas tant que ça. Eurybia décida de prendre carrément la poupée. Un petit ruban était nouée à un de ses bras. Elles devaient sortir d’ici. Elles devaient sortir. La forgeronne se tourna avec précipitation vers la porte. Devant la planche à découpée sanglante elle comprenait, tout prenait sens, et aucun déni n’était possible. Tout commençait à tourner autour d’Eurybia. Quelqu’un utilisait cet endroit pour abattre des êtres humains. Murielle le savait-elle ? Les avait-elle mené dans un guet-apens ?

Soudain dans l’encadrement de la porte, deux hommes. Celui de droite faisait sa taille, il avait un nez épaté, probablement cassé plusieurs fois, des sourcils broussailleux et une barbe négligée, il tenait une hache entre ses mains. L’autre était trapu, il avait le crâne complètement lisse et une moustache qui retombait comme un rideaux sur ses lèvres épaisses. Elle serra la poupée contre elle, comme pour la protéger. D’abord la chambre aux exsangues. Maintenant les dépeceurs. La tête lui tournait, fiévreuse.

« T’es un peu vieille pour jouer à la poupée tu crois pas ?» ricana le barbu tandis que l’autre avançait dangereusement pour se saisir de la machette. Et tout un apprentissage refit surface.

« Et pourquoi un forg’ron devrait savoir s’battre ? C’a pas de sens. C’une perte de temps. J’aurais un mari pour m’défendre !» gémit-elle alors qu’on la sortait du lit une fois de plus, une fois de trop.

« Et quel mari je te prie ? Tu parles comme une charretière, tu n’as aucune manière ! Commence déjà par soigner les mots qui sortent de ta bouche, jeune fille. Quand tu seras mariée, tu feras comme bon te semble, sous notre toit, tu fais ce qu’on te dit. Cid t’attend. » rétorqua Aline d’un ton ferme. De sa mère, la petite Pyrit n’avait que ses yeux marron clair et son caractère bien trempé. Gérer les commandes, négocier, faire des alliances commerciales, tout ça nécessité un certain charisme et une poigne qui correspondait parfaitement à son caractère. C’était donc avec joie que Geralt avait laissé à son épouse les bons soins de gérer le commerce familiale. Aline espérait que sa fille trouve un homme qui puisse l’affranchir de la gestion de son commerce, car de toute évidence, Eurybia s’intéressait beaucoup plus à la forge qu’au cahier des comptes.

« Pff. Ouais génial, c’est l'fondeur qui m’entraîne maintenant.» grommela-t-elle en aplatissant un épi. Elle avait du mal à supporter la présence de ce garçon qui accaparait tout le temps de sa mère et de son grand-père. C’était à elle que reviendrait la forge, ne devrait-on pas lui enseigner la métallurgie à elle ? Et maintenant elle devrait subir sa présence aux entraînements du matin, comme s’il avait quoi que ce soit à lui apprendre lui. Aline s’adossa au mur tandis que sa fille se baignait le visage et s’habillait.

« Oui, le fondeur oui. Je croyais que tu en avais assez de rester à la forge pendant que ton père rendait visite aux Tourbechai ?» glissa-t-elle un demi sourire en coin. « Peut-être que si tu savais assurer ta propre sécurité...

_ Vous me laisserez-y aller ? articula-t-elle. Elle avait beau avoir treize ans, son visage était toujours enfantin, et son regard alors qu’elle faisait un effort de prononciation pour amadouer sa génitrice était empli de malice.

_ Toi et Cid, oui.»

Eurybia croisa les bras. Avec son air renfrogné, elle faisait vraiment penser à Geralt lorsqu’elle lui annonçait qu’il devait éteindre les haut-fourneaux pour laisser les saisonniers ramoner les conduits. Bien sûr qu’il n’allait pas la laisser y aller seule, à quoi pensait-elle. Petite, elle accompagnait souvent son père jusqu’à Usson avant l’arrivée du printemps. C’était l’occasion de voir les très nombreux enfants Tourbechai. Pour elle qui était fille unique, c’était la découverte d’un tout autre mode de vie, beaucoup plus modeste, mais bien plus joyeux et chaleureux lorsqu’on a des complices. Maintenant qu’elle forgeait, il était bien plus pratique de la laisser à l’atelier pour assurer les commandes en l’absence de Geralt. L’idée de pouvoir y retourner de nouveau la réjouissait, mais devoir se coltiner l’apprenti métallurgiste ne l’enchantait pas du tout.

« Arrête de faire ta tête de mule, ça serait un comble pour une charretière...» rajouta sa mère d’un ton moqueur avant de tourner les talons pour la laisser se préparer.

L’apprenti métallurgiste l’attendait dehors dans la fraîcheur de l’aube, il n’était vêtu que d’une chemise de lin et d’un pantalon en toile marron. C’était bien peu alors que le gel recouvrait l’herbe. Il n’avait que seize ans, pourtant il dépassait déjà Geralt Pyrit en hauteur. Ses cheveux commençaient à être longs et tombaient par mèches devant ses yeux sombres. Eurybia leva les yeux vers le ciel, il avait la touche d’un roublard, en avait-il seulement conscience ? C’était d’un ridicule. Son sourire goguenard au dessus de sa barbe minuscule - de son bouc quoi - achevait d’irriter la jeune fille par sa simple présence.

« Qu’est-ce que tu regardes ? » lança-t-elle en prononçant chaque mot, tout en conservant le ton mélodieux d’une poissonnière. Il avait sûrement dû entendre toute la conversation, grand bien lui fasse, et pourvu qu’il n’ai pas loupé la partie qui le concernait, cet abruti.

« Rien, je vois que tu as abandonné ton projet d’hiberner jusqu’au printemps... » pour toute réponse, elle lui fit une grimace. Elle n’avait pas goût à ses plaisanterie dès le matin, surtout pas à l’aube, surtout pas avant d’avoir déjeuner. D’un geste il l’incita à se mettre en garde ce qu’elle fit avec nonchalance. A peine avait-elle mis son bâton en garde qu’il se jeta sur elle...
Mais son lourd marteau de guerre lui était encore dans son dos. La lame dégoûtante tranchait l’air droit vers elle. L’action se passait à toute vitesse, mais esprit le vit au ralenti. Quel est l’intérêt d’avoir un tel marteau sur soi «au cas où» si on ne s’en arme pas en territoire hostile ? Quel intérêt d’avoir sur soi une telle arme si on est incapable de la saisir à temps ? Elle n’eut que le temps de faire un pas de côté pour éviter la lame et déjà, elle revenait vers elle, la forgeronne bondit à l’écart tournant autour de la table endommagée. Elle allait mourir. Et après elle la fermière allait mourir. Etait-elle seulement encore vivante ?

**
*

Une complice, Gaston ne s’était pas attendu à ça. Elle semblait avoir retourné toute la chambre à la recherche de quelque chose, apparemment de cette boîte. Que contenait-elle ? Il allait très bientôt le découvrir. Prise au dépourvu, la femme révéla son visage, et tandis qu’elle le menaçait de sa dague, il prit quelques secondes pour le mémoriser. Un autre joli minois, ça il n’allait pas l’oublier pour sûr. Elle pointait une dague vers lui, ça lui décocha un sourire. Quelque chose de sauvage, pas une bonne femme de la ville celle-là. Pour toute réponse, il écarta les bras pour mettre en valeur son uniforme.

« Gaston Deschamps, coutillerie Leboucher, milice intérieure. Menacer un milicien avec une arme n’est pas très avisé ma dame.» suggéra-t-il d’un ton condescendant. Il croisa les bras en la fixant de ses yeux bruns cernés. Loin d’être intimidé, il était même plutôt amusé. «Vous vous êtes introduit dans une propriété qui n’est pas la vôtre...» Il comptait les infractions sur ses doigts au fur-et-à-mesure qu’il les énumérait. «Etant donné l’état de la porte, je peux facilement vous mettre l’effraction sur le dos... Et vous êtes prise la main dans le sac pendant votre cambriolage... C’est alors que vous menacez un milicien, représentant du Duc Sigfroi de Sylvrur... » Il agita ses quatre doigts avec un air mitigé comme s’il s’apprêtait à dire autre chose. Maintenant qu’elle était au courant de sa position, il pouvait tout simplement exiger ce qu’il voulait. En réalité il pouvait exiger beaucoup trop de chose. Son regard couru le long des formes de la mignonne. Il pouvait la pousser sur le lit, il était plus grand, plus fort, il pouvait tout prendre, et lui apprendre les bonnes manières. Mais il n’était pas là pour ça, des mignonnettes, il y en avait plein les quais. C’est alors qu’il se saisit du poignet de Mathilde pour écarter l’arme et profita de la surprise pour se saisir quasi immédiatement de la boîte qu’elle tenait dans son autre main. Bizarrement elle ne semblait pas tant tenir à son butin, c’était à croire qu’elle le lui aurait remis s’il avait tout simplement demandé. Pas le temps. Il relâcha son emprise.

« Je vous prie de m’excuser, j’ai très peu de patience lorsqu’on me menace. » fit-il sur un ton narquois. « Qui êtes-vous et que faites-vous ici ? Et qui est votre acolyte ?» demanda-t-il en observant la petite boîte. Il finit par l’ouvrir pour découvrir, surprise, de la poussière et un vieil anneau en ferraille sans aucune valeur. La confusion défigura le milicien. Tadaaaam, Eugène n’avait plus toute sa splendeur après s’être changé en fangeux, s’être fait éventré, puis incinéré dans le bûcher commun. Murielle Lapointe avait récupéré un peu de ses cendres pour faire son deuil. Enfin, c’était ce qu’elle croyait, en réalité, dans cette boîte il y avait un petit peu d’Eugène, un peu de la voisine qu’il avait bouffé, un peu du vieux du quartier d’à côté qui avait canné lui aussi, un peu de ce malade du temple, qui n’avait pas survécu à ses blessures... Bref, un échantillon des défunts du moment quoi. Plusieurs questions taraudaient Gaston à cet instant : les cendres de qui étaient-ce là, pourquoi cette femme était venue pour les voler, et.... Un boucan incroyable retentit au rez-de-chaussée, le bruit de quelqu’un qui renverse une étagère.

« Mais qu’est-ce que ??!»

L’excitation du moment, celle où il prenait une petite voleuse la main dans le sac, où trouvait le poison du crime dans la boîte, et résolvait officiellement l’affaire la pointe, était révolue. Il avait été idiot. Il était venu ici sans renfort, mal reposé, il n’avait même pas pris la peine de faire le tour du rez-de-chaussée avant de monter. Combien étaient-ils ici ? Une femme, ça se gère, mais si elle était venus avec d’autres ? S’ils étaient beaucoup plus nombreux qu’il ne l’avait cru. Il dégaina son épée et ferma la porte, et la verrouilla. Il aurait des réponses, puis une fois qu’il aurait éclairci la situation, il sécuriserait le périmètre.

« ATTRAPEZ-LA ABRUTIS, VOUS VOYEZ BIEN QUE CE N’EST QU’UNE FEMME! » s’écria une voix d’un troisième homme qui glissait dangereusement dans les aigus, exaspéré par ce qu’il voyait. Les deux dépeceurs avait décidé de contourner la table chacun d’un côté pour acculer leur victime.

« SUCEURS DE FANGE ! » s’écria quelqu’un dans un rugissement bestial.

« A combien êtes-vous venus ?» demanda-t-il à mi-voix, l’épaule contre la porte, analysant les sons qui lui parvenaient. Il s’était probablement mis dans une sacrée merde, et tout seul.
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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyMar 10 Sep 2019 - 16:49
Le souffle coupé, Mathilde dégaina lentement la dague qu’elle portait à la taille et resta dos à l’inconnu...

Deux longues secondes... le cœur battant si fort qu’il menaçait d’exploser à travers sa poitrine. En une fraction de seconde, le malaise suscité par les étrangetés de cette maison qui aurait dû être abandonnée avait cédé la place à la peur. Par les Trois! L’occupant était revenu et allait l’égorger proprement avec l’un des couteaux qu’elle avait vus en bas. Elle le vit très nettement avancer en tenant fermement son énorme couteau de boucher encore imbibé du sang de sa dernière victime. Il planterait la lame, aussi froide que son regard, dans son ventre, juste à côté du nombril. Un premier geste pour la faire s'écrouler sur le sol. Il se pencherait ensuite pour lui poser une ou deux questions, auxquelles elle répondrait en pleurant de douleur, pliée en deux dans la poussière, regardant la vie fuir son corps et tacher de rouge le plancher de bois. Puis il l'égorgerait. Une fois saignée, il la traînerait sur la table, en bas, et la débiterait en morceaux pour l'offrir au Quatrième. Oui, tout était très clair maintenant. La maison abandonnée était une parfaite cachette discrète ; les livres, les outils, les taches, le sang, les marques sur le manteau de la cheminée étaient autant de preuves qui indiquaient que Murielle avait cédé sa demeure à des monstres qui y pratiquaient maintenant une sorcellerie destinée à leur dieu. Le Quatrième.

Son estomac se contracta à cette pensée. Comment pouvait-on remettre sa vie et sa destinée entre les mains d’une fausse divinité qui appelait le sang? Comment Murielle avait-elle pu s’embrigader dans cette histoire? Aurait-elle seulement la chance de lui poser la question… Mathilde pensa à Eurybia, restée en bas. Pas un son, pas un souffle ne provenait de l’étage inférieur. Était-elle déjà morte? Impossible. Mathilde n’avait pas entendu le moindre bruit, aucune chute d’objet ou de corps inerte, pas même une exclamation… Mais elle n’avait pas non plus entendu l’homme monter à l’échelle. Mathilde prit son courage à deux mains. Il était temps d'affronter la réalité...

Deux longues secondes... Elle se retourna vivement, pointant la dague vers l’individu, les yeux grands ouverts, pour découvrir à qui appartenait la voix qui avait résonné derrière elle.

Gaston Deschamps, coutillerie Leboucher, milice intérieur. Mathilde poussa un soupir de soulagement et remercia intérieurement les Trois de ne pas la punir pour le manque total de prudence dont elle avait fait preuve. Un milicien, en uniforme, quelqu’un qui les protègerait si l’occupant devait revenir et que celui-ci se montrait hostile. Un homme grand, fort et entraîné, qui lui assurait une forme de sécurité. Quelle chance! Déjà, la tension qui animait son bras armé la quittait. La lame, qui pointait alors vers la gorge du milicien, perdit de la hauteur. Mais le dénommé Deschamps continuait de parler, énumérant les infractions commises par la fermière. Effraction, vol, menace envers l’autorité… bon sang, la liste était assez longue que pour effrayer Mathilde, qui s’était toujours mis un point d’honneur à respecter la loi et l’autorité.
Ta parole et ta réputation sont tes biens les plus précieux, Mathilde. Sois honnête en tout temps. Mène une bonne vie, suis les enseignements des Trois, fais ce qui te paraître être juste, et ne t’écarte jamais du droit chemin. Les recommandations de Marius Dumas lui paraissaient si justes en cet instant où elle faisait face à des accusations émises par un représentant du Duc. Elle déglutit. Elle n'avait pas vraiment mis la maison à sac. Ce n’était du moins pas de son fait, mais qui croirait-on? La poussière tombée au fil du temps, ou le milicien assermenté?

L’homme avançait vers elle, affirmant son autorité par les mots et par une allure débordant d’assurance. Elle eut envie de reculer, mais décréta que ce mouvement passerait pour un aveu silencieux. Mathilde ouvrit la bouche pour clamer son innocence, mais le regard qu’il coula sur sa silhouette lui glaça le sang. S’il pensait la contraindre sans qu’elle ne lui offre la moindre résistance, il se trompait. Un pas de plus, et il saisissait fermement son poignet pour écarter la menace de la lame. Complètement figée, et en proie à la panique, elle n'osa même pas se débattre, mais résista à ce réflexe, si prévisible, d’ouvrir la main pour lâcher sa dague. Il profita de l’effet de surprise pour prendre la boite que la fermière tenait dans l’autre main. Elle ne résista même pas. A quoi bon, elle aurait aggravé son cas, et son ancienne amie ne valait pas la peine qu'elle prenne le risque d'être pendue. Déjà il la relâchait, et Mathilde faisait un pas en arrière. Elle se fichait bien de la boite et de Murielle. Maintenant, tout ce qui comptait était de sortir de cette maison, et de ne pas avoir d'ennuis.

- Je... Il inspectait la boite. La petite boite de bois, fabriquée par Eugène, conservée durant tout ce temps. Elle avait échappé aux pilleurs, aux hérétiques et à la vermine, et alors qu'elle allait enfin retrouver sa propriétaire, le destin l'envoyait dans les mains d'un homme qui n'en saisirait pas la valeur sentimentale. Mathilde remarqua que l’air satisfait du milicien l'avait quitté. Il semblait maintenant nager dans l'incompréhension la plus totale. Cet instant de trouble était sans doute le bon moment pour parler, pour expliquer et être entendue. ... je suis une amie de Murielle, je viens seulement cherch... Le bruit d'une étagère se vidant avant de chuter l'interrompit. Mathilde écarquilla les yeux. Eurybia! Seule en bas, en théorie… Quelqu'un vous accompagne? souffla-t-elle à l’intention du milicien, visiblement tout aussi surpris qu’elle.

Non, à en juger par sa réaction. Mathilde serra sa dague, qui paraissait maintenant ridicule au regard de l'épée que Gaston venait de tirer de son fourreau. Elle allait faire un pas pour sortir mais déjà, Deschamps fermait la porte à double tour. Une voix aiguë monta à leurs oreilles. Puis le rugissement de la forgeronne, qui devait être en mauvaise position.

- Par les Trois, monsieur, mon amie est en danger! Il faut descendre! La voix de la fermière laissait transparaître la panique. Enfermée dans une chambre avec un homme qu’elle ne connaissait pas, armé de surcroît, Mathilde savait que son binôme était sa seule chance de s’en sortir. Or, Eurybia était en danger, probablement face à celui qui avait pris possession de la maison. Des bruits de chaises trainées sur le sol et des voix sourdes montèrent à leurs oreilles. L’intrus n’était pas seul. Combien de complices avait-il? Impossible de le savoir, il fallait descendre. Elle recula encore d’un pas. Gaston était solidement appuyé contre la porte, et elle n’avait aucune chance de le dégager de là. Mathilde était une femme des champs. Sa force s’était adaptée aux corvées quotidiennes, mais jamais elle n’avait eu à se battre contre un homme dont la vie tournait autour de cet art. Elle rangea sa dague, sans gestes brusques. Respirer. Se calmer. Examiner froidement la situation et réagir au meilleur de ses capacités.

- Nous sommes deux. Aidez-nous et je vous dirai tout, messire. Sinon… Vous menacez un milicien, représentant du Duc… Elle faisait exactement ce qu’il avait dit. En parlant, calmement, elle avait saisi l’arc qui jusqu’ici était à son dos et y avait encoché la flèche qu’elle pointait maintenant vers le milicien. Je ne suis pas votre ennemie, mais ma partenaire a besoin d’aide et je ne peux pas me permettre de la laisser en plan.

Gaston s’était retourné, dos à la porte, rouge de colère. Comment une femme pouvait-elle oser lui tenir tête? Pire, la gueuse le menaçait, et elle était confiante en plus. Sa position d’archère était assurée, sa voix était ferme, sa mâchoire détendue. Elle était sérieuse. Garce! Un cri étouffé leur parvint aux oreilles. Le dépeceur avait contourné la table, poussant les chaises d’une main pour dégager son passage, tenant fermement sa hache de l’autre. Sa voix, grave, appelait Eurybia à lui : « Viens par ici ma jolie, tu souffriras à peine ». De l’autre côté de la table, le moustachu avait saisi la machette pour approcher, lui aussi, de la forgeronne dont il se méfiait plus que son compère. C’est qu’elle était grande et bien bâtie, la bougresse, et qu’elle avait saisi son marteau, plutôt impressionnant. Mais ils étaient trois contre elle, alors que pourrait-il bien leur arriver?

« ATTRAPEZ-LA ABRUTIS! » cria le troisième, resté près de la porte, paré à fuir si d’aventure le colosse féminin prenait le dessus sur ses adversaires. Plus petit, plus frêle, le visage émacié, les yeux rentrés dans leurs orbites, il tenait un livre serré contre lui. Des pas se firent entendre. Par Etiol d’où venaient-ils? Elle n’était pas seule? Il jeta un œil du côté de l’étage. Oui, c’était de là qu’ils provenaient. « ELLE A DES COMPLICES EN HAUT ». La voix pouvait-elle être encore plus aigüe? Probablement pas. Les deux hommes se regardèrent. Le moustachu recula pour mieux voir l’ensemble de la situation, sans ouvrir le chemin à Eurybia, toujours coincée… A moins que… Renverser une chaise aurait été suffisant pour déranger le barbu dans son avancée, mais la forgeronne ne voulait pas le déranger. Elle voulait le neutraliser, et cette nuance ô combien importante l’avait conduite à agripper l’étagère à côté d’elle pour la faire basculer sur l’homme.

Gaston avait ouvert la porte, à contre-cœur. « Il nous faut un plan » avait-il dit. Nous n’avons pas le temps pour des plans avait-elle répondu. Vous passez en premier, je vous couvre. Ma partenaire est la blonde tatouée, ne la touchez pas. Il savait ce qu’il y avait à savoir, dans l’urgence. Mathilde était déterminée à utiliser ce milicien comme un bouclier, et à sortir Euryibia du mauvais pas dans lequel elle se trouvait. Dans lequel elles se trouvaient toutes les deux. Contre son gré, Gaston fut le premier à descendre et à rencontrer l’homme à la machette. Lâchant la boite, il se mit en garde, adoptant une attitude aussi intimidante que possible. Gaston Deschamps, coutillerie Leboucher, milice intérieur, plus personne ne bouge, ou alors… Ou alors quoi? Gaston s’interrompit. Que pouvait-il ajouter? Sinon je tire ajouta une voix féminine derrière lui. Mathilde descendait à son tour, arc bandé, prête à tirer sur le moustachu qui était le plus proche d’elle.

L’espace d’un instant, tout le monde s’immobilisa. Le barbu avait évité l’étagère, mais ne pouvait plus atteindre Eurybia. Il pouvait néanmoins passer par-dessus la table et venir en aide à son compère, ou bien s’occuper de la jolie blonde. Le moustachu ne se laissait visiblement pas déstabiliser par l’épée et l’uniforme, et se mettait lui aussi en garde, comptant sur son acolyte pour le couvrir d’une attaque provenant de la femme au marteau. Le troisième homme, lui, comprenait que la situation venait de se renverser. Ils n’étaient plus en position de force. Ceux qui étaient là avaient une force de frappe plus importante… la sagesse lui indiquait la meilleure chose à faire : fuir. Tant pis pour les autres, leur sang nourrirait Etiol, le Quatrième, que l’on abreuvait en vue de son retour.

La fermière avait le cœur battant. Elle n’avait jamais tué. Elle n’en aurait pas la force, elle le savait. Les bannis qui s’aventuraient chez elle repartaient toujours vivant, parfois avec une flèche plantée dans l’épaule ou dans la jambe. Mais jamais, au grand jamais, elle n’avait pris la vie d’un être humain… Parce que tuer quelqu’un revenait à aider la Fange à se rapprocher des vivants pour les engloutir. Son regard balayait la pièce. Eurybia ne semblait pas blessée, et prête à en découdre. Quelle chance qu’elle l’ait accompagnée. Si les Trois ne l’avaient pas guidée ce soir-là à la taverne où Murielle s’épanchait sur son chagrin, Mathilde aurait sans doute été seule, avec ces trois hérétiques et ce milicien qui ne comprenait rien à la situation.

Au beau milieu de ce capharnaüm, dans cette atmosphère tendue, imprégnée d'un silence qui glaçait les sangs, un premier mouvement poussa le temps à reprendre son cours. Le barbu avait grimpé sur la table et levait sa hache en direction d'Eurybia, coincée par l'étagère tombée d'un côté, et limitée dans ses déplacements par l'homme à la hache de l'autre. La flèche partit.


Hey toi!:
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Eurybia PyritForgeronne
Eurybia Pyrit



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MessageSujet: Re: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyMer 18 Sep 2019 - 14:45


Eurybia avait une carrure imposante, et une nature belliqueuse. Elle avait l’habitude des combats de taverne et ne laissait pas les hommes en reste. Mais cette situation était bien loin des petites bousculades au poing : ces gaillards avaient des armes et ils n’allaient pas se contenter de lui mettre une bonne raclée. Non, ils allaient la tuer. Une nuance bien plus glaçante que l’idée de prendre un œil au beurre noir. Son corps allait être pendu dans la pièce, serait-elle encore vivante lorsqu’on l’égorgerait ? Agoniserait-elle en toute conscience parmi les corps exsangue ? Celui a la barbe s’approchait dangereusement, un sourire cruel fendait son visage. Sans plus chercher, la forgeronne avait agrippé une étagère espérant la faire s’écraser sur l’agresseur. Ce dernier fut bien plus réactif, d’un bond en arrière, il l’avait échappé belle. La blonde n’avait fait que repousser l’inévitable. Mais quelque chose fit diversion…

Tels des Batman et Robin des temps médiévaux post-apocalyptique, Gaston Deschamps et Mathilde Dumas avaient interrompu la petite fête, sous le regard incrédule de tous les participants. Eurybia était sans doute la plus confuse car si elle espérait que Mathilde lui vienne en aide, elle ne s’attendait pas à voir un des miliciens les plus exécrables l’accompagner. Que faisait-il là ? Néanmoins toute aide était la bienvenue, même si elle venait d’un parfait idiot à l’égo surdimensionné. Il invoquait la loi du Duc, mais après ce qu’elle avait vu, Eurybia doutait de l’efficacité de cette menace. La suite des évènements allait lui donner raison. Le barbu avait bondit sur la table et tenta de lui planter sa hache en pleine tête. La forgeronne releva le manche de son marteau de guerre juste à temps pour dévier le coup. La lame ripa le long du métal mais avant qu’elle n’atteigne ses doigts, elle mit toutes ses forces pour repousser le coup et dévier l’arme. La hache fit une courbe avant de trancher le tissus et la peau de son épaule. Une coupure lancinante que le stresse du combat rendait indolore. Elle répliqua immédiatement en envoyant le bout du manche de sa hache sur la tempe de l’agresseur. La contre attaque le surprit et le coup le fit tomber de son perchoir. La chose la plus sûr à faire était peut-être de prendre l’avantage sur la situation et de mettre un terme définitif à la menace. Elle aurait peut-être dû écraser son marteau dans la face de l’homme, un bonne fois pour toute. Elle était forgeronne, elle n’était pas une meurtrière. Les bagarres lui plaisaient, pas de jouer avec sa vie. Sa main fut plus rapide que celle de l’homme, elle agrippa la hache et la lança au loi. Un peu trop loin. Elle aurait peut-être dû regarder où.

« MERDE ! »

La hache voltigea vers le visage de Gaston, ah ben lui, il avait bien fait de venir, pour sûr. Pyrit, toujours mêlée à des histoires louches décidément. Il allait découvrir le fin mot de cette histoire. Le milicien eut tout juste le temps de décaler sa tête pour éviter l’arme, et lui asséna un regard noir qui ne dura pas trop puisque les deux gudules décidèrent de tirer parti de l’opportunité donnée par la najacienne. Le moustachu fut le premier à saisir l’occasion et tenta d’asséner un coup de machette au milicien. Mathilde les avait prévenus, ils ne l’avaient pas écoutée, elle n’était pas du genre à avertir deux fois. Elle ne le savait que trop bien, à menacer dans le vent, les mots perdaient leur sens et renforcer la confiance des opposants. C’était qu’une femme, une fermière. Que pouvait-elle bien faire ? Moustache le compris une demi-seconde trop tard, lorsqu’il engageait son geste vers Gaston et qu’une flèche se planta pile dans sa clavicule, interrompant tous ses plans. Elle l’avait touché la bougresse.

Rien ne se passait comme prévu, il s’était belle et bien entouré d’incapables. Plus enclin à la fuite, le troisième homme agrippa des flacons tenus à sa ceinture qu’il écrasa au sol. Presque immédiatement une épaisse fumée se propagea, s’épaississant à chaque fiole brisée, on n’y voyait plus rien et n’entendait que les toussotements. Une douleur cinglante se glissa dans les côtes de Gaston. Il tenait toujours son épée fermement mais son autre main chercher à prendre appui sur ce qui lui tombait sous la main. Quelque chose arracha le carquois de Mathilde répandant les flèches au sol. Des bruits de pas précipité qui s’enfuient par la porte. Le maigrichon avait pris la poudre d’escampette. Il restait les deux autres. Quelqu’un trébuchait entre les débris et les meubles, impossible de dire qui c’était. Plus proche de Mathilde et Gaston, désespéré, on agrippa le rebord de la fenêtre pour essayer de s’extraire à l’endroit étouffant, le bruit d’un corps qui tombe de l’autre côté de la cloison, se relève et s’éloigne.La milice lui en avait appris des belles, et cette souffrance là il la connaissait, c’était celle d’une lame. De sa main libre il arracha le poignard de son flan et le jeta à terre avant de compresser sa plaie. L’ouverture derrière eux emportait peu à peu la brume grise.

« Faut sortir de là. » grogna Gaston sans faire l’effort de desserrer la mâchoire. On ne distinguait plus que les silhouettes et les contour des meubles. Longer les murs semblaient une option sûre. Là où le flacon s’était bisé, la fumée était épaisse, mais de l’autre côté de la pièce, Eurybia y voyait plus clair. Le barbu avait failli s’étaler en se relevant cherchait à se diriger vers la fenêtre de la salle de dépeçage. Il n’aurait pas cette occasion.

« Où tu crois aller, bâtard de tueur d’enfant ! »

Elle abattit un coup de marteau entre ses deux omoplates pour le renvoyer à terre et dans d’autres rêves. A côté de sa tête, la poupée. Son marteau de guerre se glissa dans les attaches dorsales, elle coinça le poupon sous une sangle de son équipement. Tout ça pour une poupée et une boîte… Fléchissant les genous, elle agrippait son l’agresseur désormais victime par les aisselles et entreprit de le traîner jusqu’à la sortie. Où étaient Gaston et Mathilde ? Avaient-ils la boîte ?



La joueuse a écrit:
J'ai pas trop osé faire agir Mathilde, si tu veux que je rajoute un passage pour ses réactions, ses paroles ou quoi, hésite pas ♥

Jets de dés:
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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury]   [Mission] Un élixir de vigueur, un milicien zélé & une trique mortelle [Mathy & Eury] EmptyVen 27 Sep 2019 - 4:50
La boîte.

Lâchée par un Gaston trop empressé de se mettre en garde, elle avait rebondit sur les marches pour finir sa course en bas. Elle gisait, ouverte sur le sol. Les cendres s'étaient répandues en une petite traînée poussiéreuse qui serait bien vite soulevée par les déplacements d'air. L'anneau avait roulé jusqu'au mur contre lequel il avait buté. Le bruit avait été assez clair, alors que le silence s'était installé durant de longues secondes. Le métal avait tinté contre la pierre, juste avant que les festivités ne reprennent.

La flèche partit.

Moustache avait tenté un mouvement vers Gaston, vers celui qui ferait office de bouclier humain derrière lequel la fermière se protégerait. Elle ne pouvait pas se permettre de le perdre. Il était l'obstacle qui lui offrait de précieuses secondes pour s'échapper au besoin. Bien sûr, elle ne le ferait qu'en dernier recours, parce qu'aider Eurybia était la priorité. Sortir vivantes de cette maison serait leur objectif. Et elles y arriveraient. Barbe avait-il touché la forgeronne? Mathilde ne le savait pas, trop concentrée qu'elle était sur Moustache et Gaston, lesquels s'apprêtaient à entamer une danse macabre. Mathilde encocha une autre flèche, espérant que le milicien était aussi entraîné qu'il le prétendait. Moustache était touché, mais toujours vivant.

Elle ne vit pas non plus le troisième gredin s'emparer de fioles accrochées à sa ceinture pour les projeter vers le sol. Tout allait trop vite pour la fermière, qui ne cherchait qu'à assurer sa survie. Instinctivement, c'est vers Moustache qu'elle tournait son attention, le plus proche, le plus menaçant pour elle. Une fumée s'éleva du sol. Le feu? L'espace d'un instant, elle ne comprit pas, jusqu'à ce que le bruit du verre qui se brise sur le sol attire son attention. Le milicien étouffa un grognement alors que Mathilde se sentait délestée de son carquois, dont les flèches se répandaient sur le sol. Merde! De toute façon, impossible de viser quoi que ce soit dans ce brouillard qui prenait à la gorge. Une quinte de toux la surprit. Il fallait qu'elle sorte!

Entendit-elle Moustache ouvrir la voie par la fenêtre? Non. Elle cherchait à saisir Gaston pour ne pas le perdre. Son bouclier. Elle tenait maintenant son arc comme un bâton, l'utilisant pour tâter l'air autour d'elle et peut-être saisir une menace... jusqu'à ce que l'épais brouillard semble prendre une direction. La sortie. Nouveau grognement de Gaston. Des mots, cette fois. La toux de Mathilde trahissait sa présence. Elle saisit ce qui s'annonça comme le biceps du milicien pour le pousser légèrement devant elle. Elle le suivrait, mais...

La boite. L'anneau.

Elle se baissa. Au niveau du sol, la fumée était bien moins dense. Elle respirait. Elle pouvait même discerner les lignes des murs. A tâtons, Mathilde sonda le plancher pour finalement émettre un petit murmure triomphant. La boite! Ouverte et vide. A genoux, elle continua de chercher, alors que Gaston s'éloignait d'elle. Allez, allez! Cochonnerie d'anneau où es-tu? Le tintement. Il avait rebondi contre le mur avant de finir sa course en décrivant des ronds sur le sol. Elle avança. Si Moustache était encore là, nul doute qu'elle serait à sa merci... et pourtant, il fallait trouver l'anneau. Son index frôla le métal froid. Oui! Elle le saisit, et le passa à son doigt, ramassa la boite et se redressa presque complètement. L'ombre de Gaston se découpait devant elle.

- Baissez-vous, la fumée est moins épaisse en bas.

Arc dans une main, boite dans l'autre, elle avançait en suivant le milicien blessé qui longeait le mur, lorsqu'elle entendit la voix d'Eurybia jaillir du fond de la pièce. Bien vivante. Quelle femme, bon sang! Mathilde poussa un soupir de soulagement. Un bruit sourd se fit entendre, suivit du hoquet d'un homme qui ne répondra plus pendant un moment...

- Eurybia? On sort par devant!

On sort... Quelle connerie! Quelles étaient les chances que les lascars se soient retrouvés dehors pour les cueillir dès leur sortie? Environ 1000 contre 1. La fermière murmura Pas par la porte messire, sortons par la fenêtre! Le milicien l'écouterait-elle? Un Boucle-la! lui répondit. Gaston avait bien l'intention de sortir et de mettre la main sur l'homme qui l'avait poignardé. Sans connaître l'étendue de la blessure qu'il comprimait, sans même ressentir toute la douleur qu'elle était sensée lui infliger à cause de l'adrénaline, le milicien était bien décidé à en découdre. Ensuite, il s'occuperait de cette fermière qui l'avait clairement menacé de son arc, puis de la blonde qu'il retrouvait, une fois encore, dans de beaux draps.

La fumée se fit particulièrement épaisse, jusqu'à ce qu'il passe le cadre de la porte... seul. Mathilde ne l'avait pas suivi, mais ça, il ne l'avait pas encore réalisé. La fermière avait fait demi-tour en comprenant qu'il ne l'écouterait pas et qu'ils courraient sans doute à leur perte. Bien lui en prit. Alors que Gaston ferait office de diversion involontaire, Mathilde sortirait par la fenêtre pour contourner le bâtiment et arriver, elle l'espérait, par derrière, pour... tuer l'agresseur? Et si ils étaient deux? Elle hurlerait pour rameuter le quartier!

Gaston sortit, la vue brouillée par la fumée, la gorge piquant tellement qu'il ne contrôlait pas sa toux. Ses poumons s'emplir d'un air certes odorant mais bien moins chargé que dans la maison, dont les ouvertures laissaient s'échapper la fumée des fioles. Il eut le temps de prendre une inspiration avant de sentir une douleur lui fracasser la nuque. La seconde d'après, il embrassait le sol, alors que Moustache guettait la sortie de la fermière, une grosse pierre d'un calcaire bien lourd à la main.

Mathilde sortit. Oh oui, elle sortit... mais par la fenêtre, la même qui avait vu Moustache s'échapper du piège, ce dont elle ne se doutait pas. Elle avait fourré la boîte dans sa besace, puis s'était faufilée avec une aisance déconcertante par l'ouverture. Les Trois bénissent le pantalon! Les femmes devraient toutes en porter, c'était tellement plus pratique que les couches de jupons qui ne protégeaient pas des courants d'air, et sous lesquels il fallait porter des bas qui glissaient tout le temps le long des jambes qu'ils étaient sensés couvrir. Elle aussi avait la vue brouillée, les yeux et la gorge piquaient mais elle contenait, de son mieux, la toux qui lui déchirait l'intérieur et lui vidait les poumons. Contrairement à Gaston, elle eut le temps de retrouver ses esprits, son souffle et sa vue, avant de longer le mur extérieur de la maison, sur la pointe des pieds. Elle n'avait pas entendu le milicien s'effondrer, mais un coup d'oeil depuis le coin de la maison lui permit d'appréhender la situation : son bouclier était à terre et l'assaillant était armé.

En temps normal, Mathilde aurait pris ses jambes à son cou. Elle n'était pas une combattante, elle n'avait jamais cherché la bagarre, elle évitait les brouilles comme on évite les pestiférés. Mais il y avait Eurybia, la grande tatouée, qui comptait sans doute sur elle. Elle ne pouvait pas la laisser tomber, pas après lui avoir dit qu'ils sortaient par en avant, exactement là où le moustachue s'était posté pour les cueillir. Elle jeta un oeil sur les environs. L'autre n'était pas là. Était-il parti? Peut-être. S'il était le chef des trois gus, il y avait fort à parier qu'il se soit mis en sécurité en attendant que ses brutes fassent le travail. Le lâche! Il guettait la porte. Il ne fallait pas qu'elle traîne, sinon il aurait un doute et ferait peut-être le tour de la maison. Elle ne pouvait pas se permettre de se retrouver face à lui : elle n'aurait aucune chance.

Allez Mathie, un peu de courage! Quelques pas à peine, sur la pointe des pieds. Une fois dans son dos, elle leva son arc pour se donner un bon élan, et frappa de toutes ses forces dans la nuque du gredin qui perdit l'équilibre et tomba par terre en trébuchant sur le corps jusqu'alors inerte de Gaston. Celui-ci gémit. Le choc l'avait légèrement ramené à la réalité, mais il restait encore à terre, à demi-inconscient sous le poids d'un Moustache qui peinait à comprendre ce qui venait de se passer, alors que sa pierre roulait un peu plus loin sur le sol.

- Pas bouger! dit-elle d'une voix fort assurée, alors qu'elle plantait le bout de son arc dans la nuque de Moustache.

Un peu plus à gauche... oh oui, là ma belle, juste là... murmura Gaston dans ce qui semblait être un doux rêve. La moustache de Moustache frémit de dégoût.


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