Aeryn MonclarMercenaire
| Sujet: [Domaine de Pessan] Un temps pour deux {Finn & Aeryn} Jeu 21 Nov 2019 - 14:40 | | | Domaine de Pessan Juillet 1166 Cela faisait à présent un mois que la Compagnie des Lames avait quitté la grande cité pour s’installer au Labret. Plus particulièrement en la demeure de la Comtesse de Pessan gérée par le Comte de Beauharnais. Comte qui était également devenu le second employeur de la mercenaire, engagée pour veiller à la sécurité de sa jeune fille, Alix. Un mois, donc, qu’Aeryn partageait son temps entre la protection de la vicomtesse miniature et les activités habituelles de la Compagnie. Un mois qu’elle logeait dans une chambre reculée, au bout du couloir où vivaient l’ensemble des mercenaires, coincée entre les celle que partageaient ses frères, de plus en plus protecteurs… Dire qu’il y avait encore peu de temps, ceux-ci insistaient grandement pour qu’elle vive sous le même toit qu’eux au sein du quartier général des Lames. A présent ces derniers en venaient presque à le regretter, même s’ils la connaissaient suffisamment pour savoir qu’ils n’avaient rien à craindre au sujet de la vertu de leur jeune sœur…
Il était pourtant évident qu’aucun d’eux n’avaient encore remarqué le petit manège qui s’opérait juste sous leurs nez. Aeryn disparaissant, parfois, durant de longues minutes sans que personne ne sache où elle s’était rendue, supposant, probablement que le comte de Beauharnais l’avait fait mander. Ils ne voyaient pas non plus que si le second du Capitaine manquait également à l’appel ce n’était que pour rejoindre la jeune femme dans le petit bois longeant la propriété. Oh, bien sûr, ils ne faisaient-là strictement rien de répréhensible, rien que les Trois désapprouveraient. Finn respectait bien trop la rouquine pour cela, il semblait même encore hésitant par moment, comme s’il craignait de la froisser maladroitement. Ainsi, il ne s’agissait là que de quelques baisers échangés, un petit laps de temps partagé avant que le quotidien ne les rappelle à l’ordre.
Vivre au milieu d’une telle communauté les privaient obligatoirement d’une certaine intimité. Ils ne pouvaient guère s’éloigner sans prendre le risque de rencontrer une créature contre laquelle ils ne pourraient lutter. Ils ne pouvaient pas non plus s’absenter bien longtemps sans prendre le risque d’attirer l’attention des autres et voir ainsi leur bien innocente relation exposée aux yeux de tous et plus particulièrement aux Monclar qui ne verrait pas celle-ci d’un très bon œil… Sans parler du comte qui avait exposé ses règles de cohabitation à leur arrivée au domaine, les relations hors mariage, aussi prudes soient-elles, étaient interdites en ces lieux. Elle resterait donc secrète, aussi longtemps que possible et, pour ce faire, les deux avaient adopté certaines techniques qui, pour l’instant, fonctionnaient assez bien.
Concernant leurs entraînements, ceux-ci se déroulaient à présent aux yeux de tous. Ils n’avaient que peu de temps pour s’isoler des autres sans paraître suspects, ainsi avaient-ils décidé de mettre un terme à ce côté exclusif dans leurs échanges de fer. Bien sûr, Aeryn aurait préféré préserver leurs habitudes d’antan, mais force était de reconnaître que leurs entraînements aidaient également les hommes à s’améliorer tout en observant de nouvelles techniques jusque-là restées secrète. Un mal nécessaire, maintenant qu’ils se trouvaient exposés aux dangers de la fange.
Leurs courtes retrouvailles ne se passaient jamais aux mêmes moments, toujours en raison de la crainte d’éveiller les soupçons. Jamais la nuit, non plus, pour des raisons évidentes de sécurité. Il en allait également de même pour les jours de pluies où ils se contentaient de quelques brefs instants de rencontre dans les couloirs de la bâtisse, ne durant guère plus que le temps d’un baiser. En revanche, ils avaient adopté un lieu de rendez-vous, dans le petit bois situé à l’arrière de la bâtisse, où ils se rejoignaient suite à l’échange d’un signe, un code connu d’eux seuls et qu’ils prenaient grand soin de changer régulièrement pour ne pas courir le risque d’être découverts.
Là, enfin, ils pouvaient jouir de la présence de l’autre, savourant chaque minutes passées ensemble avant de devoir se séparer de nouveau. Leurs rencontres se voyaient ainsi souvent bien espacées les unes des autres, allant de plusieurs heures à plusieurs jours selon leurs activités respectives. Ce qui pouvait parfois s’avérer bien frustrant pour la mercenaire qui se refusait encore de le reconnaitre, quand bien même elle affectionnait ces instants de paix partagés avec l’homme qu’elle aimait, chaque jour un peu plus, sans pourtant le lui dire.
Malgré tout, rien de tout ça ne l’empêchait de mener à bien ses missions. Quoiqu’elle face, la mercenaire restait concentrée dans sa tâche veillant à ne pas mélanger sa vie privée avec sa vie professionnelle, quand bien même les deux se trouvaient intimement liées parfois. Leur travail n’admettait aucune interférence de ce type, sans quoi cela reviendrait à embrasser la mort plutôt que les lèvres de l’être aimé. Aeryn en était toute aussi consciente que craintive, aussi s’isolait-elle par moment afin de s’offrir un temps de réflexion.
Par habitude, jamais la mercenaire ne pensait au futur. Qu’il soit proche ou lointain, la jeune femme éveiller de songer à ce dont demain pourrait-être fait. La mort ne se trouvait jamais bien loin des acteurs ayant embrassé la voix des lames. Son père l’avait d’ailleurs élevé dans cet optique bien précis en lui disant :
« Aujourd’hui tu vis, demain tu seras blanche, raide et froide comme un bout de bois flotté en bord de mer. »
Difficile donc pour elle d’imaginer un tout autre avenir que celui-ci, même si, depuis la fange, aucun corps ne reste froid bien longtemps. Le sien, comme les autres, rejoindra rapidement les bras ardent des flammes du bûcher rapidement érigé pour assurer la sécurité des survivants. Pour elle, sa vie se résumait donc au temps passé avant de mourir. Il pouvait être plus au moins long, mais la finalité resterait la même et, jusque-là, cette bien sombre et inévitable perspective ne la dérangeait en rien… Jusque-là. A présent, après avoir affronté la mort de son père, de ses frères. Après avoir passé un peu de temps avec la jeune Alix, si douce et éveillée, si positive, si curieuse… Un tempérament qui lui rappelait également celui de Finn. Aeryn en venait à s’interroger sur le bon sens des paroles de son géniteur sans pour autant, se serait-ce qu’oser, envisager autre chose pour elle.
De cela, Finn et elle n’en parlaient jamais. La mercenaire supposait donc, qu’en toute logique, le jeune homme voyait probablement sa vie comme elle voyait la sienne. Ils menaient la même, après tout. Ainsi, ils profiteraient simplement du temps qu’ils auront à passer ensemble jusqu’à ce que les Trois y mettent un terme d’une manière ou d’une autre. Voilà pourquoi la mercenaire ne se posait pas de question, ne se retenait guère non plus, du moment où ils étaient parfaitement sûrs d’être seuls. Et si Finn s’aventurait parfois à lui prendre la main, jamais il ne dépassait la limite du baiser et de bien chastes étreintes. Ne sachant guère comment les choses se passaient en temps normal, la rouquine n’essayait jamais de le pousser à aller plus loin et le laissait mener la danse à sa manière, même si, quelque part, cela la dérangeait sans réellement en comprendre la raison.
Ce jour-là, ils se retrouveraient seuls pour la première fois en une semaine. Leurs taches respectives les avaient tenus éloignés l’un de l’autre depuis trop longtemps et elle savait que leurs retrouvailles ne dureraient pas plus que quelques minutes avant qu’elle ne doive regagner son poste. Elle l’attendait donc, dans le petit bois, négligemment adossée contre un arbre, l’esprit néanmoins en alerte, guettant le moindre bruit afin de s’offrir une chance de fuir en cas d’attaque fangeuse. Tout était plus risqué à présent, ce qui donnait un gout doux-amer à chacun de leurs petits apartés. A cela aussi, la mercenaire évitait d’y songer, car à chaque fois un étrange sentiment venait étreindre son palpitant alors que ses pensées s’interrogeaient sur le côté raisonnable de la chose.
L’était-ce ? Non, certainement pas… Néanmoins, elle ne pouvait non plus se résoudre à tout arrêter, l’idée même lui était impossible à envisager malgré les nombreux risques.
Finn était en retard, le temps défilait bien trop vite pour lui laisser le loisir de l’attendre indéfiniment. Bientôt, il lui faudrait partir, retrouver ses frères ou la noble gamine et reprendre le court de sa vie de fourmis. Ainsi, pour patienter tout en oubliant le temps qui passe, Aeryn ferma les yeux. Cela lui permit également de mieux se concentrer sur les sons plutôt que sur tout ce que ses yeux pourraient voir, la jeune femme avait fermé les yeux. Si bien qu’elle ne put ignorer les quelques bruissements, derrière elle… Finn… La mercenaire sourit en reconnaissant le son de sa marche, de ses pas, mi-lourds, mi-félins. Prudent, certes, mais pas assez…
« Tu fais trop de bruits, je te l’ai déjà dit, » lui dit-elle sur un ton quelque eu taquin tout en étant sérieux avant de contournait l’arbre qui la dissimulait jusque-là, « Il serait tout de même dommage que tu te fasses dévorer avant même d’avoir eu le temps de me dire bonjour. »
Elle ne plaisanta pas bien longtemps avant d’aller se loger dans les bras du jeune homme qu’elle avait trop longtemps attendu. Ce fut une étreinte toute aussi chaleureuse qu’elle en fut brève tant la prudence restait constante et primordiale.
« Pourquoi as-tu tardé ? » lui demanda-t-elle en s’éloignant. « J’ai cru que tu ne viendrais pas… J’allais partir, on m’attend. »
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