[Quête] À Eaux-Risques !

Divergences, divergences. Il semblerait que le noble et l’artisane aient une vision bien différente de l’approche à adopter pour approcher le navire du malheureux Antoine. Le premier désirait avancer en toute discrétion pour du repérage et guetter l’occasion idéale pour grimper à bord tandis que la seconde visionnait une approche plus diplomatique. Meser et Flore quant à eux restaient en retrait, spectateurs malgré eux. Le port, lui, restait enfermé dans son silence d’outre-tombe à peine dérangé par le son caractéristique de l’eau et des animaux nocturnes tapis dans l’ombre.

Spoiler:

Si à première vue le pirate avait l’air menaçant avec son coutelas brillant à la lumière de sa lanterne et son visage encapuchonné, le duo composé de Roland et Magda allaient vite être éberlués par l’incompétence de ce pauvre bonhomme.

Le trapu gaillard, dans sa vigilance, surveillait plus le pont du navire que les ruelles avoisinantes, le mordillement de ses dents usées sur ses lèvres épaisses démontrant une certaine nervosité. Or cela le rendait absolument aveugle à l’approche discrète des deux sauveurs qui eurent tout loisir de s’approcher jusqu’au navire, découvrant par ailleurs une petite barque amarrée à son flanc gauche et appartenant sans doute au trio de malfaiteurs. Se grattant la nuque avec insistance, il marmonnait quelques mots sous cape et les deux héros purent entendre ces quelques bribes d’informations :

« … écailles d’Anür, fait aussi froid qu’les miches du Duc. J’donnerais une main pour une bonne choppe épicée, là … mais non, fallait qu’on suive Olson. Faut toujours qu’on suive Olson, ‘vec ses idées à deux écus. Mais j’lui ai dit qu’l’patron cracherait que dalle, plus coriace qu’une huitre, ce démon …. J’l’sens pas, j’l’sens pas. »

Frottant énergiquement ses mains entre elles en rengainant son coutelas, il souffla bruyamment sur ses doigts engourdis pour générer un semblant de chaleur avant de cracher avec un ronflement sonore et fouiller brièvement un tas de cordages.

« Rien du tout ici non plus. Soit il cache bien son jeu soit on est dans le fumier jusqu’au nez. Gibier de potence, voilà ce qu’on est, foutu Olson … me demande s’il lui a sorti les vers du nez, à c’cachalot de malheur.»

Le pirate poursuivit ensuite une série de blasphèmes vulgaires qu’il serait préférable de vous épargner tant ils étaient indignes d’un honnête croyant de la Trinité. Jetant un dernier regard aux alentours, le garde finit par hausser des épaules avant d’emprunter une petite échelle qui menant aux entrailles du bateau, abandonnant l’espace d’un instant sa garde par frustration. Un comportement qui vaudrait à un milicien de la caserne d’une sanction exemplaire, mais jamais il n’a été dit que les pirates étaient très à cheval sur les règles ou les codes.

Une chose est sûre : le quarto de sauveurs avaient le champ libre de monter à bord sans craindre de donner l’alerte maintenant que la sentinelle s’était éclipsée pour d’obscures raisons. La Trinité semblait leur sourire ou était-ce juste un caprice du destin ? Dans tous les cas, ils pouvaient tout aussi bien emprunter l’échelle qu’à descendu l’homme à capuche. Mais une autre chose pouvait attirer l’attention de cette joyeuse bande : la cabine du capitaine était à quelques pas, la porte fendue. On pouvait deviner dans l’ombre quelques kyrielles de meubles brisés, mais rien de très visible à cette distance. Risqueraient-ils de s’aventurer dans cette pièce mise en piètre état ou ne perdraient-ils pas un instant pour sauver la peau du marchand en détresse ?

Spoiler:

Roland avait été convaincu, la plus âgée des deux femmes prônait une approche plus douce, elle vantait les mérites de la négociation et semblait en connaître davantage sur les pirates que ce qu’elle laissait paraître au premier abord. Son âge reflétait bien certainement son expérience, alors très bien, ils feront ainsi. Ils se rapprochaient lentement, dissimulant leur arrivée, laissant les deux autres à l’arrière pour le moment. Cela faisait partie d’une infime stratégie évidemment, si jamais les deux premiers se faisaient prendre, les deux autres pourraient venir en renfort, ou bien donner l’alerte, faire venir la milice à la rescousse ou qu’importe, ils pourraient agir d’une façon ou d’une autre, même si la dernière solution pour eux seraient de prendre leurs jambes à leur cou…

Les Dieux devaient sûrement être avec le petit groupe ce soir là, vu que l’homme qui servait de sentinelle ne semblait pas bien futé, leur discrétion porta ses fruits, mais fortement accompagnée par l’incapacité dudit pirate à accomplir correctement son devoir. Il n’avait rien remarqué, rien entendu. Le noble était loin d’être doué en filature et furtivité, ce n’était pas du tout son domaine. Il excellait plutôt dans le corps à corps direct, pas dans cette stratégie de discrétion et diversion. Mais il n’était pas seul et de plus, pas avec des frères d’armes pour mener le combat à ses côtés. Il avait donc écouté les conseils et avertissement, il s’était aussi raisonné. Toute situation ne se règle pas à coup d’épée… Mais avec une telle vermine… Difficile de vouloir procéder autrement.
Le pirate poursuivait ses erreurs en grommelant le nom de leur supposé chef, un dénommé Olson, du moins c’est ce qu’en comprenait le noble. Il fallait le suivre, etc. C’était alors leur commanditaire. Lui devait être le moins habile des trois, visiblement… Relégué aux tâches les plus ingrates. Sans qu’il ne soit capable de bien les effectuer. Roland se tourna vers Magda, portant son index à ses lèvres, même s’il se doutait bien qu’elle avait compris qu’il fallait écouter sans faire de bruit.

Il vociférait toujours... le patron ? Parlait-il alors de ce bougre d’Antoine, il le forçait à révéler quelque chose, sans doute lui faisaient-ils subir maintes tortures ? Le voici qu’il cherchait alors autour de lui… Si tout cela le mettait dans cet état, le Antoine devait cacher quelque chose de bien plus intéressant que des sacs de grains, mais difficile de savoir quoi exactement, cela pourrait être diverses choses, peut être baignait-il dans un trafic particulier, des armes, de l’or, d’autres équipement, des vivres, de l’alcool… Cela pourrait être tellement de choses diverses et variées. L’appât du gain avait toujours été présent, encore plus dans ces temps apocalyptiques où l’on vendrait sa fille ou son fils pour survivre.

Plus que sauver le malheureux, la curiosité piquait alors le sang-bleu, il avait bel et bien envie de savoir ce qui les attirait temps, ces miséreux. Qu’est ce que le patron cachait, il était toujours excitant de démêler une affaire sombre comme celle-ci… Il fallait vraiment qu’il en sache davantage. La chance ou la volonté les aidait une nouvelle fois dans ce sens. Il serait fâcheux de contrarier les Trois en ne suivant pas cette nouvelle voie qui s’offrait à eux. La sentinelle prit une petite échelle et disparut. Roland se releva légèrement, faisant signe de la main aux deux autres, restés à l’écart. Ils étaient quatre dans cette aventure, tous avaient été partants de leur plein gré pour avancer, alors autant y aller ensemble maintenant que la voie était libre.
Ils pourraient alors monter sur le pont du navire.

- « Je propose de fouiller avant tout les environs, à la recherche de quelques indices. » murmura le blond aux yeux clairs, lorsque le groupe fut potentiellement réuni. « Ne vous aventurez pas seul en bas. » Ajouta-t-il, toujours autoritaire et précautionneux de la sécurité de la petite troupe.
Même si bien évidemment, chacun était libre de faire ce qu'il jugeait bon.

Il se mit alors dans cette optique, fouilla et remua sans faire de bruit ce qui se trouvait à sa portée sur le pont, puis il aperçut la cabine du capitaine, la porte et tout ce qui était dans son champ de vision semblaient avoir été arrachés. Il s’approcha silencieusement, cherchant à entrer dans la cabine, sans rejoindre tout de suite le chemin et l’échelle empruntés par la sentinelle.

Spoiler:

On ne peut pas dire que ce monsieur au fort accent brille par sa conversation. J’ai même la franche impression de l’ennuyer. Qu’à cela ne tienne, je ne tiens pas plus que ça à parler de toute façon, je sais voir quand ce que je dis n’a aucun intérêt. Roland et Magdalena sont donc partis les premiers, nous laissant à l’arrière, ce qui ne m’empêche pas de les suivre du regard autant qu’il est possible de le faire dans cette nuit noire. Je remarque également que le pirate laissé seul sur le pont du navire a disparu. Je me frotte le menton face à un choix : soit je les suis, soit je reste là plantée comme un radis, soit je fais volte-face et je m’enfuis.

Il est bien entendu hors de question de m’enfuir. Pas que je n’en ai pas envie, loin de là, mais les lieux sont plongés dans les ténèbres et je ne tiens pas à parcourir les rues du port toute seule. Jeune mais pas suicidaire, du moins pas encore. Je ne peux pas rester plantée là non plus, à la merci de tout avec pour seul compagnon un muet bizarre. Il ne me reste plus qu’une seule option, rejoindre les deux compagnons qui sont là devant et …ha ! Voilà Roland qui fait un signe !

- Bon. Ben faites comme vous voulez, moi j’y vais, dis-je dans un souffle.

Je me faufile aussi silencieusement jusqu’à eux, les rejoignant après avoir pris toutes les précautions d’usage. De manière générale, je préfère rester près de cet homme aux cheveux blonds, par besoin de sécurité sans doute.

- Je reste avec vous.

Suivant sa recommandation, je fouille moi aussi le pont, m’éloignant quelque peu afin d’élargir le champ de recherche avant de murmurer :

- Je ne sais pas quoi chercher, tout m’est étranger, et je ne vois presque rien…

En effet. Un bateau, c’est un peu l’exact opposé de ce dans quoi je vis quotidiennement, sans parler du fait que c’est la première fois que je monte là-dessus. Mon pas n’est pas très sûr, même si le navire est à quai et je sens très bien les mouvements de la coque sur les légères vagues qui viennent s’écraser contre le quai. C’est un peu déstabilisant et je dois me tenir à ce que je trouve tout en fouillant pour ne pas flancher et donner l’alerte. Les mains enfin posées sur le bastingage, je m’y accroche aussi fort que je peux, mes brûlures d’estomac menaçant de se changer sous peu en nausées. J’inspire et expire aussi silencieusement que possible.

- Par les Trois, comment on peut vivre là-dessus, c’est horrible…, murmurai-je.

Non, vraiment, j’aurais mieux fait de rester à la taverne.

Spoiler:

Meser observe les uns et les autres, comme à son habitude, guettant du coin de l’œil les rues menant aux quais sur lequel le groupe mène son aventure. L’assassin repère le signe de l’homme posté sur le bateau et observe du coin de l’œil sa voisine lui fausser compagnie pour rejoindre le duo présent sur l’embarcation nautique. Un dernier coup d’œil par-dessus son épaule et voilà le porteur de mort qui s’avance prudemment en direction du rafiot, avant d’y grimper, un signe de tête à l’homme en armes lui signifiant qu’il a bien entendu sa demande et sa remarque.

Il n’est pas dans les projets de l’assassin de descendre à la cale pour affronter trois pirates certainement armés, avec pour seul défense une dague logée dans sa botte. Or de question de courir un tel risque pour une récompense tout aussi invisible pour le moment, cependant le pillage n’est pas son fort et tandis que les autres se mettent à la fouille, Meser se poste non loin de l’échelle menant aux entrailles du bateau. S’armant de sa dague, celui-ci reste accroupie proche de celle-ci, lame en garde voilée glissée contre sa manche alors que l’assassin est accroupi, faisant face au dernier barreau de l’échelle, de sorte à être dans le dos d’un possible visiteur inopiné.

Le remous des vagues faisant doucement tanguer le bateau provoque un léger sentiment de nostalgie auprès du charpentier qu’il chasse bien vite, reportant son attention sur ses collègues du soir occupés à leur fouille, gardant toujours un œil sur cette écoutille menant certainement aux trois pirates et à l’objet de leur convoitise. C’est du moins ce que suppose le porteur de mort à ce moment, celui-ci n’étant pas tranquille, il surveille les quais à la recherche de la lueur de torches, annonçant la venue de la milice et donc potentiellement de la Mort.

Triste ironie pour un homme tel que lui de craindre le voyage pour rejoindre les Trois. Mais bien que Meser soit habile pour dispenser celui-ci à qui les Dieux le décident, il ne se sent pas prêt à arpenter ce passage lui-même.

MJ:

De la pièce du capitaine, il n’en restait plus que l’ombre de sa supposée gloire d’antan. Ce qui avait sans doute constitué l’ameublement décent de la cabine a été réduit en une kyrielle d’objets brisés, renversés, d’éclats de bois et de terre cuite. À croire qu’une tempête avait vu le jour ici, bien que l’hypothèse la plus probable soit celle d’une féroce échauffourée ou d’une fouille bien trop zélée des lieux. Rien pour faciliter la tâche aux aventuriers, leurs sens aux aguets.

Outre les outils éparpillés par-ci par-là, on pouvait voir quelques cartes en parchemin, chiffonnés et piétinés à en juger par la trace de bottes boueuses sur les dessins et écrits. C’était d’ailleurs la seule chose supposément intéressante dans cet amalgame digne d’une soirée arrosée de taverne locale.

Spoiler:

Les deux hommes, contrairement à leurs homologues féminins, semblaient bénéficier des bonnes grâces des Trois. Ainsi l’assassin eut le regard assez affuté pour apercevoir, à travers la faible lueur qui filtrait à l’intérieur du navire, une planche cloutée grotesquement camouflée sous l’échelle. Un piège de fortune sans doute laissé par la sentinelle comme ultime précaution, juste au cas où des curieux viendraient à profiter de son incompétence pour se faufiler en douce derrière son dos. Ou peut-être qu’il était de ce genre de marins superstitieux qui pensaient être constamment traqués par quelques esprits de noyés désireux de les entraîner dans les bas-fonds ? Une chose est certaine en tout cas, Meser avait sans doute épargné à ses pieds ou à ceux de ses camarades de fortune une bien douloureuse marche.

Le noble à la chevelure platine quant à lui fit une intéressante découverte. Un parchemin d’une taille si petite qu’il aurait été aisé de ne pas l’apercevoir. Le seigneur pouvait à peine déchiffrer l’écriture en patte de mouche griffonné dessus avec une main hâtive ou tremblante. Ce qu’il y vit, par contre, lui échappait probablement car il s’agissait d’une liste hétéroclite de plantes et autres produits de toute sorte. Une recette ? Les composants étaient plutôt inédits, rappelant les pratiques des alchimistes très critiqués et marginalisés par le Clergé qui les voyaient comme d’infidèles ensorceleurs. On avait bien vu des alchimistes brûler sur le bûcher pour avoir pratiqué leur étrange science hérétique. Par contre, trouver ces ingrédients sur le navire d’Antoine semblait être tout à fait improbable, comme toute cette histoire d’ailleurs.

Le temps presse. Les sauveurs peuvent discuter sur leurs trouvailles et débattre de la façon à procéder, mais dans l’estomac du bateau, un marchand était entre les griffes d’odieux gredins et la Trinité seule savait dans quel état ce triste sir était. De plus, si la Milice intervenait, les choses peuvent vite tourner aux armes et au sang, comme c’est coutume chez les hommes d’armes peu enclins à la diplomatie.

Spoiler:

Roland fut rapidement rejoint par le reste du petit groupe, qui s’affaira comme ils le pouvaient à chercher aussi aux alentours. Flore lui fit part de son attention de rester près de lui et aussi, comme il le comprenait, de se ranger à son avis. Elle sentait peut être qu’il serait possiblement en mesure de la protéger si les choses devaient mal tourner. C’était vrai, il chercherait à garder en vie chacune des personnes ici, en particulier elle peut être, qu’il jugeait plus fragile, plus délicate que les deux autres de ses compagnons d’infortune. Mais, pour l’heure, ils n’en étaient pas là. Ils devaient fouiller, tout retourner. Pour chercher quoi ? Il n’en savait fichtrement rien. Ils ne savaient même pas ce qu’ils étaient supposés trouver ici, sur le pont du navire. Les recherches de son côté ne donnèrent rien.
Mais lorsqu’il entra finalement dans la cabine délabrée du capitaine, parmi les divers débris et ce qu’il restait de vieux meubles arrachés, il découvrit plusieurs choses.

Ce qui retint tout particulièrement son attention, fut ce minuscule bout de parchemin. Il eut de la difficulté à déchiffrer les inscriptions, elles étaient petites, mal écrites, l’endroit était très mal éclairé… Et pourtant, il réussit à lire plusieurs noms d’ingrédients et plantes diverses qui formaient une liste pour le moins étrange. Il se rappelait bien à cet instant, lorsqu’il avait essayé d’examiner la potentielle utilité de chacun, que Flore était herboriste. Ou tout du moins, elle connaissait les plantes et leurs possibles effets. Il se dirigea alors vers elle instinctivement et lui tendit le bout de papier.

- « Pourriez-vous me dire ce à quoi cela vous fait penser cette liste de plantes et ingrédients ? Gardez le je vous prie, soigneusement et examinez le. Peut être nous en aurons besoin plus tard » Murmura-t-il, presque à l’oreille de la soigneuse.

C’était peut être celle en qui il pourrait avoir le plus confiance ici, il préférait alors le lui confier. Sans doute les curieux assemblages lui diraient davantage quelque chose qu’à lui. Une chose est sure, c’était pour le moins étrange et surprenant. Les choses, au lieu de s’éclaircir, le plongeait un peu plus dans le brouillard et l’incompréhension.

Il revint vers les autres, voir s’ils faisaient eux aussi l’étalage de leurs potentielles découvertes.
Mais l’heure tournait, il fallait prendre une décision. La sentinelle ne semblait pas revenir, ils étaient plusieurs là dessous, à faire on ne savait quoi… était-il courageux ou parfaitement stupide de sauver la peau de ce parfait inconnu, sous couvert d’histoires à dormir debout. À ce stade, il serait presque tenté de faire demi-tour et dire aux autres d’en faire de même. Mais le fait est qu’il était un seigneur, qu’il représentait peut être l’espoir, que les atrocités de ce monde pouvaient être combattus ou réduites à néant. Cette femme, Flore, semblait lui faire confiance et y croire dans une certaine mesure. Il ne pouvait pas faire le lâche, tourner les talons et ignorer ce qu’il se passait ici… Il aurait peut être préféré faire intervenir la milice et sauter là dedans de manière violente et sûrement sanguinaire. Mais il avait écouté les paroles de Magda, elle souhaitait commencer par la diplomatie et tenter de résoudre le problème différemment. Soit, il s’en tenait à ce plan.

- « Je passe en premier en bas. Vous » Dit-il en désignant l’autre homme de ma compagnie, qui n’avait pas décliné son identité. « Essayez de me couvrir si possible, on ne sait pas vraiment comment on va être accueillis. Flore restez en retrait et courez prévenir la milice si les choses tournaient rapidement mal. » Il ne savait pas très bien comment fonctionner différemment. Il fallait bien rentrer dans cette stupide cabine, il fallait démêler cette histoire.

Roland descendit alors l’échelle empruntée précédemment par l’homme en charge de la surveillance, il posa sa main sur la poignée, l’autre sur son épée. Il était prêt à entrer à l’intérieur et découvrir si les hommes seraient tout de suite face à lui, ou s’il pouvait les entendre parler et possiblement se dissimuler à l’intérieur sans être repéré d’emblée.

Spoiler:

Ha ben pour l’aventure et l’exaltation de l’inconnu, y a pas à dire, je vis un moment tel que je n’en ai jamais connu : un abominable sentiment nauséeux à chaque fois que je sentais le bateau tanguer, ne serait-ce que légèrement. Je sentais tout autant cet affreux ragout de la taverne heurter les parois de mon estomac, au risque de refluer à tout moment. J’inspire de grandes goulées d’air frais pour essayer de maintenir mon repas là où il se trouve. Après tout, le moindre bruit peut nous être fatal Quelle idée, vraiment…Je suis certaine que Jehan se taperait sur la cuisse de rire à me voir ainsi. Quand je pense que je suis là pour tenir une promesse que je lui ai faite, alors qu’il n’a même pas été fichu de tenir les siennes…Mes principes finiront par me perdre.

Cela n’arrange bien évidemment pas nos affaires. Je reste légèrement en retrait, non sans quitter de l’œil cet homme très blond, le chef de notre groupe. Il a tout d’un chef, c’est certain, même dans sa façon discrète de venir me parler en douceur, tout en me tendant quelque chose que je ne vis pas de suite. Une liste ? Mhhh ?

- Faites voir ?, dis-je sur le même ton plein de secrets.

Lorsqu’il me donna le bout de parchemin, je ne pus m’empêcher de retenir une grimace gênée. Je me retrouve exactement dans la même situation qu’avec le baron de Sombrebois lors de notre rencontre. Ce dernier recherchait de l’aquillée mille feuilles. Je n’aurais jamais pu l’aider s’il ne m’avait montré une représentation de ce qu’il cherchait et que je connaissais sous un nom différent. Ici, point de représentation. Il n’y a que des mots, du moins me semblent-ils. Une chance qu’il fasse sombre, cela a au moins l’avantage de cacher mon violent embarras. J’ai honte de ne pas savoir lire et devoir le dire une fois de plus met à mal ma fierté, même si je n’ai pas le choix.

- Roland…Je suis désolée, vous allez devoir me dire ce qu’il y a là-dessus. Je ne…Enfin…Je ne sais pas lire.

Je sens mes joues s’empourprer. Quel malheur d’être si ignorante ! Je me sens affreusement inutile. Déjà que je ne sais pas me battre alors si je ne peux même pas apporter une petite lumière sur un bout de parchemin…

- Je suis désolée. Je pratique mon art à la façon de ma mère et de sa mère avant elle. Personne ne m’a enseigné les lettres. Hem…voilà voilà.

Quoiqu’il en soit, il me donne cette petite liste que je range soigneusement dans une poche de ma jupe. Il a décidé de descendre et me demande de courir prévenir la milice en cas de danger. Il prend les devants et assume son rôle de meneur. Quelque part, je l’envie presque d’être si courageux. Je ne peux m’empêcher de murmurer un tout petit :

- Soyez prudent !

D’où je suis, en retrait des autres, je peux voir Roland disparaître vers la cale et ai une vue sur tout le pont. Au moindre cri, à la moindre alarme, je m’échapperai pour alerter la milice. Peut-être est-ce, d’ailleurs, ce que nous aurions du faire depuis le début.

L’assassin maintient sa position calmement en laissant les autres à leurs recherches, observant avec un air soucieux les alentours et les profondeurs du bateau. Travailler sur les bateaux de longues années permet une certaine expertise et cette planche cloutée qui dépasse de l’échelle ne semble pas naturel au charpentier. Levant les yeux au ciel, l’homme aux yeux bleus remercie intérieurement Rikni du manque d’ingéniosité des pirates sur ce coup-là. Du coin de l’œil, le porteur de mort observe le blondinet se pencher à l’oreille de la jeune femme et Meser lève à nouveau les yeux au ciel, soupirant faiblement.

Mais oui bien sûr, fait le joli cœur beau blond, il est vrai qu’il n’est pas de meilleurs endroits pour séduire les jeunes candides et ingénues que sur un bateau pris d’assaut par une bande de pirates assoiffés d’on ne sait quoi. A moins que ce charmant jeune homme ayant pris la tête des opérations n’ait fait une découverte incongrue dont le contenu puisse intéresser la possiblement herboriste ? N’a-t-elle pas dit un peu plus tôt qu’elle connaît pareille science.

Meser fut interrompu dans pensées par ce fameux homme en armes, lui stipulant qu’il souhaite se rendre en bas et qui plus est, qu’il compte sur l’assassin pour le couvrir. «Brav’ homme. C’vous qu’êtes d’jà bien couvert, ‘vec vot’ cape. » Argue donc le porteur de mort en souriant largement, haussant les épaules et écartant les mains dans un signe désolé. « ‘Tention à la planche t’y clou qui d’passe d’sous l’échelle. L’écorché c’porte malheur. » Le charpentier lui offre alors un sourire béat légèrement benêt, avant de venir saisir son avant-bras tandis que le nobliau s’apprête à s’enfoncer dans les entrailles du bâtiment flottant.

Se penchant alors en direction de son oreille l’assassin baisse le ton pour ne lui offrir qu’un murmure.« Pirates ou voleurs. Pensez pas qu’ils vont nous accueillir pour la parlote et qu'ça s’ra un duel à l’honneur. Surveillez les bougies et autres produits inflammables. Dans un combat de cale, l’feu on s’en pass’rait. » Haussant alors les épaules, le charpentier se craque les articulations rapidement pour ensuite sortir la dague de sa botte glissant celle-ci à sa ceinture avant d’emprunter l’échelle à la suite du blondinet.

Meser quand à lui reste bien en arrière de Roland, observant les divers objets présent dans la pièce en deçà de lui durant sa descente de l’échelle, prenant garde à ne pas marcher sur le clou, cherchant une quelconque porte et surveillant la présence d’ouvertures sur les parois du bateau pouvant laisser passer un homme le cas échéant.
Toujours préparer une porte de sortie.

Bonjour m'sieur le MJ: